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1289. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre premier. La contradiction de l’homme » pp. 1-27

Et souvent les formes récentes de l’éthique, celles mêmes qui repousseraient, comme trop discrédité, le titre de « morale », ne font que donner inconsciemment une forme nouvelle à ces mensonges éternels.

1290. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Stéphane Mallarmé » pp. 146-168

Paul Valéry, elle est plausible, Hugo n’avait-il pas émis la prétention de modeler son œuvre sur l’univers et n’est-ce pas l’éternel conflit du bien et du mal qui s’y joue, qui lui avait suggéré son procédé de l’antithèse ?

1291. (1886) De la littérature comparée

Elle est l’éternelle affirmation du génie toujours mobile de l’homme, de ses recherches d’un idéal que modifient les temps et les lieux, mais qui, sous ses formes changeantes, demeure cependant l’idéal.

1292. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Pline le Naturaliste. Histoire naturelle, traduite par M. E. Littré. » pp. 44-62

aux divinités païennes, mythologiques ; et quant aux divinités héroïques et aux apothéoses : « C’est être Dieu pour l’homme, dit-il, que de venir en aide à l’homme, et telle est la voie qui mène à l’éternelle gloire. » Mais, à part cette interprétation morale, le dieu Auguste et le dieu César ne lui imposent pas autrement.

1293. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. de Lamartine. (Les deux premiers volumes. — Pagnerre.) » pp. 389-408

Après l’avoir peint dans son costume ordinaire, avec ses bottes de velours, son habit de drap bleu, et avoir décrit ainsi sa tête : « Sa chevelure, artistement relevée et contournée par le fer des coiffeurs sur les tempes, se renfermait derrière la nuque dans un ruban de soie noire flottant sur son collet » (ce qui, sans périphrase, veut dire qu’il avait une queue) ; après avoir ajouté, en parlant toujours de sa tête : « Elle était poudrée à blanc à la mode de nos pères, et cachait ainsi la blancheur de l’âge sous la neige artificielle de la toilette », le peintre en vient au caractère de la personne et au visage : On eût dit que le temps, l’exil, les fatigues, les infirmités, l’obésité lourde de sa nature, ne s’étaient attachés aux pieds et au tronc que pour faire mieux ressortir l’éternelle et vigoureuse jeunesse du visage.

1294. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — II. » pp. 460-478

Le discours prononcé par lui au Corps législatif, le 5 avril 1802, en présentant le traité du Concordat, nous offrirait, au milieu de quelques redites, de belles et éternelles maximes d’État.

1295. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

Elle empruntait à la fausse poésie du jour tous ses oripeaux, pour se persuader que son caprice du moment était un culte éternel.

1296. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

C’est ici que se place un des plus curieux épisodes littéraires d’alors, un de ces accidents qui caractérisent le mieux et l’esprit de l’époque en particulier et l’éternel esprit de cette race parisienne, qui survit à toutes les époques et que les régimes les plus divers n’ont point changé.

1297. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

Voltaire peut-être a raison, et pourtant la postérité, qui n’a pas à opter entre ces chefs-d’œuvre divers ni à se décider pour l’un au détriment des autres, la postérité, qui n’est pas homme de lettres, ne se pose point la question de la sorte ; elle ne recherche pas ce qui est plus ou moins difficile ou élevé comme art, comme composition ; elle oublie les genres, elle ne voit plus que le trésor moral de sagesse, de vérité humaine, d’observation éternelle qui lui est transmis sous une forme si parlante et si vive.

1298. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

« J’apprends chaque matin en me réveillant, dit-il, qu’on vient de découvrir une certaine loi générale et éternelle dont je n’avais jamais ouï parler jusque-là.

1299. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

Sainte-Beuve, auquel je reviens toujours parce que l’opinion de ce temps le préfère injustement à Chasles et le classe plus haut, l’éternelle sotte qu’elle est !

1300. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Octave Feuillet a eu à rajeunir cet éternel sujet de la courtisane régénérée par l’amour, qui offre, il faut le croire, un bien vif attrait aux poëtes et aux artistes, puisque tous ou presque tous s’y sont laissé prendre. […] Les fleuves ont germé dans ses veines, sa tête Enferme les Védas ; son souffle est la tempête Sa marche est à la fois le temps et l’action ; Son coup d’œil éternel est la création, Et le vaste univers forme son corps solide, etc., etc. […] une hérésie, un paradoxe ou un mensonge, mais une légitime revanche de l’esprit contre la matière, une protestation soudaine de la plus noble portion de notre être contre la plus vile, un précieux débris de l’héritage détruit par la faute originelle, un gage de réhabilitation future, une lettre d’audience accordée par le Créateur à la créature pour la rapprocher de lui, la relever de sa misère, et lui rappeler que leur séparation ne doit pas être éternelle. […] À côté de ces poëtes secondaires, de leurs pâles héros et de leurs héroïnes fardées, notre auteur fait revivre ces générations de comédiens et de comédiennes dont les noms brillent encore, à travers les âges, comme les étoiles d’un ciel plongé dans une éternelle nuit. […] oui, tu leur ressembles, sourire éternel, larme intarissable !

1301. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Si le multiple et l’infini Shakespeare est tous les personnages de ses drames, les personnages des drames de Diderot sont tous Diderot, l’éternel Diderot, monotone et ennuyeux ; car en fait d’ennui Diderot a précédé Gœthe, le plus grand ennui qui ait jamais, depuis le commencement du monde, fait bâiller les hommes sur la terre… Le critique Geoffroy écrivait, en 1811 : « On a sifflé le Père de famille. […] Les monuments d’une science incrédule comme le fut l’Encyclopédie au xviiie  siècle ne répondent, eux, qu’à des besoins de destruction qui ne peuvent pas être éternels : autrement le monde finirait. […] Je m’imagine que l’athéisme de Littré, par exemple, l’athéisme scientifique, positif, absolu, de ces derniers temps, ne se découvre pas le front, comme faisait Newton quand il prononçait le nom de Dieu, devant le matérialisme lyrique de Diderot, ivre de matière et qui parlait avec tant d’inconséquence de l’Eternel… D’un autre côté, l’Encyclopédie n’eut pas non plus, pour son exécution, des ouvriers de la force de ces sublimes anonymes du moyen âge, qui ne se souciaient que de la gloire de Dieu et ne pensaient pas à la leur en élevant vers lui leurs merveilleux édifices.

1302. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Cet éternel sujet-là peut admettre en effet, dans ses développements, et par la peinture des personnages divers qui peuvent s’y trouver mêlés, presque toute la comédie humaine. […] Sur Célimène, c’est-à-dire sur l’« éternel féminin » dans toute son horreur. […] Des siècles et des siècles de routine héritée, de doctrine formelle et vide, de tyrannie et de soumission intellectuelle, de suffisance imperturbable et de docilité inepte, d’entêtement orgueilleux et féroce dans le faux, de profonde inintelligence des choses, consacrée et précieusement transmise en immuables formules ; bref, toute l’énorme sottise humaine semblait chanter un hymne triomphal dans ce magnifique couplet où l’éternel Pédant se peint lui-même en louant l’éternel Disciple. « … Il n’a jamais eu l’imagination bien vive, ni ce feu d’esprit qu’on remarque dans quelques-uns ; mais c’est par là que j’ai toujours bien auguré de sa judiciaire… Il est ferme dans la dispute, fort comme un Turc sur ses principes, ne démord jamais de son opinion… Mais sur toute chose ce qui me plaît en lui, et en quoi il suit mon exemple, c’est qu’il s’attache aveuglément aux opinions de nos anciens, et que jamais il n’a voulu comprendre ni écouter les raisons et les expériences des prétendues découvertes de notre siècle touchant la circulation du sang et autres opinions de même farine. » Cette page (relisez-la tout entière, je vous prie) est assurément une de celles qui donnent la plus haute idée de l’esprit de Molière. […] Il y a bien du sens dans ces préceptes du vieux Boileau : Que les vers ne soient pas votre éternel emploi.

1303. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

et ne saisissez-vous pas une ressemblance de sentiment et de ton entre la méditation, encore tempérée, de Jean-Jacques, et les effusions miséricordieuses et effrénées de Rolla : Ô Chaos éternel, prostituer l’enfance ! […] Son éternel dessein de réforme morale paraît sérieux cette fois. […] Cela rend plus fâcheuses encore leurs éternelles invocations à la vertu et leur donne un air, soit d’hypocrisie, soit d’inconscience, également regrettable… Oui, c’est vraiment désobligeant, cette manière de fourrer la vertu où elle n’a que faire. […] Elle ne l’avait point prévu : Dans l’instant même, écrit-elle à Saint-Preux, où j’étais prête à jurer à un autre une éternelle fidélité, mon cœur vous jurait encore un amour éternel, et je fus menée au temple comme une victime impure qui souille le sacrifice où l’on va l’immoler. […] » Et encore : « Connaissez-le enfin, ma Julie ; un éternel arrêt du ciel nous destina l’un pour l’autre : c’est la première loi qu’il faut écouter ».

1304. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Et puis, comme un enfant qui va au lit, dit Emerson, il s’endort du sommeil éternel. » Dans les plus grands traits comme dans les nuances les plus délicates, ils restent essentiellement germaniques. […] La vieille légende de Caïn et d’Abel se réalisa ainsi à l’origine de l’histoire de la France et généralement de toutes les nations latines ; des deux hommes qui étaient dans chacun de nos ancêtres, il y en eut un qui fut le préféré de Dieu et de la civilisation, l’homme absolu et éternel ; il y en eut un autre qui fut le rejeté et le maudit, l’homme instinctif. […] Bien que ce récit puisse paraître étrange, je proteste devant le Dieu éternel que c’est la pure vérité. […] Pour tous deux, le monde moral se divise en trois régions : la salle d’un lord-maire céleste où sont appelées à un banquet éternel les personnes de vie respectable et d’honnêtes mœurs, un Bedlam divisé en étroits cabanons noirs et infects, et un immense Newgate dont aucun charitable John Howard ne viendra visiter et assainir les cellules. […] On a là sous une forme tout à fait gentille l’éternelle histoire des illusions de l’amour.

1305. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Ce furent de beaux lis qui mieux que la nature Mêlant à leur blancheur l’incarnate peinture, Que tira de leur sang le couteau criminel, Devant que d’un hiver la tempête et l’orage À leur teint délicat pussent faire dommage, S’en allèrent fleurir au printemps éternel. […] Ma substance la plus intime me contraint à remonter jusqu’à mon éternelle racine. […] Leur état d’âme était précisément en contraste absolu avec le précédent, et l’on peut vérifier ici la seule loi de l’histoire littéraire, ou plutôt de l’histoire intellectuelle, à laquelle je croie, la loi d’éternelle action et réaction, la loi de constante réaction, d’une génération nouvelle contre celle qui la précède. […] Sachez bien que ce sont les hommes comme vous qui ont donné à l’humanité l’idée sublime et tendre de ce séjour des éternels commerces auquel vous ne croyiez point. […] C’est l’éternelle confusion volontaire du bien et du beau.

1306. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Les nouvelles idées sont de nouveaux assemblages d’éléments éternels. […] Ou bien l’aventure des peuples et des lettres ne serait qu’une éternelle frénésie. […] S’il chante, lui, ce sont des chansons presque aussi vieilles que la terre et qui semblent aussi éternelles et naturelles que les montagnes, la lune et les bois, que le chagrin, l’allégresse et l’amour. […] Or, s’il a montré, dans Salammbô, l’éternelle vie, à plus forte raison la devons-nous sentir dans les romans de mœurs contemporaines. […] Mme B…, en prison, reçut la visite de son mari, lequel lui jura une fidélité éternelle.

1307. (1903) La pensée et le mouvant

Nous nous disions que les problèmes métaphysiques avaient peut-être été mal posés, mais que, précisément pour cette raison, il n’y avait plus lieu de les croire « éternels », c’est-à-dire insolubles. […] Mais cette date s’efface aussitôt, en vertu du principe, ancré dans notre intelligence, que toute vérité est éternelle. […] Comme si leur intuition n’était pas une recherche immédiate de l’éternel ! […] Une intuition qui prétend se transporter d’un bond dans l’éternel s’en tient à l’intellectuel. […] Elles se placent dans l’éternel.

1308. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — I. » pp. 234-253

Annibal, à neuf ans, avait juré aux Romains une haine éternelle.

1309. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — II. (Suite.) » pp. 434-453

Daru de loin, comme Andrieux de près, redisait à Picard les conseils de l’Art poétique d’Horace, conseils éternels et de bon sens, mais qui étaient peut-être d’une vérité trop générale et qui ne s’appropriaient pas assez au cas particulier.

1310. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

Il était tendrement épris depuis quelque temps de l’aimable Mme de La Sablière, et croyait que cette passion qu’elle lui inspirait serait éternelle : Je sers une maîtresse illustre, aimable et sage ;         Amour, tu remplis mes souhaits : Pourquoi me laissais-tu, dans la fleur de mon âge, Ignorer ses vertus, ses grâces, ses attraits ?

1311. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « De la poésie de la nature. De la poésie du foyer et de la famille » pp. 121-138

Il mérite que Mme d’Épinay, étonnée, lui dise : « Vous, monsieur, qui êtes poète, vous conviendrez avec moi que l’existence d’un Être éternel, tout-puissant, souverainement intelligent, est le germe d’un plus bel enthousiasme. » Au reste, Saint-Lambert a lui-même exposé dans sa vieillesse, et sans plus y mêler la mousse du champagne, la série et le système complet de ses réflexions sur tous sujets dans ce fameux Catéchisme universel qui parut une œuvre philosophique si morale sous le Directoire.

1312. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — I » pp. 93-111

Ce qui est singulier, ce n’est pas qu’on ait fait une telle déclaration, qui a dû ressembler à beaucoup d’autres, et qui roule sur un éternel lieu commun de morale facile ; mais c’est que trente ans après on prenne la peine de se la rappeler en propres termes, et de l’enregistrer comme mémorable au milieu des remarques philosophiques ou politiques qu’on tire de ses lectures.

1313. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « II » pp. 21-38

On l’y retrouve surtout dans les premières années, engendrant encore les tracasseries jusque dans son bonheur, se montant la tête pour son éternelle Pucelle ; car s’il avait eu tort de la faire, elle l’en a bien puni ; il se créait des dangers en idée, se voyait déjà décrété par un parlement, et tenait parfois ses paquets tout prêts, même en plein hiver et pendant les mois de neige, pour pouvoir d’un saut, s’il le fallait, franchir la frontière.

1314. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Vauvenargues se trompe sur un point, et il borne trop son regard à l’influence présente : de grandes pensées, de belles vérités écrites et fixées avec éclat, ne sont-elles pas aussi des actions, moins promptes il est vrai, mais permanentes et éternelles ?

1315. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

Il s’en tirait par de jolis mots ; ainsi, à Cauchois-Lemaire, qui le consultait sur un écrit politique : « Je reviens à mon éternel reproche : il y a longueur selon moi.

1316. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. »

C’est le duel éternel de tout ce qui finit et de ce qui succède, de ce qui se survit et de ce qui doit vivre ; cela s’est vu de tout temps, en grand, en petit, dans tous les genres et dans tous les ordres : César et, Pompée, Malherbe et le vieux Desportes, Descartes et Voët, Franklin et l’abbé Nollet… Le chevalier de Glerville sent désormais son maître dans celui qui fut longtemps son diacre, comme le disait plaisamment Vauban : « Il est fort chagrin contre moi, ajoutait celui-ci, quelque mine qu’il fasse ; c’est pourquoi il ne me pardonnera rien de ce qui lui aura semblé faute ; mais je loue Dieu de ce que lui et moi avons affaire à un ministre éclairé qui, en matière de fortification, ne prend point le change, et qui veut des raisons solides pour se laisser persuader et non pas des historiettes. » Une dernière rencontre a lieu entre les deux rivaux, au sujet des fortifications de Dunkerque ; elle est décisive.

1317. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Il est un petit nombre d’écrivains qui ont un privilège : ils ont peint l’homme dans leurs œuvres, ou plutôt ils sont l’homme, l’humanité même, et comme elle ils deviennent un sujet inépuisable, éternel, d’observations et d’études.

1318. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Charles-Quint après son abdication, au monastère de Saint-Just »

Qu’on se rappelle Sainte-Hélène, Gourgaud jaloux de Las Cases ; c’est l’éternelle histoire.

1319. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire. »

On aura remarqué dans ces lettres de Ducis de beaux mots et une large touche ; il n’en est aucune des siennes qui n’offre ce caractère : et j’ai souvent pensé que si, par bonheur pour lui, et dans quelque naufrage pareil à celui de l’Antiquité, toutes ses tragédies étaient perdues et que s’il ne restait que ses lettres, on aurait d’éternels regrets ; on croirait avoir affaire en lui à un génie complet dont il faudrait déplorer les chefs-d’œuvre.

1320. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Aimer Molière, c’est n’être disposé à aimer ni le faux bel esprit ni la science pédante ; c’est savoir reconnaître à première vue nos Trissotins et nos Vadius jusque sous leurs airs galants et rajeunis ; c’est ne pas se laisser prendre aujourd’hui plus qu’autrefois à l’éternelle Philaminte, cette précieuse de tous les temps, dont la forme seulement change et dont le plumage se renouvelle sans cesse ; c’est aimer la santé et le droit sens de l’esprit chez les autres comme pour soi. — Je ne fais que donner la note et le motif ; on peut continuer et varier sur ce ton.

1321. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

C’est l’éternelle loi.

1322. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

Si je provoque le scandale, je hais le mensonge ; jamais, pour triompher d’une résistance, je n’ai eu recours à la comédie de l’amitié ; jamais je n’ai prodigué les feintes promesses ni les faux serments d’une éternelle flamme ; jamais je n’ai séduit, jamais je n’ai trompé… » Morale facile, morale commode, mais qui va devenir rare encore en ce siècle, s’il continue dans la voie où il est depuis quelque temps engagé, — et où il semble faire des progrès chaque jour, celle du faux-semblant convenu et de l’hypocrisie utile.

1323. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

Pour moi, je l’avouerai, ces sortes d’explications sur de grands génies pris dorénavant comme types absolus et symboles, non pas précisément surfaits, mais généralisés de plus en plus et comme élevés en idée au-dessus de leur œuvre, si forte et si grande déjà qu’elle soit en elle-même, ces considérations chères à la haute critique moderne restent à mes yeux nécessairement conjecturales ; ce sont d’éternels problèmes qui demeurent au concours et où l’on revient s’essayer de temps à autre : chacun, à son tour, y brise une lance.

1324. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Jamais elle n’avait connu ce premier attrait invincible, le plus simple, le plus éternel de tous, celui dans lequel les sens jouent leur rôle, même à leur insu, l’amour de Chloé pour Daphnis, ou même celui de Virginie pour Paul.

1325. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Leckzinska (suite et fin.) »

On se le représentera facilement, si l’on pense que cette reine aimait à la passion son époux, qu’elle le voyait lui échapper entièrement, dans la fleur encore de sa jeunesse à lui, et à l’âge où elle-même elle commençait à se flétrir ; qu’elle avait pour dames du palais, nommées pour l’accompagner et la servir, précisément ces mêmes sœurs rivales qui lui enlevaient à tour de rôle le cœur du roi et se le disputaient entre elles, de manière à compromettre aussi le salut éternel de son âme.

1326. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Mlle Eugénie de Guérin et madame de Gasparin, (Suite et fin.) »

Pour prêcher l’Évangile éternel, elle emploie les procédés de son temps ; elle est de son époque.

1327. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre »

Voilà la vérité morale, la vérité éternelle ; et à l’égard de Saint-Simon, de ce duc entêté, implacable, féroce, tout ce que vous voudrez, mais honnête homme au sens roide du mot, le duc de Noailles l’a prouvé et a vérifié la maxime.

