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1345. (1860) Cours familier de littérature. X « LIXe entretien. La littérature diplomatique. Le prince de Talleyrand. — État actuel de l’Europe » pp. 289-399

La diplomatie du vieux monde a fini son ère le jour où la révolution française a commencé la sienne. […] La diplomatie féodale, matérielle ou domestique disparaît : la diplomatie intellectuelle commence. VII C’est donc là aussi que nous devons commencer. […] Cette apparente dérision des événements doit commencer par l’abdication de soi-même ; car, pour affecter et pour soutenir ce rôle d’impartialité avec toutes les fortunes, il faut que l’homme écarte les deux choses qui font la dignité du caractère et la sainteté de l’intelligence : la fidélité à ses attachements et la sincérité de ses convictions, c’est-à-dire la meilleure part de son cœur et la meilleure part de son esprit. […] XLV Après le second retour des Bourbons, l’œuvre de la diplomatie était accomplie ; l’œuvre de l’homme d’État, dans un pays libre et déchiré par les partis en lutte, commençait.

1346. (1864) Cours familier de littérature. XVII « Ce entretien. Benvenuto Cellini (2e partie) » pp. 233-311

Benvenuto Cellini (2e partie) I Ce mécontentement et sa renommée croissante commencèrent à tourner ses yeux vers la France. […] Je commençai par le bassin d’argent que j’avais promis en France au cardinal, et que je retrouvai ébauché ; car l’aiguière m’avait été volée, avec quantité d’autres objets précieux. […] Je reçus l’argent qu’il me fallait pour mes statues, et je commençai par celle de Jupiter, qui était déjà assez avancée lorsque le roi revint à Paris. […] « Deux jours après, lorsque mon ouvrage fut bien refroidi, je commençai à le découvrir peu à peu. […] « Je commençai donc, dit-il, à mettre ma statue en état d’être montrée ; et, comme il me manquait un peu d’or et certaines choses pour la perfectionner, je murmurais, je me plaignais, je maudissais le jour où j’avais quitté la France et son grand roi ; et je ne prévoyais pas encore tout ce qui me devait arriver avec un prince qui me laissait travailler pour lui, aux dépens de ma propre bourse.

1347. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

C’est à peine si dans la prairie quelques places çà et là commençaient à verdir ; aux arbres du parc, rameaux et bourgeons étaient encore bruns ; cependant le cri du pinson et le chant du merle et de la grive, qui résonnaient de temps en temps, annonçaient l’approche du printemps. […] Goethe tourna ses regards vers les nuages, les promena sur la verdure naissante qui, partout autour de nous, des deux côtés du chemin, dans la prairie, dans les buissons, aux haies, commençait à bourgeonner, puis il dit : « Une chaude pluie d’orage, comme cette soirée nous la promet, et nous allons revoir apparaître le printemps dans toute sa splendeur et sa prodigalité !  […] Nous célébrerons cet automne le cinquantième anniversaire du jour où il a commencé à gouverner et à être le maître. […] Commencez adroitement par les écoles, et vous réussirez. […] Lorsqu’il sent enfin sa cime dans l’air libre, il s’arrête content, et puis commence à s’étendre en largeur pour former une couronne.

1348. (1893) Du sens religieux de la poésie pp. -104

Si nous essayons de nous élever plus haut pour élargir le sens de ces syllabes : notion divine, au risque de les laisser flotter dans un peu d’incertitude, nous dirons, selon la parole miraculeuse de Goethe : « L’homme est le premier entretien de la nature avec Dieu », le point du monde où Dieu commence à prendre conscience de soi. […] Un siècle suffit aux plus graves changements, commence par le sentiment, finit par la pensée ; un autre appartient à l’idée seule. […] Les poètes savants commencent à parler. […] L’idée de patrie commence à chanceler ; le xxe  siècle la reléguera parmi les préjugés caducs. […] Quoi de plus irrationnel, par exemple, que de commencer par éblouir l’âme des enfants de notions purement abstraites ?

