La gloire de l’éloquent Hortensius piqua son émulation, & il n’épargna rien pour obtenir les mêmes éloges. […] Il plaida sa premiere cause au Barreau dès l’âge de dix-neuf ans, mais avec un succès si décidé, que ses rivaux & ses amis comprirent dès-lors à quelle gloire il étoit destiné. […] La gloire de tous les Orateurs que je viens de citer fut éclipsée par le célébre Cochin. […] Ses adversaires même se faisoient une gloire de rendre publiquement hommage à ses talens. […] Si on peut lui reprocher de légers défauts (& pourquoi ne hazarderions-nous pas une critique qui ne le touche plus, & qui ne pourroit effleurer sa gloire ?)
Nous acceptons volontiers le soldat couvert de gloire et de laurier, arrivant du combat comme s’il venait à la parade. […] Sa comédie de Mélite fut le premier des anneaux qui devaient lui conquérir une gloire littéraire immortelle. […] Mais au moment où il fit paraître sa première pièce : Iphigénie, Corneille était dans toute la splendeur de sa gloire. […] C’est de ces deux rivaux le plus digne de gloire. […] Il n’a jamais soupiré que pour la gloire.
L’ardente jeunesse se presse de vivre ; elle prodigue des années pour quelques moments de gloire, et jamais elle ne se plaint lorsqu’elle a frappé ce but. […] De même pour l’immortalité et pour l’avenir des destinées humaines : rendant compte, dans son Éloge de Buffon, des Époques de la nature et rappelant l’hypothèse finale du grand naturaliste lorsqu’il peint la lune déjà refroidie et lorsqu’il menace la terre de la perte de sa chaleur et de la destruction de ses habitants : Je demande, s’écrie-t-il, si cette image lugubre et sombre, si cette fin de tout souvenir, de toute pensée, si cet éternel silence n’offrent pas quelque chose d’effrayant à l’esprit ; je demande si le désir des succès et des triomphes, si le dévouement à l’étude, si le zèle du patriotisme, si la vertu même, qui s’appuie si souvent sur l’amour de la gloire, si toutes ces passions, dont les vœux sont sans limites, n’ont pas besoin d’un avenir sans bornes ? […] Cependant la scène change ; dans cette existence d’un éclat croissant et d’une gloire jusque-là facile, les ombres vont s’introduire et se mêler par degrés et de plus en plus au tableau.
Daru très jeune, lui ayant écrit en 1788 pour le consulter sur l’opportunité de publier à celle date un poème épique dont la guerre d’Amérique serait le sujet, et ayant paru attribuer la préséance dans la famille des Muses à celle qui présidait aux sciences, Ramond, en répondant, lui rappelait que c’est la poésie au contraire à laquelle il appartient de donner à tout la vie et l’immortalité ; et convenant d’ailleurs que les circonstances étaient peu propices à l’épopée, il ajoutait : Mais c’est la destinée ordinaire des grands ouvrages de ce genre de n’être jamais des ouvrages de circonstance ; et si, par cette raison, leur succès est plus lent et plus difficile, leur gloire est plus pure et moins mortelle. Depuis Homère jusqu’à Milton, jusqu’au Tasse, jusqu’à Voltaire, je ne crois pas que le génie de l’épopée ait enfanté un poème qui ait paru dans un temps où l’on n’eût autre chose à faire que de le lire ; et beaucoup de difficultés doivent se réunir contre cette œuvre de l’esprit qui acquiert à son auteur la plus grande gloire dont l’homme soit susceptible. […] Mais en même temps et en attendant que cette épopée encore à naître fut venue, Ramond, vers 1807, savait fort bien déterminer le caractère littéraire d’un siècle qui était le sien et qui a aussi sa force et son originalité : On le dépréciera tant qu’on voudra ce siècle, disait-il, mais il faut le suivre ; et, après tout, il a bien aussi ses titres de gloire : il présentera moins souvent peut-être l’application des bonnes études à des ouvrages de pure imagination, mais on verra plus souvent des travaux importants, enrichis du mérite littéraire… Nos plus savants hommes marchent au rang de nos meilleurs écrivains, et si le caractère de ce siècle tant calomnié est d’avoir consacré plus particulièrement aux sciences d’observation la force et l’agrément que l’expression de la pensée reçoit d’un bon style, on conviendra sans peine qu’une alliance aussi heureuse de l’agréable et de l’utile nous assure une place assez distinguée dans les fastes de la bonne littérature.