1328. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Saint-Simon considéré comme historien de Louis XIV, par M. A. Chéruel »

Les courtisans souhaitèrent chacun qu’il se trouvât aussi importuné d’eux, puisque ces trois hommes avaient fait avec lui tout ce qu’ils avaient voulu toute leur vie. » Je ne sais si c’est là de la vérité historique, mais c’est assurément de la grande et éternelle vérité morale.

1329. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La comédie de J. de La Bruyère : par M. Édouard Fournier. »

Il y a de l’abus sans nul doute ; mais n’y en avait-il pas aussi dans cette éternelle répétition des mêmes choses convenues, banales et usées ?

1330. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « CHRISTEL » pp. 515-533

Si elle avait pu, du moins, sortir, se distraire par le monde, vivre de la vie de bal et s’étourdir comme la plus frivole dans le tourbillon insensé, ou mieux, s’échapper et courir par les bois, biche légère, et chercher, s’il en est, le dictame dans les antres secrets, au sein de la nature éternelle !

1331. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

Michelet restera surtout comme l’historien du moyen âge : c’est là la partie vraiment éternelle de son œuvre, où s’équilibrent l’érudition et l’imagination, où la sensibilité vibrante devient un instrument d’exactitude scientifique.

1332. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre III. La poésie : V. Hugo et le Parnasse »

De là, ce défilé des dieux et des religions qui sont les formes par où l’humanité tente toujours de tromper son ignorance et d’éterniser sa brièveté ; mais ces formes elles-mêmes passent, portant témoignage de l’universel écoulement et de l’éternelle illusion, démasquant le néant dans leur mélancolique succession.

1333. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IV. Ordre d’idées au sein duquel se développa Jésus. »

On arrive par l’échafaud à l’apothéose ; les caractères ont des traits accusés, qui les gravent comme des types éternels dans la mémoire des hommes.

1334. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre X. Les sociales »

Aujourd’hui, elle lui apparaît tout à fait condamnable parce que sa laideur éternelle s’est extériorisée : « Elle sent la gamelle et la buffleterie des bas officiers, l’amour ancillaire d’une populace de Gothons en extase devant le caporal ignominieux. » Il y a, paraît-il, un parti politique « où les professeurs d’élégance oublient de saluer sur le terrain un adversaire qu’ils jugent pourtant digne de croiser le fer avec eux » ; et Tailhade s’irrite contre ces vilains « à qui mesdames leurs mères, trop occupées de leurs confitures et du point de sel à mettre dans le pot, n’eurent guère le temps d’apprendre le bel air des choses ».

1335. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

Ce thème éternel est rajeuni ici par une imagination charmante.

1336. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « La Mare au diable, La Petite Fadette, François le Champi, par George Sand. (1846-1850.) » pp. 351-370

Les scènes de « La fenaison » offrent un tableau plein de charme et de grâce assurément, mais on y voit tout à côté cet éternel plaidoyer entre la société et la nature, entre les gens de loisir et les gens du peuple ou de labeur, ceux-ci ayant invariablement l’avantage.

1337. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres de la marquise Du Deffand. » pp. 412-431

Poursuivie de cette idée de solitude et d’éternel ennui, elle essaya alors de se donner une compagne dans Mlle de Lespinasse.

1338. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Ce début primitif, beaucoup moins emphatique et moins fastueux que celui qu’on lit en tête des Confessions, ne nous fait point entendre le coup de trompette du Jugement dernier, et ne finit point par la fameuse apostrophe à l’Être éternel.

1339. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

Au contraire, le sacrifice mercenaire du bonheur public à l’intérêt propre est le sceau éternel du vice.

1340. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

Il y exprimait pourtant une idée très philosophique, c’est qu’il n’y a pas de raison pour que la nature ne crée pas aujourd’hui d’aussi grands hommes qu’autrefois, et qu’il y a place, dans sa fertilité inépuisable, à un éternel renouvellement des talents.

1341. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

De son côté, Anatole, le bel Espagnol, doué de tous les talents et de tous les charmes, et à qui il ne manque que la parole, se croit également sacrifié, et il est disposé à s’éloigner pour toujours, lorsqu’un soir, à l’Opéra (car sans Opéra point de roman), Valentine, qui a voulu le revoir, et à qui il croit aller faire du regard un éternel adieu, lui adresse de loin un signe qui veut dire : Restez !

1342. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

La meilleure lecture au sortir de là, l’antidote le plus direct à prendre, c’est Pascal qui fait, à chaque instant, crier dans l’homme la contradiction éternelle, et qui, dans son langage ferme et nu, est le moins asiatique des écrivains.

1343. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre III. Personnages merveilleux des contes indigènes »

— Les démons, ce type de la révolte vaincue et de l’éternelle rancune, semblent assez rares et de conception islamique.

1344. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Mais l’innocente joie et la franche gaîté ont bien aussi leurs charmes ; et l’expression du bonheur est peut-être un hymne aussi respectueux pour le Dieu de qui nous tenons la vie, que ces éternelles lamentations qui semblent la lui reprocher comme un don funeste.

1345. (1892) L’anarchie littéraire pp. 5-32

Ceux-ci sont les seuls qui aient apporté des théories nouvelles en esthétique, en morale comme en philosophie, les seuls qui s’appuient sur une base invariable et éternelle : la Science.

1346. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

Et, de fait, quoi de plus piquant que de voir les sociétés et de juger l’homme à travers les deux ridicules qui font la comédie, — le ridicule éternel et le ridicule de chaque temps ?

1347. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Prosper Mérimée »

L’élégie des pantalons collants y est éternelle !

1348. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

Ses Discours sur Tite-Live, à lui, furent les Considérations sur la France, et cette méditation éternelle de la Révolution française à laquelle il retombait toujours, de toutes les pentes de la métaphysique, qu’il aimait à monter appuyé sur l’Histoire.

1349. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

Question éternelle !

1350. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iii »

Je mets ton sort éternel entre tes mains : suis-moi au Calvaire.

1351. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

… La lumière du cœur, qui ne se couche point… Ô mort, geôlière aux verrous de fer, brute sourde, qui t’a donné ces cachots éternels ? […] Il est resté fidèle, et de plus en plus fidèle, à un usage ancien dont il prouve l’éternelle jeunesse. […] Du fond de la mort, il apportera l’amour éternel ! […] Les problèmes qui inquiètent l’auteur des Grands Initiés et de La Druidesse sont les problèmes éternels que la philosophie, en tous temps comme en tous pays, examine. […] si tu savais, si tu savais, terre excessivement vieille et si jeune, le goût amer et doux, le goût délicieux qu’a la vie si brève de l’homme ; si tu savais, éternelle idée de l’apparence, ce que la proche attente de la mort donne de valeur à l’instant !

1352. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Te voilà vaincu, à ton tour, par le féminin, l’éternel féminin. […] Cet être idéal, c’est « l’enfant malade et douze fois impur » dont parle Vigny ; et ces nécessités de l’organisme sont tellement puissantes, que les vertus ou les vices de l’éternelle blessée dépendent, dans la plupart des cas, de simples désordres physiques. […] Il est là, comme une tentation éternelle, prêt à recevoir ceux que cette science n’a pas contentés, et quelques-uns s’y jettent éperdument parmi ceux-mêmes qui ont poussé le plus avant au cœur de l’impuissante et vaine science. […] On dirait que le vent qui traverse indéfiniment leurs steppes sans montagnes a laissé dans ces âmes un peu de son éternel va-et-vient Cette incertitude les fait souffrir jusqu’à l’agonie. […] C’est un de ces comparses éternels qui ne seront jamais assez énergiques pour imposer leur volonté même dans les plus humbles événements.

1353. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

C’est ici l’éternel sophisme du réel pris et donné pour le vrai. […] Il a, plus encore que Sainte-Beuve, de qui nous sortons tous, le sens du relatif et l’inquiétude avec l’amour de l’éternelle illusion qui nous enveloppe. […] Il semble qu’à lui aussi elle soit apparue, une nuit d’été, dans son voile plein d’astres, et qu’il se soit écrié comme le voyant de Madaure : « Sainte déesse, éternelle providence des hommes, toujours prodigue de tes bienfaits, tu as pour les malheureux la double affection d’une mère. […] Quel charme avez-vous donc que cette vieille et éternelle histoire revive avec vous dans sa fraîcheur et sa grâce premières ? […] Jules Verne l’éternelle question : « M. 

1354. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Des gens qui le connaissent bien m’affirment que ce poète hautain, ce prêtre du néant, est d’ailleurs très candide, très doux, un peu timide et ombrageux, sensible enfin — lui, ce fakir   à quelques-unes des vanités innocentes par lesquelles l’éternelle Maya nous déçoit. […] A mesure qu’elle montait, elle devenait belle ; et comment ne l’aurait-elle pas été, puisque la forme et les proportions en étaient commandées par des lois nécessaires et éternelles ? […] Son public est, à peu de chose près, celui des mardis de la Comédie Française et des réceptions de l’Académie… On s’amuse d’autant plus qu’on finit par connaître intimement les artistes, « les hommes les plus forts du dix-neuvième siècle », comme dit l’enseigne : Monsieur Gaston, l’hercule en maillot noir, tout à fait distingué et sympathique, l’éternel Bamboula, et ce grand diable qui a si mauvais caractère et qui, lorsque les autres « travaillent », passe son temps à crier : « Il a touché !  […] Ainsi rapproché de la terre antique et de la vie des choses, sentant tout autour de soi l’action imperturbable des forces éternelles, on est moins tenté de s’en faire accroire sur l’importance d’une vie humaine, fût-ce une vie de journaliste. […] Je ne vous rappellerai que cette strophe de Lamartine : Ainsi toujours poussés vers de nouveaux rivages, Dans la nuit éternelle emportés sans retour, Ne pourrons-nous jamais sur l’océan des âges Jeter l’ancre un seul jour ?

1355. (1875) Revue des deux mondes : articles pp. 326-349

Il en est de même pour les corps organisés : un chimiste et un physiologiste ne pourraient faire apparaître des êtres vivants nouveaux dans leurs expériences qu’en obéissant aux lois éternelles de la nature. […] En effet, au point de vue scientifique, la philosophie représente l’aspiration éternelle de la raison humaine vers la connaissance de l’inconnu. […] « Les propriétés physiques des corps, dit-il, sont éternelles. […] Les propriétés physiques étant éternelles, dit-il, les corps bruts n’ont ni commencement ni fin nécessaires, ni âge, ni évolution ; ils n’ont de limites que celles que le hasard leur assigne. […] D’abord est-il vrai que les corps de la nature inorganique soient éternels et que les corps vivants seuls soient périssables ; n’y aurait-il pas entre eux de simples différences de degrés qui nous font illusion par leur grande disproportion ?

1356. (1932) Les idées politiques de la France

On peut concevoir trois formes du libéralisme non politique : 1º le libéralisme à l’égard des idées, chacune étant acceptée comme une forme ou un moment de l’éternel esprit humain et pouvant contenir une âme de vérité : soit une tolérance active, dans laquelle est compris un libéralisme envers les religions ; 2o le libéralisme à l’égard des personnes, de leur intelligence et de leur conduite, que vous ne condamnerez ou ne ridiculiserez pas dans la mesure où elles diffèrent des vôtres. […] Elle a identifié aux yeux des Français la politique de Pie XI, sinon la politique éternelle de l’Église, avec un libéralisme international, et, trente ans après l’affaire Dreyfus, elle a, par un coup d’État spirituel, séparé du sabre le goupillon. […] Leur vie est liée à celle de leur éternelle adversaire. […] Il sait les lois générales des nombres et des lignes ; il sait ce que sont les forces physiques : la pesanteur, la lumière, le son, l’électricité, la chaleur, et il sait qu’elles ne sont peut-être que les diverses apparences d’un mouvement unique et qu’elles obéissent toutes à des lois semblables dont un certain nombre d’exemples ont suffi à lui montrer l’éternelle fixité. » Soit l’histoire naturelle, l’anthropologie, l’histoire, un humanisme fait de la tradition gréco-romaine, où le christianisme ne figure que pour avoir versé dans le cœur de l’homme nouveau « le sentiment nouveau de la pitié » (contre sens qui vient de la proscription subie officiellement par tous les sens du mot charité), et qui se termine sur « la Réforme et la Renaissance l’éveillant pour ainsi dire de la longue nuit du passé, et lui mettant au front comme une aurore le rayon de la liberté de penser ; la France moderne, de Descartes à Voltaire, achevant dans une langue d’une force et d’une précision définitive l’affranchissement de son esprit, et faisant enfin, dans l’explosion de 1789, tomber autour de lui les dernières entraves, et le dressant, au milieu du monde, dans la hauteur de tous ses droits et le rayonnement de toutes ses libertés. » Évidemment, c’est monument de Gambetta, c’est court, et l’on comprend que ce manifeste officiel du laïcisme ait été alors accueilli avec quelque gaîté par l’opinion littéraire, laquelle allait céder au mouvement dit des Cigognes, et prendre parti, en sens divers, dans la bataille Brunetière-Berthelot de 1894 sur la faillite ou l’apothéose de la science, — sorte d’ouverture de l’affaire Dreyfus, où l’on se disputa fort le jeune Français de demain. […] Le socialisme bénéficie, par position, de sa force habituelle, spontanée, anticonservatrice et révolutionnaire, contre l’éternel ennemi, si justement discerné et nommé par M. 

1357. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

À travers les pics et leurs neiges, de l’Engadine, où, par exemple, Caliban prend une rude revanche et s’amuse comme il faut de tout le snobisme (mot qui au fond veut dire bourgeoisisme et embourgeoisisme plutôt encore) des Tartarins moins bonhomme ou des Obermann d’imitation aux ébats de qui chaque « Season » assiste, impassible, du haut des nobles neiges éternelles. […] Ce repos n’est pas celui auquel j’aspire, qui est l’éternel éveil dans l’éternelle Charité, mais il est, il fut celui de bien des grandes âmes… Date manibus lilia plenis ! […] Des sonnets ou pièces diverses suivent le même thème que les Ballades, le vin joyeux ou l’amour tendre, et tout le monde content, de la bonne façon : leitmotiv éternel et original dans sa vaste banalité qui est, au fait, tout un monde. […] Dans un « conseil aux jeunes gens », M. le vicomte de Colleville leur dit, en deux vers excellents, à propos de jeunes filles modernes — et éternelles !

1358. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 5482-9849

« Je suppose que ce soit ici notre derniere heure à tous, que les cieux vont s’ouvrir sur nos têtes, que le tems est passé & que l’éternité commence, que Jesus-Christ va paroître pour nous juger selon nos oeuvres, & que nous sommes tous ici pour attendre de lui l’arrêt de la vie ou de la mort éternelle : je vous le demande, frappé de terreur comme vous, ne séparant point mon sort du vôtre, & me mettant dans la même situation où nous devons tous paroître un jour devant Dieu notre juge : si Jesus-Christ dis-je, paroissoit dès-à-présent pour faire la terrible séparation des justes & des pécheurs ; croyez-vous que le plus grand nombre fût sauvé ? […] L’éternel est son nom, le monde est son ouvrage. […] « Quel homme est assez grossier, assez stupide, pour douter qu’il soit un Dieu suprème, éternel, infini, qui n’a rien engendré de semblable à lui-même, & qui est le pere commun de toutes choses » ? […] Mais en combien d’endroits ne fait-il pas voir qu’il ne reconnoît qu’un Dieu éternel, infini ? […] Le Créateur a gravé lui-même dans sa créature ce qu’il inspiroit aux prophetes & aux apôtres, & la raison est le premier rayon de sa lumiere éternelle, une étincelle de sa science.

1359. (1910) Rousseau contre Molière

  Quant aux Femmes savantes, d’abord il eût été assez difficile à Rousseau de leur appliquer son éternelle formule, à savoir que dans Molière le trompé est toujours antipathique et le trompeur toujours sympathique et présenté « avec un air d’approbation » car ici le trompeur, c’est Trissotin, et l’on conviendra que Molière ne le « fait » pas « aimer ». […] Entre la tragédie qui est le drame histprique et qui ne peint pas les mœurs des hommes, mais plutôt leurs sentiments généraux et éternels, et qui, pour cela, est raillée, un peu lourdement, par Molière (même passage, Critique de l’Ecole des femmes) — et la comédie qui ne doit que faire rire et qui, pour cela, n’a affaire qu’aux sots et n’a affaire que des sots ; une forme intermédiaire de poème dramatique est indiquée qui peindra toutes les mœurs du siècle où l’on est et qui par conséquent aura dans son domaine et les sots et les méchants. […] Cela est si vrai qu’au passage même où il proclame l’amour du beau moral comme éternel dans le cœur de l’homme (« l’amour du beau est un sentiment aussi naturel au cœur humain que l’amour de soi-même… », à ce passage même, il ajoute une note qui est celle-ci : « C’est du beau moral qu’il est ici question. […]   Voilà certes une chose étrange et qui blesse toutes les idées reçues et qui prouve, par parenthèse, que, dans la pièce de l’année suivante, Arnolphe, qui n’a que quarante ans, ne déplaît pas à Agnès selon les idées de Molière, parce qu’il est vieux, mais parce qu’il est ennuyeux et tient des discours éternels de sagesse et d’honneur ; enfin voilà une chose parfaitement étrange, un véritable paradoxe, et, il faut bien le dire, un peu choquant. […] Jourdain) ; sa défiance à l’égard des médecins qui lui vendent leur latin trop cher ; son mépris pour les gens de province, éternelle matière de succès auprès des Parisiens (M. de Pourceaugnac, la comtesse d’Escarbagnas) ; son aversion et sa peur de bourgeoisie peu instruite à l’égard des femmes qui s’instruisent et qui instruites pourraient la mépriser, — et il était bien loin de l’École des Maris et de l’École des Femmes.

1360. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

Voyez ces amants, condamnés aux peines éternelles ; ils m’ont donné l’inspiration de représenter l’amour dans les phases et les poses différentes où il apparaît à notre imagination. […] mourir au balancement de ces sons évanouis en pâles visions, sur l’escarpolette des heures fugitives, berceuses ailées du repos éternel ! […] Quand la balance semble pencher du côté de l’étroitesse de cœur, il met en contrepoids les idées qui le rattachent à tout ce qui est impersonnel et éternel, et l’équilibré est rétabli. […] Ou verra-t-on l’éternel couple de deux cavaliers, chevauchant ensemble sur la route solitaire au coucher du soleil ? […] Oui, le marcheur éternel erre dans ces pages de son pas inquiet.

1361. (1896) Études et portraits littéraires

Lorsque Loti nous confie son angoisse, « son effroi devant le vide indiscuté, absolu, éternel… », et qu’il s’écrie : « Il n’est donc remplaçable par quoi que ce soit au monde, le Christ, quand une fois on a vécu de lui… », j’avoue que je suis ému, dussé-je passer pour dupe. […] Et puis, peu à peu, mon humaine angoisse s’était fondue en une prière ; le Christ était retrouvé, le Christ de l’Évangile…, et les terrestres fins ne m’atteignaient plus ; et il n’y avait plus de néant, plus de poussière, ni plus de mort ; j’étais arrivé au port ineffable et unique, au refuge des refuges, dans la certitude absolue des éternels revoirs… » Encore une de ces pages dont certains ont voulu sourire. […] Puis, presque toujours les « actualités » les plus prochaines s’y introduisent en contrebande ; les choses d’aujourd’hui ou de demain parmi les choses éternelles. […] je n’oublie pas la conclusion de Ma sœur Henriette : les saints préservés de la corruption, l’immortalité assurée aux âmes pures « dans le souvenir de Dieu » et la vie même d’Henriette invoquée comme « un précieux argument de ces vérités éternelles que chaque vie vertueuse contribue à démontrer ». […] Sur le granit, à travers les lierres grimpants, je déchiffre un verset de saint Paul : « Celui qui sème pour l’esprit moissonne, de l’esprit, la vie éternelle. » (Galates, vi, 8.)