1349. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Huysmans Avant de commencer la série des analyses et traductions, la Revue wagnérienne publie, aujourd’hui, une étude générale sur les œuvres théoriques, si considérables, de Richard Wagner. […] C’est en ce traité que commence, vraiment, l’exposition dogmatique du système de Richard Wagner9. […] Donner sur une scène française — ou, tout au moins, sur une scène de langue française — une des œuvres les plus hardies et les plus originales du hardi novateur ; la monter avec un soin jaloux des moindres détails de la mise en scène et de l’interprétation vivante ; commencer à mettre les chanteurs français, enclins à parader dans le style italien, aux prises avec la musique d’action ; obliger les chœurs à prendre part à la comédie, à y jouer franchement un rôle : ce n’est pas seulement plaire aux connaisseurs désintéressés, c’est aussi hâter l’avènement d’un art de sincérité, de liberté, d’émotion et de logique. […] Nous connaissons jusqu’à quatre personnes qui ont éprouvé de sérieuses indigestions pour être allées entendre les Maîtres Chanteurs : le dîner avalé à la hâte parce qu’on ne veut pas manquer l’ouverture qui commence à sept heures précises, l’attention soutenue donnée à une musique compliquée et énervante, tout cela avait arrêté net chez elles les fonctions digestives. […] Angleterre. — Le mois passé n’a offert que peu d’événements ; mais maintenant que la saison va bientôt commencer à Londres, nous pouvons attendre, certainement, plus d’activité parmi les musiciens.

1350. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

Les vieillards y sont galants, polis et civils ; les jeunes gens y sont durs, féroces, affranchis de toute politesse, et parfaitement délivrés des belles passions, à l’heure ordinaire où les jeunes gens commencent à savoir ce que c’est que l’amour. […] ils commençaient, comme leurs pères n’eussent pas osé finir ! […] Les uns et les autres, ils se sont tous perdus, en mille papotages ingénieux, philosophiques, politiques et littéraires, et ils commençaient à comprendre le danger, lorsque la révolution française est venue interrompre brusquement cette aimable causerie. […] Tout à coup, au milieu de la conversation commencée, on annonce mademoiselle Mars ! […] La fille du comédien avait abrité son berceau à l’ombre du berceau de la princesse royale… Bientôt l’orage était venu qui avait jeté dans ces prisons du Temple, le roi, la reine et la princesse de Versailles, pendant que la petite Monvel, qui était leur pensionnaire, commençait sa douce vie par des chansons.

1351. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Granier de Cassagnac » pp. 277-345

Le premier, qui commence à l’horrible inventaire de la succession que le Directoire a ramassée, est, avant tout, un large tableau de la France ainsi que la Mort l’avait faite, eût dit Bossuet, qui ne se doutait pas que la Mort aurait bientôt une sœur en France qui lui contesterait son droit d’aînesse, — la Révolution ! […] Quand une fois il nous a montré toutes les plaies dont elle était morte, l’historien nous met au courant de cette Constitution de l’an III, qui régnera jusqu’au moment où commencera de souffler ce vent que l’on n’apaisera plus et qui doit emporter toutes les constitutions, les unes après les autres ; puis il nous frappe en effigie ces têtes molles qui répugnent à la ferme précision des médailles, ces traits brouillés de sang, blafards de peur, des maîtres nouveaux de la France : Barras, La Révellière-Lépeaux, Rewbell, Le Tourneur et Carnot. […] Il y a l’entente bien plus profonde du grand homme qui commence à poindre, et dont Μ. de Cassagnac a très bien saisi et rendu le trait caractéristique, à ce moment de son action. […] L’historien de la Chute de Louis-Philippe, la Révolution de 1848 et le rétablissement de l’Empire, continue cette exécution qu’il avait commencée dans son livre des Causes de la Révolution française. […] Ainsi, il l’est quand il nous raconte, avec un renseignement si précis et une phrase si nette, les irruptions diverses de cette glorieuse race gauloise, qui semble glorieuse de toute éternité, car on ne sait pas où elle a commencé dans les annales humaines, et qui, par l’étendue et la rapidité de ses invasions, a une espèce d’ubiquité dans l’histoire.