Dans l’histoire des guerres comme dans celle des littératures, il y a des moments et des heures plus favorisées ; le rayon de la gloire tombe où il lui plaît ; il éclaire en plein et dore de tout son éclat certains noms immortels et à jamais resplendissants : le reste rentre peu à peu dans l’ombre et se confond par degrés dans l’éloignement ; on n’aperçoit que les lumineux sommets sur la grande route parcourue, on a dès longtemps perdu de vue ce qui s’en écarte à droite et à gauche, et tous les replis intermédiaires : et ce n’est plus que l’homme de patience et de science, celui qu’anime aussi un sentiment de justice et de sympathie humaine pour des générations méritantes et non récompensées, ce n’est plus que le pèlerin de l’histoire et du passé qui vient désormais (quand par bonheur il vient) recueillir les vestiges, réveiller les mémoires ensevelies, et quelquefois ressusciter de véritables gloires. […] Que le Dugommier vif et franc, brave et simple autant qu’habile, et dont les talents n’éclatèrent également qu’à la fin de la carrière, paraît donc supérieur à ce Dumouriez, qui fut un libérateur aussi à son heure, mais qui ternit sa gloire, de tout temps un peu équivoque, par les intrigues manifestes et les manigances prolongées de sa dernière vie !
Après la gloire de faire des découvertes dans cet ordre élevé et d’une sublimité sereine, il n’est rien de plus honorable que de se rendre compte directement de ces découvertes faites par les premiers génies, et de les pleinement comprendre. […] Biot donna cours, dans l’examen qu’il en fit au Journal des Savants (mai 1833), à un sentiment qui, sous sa forme discrète et son expression modérée, ne peut être qualifié au fond que de dénigrant et de malveillant : « Les éditeurs de semblables recueils, disait-il en commençant, lorsqu’ils n’ont que des intentions honorables, ce qui est certainement le cas actuel, doivent bien examiner, avant de les émettre, si la gloire des hommes célèbres qu’ils ramènent ainsi sur la scène s’accroîtra par ces publications qu’eux-mêmes n’avaient point prévues ; ou si l’expression, pour ainsi dire surprise, des idées qu’ils n’avaient pas exposées au grand jour, aura une utilité générale, soit en ajoutant de nouvelles et réelles richesses à la masse des connaissances déjà acquises, soit en détruisant des erreurs que des hommes célèbres auraient accréditées ; soit, enfin, en redressant des injustices qui se seraient propagées sous l’influence de leur nom : car, si aucun de ces résultats ne doit être obtenu, la gloire de ce nom risque d’en être affaiblie plutôt qu’augmentée, ne fût-ce que par l’évanouissement du prestige de perfection qui s’y attachait. » C’est donc au nom d’un prestige que M.
Chateaubriand donc régnant au fond et apparaissant dans un demi-lointain majestueux comme notre moderne buste d’Homère, on a : 1° Hors ligne (et je ne prétends constater ici qu’une situation), Lamartine, Hugo, Béranger, — par le talent, la puissance, le renom et le bonheur ; 2° Un groupe assez nombreux, artiste et sensible, dont il serait aisé de dire bien des noms, même plusieurs de femmes ; de vrais artistes passionnés, plus ou moins originaux, mais qui n’ont pas complétement réussi, qui n’ont pas été au bout de leurs promesses, et qu’aussi la gloire publique n’a pas consacrés. […] Mais c’est sur eux, la plupart, que nous vivons dans cette série dès longtemps entreprise ; ce sont eux qui formeront en définitive le corps de réserve et d’élite de la poésie du dix-neuvième siècle contre le choc du formidable avenir, et qui montreront que les gloires de quelques-uns n’ont pas été des exceptions ni des accidents. […] Un bel âge littéraire complet, ou du moins une vraie gloire de poëte de premier ordre, serait un bonheur et un coup de fortune pour tous ceux de valeur qui l’auraient précédé.
