Il l’avait longtemps savourée, et, puisqu’il la publiait enfin, nous étions en droit de nous attendre à quelque chose de hardi et de distingué, par son audace même, de toutes les autres hardiesses auxquelles l’auteur nous avait accoutumés. […] Être la maîtresse reconnue d’un roi corrompu, qui donna fastueusement à toutes les familles d’un pays l’exemple honoré de l’adultère, voilà un de ces crimes irréductibles pour lequel on n’a pas le droit de réclamer les circonstances atténuantes devant l’histoire : car rien ne saurait atténuer, pas même la passion, que n’eut d’ailleurs jamais Mme Du Barry pour Louis XV, le crime de l’adultère public et royal. […] Capefigue a signalés contre elle, subsiste toujours cet adultère royal, certain, authentique, ineffaçable, qui suffirait seul pour interdire jusqu’à l’idée d’une réhabilitation à tout esprit droit. […] Capefigue de la voix qu’on a quand on chante dans la nuit, trappistes de théâtre, puritains de spéculation et de Bourse, avons-nous bien le droit, au milieu de nos Thébaïdes de plaisir, de nous montrer si impitoyables pour le siècle de nos aïeux ? […] Cela seul suffirait pour qu’elle eût droit, comme concubine adultère d’un roi, à tout le mépris de l’histoire, et comme victime parmi les trente mille victimes (plus ou moins peut-être) que la Révolution égorgea, à son trente millième de pitié !
Laquelle de ses œuvres lui en donnerait le droit ? […] Sur le visage presque imberbe, toutes les lignes sont fermes et précises comme sur un bronze ciselé avec insistance ; la peau recouvre d’une pâleur fauve des muscles secs, accoutumés à se manifester par un frémissement sauvage dans le désir ou dans la colère ; le nez droit et rigide, le menton osseux et étroit, les lèvres sinueuses, mais énergiquement serrées, exprimant la volonté téméraire ; et le regard est pareil ù une belle épée, dans l’ombre d’une chevelure épaisse, lourde et presque violette comme les grappes de raisin embrasées par le soleil sur le sarment le plus vivace. […] Devenue comtesse de Nièvres, Madeleine part pour Paris, où Dominique, de son côté, va faire de vagues études de droit. […] Non, vraiment, vous n’aviez pas le droit, vous autres de la génération de 1862, de parler de livres ennuyeux. […] Mais n’a-t-on pas le droit de l’être ?
Il n’avait que neuf ans, il n’entra de fait à la Chambre des pairs qu’en 1835 avec le droit d’y parler, mais non point d’y voter encore. Ce ne fut qu’en 1840, à trente ans, qu’il acquit ce droit. […] Il étouffait et se sentait déplacé dans « cette citadelle du droit divin », comme il appelle l’Hôtel des Pages.
elle a le droit de la pleurer ! Mme Le Normand, en sa qualité de chef de cabinet de sa tante, dont le salon fut un ministère, — le ministère de l’esprit non public, mais particulier, — Mme Le Normand a bien le droit de mélancoliser sur la décadence des salons et de la causerie. […] Pas plus souvent dans les salons qu’ailleurs vous ne trouvez la supériorité réelle, et y régnant en vertu de son droit éternel.
Et, d’ailleurs, la France a le droit d’être tout ce qu’elle veut, comme les femmes qu’on aime et qui savent qu’avec un mot ou un sourire elles peuvent toujours tout effacer ! […] Elle n’a plus le droit d’exister. […] Seulement, à côté de l’œuvre pratique, qui ne donne que le droit d’un pressentiment, c’est-à-dire pourtant de bien plus que d’une espérance, nous avons une réalité, et une réalité conditionnée, celle-là !
Il s’est pris d’admiration pour Milton, à part de son siècle et aussi à part des théories du nôtre, et de cela — de ces deux à-partés — il est sorti un livre droit et simple, grave et renseigné, très heureusement pensé par places, et partout écrit avec une ampleur un peu traînante et un peu lourde, mais de cette lourdeur, que je ne crains pas, qui tient à l’étoffé du style et que l’on pourrait comparer à celle d’une draperie de velours. […] Mais le Titan poétique était si fort en lui, qu’au moment même où l’on pouvait le plus le croire écrasé, il se leva tout droit et tout grand en rejetant ces affreuses montagnes qu’il avait empilées sur sa tête, et il apparut à l’Angleterre la fleur magnifiquement épanouie du Paradis perdu à la main ! […] À côté des pédants de la Critique, il y a les pédants de la Politique, — une race nouvelle, — il y a les caporaux de la Démocratie, qui donnent, depuis quelque temps, le mot d’ordre contre la Poésie, qui lui refusent le droit d’exister, à cette sublime fille de la tête humaine, et qui la traitent comme une amusette de peuple enfant, comme un polichinelle cassé.