1352. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Les bourgeois eux-mêmes, ces pourceaux augustes, commencent à ne plus vouloir de cette ordure pour leur dessert. […] Je me disais que c’était bien là le sale peuple d’esclaves que toute l’Europe commence à mépriser. […] Je commençais à furieusement m’avachir dans la lecture des Zola, des Ramollot et des Catulle Mendès. […] Aussitôt qu’on commence à étudier cette histoire, le fameux secret se trouve inondé de lumière. […] Quelques artistes commencent, il est vrai, à l’apercevoir un peu, Dieu sait avec quels sentiments !

1353. (1889) Ægri somnia : pensées et caractères

Les autres ont l’air grave de gens qui commencent à se recueillir. […] Pour faire vivre une constitution sur notre sol si remuant, il faudrait commencer par y planter et par y acclimater le goût d’obéir à la loi. […] Il commença par me faire de la part de l’historien des compliments dont je me réservai d’apprécier la sincérité d’après ce qu’il allait y ajouter. […] Où je commence à compatir aux tribulations des juges, c’est quand ils en viennent à la comparaison des titres. […] Tout cela était dit avec tant de candeur, en termes si délicats, que je commençai à réfléchir à l’inconvénient des engagements précipités.

1354. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

Dans la seconde enfance commencent d’apparaître les tendances individuelles, dont la diversité impose une diversion appropriée de méthodes et de moyens d’action. […] Il commençait de parler, sans gestes, d’une voix plutôt monotone, qui ne se permettait aucun éclat, aucun soulignement. […] La cathédrale fut commencée au début du onzième siècle. […] Ses architectes et ses sculpteurs avaient déjà commencé aux temps de ses triomphes, puis de ses revers, à lui préparer cette revanche. […] En était-il de même quand Octave Feuillet commençait d’écrire, aux environs de 1850 ?

1355. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Le public n’y a rien compris, il commence à laisser tout ce pathos aux poètes et aux natures d’élite. […] comme je pleure l’âne de mon grand-oncle qui mourut subitement quand il commençait à s’habituer à ce régime, pleurez le théâtre ! […] Les réalistes commencent déjà à lancer convenablement une boule et à lui faire décrire à volonté quelques courbes redoutables. […] Millaud est une araignée qui commence à tendre une toile effrayante. […] Étienne Eggis, un des plus comiques romantiques de Mardi-Gras qui aient pris la défroque de 1830, commence à avoir des remords de tous les crimes qu’il a commis.

1356. (1932) Les idées politiques de la France

De sorte que la vraie gauche parlementaire commence à la limite exacte où, pour que l’électeur croie qu’on en est, il devient inutile de lui conter qu’on en est. […] Et une nouvelle phase du spirituel républicain commença, le passage dans d’autres signes du zodiaque : aujourd’hui la constellation de l’École Unique ! […] C’est par la loi de séparation, dont il fut le rapporteur, que Briand commença à devenir un homme consulaire. […] La timide figure qu’elles font aujourd’hui dans tous les Parlements, à commencer par le nôtre, révèle leur état de santé. […] Et Maurras a commencé ses Trois Idées Politiques en exorcisant ce démon.

1357. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Machiavel I Faisons cette fois comme Plutarque, et commençons par la fin. […] « Je commençais sur cela à faire le diable et à m’en prendre au charretier qui s’en était allé emportant mes bûches sans les payer, comme un voleur, lorsque Machiavel, mon parent, entra et nous remit d’accord. […] XII Machiavel commençait à rentrer en grâce auprès des Médicis quand Léon X mourut. […] XXI Machiavel commence par jeter un coup d’œil magistral sur la décomposition du cadavre de l’Italie romaine sous les flux et les reflux des populations hétérogènes qui descendent des Alpes d’un côté, et qui descendent de l’Afrique de l’autre, pour dépecer, comme les vautours de la guerre, les restes de l’empire des Césars et pour en occuper les territoires.