Cette épître, monument élevé à la gloire de la nation & de son roi, avoit été reçue avec de grands applaudissemens, & devoit l’être, à cause de son propre mérite & celui de l’à-propos. […] Dans le temps que parut l’Astrate, ils étoient jeunes tous deux & rivaux, quoiqu’ils allassent à la gloire par des voies différentes. […] Ces réflexions, qui n’étoient rien moins qu’à la gloire de celui qui pouvoir passer pour être l’honneur du Parnasse françois, le blessèrent vivement.
Les Tennemann, les Schleiermacher, les Brandis, les Ritter, les Zeller, les Trendelenbourg, ont mis l’histoire de la philosophie, surtout de la philosophie ancienne, au niveau des parties les plus avancées des sciences historiques et philologiques ; mais la France a eu aussi sa gloire dans ce grand mouvement : elle a fait aussi des efforts pour rivaliser avec l’Allemagne, ou pour lui disputer le premier rang. […] Cousin a été, à n’en pas douter, l’initiateur et le guide de ce mouvement de recherches, et c’est la partie la moins contestable de sa gloire philosophique. […] Willm38, et tant d’autres œuvres importantes que je ne puis citer, sans parler des traductions, des commentaires, des monographies surtout, dont la gloire revient à la Faculté des lettres de Paris, à laquelle on a reproché quelquefois de rester attardée dans les voies d’une érudition surannée, tandis qu’il n’est pas une des branches nouvelles de la critique qu’elle n’ait encouragée et récompensée dans les travaux du doctorat.
L’évêque de Rome s’élève peu à peu, par sa diplomatie sans doute, mais aussi sans le vouloir, par le passé de la Ville ; le sang des martyrs lui est une gloire. […] Le Christianisme, la Renaissance, la Révolution n’en demeurent pas moins trois étapes essentielles de l’humanité. — Au moment où la France s’acheminait vers une longue décadence (d’ailleurs utile et nécessaire à d’autres points de vue), l’Italie, débarrassée de certaines contingences par son malheur même, créait Pétrarque, marchait à la Renaissance, et se préparait par là une gloire nouvelle et des raisons nouvelles de servitude. […] Il y a là, je le répète, quelque chose d’anormal ; une gloire et une faiblesse tout à la fois.
Ce fut à la langue latine que Pétrarque voulut demander la gloire. […] La gloire obtiendrait-elle ce que l’amour n’aurait pas su obtenir ? […] La gloire la plus éclatante peut-elle apaiser un cœur agité par l’amour ? […] La Gloire me dit en souriant : Je sais bien ce que tu penses. […] La gloire est un Calvaire et le poète est crucifié.
Et s’il obtint la gloire, ce ne fut jamais qu’une gloire discrète, voilée, comme le reflet de la lumière dans une lampe d’albâtre. […] Il n’aspire à rien moins qu’à des amours et à des gloires parfaites. […] Mais ce ne fut pas la fortune qui lui apparut d’abord, ce fut la gloire. […] Là est la gloire pure, solide et vraie de Béranger. […] notre gloire impérissable.
Les raisons qu’il donne à sa décharge dans sa prose un peu hétéroclite sont des plus sensées : on vous élève ou l’on vous élevait en ce temps-là au collège à ne rien tant admirer que Virgile, Horace, Ovide, Térence, à faire des vers à leur exemple, à ne voir la belle et pure gloire que de ce côté. […] On a retenu les principaux points de cette plaidoirie ardente, éloquente : Ce mélange de gloire et de gain m’importune… Que peut contre le roc une vague animée ? […] « Voltaire, dit-il dans ses lettres, est venu perdre ici la seule réputation à laquelle il avait sacrifié toutes les autres, sa réputation de bel esprit. » La vanité m’a donné des yeux pour en tant écrire ; mais, réflexion faite, j’ai vaincu avec si peu de péril, que j’en dois triompher sans gloire. […] Je tenais déjà son épitaphe, et la voici ; elle n’est pas longue : Ci-gît le glorieux à côté de la gloire ! […] Vive notre honte et la gloire des voisins !