Il ne sera pas mis non plus parmi ces grands hommes d’état nés pour être conquérants et législateurs, puissants par leur génie, grands par leur propre force, qui ont créé leur siècle et leur nation, sans rien devoir ni à leur nation ni à leur siècle : cette classe des souverains n’est guère plus nombreuse que la première ; mais il en est une troisième qui a droit aussi à la renommée : ce sont ceux qui, placés par la nature dans une époque où leur nation était capable de grandes choses, ont su profiter des circonstances sans les faire naître ; ceux qui avec des défauts ont déployé néanmoins un esprit ferme et toute la vigueur du gouvernement, qui, suppléant par le caractère au génie, ont su rassembler autour d’eux les forces de leur siècle et les diriger, ce qui est une autre espèce de génie pour les rois ; ceux qui, désirant d’être utiles, mais prenant l’éclat pour la grandeur, et quelquefois la gloire d’un seul pour l’utilité de tous, ont cependant donné un grand mouvement aux choses et aux hommes, et laissé après eux une trace forte et profonde. […] Il sut, comme Auguste, employer les talents qu’il n’avait pas, et faire servir les grands hommes à sa renommée ; mais il fallait qu’Octave se servît de ses égaux pour sa grandeur, et leur persuadât qu’il avait droit à leurs victoires, quoiqu’il ne tînt ce droit que de leurs victoires même ; tandis que Louis XIV, armé de la souveraineté, commandait à des hommes qui lui étaient soumis, etc.
Ceux-là vont tout droit se poser sur un objet qui les attire. […] De là à l’idée que tous avaient une égale valeur en tant qu’hommes, et que la communauté d’essence leur conférait les mêmes droits fondamentaux, il n’y avait qu’un pas. […] Il eût fallu condamner l’esclavage, renoncer à l’idée grecque que les étrangers, étant des barbares, ne pouvaient revendiquer aucun droit. […] On dit couramment que l’individu a droit à toute liberté qui ne lèse pas la liberté d’autrui. […] Elle ira tout droit aux solutions égoïstes.
Gacon, qui se présentait en homme droit et éclairé, remettait le couple imparfait à la raison : Messieurs, que l’ignorant vulgaire Met plus haut qu’Ésope et qu’Homère, Vous n’approchez de ces héros Que par les yeux et par le dos. […] Je déclare donc ici que tout homme qui voudra m’offenser n’y réussira pas en attaquant ma figure ; il y a longtemps que je l’ai abandonnée à son mauvais sort ; il y a longtemps que ses querelles ne sont plus les miennes : mais comme je ne connais point M. l’abbé Couture, que je n’ai pu par conséquent lui faire cette déclaration, il n’a pas dû croire qu’il fût de mon goût que cette liberté devînt le droit de Gacon même. […] C’est là que parurent successivement sa Dissertation sur les langues en général, et sur la langue française en particulier, en tête du numéro de mars 1717 ; ses Réflexions sur l’éloquence, en tête du numéro de mai 1718 ; son Nouveau Système d’éducation, en tête du numéro de juillet, même année : notre auteur, toutes les fois qu’il y écrit, a de droit la place d’honneur dans le Mercure. […] Ami de la propriété des termes, de l’ordre logique et direct dans le langage, il se disait que l’esprit n’a ses coudées franches et son juste instrument que dans la prose ; « qu’elle seule a droit sur tous genres d’ouvrages indistinctement ; qu'elle a seule l’usage libre de toutes les richesses de l’esprit ; que, n’étant asservie à aucun joug, elle ne trouve jamais d’obstacles à exprimer ce que le génie lui présente ; qu’elle n’est jamais forcée de rejeter les expressions propres et les tours uniques que demandent les idées successives et les sentiments variés que ses sujets embrassent. » Mais, avec les vers, il faut toujours faire quelque concession, quelque sacrifice, tantôt pour la clarté, tantôt pour l’élégance, ces deux qualités dont la prose est toujours comptable : « Quand une pensée se trouve, à quelque chose près, aussi bien exprimée en vers qu’elle pourrait l’être en prose, on applaudit au succès du poète, on lui voue son indulgence, on lui permet de grimacer de temps à autre ; les expressions impropres sont chez lui de légères fautes ; les constructions inusitées deviennent ses privilèges. » Et il en citait des exemples jusque dans Boileau. […] C’est en ce sens qu’on a le droit de l’appeler un idéologue.