1358. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

On est tenté de croire que Jean, dans sa vieillesse, ayant lu les récits évangéliques qui circulaient, d’une part, y remarqua diverses inexactitudes 43, de l’autre, fut froissé de voir qu’on ne lui accordait pas dans l’histoire du Christ une assez grande place ; qu’alors il commença à dicter une foule de choses qu’il savait mieux que les autres, avec l’intention de montrer que, dans beaucoup de cas où on ne parlait que de Pierre, il avait figuré avec et avant lui 44. […] Un nouvel esprit a soufflé ; la gnose est déjà commencée ; l’ère galiléenne du royaume de Dieu est finie ; l’espérance de la prochaine venue du Christ s’éloigne ; on entre dans les aridités de la métaphysique, dans les ténèbres du dogme abstrait. […] La légende d’Alexandre était éclose avant que la génération de ses compagnons d’armes fût éteinte ; celle de saint François d’Assise commença de son vivant. […] Il n’y a pas grand abus d’hypothèse à supposer qu’un fondateur religieux commence par se rattacher aux aphorismes moraux qui sont déjà en circulation de son temps et aux pratiques qui ont de la vogue ; que, plus mûr et entré en pleine possession de sa pensée, il se complaît dans un genre d’éloquence calme, poétique, éloigné de toute controverse, suave et libre comme le sentiment pur ; qu’il s’exalte peu à peu, s’anime devant l’opposition, finit par les polémiques et les fortes invectives.

1359. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 novembre 1885. »

Lamoureux va continuer son œuvre : oui, il fallait commencer par les ordinaires concerts avec le chœur des Fileuses ; ensuite, des œuvres plus caractéristiques ; deux actes de Lohengrin ; puis un acte, deux actes de Tristan ; il fallait bien initier le public, peu à peu et progressivement et certes par le concert : maintenant, un acte encore, peut-être le premier de la Walkure : qu’ainsi le public entre en l’intelligence de l’art nouveau, et le temps sera venu du définitif et complet essai ; éduqué par le Concert, le public parisien pourra en fin connaître le théâtre. […] Après bien des aventures, le naïf ignorant arrive dans le domaine de Saint-Graal, C’est ici que Wagner fait commencer son drame ou plutôt son mystère. […] Puis, avec de grands gestes, il commence son évocation. « Sors du gouffre ! […] Il commence à comprendre qu’il a vécu jusqu’à ce jour comme un fou sans mémoire et sans conscience.

1360. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse sociologique »

La forme extérieure d’un roman commence au style, et aimer un certain style, c’est pour un lecteur éprouver que les conditions de sonorité, de couleur, de précision, de grandeur et d’éloquence, suivant lesquelles les mots ont été choisis et assemblés, sont celles qui réalisent ou du moins qui ne choquent pas son idée vague de la propriété et de la beauté du langage, idée qui lui est personnelle, qui le caractérise puisque son voisin peut ne pas la partager, qui fait donc partie du cours de ses pensées et aide à le définir. […] Shakespeare a pénétré en France au moment du romantisme, quand nos lettrés commencèrent à se germaniser et il avait pénétré bien auparavant en Allemagne : il avait été oublié en Angleterre pendant les deux siècles où notre influence et nos mœurs y dominèrent ; sa gloire renaquit quand l’Angleterre reprit possession d’elle-même littérairement et socialement. […] Henri Heine, bien qu’Allemand, a écrit plutôt pour une certaine classe de lecteurs français qui le prisent et parmi lesquels il eut des disciples, que pour sa patrie où on le tient en petite estime, ou pour l’Angleterre où il commence à peine à être connu. […] Mais une fois le génie, né, développé, productif, commence un jeu d’attractions et de répulsions qui nous est accessible.

1361. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

D’autre part, il est prouvé que la variabilité, une fois qu’elle a commencé à se manifester, ne cesse pas totalement d’agir ; car de nouvelles variétés se forment encore de temps à autre parmi nos produits domestiques les plus anciens. […] Un petit nombre de naturalistes, doués d’une intelligence ouverte et qui d’eux-mêmes ont déjà commencé à douter de l’immutabilité des espèces, peuvent être influencés par cet ouvrage ; mais j’en appelle surtout avec confiance à l’avenir et aux jeunes naturalistes qui s’élèvent et qui pourront regarder les deux côtés de la question avec plus d’impartialité. […] Ainsi qu’on l’a vu dans une précédente note, les lois générales de la vie durent se fixer d’abord, selon les conditions physiques particulières à notre planète, en même temps que commençait la divergence des types successivement adaptés à la diversité peu profonde de ces conditions. […] Notre monde organique actuel ne serait donc que le reste d’un nombre infini de germes primitifs qui, tous, si les circonstances leur eussent été favorables, auraient pu chacun donner naissance, sinon à un embranchement, du moins à une classe, un ordre ou un groupe et qui tous ont au moins commencé une race.

