/ 2228
371. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Société française pendant la Révolution »

L’histoire d’une société, c’est-à-dire l’histoire des idées, des sentiments et des influences, qui font les mœurs et qui les changent, et, pour tout exprimer avec le seul mot qui convienne : l’histoire de l’Histoire ! […] Il vous reste juste leur livre : des miettes historiques tombées de quelques corbeilles, de quelques pamphlets, de quelques journaux, — des miettes historiques, des atomes, de la poussière de documents qui en eux-mêmes ne sauraient changer le caractère jugé de la Révolution, mais que de grands artistes broieraient seulement dans les couleurs de leur palette pour donner plus d’éclat et plus de vie à cette grande fresque d’une histoire qu’on ne fera jamais au pointillé.

372. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Brispot »

C’est là une grande raison, il semble, pour que la vérité, qui ne change point, la vérité immortelle, ne se croie pas obligée, devant les insolentes exigences de l’esprit humain, de revêtir des formes nouvelles qui la feraient mieux accepter de ce Balthazar ennuyé à la dernière heure de son orgie. […] Cette rage, vieille comme le monde et éternelle comme lui, et qui n’est, en fin de compte, que la révolte délirante de l’orgueil, sait se masquer avec la figure de chaque époque ; mais une pareille mascarade ne change pas le fond des choses, et le fond des choses, c’est le travail destructeur, latent ou visible, mais implacable, de la philosophie.

373. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Mgr Rudesindo Salvado »

L’accent même avec lequel ils l’ont dit, ce mot invariable, n’a pas changé. […] Mgr Salvado aurait pu ajouter aux paroles si sensées et si courageuses du docteur, ce passage des Monthly Records, plus courageux et plus explicite encore : « S’il est un fait incontestable, — disent les Monthly Records, — qui nous humilie et qui nous afflige, c’est que là où nous, anglicans, nous agissons timidement, dans nos possessions australiennes, l’Église de Rome est activement à l’œuvre avec un zèle et une sagesse que nous ferions bien d’imiter… Ses évêques sont partout où il y a des âmes à conquérir et à changer… Une maîtresse pensée (master mind) anime et dirige leurs travaux… Quand un seul membre de notre clergé poursuit solitairement une tâche accablante, sans être assisté des conseils de ses supérieurs, l’Église de Rome ne cesse d’apparaître avec tous ses moyens d’action au grand complet… » Certainement, jamais le sentiment de ce qui manque à sa patrie n’a inspiré à un anglais plus de noble jalousie et de justice, et il n’y aurait qu’à admirer, si, en sa qualité d’anglican, l’écrivain auquel on applaudit ne provoquait pas le sourire en nous parlant des moyens d’action au grand complet de cette Église romaine dont il faut bien compliquer le génie pour en comprendre la puissance, quand on ne croit plus à sa divine autorité !

374. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Théophile Gautier. » pp. 295-308

et qu’il est plus que temps, pour l’honneur de tous, d’en finir avec ce capitonnage dérisoire du même mot qu’on répète contre la Critique, surtout quand il s’agit d’un homme qui ne demande pas quartier, lui, et qui a bien assez de talent pour entendre une fois la vérité, — ce qui le changera ! […] amant tigre changé subitement en mouton, avec la prestesse d’un changement à vue théâtral, mariage final des amants restés vertueux, telles sont les étonnantes découvertes de M. 

375. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome I

Quant à la théorie du nerf grand sympathique, elle changera et se modifiera sans doute ; mais peu nous importe. […] Le sucre venu du dehors ne s’ajoute pas comme tel au sucre hépatique, mais il est changé dans le foie en une autre matière, ainsi que je vous l’ai fait pressentir dans la dernière leçon. […] Vous avez vu que le foie doit être considéré comme un véritable laboratoire vital qui change profondément toutes les substances qui lui sont apportées par le sang. […] Ce sont les conceptions, les manières de voir, les théories qui changent et se contredisent, ce ne sont jamais les faits. […] On avait pensé, dans l’idée où l’on était que le diabète provenait d’une perversion des fonctions digestives, que la viande était changée en sucre dans l’estomac.

376. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 140-141

Elle mérite encore plus nos éloges par un style piquant & familier, qui semble donner un nouveau coloris aux Héros qu’il peint, & qui, sans affoiblir leur caractere ni changer la physionomie, les naturalise en quelque façon parmi nous.

377. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » p. 118

Si ces intérêts ont changé, il n'en est pas moins vrai que les réflexions & les vûes de l'Auteur annoncent beaucoup de pénétration, de justesse, & de solidité.

378. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 234-235

Alors sa ressource étoit de changer son lit de place ; en moins d’un an il lui fit faire le tour de sa chambre, en cherchant toujours un endroit pour le mettre à l’abri de la pluie.

379. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

L’éblouissement des rayons trop nombreux sur lesquels le jour éclaboussait s’est changé en lumière unie, franche et vraie, qui attire les yeux, qui les fixe et qui les repose ! […] Mais elle se disait qu’un avenir prospère Avait changé soudain par la mort de son père ; Qu’elle était fille aînée, et que c’était raison De prendre part active aux soins de la maison. […] L’amitié qu’elle implore, et en qui elle veut établir sa demeure, ne saurait être trop pure et trop pieuse, trop empreinte d’immortalité, trop mêlée à l’invisible et à ce qui ne change pas ; vestibule transparent, incorruptible, au seuil du Sanctuaire éternel ; degré vivant, qui marche et monte avec nous, et nous élève au pied du saint Trône. […] Nous nous éloignâmes, mais cela ne changea rien à mon tendre intérêt pour vous. […] « Ainsi je ne changerais rien à ma conduite, et je serais récompensé pour faire précisément ce que je fais.

380. (1861) La Fontaine et ses fables « Préface »

Nous regarderons alors ses organes en exercice ; nous essayerons de découvrir de quelle façon elle recueille le pollen des fleurs, comment elle l’élabore, par quelle opération intérieure elle le change en cire ou en miel.

381. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 135-136

Malgré la réclamation d’un de ses amis*, au zele duquel nous applaudissons, nous ne changerons rien à ce que nous avons dit.

382. (1930) Le roman français pp. 1-197

Elles ont changé chez nous, non chez eux. […] Je l’interrompis, disant : « Je ne partage pas votre admiration (depuis, j’ai bien changé !) […] Les dernières trente années ont changé tout cela. […] Ce n’est pas qu’il n’aime pas cela, c’est pour bien dire qu’on ne peut pas lui changer sa volonté. […] Mais c’est la bourgeoisie qui a changé.

383. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

Elle paraissait toute changée. […] Le sublime change de costume, comme le reste. […] mon Dieu, on a tout changé, hélas ! […] — Tu n’as pas changé, fit-elle. […] Vous en changiez.

384. (1924) Souvenirs de la vie littéraire. Nouvelle édition augmentée d’une préface-réponse

Les mœurs littéraires ont changé. […] La vieillesse ne nous change pas ». […] Nous changeons physiquement de peau tous les cinq ou six ans. […] Supposez Mistral né à Aix ou habitant le Var, tout changeait. […] L’Affaire changea totalement le caractère des réunions de la rue Oudinot.

385. (1886) Le roman russe pp. -351

Deux motifs m’ont fait changer d’opinion. […] Le thème déclamatoire avait changé, et non la déclamation. […] On changea le titre malsonnant et les couplets de certains opéras. […] Un soir d’été, dans un relais de Petite-Russie, on changeait mes chevaux. […] Mais, ici encore, notre auteur a changé de manière.

386. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 435-436

Son changement, dont les motifs, malgré l’adresse de l’Auteur, trouvent peu de grace dans un cœur delicat, change aussi les sentimens qu’on se plaisoit à éprouver en sa faveur.

387. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 478

Le plus distingué de ses Ouvrages est la Métamorphose des yeux d’Iris changés en Astres, Poëme d’environ sept cents Vers, digne de figurer à côté des meilleures Métamorphoses d’Ovide, soit pour l’invention, qui en est aussi ingénieuse que féconde, soit pour la Poésie, qui est noble, coulante, pleine de chaleur & de sentiment, mais où le goût de l’antithese & des pointes se montre avec trop d’affectation.

388. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Instruction générale sur l’exécution du plan d’études des lycées, adressée à MM. les recteurs, par M. Fortoul, ministre de l’Instruction publique » pp. 271-288

Le monde a changé de tour et de manière de voir ; il est devenu positif, comme on dit : je le répète sans idée de blâme : car, si par positif on entend disposé à tenir compte avant tout des faits, y compris même les intérêts, — disposé à ne pas donner à la théorie le pas sur l’expérience, — disposé à l’étude patiente avant la généralisation empressée et brillante, — disposé au travail et même à la discipline plutôt que tourné à la fougue sonore et au rêve ; si par positif on entend toutes ces choses et d’autres qui peuvent devenir d’essentielles qualités, au milieu de tout ce que laisserait de regrettable l’espèce des qualités et des défauts contraires, il y aurait encore de quoi se raffermir et se consoler. Mais, regret ou non, il en faut prendre son parti, et, comme l’a dit il y a longtemps Euripide (c’est bien lui en effet qui l’a dit, et non pas un autre) : « Il n’y a pas à se fâcher contre les choses, car cela ne leur fait rien du tout50. » L’esprit des générations a donc changé, c’est un fait ; elles sont devenues peut-être plus capables d’une direction précise et appropriée ; elles en ont plus besoin aussi, et il me semble que la pensée qui a présidé à l’Instruction présente et qui s’y diversifie en nombreuses applications est de nature à convenir à ces générations nouvelles, à soutenir, à développer leur bon sens, leurs qualités intelligentes et solides, à tirer le meilleur parti de leur faculté de travail, à les préparer sans illusion, mais sans faiblesse, pour la société telle qu’elle est faite, pour le monde physique tel quelles ont à le connaître et à le posséder : — et tout cela en respectant le plus possible la partie délicate à côté de l’utile, et en laissant aussi debout que jamais ces antiques images du beau, impérissables et toujours vivantes pour qui sait les adorer. […] quoique notre état social ait complètement changé depuis mille ans, quoique les portes de la science aient été enfoncées par les laïques, c’était encore, il y a cinquante ans, la méthode ecclésiastique que l’on suivait dans l’éducation, et il fallait une révolution comme celle de 89 et un homme comme Napoléon pour élever au-dessus des langues mortes les sciences physiques et mathématiques qui doivent être le but de notre société actuelle, car elles forment des travailleurs au lieu de créer des oisifs.

389. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

Ses ennemis avaient oublié de le faire bannir et de confisquer ses biens ; il estima qu’il avait toujours pied dans le canton, que cette bourrasque n’aurait qu’un temps, et que dans les républiques l’esprit du souverain, comme on dit, change avec plus de facilité qu’ailleurs. […] Elles savent trop comment occuper leur loisir et donner le change à leur ennui. […] [NdA] Stendhal (Beyle) qui avait plus d’une raison pour goûter Besenval et qui le cite souvent à l’appui de ses propres vues sur la société, a dit de lui : « J’aime ses mémoires ; il a la première qualité d’un historien, pas assez d’esprit pour inventer des circonstances qui changent la nature des faits ; et la seconde, qui est d’écrire sur des temps qui intéressent encore.

390. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

Je sais que les points de vue changent et se déplacent ; qu’en avançant dans la marche, et d’étape en étape, de nouvelles perspectives s’ouvrent vers le passé et y jettent des lumières parfois imprévues ; que si, dans les œuvres déjà anciennes, de certains aspects s’obscurcissent et disparaissent, d’autres se détachent mieux et s’éclairent ; que des rapports plus généraux s’établissent, et que, dans la série des monuments de l’art, il y a un juste lointain qui non seulement n’est pas défavorable, mais qui sert à mieux donner les proportions et la mesure. […] Loin de moi de lui demander de la changer ! […] Si inventeur que soit un esprit, il n’invente guère ; ses idées sont celles de son temps, et ce que son génie original y change ou ajoute est peu de chose.

391. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

Mais la Congrégation triomphe ; elle est au pinacle : la scène change aussitôt, et d’un déjeuner à l’autre, — un vrai changement à vue. […] Tous ont changé depuis et ont dû changer : l’un irrité et emporté, dans sa fièvre d’impatience, a passé d’un bond à la démocratie extrême ; l’autre, tout vertueux, sans ambition et sans colère, est arrivé par une douce pente aux honneurs mérités de l’épiscopat, vérifiant ainsi en sa personne le mot du Maître : « Heureux les doux parce qu’ils posséderont la terre ! 

392. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. (suite) »

A force de remuer les choses dans la pensée, elles changent de valeur et on éprouve cette lassitude de l’intelligence qui ne la fait se reposer que dans le paradoxe ; et il arrive que parfois le distingué vous devient si commun, l’esprit vous paraît si bête, et qu’enfin tout ce qu’on préconise vous est si peu, qu’on irait volontiers boire au cabaret avec des charbonniers pour trouver quelque distinction, — et qu’on y va plus ou moins. » Tantôt il y met plus de tendresse et un accent ému, éloquent, qui élève et passionne le regret : « Oh ! […] ces heures sont encore des heures heureuses, et l’on ne se quitte point sans un vif désir de se retrouver. « J’ai toujours pensé, dit Michel, que les querelles étaient arrangées par la Providence pour les raccommodements. » Et puis, le lendemain de ces journées de bonheur, tout est changé tout d’un coup sans qu’on sache pourquoi. […] Marie a changé de ton ; elle met en avant les grands mots, « ce besoin d’aimer qui ne peut être satisfait par rien » ; ou encore : « Tout ce qui est grand, est triste. » Elle est femme à dire : « Je vous aime de toutes les puissances de mon cœur, et je ne veux pas de votre amour. » Que voulez-vous donc, Marie ?

393. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

D’ailleurs, les hommes changent, et tel qui a été fort bon devient médiocre et quelquefois misérable. » Et encore, dans une autre lettre à ce même ministre, en parlant de la bravoure : « C’est la première qualité que je demande à la guerre. […] que tout à coup les affaires changèrent de face ; le projet de la Sambre fut abandonné ; on reprit celui de Denain pour l’exécuter, non pas avec un détachement, mais avec toute l’armée : ce qui était l’idée hardie et l’idée neuve. […] En conséquence, rien ne fut négligé, dans la journée du 23 juillet, de ce qui pouvait donner le change au prince Eugène pour lui faire croire à une bataille le lendemain devant Landrecies ; on travaillait à jeter des ponts sur la Sambre comme si toute l’armée devait y passer ; on fit un gros détachement comme pour reconnaître le terrain où l’on devait combattre.

394. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’Audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. »

Et toutefois je ne demeure pas d’accord que toute leur utilité soit bornée d’un si petit espace de temps, non-seulement parce qu’il n’y a nulle proportion entre ce qui se change et ce qui demeure dans le cours de vingt-cinq ou trente années, le changement n’arrivant pas à la millième partie de ce qui demeure, mais à cause que je pose des principes qui n’auront pas moins de durée que notre langue et notre Empire. » Que vous en semble ? […] « Ce sont des maximes, ajoute-t-il en parlant des siennes, à ne jamais changer, et qui pourront servir à la postérité, de même qu’à ceux qui vivent aujourd’hui ; et quand on changera quelque chose de l’usage que j’ai remarqué, ce sera encore selon ces mêmes Remarques que l’on parlera et que l’on écrira autrement que ces Remarques ne portent.

395. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

Dans son désir de changer le sujet de conversation, Emma prend le journal des mains de M. de Noirmont et se met à lire le feuilleton à haute voix : « Théâtre-Italien. — Ouverture. — Don Juan […] Noirmont n’a garde d’y prêter la main ; il n’est pas homme à se laisser donner le change : quand le diable se mêle de faire l’ange gardien, il y voit plus clair qu’un autre et perce à jour toutes les malices. […] » On la rassure ; ce n’est pas elle qui a vieilli, c’est Herman ; il prend tout sur lui, il s’excuse, il s’humilie ; la nécessité… ; il raconte son histoire, ce testament d’un vieil ami, d’un père… plus qu’adoptif ; c’est Pompéa du moins qui le dit, comme elle l’a deviné, à la simple vue d’un portrait et à la ressemblance ; — il parle de son amour pour sa femme, de ce sentiment nouveau qui lui est venu en la voyant : «  J’ai senti que près de cette charmante personne je devenais meilleur ; j’ai apprécié ses excellentes qualités ; je l’ai estimée, puis aimée d’un amour inconnu, confiant, impérissable… » Mais Pompéa n’est pas de celles qui prennent le change ; elle sourit d’un sourire de pitié : « Voilà une idylle qui a le défaut d’arriver trop tard ; hier je t’aurais cru, mais il ne fallait pas me faire passer la soirée avec ta belle-sœur. » Herman assure ne pas comprendre ; Pompéa reprend : « Est-ce qu’on nous trompe, nous autres ?

396. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

Pendant les dix années qu’il vécut encore, il habita dans la capitale ; mais il changea bien des fois de logement, et l’on a noté jusqu’à sept de ses déménagements successifs. […] Cervantes était allé, pour changer d’air, à la petite ville d’Esquivias, pays de sa femme ; mais il revint peu après à Madrid sans avoir trouvé de soulagement et en sentant son mal empiré ; ce mal dont on ne dit pas le principe et le siège se traduisait par un hydropisie : « Il advint, cher lecteur, nous dit Cervantes, que deux de mes amis et moi, sortant d’Esquivias (lieu fameux à tant de titres, pour ses grands hommes et ses vins), nous entendîmes derrière nous quelqu’un qui trottait de grande hâte, comme s’il voulait nous atteindre, ce qu’il prouva bientôt en nous criant de ne pas aller si vite. […] Ennoblissons-le, traitons-le dignement, comme il sied et selon le ton primitif ; mais ne le changeons, pas trop, ne le chargeons pas, mêlons-y le moins possible de pensées étrangères et de ce que le trop de réflexion serait tenté d’y mettre.

397. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre »

On le regarde comme un fou qui dit quelquefois bien et souvent mal, mais toujours sans principe… » (Et encore :) « Il radote, change toujours d’avis, augmente de surdité. […] Un peu de folie dans son talent, un peu de vertu dans son égoïsme, ajoutaient aux variations de ce Protée que la Cour avait vu changer successivement de parti, de goûts, de mœurs, et qui probablement aussi eût changé d’amis s’il en avait eu.

398. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La comédie de J. de La Bruyère : par M. Édouard Fournier. »

Il avait non-seulement l’air de Vulteius, mais celui de Vespasien (faciem nitentis), et toutes les fois qu’on le voyait, on était tenté de lui dire : Utere lactucis et mollibus… « C’était, un bonhomme dans le fond, mais que la crainte de paraître pédant avait jeté dans un autre ridicule opposé, qu’on ne saurait définir ; en sorte que pendant tout le temps qu’il a passé chez M. le Duc, où il est mort, on s’y est toujours moqué de lui. » Pour bien entendre ce jugement de Valincour, il faut d’abord relire l’Épître d’Horace (la septième du livre I) où il est question de ce Vulteius, lequel, ayant changé d’état, change aussi d’humeur, devient inquiet, rêveur et a l’air dépaysé. […] Il est le premier nom en tête de la liste des nouveaux venus, des plus modernes et des plus hardis, de ceux qui prétendent bouleverser les rangs et changer les choses.

399. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SÉVIGNÉ » pp. 2-21

Il y en a cinq ou six dans cette contrariété. » Ces réminiscences un peu fades de pastorales et de romans sont naturelles sous son pinceau, et font agréablement ressortir tant de descriptions fraîches et neuves qui n’appartiennent qu’à elle : « Je suis venue ici (à Livry) achever les beaux jours, et dire adieu aux feuilles : elles sont encore toutes aux arbres, elles n’ont fait que changer de couleur ; au lieu d’être vertes, elles sont aurore, et de tant de sortes d’aurore que cela compose un brocard d’or riche et magnifique, que nous voulons trouver plus beau que du vert, quand ce ne seroit que pour changer. » Et quand elle est aux Rochers : « Je serois fort heureuse dans ces bois, si j’avois une feuille qui chantât : ah ! […] « Le seul art dont j’oserais soupçonner Mme de Sévigné, dit Mme Necker, c’est d’employer souvent des termes généraux, et par conséquent un peu vagues, qu’elle fait ressembler, par la façon dont elle les place, à ces robes flottantes dont une main habile change la forme à son gré. » La comparaison est ingénieuse ; mais il ne faut pas voir un artifice d’auteur dans cette manière commune à l’époque.

400. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IV. Précieuses et pédantes »

Il est bon et juste de revendiquer le droit de changer. […] Il ne faut mépriser ni tous ceux qui changent, ni tous ceux qui ne changent pas.

401. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Les plus sincères sont vrais tout au plus dans ce qu’ils disent, mais ils mentent par leurs réticences, et ce qu’ils taisent change tellement ce qu’ils feignent d’avouer, qu’en ne disant qu’une partie de la vérité, ils ne disent rien. […] Qui sait si quelque balafre à la joue, ou un œil crevé du côté qu’il nous a caché, n’eût pas totalement changé la physionomie ? […] Je ne m’attacherai point à le rendre uniforme ; j’aurai toujours celui qui me viendra, j’en changerai selon mon humeur, sans scrupule ; je dirai chaque chose comme je la sens, comme je la vois, sans recherche, sans gêne, sans m’embarrasser de la bigarrure.

402. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

Ainsi, à propos de ces gratifications et pensions distribuées à si grand fracas au nom de Louis XIV parmi tous les illustres de France et d’Europe, voici ce que nous apprend Perrault : Il alla de ces pensions en Italie, en Allemagne, en Danemark, en Suède et aux dernières extrémités du Nord : elles y allaient par lettres de change. […] Il faut que Colbert subvienne à cet extraordinaire de dépenses ; son humeur change : Nous remarquions, que jusqu’à ce temps, quand M.  […] [NdA] Depuis lors, pourtant, il faut convenir que la disposition a quelque peu changé, et que les partisans de la perfectibilité et les idolâtres de l’avenir sont devenus, à leur tour, des manières de grands prêtres, s’enflammant par toutes sortes de dithyrambes et prétendant imposer la loi future : il ne fait pas bon de parler en amateurs contre leur sens.

403. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Enfin Daudet arrive avec son succès de la veille, au Vaudeville, sur la figure, et l’on se met à table, au milieu de cette phrase de Zola, qui revient comme un refrain : « Décidément, je crois que je vais être obligé de changer mon procédé ! […] » Et il remarche, jetant des phrases comme celle-ci : « Enfin nous sommes dans un monde tout nouveau, où toutes les conditions de l’existence sont changées, sans qu’on ait l’air de s’en apercevoir… Autrefois un ouvrier chaudronnier gagnait 6 francs par jour… Il pouvait mettre 3 francs de côté… Donc au bout de cinq ans, il avait 5 000 francs et pouvait se faire chaudronnier… Aujourd’hui il faut 800 000 francs pour établir un chaudron… donc il n’y a plus moyen pour le peuple de sortir du peuple… et le peuple ne veut pas rester peuple… Savez-vous avec quelle somme s’est fondée, sous Louis-Philippe, la plus grande fabrique de produits chimiques… Chabrol vous l’apprend… avec 60 000 francs… Allez maintenant chez Salleron, il vous demandera 15 000 francs pour une cheminée… un fourneau sans luxe, c’est une affaire de 50 000 francs… Et tout comme cela… une confiserie se fonde avec un capital de 1 200 000 francs… une épicerie, vous connaissez la maison Potin ?  […] Il y a au troisième acte une déclaration de Jack dont pas une parole n’est à changer, déclaration qui ne portait pas cependant.

404. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

Le sens des couleurs change, le sens de la cadence poétique change aussi ; insensiblement, sans doute ! […] Un continuateur de Banville pourrait m’objecter qu’avec le vers libre la difficulté ne fait que changer et que l’aphorisme de Banville demeure entier : soit : si le vers pseudo-classique ou le vers romantique faible ne se distingue que par la rime, et peut être confondu avec de la prose, le vers libre, plus flottant, pourra être confondu avec une prose poétique, rythmée et nombrée, avec une sorte de musique.

/ 2228