On dit que, sur ces bords où règne ta mémoire, Une lyre à la main tu mendiais ta gloire !… Ta gloire ! […] On tire au sort, dans un casque, parmi un certain nombre de noms fameux, le nom de celui qui aura la gloire de lutter contre Hector. […] Cet assaut, où les guerriers de toutes les peuplades de la Grèce et tous ceux de la Troade sont tour à tour le sujet rapide d’un chant du poète, est pour chaque race, pour chaque ville et pour chaque île une inscription populaire qui répartit à chacun sa part de gloire éternelle. […] La nature l’emporte même un moment sur la gloire, et Hector s’enfuit à l’approche du héros des Grecs.
Sous l’empire d’un seul, au contraire, les beaux-arts sont l’unique moyen de gloire qui reste aux esprits distingués ; et quand la tyrannie est douce, les poètes ont souvent le tort d’illustrer son règne par leurs chefs-d’œuvre. […] Mais ce qu’il y a de tendre et de philosophique dans les poètes latins, eux seuls en ont la gloire.
Ils ne se sont pas contentés de la gloire qui s’attache à des auteurs charmants. […] Oui, ce qu’on appelle risiblement la gloire des lettres, et qui n’est au fond que la modeste popularité domestique d’un nom connu d’autres noms contemporains plus éclatants, serait pour moi ceci : laisser quelques pages de mes sentiments ou de mes pensées en un petit volume sur la tablette de la chaumière ou de la maison des ouvriers de la ville ou de la campagne.
Cette école, dont Augustin Thierry, revenu à la Vérité, se sépare, dit-on, par le plus généreux travail entrepris sur le livre qui a fait la gloire de sa vie (Histoire de la conquête de l’Angleterre), cette école, qui n’eut jamais d’ailleurs l’insouciante hardiesse de son fondateur, cache maintenant, sous des formes modérées et cauteleusement respectueuses, une hostilité contre le Christianisme, arrêtée et profonde. […] , ni Guizot, qui a vu les mélanges du bien et du mal, mais qui n’a pu les expliquer, ni personne, enfin, parmi les gloires modernes, n’a porté la lumière et la main sur le nœud gordien de ce temps et son implication formidable, tandis que quelques vers de Shakespeare, quelques pages de Walter Scott, en font du moins passer l’âme dans nos esprits, comme une vision trop tôt évanouie !
Encore une fois, l’Allemagne préoccupée de révolutions, l’Allemagne troublée et inattentive à tout ce qui n’était pas la nuée d’Ixion de sa politique, ne prit pas garde aux rares qualités d’une poésie comme elle n’en avait pas encore, et Louis Wihl fut obligé d’attendre sa gloire. […] La gloire, pour ceux qui la méritent et qui ont la faiblesse de l’aimer, n’est jamais qu’une question d’heure qui se résout montre à la main.
Ils s’en acquitteront sans doute : leur gloire est inséparable de la vôtre. […] Picart, de son côté, reclama & obtin la gloire de l’avoir commencée. […] Cette gloire ne lui fut pas disputée. […] Le Poëme de la Religion est un des monumens les plus utiles qu’on ait érigés à sa gloire. […] Pourquoi donc attribuer à cette nation la gloire d’avoir créé notre Musique ?
S’il peint ici les frénésies guerrières, là sa sagesse en retrace les déplorables suites dans les infortunes d’Ulysse et de ses compagnons de gloire. […] « J’abhorre les combats, je pleure sur ma gloire, « Et voudrais racheter ma coupable victoire. […] « Riche des sentiments en ton cœur médités, « Ta gloire est l’heureux fruit de tes adversités. […] Le palais du soleil n’a rien de plus éclatant que Jéhovahk dans sa gloire. […] Qu’il n’envie point à son rival la faible gloire de lui survivre.
