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835. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

L’héroïne d’Aziyadê est une ombre, et dans Pêcheur d’Islande Yan n’a ni la rudesse ni la grossièreté d’un paysan de la mer. […] Comme on les a aimées, ces héroïnes inattendues ! […] Jean Aicard, dans son poème, a élargi le cadre purement féminin de cet immense sujet, en plaçant son héros dans notre siècle, en 1889. […] Marie Duperrier, par exemple, l’héroïne de Fleur d’abîme, est un caractère magistral, implacablement fouillé, digne de Balzac, aussi vivant que l’héroïne de Fumée, de Tourgueneff, un caractère inflexible comme les dessinait Maupassant et comme Ils plaisaient à Flaubert. […] L’héroïne de M. 

836. (1902) La poésie nouvelle

Dans l’histoire comme dans l’exotisme, Hugo n’était pas extrêmement scrupuleux : il inventait des noms de héros pour la rime, créait des villes pour son plaisir et combinait des luttes de peuples pour la seule joie de son imagination. […] Mais l’hiatus est autorisé s’il se produit dans le corps d’un mot (créature, Phraorte, etc.), ou bien si la seconde voyelle est précédée d’un h aspiré (le héros, la halte, etc…) Pourquoi ? […] Enfin, il fut attentif à conserver intact le sens qu’il avait du mystère, et comme Hamlet, son héros de prédilection, il tint à garder, vis-à-vis des êtres et de l’Univers l’attitude de l’étonnement… « Ah ! […] En outre, il secoua si rudement l’ancienne poésie, il déconsidéra tant de poncifs et, par ses innovations heureuses, communiqua à d’autres un tel désir de sincérité fraîche et hardie, qu’il faut le considérer comme l’un des héros de la poésie nouvelle. […] Et son époux, sans doute, fils d’Oïclée, fut un héros,‌ Mais sa barbe était, à son menton, ‌ Chenue et dure.

837. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « La poésie »

Il reproche à l’aimable et romanesque chantre d’avoir, en consacrant uniquement les noms de ses héros chevaliers, négligé et tout à fait omis la foule héroïque, le peuple, ces chrétiens obscurs, ces martyrs sans nom : « Le manant, dit-il, le petit bourgeois, le vilain aussi bien que le baron et le roi, tous vont délivrer le Saint-Sépulcre, tous vont chercher la rémission de leurs péchés ; tous sont égaux devant la miséricorde de Dieu qui recueille leurs confessions et prépare leurs sièges en paradis.

838. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VI. De la littérature latine sous le règne d’Auguste » pp. 164-175

On ne désire point, il est vrai, ce genre de supériorité dans l’histoire ; il faut que la nature humaine y soit représentée seulement dans son ensemble, il faut que les héros y restent grands, qu’ils paraissent tels à travers les siècles.

839. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre IV. La fin de l’âge classique — Chapitre I. Querelle des Anciens et des Modernes »

Un de ces auteurs, Desmarets de Saint-Sorlin, ayant donné son Clovis en 1657, crut nécessaire, lorsqu’il vit s’élever une école dont les maximes essentielles allaient, dans tous les genres, à suivre les anciens et à reprendre les sujets déjà traités par eux, de justifier le choix qu’il avait fait dans son poème d’un héros moderne et chrétien.

840. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Marcel Prévost et Paul Margueritte »

Je voudrais abréger les quatre-vingts premières pages, celles où l’auteur nous fait connaître son héros, son caractère indécis et fier, son ennui, son désespoir, sa tentative de suicide… Ce sont là choses connues et qu’il était peu utile de répéter.

841. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mistral, Frédéric (1830-1914) »

Il ne renonce pas à l’élégance, mais quel sentiment hardi de la réalité, quelle énergie redoutable dans ses peintures, soit qu’il chante la Belle d’août et qu’avec une grâce funèbre il associe toute la nature éplorée aux malheurs de son héroïne ; — soit que, dans l’étrange pièce intitulée : Amarum, il attaque le débauché, le secoue, le flagelle, et l’enferme, épouvanté, au fond du sépulcre infect ; — soit que, devant un épi de folle avoine, son ironie vengeresse châtie l’oisiveté insolente, toujours il y a chez lui une pensée généreuse, une imagination agreste, un langage imprégné des plus franches odeurs du terroir.

842. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

Son cri d’angoisse expire en refrains de café-concert, préoccupé qu’il est de se blaguer lui-même, et cela explique qu’en dépit de dons prestigieux, son lyrisme échoue avant la cristallisation parfaite et qu’il demeure un essayiste impénitent, comme s’il dédaignait d’être autre chose que le héros qu’il avait ambitionné de peindre : un raté de génie.

843. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIX » pp. 319-329

Il doit y avoir du plaisir à servir un héros et un bienfaiteur.

844. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 23-38

Peut-être ces marques non équivoques de repentir ont-elles soulevé contre lui plusieurs Héros de la Philosophie.

845. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Racine, et Pradon. » pp. 334-348

Tous les héros de la Grèce & de Rome qu’il a voulu peindre, il les a faits sur le modèle des courtisans de Versailles.

846. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre sixième. »

Celui qui en est le héros, sait très-bien qu’il va combattre un lion, et cependant il est saisi de frayeur quand il voit le lion paraître.

847. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre III. Suite des Époux. — Adam et Ève. »

Ulysse, bien que roi et héros, a toutefois quelque chose de rustique ; ses ruses, ses attitudes, ses paroles ont un caractère agreste et naïf.

848. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Philippe II »

Il n’y a pas de héros qui ne soit plus ou moins diminué ou plus ou moins contaminé par cette histoire… Catholiques ou protestants, tout l’ensemble de ce monde-là est effroyable.

849. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Napoléon »

Quand nous avons lu ses deux énormes volumes, et qui ne sont que le commencement d’un récit qu’il continuera, jamais nous n’avons mieux compris la rareté des historiens véritables en présence de la plus resplendissante histoire à écrire, et jamais nous n’avons plus souffert du choquant contraste qui existe parfois entre l’historien et le héros.

850. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Alexandre Dumas fils » pp. 281-291

Est-ce un caractère que Pierre Clémenceau, le sculpteur, le héros du livre, que j’écrirais Clément-sot pour le mieux nommer, si je ne craignais pas d’être désagréable à Dumas ?

851. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Avellaneda »

C’est un fou sans placidité, sans excuse majeure et touchante de sa folie, sans les longues et sereines intermittences de raison, d’esprit, de goût, de politesse et de grandes manières qui rendent le héros de Cervantes le plus aimable et le plus respectable des gentilshommes.

852. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pierre Dupont. Poésies et Chansons, — Études littéraires. »

Or, même au point de vue économique, qui ne devrait pas être celui du poète, la teinture de ce sang, d’où peuvent sortir des héros, rapporte plus à une nation que la plus précieuse et la plus rare des pourpres, faites par l’industrie.

853. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre II. Des éloges religieux, ou des hymnes. »

On sait que dans ses poèmes il a mieux célébré les héros que les dieux : ses hymnes sont du même ton ; ce sont plutôt des monuments de la mythologie païenne, que des éloges religieux ; mais on y retrouve quelquefois son pinceau et les charmes de la plus riante poésie.

854. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XI. Des éloges funèbres sous les empereurs, et de quelques éloges de particuliers. »

Germanicus, le modèle des princes ; Germanicus qui eut le tort d’être vertueux dans une cour corrompue, et sous Tibère le tort bien plus grand d’être adoré du peuple et de l’aimer, empoisonné en Asie, n’obtint pas d’éloge funèbre dans Rome ; mais aussi la mémoire de Tibère ne manqua point d’être célébrée ; l’éloge de Tibère fut prononcé par Caligula : c’était dignement commencer un règne qui devait finir par tant de crimes ; et le panégyriste et le héros étaient dignes l’un de l’autre.

855. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Mémoires du général La Fayette (1838.) »

Que des hommes de la Montagne, les héros plus ou moins sanglants de cette formidable époque, soient demeurés fixes jusqu’au bout dans leur conviction et soient morts la plupart immuables, on le conçoit : la foudre, on peut le dire sans métaphore, les avait frappés : une sorte de coup fatal les avait saisis et comme immobilisés dans l’attitude héroïque ou sauvage qu’avait prise leur âme en cette crise extrême ; ils n’en pouvaient sortir sans que leur caractère moral à l’instant tombât en ruine et en poussière. […] Cette sorte de vocation chevaleresque du héros républicain, de l’Américain de Versailles, apparaît tout d’abord dans les volumes de Mémoires et de Correspondance publiés. […] On n’a pour opposer véritablement à cette triste vue que le nom de Washington, qui va rejoindre à travers les siècles ces noms presque fabuleux des Épaminondas et des héros de la Grèce. […] Nul n’est en mesure de démontrer le contraire ; l’autorité de ce bel et unique exemple reste donc en dehors, à part, une exception non concluante, et je ne puis dire de la vie de Washington ce que le poëte a dit de la chute d’un grand coupable politique : Abstulit hunc tandem Rufini pœna tumultum Absolvitque Deos75 En 1784, La Fayette en est déjà à son troisième voyage d’Amérique : ce voyage de 1784, au commencement de la paix, fut un triomphe touchant et mérité qui ouvre pour lui cette série de marches unanimes et de processions populaires, dont il fut si souvent le héros et le drapeau. […] Permettons-lui, sous ce rapport, d’en vouloir un peu à la philosophie moderne qui tend à désenchanter le monde du prestige des conquêtes, et qui, modifiant l’opinion de l’Europe et le ton de l’histoire, fait demander quelles furent les vertus d’un héros, et de quelle manière la victoire influa sur le bien-être des nations.

856. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

Son principal récit est, comme dans Hérodote, celui d’une grande invasion ; il a ses héros, et, non moins impartial que l’historien grec, il les prend dans les deux partis : le Prince Noir, Talbot, Clisson, Duguesclin, Charles V. […] Il est bien vrai que l’héroïne Leucippe, captive et sans secours, conserve une irréprochable pureté et une parfaite constance ; mais les peintures les plus libres et les traces les plus choquantes de l’infamie des mœurs antiques se rencontrent dans ce roman. […] Il faut l’avouer, quand on lit les étranges discours que le roi Jacques faisait à son parlement, on s’étonne moins du langage que Shakspeare a souvent prêté à ses héros et à ses rois. […] Le caractère hautain du héros, son orgueil de patricien et de guerrier, son dégoût de l’insolence populaire, sa haine contre Rome, son amour pour sa mère, en font le personnage le plus dramatique de l’histoire. […] On sent dans cette pièce que le poète aveugle et malheureux se met involontairement à la place de son héros, et souffre de toutes les douleurs qu’il exprime.

857. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

Mais ce sont là louanges un peu convenues, et qui ne sont pas données sans un certain air de négligence, ou procédés pour tirer à soi et ranger bon gré mal gré dans son camp les héros du jour. […] Qu’ils aient leur part dans le drame, et la principale encore, et comme indéfinie au contraire, par toute la force dont ils pèsent sur les desseins de nos héros. […] Mais cela ne fait jamais qu’un héros par roman. […] On cherche les vrais héros, les chrétiens indomptables et puissants, qui sont nos géants à nous, nos Hercule vainqueurs de la mort. […] Deux guerriers qui se battent : où est le héros, le personnage où devra éclater la vie morale de l’œuvre ?

858. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Le héros de Carmen, José Navarro, est un bandit qui poignarde sa maîtresse, elle-même une voleuse. […] À travers ses subtilités il reste le héros de la célèbre anecdote, celui à qui M.  […] Le héros chrétien nous eût défendu de le pleurer, « comme ceux qui n’ont pas d’espérance ». […] Bergeret est le héros, avec une partialité souvent injuste, mais la verve et la finesse y sont incomparables. […] Ils ne pensent même plus qu’ils sont des héros.

859. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

La beauté est la royauté de la nature, peu importe qu’elle soit née, comme Cléopâtre, sur un trône, ou, comme la Vénus antique, de l’écume de l’onde, ou, comme lady Hamilton, de la lie des vices ; dès qu’elle paraît elle règne ; dès qu’elle sourit elle enchaîne ; que l’on soit Phidias, Raphaël, Dante, Pétrarque, César, Nelson, lord Byron, Bonaparte, Chateaubriand, elle consume Phidias de la passion de reproduire le beau dans le marbre ; elle divinise Raphaël sous le regard de la Fornarina, et elle le fait mourir, comme le phénix, dans la flamme de deux beaux yeux ; elle allume à douze ans dans le Dante un foyer inextinguible d’un seul rayon de sa Béatrice ; elle sanctifie Pétrarque dans la mystique adoration de Laure ; elle arrête d’une caresse, en Égypte, ce César que ni l’Italie, ni la Grèce, ni l’Afrique, ni l’Espagne n’avaient la puissance d’arrêter ; elle corrompt Nelson dans les délices de Naples et contrebalance dans le cœur de son héros la gloire de Trafalgar ; elle fait oublier, à Ravenne, la poésie à lord Byron dans la contemplation de cette poésie vivante qu’on appelle la Guicioli ; elle fait oublier à Chateaubriand son ambition, son égoïsme et sa vieillesse dans le rayonnement déjà amorti de Juliette. […] Lucien Bonaparte, jeune homme de Plutarque, à la fois poète, orateur et amant, flottait alors entre le rôle de héros de la république et celui de héros de roman ; sa passion déclamait un peu comme son éloquence ; quoique vêtu en apparence d’une page de Tacite, il écrivait à Juliette des pages de Clélie et de Roméo.

860. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIIe entretien. Madame de Staël. Suite. »

C’est ainsi que des Français désignaient le petit-fils des héros qui ont fait la gloire de leur patrie. […] Le prince Louis m’écrivait en commençant son billet par ces mots : « Le nommé Louis de Prusse fait demander à Madame de Staël, etc. » Il sentait l’injure faite au sang royal dont il sortait, au souvenir des héros parmi lesquels il brûlait de se placer. […] « Il serait plus aisé de décrire les symptômes du talent que de lui donner des préceptes ; le génie se sent comme l’amour par la profondeur même de l’émotion dont il pénètre celui qui en est doué ; mais si l’on osait donner des conseils à ce génie, dont la nature veut être le seul guide, ce ne serait pas des conseils purement littéraires qu’on devrait lui adresser ; il faudrait parler aux poëtes comme à des citoyens, comme à des héros, il faudrait leur dire : — Soyez vertueux, soyez croyants, soyez libres, respectez ce que vous aimez, cherchez l’immortalité dans l’amour, et la divinité dans la nature ; enfin, sanctifiez votre âme comme un temple, et l’ange des nobles pensées ne dédaignera pas d’y apparaître. » Ne croit-on pas entendre la poésie elle-même devenue ce que Dieu l’a faite, la sibylle de la nature et la prêtresse du cœur humain ?

861. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

M. de Saumaise, par exemple, est pour lui le type du grand homme littéraire contemporain, le demeurant des savants de la grande bande ; il l’appelle habituellement « ce grand héros des belles-lettres ». Il se tient au courant de tous ses pas et démarches ; il regrette de le voir se détourner de ses travaux herculéens pour répondre aux critiques du jour : Si ce grand héros de la république des lettres allait son grand chemin, dit-il, sans se détourner pour ces petits docteurs ; s’il faisait comme la lune, qui ne s’arrête point pour les petits chiens qui l’aboient, nous pourrions jouir de ses plus grands travaux, qui nous feraient plus de bien que toutes ces menues controverses ; sans faire tant de petits livrets, il nous obligerait fort de nous donner son grand Pline.

862. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — II. (Suite.) » pp. 346-370

Il n’y a point de héros pour son valet de chambre, dit le proverbe ; je le crois, parce que les grands cœurs ne sont pas toujours de grands esprits. […] S’il est beau par-dessus tout au héros militaire et civil d’inspirer de tels sentiments d’admiration à ceux qui l’approchent, il n’est pas moins honorable à l’homme politique déjà éprouvé par les révolutions d’avoir gardé son esprit assez ferme et assez intègre pour être capable de les ressentir.

863. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « De la tradition en littérature et dans quel sens il la faut entendre. Leçon d’ouverture à l’École normale » pp. 356-382

Poète admirable et le plus naturel sans doute depuis Homère (quoique si diversement), de qui l’on a pu écrire avec raison qu’il a une imagination si créatrice et qu’il peint si bien, avec une si saillante énergie, tous les caractères, héros, rois, et jusqu’aux cabaretiers et aux paysans, « que si la nature humaine venait à être détruite et qu’il n’en restât plus aucun autre monument que ses seuls ouvrages, d’autres êtres pourraient savoir par ses écrits ce qu’était l’homme !  […] Il a écrit Werther, mais c’est Werther écrit par quelqu’un qui emporte aux champs son Homère, et qui le retrouvera, même quand son héros l’aura perdu.

864. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

En se cherchant dans la mêlée, les deux héros immolent à l’aveugle tout ce qui se présente devant eux : des guerriers qui avaient jusque-là échappé y trouvent le terme de leur destin. […] Wagner, dans ces derniers mots de sa Préface, détournait et appliquait, moyennant un léger changement, à son maître Heyne les beaux vers que Virgile a mis dans la bouche d’Évandre, confiant à Énée son fils Pallas et l’envoyant apprendre le métier des armes sous le héros troyen : …………………..Sub ta tolerare magistro Militiam et grave Martis opus, tua cernero facta Adsuescat, primis et te miretur ab annis !

865. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Nous allons tâcher de le suivre, et de suivre à la trace son saint et sublime héros. […] Il connut de bonne heure Bossuet et s’était lié avec lui sur les bancs des écoles : « Il eut le bonheur, dit M. de Chateaubriand, de rencontrer aux études un de ces hommes auprès desquels il suffit de s’asseoir pour devenir illustre. » Le biographe s’est laissé aller à être modeste pour l’humble héros : Bossuet, on le verra tout à l’heure, s’exprimera plus librement ; c’est lui qui revendiquerait pour lui-même le bonheur et l’honneur de s’être assis à côté de Rancé, de cet homme dont il ne parlait jamais sans être saisi d’une admiration sainte. 

866. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — I »

C’était une conséquence du système de Corneille, qui faisait ses héros tout d’une pièce, bons ou mauvais de pied en cap ; à quoi Racine répondait fort judicieusement : « Aristote, bien éloigné de nous demander des héros parfaits, veut au contraire que les personnages tragiques, c’est-à-dire ceux dont le malheur fait la catastrophe de la tragédie, ne soient ni tout à fait bons ni tout à fait méchants.

867. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

Il en faut dire autant de l’inclination du vieux marquis pour la belle milady R… Prévost n’a voulu que rendre son héros perplexe et intéressant : le comique s’y est glissé à son insu, mais un comique délicat à saisir, tempéré d’aménité, que le respect domine, que l’attendrissement fait taire, et comme il s’en mêle dans Goldsmith au personnage excellent de Primerose. […] L’examen à peu près psychologique, auquel s’applique le héros au début du livre sixième, nous montre la droiture lumineuse, l’élévation sereine des idées, compatibles avec les conséquences pratiques les plus arides et les plus amères.

868. (1892) Boileau « Chapitre IV. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » » pp. 89-120

C’est cet Art poétique, bien entendu, qu’il faut prendre pour base en essayant de dégager le véritable caractère de la théorie de Boileau ; mais comme il s’agit moins d’analyser un ouvrage que tout le monde à peu près sait par cœur, que d’en indiquer l’esprit et la portée, je mettrai à profit dans cette exposition toutes les indications, parfois d’une importance capitale, que nous fournissent les autres ouvrages de notre critique, comme la Satire II et l’Épître IX, la Dissertation sur Joconde et le Dialogue des héros de roman, enfin les Réflexions sur Longin, surtout la septième, dont l’intérêt est tout particulier. […] C’est la formule même du théâtre classique, des ridicules de Molière comme des héros de Racine.

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