Un des insignes bonheurs de Henri IV fut (et je parle toujours d’après des contemporains), que Henri III, un peu avant de mourir et depuis son attentat de Blois, dans l’extrémité où il se vit réduit par la révolte des principales villes, eut besoin de lui, fut contraint, au vu et su de toute la France, de capituler avec lui, de le rappeler à son service, d’en faire son bras droit et son chef d’avant-garde. […] Laissons-les se répondre les uns aux autres, et tenons le droit chemin. […] Quand les bonnes gens faisaient les noces de leurs enfants, c’était un plaisir d’en voir l’appareil ; car, outre les beaux habits de l’épousée, qui n’étaient pas moins que d’une robe rouge et d’une coiffure en broderie de faux clinquant et de perles de verre, les parents étaient vêtus de leurs robes bleues bien plissées, qu’ils tiraient de leurs coffres parfumés de lavande, de roses sèches et de romarin ; je dis les hommes aussi bien que les femmes, car c’est ainsi qu’ils appelaient le manteau froncé qu’ils mettaient sur leurs épaules, ayant un collet haut et droit comme celui du manteau de quelques religieux ; et les paysannes, proprement coiffées, y paraissaient avec leurs corps de cotte de deux couleurs. […] Si la France s’était assise et établie sous Henri IV et sur les bases de la société d’alors, si elle y avait acquis son ciment qui l’eût fixée sous la forme qu’elle semblait affectionner de 1600 à 1610, l’élément prédominant, je l’ai dit, eût été le gentilhomme rural, disséminé dans le pays, le cultivant, mais aussi le possédant ; prenant volontiers la charrue après l’épée, mais ayant aussi seul le droit de porter l’épée, ayant le droit de justice sur le paysan, etc.
Il y avait là un premier droit divin qui n’est pas sans doute tout à fait celui qu’on professait sous Louis XIV, qui n’a pas été transmis à la monarchie de saint Louis sans interruption, que la féodalité a coupé à plus d’un endroit, et qui a dû se retremper, dans l’intervalle, à l’onction romaine ; mais enfin c’était un droit divin très-profond, très-vénéré, qui impliquait l’hérédité, sinon par ordre de primogéniture, du moins par égal partage entre tous les fils ; qui constituait la qualité de prince du sang comme quelque chose de très à part et d’inamissible ; qui excluait toute aristocratie dominante et proportionnait le rang des chefs au degré dans lequel ils approchaient le roi. […] L’auteur va plus loin : il fait descendre sur cette race mérovingienne et sur son droit inné une sorte de mysticisme demi-asiatique, demi-scandinave, et il en personnifie le résultat idéal dans la figure de Brunehaut. […] Autrefois (selon la théorie que j’expose) il n’y avait pas d’élection de la part des leudes, il n’y avait qu’acclamation, reconnaissance, adhésion, une pure cérémonie : ici le choix formel se déclare et crée le droit qui ne découle plus du sang. Mais ce droit qui naît, qui se fabrique à vue d’œil, qui tire toute sa force de l’utilité et de la fonction, est faible à d’autres égards : il a besoin de consécration et de complément religieux.