1362. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

C’est en ces termes qu’un moraliste de société, le duc de Lévis, commence un chapitre assez piquant sur les médecins qui étaient en vogue vers 1774 ; et au nombre des conditions requises alors pour réussir, indépendamment des talents propres à la profession, il met un esprit délié, la connaissance et l’usage du monde, des manières agréables : « Mais, avant tout, il fallait qu’ils eussent ou qu’ils feignissent un cœur sensible. » On retrouve quelque chose de ce soin et de cette prétention dans les éloges de Vicq d’Azyr. […] Dans l’âge mûr on commence à jouir du passé, on connaît mieux la valeur du présent et l’on espère encore de l’avenir.

1363. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — II. (Suite.) » pp. 463-478

Ainsi, en montant le pic du Midi, le voyageur arrivé à une certaine élévation se trouve avoir atteint à un beau réservoir d’eau appelé le lac d’Oncet, et où la nature commence à prendre un grand caractère ; il en fait voir en peu de mots l’encadrement, et en quoi ce nouveau genre de beauté consiste : C’est un beau désert que ce lieu : les montagnes s’enchaînent bien, les rochers sont d’une grande forme ; les contours sont fiers, les sommets hérissés, les précipices profonds ; et quiconque n’a pas la force de chercher dans le centre des montagnes une nature plus sublime et des solitudes plus étranges prendra ici, à peu de frais, une idée suffisante des aspects que présentent les monts du premier ordre. […] On commence à voir de quelle manière ce paysage se diversifie d’avec les précédents, et comment ces continuelles courses de montagnes ne se ressemblent point toutefois et admettent les accidents, les variétés les plus sensibles.

1364. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — III » pp. 90-104

Montluc ne se donne pas pour un historien, c’est un écrivain spécial de guerre ; il semble qu’il tienne à justifier ce mot de Henri IV lisant ses Commentaires, que c’est la Bible du soldat : « Je m’écris à moi-même, et veux instruire ceux qui viendront après moi : car n’être né que pour soi, c’est à dire en bon français être né une bête. » Il commence par établir une bonne police dans la ville ; il la divise en huit parties, dont chacune est sous la surveillance et les ordres d’un des huit magistrats nommés les « huit de la guerre » : dans chacune de ces sections, il fait faire un recensement exact des hommes jusqu’à soixante ans, des femmes jusqu’à cinquante, et des enfants depuis douze, afin qu’on voie quels sont ceux qui peuvent travailler aux choses de siège et à quoi ils sont propres ; dans le travail commun, les moindres ont leurs fonctions ; chaque art et métier, dans chaque quartier, nomme son capitaine, à qui tous ceux du même métier obéissent au premier ordre. […] Ces trois escadrons étaient composés de trois mille dames, gentils-femmes ou bourgeoises : leurs armes étaient des pics, des palles (pelles), des bottes et des fascines ; et en cet équipage firent leur montre et allèrent commencer les fortifications.

1365. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettres sur l’éducation des filles, par Mme de Maintenon » pp. 105-120

Elles commencent à l’année 1680. […] Cependant le roi commençait à entrer dans sa pensée, et chaque fois qu’il y entrait, il l’avertissait de l’agrandir.

1366. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

Celui-ci ne les commence, en effet, qu’avec le siège de Namur en 1692, ce qui donne plus de prix aux faits antérieurs racontés par Dangeau et aux notes que Saint-Simon y joint, et qui n’ont pas toutes passé en substance dans son grand ouvrage. […] Je rends ce que j’éprouve en ces bons endroits, comme encore on me laissera citer ce mot de Louis XIV, conservé par Dangeau, lorsque deux ans après environ le vainqueur de Steinkerque et de Nerwinde, Luxembourg, se meurt : Vendredi 31 décembre 1694, à Versailles. — M. de Luxembourg à cinq heures du matin s’est trouvé mal, et sa maladie commence si violemment que les médecins le désespèrent.