1362. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

Voilà l’histoire fidelle du mur éternel de division entre les oratoriens & les jésuites ; la jalousie de corps l’éleva. […] L’inconvénient de la langue de ce peuple, dont l’origine remonte si haut, est cause que les sciences & les arts languissent chez lui dans une éternelle enfance. […] Il ajoute : Cette partie du seizième siècle fera une tache éternelle à la Sorbonne, vu comme elle se conduisit. […] Excédé de leurs éternelles critiques, il crut qu’elles pourroient servir à l’éclairer. […] Entr’autres, celle-ci : « Les enfans qui meurent sans baptême, sont destinés à quelque chose de mieux que la vie éternelle ».

1363. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE CHARRIÈRE » pp. 411-457

Il me semble qu’un volume entier de titres ne me ferait pas envier ce jour-ci : il faut bien autre chose pour compenser ce qu’un engagement éternel a d’effrayant. […] c’est du moins une obligation éternelle que vous m’aurez imposée ; et vous ne pourrez jamais repousser ma reconnaissance, mon respect, mes services, mon dévouement. — Je ne les repousserai pas, m’a-t-elle dit avec des accents enchanteurs ; mais c’est bien plus que je ne mérite.

1364. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

Aristote avait rejeté ces dogmes divins, mais ténébreux, et demandait au corps et aux sens, c’est-à-dire, à la mort, le secret de l’âme et de la vie éternelle. […] Que le dialogue reste le monopole éternel de Platon, puisqu’il n’a été donné qu’à lui seul d’avoir un Socrate pour maître.

1365. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVe entretien. Ossian fils de Fingal »

« — Paix éternelle, dit Cuchullin, aux âmes des héros ! […] je ne te vois plus environné des guerriers de ta race : les bêtes sauvages viennent paître sur la tombe du puissant roi de Morven… Paix éternelle à ton ombre, roi des épées, héros le plus fameux des collines de Cona. » VII Ossian lui-même chante ses premières amours dans son quatrième chant.

1366. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

. — Dans Le Drame de la jeunesse, où il reprit l’idée d’Aimée (l’influence des livres et du théâtre sur la pensée et la moralité modernes, l’altération du naturel par les réminiscences littéraires, la pose, la comédie éternelle jouée entre nous et Dieu, et qui nous empêche d’avoir l’originalité même de nos vices et de nos douleurs), il poussa au comble du suraigu cette ironie15 qui est le caractère de son esprit et le symptôme de sa force, et qui pourrait faire de Paul Féval, s’il la développait dans des sujets de cœur, un romancier d’un comique amer de la plus poignante originalité. […] L’utilitarisme, en religion, est aussi bas qu’en autre chose… Il n’y a de beau et même d’utile, puisqu’on aime ce mot et cette idée-là, mais d’utile dans le sens infini, que ce qui est beau, toujours plus beau, que ce qui se rapproche le plus de la Beauté Éternelle !

1367. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Et il y aura une alliance éternelle avec eux (XXXVII, 26). […] Je sais aussi que, dans les époques de crise, le drame à thèse fera toujours, forcément, une part assez large aux goûts passagers ; mais l’auteur dramatique, s’il prétend être un artiste, n’en est pas moins tenu de respecter, sincèrement, les lois sévères de l’art qui vise à l’éternel.

1368. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

Toute l’ode de Maynard se continue et se soutient dans cet ordre d’idées : c’est le lieu commun éternel sur le néant de toute chose, sur la nécessité de mourir, quoi qu’on fasse.

1369. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

Après une nuit sans sommeil, il courut d’abord au Forum, et il employa plusieurs mois à se familiariser avec ces lieux célèbres : Ce fut à Rome, le 15 octobre 1764, dit-il, comme j’étais assis à rêver au milieu des ruines du Capitole, pendant que les moines déchaussés étaient à chanter vêpres dans le temple de Jupiter, que tout d’un coup l’idée d’écrire la décadence et la chute de la Ville éternelle se présenta pour la première fois à mon esprit.

1370. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

La dévastation et les incendies célèbres qu’entraînèrent ces luttes d’ambition lui causèrent des peines inexprimables : « Quand je songe aux incendies, il me vient des frissons… Toutes les fois que je voulais m’endormir, je revoyais tout Heidelberg en feu ; cela me faisait lever en sursaut, de sorte que je faillis en tomber malade. » Elle en parle sans cesse, elle en saigne et en pleure après des années ; elle en garda à Louvois une haine éternelle : « J’éprouve une douleur amère, écrivait-elle trente ans après (3 novembre 1718), quand je pense à tout ce que M. 

1371. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — II » pp. 375-394

Nous en avons fait quelques-unes de semblables ; mais il faut se rappeler qu’une armée est un corps éternel pour la masse, mais dont les membres se renouvellent continuellement.

1372. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Il voit son ami s’oublier à Bordeaux depuis un an, attaché par quelques liaisons qu’il appelle chaque fois des passions éternelles.

1373. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

croyez-vous à la réunion éternelle des âmes qui se seront entendues ici-bas ?

1374. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

— Je songeais aux jours anciens, et j’avais dans l’esprit les années éternelles. » Au lieu de ce tableau à la Lesueur, Merlin nous fait assister au spectacle d’une communauté mangeante et buvante, qui appellerait le pinceau de quelque maître hollandais grotesque : « A diverses fêtes où les chartreux se réunissaient, on m’accordait la faveur insigne de manger avec eux au réfectoire.

1375. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Il le simplifie beaucoup trop en n’y voyant que la lutte du bien et du mal, cette lutte éternelle, dit-il, qui est vieille comme le monde.

1376. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers. »

Je traduirai du moins, sans en rien retrancher, la dernière moitié de cette belle et longue lettre, qui perd assurément à ne pas être présentée dans toute son étendue : « La perte d’un ami, celle d’une dignité ou de la fortune, admet quelque consolation, sinon par raison, au moins par oubli, et ces sortes de chagrins ne sont pas éternels.

1377. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin »

Nous avons laissé le voyageur à la lisière du désert : il le cherchait encore, il l’appelait dans son âpre nudité ; il voulait le pays du bleu, le pays de l’éternel azur, le royaume du soleil ; il le voulait affronter dans sa saison la plus violente ; il l’aura.

1378. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin (suite et fin.) »

Fromentin en analyse finement les progrès : « L’absence, dit-il, a des effets singuliers… L’absence unit et désunit, elle rapproche aussi bien qu’elle divise, elle fait se souvenir, elle fait oublier ; elle relâche certains liens très solides, elle les tend et les éprouve au point de les briser ; il y a des liaisons soi-disant indestructibles dans lesquelles elle fait d’irrémédiables avaries ; elle accumule des mondes d’indifférence sur des promesses de souvenirs éternels.

1379. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid(suite et fin.)  »

. — Mais cette éternelle règle des vingt-quatre heures s’y oppose.

1380. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Collé. »

j’aimerais autant dire que le Père éternel des petites-maisons n’est pas fou, que les paroles de l’opéra-buffa ne sont pas bêtes, que M. 

1381. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

« Or, cette idée de solitude éternelle qui vous saisit et vous serre au sein des plus vives et des plus saintes affections, c’est une idée très-sombre et très-difficile à accepter.

1382. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

Ce n’est pas à dire pourtant que les Pleurs ne renferment pas des trésors ; la passion jeune et presque virginale y reparaît dans une auréole nouvelle ; l’amour malheureux y a des transes, des agonies et d’éternels retours, dont Mme Valmore est seule capable entre nos poëtes.

1383. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « GRESSET (Essai biographique sur sa Vie et ses Ouvrages, par M. de Cayrol.) » pp. 79-103

Je dis que cela est touchant, parce que cela est désintéressé ; et c’est l’honneur éternel des lettres, de ce que les Anciens appelaient studia, d’entretenir en ceux qui les aiment de ces piétés qu’on appellera, si l’on veut, des manies : les hommes qui ne visent qu’au présent et à user à leur profit des circonstances sont incapables, je l’avoue, de telles illusions, qui supposent le rêve d’immortalité, et c’est pourquoi, avec toute sorte de considération pour ces hommes utiles, je préfère les autres.

1384. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

Il est des douleurs tellement irrémédiables à la fois et fécondes, que, malgré la fragilité de notre nature et le démenti de l’expérience, nous nous obstinons à les concevoir éternelles ; faibles, inconstants, médiocres nous-mêmes, nous vouons héroïquement au sacrifice les êtres qui ont inspiré de grandes préférences et causé de grandes infortunes ; nous nous les imaginons comme fixés désormais sur cette terre dans la situation sublime où l’élan d’une noble passion les a portés. — Mais nous n’en étions qu’au départ de Rome.

1385. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre III. Montesquieu »

Par la raison que leurs crimes, leurs injustices, le mal qu’ils justifient par l’utilité et le bien public, que tout cela ne sert à rien : leurs agitations sont vaines et ne changeront rien à l’action toute-puissante de causes éternelles.

1386. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

Qu’il se défie de son éternel Stendhal et même un peu de M. 

1387. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

L’idée particulière n’embrasse que le relatif, ce qui est éternel lui échappe ; elle ne peut s’envelopper de songe, elle ne nous conduit pas au-delà de nous-mêmes et rapetisse l’œuvre d’art à une réalité immédiate et tangible, lorsque la fonction même de cette œuvre est de nous suggérer l’infini.

1388. (1890) L’avenir de la science « XIII »

Un livre de généralités est nécessairement dépassé au bout de dix années ; une monographie étant un fait dans la science, une pierre posée dans l’édifice est en un sens éternelle par ses résultats.

1389. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

Ajoutez-y la gaieté du matin et l’insouciance de l’adolescent qui croit fouler du pied une terre éternelle. « Nous avons changé tout cela », s’il faut en croire la spirituelle comédie de M. 

1390. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Ce qui soutient et presque ce qui touche le lecteur, dans cette lutte où tant d’art est dépensé et où l’éternel conseil revient toujours le même au fond sous tant de métamorphoses, c’est l’affection vraie, paternelle, qui anime et qui inspire le délicat et l’excellent maître, patient cette fois autant que vif, prodigieux de ressources et d’adresse, jamais découragé, inépuisable à semer sur ce sol ingrat les élégances et les grâces.

1391. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

On se rappelle involontairement ce magnifique début des Pensées : Que l’homme contemple donc la nature entière dans sa haute et pleine majesté ; qu’il éloigne sa vue des objets bas qui l’environnent ; qu’il regarde cette éclatante lumière mise comme une lampe éternelle pour éclairer l’univers ; que la terre lui paraisse comme un point au prix du vaste tour que cet astre décrit… Au lieu de ces expressions amples et véritablement augustes, Fontenelle, en parlant de l’ordonnance céleste, n’emploie volontiers que des images et des comparaisons rapetissantes.

1392. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

Qu’un tel régime de littérature spartiate ou romaine, comme le pourrait régler un Caton l’Ancien, soit souhaitable ou regrettable, je n’examine pas cette question, qui n’est autre que l’éternelle querelle entre les vieilles mœurs et le génie des arts ou de la pensée ; mais est-ce possible dans l’état actuel et prochain de la société, et sur les pentes nouvelles où se précipite le monde ?

1393. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Œuvres de Louis XIV. (6 vol. in-8º. — 1808.) » pp. 313-333

Il voudrait que son fils, au lieu de s’arrêter en chemin, et de regarder autour de lui et au-dessous de lui, ceux qui valent moins, reportât ses regards plus haut : Pensez plutôt à ceux qu’on a le plus sujet d’estimer et d’admirer dans les siècles passés, qui d’une fortune particulière ou d’une puissance très médiocre, par la seule force de leur mérite, sont venus à fonder de grands empires, ont passé comme des éclairs d’une partie du monde à l’autre, charmé toute la terre par leurs grandes qualités, et laissé depuis tant de siècles une longue et éternelle mémoire d’eux-mêmes, qui semble, au lieu de se détruire, s’augmenter et se fortifier tous les jours par le temps.

1394. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Bien habile et bien confiant serait celui qui y verrait la confirmation d’un certain ordre annoncé par lui, et non l’éternelle vicissitude.

1395. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

Il y avait des années qu’écrivant à Mlle Volland, l’amie de Diderot, et lui parlant de la vérité et de la vertu comme de deux grandes statues que Diderot se plaisait à voir élevées sur la surface de la terre et immobiles au milieu des ravages et des ruines : « Et moi je les vois aussi, s’écriait-il ; … mais qu’importe que ces deux statues soient éternelles et immobiles s’il n’existe personne pour les contempler, ou si le sort de celui qui les aperçoit ne diffère point du sort de l’aveugle qui marche dans les ténèbres ! 

1396. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Mêlant ses idées religieuses si honorables à ses combinaisons de finance, il suppose que Colbert devait à son génie politique d’être plus religieux qu’un autre : « Un grand administrateur s’attache plus fortement qu’un autre à l’idée d’un Dieu. » Dieu, quelque part, est appelé, par un singulier rapprochement de termes, « l’Administrateur éternel ».

1397. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre sixième. Genèse et action des idées de réalité en soi, d’absolu, d’infini et de perfection »

., Platon concluait, lui aussi, à l’existence éternelle du cercle idéal, du triangle idéal.

1398. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

Il connaît tout le ridicule des plans forgés d’avance et sans cesse déroulés, toute la futilité des passions crues éternelles, la vanité des spéculations philosophiques, les vacillations des plus belles volontés.

1399. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre II : Rapports de l’histoire de la philosophie avec la philosophie même »

Au lieu de deux classes d’hommes, les réprouvés et les élus, les uns dignes du salut éternel, les autres condamnés au feu dans ce monde et à l’enfer dans l’autre, nous ne voyons dans tous les philosophes de bonne foi, quels que soient leurs principes, que des frères en esprit.

1400. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre VI. Des Livres qui traitent de la Rhétorique. » pp. 294-329

S’il ne joint un beau geste à L’art de bien parler, Si dans tout son dehors il ne sait se régler, Sa voix ne charme plus, sa phrase n’est plus belle, Dès l’exorde j’aspire à la gloire éternelle ; Et dormant quelquefois sans interruption, Je reçois en sursaut sa bénédiction.

1401. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre III : Concurrence vitale »

Quand on atteint les régions arctiques, celles des neiges éternelles ou de véritables déserts, la lutte vitale n’a plus lieu que contre les éléments.

1402. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre I. »

* * * En regard des fables — relativement rares — qui relatent les aventures d’animaux divers, il en est un grand nombre qui s’attachent avec complaisance à évoquer les tours pendables de frère lièvre à son éternelle dupe : l’hyène.

1403. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rivarol » pp. 245-272

D’écrivain éternel qu’il aurait pu être, il devint cette charmante mais éphémère chose, un causeur, dans une société de la corruption la plus raffinée.

1404. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ernest Hello » pp. 207-235

Lacordaire surtout (rendons-lui cette justice), Lacordaire, dont la tache, restée sur son froc, sera d’avoir trop été un moderne, redevint, en écrivant la Vie de Saint Dominique, un dominicain du xiiie  siècle, un dominicain éternel.

1405. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XI : M. Jouffroy moraliste »

» Ainsi d’écho en écho retentit la question éternelle, unique matière de la religion, de la poésie et de la science, poursuivie par toutes les puissances de l’homme « qui, alarmées, demandent, invoquent la lumière, comme les lèvres du voyageur altéré appellent la source dans le désert. » Mais jamais elle ne reparaît plus impérieuse que dans des temps comme les nôtres, où les anciennes réponses niées ou combattues laissent l’âme en proie au tourment du doute, battue par le vent des opinions contraires, ébranlée et arrachée à tous ses appuis.

1406. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

Il me suffit que, dans cette controverse comme dans toutes celles qu’il a soutenues, ce soit son éternel honneur d’avoir défendu de tout son cœur et de tout son génie ces principes dont ne se prennent à douter que ceux qui, comme dit le philosophe, ont été rapetissés par la vie. […] Mais, s’il y a dans une telle vie de quoi épuiser le châtiment éternel, que voulez-vous me faire entendre « avec vos suites plus étendues et plus terribles » ? […] Ainsi, la vie humaine est chose assurément précieuse, ils ont eu raison de le dire, et nous leur en devons une éternelle reconnaissance ; mais ils n’ont pas assez dit que beaucoup de choses sont et doivent demeurer plus précieuses que la vie humaine. […] C’est que, dans les entrailles de ce philosophe, il s’agite un éternel démon de luxure. […] Et serait-il possible qu’ayant brassé tant d’idées, discuté tant de questions, et risqué tant de solutions, il n’eût jamais rencontré juste, et que le vrai l’eût fui d’une fuite éternelle ?

1407. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

Et, si les gens d’alors, tout en souriant un peu, s’intéressent à nous, à la vie que nous aurons menée, à nos divertissements d’un jour, nos cendres en seront, peut-être, vaguement émues, et nous les remercierons du fond de notre éternel sommeil. […] Alors le vieux malin fait croire à Léon qu’un obstacle éternel, un abîme, le sépare de Jeanne. […] Hermine est une femme séparée ; toujours malade, dit-elle, toujours languissante, « absurdement femme, l’éternelle blessée de Michelet… qui vit de chloral et de morphine jusqu’à ce qu’elle en meure ». […] Maujan n’ait pas un peu plus développé la dernière partie de son drame, cette éternelle histoire des montagnards et des girondins. […] Il ne vous a pas échappé, même à travers les insuffisances de mon compte rendu, que ce qui donne quelque saveur à Cocart et Bicoquet, c’est la satire bouffonne, effrénée avec bonhomie, de quelques-unes des formes les plus bizarres, les plus sangrenues et les plus développées de nos jours, de l’éternelle vanité humaine : badauderie, snobisme, cabotinage.

1408. (1910) Propos de théâtre. Cinquième série

Le corps de Pierrot reste inanimé et Colombine pleure ses excès) C’est à Rome que Casimir Delavigne connut la reine Hortense, reine en exil, qui vivait dans la ville éternelle chez la princesse Borghèse, sa sœur, et qui y tenait une petite cour littéraire et artistique. […] C’était son rêve éternel réalisé en miniature. […] Ses conclusions sur l’Education sentimentale sont celles-ci, et, quoique dépassant l’œuvre, et elles sont bien encore en raison de l’œuvre et elles sont très belles et à méditer encore aujourd’hui comme en 1869 : « C’est à nous de conclure [et non à l’auteur] et de nous demander si notre époque est effectivement médiocre, ridicule et condamnée à l’éternel avortement de ses aspirations. […] qui, sans s’être prosternés dans la poussière sacrée des chemins d’Athènes, sans avoir vu, dans la lumière pourpre des soirs, passer les grandes ombres dont le défilé solennel anime les cimes de l’Hymette et les plaines de la mer de Salamine, sans avoir vu cette terre d’Hellas où les Dieux, les Dieux éternels vivent encore, vivent à jamais dans leur gloire et dans leur beauté, sans être sortis de la boue de leur ville ténébreuse, se sont permis de peindre les héros, se sont permis de faire parler les filles de Sparte et d’Argos, se sont permis de corriger Euripide et d’apprendre à vivre à Sophocle !  […] Et puis, pour oublier cette pensée amère, J’ai voulu contempler Athènes, notre mère, Notre éternelle et sainte et divine cité, La ville de la Grèce et de l’humanité.