Il se croit les droits de la Providence parce qu’il a un sentiment et un plan dans son imagination. […] Il tombe enfin dans sa première lutte contre la terreur, parce qu’il n’a pas conquis, en lui résistant dès le commencement, le droit et la force de la dompter. […] Un historien n’a pas le droit de jeter ainsi son manteau sur les nudités hideuses de son siècle et de dire : « Tout est bien », quand le bien et le mal sont là sous ses yeux, demandant chacun qu’on lui fasse sur la terre la part que Dieu lui-même lui doit dans sa rétribution divine. […] C’est un enseignement propre à fausser le jugement de ce peuple et non à le moraliser ; c’est un mensonge à la postérité, qui a droit à aimer ou à abhorrer selon les œuvres ; c’est une offense à Dieu, dont vous faites mentir la justice dans votre bouche ; c’est un crime contre la conscience, dont vous étouffez la voix par un chant de triomphe, au lieu de lui livrer les justes à récompenser, les criminels à punir. […] Cette page, écrite dans un de ces moments d’enthousiasme plus poétique qu’historique où l’on s’élève si haut dans l’espace qu’on cesse de voir les sinistres détails d’un événement pour n’en considérer que l’ensemble (et l’homme à faible vue n’a pas le droit de s’élever ainsi jusqu’à ce point où l’on ne distingue plus que les résultats dans un désintéressement soi-disant sublime, mais en réalité coupable, du crime ou de la vertu), cette page, dis-je, est une des deux grandes fautes involontaires que j’aie à me reprocher dans ma carrière d’écrivain.
Budé avait vingt-quatre ans, il avait terminé son droit, quand, vers 1491 ou 1492, il reprit les auteurs latins, surtout les poètes, et commença de les comprendre ; Erasme avait près de trente ans, en 1496, quand il s’enferma comme boursier au collège Montaigu. […] Budé avait renouvelé le droit en 1508 par ses notes sur les Pandectes ; son traité des Monnaies et Mesures anciennes (1544) tournait l’humanisme vers l’exacte érudition. […] Mais à la Renaissance religieuse, à la Réforme, il faut rendre les inquiétudes morales, la revendication pour le fidèle du droit d’interpréter l’Écriture, et certain effort sensible pour ramener vers le doux Rédempteur et le Père incompréhensible le culte un peu trop détourné au moyen âge sur l’humanité plus prochaine de la Vierge. […] Amadis ravit François Ier, le roi chevalier, et toute cette brave noblesse des guerres d’Italie, qui se reconnaissait bien lorsqu’elle lisait comment, les chefs discutant s’il fallait donner bataille à un ennemi supérieur en nombre, « Agraies donna des éperons à son cheval, criant à haute voix : Maudit soit qui plus tardera, voilà ceux contre qui il faut débattre, non pas entre nous ; et ce disant piqua droit aux ennemis ». […] Biographie : Mellin de Saint-Gelais (1487-1558), fils du poète Octovian de Saint-Gelais, évêque d’Angoulème, fut très bien instruit en langues, sciences, armes, arts libéraux, étudia le droit aux universités de Poitiers, Bologne, Padoue, entra dans les ordres en 1524, et devint aumônier du dauphin.
— Je prétends que les wagnéristes ont plus que le droit, mais le devoir, de demander ou de faire la lumière. […] Peut-être que tel illustre personnage disposant, à force d’argent, de la publicité du Figaro ou de quelque autre journal à grand tirage, affectera de suspecter la valeur des opinions émises par la Revue Wagnérienne… S’il y a pour de l’orgueil à revendiquer l’importance de la Revue Wagnérienne, ce péché d’orgueil, je l’admets ; et, dans cette première et (je l’espère) unique occasion, je demande la permission de réclamer tous les droits que je crois dûs à la Revue. […] Ce peu d’autorité qu’a pu acquérir la Revue, le droit qu’après ces deux ans et demi on m’accordera d’avoir et d’exprimer une opinion, la confiance personnelle que mes amis veulent bien me montrer, je demande aujourd’hui, en une très grave circonstance, d’y faire appel. […] Seulement, j’ai cru avoir acquis, sans ambages, le droit d’être indépendant. […] « Mon seul désir, en toute cette affaire, est d’obtenir la satisfaction à laquelle j’ai droit : celle d’entendre proclamer que je suis seul à supporter le poids de la responsabilité que j’ai assumée en montant Lohengrin, dans le but unique de servir la cause de l’art dans mon pays.