1367. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — I — Vauvenargues et Fauris de Saint-Vincens » pp. 1-16

Gilbert a rassemblé à ce propos différents passages de ses maximes et de ses caractères, qui se rapportent évidemment à cette situation personnelle ; on le soupçonnait auparavant, on en est sûr désormais : et par exemple dans ce portrait de Clazomène qui est tout lui : « Quand la fortune a paru se lasser de le poursuivre, quand l’espérance trop lente commençait à flatter sa peine, la mort s’est offerte à sa vue ; elle l’a surpris dans le plus grand désordre de sa fortune ; il a eu la douleur amère de ne pas laisser assez de bien pour payer ses dettes, et n’a pu sauver sa vertu de cette tache. » L’amitié si tendre, si familière, que nous voyons établie entre Vauvenargues et Saint-Vincens nous permet de nous figurer en la personne de ce dernier un de ces amis dont La Fontaine avait vu des exemples autre part encore qu’au Monomotapa : Qu’un ami véritable est une douce chose ! […] On sent dans cette lettre qu’il aurait pu, ce jour-là même, tracer le caractère de Sénèque ou l’orateur chagrin, l’orateur de la vertu, qui commence en ces termes : Celui qui n’est connu que par les lettres, n’est pas infatué de sa réputation, s’il est vraiment ambitieux ; bien loin de vouloir faire entrer les jeunes gens dans sa propre carrière, il leur montre lui-même une route plus noble, s’ils osent la suivre : Ô mes amis, leur dit-il, pendant que des hommes médiocres exécutent de grandes choses, ou par un instinct particulier, ou par la faveur des occasions, voulez-vous vous réduire à les écrire ?

1368. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

Il est très-utile d’abord de commencer par le commencement, et, quand on en a les moyens, de prendre l’écrivain supérieur ou distingué dans son pays natal, dans sa race. […] Rien ne sert mieux à marquer les limites d’un talent, à circonscrire sa sphère et son domaine, que de savoir les points justes où la révolte contre lui commence.

1369. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

On commence à déclarer ennuyeuse l’exposition de pensées et d’actions nobles ; on s’essaye à traiter toutes les folies. […] Dans ces deux ouvrages, tu verras ce que peut le talent, pour ne pas dire le génie, lorsqu’il paraît dans une époque féconde et qu’il ne prend aucune précaution. — C’est à peu près ainsi que, nous aussi, nous avons commencé. » 55.

1370. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite.) »

M. de Crémille, l’excellent major général, le Chanlay du règne de Louis XV, écrivait au prince, du camp de Malines, le 14 juin : « Permettez-moi, Monseigneur, d’oser assurer Votre Altesse Sérénissime du plaisir que j’ai à voir commencer, sous ses drapeaux, les opérations de cette campagne, dont les succès ne peuvent manquer de devenir bien glorieux, par les dispositions excellentes qui les dirigent, et dont la conduite est remise en de si bonnes mains. » Et le maréchal lui écrivait de Louvain, à la date du 27 juin : « Monseigneur, J’ai reçu les lettres que Votre Altesse Sérénissime m’a fait l’honneur de m’écrire le 25 et le 26, etc. […] Ici commencent, à proprement parler, les divertissements de Berny, qu’on a comparés sans trop d’ambition à ceux de la Cour de Sceaux.

1371. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

L’époque de transition, le second seizième siècle, où nous nous trouvons, a commencé par un Ronsard : il faut prendre garde qu’il ne finisse par un Du Bartas et un Malherbe156. » Laissons ces noms, ces rapprochements, toujours inexacts, et qui resserrent. […] Ackermann a publié en 1839 l’Illustration de du Bellay, avec une préface où il commençait l’exposé de ses vues littéraires ; il les a reprises et poussées depuis dans la préface d’un volume intitulé Chants d’Amour (Crozet, 1841).