1409. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

On y voyait le marquis du Châtelet, le marquis d’Arbaux, le marquis de Vilaines, l’abbé de Villars, l’abbé de Villeserain, qui a l’air d’un personnage de Musset, M. du Perrier (« ta gloire du Perrier, sera donc éternelle !  […] Seulement, il n’avait pas beaucoup de talent, de ce talent particulier qui empêche une chose bien faite de vieillir, de se rider, de se faner et qui lui met un lustre éternel. […] L’Ambigu, le Château-d’Eau, la Porte-Saint-Martin, ressassent leurs éternels mélodrames ; Cluny et les théâtres de banlieue leurs éternelles folies-vaudevilles ou gâtismes-vaudevilles, les cafés-concerts leurs éternelles gaudrioles. […] Avec le don seul de dresser en pied un personnage qui se tient et qui marche au moins du salon à la salle à manger, comme disait Doudan, on écrit Cinna, on écrit L’Avare, chefs-d’œuvre, certes, mais où tout le monde sent qu’il manque quelque chose ; on écrit Adolphe, œuvre étonnante dont je défie bien qu’on fasse un drame ; on tombe dans ce défaut où il ne faut pas se dissimuler que Molière tendait lui-même, de faire une comédie avec un des types généraux de l’humanité éternelle. […] Découragé parfois d’un retard éternel, J’ai voulu retourner à l’état paternel ; Mais cette illusion était bientôt déçue : Un bachelier peut-il conduire une charrue ?

1410. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

Au-delà de tout « est la tombe muette, où l’on n’entend plus rien, ni le pas joyeux de son ami, ni la voix de son amant, ni le conseil affectueux de son père, où il n’y a plus rien, où tout est oubli, poussière, obscurité éternelle. » Encore s’il n’y avait rien ! […] —  La mort, et la perte éternelle de tout ce que nous aimons, la jeunesse, la force, le plaisir, la compagnie, l’avenir, la raison elle-même. Car, dans le tombeau silencieux, les entretiens, la joyeuse démarche des amis, la voix des amants, les conseils affectueux d’un père, rien, on n’entend plus rien, il n’y a plus rien ; tout est oubli, poussière, obscurité éternelle ; et osez-vous bien, femme, souhaiter une pareille demeure ?

1411. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Cet abominable charivari dont Béranger fournit la matière première, me le fait prendre en horreur. » À part cette grande colère contre Béranger, Victor Jacquemont est un marin très inoffensif et très commode, du moins pour ses correspondants ; il leur fait grâce de toute poésie descriptive, à propos de la mer, de la lune et des étoiles ; car la mer l’ennuie ; il est sans passion, sans poésie, sans illusions devant ce spectacle éternel d’un horizon monotone qui chaque jour recule sans se renouveler. […] Nous laisserons donc notre infatigable compatriote cheminer lentement, en tête de sa caravane, flanquée de droite et de gauche par une imperturbable escorte de Sipahis en habit rouge, faire ses deux repas matin et soir avec l’éternel pilau, descendre de cheval cinquante fois par jour pour étudier les plantes et les cailloux du chemin, dormir la nuit sous une tente dont les vents déchaînés lui disputent bien souvent la possession ; nous le laisserons traverser Bénarès, la sainte ville, Mirzapoor, Callinger, et tout ce pays de sel et de salpêtre, au sol sablonneux, à l’atmosphère pulvérulente, à la végétation rabougrie, qui s’étend depuis Agra, le long des deux rives désertes de la Jumma, jusqu’à Delhi, la ville impériale ; et nous nous arrêterons un moment dans cette magnifique résidence où notre voyageur se repose quelques jours et où de nouveaux honneurs l’attendent. […] C’est un représentant de l’éternelle rivale de l’Angleterre, un enfant de la France, un ami de ceux qui ont reconquis la liberté de la France à coups de fusil.

1412. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Certes, l’extrémité est cruelle et le cœur m’en saigne ; mais j’en ai pris mon parti de dire un long, un éternel adieu à cette terre natale… Mieux eût valu de fuir, sans doute, avant la ruine de la patrie qu’après, et de s’être épargné ce spectacle funeste : pourtant, ne nous repentons point d’avoir rempli jusqu’au bout notre devoir de bon Français, et que notre piété se console même par ce qu’elle a fait d’inutile.

1413. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

Il avait des plans de reconstitution politique à l’étranger, notamment pour l’Italie ; il prétendait y former « une république ou association éternelle des puissances italiques, comme il y en avait une germanique, une batave, une helvétique, la plus grande affaire qui se fût traitée en Europe depuis longtemps. » Tout cela manqua.

1414. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

Il estime que le malheur de la plupart des hommes provient d’inquiétude, et de cette poursuite éternelle de quelque chose d’autre, au lieu de jouir de ce qu’on a : « Les hommes, dit-il, sont toujours in via et jamais in mansione. » Il attribue cette inquiétude à l’exemple, à l’imitation, à des causes étrangères à la nature de l’homme : « C’est une mauvaise et extraordinaire habitude, croit-il, dont nous pouvons être corrigés par le progrès de la raison universelle, comme on l’a été de la superstition et de quantité d’habitudes barbares et de façons de penser peu approfondies. » Pour lui, il est heureux et content de vivre ; il lui semble assister à un beau spectacle, à un joli songe ; si l’envie prend parfois au spectateur de faire l’acteur, c’est une faute, on est sifflé (il en sait quelque chose), et l’on s’en repent.

1415. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

C’est de là que résulte cette admirable clarté, base éternelle de notre langue.

1416. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Souvenirs militaires et intimes du général vicomte de Pelleport, publiés par son fils. » pp. 324-345

De cette sorte, et si l’on s’en tenait à cette règle, la connaissance des faits irait s’accroissant en réalité ; on entendrait successivement bien des témoins, mais des témoins toujours utiles ; on ne recommencerait pas sans cesse d’éternels récits qui n’ont de prix que chez les narrateurs vraiment originaux et compétents, en attendant qu’ils aient rencontré l’artiste définitif et suprême.

1417. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

Il ne créait plus, je n’appelle pas création cette seconde et éternelle partie de Faust, — mais il revenait sur lui-même, il revoyait ses écrits, préparait ses Œuvres complètes, et, dans son retour réfléchi sur son passé qui ne l’empêchait pas d’être attentif à tout ce qui se faisait de remarquable autour de lui et dans les contrées voisines, il épanchait en confidences journalières les trésors de son expérience et de sa sagesse.

1418. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La femme au XVIIIe siècle, par MM. Edmond et Jules de Goncourt. » pp. 2-30

je ne voudrais pas encore une fois m’enfermer sans retour dans ces îles enchantées, dans ces cercles où tout l’homme ne saurait penser et vivre, où la femme elle-même n’était pas nécessairement plus aimable qu’on ne la rencontre, sans trop la chercher, en dehors de là : éternelle nature féminine qui recommence toujours, qui devine si tôt ce qui est bien, ce qui est mieux comme ce qui est pire, en même temps que ce qui est décent, et qui le rapprend sans enseigne et sans affiche à quiconque lui veut plaire ; devant qui la passion, la verve, la poésie, le naturel aujourd’hui avec tous ses risques et tous ses avantages peuvent oser plus que jamais se déployer !

1419. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Lors même que l’on sent que cette fécondité n’est pas chose qui s’apprenne, le principe n’en est pas moins admirable, et rien ne peut remplacer la gaieté, l’éternelle ardeur au travail, qui en résultent.

1420. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid (suite.) »

Et aussi la partie humaine, éternelle, s’y retrouve : c’est l’amour.

1421. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Essai de critique naturelle, par M. Émile Deschanel. »

encore une fois, sans doute, il est certaines beautés naturelles, simples, éternelles, de ces grands peintres du cœur humain, qui ont été senties de tout temps ; mais, dans les intervalles et pour l’ensemble de l’œuvre, que de restrictions, que de méprises, que de blâmes ou d’admirations à côté, avant que la critique historique fût venue pour éclairer les époques, les mœurs, le procédé de composition et de formation, tout le fond et les alentours de la société au sein de laquelle se produisirent ces grands monuments littéraires !

1422. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. »

L’éternel refrain de Maurice, dans ses lettres au ministre du roi son frère, était : « Méfiez-vous, ne vous mettez pas à la merci d’un voisin puissant et peu scrupuleux. » Et il disait encore, et sur tous les tons : « Abandonnerez-vous les Français ?

1423. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [II] »

Je lui prédis que ce rêve pourrait lui coûter son armée, et qu’en cas d’un succès inespéré il forcerait la France à d’éternelles guerres pour soutenir cet édifice sans base.

1424. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

Jomini eut là son rôle éternel de consultant militaire non repoussé, non entièrement écouté.

1425. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

Le commun des versificateurs, à la fin du xve et au commencement du xvie  siècle, croupissait encore sur d’ennuyeuses variations de l’éternelle allégorie.

1426. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

Sa suprême raison, à lui, n’est autre que l’éternel logos, le Verbe de Jean, incarné une fois et habitant perpétuellement parmi les hommes.

1427. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

Ainsi, dans la seconde partie, lorsque Arthur, après un court éloignement, après cette rencontre si mémorable et si simple du vieillard sous les oliviers près d’Avignon, revient à sa terre, l’embellit, s’ouvre de toutes parts à travers sa forêt, comme à travers ses souvenirs, des perspectives vers le ciel, et remercie à genoux l’Auteur de ces biens ; lorsqu’il nous donne le journal de ses promenades, l’extrait de ses lectures, comme un bouquet champêtre assorti pour la parure de l’autel le jour de la fête de la patronne ; lorsqu’il nous raconte un des derniers jours d’octobre, ou sa belle cathédrale de Rouen, ou le salut de la Sainte-Catherine, ou le gazon frais des calvaires, l’effusion abonde, la charité coule par ses lèvres, se répand sur tous, et l’éternel christianisme des âmes tendres rajeunit et multiplie ses plus chers accents.

1428. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

Que d’adieux éternels !

1429. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

Tout le reste, on l’a trop vu en effet, n’était que critique, système, étude préparatoire éternelle.

1430. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

Il est vrai que ces éternelles discussions entre parenthèses ralentissent un récit, et que, lui, il porte volontiers dans le maniement son érudition, si vaste et si bien acquise, quelque chose de la façon courante et preste de Voltaire ; ce qui est un dernier éloge ; car ce nous serait une honte de finir par une chicane janséniste avec un si beau livre, qui n’a qu’à se poursuivre sur ces bases et dans cette ordonnance pour être un monument.

1431. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LES JOURNAUX CHEZ LES ROMAINS PAR M. JOSEPH-VICTOR LE CLERC. » pp. 442-469

Qu’on nous pardonne ces graves rêveries qu’ont amenées insensiblement et que justifient peut-être ces idées si contrastantes de Rome et de journaux, ce bruyant passé d’hier et cet antique et auguste passé tous les deux à leur manière presque sans histoire ; la Ville éternelle en partie douteuse et ses cinq201 siècles de grandes ombres, la société moderne avec sa marche accélérée, conquérante ; ses mille cris assourdissants de triomphe, et son bruit perpétuel de naufrage !

1432. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

A Rome pourtant, qui était devenue veuve des césars, la papauté insensiblement héritait de la souveraineté de la Ville éternelle, et attendait avec patience, recueillant, redoublant ses forces et ses mystères, jusqu’à ce que vînt le jour d’apposer le sceau et l’onction à une royauté nouvelle.

1433. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. Joubert »

Sur quantité de points qui reviennent sans cesse, sur bien des thèmes éternels, on ne saurait dire mieux ni plus singulièrement que lui : « Il n’y a pas, pense-t-il, de musique plus agréable que les variations des airs connus. » Or, ses variations, à lui, mériteraient bien souvent d’être retenues comme définitives.

1434. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Madame de Krüdner et ce qu’en aurait dit Saint-Évremond. Vie de madame de Krüdner, par M. Charles Eynard »

« Il y a des femmes qui traversent la vie comme ces souffles du printemps qui vivifient tout sur leur passage. » Elle était elle-même une de ces femmes : dans le monde comme dans la pénitence, toute son ambition fut qu’on la prît pour une de ces brises vivifiantes du printemps ; et quand il n’y eut plus moyen de se faire illusion sur le printemps terrestre, elle aspira, elle avisa à paraître dès ici-bas un souffle et un soupir du printemps éternel.

1435. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Il y vit sa condamnation certaine à un éternel exil, et sa situation d’ennemi public dans une cour qui ne lui pardonnerait jamais.

1436. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

La foi servant à la politique, les actes égoïstes sortant d’une volonté de sacrifice, la cruauté et l’intérêt se faisant ministres de la justice et vengeurs du crime, on voit apparaître ici, quand on lit bien, quelques-uns des éternels sophismes, des incessantes contradictions de la faible humanité qui ne peut renoncer ni à rêver le bien ni à suivre son bien.

1437. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Il n’a cru qu’à la raison : mais il a trop cru que ses habitudes, ses préjugés, ses partis pris étaient la forme universelle, éternelle de la raison.

1438. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre V. Le roman »

Dans des œuvres sincères, en un style étrangement vibrant et intense, Loti a dit quelques-unes des impressions qu’il a recueillies en ses campagnes : dans le Spahi, les soleils du Sénégal ; dans Mon frère Yves, les vastes paysages de pleine mer, quand le vaisseau fuit et que « l’étendue miroite sous le soleil éternel », des coins de Bretagne pluvieuse rendus avec une singulière délicatesse ; dans Pêcheurs d’Islande, la Bretagne encore, et la mer boréale, et le Tonkin, et les mers tropicales.

1439. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Il est aussi conscient qu’on le peut être : il peindra donc surtout des inconscients, de ces êtres qui ne rentrent jamais en eux-mêmes, qui s’abandonnent sans défiance aux excès de parole et de mimique, qui sont le moins dans le secret de la comédie humaine, éternelles dupes et d’eux-mêmes et du monde extérieur.

1440. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Octave Feuillet »

Ils m’ont fait tant de plaisir entre quinze et dix-huit ans que je leur en garde une reconnaissance éternelle et qu’il m’est encore difficile de les juger aujourd’hui en toute liberté.

1441. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7761-7767

* La gloire de M. de Montesquieu, fondée sur des ouvrages de génie, n’exigeoit pas sans doute qu’on publiât ces fragmens qu’il nous a laissés ; mais ils seront un témoignage éternel de l’intérêt que les grands hommes de la nation prirent à cet ouvrage ; & l’on dira dans les siecles à venir : Voltaire & Montesquieu eurent part aussi à l’Encyclopédie.

1442. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

Les épîtres de Marot à François Ier sont des modèles de cette flatterie, la forme la plus noble et la plus agréable que puissent prendre dans notre pays la dépendance et l’inégalité, éternelles comme les sociétés humaines.

1443. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre douzième. »

Le génie fécond ne se fatigue pas en arrangements ; il va droit à ces choses éternelles qui n’ont pas besoin d’être ornées, et par le même effort d’esprit il les découvre et les exprime.

1444. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VIII. L’antinomie économique » pp. 159-192

Sous la fausse humilité socialiste, il y a l’éternelle volonté de puissance égoïste ; il n’y a pas de vie si médiocre qui n’ait son ambition ; il n’y a pas d’égalitaire qui n’aspire secrètement à une supériorité quelconque.

1445. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre III. La notion d’espace. »

D’un autre côté, je ne puis dire non plus que je n’ai pas le droit de donner le nom de droites aux côtés des triangles non-euclidiens, parce qu’ils ne sont pas conformes à l’idée éternelle de droite que je possède par intuition.

1446. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes décadents » pp. 63-99

Ces mœurs sont éternelles.

1447. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

Impossible de douter que la misère ne fût éternelle, comme la maladie et la mort, puisqu’elle avait toujours existé.

1448. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

Ils ont aidé la comédie à remplir la tâche difficile de faire rire les honnêtes gens ; mais, dans la comédie même, le jeune premier est parfois trop réduit au rôle d’éternel soupirant.

1449. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IV, Eschyle. »

Il semble même les préférer aux nouveaux parce qu’ils sont plus près des forces premières et que la majesté des choses éternelles transparaît mieux à travers leur obscurité.

1450. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VII »

Pour qu’il se repente, pour qu’il demande grâce, il faut que Léa noblement affligée du mal qu’elle a fait, vienne promettre à Camille un éloignement éternel ; il faut encore qu’il lise une lettre où la pauvre enfant, se sentant de trop, lui annonçait qu’elle allait mourir, puisque sa mort le rendrait heureux.

1451. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Goethe et de Bettina, traduites de l’allemand par Sébastien Albin. (2 vol. in-8º — 1843.) » pp. 330-352

Le privilège des dieux est, comme on sait, une éternelle jeunesse : même à cinquante-huit ans, Goethe n’eût pas sans doute été un vieillard assez aguerri pour supporter tous les jours, sans danger, le voisinage et les familiarités, les agaceries innocentes de Bettina.

1452. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

Ce sera l’éternelle et l’unique recette de Camille pour le bonheur universel : tout permettre, tout laisser faire, ou du moins tout laisser dire.

1453. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

Elle jouait à travers cela la comédie et la bergerie à chaque heure du jour et de la nuit, donnait des idées à tourner en madrigaux à ses deux faiseurs, l’éternel Malezieu et l’abbé Genest, invitait, conviait une foule d’élus autour d’elle, occupait chacun, mettait chacun sur les dents, ne souffrait nul retard au moindre de ses désirs, et s’agitait avec une démonerie infatigable, de peur d’avoir à réfléchir et à s’ennuyer un seul instant.

1454. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

C’est l’éternelle histoire.

1455. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « L’abbé de Choisy. » pp. 428-450

Qu’est-ce que le paradis, qu’une musique éternelle ?

1456. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La Grande Mademoiselle. » pp. 503-525

Pendant plus de trente ans encore on lui parlera de ces sortes de projets à l’infini ; elle en parlera sans cesse elle-même, mais en enfant, sans jamais pouvoir se résoudre, et sans s’apercevoir à la fin que cette indécision éternelle devient une fable.

1457. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Correspondance entre Mirabeau et le comte de La Marck (1789-1791), recueillie, mise en ordre et publiée par M. Ad. de Bacourt, ancien ambassadeur. » pp. 97-120

que Mirabeau le sentait lorsque, impatient de ces éternelles remises de l’« homme aux indécisions » (c’est ainsi qu’il appelle La Fayette), et de cette pudibonderie si hors de propos, irrité de voir en tout et partout les honnêtes gens de ce bord en réserve et en garde contre lui, il s’écrie : « Je leur montrerai ce qui est très vrai, qu’ils n’ont ni dans la tête, ni dans l’âme, aucun élément de sociabilité politique. » Et relevant la tête en homme qui, avec ses taches, avait son principe d’honneur aussi et le sentiment de sa dignité, il écrivait un jour (1er décembre 1789) à La Fayette, sans craindre d’aborder le point délicat et qui recelait la plaie : J’ai beaucoup de dettes, qui en masse ne font pas une somme énorme ; j’ai beaucoup de dettes, et c’est la meilleure réponse que les événements puissent faire aux confabulations des calomniateurs.

1458. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Rivarol. » pp. 62-84

Et ceci encore : Que l’histoire vous rappelle que partout où il y a mélange de religion et de barbarie, c’est toujours la religion qui triomphe ; mais que partout où il y a mélange de barbarie et de philosophie, c’est la barbarie qui l’emporte… En un mot, la philosophie divise les hommes par les opinions, la religion les unit dans les mêmes principes ; il y a donc un contrat éternel entre la politique et la religion.

1459. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

Dans le numéro du 9 septembre, il décrivait la situation et exposait le nouveau droit constitutionnel de la royauté consentie ; il ne dénonçait ni ne prévoyait point de grave désaccord : Dans ces huit jours d’éternelle mémoire, le principe du progrès a vaincu le principe étouffant du retour au passé.

1460. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Les ruines les environnent, et ils passent devant elles sans éprouver seulement la curiosité ordinaire à un voyageur : ils ont déjà oublié ces temps d’une éternelle mémoire.