Il faut l’entendre là-dessus parler avec autorité et conviction : Les grands sujets de cette belle et solide instruction chrétienne, si bien indiqués par l’Église dans l’ordre annuel et la distribution des Évangiles ; ces sujets si importants, si féconds, si riches pour l’éloquence, et sans lesquels la morale, dépourvue de l’appui d’une sanction divine et déshéritée de l’autorité vengeresse d’un Juge suprême, n’est plus qu’une théorie idéale et un système purement arbitraire qu’on adopte ou qu’on rejette à son gré ; ces sujets magnifiques, dis-je, furent plus ou moins mis à l’écart par les orateurs chrétiens qui composèrent malheureusement avec ce mauvais goût, et qui, en s’égarant dans ces nouvelles régions, renoncèrent d’eux-mêmes aux plus grands avantages et aux droits les plus légitimes de leur ministère. […] Maury est-il de bonne foi, lui, homme du xviiie siècle, lorsque, dès les premiers mois de l’Assemblée (23 décembre 1789), il s’oppose à l’admissibilité des comédiens et des juifs aux droits de citoyens, les assimilant, dans son énumération, à l’exécuteur de la haute justice ? […] Je ne sais si Maury, malgré ses intrigues, avait cette finesse cauteleuse, prudente, et il était homme plutôt, j’imagine, à se diriger droit du côté de ses intérêts et de ses appétits. […] La conversation étant venue sur le chapitre des langues, sans se soucier de son interlocuteur qui en savait cinq et en déchiffrait deux autres, le cardinal Maury disait, en poussant toujours tout droit devant lui : Les langues sont la science des sots. […] Il n’abuse jamais du procédé de Diderot qui consiste à refaire à sa manière ce qu’il critique, mais il use à son tour du droit d’un maître en indiquant comment on aurait pu faire mieux.
Carrel dit quelque chose d’approchant de la seconde réalité, essentielle encore, selon lui, à toute constitution politique qui dérive de la Révolution bien comprise : ce second pouvoir, c’est une certaine aristocratie, qui tient de l’ancienne noblesse et qui se rapporte assez exactement à la classe des grands propriétaires : « Nous la transformerons en pairie, dit-il, et nous vivrons bien désormais avec elle. » Cet article, un peu enveloppé à cause du but, est d’ailleurs plein de sens et fait bon marché des doctrines abstraites ou mystiques en sens inverse, tant de celle du droit divin que de celle des disciples de Rousseau : Que si, croyant nous pousser à bout, vous nous demandez où réside enfin suivant nous la souveraineté, nous vous répondrons que ce mot n’a plus de sens ; que l’idée qu’il exprime a disparu par la Révolution comme tant de choses ; que nous ne voyons nulle utilité à la vouloir ressusciter ; que le peuple n’a plus besoin d’être souverain et se moque d’être ou non la source des pouvoirs politiques, pourvu qu’il soit représenté, qu’il vote l’impôt, qu’il ait la liberté individuelle, la presse, etc. ; enfin le pouvoir d’arrêter une administration dangereuse en lui refusant les subsides, c’est-à-dire l’existence même. […] Dans le numéro du 9 septembre, il décrivait la situation et exposait le nouveau droit constitutionnel de la royauté consentie ; il ne dénonçait ni ne prévoyait point de grave désaccord : Dans ces huit jours d’éternelle mémoire, le principe du progrès a vaincu le principe étouffant du retour au passé. […] Voici le point très net : ne point continuer la Chambre née avant les événements, ne point la proroger, mais la dissoudre franchement, et consulter l’opinion vive du pays ; obtenir de lui la même Chambre à très peu près peut-être, mais retrempée et munie d’un droit incontestable. […] … Pourquoi avons-nous eu jamais la folle pensée qu’on pût renverser, par des complots d’élèves en droit et de sous-lieutenants, un gouvernement appuyé sur les lois et sur la force d’inertie de trente millions d’hommes ? […] Quelques mots pourtant avertissent qu’il commence à songer au chef : Ce ne fut point une Chambre de Charles II ni de Jacques II, dit-il (26 septembre), qu’on appela à fonder la liberté sous Guillaume III… Guillaume III aussi était un homme politique, et il tint avant tout à ce qu’on ne pût mettre en question la légalité d’une assemblée qui devait parler au nom du droit de l’Angleterre, et faire une besogne à tout jamais respectée.