Carteaux se lamenta pourtant, parla de sa « gloire ». […] Il entrait alors, sinon dans la gloire, du moins dans la notoriété. […] Qui osera dire, après cela, que les femmes se soucient de la gloire ? […] D’ailleurs, ils se méfiaient de cette explosion de gloire. […] Gondouin et Lepère, architectes, élevaient à la gloire de la Grande-Armée.
Il attendra la gloire et se passera de la vogue. […] Hugo prendra place parmi ceux des plus hardis, des plus habiles, des plus persévérants novateurs, et certes cette gloire incomplète n’est pas sans valeur. […] Si l’auteur, en effet, a été vaincu dans la lutte qu’il avait engagée, sa défaite n’a pas été sans gloire. […] Dans ces strophes si abondantes où les mots disciplinés exécutent si bien toutes les évolutions que le poète leur commande, je n’aperçois aucune sympathie sincère pour la gloire des armes ou la gloire de la tribune, pour les conquêtes pacifiques ou les conquêtes militaires, pour le développement de la puissance ou de la liberté. […] Il a connu la gloire à l’âge où des poètes du premier ordre hésitaient encore à publier leurs pensées ; oublier cette gloire, qu’il croyait si solidement assise, sera sans doute pour lui un cruel sacrifice.
La première de ces lettres est adressée à un ami de Salzbourg, qui suivait du cœur et des yeux les deux pèlerins de l’art et de la gloire. […] Qui ne tente rien n’a rien ; il faut vaincre ou mourir, et c’est au théâtre que nous trouverons la mort ou la gloire. […] La gloire d’avoir écrit un opéra pour le théâtre de Vienne n’est-elle pas la meilleure voie pour obtenir du crédit non seulement en Allemagne, mais en Italie ? […] On ne veut pas en laisser la gloire à Dieu. […] Ils y jouissent quelque temps de leur félicité domestique dans une indigence que la gloire n’a pas encore adoucie.
À côté d’Aristote, il n’y a que deux noms que la gloire prononce après le sien : c’est Horace et Boileau. […] L’historien de l’esprit peut être aussi grand que l’historien de la politique ; et ce n’est pas une faible gloire d’avoir ajouté cette branche nouvelle au domaine de l’intelligence. […] Ces mérites, les voici ; et s’ils sont moins élevés que nous ne l’eussions désiré, ils le sont bien assez encore pour justifier toute la gloire du péripatétisme. […] Que ce soit pour lui un titre de gloire aussi incontestable, s’il est moins grand, que la théorie des Idées. […] Gloire à lui !
Les vanités nationales ont été soutenues par la vanité des savants qui mettent leur gloire à reculer l’origine de leurs sciences favorites. […] Que l’on m’assure sa gloire, et je ne refuse point sa mort8 ! […] Quiconque veut trouver dans l’étude le profit et l’honneur, doit travailler pour la gloire, c’est-à-dire pour le bien général. — 1705. Les époques de gloire et de puissance pour les sociétés, ont été celles où elles ont fleuri par les lettres. — 1707. […] La vigueur et l’originalité avec lesquelles il écrivait en cette langue eût fait la gloire d’un savant ordinaire.
Il y a un mauvais symptôme de gloire ; ce mauvais symptôme, c’est l’engouement. Pourquoi l’engouement est-il l’apparence et cependant l’opposé de la gloire ? […] La gloire, au contraire, ne s’attache qu’aux vérités permanentes et ne se ratifie que par la postérité. […] On s’y moque aussi joliment du bonhomme, qui, en effet, n’est que cela, soit dit à sa gloire ! […] Les souvenirs de gloire militaire, qui faisaient sa popularité rétrospective dans l’imagination d’un peuple de soldats, semblent aujourd’hui le contraindre à la guerre : l’Europe s’émeut de répugnance au sang, dans tous ses cabinets et dans tous ses conseils politiques.