1461. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

Voilà l’éternelle morale qui avant et depuis Salomon, jusqu’à Sophocle, jusqu’à Cicéron, jusqu’à nous tous, se peut tirer du spectacle changeant des choses humaines, et il semble que, sauf le rajeunissement de l’expression, toujours possible à une âme sincère, les ruines de la ville de Zénobie, dévastée à la suite d’une guerre par l’empereur Aurélien, n’étaient guère de nature à inspirer d’autres pensées.

1462. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre premier. La solidarité sociale, principe de l’émotion esthétique la plus complexe »

Aussi les plaisirs qui n’ont rien d’impersonnel n’ont ils rien de durable ni de beau : le plaisir qui aurait, au contraire, un caractère tout à fait universel, serait éternel ; et étant l’amour, il serait-la grâce.

1463. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Le poète raconte la joie des premières adorations, un cœur débordant prenant à témoin de sa félicité le printemps et le monde ; des doutes arrêtent cet essor passionné ; la bien-aimée est plus belle que bonne ; ses perfidies détruisent une à une toutes les promesses de ses yeux ; l’amant, abîmé de douleur, ne pouvant être aussi oublieux que sa maîtresse, se plaît à aigrir sa souffrance par ces éternelles plaintes qu’échangent les amants déçus.

1464. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre I. Shakespeare — Son génie »

La nature, c’est l’éternel bi-frons.

1465. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Introduction »

ces vérités éternelles et inébranlables ne pourraient supporter l’examen sans périr, et celui qui les étudie librement et consciencieusement serait fatalement conduit à en douter comme Voltaire ou à les nier comme Diderot !

1466. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie »

Autant on doit être sévère pour les philosophes qui nient la philosophie, autant nous trouvons naturel et excusable l’orgueil du savant qui, marchant d’un pied ferme sur le terrain solide de la réalité, ne peut s’empêcher de contempler avec quelque pitié nos fragiles systèmes et nos éternelles controverses.

1467. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre I. La critique » pp. 45-80

Nul n’a plus sûrement que lui ni avec plus de franchise développé, une critique précise, basée sur des principes immuables, sur une connaissance approfondie des chefs-d’œuvre éternels.

1468. (1920) Action, n° 4, juillet 1920, Extraits

C’est là notre délivrance, que nous tenons des étoiles — et c’est là en même temps l’éternel danger d’une vie crépusculaire.

1469. (1759) Réflexions sur l’élocution oratoire, et sur le style en général

J’ai vu mes tristes journées Décliner vers leur penchant ; Au midi de mes années Je touchais à mon couchant  La mort déployant ses ailes, Couvrait d’ombres éternelles La clarté dont je jouis ; Et dans cette nuit funeste Je cherchais en vain le reste De mes jours évanouis.

1470. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

La parole de Dieu est instantanée et éternelle : celle de l’homme est successive et limitée.

1471. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Nisard » pp. 81-110

Il vous montre, en Byron, à travers la passion de ses poèmes, le poète de la fidélité éternelle.

1472. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « X. M. Nettement » pp. 239-265

nous n’entendons pas seulement un gouvernement, mais une époque, — rechercher comme le botaniste cherche dans la fleur le point noir qui doit la faire périr, rechercher le point d’erreur ou de faiblesse par lequel tout ce qui semblait si vivant devait s’altérer et durer si peu, qu’à quelques années de distance, c’était fini ou à peu près de ce qui paraissait éternel, n’est-ce pas là un magnifique sujet d’histoire, plus beau, selon nous, et plus tentant pour une forte pensée, que l’histoire d’une époque qui eût construit des œuvres durables et accompli tout son destin ?

1473. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

À bien y regarder, il n’y avait, au fond, dans son histoire de Galilée, que l’éternelle histoire de la nature humaine, dont madame Pernelle disait ; Je vous l’ai dit, mon fils, quand vous étiez petit : Les envieux mourront, mais non jamais l’envie !

1474. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — La rentrée dans l’ordre »

Et quant à ces mouvements profonds de l’instinct et du cœur par où s’annonce bien plus communément encore chez une âme jeune l’éternel amour de la vie, si elle ne parvient pas à les détruire, du moins y jette-t-elle, par la terreur du péché et les hideuses images de la souillure, assez de trouble, de honte et d’alarmes, pour en chasser à jamais toute franchise et toute joie.

1475. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre II. Réalité des idées égalitaires »

— C’est elle que visent les socialistes lorsqu’ils en appellent à cette éternelle lutte des classes qui mène l’histoire : ils opposent la classe des prolétaires à celle des capitalistes.

1476. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVIII. Des obstacles qui avaient retardé l’éloquence parmi nous ; de sa renaissance, de sa marche et de ses progrès. »

L’éloquence de la chaire avait des défauts presque semblables ; affectation, exagération, pointes ridicules, entassement de métaphores, mélange du profane et du sacré, citations éternelles de grec, de latin, d’hébreu, et un peu plus d’Ovide ou d’Horace que des pères ; enfin, multitude d’idées empruntées des erreurs et des préjugés du temps sur la physique, sur l’histoire naturelle, sur l’astronomie, sur l’astrologie, sur l’alchimie ; car alors on prodiguait tout, et on faisait étalage de tout ; tel était le goût des orateurs sacrés sous Henri IV et sous Louis XIII.

1477. (1788) Les entretiens du Jardin des Thuileries de Paris pp. 2-212

Ne dois-je pas, comme tous les hommes, une reconnoissance éternelle à un travail qui me nourrit, & pourrois-je oublier que je n’existe que par le moyen de l’agriculture, qui met toute la terre à contribution, pour nous procurer la vie. […] Je ne suis pas timide ; mais j’avoue de bonne foi, que des murmurateurs éternels ne formerent jamais ma société, & que je les redoute comme des individus qu’on ne peut ni appaiser, ni contenter. […] On ne veut pas se persuader que ce monde n’étant qu’un passage, doit se ressentir du néant d’où la sagesse éternelle l’a tiré, & que selon la belle réflexion de Jean-Jacques Rousseau, il seroit inutile de quitter ces bas-lieux, si l’on y trouvoit tout le calme & toutes les douceurs que nous promet le ciel. […] Alors il n’y aura plus dans les esprits ni courage, ni énergie ; alors on louera tout, on admirera tout, & nous n’aurons que des panégyristes éternels…. […] Déclamateurs éternels de la médecine, disoit Fontenelle à ses amis, vous cesserez vos déclamations, quand vous approcherez du terme.

1478. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Au-dessus de la morale, il y a la religion, et la religion, quand elle n’est pas une hypocrisie, est un leurre et une duperie. — A quoi donc aboutit, pour faire exactement le compte, tout ce travail où s’épuise depuis des siècles la pensée humaine, l’éternelle travailleuse ? […] mais elle est inévitable, aussi inévitable que la nuit après le jour. « Est-ce étrange qu’on puisse rire, s’amuser, être joyeux sous cette éternelle certitude de la mort18 !  […] Loti a le culte de la nature, au sens où l’entendaient les anciens, de la nature créatrice, source de toute vie, et seule vivante, de l’éternelle Isis qu’a chantée Lucrèce. […] des images qu’il fait passer devant nos yeux l’impression se lève d’une nature paradisiaque, terre d’éternel printemps, tiède et parfumé, où les arbres n’ont point d’ombres perfides, où les plantes n’ont pas de sucs dangereux, où les bêtes sont inoffensives, où les hommes sans besoin ignorent le travail, où la vie s’écoule indolente et charmée dans un rêve de volupté. […] Qu’il existe ou non, ce néant, éternel sommeil sans rêves, plus doux que tous les rêves, je l’aime.

1479. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Ce dernier caractère du génie, qui fait son charme éternel, lui manque, et Rousseau se trouve par là bien loin de l’éloquence de Bossuet. […] La peinture des frimas éternels revient glacer tous nos sens ; et quand il nous représente les marais fangeux de l’Amérique méridionale, une impression profonde de dégoût et d’horreur nous saisit entièrement. […] Qu’ils ont été heureux ceux qui ont pu voir Bossuet, orné de ses cheveux blancs et du souvenir de ses vertus, s’élever dans la chaire en face du cercueil du grand Condé, et consacrer les louanges de la gloire périssable en les associant aux louanges de la gloire éternelle ! […] Son éternel honneur sera d’avoir été associé à l’événement le plus tristement religieux de notre Révolution. […] On tira de la souveraineté du peuple, et de la suprême loi du salut de l’État, une dérogation avouée aux lois d’éternelle justice.

1480. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Il n’y a que les choses qui ont toujours été anciennes, il n’y a que les choses éternelles qui soient en possession de beauté dans l’esprit des hommes depuis qu’elles existent… Et encore, non ! […] Donc pour tout se contemplant soi-même il n’existe pas. — Et remarquez que par « tout », il faut entendre tout, c’est-à-dire, non seulement l’infini, mais l’éternel. […] Il plonge par le passé dans l’éternel et dans l’éternité par l’avenir. […] Il a même résolu le problème éternel de l’union de la philosophie et de l’art. […] On peut dire qu’il n’eut rien de terrestre et qu’il vécut littéralement de la vie éternelle, en communication constante avec l’infini.

1481. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Tout étant prêt pour jouer la Passion, on s’aperçut qu’on n’avait pas de vêtements assez beaux pour l’acteur chargé du rôle du Père Éternel. […] Ils ne pouvaient se faire à l’idée du Père Éternel, de son Fils, de la Sainte Vierge et du diable, cédant le pas à Priam, à Cléopâtre, à Didon, à Marc-Antoine et autres personnages des histoires grecque ou romaine. […] La première pièce donnée par Scudéry, Ligdamon et Lidias (1629), tragi-comédie tirée, comme bien d’autres, de l’éternel roman d’Astrée, a une préface trop singulière pour que nous n’en parlions pas. […] le grand homme d’État ne put, malgré tous ses efforts, que sauver Mirame d’un éternel oubli, eu rendant cette tragi-comédie et celle d’Europe, célèbres, non par les beaux vers qu’elles renferment, mais par le souvenir qui se rattache à leur mise en scène. […] Boileau concluait des quatre vers suivants : L’imbécile Ibrahim, sans craindre sa naissance, Traîne, exempt de péril, une éternelle enfance, Indigne également de vivre et de mourir, On l’abandonne aux mains qui daignent le nourrir ; concluait, disons-nous, de ces vers, que Racine avait, plus encore que lui, le génie satirique.

1482. (1923) Au service de la déesse

non : ces Normands, aventuriers magnifiques, n’ont rien fait de bon, n’étant pas civilisateurs ni créateurs d’empires, Leur Guiscard les conduit à Rome : ils démolissent la ville éternelle. […] « J’écris cette dernière page, — dit-il en son avant-propos, — le jour où s’affirme la Victoire du Droit et de l’éternelle Justice qui va commencer une ère nouvelle pour l’humanité, victoire dont notre patrie bien-aimée et ses admirables Alliés recueilleront une gloire impérissable. […] … De là, ce refrain éternel : la religion de Socrate et de Fénelon, la religion de Fénelon et de Marc-Aurèle ! […] — Comme l’arbre au printemps nouveau chaque année — invente, travaillé par son âme, — le vent, le même qui est éternel, crée de rien sa feuille pointue, — moi, l’homme, je sais ce que je fais. — De la poussée et de ce pouvoir même de création, — j’use, je suis le maître… » Doux et bon, M.  […] Telle qu’elle est, notre civilisation, si menacée, vaut bien qu’on la défende, et non pas contre les retours de la barbarie, comme on dit, mais contre l’éternelle barbarie toute proche, celle des ignorants et celle des sauvages.

1483. (1895) Hommes et livres

Rien de plus suave, de plus touchant, de plus admirable que la prière de Marie Stuart se préparant à mourir : Voici l’heure dernière en mes vœux désirée, … Où l’esprit se radopte à sa tige éternelle, Afin d’y refleurir d’une vie immortelle. […] … Il faudrait citer le chœur gracieux qui suit, en l’honneur des Bienheureux, Possesseurs éternels des grâces éternelles. […] Dans sa possession j’ai trouvé pour tous charmes D’effroyables soucis, d’éternelles alarmes, Mille ennemis secrets, la mort à tous propos, Point de plaisir sans trouble, et jamais de repos. […] La vérité, c’est la sérénité paisible qui laisse opérer les causes, confiante en leur inévitable explication : Montesquieu eût avoué, dans Guerre et paix, cet héroïque et simple Kutusof, qui, la veille d’Austerlitz, se plongeait dans la lecture d’un roman français, sans prétendre troubler de sa faible main d’homme le travail mystérieux des forces éternelles, inaltérables. […] On a souvent présenté Gil Blas comme un parfait exemplaire de la moyenne humanité : Gil Blas instruit par l’expérience, roulé et poli par l’éternel flux et reflux de la vie, nature vulgaire, vaniteuse, égoïste, avide de jouir, et craignant la peine : tout cela risque vingt fois de faire un fripon et finit par faire un honnête homme.

1484. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

Et contre Des Fontaines d’abord, sa bête noire : — c’est l’éternelle guerre du poëte contre son critique. […] C’est la gaudriole, l’éternelle gaudriole des aïeux, plus ou moins grossière et remaniée en tous sens, rien de plus.

1485. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

Elle hait ces prescriptions orgueilleuses qui vont à mesurer à chacun l’air, l’espace, la nourriture, à imposer une forme ou un tarif aux habits, à affubler l’homme de l’éternelle livrée d’une condition immuable. […] C’est ce même ciel dont tout le Télémaque est éclairé, c’est cette présence du génie grec à toutes les pages, ce sont toutes ces images agréables ou sérieuses par lesquelles l’antiquité nous a initiés à la connaissance de la vie, qui donnent un mérite d’éternelle nouveauté à ce livre charmant, espèce de vase antique où la main de Fénelon semble avoir composé un bouquet des plus belles fleurs de la Grèce.

1486. (1879) À propos de « l’Assommoir »

Il vint à lui, lui serra la main avec effusion, et lui dit : « Ce sera mon éternel honneur, d’avoir créé le rôle de votre pièce. […] Je serai toujours très honoré de sa rancune     … Je me souviens d’avoir lu dans Thérèse Raquin, avec la description d’un cadavre de femme en décomposition : « C’est à la Morgue que les voyous ont leur première maîtresse. » Je voudrais que les écrivains de mon temps ne bornassent pas leurs amours éternelles aux premières amours des voyous. » Voici maintenant le passage le plus violent de l’article de M. 

1487. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Samedi 22 juillet Dans notre promenade de ce matin, Daudet me parlant de son livre commencé : Quinze ans de ménage, me confie qu’il y a dans son esprit, une évolution, semblable à celle qui s’est faite dans le mien : le dégoût de l’éternelle aventure, de l’éternelle complication de la chose romancée.

1488. (1925) La fin de l’art

Il l’a beaucoup moins que l’historien latin Ammien Marcellin, qui donne du paysage alpestre un tableau assez saisissant et parle romantiquement de l’horreur des neiges éternelles. […] Il était bien plus intéressant pour moi de remarquer combien le côté mélodrame de la vieille tragédie romantique et éternelle empoignait le public, plus sensible, au malheur de Marguerite qu’à la fantasmagorie métaphysique où elle n’est en réalité qu’un accessoire.

1489. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre III. De l’organisation des états de conscience. La liberté »

Spinoza disait que les modes de la pensée et les modes de l’étendue se correspondent, mais sans jamais s’influencer : ils développeraient, dans deux langues différentes, la même éternelle vérité. […] Bref, si le point matériel, tel que la mécanique l’entend, demeure dans un éternel présent, le passé est une réalité pour les corps vivants peut-être, et à coup sûr pour les êtres conscients.

1490. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

L’atroce doctrine de Calvin a fixé de nouveau les yeux des hommes sur le dogme de la malédiction et de la damnation éternelle. […] Montons plus loin et plus haut, à l’origine des choses, parmi les êtres éternels, jusqu’aux commencements de la pensée et de la vie, jusqu’aux combats de Dieu, dans ce monde inconnu où les sentiments et les êtres, élevés au-dessus de la portée de l’homme, échappent à son jugement et à sa critique pour commander sa vénération et sa terreur ; que le chant soutenu des vers solennels déploie les actions de ces vagues figures, nous éprouverons la même émotion que dans une cathédrale quand l’orgue prolonge ses roulements sous les arches, et qu’à travers l’illumination des cierges les nuages d’encens brouillent les formes colossales des piliers. […] L’enfer de Milton est immense et vague, « donjon horrible, flamboyant comme une fournaise ; point de lumière dans ces flammes, mais plutôt des ténèbres visibles qui découvraient des aspects de désolation, régions de deuil, ombres lugubres », mers de feu, « continents glacés, qui s’allongent noirs et sauvages, battus de tourbillons éternels de grêle âpre, qui ne fond jamais, et dont les monceaux semblent les ruines d’un ancien édifice. » Les anges s’assemblent, légions innombrables, pareils à « des forêts de pins sur les montagnes, la tête excoriée par la foudre, qui, imposants, quoique dépouillés, restent debout sur la lande brûlée531. » Milton a besoin du grandiose et de l’infini ; il le prodigue.

1491. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

Mais le souvenir vivant des collines qu’il a parcourues pour instruire son pinceau colore parfois son langage d’une teinte païenne ; aux gémissements de Naples asservie se mêle impérieusement un hymne d’amour pour l’éternelle beauté de la nature, et peu à peu la voix du pêcheur et celle de Salvator, comme deux liâtes arcadiennes, s’unissent pour redire à l’écho la même mélodie. […] Les faits sont remis à leur place, l’évolution historique des droits que la philosophie déclare éternels, et qui n’apparaissent que successivement dans le monde réel, est décrite avec une patience et une clarté très dignes d’éloges ; mais il n’y a pas dans l’expression de ces idées la moindre trace de composition. […] Loin de là ; il voit dans l’éternelle répétition des mêmes idées un moyen de popularité ; et à ne prendre la popularité que dans le sens le plus grossier, nous sommes forcé de nous ranger à son avis. […] Si les poètes de nos jours, en se plaignant de la critique, n’allaient pas au-delà du reproche d’injustice et d’ignorance, la critique devrait se taire et accepter l’accusation connue inoffensive ; dans tous les temps, les hommes qui produisent des œuvres d’imagination ont eu pour leurs paroles et leurs pensées une admiration persévérante et obstinée ; dans tous les temps, soit à l’aurore, soit au déclin de leur gloire, ils se sont crus méconnus par leur siècle ; cette plainte éternelle et vulgaire ne mérite pas d’être discutée. […] Il est pris de compassion en voyant l’intervalle qui le sépare de la foule ; il mesure d’un regard découragé le désert où il s’est enfermé, et malgré son admiration pour l’œuvre ignorée de son génie, il sent au-dedans de lui-même un vague désir de popularité, un besoin de louange et d’applaudissement ; il commence à comprendre qu’il lui faut un auditoire, et que si personne ne vient à son secours, il est condamné à une éternelle obscurité.

1492. (1925) Proses datées

Dans le petit salon de la rue de Rome, à la douce lueur de la lampe familiale, que de fois nous avons écouté Mallarmé tenir tête au wagnérisme et revendiquer pour la Poésie son droit éternel de tenter à son profit le prodige inverse de celui qu’avait réalisé par la puissance de son génie le créateur du Drame musical !     […]   25 novembre 1912 Propos tardifs Il y a certaines œuvres littéraires qui portent en elles une telle certitude de durée que, presque du vivant même de leurs auteurs, elles revêtent un caractère éternel. […] De là aussi le scandale qu’elles suscitèrent chez « l’hypocrite lecteur » et qui fit momentanément de Baudelaire un poète d’exception, un « poète maudit », selon l’expression de Verlaine, de ceux dont le laurier, en sa verdeur éternelle, conserve toujours la trace de la foudre et sa divine cicatrice. […] D’ailleurs, la lumière de la vraie gloire ne rend-elle pas éternel ce qu’elle a touché de son rayon ? […] De ses deux fils, l’aîné Alexandre-Philibert-Joseph du Bard de Curley, marié, en 1832, à Antoinette-Octavie de Guillermin8 fut le père de ma mère, et c’est ainsi que sont venus jusqu’à moi la miniature au cadre noir, la lettre autographe de Monge, le cahier intitulé Mes Enfants sur les feuillets duquel une main maternelle a noté ces vieilles choses de famille assez touchantes en ce qu’elles ont de quotidien et d’éternel.