Elle ne lui avait nullement nié sa découverte ; mais elle n’entendait pas, comme c’était son droit, à elle, qu’il mêlât de la théologie à son enseignement. Ce qu’on a toujours oublié, ce qu’on oublie toujours encore dans cette question de Galilée, c’est qu’il prétendait être théologien de par les mathématiques et enseigner ce que les docteurs en droit canon, et encore sous le regard ouvert de l’Église, ont seuls le droit d’enseigner. […] quaker sans être chrétien, sans être le chrétien armé de la croix qui est le seul être ayant le droit de prêcher l’amour aux hommes et la puissance de s’en faire écouter, — Philarète Chasles, qui n’est point saint Paul, qui n’est pas saint Jean, pour nous répéter de nous aimer les uns les autres, mais un professeur de morale indépendante et d’instruction obligatoire attendri, ne voit plus la beauté, — cette entité par elle-même ! […] Je ne pèserai pas non plus sur Eugène Sue, pour Chasles, le romancier « de la haine », de l’exécrable haine qu’il faut supprimer, — et quoiqu’il y ait dans le socialiste Eugène Süe une philanthropie qui a bien le droit de dresser l’épaule à côté de la philanthropie, de Chasles.
Ce dernier devoir est d’autant plus indispensable, qu’on ne sauroit acquérir le droit de blâmer ce qui est mal, que par une égale disposition à louer ce qui est bien. […] La Littérature est une espece d’arene, où les combattans sont soumis au jugement de chaque Spectateur, qui a droit d’aller y combattre à son tour ; & personne ne doit s’y engager, s’il refuse de s’assujettir aux loix établies, dont la premiere est la liberté.
Ainsi Achille reçoit dans sa tente l’infortuné Priam, qui est venu seul pendant la nuit à travers le camp des Grecs, pour racheter le cadavre d’Hector ; il l’admet à sa table, et pour un mot que lui arrache le regret d’avoir perdu un si digne fils, Achille oublie les saintes lois de l’hospitalité, les droits d’une confiance généreuse, le respect dû à l’âge et au malheur ; et dans le transport d’une fureur aveugle, il menace le vieillard de lui arracher la vie. […] Usage barbare dont les nations se seraient constamment abstenues si l’on en croyait les auteurs qui ont écrit sur le droit des gens, et qui pourtant était alors pratiqué par ces Grecs auxquels on attribue la gloire d’avoir répandu la civilisation dans le monde.
L’apostrophe à la Vertu qui termine cette pièce a droit d’être placée parmi les plus beaux mouvements de poésie lyrique. […] Qui sait si le chevalier des Grieux ne se décide pas à devenir le complice de Manon pour perdre le droit de la mépriser ? […] Lâchement trahi par ses complices, il achète des gardiens de Manon le droit de la suivre, de lui parler, de pleurer avec elle. […] Prévost ne s’est pas attribué le droit de franchir les limites marquées par les besoins de son récit. […] Ce ne fut que dix ans après la mort d’Agnès qu’Ingeburge fut définitivement rétablie dans ses droits de reine.
On s’indigne lorsqu’on apprend qu’elle ne l’est pas suffisamment en droit. […] J’ai droit au bonheur. J’ai le droit de refaire ma vie. […] le Droit futur, toute une refonte de nos lois ? […] Il n’aurait droit qu’à une part de fondateur ; c’est à lui pourtant que reviennent tous les dividendes.
Comment donc, ces rhéteurs donnent au drame son droit de bourgeoisie ! […] De quel droit, et comment ? […] Et de quel droit cet Alceste a-t-il pris l’espèce humaine en horreur ? […] » Or ce comédien-là serait dans son droit. […] Va donc pour la nature, et cependant respectons l’art, il a ses droits et ne peut rien gâter.
Freeman, l’historien devrait tout savoir : philosophie, droit, finances, ethnographie, géographie, anthropologie, sciences naturelles, etc. ; un historien n’est-il pas exposé, en effet, à rencontrer dans l’étude du passé des questions de philosophie, de droit, de finances, etc. ? […] Ce pas décisif, il n’a le droit de le faire que pour de bonnes raisons. […] Droit privé et commerce. […] Leur contenu (règles du droit) ? […] On doit examiner les cas à partir desquels on veut généraliser et se demander : Quel droit a-t-on de généraliser ?
