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609. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de la Révolution » pp. 73-87

Voilà pourquoi toute critique qui va plus loin que l’œuvre d’art et l’édifice de la composition, ne doit pas laisser circuler, sans avertir et sans y attacher une étiquette, ce sachet de graines vénéneuses, ce haschich préparé pour les têtes ardentes, ce petit poison de Java dans lequel les Tricoteuses des temps futurs peuvent tremper la pointe de leurs aiguilles, et qu’on nous débite, en ce moment, avec des airs vertueux et sensibles dignes de la femme de l’apothicaire de Roméo ! […] Sensible, inconséquente, entraînée, vraie femme au fond sous ses airs grenadiers de virago, amazone de la pensée qui n’eut jamais le sein coupé, madame de Staël se prit d’horreur pour la Révolution qu’elle avait aimée.

610. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « L’abbé Monnin. Le Curé d’Ars » pp. 345-359

Il n’était pas un de ces Siméon Stylites, passés marbre sur leur colonne, avec lesquels la Philosophie puisse se donner les airs des explications indiennes et qu’elle traite sans façon de fakirs. […] l’égal, pour le moins, de Bossuet, de Fénelon, de sainte Thérèse, et lui donnait sans cesse cet air de prophète qui ne vient aux plus grands génies qu’à force de regarder Dieu.

611. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Gustave Rousselot  »

Jeune, vingt-trois ans à peine, l’âge à peu près de lord Byron quand il publia ses Heures de loisir, l’auteur du livre que voici nous le jette à la tête comme un défi, avec des airs qu’assurément lord Byron n’avait pas quand il débuta. […] C’est l’enthousiasme, le Dieu en nous, comme traduisait madame Staël ; c’est l’enthousiasme, cet élargisseur des poitrines et des cœurs, qui donne aux poètes cette longue haleine et cette force d’enlever leurs vers comme sur des ailes, en plein ciel, en plein air, en pleine étendue, et, quoiqu’il se perde ici dans la chimère, l’auteur du Poème humain en a le foyer.

612. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Musset »

Mais il m’est revenu sur Alfred de Musset plus que cela… seulement par les airs !! […] Excepté l’adorable pièce de vers qui fait suite à la pièce, déjà connue, à Ninon, et qui est adressée à la même Ninon : Avec tout votre esprit, la belle indifférente, Avec tous vos grands airs de rigueur nonchalante, etc. 

613. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIV. Des panégyriques depuis la fin du règne de Louis XIV jusqu’en 1748 ; d’un éloge funèbre des officiers morts dans la guerre de 1741. »

Son style, toujours élégant et noble, s’élève au-dessus du style ordinaire de l’histoire ; mais il ne se permet nulle part ces mouvements, ces tours périodiques et harmonieux, qui semblent donner plus d’appareil aux idées et un air plus imposant au discours. […] Il invite nos guerriers « à ne pas prendre dans l’oisiveté voluptueuse des villes, cette habitude cruelle et trop commune de répandre un air de dérision sur ce qu’il y a de plus glorieux dans la vie et de plus affreux dans la mort.

614. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. RODOLPHE TÖPFFER » pp. 211-255

Pour nous, à mesure que nous lisions les pages les plus heureuses de l’auteur genevois, il nous semblait retrouver, au sortir d’une vie étouffée, quelque chose de l’air vif et frais des montagnes ; une douce et saine saveur nous revenait au goût, en jouissant des fruits d’un talent naturel que n’ont atteint ni l’industrie ni la vanité. […] Publier et introduire en une littérature corrompue ces Nouvelles genevoises, de l’air dont Tacite a donné ses Mores Germanorum, ce serait les compromettre tout d’abord. […] Toujours est-il que si, sur les lieux, on considère de près, avec quelque attention, la physionomie générale et les produits beaucoup plus multipliés qu’on ne peut croire de la littérature courante, on reconnaît combien Genève, en tout ce qui est poétique, romanesque et purement littéraire, reste au-dessous, depuis cinquante ans, de son voisin le canton de Vaud, qui, avec bien moins d’importance et d’illustration, et sous un air de rusticité, a beaucoup plus le goût de ces sortes de choses. […] Prévère paraît à la fenêtre de la cure avec un air pensif ; il a résolu d’éloigner Charles pour quelques années, de l’envoyer à la ville chez un ami près de qui le jeune homme pourra continuer ses études et se préparer, si Dieu le permet, aux fonctions du ministère. […] Prévère, si l’air pensif de M.

615. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

Il s’est mis à table à Rome ; il s’est assis à l’ombre de son buisson de lauriers à Ustica, au pied de ses oliviers à Tibur, au bord de sa source de Blandusie à Venouse ; et si un souffle d’air a frémi mélodieusement dans l’arbre, si un gazouillement de la source a ému son oreille, si un flacon du falerne écumeux a répandu l’ivresse à la fin du festin d’amis, si les cheveux dénoués de la jeune Napolitaine Leucothoé ont eu un pli gracieux sur ses épaules ou exhalé un parfum de Syrie dans l’air, il a écrit, le jour même ou le lendemain, en deux ou trois strophes négligées, mais accomplies, son impression du moment, sans autre ambition que de perpétuer son plaisir. […] Ses travaux cependant avaient altéré sa santé naturellement maladive ; il éprouvait le besoin de changer l’air épais de Rome contre l’air vital et léger d’Athènes ; il voulait surtout voir de ses yeux, avant de les décrire, les mers et les rivages d’Ilion : Campos ubi Troia fuit ! […] Après ce sacrilège du feu enlevé aux demeures célestes, les fléaux vengeurs, de nouvelles fièvres et des maigreurs décharnées, furent infligés à la terre ; la mort, jusque-là tardive, précipita ses pas contre les vivants : c’est ainsi que, sur des ailes refusées à l’homme par les dieux, Dédale osa tenter le vide des airs, le bras d’Hercule força les portes de l’Achéron.

616. (1831) Discours aux artistes. De la poésie de notre époque pp. 60-88

Et quanti l’homme était encore absent de la terre, quand son œil n’était pas là pour jouir de ces décorations, qu’importe, elles se réfléchissaient dans l’œil des animaux qui la peuplaient, et qui, en harmonie eux-mêmes avec la géométrie divine, goûtaient de cette beauté du monde les rayons qu’ils pouvaient en saisir et qui les animaient, comme encore aujourd’hui, sans qu’ils en eussent conscience, comme l’air qu’ils respirent, la lumière qui les éclaire, la chaleur qui les échauffe, l’orage qui les effraie. […] Il n’y avait point de ruche où l’abeille fît son miel ; point de rocher solide où l’aigle déposât son nid : l’abeille a été entraînée par les torrents de l’air, tenant dans ses pattes le suc odorant des fleurs, qui ne s’est pas transformé en miel ; l’aigle a vécu solitaire, contemplant le soleil, sans compagne et sans nid. […] L’un recherchera dans l’Univers tout ce qui, pour ainsi dire, n’a pas de parties, c’est-à-dire les fluides impalpables ou tangibles dans lesquels les parties tendent sans cesse à se rejoindre et à se réunir en un tout : l’air, les eaux, les sons, les nuages. […] J’aime mieux la chrysalide se développant dans le tombeau qu’elle s’est filé elle-même, préparant ses ailes brillantes dans sa vieille peau, et paraissant cadavre au moment où elle va s’élancer dans les airs, éclatante merveille de sa propre création ; j’aime mieux cela qu’une pensée mélancolique, une pensée de mort et de renaissance, une pensée de ruine et de construction nouvelle, qui va se loger dans les vieux débris du passé, dans les tours des seigneurs du Moyen-Âge ou dans les églises gothiques, et qui dit : — Voilà mes palais, j’ai retrouvé mon héritage ; — et qui ment en disant cela, puisqu’elle se lamente en elle-même amèrement, et qu’elle désire autre chose d’un désir brûlant qui la dévore. […]  » Oui, grand poète, tu sais dire la superstition de l’Arabe, qui croit voir, à travers la vapeur de sable que soulève le simoun, l’ombre de Buonaberdi debout sur le sommet d’une pyramide, ou l’illusion du matelot qui voit planer cette ombre, entourée de nuages, sur le pic de Sainte-Hélène ; tu sais chanter la fée et la péri se disputant une jeune âme au milieu du ciel, entre l’orient et l’occident, entre le merveilleux de la matière et le merveilleux de l’esprit, entre le paradis des houris et le paradis mystique des Chrétiens ; et quand les djinns funèbres passent en sifflant dans les airs, ton vers, comme une onde sonore, associe tous les degrés du sentiment, depuis le calme le plus profond jusqu’à la terreur la plus vive, à tous les degrés du son, depuis le souffle le plus léger jusqu’à la plus horrible tempête, par une admirable combinaison d’harmonie que l’art n’avait pas su encore atteindre.

617. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre V. Des orateurs anciens et Modernes. » pp. 223-293

“Des traductions aussi bien faites, dit l’auteur des Affiches de Province, valent des ouvrages originaux pour ceux qui savent apprécier les difficultés de ce genre, & ce qu’il en coûte en les surmontant, pour n’en laisser rien appercevoir, ou pour en dérober les traces sous l’air de la diction.” […] Le traducteur de Pline est tellement son rival, qu’il substitue quelquefois ses pensées à celles de l’auteur, pour lui donner un certain air de bel esprit qui étoit alors à la mode. […] Il a encore ce ton aisé, cet air simple & insinuant qui fait bien plus d’impression que tout le travail de l’art ; & la composition sans être négligée, sent peu le cabinet, ce qui n’est pas un petit mérite. […] Il y a des graces & de la force dans plusieurs de ses discours, mais il faut convenir, avec un excellent critique, que ces graces ont quelquefois un air d’affectation, & que sa force n’est souvent qu’un ton déclamateur. […] Je voudrois pouvoir rendre hommage à tous les hommes éloquens qui se distinguent dans les chaires de la Capitale, mais cette nomenclature auroit trop l’air d’un Dictionnaire d’épithètes.

618. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Les nouveautés de l’idéologie et du sentiment avaient un air un peu aventureux, à peine aventureux, un air d’aimable hardiesse, un air de bohème bien élevée. […] Léopold avec un grand air épiscopal, les autres avec des mines averties. […] Elle a un grand air froid. […] Leurs volées magnifiques jetaient dans l’air une gaieté de vie nouvelle. […] Et puis un air cérémonieux, distant, un peu guindé, narquois, dédaigneux et très poli.

619. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Frémine, Charles (1841-1906) »

. — Vieux airs et jeunes chansons (1884). — Poésies (1900).

620. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 437-438

De tous ses petits Vers on n’a retenu que le Couplet suivant, sur l’air : De tous les Capucins du Monde.

621. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Bâtiment. » p. 534

Un lieu vaste, en plein air, ombré et sablé pour les récréations générales.

622. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — J — Jouy, Jules (1855-1897) »

Rappelez-vous la Perquisition et les Manifestations boulangistes, sur l’air de la Légende de Saint-Nicolas.

623. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Bug-Jargal » (1826-1832) — Préface de 1826 »

L’épisode qu’on va lire, et dont le fond est emprunté à la révolte des esclaves de Saint-Domingue en 1791, a un air de circonstance qui eût suffi pour empêcher l’auteur de le publier.

624. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Carle Van Loo » pp. 92-93

L’imbécile tire son épée contre une magicienne qui s’envole dans les airs, qui est hors de sa portée et qui laisse à ses pieds ses enfants égorgés.

625. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

Il manquait d’air, de liberté, d’espace ; il manquait de mémoire. […] Armand, et — il en fit un drame, une comédie, une chose en l’air. […] Plus de sourire, plus de gaieté, plus de propos en l’air, plus de déclamation goguenarde, plus rien ! […] Il invoque l’air et les nuées, ses grands dieux ! […] La gaîté, dans le poème, c’est l’air, l’espace, le soleil, et la vie !

626. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXV » pp. 254-255

L'éloquent secrétaire perpétuel, au moment où il posait la couronne sur le front du lauréat, avait tout l’air de s’en laver les mains : « Vous allez entendre, Messieurs, l’éloge de Voltaire, nous ne pouvons nous empêcher de le couronner, mais rendez-nous cette justice, ce n’est pas certes nous qui l’aurions fait. » Tel était le sens et des paroles et du geste, nous assure-t-on, de M.

627. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — J — Joncières, Léonce de »

Dans chacun de ces vers d’une couleur ardente, dont l’envolée fait saigner, dans l’air, l’aile des ibis, on sent l’amour profond de la vieille race disparue et de ses superstitions admirables.

628. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Du Plessys, Maurice (1864-1924) »

Au sortir de la boue et des marécages de la littérature décadente, nous retrouvons dans ce livre l’air salubre et vivifiant des purs sommets.

629. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 175-177

Sans s’éloigner du naturel & de la simplicité, il a eu l’art d’élever le ton de l’Apologue, & de lui donner un air de philosophie qui ne dépare point la Fable, quand il est sobrement dispensé.

630. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 334-336

Qu’on les lise, à l’exemple de l’illustre Archevêque de Cambrai, pour acquérir cet amour de la vertu, inséparable de celui de la Religion, ce naturel, ce ton de candeur, cet air de sérénité, si rares dans tous les Ecrits, & destinés cependant à en être le plus doux charme.

631. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 200-202

Le silence régnoit sur la terre & sur l’onde, L’air devenoit serein, & l’olympe vermeil ; Et l’amoureux Zéphyr, affranchi du sommeil, Ressuscitoit les fleurs d’une haleine féconde.

632. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 361-363

Quand j’écoute ces Foux d’un air si sérieux, Vous me raillez aussi bien qu’eux ; Mais je leur porte envie, & je n’en saurois rire.

633. (1767) Salon de 1767 « Dessin. Gravure — Demarteau » p. 335

Les deux enfans en l’air, sortant de dessous un lambeau de draperie, sont d’une finesse et d’une légèreté étonnantes ; cette femme qui regarde ironiquement par-dessus son épaule, est d’une grâce et d’une expression peu communes.

634. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

On choisit un sujet, on en saisit les rapports, on les coordonne et on laisse chanter sa phrase sur des airs connus. […] Pendant quelques années l’air en fut obscurci. […] C’est ainsi que Victor Hugo, pour se donner l’air d’avoir inventé le Romantisme, ne faisait qu’en exagérer les principes. […] Il n’a fait qu’aspirer l’air de son époque pour y découvrir des harmonies nouvelles, et d’un bond il a atteint aux plus hautes sphères du lyrisme. […] Il avait rencontré sur le boulevard un homme couvert de haillons, mais de haillons qui avaient conservé un certain air d’élégance.

635. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Là, voyant les commodités qu’elle recevait du corps, son visible et sensuel collègue, et trouvant ses ailes brisées et pendantes, elle s’affranchit de la peine de monter dorénavant au haut de l’air, oublia son vol céleste, et laissa l’inerte et languissante carcasse se traîner sur la vieille route dans le rebutant métier d’une mécanique conformité472. » Si l’on ne découvrait pas ici des traces de brutalité théologique, on croirait lire un imitateur de Phèdre, et sous la colère fanatique on reconnaît les images de Platon. […] Au milieu de ses syllogismes, Milton prie, soutenu par l’accent des prophètes, entouré par les souvenirs de la Bible, ravi des splendeurs de l’Apocalypse, mais retenu à la porte de l’hallucination par la science et la logique, au plus haut de l’air serein et sublime, sans monter dans la région brûlante où l’extase fond la raison avec une majesté d’éloquence et une grandeur solennelle que rien ne surpasse, dont la perfection prouve qu’il est entré dans son domaine, et au-delà du prosateur promet le poëte484 : « Toi qui siéges dans une gloire et dans une lumière inaccessibles, père des anges et des hommes ! […] Elle appelle ses frères ; « le doux et solennel accent de sa voix vibrante s’élève comme une vapeur de riches parfums distillés, et glisse sur l’air dans la nuit », au-dessus des vallées « brodées de violettes » jusqu’au Dieu débauché qu’elle transporte d’amour. […] At last a soft and solemn breathing sound Rose like a steam of rich distilled perfumes, And stole upon the air. […] Sure something holy lodges in that breast, And with these raptures moves the vocal air To testify his hidden residence : How sweetly did they float upon the wings Of silence, through the empty vaulted night, At every fall smoothing the raven down Of darkness, till it smil’d !

636. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

Soudain elle s’éleva dans l’air comme une pluie d’or ; tout disparut à travers cette vapeur de feu, et le disque même du soleil fut entièrement caché. Ce spectacle avait le prestige d’un songe ; mais, un instant après, cette pluie retomba, l’air se retrouva aussi pur, le brouillard aussi épais, mais moins élevé. […] Dans ce moment le voile était tiré : je voyais tout. jusqu’à l’écume des torrents et au vol des oiseaux ; l’air était parfaitement pur ; seulement, quelques nuages qui se trouvaient sur la direction ordinairement plus froide des eaux ou des courants d’air circulaient encore dans le milieu du bassin, se traînaient peu à peu le long des montagnes, remontaient dans leurs sinuosités, et venaient se reposer enfin autour de leurs pointes les plus élevées, où ils ondoyaient légèrement. […] Mais cette douce émotion passe comme un beau rêve, comme un bel air de musique, comme un bel effet de lumière, comme tout ce qui est bien, comme tout ce qui, nous touchant vivement, ne doit par cela même durer qu’un instant. » Certes de telles pages, négligemment jetées et venues comme d’elles-mêmes dans une brochure plutôt politique, attestent mieux que tout ce qu’on pourrait dire un coin de nature d’artiste bien mobile et bien franche (genuine), ouverte à toutes les impressions, et digne, à certains moments, de tout comprendre et de tout sentir. […] Sous air de reprendre et de professer Delolme, il est aussi révolutionnaire qu’il le faut.

637. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

Souvent nous imputons aux contre-temps, des chagrins dont la source est uniquement dans l’intemperie de nos humeurs, ou dans une disposition de l’air qui afflige notre machine. Si l’air avoit été plus serain, peut-être aurions-nous vû avec indifference une chose qui vient de nous desesperer. […] Quoique les espagnols aïent eu plusieurs souverains magnifiques, et aussi épris des charmes de la peinture qu’aucun pape l’air jamais été ; cependant cette nation si fertile en grands personnages, et même en grands poëtes tant en vers qu’en prose, n’a point eu de peintre de la premiere classe, à peine compte-on deux espagnols de la seconde. […] Aussi toutes ces traductions, qui ne se réimpriment gueres, n’ont qu’une vogue passagere qu’elles doivent à l’air étranger de l’original, et à l’amour inconsideré que bien des gens ont pour les choses singulieres. […] Il osa le premier mettre des figures véritablement en l’air, et qui plafonnent, comme disent les peintres.

638. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

La Monnoye, dans ses notes sur La Croix du Maine, en a usé à son exemple ; il cite sur Louise Labé un petit distique et un quatrain qu’on ne trouve point, dit-il, dans la guirlande de vers à sa louange ; je le crois bien, car ces petits vers salaces ont tout l’air d’être de la façon du malin commentateur lui-même. […] J’étais sans nulle défiance ; J’avançais en cueillant un gros bouquet de fleurs, En chantant à mi-voix un air de mon enfance, Avec lequel toujours on m’endormait sans pleurs. […] l’invisible Amour circule dans les airs, Dans les flots, dans les fleurs, dans les songes de l’âme, Dans le jour qui languit, trop chargé de sa flamme, Et dans les nocturnes concerts ! […] Cela en a presque l’air.

639. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

… Partout sur des autels j’entends mugir Apis, Bêler le dieu d’Ammon, aboyer Anubis. » Mais voici le génie d’expression qui se retrouve : « Des opinions puissantes, un vaste échafaudage politique ou religieux, ont souvent été produits par une idée sans fondement, une rêverie, un vain fantôme, Comme on feint qu’au printemps, d’amoureux aiguillons La cavale agitée erre dans les vallons, Et, n’ayant d’autre époux que l’air qu’elle respire, Devient épouse et mère au souffle du Zéphire. » J’abrège les indications sur cette portion de son sujet qu’il aurait aimé à étendre plus qu’il ne convient à nos directions d’idées et à nos désirs d’aujourd’hui ; on a peine pourtant, du moment qu’on le peut, à ne pas vouloir pénétrer familièrement dans sa secrète pensée : « La plupart des fables furent sans doute des emblèmes et des apologues des sages (expliquer cela comme Lucrèce au livre III). […] Furieux, de ses pas cachés dans ces déserts Leur narine inquiète interroge les airs, Par qui bientôt frappés de sa trace nouvelle, Ils volent à grands cris sur sa route fidèle. » La pensée suivante, pour le ton, fait songer à Pascal ; la brusquerie du début nous représente assez bien André en personne, causant : « L’homme juge toujours les choses par les rapports qu’elles ont avec lui. […] l’auteur du Génie du Christianisme, celui même à qui l’on a dû de connaître d’abord l’étoile poétique d’André et la Jeune Captive 55, a rempli comme à plaisir la comparaison désirée, lorsqu’il nous a montré les missionnaires du Paraguay remontant les fleuves en pirogues, avec les nouveaux catéchumènes qui chantaient de saints cantiques : « Les néophytes répétaient les airs, dit-il, comme des oiseaux privés chantent pour attirer dans les rets de l’oiseleur les oiseaux sauvages. » Le poëte, pour compléter ses tableaux, aurait parlé prophétiquement de la découverte du Nouveau-Monde : « Ô Destins, hâtez-vous d’amener ce grand jour qui… qui… ; mais non, Destins, éloignez ce jour funeste, et, s’il se peut, qu’il n’arrive jamais !  […] Chaque fois qu’en ces lieux un air frais du matin Vient caresser ta bouche et voler sur ton sein,  Pleure, pleure, c’est moi ; pleure, fille adorée ; C’est mon âme qui fuit sa demeure sacrée, Et sur ta bouche encore aime à se reposer.

640. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

On dirait qu’il écoute lui-même, en dedans de lui, un invisible musicien qui lui note l’air, et qu’il répète timidement, en s’effrayant, en se relevant, en se reprenant lui-même, le solfège que la nature lui fait épeler ! […] Nous montâmes plus haut faire aussi nos vendanges De rêves purs à l’âme et d’air sain aux poumons ; C’est que la poésie est une vigne d’anges, Qui mûrit et qu’on cueille à la cime des monts. […] À l’appel du soleil on se lève soudain ; Le corps prend sa fraîcheur, l’âme son innocence, Dans cet air transparent et vierge du jardin. […] Et le maître, emporté par des souffles divins, S’en va, poète équestre, au-dessus des ravins, Au galop, dans le vent, selon sa fantaisie, Humer, à pleins poumons, l’air et la poésie.

641. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

On nous bandait les yeux, et alors il était beau de voir toutes les pièces du carillon, par ordre de grandeur, de la plus grosse à la plus petite, revêtues de la belle robe de dentelle brodée qu’elles portèrent le jour de leur baptême, traverser l’air pour aller, en bourdonnant gravement, se faire bénir par le pape. […] D’ordinaire, elle était à peu près immobile, l’air sombre, égaré, l’œil terne et fixe. […] En nous retournant, nous lui trouvions l’air cruel et irrité. […] À la pudeur exquise que respirait tout son extérieur se joignait un air triste, résigné, discret.

642. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 février 1885. »

Ritt et Gailhard sont résolus à repousser toutes nouveautés dangereuses : ils ont donné Tabarin, une pantomime agréable, accompagnée, je crois, de chants et de musique ; ils nous ont rendu Faust, avec une foule de chanteurs et d’airs renouvelés ; enfin ils nous promettent Rigoletto, pour attendre un grand opéra de Clapisson. […] Concert : Air de concours des Maîtres Chanteurs ; 22 Janvier. Concert : Air de Dalad, du Hollandais Volant ; l’Enchantement du Vendredi-Saint (paraphr.) […] Concert : Air de Tannhæuser.

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