1493. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

C’est à lui que Lamartine venait confier ses rêves de spéculations financières ; Chateaubriand ses éternelles doléances d’homme gêné ; Lamennais ses troubles de conscience. […] Quand l’homme a touché le fond du malheur de vivre, il en revient à l’illusion divine ; et l’origine de toutes les religions est là, l’homme faible et nu n’ayant pas la force de vivre sa misère terrestre sans l’éternel mensonge du paradis. […] « Tant que l’astre projette ses feux puissants, il oublie le terme fatal et savoure l’éphémère allégresse, comme il boirait le Paradis éternel. […] Poictevin répondra qu’il s’efforce de sortir des formes « ou du moins de les faire rentrer en leur sens invisible, latent, éternel. […] On a beaucoup redit au peuple français qu’il avait reçu sa vocation d’en haut, qu’il était investi d’une mission particulière ; que, dans la marche éternelle des peuples, il était toujours et nécessairement “en tête de la troupe” ; qu’il s’en allait “chevauchant des chevauchées gigantesques, à travers le monde”, taillant dans la masse humaine, démolissant les remparts du passé, reculant les frontières invisibles de l’esprit, refaisant la carte mouvante de la géographie idéale ; qu’il était enfin “la conscience de l’humanité dans son expression la plus haute”.

1494. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

De même donc qu’il y a dans Ronsard quelque chose de ce Marot et de ce Mellin de Saint-Gelais que, des hauteurs de son pindarisme, il avait cru précipiter dans l’éternel oubli, de même il y a quelque chose de Ronsard dans Malherbe, et premièrement, la prétention ou le projet de fondre ensemble, dans une forme à peu près française, l’imitation de l’antique et celle de l’Italie. […] La savante Histoire critique de la prédication de Bossuet, par M. l’abbé Lebarcq, elle-même suivie d’une nouvelle édition des Sermons, dont les deux premiers volumes viennent justement de paraître, nous serait sans doute un heureux prétexte à reparler du plus grand des orateurs… Je l’appelle le plus grand, et il l’est, d’autant que les intérêts éternels qu’il agite dans ses Sermons sont eux-mêmes au-dessus de ceux qu’ont remués dans leurs discours les Démosthène, les Cicéron, les Mirabeau… Mais, au lieu de l’orateur, si c’était plutôt l’écrivain qu’on voulût étudier, le livre du P. de la Broise sur Bossuet et la Bible nous en procurerait tout naturellement l’occasion. […] Mais, ce qui nous importe beaucoup davantage, on voit les libertins ici paraître en scène, et Bossuet, dans son exorde, annoncer son intention d’établir contre eux la vérité du dogme de la Providence : « De toutes les perfections infinies de Dieu, celle qui a été exposée à des contradictions plus opiniâtres, c’est sans doute cette Providence éternelle qui gouverne les choses humaines. […] « Ainsi, tous les temps sont unis ensemble, et un dessein éternel de la divine Providence nous est révélé. […] Et si enfin tout ce qui est vient de Dieu sans en excepter le mal même, « physique » ou « moral », dont nos yeux ne voient pas la liaison avec un plus grand bien, de telle sorte que, travailler à la réalisation de la justice parmi les hommes, ce soit en réalité s’insurger contre les décrets de l’éternelle sagesse ; — que devient alors le progrès moral ?

1495. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Et par-dessous ce symbolisme social, il s’en fût caché sans doute un autre : on eût entendu passer dans ces pages la plainte profonde de la mésintelligence éternelle, cette torture que, même dans la plus complète et la plus tendre communion des cœurs, ces cœurs ne soient pas un seul cœur, qu’ils restent deux, irréparablement, immortellement. […] C’est un rapport de l’Âme et de l’éternelle Pensée, de l’éternel Amour, de l’éternelle Puissance. […] Il ne les prononçait pas, mais tout proclamait en lui cette sérénité d’une conscience qui n’a pas cessé de se tourner vers les clartés éternelles. […] La place très importante que vous occupez dans le mouvement contemporain est due à la manière neuve dont vous avez posé les éternels problèmes. […] De là ce flottement dans la conduite de son empire, et ces éternelles remises qui, par instants, lui ont donné un air de matamore qui a peur, de « valeureux poltron », répétait volontiers le roi Édouard, son oncle.

1496. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

Cette maternité féconde était pour Pétrarque un éternel sujet d’affliction, une torture sans fin. […] Ainsi qu’il a plu à notre père éternel, chacune de nous deux est née immortelle. […] Ils se demandent comment il n’a pas compris que la seule manière aujourd’hui, je ne dis pas de rajeunir, mais de traiter ces questions éternelles, inévitables, est de montrer l’impuissance de la physiologie à les résoudre. […] C’est l’éternelle histoire de tous les esprits paresseux. […] Je sais tout ce qu’il y a de vulgaire et de vide dans cette industrie qui peuple aujourd’hui de redites éternelles tous les théâtres de boulevard, et parfois aussi le théâtre qu’on appelle la maison de Molière.

1497. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

Jamais je ne serais sorti de moi-même de mes éternelles irrésolutions ; mais Dieu m’avait préparé en ce pays le secours dont j’avais besoin ; sa Providence, par un enchaînement de grâces admirable, m’a conduit au terme où elle m’attendait ; pleine d’amour pour un enfant rebelle, pour le plus indigne des pécheurs, elle m’arrache à ma patrie, à ma famille, à mes amis, à ce fantôme de repos que je m’épuisais à poursuivre, et m’amène aux pieds de son ministre pour y confesser mes égarements et m’y déclarer ses volontés.

1498. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

Tout vrai Suisse a un ranz éternel au fond du cœur.

1499. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE BALZAC (La Recherche de l’Absolu.) » pp. 327-357

j’étais hors de moi-même, je fis comme Pygmalion, je me mis à genoux pour contempler mon ouvrage et en remercier l’Éternel.

1500. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SUE (Jean Cavalier). » pp. 87-117

Les grands et éternels peintres, qui certes savaient le mal aussi, les Shakspeare, les Molière, l’ont- ils jamais exprimé dans ces raffinements d’exception, dans cette corruption calculée ?

1501. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. NISARD. » pp. 328-357

ce que lui-même, en d’autres occasions, appellerait des vérités éternelles que l’expression rajeunit.

1502. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires sur la mort de Louis XV »

Quoique ce sentiment fût le même à Versailles, l’air d’inquiétude y était plus général ; c’est d’abord le pays du déguisement, et si le déguisement est permis dans un cas, c’est bien dans celui où quand on peut, sans blesser l’honneur, cacher ce qu’on pense, on ne peut pas le faire paraître sans étourderie et sans courir le risque à peu près sûr d’une Bastille éternelle.

1503. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

Il n’est pas possible de ne pas éprouver une affliction profonde lorsqu’on voit, dans une certaine littérature moderne dont on vient louer les auteurs, fouler aux pieds les lois de l’ordre éternel, attaquer la religion, base de l’ordre social.

1504. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Introduction »

Ces diverses réflexions ne pourraient avoir de prix qu’en les appuyant sur des faits, sur une connaissance détaillée de l’histoire, qui présente toujours des considérations nouvelles, quand on l’étudie avec un but déterminé, et que guidé, par l’éternelle ressemblance de l’homme avec l’homme, on recherche une même vérité à travers la diversité des lieux et des siècles.

1505. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

Dans un livre qui est comme le testament philosophique du siècle382, Condorcet déclare que cette méthode est « le dernier pas de la philosophie, celui qui a mis en quelque sorte une barrière éternelle entre le genre humain et les vieilles erreurs de son enfance ». — « En l’appliquant à la morale, à la politique, à l’économie politique, on est parvenu à suivre dans les sciences morales une marche presque aussi sûre que dans les sciences naturelles.

1506. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre premier. De l’illusion » pp. 3-31

Si vous avez l’imagination nette et si, tranquille au coin de votre feu, vous vous laissez absorber par cette rêverie, vous verrez bientôt les moires luisantes de la surface, les feuilles jaunâtres ou cendrées qui descendent le courant, les faibles remous qui font trembler les cressons, la grande ombre froide des deux files d’arbres ; vous entendrez presque le chuchotement éternel des hautes cimes et le vague bruissement de l’eau froissée contre ses bords.

1507. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

. — Mort amère, éternelle mémoire !

1508. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Michel-Ange, dans la fameuse chapelle de San Lorenzo, lui construisit son sépulcre, à jamais célèbre : les statues de la Nuit et du Jour y représentent l’éternelle vicissitude des événements et la brièveté de la gloire.

1509. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre II. Les romans bretons »

Voici bien du nouveau pour notre public : voici la passion intime, éternelle, qui souffre, et qui se sacrifie : Fresne préparant le lit de la nouvelle épouse pour laquelle son seigneur la répudie ; la femme d’Eliduc ranimant la fiancée que son mari avait ramenée d’outre-mer, et se faisant nonne pour lui céder la place.

1510. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. Le théâtre romantique »

D’abord la forme dramatique épure l’inspiration lyrique en l’objectivant, et surtout quand le thème éternel est l’amour, le lyrisme direct devient trop facilement agaçant ou ennuyeux.

1511. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Francisque Sarcey »

Je suis bien aise de lui dire que je connais des âmes pieuses qui, depuis qu’elles ont lu ce chapitre, ne désespèrent plus de son salut éternel.

1512. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Ferdinand Fabre  »

Le prêtre doit à Dieu plus qu’un autre homme et se sent plus qu’un autre sous la main de Dieu ; mais en même temps il est ministre de l’Éternel ; il est élevé par l’onction sacerdotale fort au-dessus des laïques, même au-dessus des grands de l’esprit et des puissants.

1513. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Victor Hugo, Toute la Lyre. »

Mais les expiations ne sont pas éternelles.

1514. (1895) La musique et les lettres pp. 1-84

  Mythe, l’éternel : la communion, par le livre.

1515. (1894) Propos de littérature « Chapitre V » pp. 111-140

Pourtant, — MM. de Régnier et Griffin l’ont compris en tentant la poésie la plus noble, — il n’est pas de demi Beauté ; et qui d’entre nous, se disant artiste, aurait la lâcheté de ne pas dévouer tout son être au poème éternel ?

1516. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre huitième »

Plus d’une réflexion courte mais profonde, qui semble comme échappée à une conviction habituelle, une éloquente réfutation du paradoxe de Bayle qui prétend qu’un État formé de véritables chrétiens ne pourrait subsister, le dogme des peines éternelles presque justifié par la théorie des crimes inexpiables, tout cela est d’un homme qui a eu tout au moins une vue supérieure du christianisme.

1517. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Il n’y a pas vu ce qu’un si grand objet pouvait inspirer d’éloquence dans les écrits, de vertus dans la conduite, ni ce que l’histoire peut tirer de vérités sur l’esprit français et sur le cœur humain, de ces querelles où la théologie n’est que le champ clos temporaire de passions et de contradictions éternelles.

1518. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Appendice »

Quand je songe au bonheur si pur dont je jouissais autrefois, à pareille époque, je suis pris d’une grande tristesse, surtout quand je songe que j’ai dit à ces jours un adieu éternel.

1519. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre X. La littérature et la vie de famille » pp. 251-271

De même que l’amour dans les temps modernes s’est transformé avec une souplesse infinie et est devenu quelque chose de plus complexe, de plus troublé et partant de plus dramatique que dans l’antiquité, de même ces sentiments toujours jeunes, comme ce qui est éternel, ont varié, suivant les époques, d’expression et même d’intensité.

1520. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIII. La littérature et la morale » pp. 314-335

Mais aussi la combinaison de ces éléments éternels varie incessamment ; vices et vertus changent suivant les temps et de forme et d’intensité ; la moralité dans l’humanité et même dans une seule nation a son va-et-vient, sa hausse et sa baisse, autrement dit son évolution.

1521. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre II : La Psychologie. »

Or, si on examine cette doctrine de Hamilton, on verra que poussée à ses dernières conséquences, elle aboutirait à donner à tous les phénomènes un substratum éternel dont les causes et les effets ne seraient que des manifestations dans le temps : c’est-à-dire qu’elle est complètement opposée d’esprit et de tendances à l’empirisme, tandis que M. 

1522. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XIV, l’Orestie. — Agamemnon. »

L’esclave secoue la rosée qui glace son corps engourdi, il rappelle ses dix années d’insomnie, son interminable faction devant l’éternelle année des étoiles.

1523. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Études sur Saint-Just, par M. Édouard Fleury. (2 vol. — Didier, 1851.) » pp. 334-358

Ce prochain démagogue fait un aveu peu propre à encourager : « Le peuple est un éternel enfant. » Et rien n’empêche chez lui de croire l’aveu sincère.

1524. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre I. Le Bovarysme chez les personnages de Flaubert »

Guy de Maupassant traduisait cette impression pessimiste lorsqu’il voyait démontrées dans Bouvard et Pécuchet « l’impuissance de l’effort, la vanité de l’affirmation et toujours l’éternelle misère de tout ».

1525. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préface des « Derniers Jours d’un condamné » (1832) »

— Voilà bien à peu près textuellement la phrase éternelle dont tous les réquisitoires des cinq cents parquets de France ne sont que des variations plus ou moins sonores.

1526. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre II. Des poëtes étrangers. » pp. 94-141

Qui pourroit supporter parmi nous le mêlange éternel qu’il fait du sacré & du profane ?

1527. (1913) La Fontaine « III. Éducation de son esprit. Sa philosophie  Sa morale. »

Très directement encore, comme dans les Souhaits, plus directement encore dans le prologue de Philémon et Baucis, il s’exprime ainsi : Ni l’or ni la grandeur ne nous rendent heureux : Ces deux divinités n’accordent à nos vœux Que des biens peu certains, qu’un plaisir peu tranquille ; Des soucis dévorants c’est l’éternel asile ; …………………………………………………     L’humble toit est exempt d’un tribut si funeste ; Le sage y vit en paix et méprise le reste : Content de ses douceurs, errant parmi les bois, Il regarde à ses pieds les favoris des rois ; Il lit au front de ceux qu’un vain luxe environne, Que la fortune vend ce qu’on croit qu’elle donne.

1528. (1913) La Fontaine « IV. Les contes »

Seulement, dans la possession du pouvoir, il a trouvé pour tous charmes d’effroyables soucis, d’éternelles alarmes, comme dit Corneille.

1529. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre III. De la nature du temps »

Qu’un univers ait trois dimensions, ou deux, ou une seule, qu’il n’en ait même pas du tout et se réduise à un point, toujours on pourra convertir la succession indéfinie de tous ses événements en juxtaposition instantanée ou éternelle par le seul fait de lui concéder une dimension additionnelle.

1530. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

C’est que Molière a puisé ici son comique à cette source éternelle du rire qui est le contraste en ce qu’est réellement un personnage et ce qu’il veut paraître. […] Elle tournait en raillerie des travers qui sont légers, mais éternels. […] Vous devez être ridicule ; ainsi l’a voulu Molière, ainsi le veut l’éternel bon sens ; car tout ce qui est disproportionné est comique, et vous êtes bossu, mon bon. […] Les dilettantes sauront bien reconnaître dans ce fond de bouffonnerie l’éternelle vérité humaine. […] Vous pouvez fouiller tant qu’il vous plaira un personnage de Molière et en tirer toute l’ardeur des passions modernes, parce qu’il a vu et peint, sous le personnage à perruque du siècle de Louis XIV, l’homme en son fond éternel.

1531. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

C’est l’éternelle question. […] TRISSOTIN Cette ardeur, jusqu’ici de vos yeux ignorée, Vous consacre des vœux d’éternelle durée. […] A la vérité, ceux-ci y trouvent un intérêt plus fort dans la seule peinture merveilleuse des personnages : ils y voient « le monde » du dix-septième siècle et des types éternels du monde immuable. […] À cela se rattache naturellement l’histoire des démêlés continuels de ces théâtres avec la Comédie française, puisque les sévérités de l’administration à l’égard des petits théâtres avaient pour une de leurs causes les éternelles doléances de la Comédie française et la revendication éternelle qu’elle faisait de son privilège. […] Et que du trône où le Ciel vous appelle L’inflexible équité soit la garde éternelle.

1532. (1907) Propos de théâtre. Quatrième série

C’est ainsi que le monde entier se métamorphose sous les mains de l’homme, et la pauvre dame Nature doit se rire parfois au nez de bon cœur quand elle mire dans ses mers et dans ses lacs son éternelle mascarade. » Sentez-vous assez qu’il y a ici un peu de fatigue et que Fantasio ne laisse pas ici de faire de la fantaisie ? […] Quoi qu’il en soit, après un long silence volontaire, dont plus d’un s’est plaint, il entre dans le silence éternel, et aussi dans une gloire incontestée et pure, que rien, à l’heure grave de la séparation, ne vient offusquer ou altérer d’un mauvais mélange. […] — Tu as dû le laisser dans le billard, dit la cousine, éternelle gaffeuse. […] D’où il faut conclure, je crois, qu’il n’aimait ce métier que parce qu’il comportait les éternels voyages, la vie errante, l’existence vagabonde et inquiète. […] Le docteur plaide la cause du bonheur humain et l’abbé la cause du bonheur éternel ; et aussi, le docteur plaide pour lui et pour son amour, et le prêtre pour son office sacerdotal et avec ce sentiment qu’il exprime presque nettement : « J’ai charge d’âme et les âmes m’appartiennent. » Et le docteur en vient très naturellement à dire ce qu’il a déjà au moins indiqué à la duchesse.

1533. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

Lorsque le goût se corrompît à Rome, l’éloquence de Cicéron, quoique mal imitée, resta l’éternel modèle. […] Le traité de la Nature des Dieux n’est qu’un recueil des erreurs de l’esprit humain, qui s’égare toujours plus ridiculement dans les plus sublimes questions ; mais l’absurdité des différents systèmes n’empêche pas d’admirer l’élégance et la clarté des analyses ; et les morceaux de description restent d’une vérité et d’une beauté éternelles. […] Dans ce testament fait au nom de Dieu, il déclare d’abord qu’espérant et croyant avec certitude participer à la vie éternelle, par les seuls mérites de Jésus-Christ son sauveur, il confie son âme aux mains de Dieu son créateur, et son corps à la terre, d’où il est formé ; puis il dispose, en bon gentilhomme anglais, de son bien, assez considérable pour le temps. […] Nous aimons, nous admirons le génie dramatique de la France, si fortement expressif sans barbarie, si vrai sans bassesse ; et, malgré le découragement trop désintéressé d’un illustre écrivain67, nous croyons à l’éternelle durée des monuments gracieux et sublimes de notre poésie. […] Mais la postérité, laissant ces diatribes dans l’oubli qu’elles méritent, ne cherche Milton que dans son poème, qui fait un éternel honneur à l’esprit humain.