C’est la théorie du droit de la force, ou plutôt c’est la théorie de la force niant le droit et s’affirmant comme règle des choses. […] Si le droit est à la force, il est au nombre. […] Elle laissait dormir son droit. […] Dès qu’elle se sent comme force, du même coup elle a le droit. […] L’esprit de justice, c’est de respecter le droit d’autrui.
Ainsi, nous n’avons pas le droit d’accuser Dieu d’imprévoyance ou d’injustice. […] Les maîtres ont sur les esclaves non-seulement les droits d’une race d’êtres intelligents sur une race d’êtres stupides, mais encore les droits d’une race de justes sur une race de pécheurs. […] Il s’y installe, comme dans son royaume, par droit de nature et par droit de volonté. […] Aucun n’a le droit d’imposer à autrui son plaisir et sa nature ; aucun n’a le droit d’emprunter à autrui sa nature et son plaisir. […] Il regrette la pairie héréditaire, les majorats, le droit d’aînesse.
Pourquoi le droit est-il la science de l’équivoque ? […] Il semble donc plus commode de chercher et à la connaissance et à la morale et à la politique une base extérieure à l’homme, une révélation, un droit divin. […] Elle vaincrait encore une fois ses vainqueurs, et toujours de même, jusqu’au jour où elle n’aurait plus personne à vaincre et où, seule maîtresse, elle régnerait de plein droit. […] Celui qui a comparé savamment les faces diverses de l’humanité aurait seul le droit de faire cet appel à des opinions universelles. […] Car comment un esprit droit, appliqué sérieusement à son objet, verrait-il faux ?
Un pont jetté du côté droit au côté gauche de la scène, et coupant en deux toute la composition, laisse en devant un assez grand espace, et dans la profondeur du tableau, au loin, un beaucoup plus grand encore. […] Le côté droit étant éclairé par la lumière qui vient de dessous l’arcade, on pense bien que le côté gauche est tout entier dans la demi-teinte. […] Attenant à cette fabrique, une ouverture ou espèce de porte dont la fermeture faite de poutrelles assemblées à claire-voie, à demi ouverte, fait angle droit en devant avec le côté de la fabrique qui lui sert d’appui. […] Au côté droit de l’escalier, à sa partie supérieure, un obélisque ; au bas, sur le devant, deux hommes poussant un tronçon de colonne que quatre chevaux n’ébranleraient pas : absurdité palpable. […] Il y a au côté droit une forte fabrique de charpente à claire-voie ; c’est une espèce de fermeture commune à l’ écurie et à une partie du grenier à foin.
Est-ce un droit légal ? Non, c’est le droit du plus fort. En fait d’art, tous les autres droits comptent peu. […] Racine et Boileau avaient eu leur droit comme M. […] exercez votre droit !
On vint lui contester le droit, à lui sénateur, d’écrire dans un journal qui n’avait ni couleur ni attache gouvernementale. […] Sainte-Beuve, fort et convaincu d’un droit selon lui professionnel, et que tous les écrivains revendiqueraient avec lui, d’écrire dans un journal de son choix, fut tout étonné de l’avalanche de récriminations et de reproches dont il eut à se garer le lendemain de l’insertion de son premier article au Temps. […] Elle fait aujourd’hui partie de ses Mémoires, et je considère comme un devoir de la reproduire ici : il a été trop attaqué dans le moment même pour n’avoir pas un jour le droit de répondre et de se défendre à haute et intelligible voix, fût-ce après sa mort : « Depuis quelques jours, des démarches pressantes ont été faites auprès de M. […] Le Sénat n’est pas apparemment, comme l’ordre des avocats, soumis à un conseil de discipline, et nul n’a droit de demander compte à un sénateur de ses actions, — surtout d’actions aussi étrangères à la politique active.
Le monde ne souffre pas la passion, et en cela il est dans son droit. […] La maîtresse de maison a toujours droit de dire à un homme que son émotion contenue réduit au silence : « Monsieur un tel, vous n’êtes pas aimable aujourd’hui ». […] Mme de Tourzel a réclamé sa place dans la voiture, et elle y avait droit, comme gouvernante des Enfants de France. […] M. de Montlosier, à l’Assemblée constituante, est presque le seul qui sache le droit féodal.
