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577. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

Ce La Fontaine qu’on donne à lire aux enfants ne se goûte jamais si bien qu’après la quarantaine ; c’est ce vin vieux dont parle Voltaire et auquel il a comparé la poésie d’Horace : il gagne à vieillir, et, de même que chacun en prenant de l’âge sent mieux La Fontaine, de même aussi la littérature française, à mesure qu’elle avance et qu’elle se prolonge, semble lui accorder une plus belle place et le reconnaître plus grand. […] Elle jouit de ces charmants tableaux encore plus qu’elle ne songe à les mesurer ou à les classer ; elle en aime l’auteur, elle le reconnaît pour celui qui a le plus reproduit en lui et dans sa poésie toute réelle les traits de la race et du génie de nos pères ; et, si un critique plus hardi que Voltaire vient à dire : « Notre véritable Homère, l’Homère des Français, qui le croirait ? […] Le fond de ses Fables est emprunté de toutes parts ; la vieille littérature française en fournissait en abondance et plus même que La Fontaine de son temps n’en connaissait. […] Et de plus M. de Lamartine représente une poésie sentimentale, élevée, un peu métaphysique, qui était nouvelle en France au moment où il parut, et qui se trouvait opposée à l’esprit français en ce que celui-ci a toujours eu de positif, de malin, de moqueur. […] Et notez bien que, s’il n’y avait pas de La Fontaine dans le passé, ou que si l’on cessait de le goûter et de l’aimer dans l’avenir, il n’y aurait pas ce coin d’esprit français mêlé jusque dans la poésie, qui ne se contente pas de la sensibilité pure, qui raille le vague du sentiment, et, pour tout dire, qui sourit souvent même aux beaux endroits de Lamartine.

578. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

Il a mêlé de cette nuée aussi à sa littérature, faite pour rester claire, consistante et gaie comme l’éther du ciel et le bon sens français ! Ce Français européanisé, qui toute sa vie a écrit, en anglais, des choses parfaitement et incroyablement anglaises ; qui en aurait peut-être écrit en allemand, s’il l’avait voulu, mais qui, du moins, a traduit en français le plus Allemand des Allemands, Jean-Paul Richter, a glissé, hélas ! à certains jours, dans ces allemanderies d’une métaphysique appliquée à la littérature, dont, avec son esprit français, il aurait dû rire. […] Il y avait vécu et il y avait écrit dans la langue du pays, comme Voltaire qui, jeune et fat comme un Français, s’était aussi permis d’y écrire, dans cette langue si opposée pourtant à son genre de génie. […] Ici, il n’est qu’un entraîné — un entraîné pensant en anglais, tout en parlant français ; séduisant souvent, mais toujours séduit.

579. (1912) Enquête sur le théâtre et le livre (Les Marges)

Le génie français, à la scène, se rassied. […] Dégager de ce fatras les ouvrages nombreux, plus nombreux que jamais, qui sont la gloire de la littérature moderne française, est une besogne ardue. […] Voilà ce qui me paraît la réalité actuelle, pour Paris et les plus grandes villes françaises. […] Celui de trois grecs, un anglais, deux français, deux allemands. […] On réédite, en mauvais français, les idées des littérateurs d’hier, et l’on comprend qu’une pareille lecture n’ait aucun attrait.

580. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Il a paru après une révolution qui avait fait peser sur la langue française le niveau terrible qui avait tout abattu, et il a relevé la langue française. […] D’abord, il était Français, et Runjet-Sing aime passionnément les Français. C’est un officier français, M.  […] C’est ainsi qu’on traite les Français dans le royaume de Lahore. […] On peut le dire aussi des Français qui voyagent en Asie.

581. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Ce fut, à quelques exceptions près, le rôle du haut clergé français dans la Révolution. […] Le roi m’a donné pour mes étrennes, mon cher confrère, le premier de tous les biens, la liberté, et la permission de lui faire ma cour, qui est le plus précieux et le plus cher de tous pour un Français comblé des bienfaits de son maître. […] Bernis avait de plus l’honneur d’être son confrère à l’Académie française, où, chose singulière ! […] Tout ce qui est dû à la nation française et à son roi rejaillit sur sa personne par l’art avec lequel il le leur fait rendre. […] D’après cela, tout Français qui peut se réclamer de Son Éminence, dans quelque circonstance que ce soit, à son nom seul est respecté.

582. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Il traduisit aussi en français un traité de Xénophon et un autre de Plutarque. […] Certes, l’extrémité est cruelle et le cœur m’en saigne ; mais j’en ai pris mon parti de dire un long, un éternel adieu à cette terre natale… Mieux eût valu de fuir, sans doute, avant la ruine de la patrie qu’après, et de s’être épargné ce spectacle funeste : pourtant, ne nous repentons point d’avoir rempli jusqu’au bout notre devoir de bon Français, et que notre piété se console même par ce qu’elle a fait d’inutile. […] Telles étaient les inspirations senties et touchantes que le spectacle des premières guerres civiles dont allait s’embraser toute la dernière moitié du siècle, faisait naître dans les nobles âmes, et qu’Étienne de La Boétie exhalait en des vers qui n’ont contre eux que de n’être point en français. […] Mais je ne sais personne qui en ait mieux parlé dans la pure nuance et la juste mesure qu’un auteur du commencement de ce siècle, que je cite quelquefois, et à qui la France doit un souvenir, puisqu’il est du petit nombre des étrangers aimables qui ont le mieux écrit en Français : Malgré les treize lustres qui pèsent sur ma tête, écrivait M.  […] [NdA] À la date de 1789, on trouve une brochure intitulée Discours de Marius, plébéien et consul, traduit en prose et en vers français du latin de Salluste, suivi du discours d’Étienne de La Boétie sur la servitude volontaire, traduit du français de son temps en français d’aujourd’hui, par l’Ingénu, soldat dans le régiment de Navarre ; le tout dédié aux mânes de Chevert.

583. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La femme au XVIIIe siècle, par MM. Edmond et Jules de Goncourt. » pp. 2-30

Je suis avec un profond respect, etc. » Tout cela ne prouverait qu’une chose, c’est que Mme de Luxembourg savait mieux le monde et le français que l’orthographe. […] M. de Bissv a été élu tout d’une voix pour remplacer l’abbé Terrasson à l’Académie française. […] Nos mœurs françaises deviennent charmantes. » Malgré le dénigrement anticipé de d’Argenson, le salon ouvert par Mme de Luxembourg vers 1750 devint en effet un des ornements et, à la longue, une des institutions du siècle. […] Société française, ancienne société tant regrettée, — non pas celle que je vois déplorer chaque jour dans des écrits bruyants, avec de grands hélas ! […] C’est une faute de français ou plutôt contre la grammaire ; mais dans ces styles parlés on n’y regarde pas de si près, et l’on n’en reste que mieux dans le génie de la langue.

584. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

» Horace reste Français de cœur à l’étranger ; ce n’est pas un mal, puisque cela ne l’empêche ni de bien regarder ni de juger. […] Tout cela est gai, spirituel, bien français de tour et d’humeur. […] À Smyrne, Horace Vernet rencontre (février 1840) les flottes française et anglaise ; il est accueilli par notre marine comme il l’était en Afrique de notre armée de terre. […] Horace avait à ne pas se montrer ingrat envers l’empereur, et à ne pas trahir sa qualité de Français : il sut tout concilier. […] Ou m’accorderez-vous bien quelques pages encore en faveur de celui dont le nom répandu est à la fois si européen et si français, et qui a couvert des murailles entières de ses peintures ?

585. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

Il a pensé avec les Bénédictins, et par des raisons que j’ose dire plus profondes, que l’histoire littéraire de la France ne se pouvait circonscrire aux siècles où l’on a commencé d’écrire en français. […] Les gens de parlement, les théologiens, les doctes, écrivaient la veille en latin ; leur style, en passant au français, était tout gorgé de latinismes. […] Ampère nous offre avec les siècles littéraires proprement dits, et combien, même en pleine étude des temps gallo-romains, il vise au cœur des époques toutes françaises. […] Ampère, dans lesquels il a su ressaisir la vie même des idées et des personnages qu’il exprime, Ausone, saint Paulin, Rutilius, la confession de l’autre Paulin, petit-fils d’Ausone, Sidoine Apollinaire, toutes pages à la fois graves et charmantes, qui suffiraient à caractériser dans la critique française cette manière sobre, délicate, profonde et sûre ! […] Dans un temps où il y aurait encore une Anthologie française, une seule pièce pareille suffirait pour y marquer un nom.

586. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Voltaire s’effare, écrit à tous ses amis, à l’Académie française : mais rien ne menace même son repos, il se rassure ; et cette alerte lui fait comprendre tous les avantages de la position. […] Il acquit sur la frontière française, et en France, les deux terres de Tournav et de Ferney : il y établit son domicile habituel en 1760. Cette fois, il était absolument indépendant, insaisissable, inviolable : narguant, à leur nez, les Messieurs du Magnifique Conseil, et hors de la prise du gouvernement français, qui, à la première menace, l’aurait vu installé en terre étrangère. […] Ainsi le fondement de l’ironie voltairienne, de ce ricanement fameux, est identique à celui du comique moliéresque ; cette façon de prendre les choses par la raison plutôt que par le sentiment est éminemment française. […] Dans le mouvement intellectuel, la trace principale de Voltaire est la diffusion de l’incrédulité du haut en bas de la société française.

587. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XII. La littérature et la religion » pp. 294-312

Puis on a composé des pièces farcies, moitié françaises, moitié latines ; enfin la langue vulgaire l’a tout à fait emporté. […] De même, dans leurs collèges ils enseignent à leurs élèves toutes les élégances, ils font jouer des tragédies, ils encouragent et cultivent le talent d’écrire en vers latins, parfois même en vers français ; ce sont d’habiles, professeurs de rhétorique. […] Si du reste on considère, non plus un cas particulier, mais l’ensemble, comment n’être pas frappé des caractères qui distinguent les Réformés français ou parlant français du reste de la population française ! […] Il eut plusieurs causes sans doute ; mais il faut l’attribuer en partie au caractère à la fois cérémonieux et intolérant que le catholicisme français eut dans cette époque, qui fut pourtant pour lui l’apogée d’une brillante renaissance. […] L’opposition acharnée qu’elle a faite au développement de l’instruction populaire prouverait, à elle seule, la défiance et peut être la rancune qu’elle nourrit contre la vertu émancipatrice contenue dans les œuvres littéraires, du moment qu’elles se dérobent à sa tutelle et se proclament libres de toucher à ces grands sujets qui étaient jadis, au dire de La Bruyère, interdits à un homme né chrétien et français.

588. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

On a de lui la Relation de son voyage en Amérique, dont quelques parties ont été imprimées : c’est un vif, amusant et spirituel récit, tout à fait dans le genre d’esprit d’alors, dans le genre français et léger. […] Le prince de Broglie était bien de cette race d’aimables Français qui s’en allaient à travers les deux mondes semant les saillies, les fleurettes et les idées, — les idées, notez-le, tout autant que le reste. […] Il passa quelque temps en Espagne, à Valladolid, en qualité de secrétaire général de l’administration française. […] Les divers articles que M. de Broglie a fournis vers ce moment à la Revue française, et qui sont des morceaux du plus grand mérite, sont tous inspirés ou dominés par un sentiment de cette nature, soit qu’examinant le livre de M.  […] Quoi qu’il en soit, les articles de M. de Broglie dans la Revue française, surtout les trois articles que j’ai indiqués, à propos du livre de M. 

589. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « L’abbé Maury. Essai sur l’éloquence de la chaire. (Collection Lefèvre.) » pp. 263-286

L’Académie française avait pour usage, en ce temps-là, de célébrer tous les ans la fête du roi dans la chapelle du Louvre, et d’entendre, à cette occasion, le panégyrique de saint Louis. […] Ne perdant point de vue sa carrière dans le monde, l’abbé Maury recueillit en 1777 ses Discours choisis sur divers sujets de religion et de littérature, et il se mit en mesure de postuler un fauteuil à l’Académie française. […] Peu de jours après, je le vis chez la baronne de Juliana, Française émigrée, qui avait une assemblée chez elle. […] J’ai retenu plusieurs de ses idées, les voici mot à mot :   Académie française : Académie des sciences.   « L’Académie française (c’est le cardinal Maury qui parle) était seule considérée en France, et donnait réellement un état.

590. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

À lui seul il contrebalance notre beau dix-septième siècle français et presque le dix-huitième. […] Voltaire, disons-le avec joie et avec tristesse, c’est l’esprit français. Entendons-nous, c’est l’esprit français jusqu’à la Révolution exclusivement. […] Nul peuple n’est plus illustre, plus noble, plus magnifique et plus magnanime que le peuple français. […] Du reste, quelques lords-chambellans qu’il y ait, la censure française est difficile à distancer.

591. (1897) Manifeste naturiste (Le Figaro) pp. 4-5

Avec l’éducation donnée, depuis dix ans, à toutes les personnes françaises, avec cette sanguine énergie que nous ont transmise nos pères, comment pourrions-nous accueillir les poètes septentrionaux ? […] * *   * Cependant, une telle frénésie qui agite les hommes de vingt ans, à cause de leur éducation et par l’effet du profond tremblement dont fut marquée la terre française en 1870, à quoi pouvons-nous l’occuper ? […] Quand les qualités d’ordonnance qui forment la base du caractère français (cela apparaît assez dans notre architecture, la symétrie de nos jardins taillés et les lois de notre équilibre, auxquelles se sont toujours soumis nos grands écrivains classiques) ; quand ces qualités d’ordonnance semblaient tout à fait détruites, au contact de poètes allemands si incohérents dans leur frénésie, Zola en garda le goût, et ses romans en portent l’empreinte. […] Puisse-t-elle tenir ses promesses afin que nous assistions au spectacle fortifiant d’une renaissance française !

592. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XV. Des ouvrages sur les différentes parties de la Philosophie. » pp. 333-345

Leurs ouvrages ont été traduits en françois. […] On ne sauroit assurément la refuser aux suivans ; Derham présente sa Théologie-Physique, & sa Théologie astronomique, l’une & l’autre traduites en françois, in-8°. […] C’est le premier des Philosophes françois, qui ait donné des graces à la raison. […] Il y en a un en françois qui pourroit bien effacer tous les autres, s’il est jamais fini.

593. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 21, du choix des sujets des comedies, où il en faut mettre la scene, des comedies romaines » pp. 157-170

Nos poëtes lyriques et nos poëtes comiques ont fait la même méprise que Plaute et que Terence, lorsque notre goût perfectionné par Malherbe et par ses successeurs, devint assez difficile pour ne s’accommoder plus des anciennes farces ; nos poëtes comiques françois tâcherent de perfectionner leur tâche, comme les autres poëtes avoient perfectionné la leur. […] Ces comediens ont été obligez de parler françois, c’est la langue de ceux qui les païent. […] Nos premiers faiseurs d’opera se sont égarez, ainsi que nos poëtes comiques, pour avoir imité trop servilement les opera des italiens de qui nous empruntions ce genre de spectacle, sans faire attention que le goût des françois aïant été élevé par les tragedies de Corneille et de Racine, ainsi que par les comedies de Moliere, il exigeoit plus de vrai-semblance, qu’il demandoit plus de regularité et plus de dignité dans les poëmes dramatiques, qu’on n’en exige au-delà des Alpes. […] Monsieur Quinault, qui travailla pour notre théatre lyrique après les auteurs que j’ai citez, n’eut pas fait deux opera qu’il comprit bien que les personnages de bouffons, tellement essentiels dans les opera d’Italie, ne convenoient pas dans des opera faits pour des françois.

594. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (2e partie) » pp. 177-248

C’est ce difficile travail de la persuasion jointe à la force que le vainqueur de Rivoli et de Marengo avait entrepris auprès de l’Église romaine pour la réconcilier avec la République française. […] Mais ce soldat, dans sa position naturelle et simple de premier magistrat de la République française, n’avait point d’égal sur la terre, même sur les trônes les plus élevés. […] Malheureusement la France, qui avait payé de son sang leur délire républicain, était exposée à payer de sa grandeur leur nouveau zèle monarchique ; car c’est pour qu’il y eût des rois français en Westphalie, à Naples, en Espagne, que la France a perdu le Rhin et les Alpes. […] Les divers corps de l’armée française étaient en mouvement, et descendaient de la position qu’ils avaient occupée pendant la nuit, pour traverser le ruisseau qui les séparait des Russes. […] Les principaux officiers des deux armées se tenaient à l’écart et regardaient avec une vive curiosité ce spectacle extraordinaire du successeur des Césars vaincu et demandant la paix au soldat couronné que la révolution française avait porté au faîte des grandeurs humaines.

595. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — I. Faculté des arts. Premier cours d’études. » pp. 453-488

Il y a des éléments de chimie sans nombre ; il y en a en français, il y en a en allemand. […] Duclos54, secrétaire de l’Académie française. […] Presque point de milieu dans un ouvrage français, il est bien, très-bien ou très-mal écrit. […] Les Vrais Principes de la langue française. 1747, 2 vol. in-12. […] Dont Voltaire disait qu’ils subsisteraient tant que la langue française durerait.

596. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Pailleron, Édouard (1834-1899) »

m’est inspiré par la vue d’un volume de poésies signées Édouard Pailleron, de l’Académie française. […] Que nous sommes loin de la blonde Isabelle et de Marton la brune… écrivain de grand talent, d’un intarissable esprit, bien français et bon Français (en 1870 M. 

597. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — I »

Oui, qu’il étudie la littérature anglaise, la civilisation italienne, quelques écrivains français contemporains, la société parisienne ou la révolution, son souci constant est d’appliquer et de vérifier une certaine méthode.‌ […] Taine ne vécut que pour saisir la cause ordonnatrice dans la multitude des faits que nous classons sous les noms de littérature anglaise, civilisation italienne, Révolution française, etc., etc.‌ […]   Je m’arrête encore dans ce raccourci que j’essaye de tracer de l’influence de Taine sur la pensée française.

598. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre III. La Révolution. »

. —  Jugement de Burke et du peuple anglais sur la Révolution française. […] L’élégant jardinage français n’y eût rien fait. […] Un Anglais, dit Chesterfield, se croit en état de battre trois Français. […] Ils arrivent ainsi au seuil de la Révolution française, conservateurs et chrétiens, en face des Français libres penseurs et révolutionnaires. […] Burke, 133, Réflexions sur la Révolution française.

599. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Influence de la victoire de Bossuet sur l’esprit français et la langue. — § XVIII. […] C’est que la spéculation, dans une tête française, n’est pas longtemps oisive. […] Il importait donc qu’il fût vaincu ; il l’importait pour l’esprit français comme pour la religion. […] Il y a deux esprits français, ou plutôt deux faces distinctes de cet esprit. […] Discours de réception à l’Académie française.

600. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

Malheur au dramaturge qui s’exprimerait en lapon devant des spectateurs français ! […] En plein seizième siècle, on proposa au bon peuple français une pâle copie de la tragédie hellénique. […] Il porte dans le sang la plus aimable tradition française, mi-chrétienne, mi-galante, chevaleresque. […] Du Shakespeare français où Watteau a posé son aile. […] Il a influencé le lyrisme français — et pas toujours, en bien ; le théâtre français, très peu ou de très loin.

601. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

Le grand roi françois est un des ardens protecteurs dont les lettres et les arts puissent se glorifier. […] Au contraire, le plus grand de leurs défauts est de les avoir imitez trop servilement ; c’est d’avoir voulu parler grec et latin avec des mots françois. […] La balustrade de bronze qui renferme cet autel, laquelle est composée d’anges qui se joüent dans des seps de vigne mêlez d’épis de bleds, est encore l’ouvrage d’un sculpteur françois. Les cinq meilleurs graveurs en taille douce que nous aïons vûs, étoient françois par leur naissance ou par leur éducation. […] On trouve des stances admirables dans les oeuvres de plusieurs poëtes françois qui ont écrit avant le temps que je marque, comme l’époque où commence la splendeur de la poësie françoise.

602. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Élève de la Sainte-Barbe-Delanneau, il suivit les classes du lycée Napoléon, et obtint en rhétorique, au concours général de 1812, le premier prix de discours français des nouveaux et un accessit en version grecque. […] Il s’essaya d’abord, non sans succès, dans les concours académiques : il eut un accessit à l’Académie française en 1815 pour une pièce de vers sur les Derniers Moments de Bayard, une mention en 1820 pour un Entretien sur l’Éloquence. […] que nous connaissons bien cette forme de l’érudition ou de la paresse française ! […] Magnin, qu’il avait peut-être fallu un peu enhardir et pousser d’abord, demeura ensuite fidèle aux impressions de cette forme de drame où l’imagination et la fantaisie jouaient un si grand rôle et s’accordaient plus d’exagérations en tous sens que la fibre française, hélas ! […] Magnin ; celui-ci, je le sais pour en avoir causé avec lui, ne se serait fait aucun scrupule et, bien au contraire, eût été très-flatté d’entrer à l’Académie française comme son ami Ampère, qui était aussi de l’Académie des inscriptions.

603. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

Garnier, architecte de l’Opéra, pour apprendre aux Français l’histoire de l’habitation humaine. […] Jusserand, un des Français qui connaissent le mieux l’Angleterre. […] L’observation hostile, ironique, railleuse des réalistes français nous dégoûta. […] Il faut souhaiter à l’armée française beaucoup d’officiers de cette trempe. […] C’est qu’il a trouvé son maître, son ami, l’idéal de tout Français : un bon officier.

604. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Dübner »

Au bas et au milieu, l’épitaphe est en français. […] Que d’ailleurs la grammaire grecque de Dübner soit plus ou moins applicable à nos classes, qu’elle remplisse ou non les conditions qu’exigent l’esprit et le cerveau français, que l’auteur ait rencontré ou non dans ses exposés l’expression juste, précise et claire, c’est-à-dire française, ou qu’il ait trop retenu du jargon scolastique, je n’ai qualité, ni compétence, ni goût, pour traiter de pareilles questions. […] Adert, je lui marquais que cette Grammaire de Dübner ne me paraissait en rien présentée de la façon qui la pouvait faire agréer du public français. […] L’Université française a bien des qualités, mais, à la prendre par le haut, elle a toujours manqué essentiellement de générosité.

605. (1874) Premiers lundis. Tome I « Alexandre Duval de l’Académie Française : Charles II, ou le Labyrinthe de Woodstock »

Duval ; maintenant en voici les effets désastreux : Comme les jeunes rédacteurs d’un journal scientifique et littéraire emploient beaucoup de talent et d’esprit à prouver que tous les ouvrages français n’ont pas le sens commun et à proposer pour modèles les étrangers, qui n’ont pas d’autre théâtre que le nôtre, il s’en est suivi : 1° que, de nos jours, tout vise à l’originalité, au bizarre ; que la vraisemblance et la raison sont bannies ; et que, à force de chercher la vérité, on arrive au trivial pour tomber bientôt dans l’absurde ; 2° que les jeunes gens, égarés par les prédicateurs des nouvelles doctrines, ne sachant plus quelle est la meilleure route, de celle qu’ont suivie nos pères ou de celle qu’on leur indique, se bornent, en attendant la solution du problème, à faire des tiers de vaudevilles, ou à mettre de petits articles dans les journaux littéraires ; et que notamment l’un d’entre eux, à force d’esprit et de savoir-faire, en est venu (ô scandale !) […] Il a pour but d’y montrer que le théâtre allemand se compose en grande partie de traductions françaises, et que le peu de compositions originales qu’on y représente sont médiocres ou absurdes. […] Duval, de l’Académie française. […] Cet intervalle de près de deux ans est marqué, dans l’œuvre du critique : 1° par la publication en 1828 de son premier livre, en prose, Tableau historique et critique de la Poésie française et du Théâtre français au xvie  siècle ; 2° en 1829, par l’apparition de son premier volume de vers, Vie, Poésies et Pensées de Joseph Delorme.

606. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « II »

Disons seulement que cette grande royauté française avait été si hautement nationale, que, le lendemain de sa chute, la nation a pu tenir sans elle. […] Le Français n’est ni un Gaulois, ni un Franc, ni un Burgonde. […] Avant la culture française, la culture allemande, la culture italienne, il y a la culture humaine. Voyez les grands hommes de la Renaissance ; ils n’étaient ni Français, ni Italiens, ni Allemands. […] Il n’y a plus de religion d’État ; on peut être Français, Anglais, Allemand, en étant catholique, protestant, israélite, en ne pratiquant aucun culte.

607. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre V. Chanteuses de salons et de cafés-concerts »

Ce parnassien se croit le premier des sonnettistes français. […] Après comme avant les Trophées, le premier des sonnettistes français, — et ce n’est pas un bien grand homme — s’appelle Maynard. […] La première est « un examen attentif des conditions les plus essentielles, fondamentales, de la poétique française ». […] Sully-Prudhomme s’efforce de démontrer que la prosodie parnassienne est la prosodie française absolue. […] La rigueur élégante des raisonnements du scolastique parnassien me charme aussi ; mais je ne puis les accepter que comme la métaphysique d’une école, non comme li théorie générale du vers français.

608. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre I : Une doctrine littéraire »

Nous n’avons donc pas à nous étonner ni à nous plaindre qu’un éminent critique, le seul qui nous ait donné une histoire complète de la littérature française, M.  […] La théorie littéraire que nous dégageons de l’Histoire de la littérature française de M.  […] La littérature française a ainsi passé à plusieurs reprises par certaines manies qui ont duré un jour, ont enchanté les ruelles ou les salons pendant une saison, et ont disparu chacune à son tour : le précieux, le galant, le grotesque, le pompeux, le pleureur, le voluptueux, le lugubre, l’imitation italienne, espagnole, anglaise, allemande, grecque, tous ces faux goûts ont successivement succombé ; mais à côté de ces fausses beautés il y en avait d’autres vraies, générales, durables, qui ont subsisté. […] C’est là un des caractères de l’esprit français ; tout s’y fait par coup d’État. […] Ce travail a été publié à propos de l’Histoire de la littérature française de M. 

609. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Louis Vian » pp. 373-387

Et enfin, dans ces derniers temps, nous avons eu Dupin, ce vieux soulier ferré de Dupin, extrait des crottes du Morvan, qui n’a jamais écrit une seule phrase de langue ou de sentiment français en toute sa vie, qui fut longue ! […] Il fit du vieux jardin français de la Brède un parc anglais, dressa sa généalogie, — occupation anglaise !  […] Il était le caméléon des pays qu’il parcourait, il se teignait d’eux ; ce qui n’est pas français, du reste. Le Français voudrait que l’univers tout entier fût son caméléon. […] Il y parle du xviiie  siècle, et il ne salue pas jusqu’à terre ce gros ventre de Messaline, plein de l’enfant de tout le monde qui va sortir tout à l’heure, et qui sera la Révolution française !

610. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IV. M. Henri Martin. Histoire de France » pp. 97-110

Elle fut, en ce qui nous concerne, nous Français, un jour franque et romaine avec l’abbé Dubos, un autre jour féodale avec Boulainvilliers. […] Martin l’admet très positivement en histoire et jusqu’à vouloir retrouver l’influence celtique là où elle est le moins, emportée qu’elle fut et perdue dans l’énergique torrent de la circulation chrétienne et française ! […] Il ajoute encore : « Il n’est plus permis de douter que l’idéal de la chevalerie ne soit tout celtique », et il finit par assurer « que les tendances de l’esprit celtique se retrouvent dans les manifestations de l’esprit français », conclusion qui embrasse tout et qui ne va à rien moins qu’à la plus insolente négation, et la plus hypocrite, de tous les mérites chrétiens du Moyen Âge, le temps le plus détesté par les philosophes, parce qu’il est le plus catholique de tous les temps, de ce Moyen Âge auquel on essaie de voler sa gloire, quand il est impossible de la nier ! […] Le savant critique de cet historien examine et ruine le seul argument sur lequel la thèse gauloise s’appuie, et qui est tiré (par les cheveux) de ces chansons galloises qui furent traduites et remaniées en français du temps, au douzième siècle. […] Martin une cocarde, — une branche de chêne, qui sera, je crois, tout son laurier, mais que la gaîté française saluera toujours !

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