1534. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Elle était absente du cœur de l’artiste qui peignit cette toile sombre, elle est absente de presque tous les cœurs, l’espérance d’une absolution divine, d’une innocence reconquise, d’un bonheur éternel promis au plus coupable des coupables. […] » Et l’auteur continue sur ce ton, fouillant dans ses, souvenirs d’enfance ou de jeunesse, et variant des impressions personnelles sur l’éternel thème de la Tristesse d’Olympio dont ces quatre merveilleux vers résument la grandeur, et qui viennent d’eux-mêmes au bout de ma plume : Que peu de temps suffit pour changer toutes choses ! […] Il le comprit, et le fit comprendra à ceux qui avaient combattu et vaincu avec lui : les mauvais Anges acceptèrent de passer pour les bons Anges enfouis aux éternelles ténèbres, tandis que Lucifer tenait lieu de Jéhovah déchu. […] Ne nous étonnons donc pas nous, fils de ces Latins qui devaient quelque reconnaissance aux Grecs, du plaisir que nous éprouvons parfois à respirer les bouffées d’air qui ont passé sur l’Attique et qui nous en apportent de lointains parfums, et remercions ceux qui nous font revivre dans cette antiquité, source éternelle de beauté et de jeunesse. […] En revanche, les femmes peuvent circuler sans danger dans les rues, en tout temps ; pour elles seulement il y a amnistie complète et éternelle.

1535. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

Jusque sous la griffe du milan, il sait ce qu’il se doit, et garde sa gravité, au risque de perdre son nez. « Il n’éclate pas : les cris sont indécents à la majesté souveraine. »28 Louis XIV avait de la tenue même quand on l’opérait de sa fistule, et sa perruque comme ses beaux gestes seront l’éternel exemple de tous les rois. […] Il veut toucher les deux ou trois passions éternelles qui mènent l’homme, les quelques facultés maîtresses qui composent la race, les quelques circonstances générales qui façonnent la société et le siècle.

1536. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

Et quand Molière, regardant au-dessus des ridicules, voulut, de sa libre invention, et sans l’indication royale, montrer dans le Tartufe le plus odieux de tous les vices, l’hypocrisie religieuse, exploitant le plus commun des travers, la crédulité, Louis XIV protégea le poète et la pièce, et le plus religieux des rois consacra cette éternelle leçon donnée au genre humain sur l’abus qu’on peut faire de la religion. […] Il lut ces fameux écrits qui, par toutes les qualités du grand siècle, la méthode, la proportion, la majesté jointe au naturel, les vues les plus profondes sur l’homme, sont des monuments littéraires d’un intérêt éternel.

1537. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1866 » pp. 3-95

Des poésies de l’époque des Thang, la philosophie épicurienne au bord des eaux, l’éternelle invitation à la tasse, font vaguement rêver à un Horace de Rotterdam. […] À table, Gautier, ses deux vieilles sœurs, l’éternel Chinois, et la jolie Estelle, ayant comme voisine de table, Éponine, une chatte noire aux yeux verts qui mange à son couvert, aux côtés de sa maîtresse.

1538. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Vous le deuez, et pour vostre gloire en particulier, et pour celle de nostre nation en général, qui s’y trouue intéressée : veu que les estrangers qui pourroient voir ce beau chef-d’œuure, eux qui ont eu des Tassos et des Guarinis, croyroient que nos plus grands maistres ne sont que des apprentifs. » Il y a dans ce peu de lignes instructives toute la tactique éternelle de la routine envieuse contre le talent naissant, celle qui se suit encore de nos jours, et qui a attaché, par exemple, une si curieuse page aux jeunes essais de lord Byron. […] Les unes sont éternelles, intérieures, et restent ; les autres variables, extérieures, et ne servent qu’une fois.

1539. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

Ainsi, depuis des siècles dont nous ne pouvons évaluer le chiffre, l’éternel modèle animé et inanimé pose devant les hommes qui, de génération en génération, s’efforcent de l’observer, de l’étudier, de le pénétrer et de le traduire fidèlement. […] Les écrivains contemporains ne font qu’actualiser ce qui est éternel.

1540. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

Que le miel embaume toute la forêt, qui s’étend dans les vallons et sur les montagnes ; que des parfums rares se répandent sur les bords des prés, que l’huile coule à flot des terres basses. » Tous les métiers, tous les travaux d’art sont écrits, comme dans Homère, avec un minutieux détail  : Alors le forgeron Ilmarinen, l’éternel artiste-forgeron, dans la fournaise, forgea un aigle avec le feu de l’antique savoir. […] Empare-toi pour moi de ce monstre aquatique Et la construction d’une barque par Wainamoinen est un des grands épisodes du poème  : Wainamoinen, vieux et habile, l’éternel faiseur de merveilles, construit son vaisseau avec enchantement, construit son bateau par art et magie. […] Néron jouait du violon pendant que Rome brûlait, du moins à ce que disent des historiens inexacts, mais c’est pour bâtir une cité éternelle que les Socialistes de nos jours se sont occupés de faire de la musique et ils ont une entière confiance dans les instincts artistiques du peuple. […]  » La moitié des passions des hommes ont une fin prématurée, parce qu’on s’attend à ce qu’elles soient éternelles. […] Et tu seras silencieux dans ce sommeil éternel.

1541. (1921) Esquisses critiques. Première série

Étrange, éternel aveuglement des critiques, qui ne peuvent confesser sur-le-champ la nature de chef-d’œuvre que possède ce qu’on leur soumet. […] À qui d’ailleurs échapperaient la qualité de ce langage théâtral abondant et dru, les larges traits de cette représentation du monde, l’éclat et la vivacité avec lesquels sont dépeints ici, l’imbécile fatalité de la vie et l’éternelle malignité des femmes. […] En effet, elles sont ornées de toutes les vaines parures auxquelles se complaisait l’école, et rien n’est moins éternel que ces enjolivures extérieures. […] Deux amants s’aiment ou cessent de s’aimer ; thèmes éternels, sujets infinis, consubstantiels à toute littérature et dont seuls peuvent s’emparer pour les revêtir de chair les écrivains du premier ordre.

1542. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

Renan, qui aimait le poète de la Légende des siècles pour ce qu’il sentait, dans son génie, d’inconscient et de divin, a dit un jour que Victor Hugo avait été mis au monde « par un décret spécial et nominatif de l’Eternel ». […] C’est ce scrupule qu’il a un jour exprimé avec une vivacité un peu osée, — cum grano salis, — en disant que « nous devons la vertu à l’Eternel, mais que nous avons droit d’y joindre, comme reprise personnelle, l’ironie ». […] Mais je vois dans ce mot tout le combat du Christ et du paganisme, « de l’éternel paganisme », comme disait Sainte-Beuve. […] Et cependant, voyez ce qui reste d’un succès d’il y a vingt-cinq ans… Qu’est-ce que tout cela qui n’est pas éternel Il y a pourtant, dans ce drame inutile, un coin qui m’a plu. […] « Ce n’est point, dit Valentin à Cécile, l’éternelle pensée qui fait graviter les sphères, mais l’éternel amour.

1543. (1927) Approximations. Deuxième série

Objet de l’éternel regret d’un Nietzsche, c’est elle qui rend compte avant tout de l’admiration qu’il n’était jamais las de proclamer pour notre littérature. […] Ils ont une valeur indépendante de toutes les circonstances temporelles, — une valeur éternelle et qui doit être sentie pour elle-mêmez ». […] Je suis porté au loin en de tragiques ténèbres ; tandis que brûlant au travers du voile le plus reculé du ciel, l’âme d’Adonais, telle une étoile, s’allume au séjour où les éternels résidentav ». […] Quelque terme où nous pensions nous attacher et nous affermir, il branle et nous quitte ; et si nous le suivons, il échappe à nos prises, nous glisse et fuit d’une fuite éternelle. […] Sentimentalement cette opinion est très voisine de l’orgueil nihiliste d’un Vigny154, se posant en antithèse au « silence éternel de la divinité ».

1544. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Un peuple, certes, a ses traditions ; et Montesquieu, toujours hanté de l’histoire des Athéniens et de l’histoire de la plèbe romaine, ne reconnaît pas assez qu’un peuple a ses traditions ; mais il faut bien convenir qu’il les a moins fixes, moins arrêtées et surtout qu’il s’en rend moins compte qu’un corps constitué et organisé, qui précisément ne s’est constitué, organisé et conservé que par amour de la tradition, du durable, du permanent et de l’éternel. […] Comptez que quand la magistrature ne sera pour ceux qui l’exercent, qu’un état d’épreuve pour monter plus, haut, cette autorité n’aura pas en eux l’abus qu’on en pourrait craindre, ou que, si cet abus a lieu, il sera toujours moindre que celui de ces foules de lois qui se contredisent, dont le nombre rend les procès éternels et dont le conflit rend également le jugement arbitraire.  » (Considérations sur le gouvernement de Pologne.) […] L’Église catholique pousse au célibat et le célibat épuise et ruine la nation : « Je parle des prêtres et des dervis de l’un et de l’autre sexe qui se vouent à une continence éternelle. […] On voit dans chaque famille religieuse une famille éternelle où il ne naît personne et qui s’entretient aux dépens de toutes les autres. […] Ce rabbin prétend que la loi mosaïque est éternelle, immuable, et de là il conclut que ses ancêtres se conduisirent, dans leur déicide comme leur loi l’ordonnait expressément… » Dans ses lettres : au cardinal Dubois, 28 mai 1722 : « Si Votre Excellence juge la chose importante, oserai-je vous représenter qu’un juif, n’étant d’aucun pays que celui où il gagne de l’argent, peut aussi bien trahir le roi pour l’empereur que l’empereur pour le roi ?

1545. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

Bernhardi serait heureux de nous faire croire qu’il sacrifie, en ces termes, des contrats médiocres au « droit de l’éternel humain ». […] Dus à l’éternel oubli, nous réussissons, en cultivant notre manie à l’âge de l’activité, un peu plus tard notre jardin, à oublier cette misère de notre condition mortelle, ici-bas. […] Le soleil éternel embellit ainsi tous les êtres. […] Plus tard, à la tribune de la Chambre, il admonestera vivement ceux qui, négligeant l’affranchissement de tous les peuples, ne craignent pas de placer l’intérêt de la France dans « une grandeur égoïste » : il préconise « la grandeur de tous et la justice éternelle ». — « Soyons Français !  […] Leurs thèmes, ce furent tous les problèmes du jour, sans compter les idées éternelles.

1546. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Benjamin Constant était le premier à plaisanter de ces transformations de son éternel ouvrage, de cet ouvrage toujours continué et refait tous les cinq ou dix ans, selon les nouvelles idées survenantes : « L’utilité des faits est vraiment merveilleuse, disait-il de ce ton qu’on lui a connu ; voyez, j’ai rassemblé d’abord mes dix mille faits : eh bien ! […] Je vous fais des adieux, et des adieux éternels. […] Pressé pourtant, persécuté de nouveau par sa famille, il repart en novembre pour cet éternel Brunswick.

1547. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Werther. Correspondance de Goethe et de Kestner, traduite par M. L. Poley » pp. 289-315

Quand les vapeurs de la vallée s’élèvent devant moi, qu’au-dessus de ma tête le soleil lance d’aplomb ses feux sur l’impénétrable voûte de l’obscure forêt, et que seulement quelques rayons épars se glissent au fond du sanctuaire ; que couché sur la terre dans les hautes herbes, près d’un ruisseau, je découvre dans l’épaisseur du gazon mille petites plantes inconnues ; que mon cœur sent de plus près l’existence de ce petit monde qui fourmille parmi les herbes, de cette multitude innombrable de vermisseaux et d’insectes de toutes les formes, que je sens la présence du Tout-Puissant qui nous a créés à son image, et le souffle du Tout-Aimant qui nous porte et nous soutient flottants sur une mer d’éternelles délices ; mon ami, quand le monde infini commence ainsi à poindre devant mes yeux et que je réfléchis le ciel dans mon cœur comme l’image d’une bien-aimée, alors je soupire et m’écrie en moi-même : « Ah !

1548. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

Et enfin, après d’insatiables retouches et remaniements de cet éternel cinquième acte d’Hamlet, et lui-même la tête encore toute fumante d’une dernière refonte : « Je lui écris (à Talma) que mon nouveau cinquième acte, refait à ma guise, à ma cuisine, est terminé, et que je ne le conçois et ne le concevrai jamais que de cette manière.

1549. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Appendice. »

D’ailleurs il y a des choses de climat qui sont éternelles.

1550. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance. »

Le jugement de Sismondi sur la société de Paris est à la fois remarquable et ordinaire : il distingue à merveille et indique par des nuances fort justes les divers degrés de mérite et d’amabilité chez les personnes qu’il rencontre, et en même temps il recommence pour son compte l’éternelle plainte qu’on avait déjà faite avant lui, et qu’on refera depuis, sur la décadence des générations.

1551. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Elles ont de ces refus fixes et définitifs au moment de rentrer à jamais dans l’éternel Érèbe : ……..Atque inimica refugit In nemus umbriferum…….

1552. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Bruyère »

On se révolte, il est vrai, de temps à autre, contre ces belles réputations simples et hautes, conquises à si peu de frais, ce semble ; on en veut secouer le joug ; mais, à chaque effort contre elles, de près, on retrouve cette multitude de pensées admirables, concises, éternelles, comme autant de chaînons indestructibles : on y est repris de toutes parts comme dans les divines mailles des filets de Vulcain.

1553. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (4e partie) » pp. 81-143

Elle ne savait pas si cela est bon ou mauvais, utile ou dangereux, nécessaire ou mortel, éternel ou passager, permis ou prohibé ; elle aimait.

1554. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIVe entretien. Mélanges »

De l’éternel séjour, le regard de son âme Est un astre toujours sur ses enfants levé.

1555. (1892) Boileau « Chapitre V. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » (Fin) » pp. 121-155

Il faut traduire son observation, conformer son imitation, de façon que non seulement on en reconnaisse l’éternel modèle, mais qu’encore cette reconnaissance soit  un plaisir.

1556. (1889) Les premières armes du symbolisme pp. 5-50

Les prétendus décadents cherchent avant tout dans leur art le pur Concept et l’éternel Symbole, et ils ont la hardiesse de croire avec Edgar Poë « … que le Beau est le seul domaine légitime de la poésie.

1557. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre premier »

Il ne se pense rien de général et d’éternel en français, du moins dans cet ordre d’idées qui seul peut susciter le langage littéraire, et recevoir des formes définitives.

1558. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

Il fait justice de la Ligue au nom des principes éternels qui condamnent toute anarchie, il oppose à sa politique la vraie politique de la France, et il retrouve, pour peindre les horreurs de la guerre civile, les accents de Démosthène dévoilant Philippe, et de Cicéron accablant Antoine.

1559. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre dixième. »

On sait comment il se tourna tout à coup vers « ces sources éternelles d’instruction et de vie79. » Esprit charmant par son ouverture et son abandon, qui ne cherche pas à se connaître, pour n’avoir pas à se gouverner, et qui se laisse avertir de lui par les autres ; pieux, s’il vient à ouvrir un livre de piété ; galant et presque précieux, quand il lit Voiture ; un ancien, quand il lit les anciens.

1560. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 janvier 1886. »

La musique n’est pas le langage de l’éternelle et absolue vérité ; plus qu’aucun autre art, elle est fatalement soumise à l’instabilité du caprice, aux variations de la mode.

1561. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 457-512

  L'humeur, dont il n'a jamais su se rendre maître, a aussi beaucoup influé sur ses éternelles variations.

1562. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

On revit, on rajeunit, et tout aïeul, penché sur le berceau de ses petits-enfants, conçoit mieux qu’un philosophe et qu’un grand moraliste la chaîne doucement renouée des générations et cet éternel recommencement du monde.

1563. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Sieyès. Étude sur Sieyès, par M. Edmond de Beauverger. 1851. » pp. 189-216

. — Voici, mon très cher maître, mon Droit de la guerre, qui vous sera un éternel monument (si toutefois vous ne le brûlez pas) de mes sentiments et de mes reproches.

1564. (1913) La Fontaine « VII. Ses fables. »

L’homme est animal inventeur éternel, parce qu’il en a contracté le pli, en quelque sorte, et parce qu’il n’a pas su s’arrêter au point où il est très probable qu’il aurait pu s’arrêter.

1565. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Quoique nous pliions sous l’influence de Goethe qui a replacé, prétend-on, les anciens dans leur vraie lumière, nous, c’est-à-dire tous, n’avons ni pour Virgile, ni pour aucun ancien, excepté Tacite qui se rapproche de nous par la haine éternelle du pouvoir chez l’homme et l’insultante manière de juger nos maîtres, l’intérêt animé et sincère qui répond par un frémissement ou une palpitation à chaque coup de scalpel porté dans l’œuvre du grand écrivain-Les raisons de cette indifférence sont nombreuses.

1566. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

Après avoir été infidèle à sa femme pour cette fameuse Charlotte de Campvallon, — que les ingénus qui jugent les femmes à l’audace avec laquelle elles relèvent leurs jupes ne manqueront pas de prendre pour un caractère, — il redevient platement amoureux de sa femme, à lui, uniquement parce qu’elle l’a quitté et que c’est l’éternel jeu de ces enfants : « Tu ne veux plus, mais moi précisément je veux, parce que toi tu ne veux plus. » Enfin, dernier coup porté à cet invincible !

1567. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Si donc le naturalisme apporte réellement, ainsi qu’il l’affirme, quelque chose de nouveau et d’original, ce n’est pas, comme il le dit, ce précepte éternel et vieux comme l’art lui-même de l’observation de la réalité, c’est une certaine façon de faire cette observation, c’est une certaine méthode pour la diriger.

1568. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Sous le nom de Jupiter, c’est le Dieu des Juifs qui est adoré ici, ce Dieu qui donne la vertu et la richesse, et qui, même par les biens terrestres, anticipe sur les promesses éternelles, selon les images fréquentes dans les livres de l’ancienne loi.

1569. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

II La lutte entre le bien et le mal ne date pas d’hier, en littérature comme en toutes choses : on retrouve cet éternel combat, qui est la vie même de l’humanité, dans les diverses phases de l’histoire comme dans les replis du cœur, dans les créations de la poésie comme dans les œuvres de Dieu, dans les plus grossiers symbolismes des théogonies païennes comme dans les plus limpides lumières de la religion révélée. […] Pour ces femmes, dont le nombre est grand et qui voudraient avoir les menues friandises d’un amour illicite sans en connaître les emportements et les orages, M. de Balzac a été, dans le Lys dans la vallée et dans quelques autres parties de ses trop nombreux ouvrages, ce qu’il est pour les jeunes gens ambitieux et sans principes, dans les récits où figurent ses éternels Rastignac, Rubempré, de Marsay, de Manerville, d’Esgrignon : le tentateur, non pas ardent, passionné, dupe de lui-même et s’entraînant dans ses mauvais conseils, mais subtil, dissolvant, insinuant, s’infiltrant goutte à goutte, et grisant de ses perfides arômes ceux qu’il va égarer ou corrompre. […] Hugo lui a répliqué, toujours avec la même aménité de langage et le même bonheur d’expressions : En marchant, je le sais, j’afflige votre foi, Votre religion, votre cause éternelle, Vos dogmes, vos aïeux, vos dieux, votre flanelle, Et dans vos bons vieux os, faits d’immobilité, Le rhumatisme antique appelé royauté ! […] Une réaction, cette éternelle réaction qui tient de si près aux faiblesses humaines et qui s’accomplit à petit bruit sous les républiques puritaines comme sous les royautés dévotes, se préparait, dans la population génevoise, au profit de quiconque lui apporterait, du côté de Paris, des divertissements, des broderies et des dentelles, pour remplacer la serge, le drap noir et le prêche. […] Évidemment et sans cesser de tenir compte de cet éternel mélange de bien et de mal qui est la vie de l’histoire et l’histoire de la vie, il y a là, à ce moment où nous retrouvons Charles IV et ses contemporains, esquissés avec tant de vérité et de relief par M. d’Haussonville, une marque distinctive, un trait particulier qui peut servir à expliquer ces contrastes, ces alternatives de grandeur et de bassesse, d’héroïsme et de défaillance, à éclairer même d’une lueur consolante ces côtés mesquins et fâcheux de l’humaine nature.