C’est la pauvreté des autres races nationales de l’Europe, de n’avoir qu’un caractère national ; c’est le génie, c’est l’aptitude, c’est la grandeur, c’est la gloire de la France, d’en avoir plusieurs. […] Nous aurions eu plus tôt de la gloire littéraire, mais nous l’aurions eue moins universelle et moins consolidée plus tard. […] Ces deux plus grandes gloires du siècle, l’un dans la guerre, l’autre dans les lettres et dans la religion, semblaient s’entraîner l’une et l’autre. […] Mais approchez en particulier, ô vous qui courez avec tant d’ardeur dans la carrière de la gloire, âmes guerrières et intrépides ! […] Vous aurez dans cette image des traits immortels : je vous y verrai tel que vous étiez à ce dernier jour sous la main de Dieu, lorsque sa gloire sembla commencer à vous apparaître.
On y trouve l’action fatale et funeste de la société américaine sur un génie qui devait naître ailleurs pour s’épanouir dans toute sa gloire et qui valait mieux que le sol de limaille de fer et de poussière où Dieu l’avait jeté. […] avec l’enthousiasme connu de Charles Baudelaire pour son auteur et le dévouement qu’il montre à sa gloire, la personnalité humaine d’Edgar Poe n’est pas plus complète dans cette notice que sa personnalité littéraire dans ce premier volume d’œuvres choisies. […] XII45 Ce n’est pas ces Contes grotesques qui ajouteront beaucoup à la gloire d’Edgar Poe. […] Il est le Spallanzani poétique qui galvanise encore les imaginations mortes ou qui vont mourir… Lui et son traducteur Baudelaire, qui l’a traduit deux fois, dans ses œuvres et dans sa vie, quoique la sienne ne fût pas comparable à celle du poète et du conteur américain, Edgar Poe et Baudelaire, que d’aucuns déjà appellent le grand Baudelaire, sont si bien étreints dans la préoccupation et l’admiration universelles, que des publications comme celle d’Émile Hennequin ne seraient pas capables d’entamer leur gloire ou de la diminuer. […] Il publiait isolément ses Contes, calculés pour produire l’étonnement, qui est la gloire en Amérique, mais ils ne furent jamais que de brillants sillages, bientôt effacés, sur le gouffre de la misère immense qui, finalement, l’engloutit.
Ainsi Shakespeare, mort, entra dans l’oubli ; Eschyle, dans la gloire. Cette gloire, qui devait avoir dans les siècles ses phases, ses éclipses, ses disparitions et ses réapparitions, fut éblouissante. […] Chose étrange, c’est cette gloire qui a fait sombrer son œuvre. […] Shakespeare, avec cette obscure et chétive édition attendant en vain le public, était une sorte de pauvre honteux de la gloire. […] Corinthe, Épidaure, Œdepsus, Gythium, Chéronée, où Plutarque devait naître, Thèbes, où était la maison de Pindare, Mantinée, où était la gloire d’Épaminondas, toutes ces villes dorées repoussaient l’Inconnu qu’on entrevoyait comme une nuée derrière le Caucase.
Mais à cela près de l’estime des esprits clairvoyants, acquise à l’auteur, et qui vaut mieux que les faveurs de cette Gloire, fille de la Fortune et plus aveugle que sa mère, quelles contradictions un tel ouvrage a-t-il soulevées, et quels bruits ? […] Ce que Henri VIII avait accompli en Angleterre, Pombal l’essaya pour le Portugal, et si les efforts du misérable n’ont point réussi, ce n’est pas sa faute, mais bien la seule gloire qui soit restée à son pays. […] Enivrés de ces fausses lumières que les Encyclopédistes répandaient dans leurs livres, ils faisaient tout pour obtenir une gloire qui en était une de plus. […] Avec beaucoup de génie, beaucoup de lumières, beaucoup d’entrailles même, avec tout ce qui rend la gloire facile et la grandeur réelle, l’Europe du xviiie siècle est la plus petite des Europes qui viennent séculairement comparaître au tribunal de l’histoire. […] Nous aimons, comme l’auteur de Clément XIV, à suivre jusqu’à ses dernières limites le développement du principe de l’obéissance, appliqué contre eux-mêmes par ces hommes qui sont la gloire de l’humanité.