1372. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VII. De l’esprit de parti. »

Je commence par dire qu’il y a une époque de la révolution de France (la tyrannie de Robespierre) dont il me paraît impossible d’expliquer tous les effets par des idées générales, ni sur l’esprit de parti, ni sur toutes les autres passions humaines ; ce temps est hors de la nature, au-delà du crime, et, pour le repos du monde, il faut se persuader que nulle combinaison ne pouvant conduire à prévoir, à expliquer de semblables atrocités, ce concours fortuit de toutes les monstruosités morales, est un hasard inouï dont des milliers de siècles ne peuvent ramener la chance. […] C’est sans doute à l’instinct secret de l’empire que doit avoir le vrai sur les événements définitifs, du pouvoir que doit prendre la raison dans les temps calmes, c’est à cet instinct qu’est dû l’horreur des combattants pour les partisans des opinions modérées : les deux factions opposées les considèrent comme leurs plus grands ennemis, comme ceux qui doivent recueillir les avantages de la lutte sans s’être mêlés du combat ; comme ceux, enfin, qui ne peuvent acquérir que des succès durables, alors qu’ils commencent à en obtenir.

1373. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Les auteurs du théâtre italien, qui commencèrent à écrire pour M.  […] Il la prend, commence à en jouer : pendant ce temps-là.

1374. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 janvier 1887. »

  Sous le radeau premier des naissantes mémoires Le grand lac commençait à dérouler ses moires Pour l’homme, brute aux bras trop longs, au nez trop court ;   Et dans l’annonce obscure, en tintements agiles, Tout ce qui rôde, et vole, et nage, et rampe, et court, Entendait bégayer les futurs Evangiles. […] La publication en a commencé en 1878 ; tous les deux ans on en donne quelques pages.

1375. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

On voit la raison de cette différence : le roi, fatigué de madame de Montespan comme eut pu l’être un vieux mari, commençait à cédera l’attrait de madame de Maintenon. […]   L’année 1675 peut se résumer ainsi : Elle commence par la manifestation de la bienveillance royale, exprimée par le changement du nom de Scarron en celui de madame de Maintenon.

1376. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Raphaël, pages de la vingtième année, par M. de Lamartine. » pp. 63-78

Ce sont celles avec lesquelles on achève la pensée de la veille et l’on commence le rêve d’aujourd’hui, celles dont on s’entretient d’abord en se revoyant, dont on se conseille la lecture, qu’on marque légèrement du doigt dans le volume qu’un autre lira tout à l’heurec. […] Mais, après avoir parlé ainsi de Raphaël, M. de Lamartine n’a plus qu’une réponse à faire à ceux qui lui demanderaient si Raphaël ce n’est pas lui-même ; il devra répondre comme faisait Rousseau à ceux qui lui demandaient s’il avait voulu se peindre dans Saint-Preux : « Non, disait-il, Saint-Preux n’est pas ce que j’ai été, mais ce que j’aurais voulu être. » Le roman commence par une description des lieux, du lac et des montagnes qui vont être comme la décoration de cet amour : On ne peut bien comprendre un sentiment que dans les lieux où il fut conçu… Ôtez les falaises de Bretagne à René, les savanes du désert à Atala, les brumes de la Souabe à Werther, les vagues imbibées de soleil et les mornes suants de chaleur à Paul et Virginie, vous ne comprendrez ni Chateaubriand, ni Bernardin de Saint-Pierre, ni Goethe.

1377. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Madame Récamier. » pp. 121-137

Tous ses amis, à bien peu d’exceptions près, avaient commencé par l’aimer d’amour. […] Erskine et beaucoup d’autres : on était en présence, on s’observait ; c’était à qui ne commencerait pas.

1378. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Poésies nouvelles de M. Alfred de Musset. (Bibliothèque Charpentier, 1850.) » pp. 294-310

Alors on récitait tout de ces jeunes poèmes, maintenant on commence peut-être déjà à faire le choix. […] Un des poètes dont il restera le plus, Béranger, me disait un jour : « Vous autres, vous avez tous commencé trop jeunes et avant la maturité. » Il en parlait à son aise.

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