Mais je crois la Charte suffisante pour donner à la Chambre l’occasion et le droit de s’expliquer, et, si je crains qu’elle soit attaquée un jour par le ministre, je ne crains pas moins qu’elle ne soit violée par un coup d’État parlementaire. Or, déclarer au roi, dans une adresse, que ses ministres ne sont pas ceux de l’Assemblée et qu’on repoussera tout ce qui viendra d’eux, c’est, selon moi, dépasser les droits de l’Assemblée et nommer, en réalité, les ministres. […] Royer-Collard ne trouva pas de bonnes raisons pour défendre l’adresse, et me parut un homme qui avait voulu conserver sa popularité à un prix trop dangereux et flatter les 221 au-delà de leur droit. […] Sieyès, devenu célèbre par une brochure radicale au commencement des États généraux, avait été du premier bond au fond de la question, et, prenant uniquement pour logique le droit et l’intérêt du grand nombre, avait conclu dans son titre même : Qu’est-ce que le tiers état ?
L’enfantement de la société moderne, de l’égalité civile, du respect des droits de tous, s’y opérait péniblement à travers des scènes barbares et au moyen du fanatisme même. Seule et sans conseil, aux prises avec les seigneurs et avec la noblesse comme avaient été ses aïeux, Marie Stuart, prompte, mobile, sujette à ses prédilections ou à ses antipathies, était déjà insuffisante : qu’était-ce donc lorsqu’elle se trouvait de plus en face d’un parti religieux, né et grandi durant les années récentes, en face d’un parti « raisonneur et sombre, moral et audacieux », discutant rationnellement et la Bible en main le droit des rois, et poussant la logique sous la prière ? […] Captive, ne l’accusez pas de conspirer contre Élisabeth ; car, dans ses idées de droit divin et de royauté absolue, de souveraine à souveraine, l’une des deux fût-elle prisonnière de l’autre, ce n’est pas conspirer que de chercher le triomphe de sa cause, c’est simplement poursuivre la guerre. […] et déjà blanchie avant l’âge ; quand on l’entend, dans la plus longue et la plus remarquable de ses lettres à Élisabeth (8 novembre 1582), lui redire pour la vingtième fois : « Votre prison, sans aucun droit et juste fondement, a jà détruit mon corps, duquel vous aurez bientôt la fin s’il y continue guère davantage, et n’auront mes ennemis beaucoup de temps pour assouvir leur cruauté sur moi : il ne me reste que l’âme, laquelle il n’est en votre puissance de captiver » ; quand on a entendu ce mélange de fierté et de plainte, la pitié pour elle l’emporte, le cœur a parlé ; ce doux charme dont elle était douée, et qui agissait sur tous ceux qui l’approchaient, reprend le dessus et opère sur nous à distance.
En envisageant ces événements de 1830, le sentiment de sa destinée et de son droit se réveillait en lui comme malgré lui-même. Le droit de la branche aînée, il l’admettait encore ; il reconnaissait jusqu’à un certain point cette légitimité antique et antérieure : mais, à leur défaut, pourquoi d’autres ? « C’est moi qui suis le plus légitime et qui ai le droit », pensait-il. […] qu’ils aillent dans la Terre sainte, s’écrie-t-il encore, qu’ils entrent à Jérusalem, même avec une foi douteuse, ceux-là qui sont avides de nouvelles émotions ; pour peu que leur imagination soit vive, et leur cœur droit et sincère, elles arriveront en foule à leur âme.
Du point de vue idéaliste, je n’avais pas le droit d’attribuer à ces mouvements internes la mystérieuse puissance de se doubler de la représentation des choses extérieures, car ils tenaient tout entiers dans ce qui en était représenté, et puisque, par hypothèse, on se les représentait comme des mouvements de certains atomes du cerveau, ils étaient mouvements d’atomes du cerveau et rien autre chose. […] Un idéaliste a le droit de déclarer isolable l’objet qui lui donne une représentation isolée, puisque l’objet ne se distingue pas pour lui de la représentation. […] Vous ne le conservez que parce que vous passez subrepticement au système de notation idéaliste, où l’on pose comme isolable en droit ce qui est isolé dans la représentation. […] Comme si l’on avait le droit d’étendre au détail des parties, rapportées chacune à chacune, ce qui n’a été observé ou inféré que des deux touts, et de convertir ainsi un rapport de solidarité en une relation d’équivalent à équivalent !