L’auteur commençait alors ses travaux de colosse et ces longues luttes, si fécondes pour sa gloire et pour son génie ; et, comme tous ceux qui ont besoin de se faire un public, il ne choisissait pas beaucoup ses intermédiaires, et il mettait le plus cher trésor de sa pensée sur le premier flot venu de cette mer de la publicité quotidienne, qui, comme l’autre mer, efface si vite de son sein la trace de tous les sillages ! […] Sa gloire profitera, sans nul doute, à celle de ses œuvres que dans sa conscience d’artiste il estimait le plus. Nous sommes d’assez dociles petits garçons avec la Gloire. […] Je l’ai traité comme un artiste qui doit un jour compter ou décompter avec la Gloire. […] La gloire de l’homme continuera à s’élever, mais lui ne grandira plus dans la splendeur de la connaissance qu’on aura de lui.
Sieyès ne fut pas long, du reste, à comprendre que son rôle était accompli, que le chef d’État idéal qu’il avait cherché à faire asseoir théoriquement au haut de sa pyramide était trouvé, debout, vivant, en action, investi de puissance et de gloire, et que le moment pour lui était venu d’abdiquer. […] Des hommes jusque-là jugés incapables se rendaient utiles ; des hommes jusque-là distingués se trouvaient tout à coup confondus ; des hommes regardés comme les ressources de l’État se trouvaient inutiles ; et toutes les âmes ambitieuses de gloire furent forcées de se contenter d’un reflet de sa gloire. […] Il faudrait voir, en bien d’autres détails, comme il était réellement épris et enthousiaste de la gloire, de la vertu du premier consul à cette époque, comme il luttait de toutes ses forces et avec passion contre l’influence de Fouché en laquelle il dénonçait un danger, et, qui pis est, une souillure pour la réputation immaculée du jeune chef d’empire.
Les méchants propos de Versailles ne sont plus que des propos, et même en y faisant toute la part possible, en accordant un peu de vérité dans beaucoup de mensonge, les lignes et les traits essentiels de l’habile et hardi capitaine, ses belles parties de talent n’en sont pas entamées ; la gloire de Villars subsiste. […] Sans compter les marques de satisfaction publique, la première fois qu’il reverra Villars, deux ou trois mois après, il lui dira ces belles paroles : Je suis autant Français que roi ; ce qui ternit la gloire de la nation m’est plus sensible que tout autre intérêt. […] Vous avez acquis beaucoup de gloire, écrivait Louis XIV à Villars (16 mars 1703), vous avez fait tout ce que le courage, le zèle le plus ardent et l’expérience la plus consommée me devaient faire attendre de vous ; ce qui vous reste à faire est encore plus important, et vous pouvez vous combler d’honneur et me procurer une paix glorieuse en joignant les troupes de l’électeur de Bavière, et en portant avec lui la guerre dans le milieu de l’empire. […] Ce n’est pas là la bonne manière, et, suivant l’expérience, il fallait me mander : « Le roi sait que votre zèle et un désir de gloire vont tellement avant tout dans votre cœur, que les récompenses ne sont pas nécessaires pour vous exciter.
Je vous avouerai, du reste, que la gloire a son mauvais côté ; le système pénitentiaire étant notre industrie, il nous faut, bon gré, mal gré, l’exploiter tous les jours ; en vain cherchons-nous à nous en défendre, chacun trouve moyen de nous glisser une petite phrase aimable sur les prisons. […] Non, je ne vous crois pas un orgueilleux, un ambitieux ; je mets, il est vrai, moins de prix que vous à l’opinion, c’est-à-dire à l’opinion du grand nombre ; car l’opinion du petit nombre, c’est-à-dire des juges éclairés, est ce qu’il y a de plus digne d’être ambitionné : c’est la vraie gloire. […] Il y a, je le sais, de plus hautes vocations, et la vôtre est de ce nombre ; je les reconnais, je les honore, je les admire, en leur adressant toutefois ce conseil dont Bossuet fait honneur au grand Condé : qu’il faut songer d’abord à bien faire, et laisser venir la gloire après. » En même temps qu’il le tempère, il l’encourage, il l’élève, il l’exalte même : à ses conseils particuliers il mêle des paroles d’oracle, des éclairs de prophétie qui portent loin. […] Ce n’est pas là qu’il faut chercher la gloire, il faut l’y apporter.