1570. (1864) Le roman contemporain

Alors tous ces consuls sans faisceaux, ces magistrats sans magistratures, ces orateurs sans tribune, ces généraux sans soldats, qu’on voit s’agiter dans la curieuse correspondance de Cicéron, ne rappelèrent pas mal ces héros des Champs-Élysées qu’Énée, dans sa descente aux enfers, rencontra prêts à se livrer, sur leurs chars vides, à des simulacres de combats, vaines images de leurs occupations pendant leur vie, stérile amusement de leurs loisirs éternels ! […] Et Emma se mit à rire, d’un rire atroce, frénétique, désespéré, croyant voir la hideuse figure du misérable qui se dressait dans les ténèbres éternelles comme un épouvantement… Une convulsion la rabattit sur le matelas. […] Les malheureux poussent de bruyants éclats de rire qui se terminent à leur insu en gémissements lugubres, la sombre nuit descend sur leurs têtes ; les viandes dont ils se repaissent s’ensanglantent sur leurs lèvres ; des larmes dont la source leur est inconnue coulent sur leurs joues, et des figures étranges glissent sur les murailles, comme si les morts sortaient des ténèbres éternelles pour venir chercher ceux qui vont mourir. […] L’air qu’on y respire ressemble un peu à cette atmosphère marécageuse dans laquelle mademoiselle de Férias puise les germes de la fièvre pernicieuse qui l’emporte en quelques heures, après cette longue et étrange promenade, qu’en véritable héroïne de roman elle fait avec le comte de Chalys dans la forêt, à la tombée du jour, au moment de lui dire un éternel adieu. […] La société ne possède aucun moyen de faire d’un forçat un honnête homme, elle le sait ; la religion sait qu’elle a avec elle la grâce de Dieu, qui a changé les bourreaux en martyrs, et qu’elle peut faire d’un forçat un saint, comme le Christ sur le Calvaire fit du larron crucifié à côté de lui le cohéritier de son royaume éternel.

1571. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

V Demandons-nous, pour cela, que l’on proscrive en masse toute cette littérature, et que l’on fasse à jamais sur elle un éternel silence ? […] D’autres encore ne veulent, ne peuvent voir en lui qu’un chrétien sincère et convaincu, plus humble qu’un petit enfant, s’efforçant de communiquer à ses semblables la paix qu’il goûte lui-même dans la possession des vérités éternelles, et « devenant théologien dans l’intérêt de ceux qui n’ont pas eu le bonheur de faire les mêmes expériences que lui65 ». […] Mais je sais que Tartuffe est Tartuffe, comme Alceste est Alceste, comme Arnolphe est Arnolphe : des caractères tirés des entrailles de la nature, éternels exemplaires des vices et des faiblesses humaines, vieux comme le monde et qui ne périront qu’avec nous, — et cela me suffit. […] Les derniers tenants d’une vieille querelle se lamentent et déplorent qu’à l’éternel Homère des anciens les modernes ne puissent opposer un seul poète épique ? […] Je crois qu’actuellement nous sommes les seuls en France qui citions aujourd’hui ce Quinault, qui était autrefois dans la bouche de tout le monde253. » Ainsi, sur la fin de cette vie tant agitée, il se faisait comme un grand apaisement, précurseur de l’éternel silence.

1572. (1772) Discours sur le progrès des lettres en France pp. 2-190

Les partisans de la mode & de la nouveauté ont beau dire, que nous nous sommes enrichis d’un genre ignoré de Molière, & qu’il ne faut pas borner nos plaisirs, dont le cercle est déja trop étroit : d’accord ; mais qu’il naisse donc des la Chaussées, & que ses tristes & impitoyables imitateurs cessent de multiplier nos ennuis (dont le cercle est beaucoup trop grand) par leurs Drames éternels, échafaudés sur des fables triviales, mal conçues, sans génie, sans goût, sans vraisemblance, sans chaleur & sans style. […] Quelle foule d’Auteurs plongés dans un éternel oubli !

1573. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1885 » pp. 3-97

Une éternelle chaîne de rochers, aux dentelures étranges, et à l’extrémité de cette chaîne, une ville dont les habitations sont en partie creusées dans la pierre, une ville où l’on ne sait pas où finit la roche, où commence la construction, — et une ville abandonnée, où semblent à la fois avoir passé un incendie et une peste. […] Samedi 14 novembre Ces jours-ci, il a paru dans la Gazette de France, un éreintement des Lettres de mon frère, par l’éternel de Pontmartin.

1574. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Reviens, comme le sage à qui doit ton pays Le contrat immortel de ses droits envahis, Contraindre l’avenir de son pieux hommage À visiter le toit de cet autre hermitage ; Qu’il associe un jour en des nœuds éternels Votre double mémoire et vos noms fraternels, Et qu’ensemble admirés, Paris immortalise Les bois de Velléda, les vallons d’Héloïse. […] Sous l’arrêt éternel repoussant ma prière Jamais plus le soleil n’atteindra ma paupière Pour l’essuyer du monde et des tableaux affreux Qui font baisser partout mes regards douloureux. […] Contre Scudéry ou Mairet, Corneille aurait pu répéter les vers dont Ronsard cingla son détracteur Mellin : … Lorsqu’un blasmeur avec ses rôles, Pleins de mes plus braves paroles Et des vers qui sont plus les miens, Grinçait la dent envenimée Et aboyait ma renommée Comme au soir la lune et des chiens… … Mais il lui feist veoir que l’envie Etoit le tyran de sa vie, Qui le suit d’un pas éternel, Qui tousjours, tousjours l’accompaigne Comme une furie campaigne Le dos d’un pâle criminel… Lorsque Corneille donna la Veuve, charmante comédie, mais qui ne pouvait, ni par son mérite, ni par son succès, humilier les rivaux, ceux-ci ne laissèrent point d’entonner d’une voix unanime les louanges de l’auteur. […] Il corrige, et nous avons ce vers énergique : Dans la nuit éternelle emportés sans retour… Une strophe finissait sans éclat : Chanta ces tristes mots.

1575. (1913) Poètes et critiques

Il faut relire, dans le discours prononcé par lui en 1898, à l’Association Philotechnique, sa définition de la poésie d’Homère et ses éloquentes indications sur les leçons de morale éternelle répandues à travers les inventions terribles et touchantes de l’aède grec. […] Comme si le succès le plus brillant pesait, je ne dis pas dans la balance de l’Éternel, mais dans l’estime de tout homme indépendant et réfléchi, autant qu’un peu de supériorité professionnelle ou d’irréprochable labeur, nous courons après les honneurs, nous luttons pour nous élever, et tout ce qui fait la beauté, la douceur et le sens de nos jours, strictement comptés, nous échappe misérablement. […] Qu’on relise Monsieur Prudhomme avec cette arrière-pensée que le sonnet, intitulé ainsi, pourrait être une simple charge, Il est grave, il est maire et père de famille, et qu’on daigne seulement noter l’allure des tercets : Quant aux faiseurs de vers, ces vauriens, ces maroufles Ces fainéants barbus, mal peignés, il les a Plus en horreur que son éternel coryza, Et le printemps en fleurs brille sur ses pantoufles. […] Il énumère les fléaux, dont un suffit pour assiéger et ruiner la sympathie entre deux cœurs qui rêvaient de s’unir par une tendresse éternelle : elle devient « momentanée ainsi qu’un son, rapide comme une ombre, brève comme un songe, fugitive comme dans la nuit ténébreuse l’éclair, qui, d’un seul trait capricieux, découvre ciel et terre en même temps, et, avant qu’un homme ait eu le temps de dire : Regardez !

1576. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

Mais il y a quelqu’un qui est plus sage que le sage, c’est l’humanité entière, c’est l’âme mouvante, laborieuse et subtile de l’Ulysse éternel : et si nous trouvons qu’elle n’en tire pas toujours autant de sagesse que nous, haussons-la jusqu’à nous… * * * On pensera peut-être que je me suis un peu éloigné de la critique. […] Cette critique d’artiste, comme la critique professionnelle, nous l’avons vue surtout dans son contact avec le passé, ou plutôt avec le courant de l’art éternel. […] Mais, le diable est là, l’éternel Malin, et il vient nous tenter. […] De là l’échec de Brunetière, mais un échec instructif, un échec qui ne pouvait advenir qu’à un grand critique, qui nous met sur la voie d’une vérité plus souple et plus vive, et qui doit nous exciter à reprendre d’après de nouveaux termes le problème éternel des genres, comme on reprend aujourd’hui dans tous les domaines, les autres problèmes de l’évolution.

1577. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

Les jeunes hommes de lettres sont à genoux devant cette littérature : ils veulent aussi devenir « très forts », ils rêvent l’immobilité du style, « la ligne absolue », comme ils disent ; ils ont cette ambition de donner à l’agile, à l’impatiente langue française l’attitude éternelle des momies égyptiennes. […] M. de Mercey est l’éternel mari de la comédie contemporaine, mari chauve et sceptique, promenant son ventre heureux et son cœur vide du Cercle au Bois et du Bois au Cercle ; détestant la demeure conjugale, dînant et aimant dehors. […] L’écrivain eût condamné Mme de Mercey à l’adultère et au mépris public, qu’ils eussent trouvé la chose révoltante et l’auteur inconvenant ; tandis qu’il ne leur répugne point de voir cette femme honorée (comme si de rien n’était), l’existence d’Albert de Woëll brisée, et le soupçon éternel, la jalousie rétrospective, la plus terrible parce qu’elle est incurable, s’installer dans le cœur de Léonie innocente. « Bah ! […] L’auteur, dans Une vieille maîtresse, a donc posé, en droit, la revendication de la fidélité éternelle. […] Fatigué de ces amours d’aventure, il aspirait à un amour calme, solide, éternel, lorsqu’il rencontre dans le monde Mlle Hermangarde de Polastron.

1578. (1924) Critiques et romanciers

Voltaire néanmoins est un sot… Voltaire fut un véritable sot, qui travailla, vécut et mourut sottement. » Les personnes que cette opinion dérouterait sont priées de se rappeler que Tertullien ne craint pas de nommer « sots éternels » Aristote et Platon. […] Je le croirais, quand il écrit : « Un honnête savant, héritier de Buffon et de Cuvier, sortit de son laboratoire pour rajeunir et préciser la loi de l’éternelle transformation, pressentie par Épicure. […] La belle page n’est pas surannée. » L’on a coutume d’opposer aux idées, qui ont le renom d’être éternelles, les petits faits, qui sont passagers. […] Et cette morte lui enseigne le pardon, l’abnégation, l’éternel bonheur. […] Elle y a vu « les débats de l’éternel trio, le mari, la femme et l’amant, dont le nul d’amour se communique de scène en scène et fait ressembler le cabinet de travail de l’auteur dramatique à un cabinet de consultation pour maladies sentimentales et mentales ».

1579. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

Elle est le désespoir impuissant d’un malade chronique qui, au milieu de la nature exubérante et éternelle, se sent peu à peu mourir ; l’envie du débauché âgé et riche qui voit un jeune couple amoureux s’enfoncer dans un bosquet discret ; la confusion d’épuisés et d’impuissants qui, fuyant une peste de Florence, se réfugieraient dans un jardin enchanté pour y vivre un décaméron, et se tortureraient en vain afin d’arracher à l’heure incertaine une ivresse encore. […] Il est conforme à sa nature de se mouvoir dans d’éternelles contradictions. […] S’il devait même être accordé à son bien-aimé de devenir très âgé, elle aurait au plus à attendre cinq ou six de ses jours pour le voir paraître à son côté, et au bout de ce laps de temps tien minime fleurirait pour tous deux la félicité éternelle. […] Puis vint l’éternelle désillusion, la ruine périodique de tout ce que l’homme bâtit sur le creux de sa raison… Il dut s’avouer que par-delà le cercle des vérités conquises, l’abîme d’ignorance reparaissait, toujours aussi vaste, aussi irritant104 ». […] Dans leurs prunelles Rit et pleure — fastidieux — L’amour des choses éternelles, Des vieux morts et des anciens dieux !

1580. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite et fin.) »

C’est l’éternel honneur de Voltaire qu’on ne puisse le louer sans amener aussitôt les représailles de pareils adversaires.

1581. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Jouffroy »

La philosophie est perpétuellement à recommencer pour chaque génération depuis trois mille ans, et elle est bonne en cela ; c’est une exploration vers les hauts lieux, loin des objets voisins qui offusquent ; elle replace sur nos têtes à leur vrai point les questions éternelles, mais elle ne les résout et ne les rapproche jamais.

1582. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIe entretien. Poésie lyrique » pp. 161-223

À midi, quand j’eus accompli ce funèbre devoir, et déposé avec le cercueil, la meilleure partie de ma vie dans le caveau de la chapelle de famille, entre l’église rustique et le jardin du château de Saint-Point, je rentrai dans cette maison vide pendant l’hiver, et mille fois plus vide depuis que celle qui l’animait de son sourire dormait les premiers jours de son éternel sommeil.

1583. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

C’était un de ces hommes qui donnent la certitude d’une autre vie ; car, si Dieu trompait de telles espérances et de telles privations par un leurre éternel, ce ne serait pas seulement le monde interverti, ce serait la Divinité renversée.

1584. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (2e partie) » pp. 305-367

Balayer de la scène le moyen âge et installer à sa place un âge de justice, de logique, de vérité, de liberté, de fraternité, conçu d’une seule pièce et jeté d’un seul jet ; En religion, conserver la belle morale et la sainte piété chrétienne, en détrônant les intolérances ; En politique, supprimer les féodalités oppressives des peuples, pour les admettre aux droits de famille nationale, et leur laisser la faculté de grandir au niveau de leur droit, de leur travail, de leur activité libre ; En législation, supprimer les privilèges iniques pour inaugurer les lois communes à tous et à tous utiles ; En magistrature, remplacer l’hérédité, principe accidentel et brutal d’autorité, par la capacité, principe intelligent, moral et rationnel ; En autorité législative, remplacer la volonté d’un seul par la délibération publique des supériorités élues, représentant les lumières et les intérêts généraux du peuple tout entier ; Enfin, en pouvoir exécutif, respecter la monarchie, exception unique à la loi de capacité, pour représenter la durée éternelle d’une autorité sans rivale, sans éclipse, sans interrègne ; honorer cette majesté à perpétuité de la nation, mais la désarmer de tout arbitraire, et n’en faire que la majestueuse personnification de la perpétuité du peuple : voilà la véritable Révolution française, voilà le plan des architectes sages et éloquents des deux siècles.

1585. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

Sont-ils noyés dans l’éternelle flamme ?

1586. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre V. Le roman romantique »

Puis c’est un poème humanitaire et démocratique : en face du bourgeois égoïste et satisfait, le peuple opprimé, trompé, souffrant, irrité, mourant, l’éternel vaincu ; en face des vices des honnêtes gens, les vertus des misérables, des déclassés, d’un forçat, d’une fille.

1587. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Tandis qu’il menait, sur les gazons de sa planète paradisiaque, son éternelle et pâle idylle, la plainte de la Terre montait dans les espaces, frôlant les astres, et cherchant partout la justice.

1588. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

Il a fait rendre à la langue des sons qui n’avaient pas été entendus avant lui ; et, en saisissant de nouveaux rapports entre le monde physique et l’Homme, il a créé d’éternelles images.

1589. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Conclusion »

Loin d’absoudre la France des excès de la révolution, il la force de s’en déclarer responsable ; et comme le confesseur qui presse le condamné, jusque sous le couteau, d’avouer et de se repentir, l’inexorable vengeur de la justice éternelle demande, jusque sur la charrette, une confession au malheureux qu’on mène à l’échafaud.

1590. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

L’éternel lieu commun : « Où est la femme ? 

1591. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

Et bientôt c’est, dans la philologie, l’érudition lourde d’ennui qui sait à merveille corriger un texte, mais non plus en sentir la grandeur ou la grâce ; dans l’histoire, la monographie substantielle et indigeste qu’on estime et ne lit pas ; dans la philosophie, la peur des vastes synthèses et la mise sous scellés de la métaphysique et de ses éternels problèmes ; dans le roman, au théâtre, la décroissance de la verve inventive, la froideur, la sécheresse, la vulgarité du terre à terre, l’impuissance à créer un type supérieur ; en toute matière, le style pesant, épais, scolastique, engrisaillé de termes abstraits ou hérissé de vocables rébarbatifs ; bref, tout ce que comprend d’étroit, de rogue, de fastidieux, de glacé, de mort le mot de pédantisme.

1592. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 février 1886. »

L’éternel désaccord entre l’idéal et la vie, la recherche toujours inassouvie de visées vaguement pressenties mais jamais reconnues, ont précocement mis un terme à la vie de cet artiste qui par une force irrésistible fut poussé à communiquer son idéal à ses contemporains.

1593. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 avril 1886. »

Dans Tristan l’éternelle souffrance de la nature humaine a été élevée à une manifestation de l’art idéal, mais dans Parsifal cette œuvre d’art idéale devient l’expression d’une religion purement humaine.

1594. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre premier. La sélection et la conservation des idées dans leur relation à l’appétit et au mouvement. »

Enfin, pour Ravaisson, c’est la raison même, « la raison qui lie les idées » et qui conçoit « l’éternel ».

1595. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Tâchons donc d’écrire médiocrement, d’écrire mal, même plutôt que ne pas écrire du tout ; mais qu’il soit bien entendu qu’il n’existe pas un patron de style unique, ainsi que l’enseignent les professeurs de l’éternel beau, mais que le style de La Bruyère, le style de Bossuet, le style de Saint-Simon, le style de Bernardin de Saint-Pierre, le style de Diderot, tout divers et dissemblables qu’ils soient, sont des styles d’égale valeur, des styles d’écrivains parfaits.

1596. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — La déformation  »

L’opuscule est précédé d’une lettre de Jean-Baptiste Rousseau qui est curieuse parce qu’elle est éternelle comme la plainte du vieillard : « Il règne aujourd’hui dans le langage une affectatation si puérile, que le jargon des Précieuses de Molière n’en a jamais approché.

1597. (1902) La métaphysique positiviste. Revue des Deux Mondes

Quelque terme où nous pensions nous attacher et nous affermir, il branle et nous quitte ; et, si nous le suivons, il échappe à nos prises, nous glisse et fuit d’une fuite éternelle, … » plus heureux que Pascal, dont on a reconnu les fortes paroles, ils ont, eux, trouvé « le terme où s’attacher », le roc inébranlable dans l’océan de nos perplexités, et ce roc ou ce terme, c’est la « Science. » Ils savent que deux et deux font quatre, que la terre tourne autour du soleil, que les pierres vont au fond de l’eau, que le coke est le produit de la distillation de la houille, que la peste et le choléra sont d’origine microbienne, quoi encore ?

1598. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre III. De la logique poétique » pp. 125-167

Elle dut être adoptée par une convention libre ; car c’est une règle éternelle que le langage et l’écriture vulgaire sont un droit des peuples.

1599. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

Tout le monde connaît ces peintures d’une éternelle vérité ; je prie seulement le lecteur d’en rappeler les principaux traits dans sa mémoire. […] Ils ne veulent plus rien : ils ont tout sans rien avoir, car ce goût de lumière pure apaise la faim de leur cœur… Une jeunesse éternelle, une félicité sans fin, une gloire toute divine est peinte sur leur visage… », etc., etc. […] Mais celui-là seul qui sera digne par son amour de pénétrer les mystères que je soupçonne à peine41 comprendra dans cette musique comment la passion y devient l’héroïsme, comment elle s’y transfigure dans l’éternel amour. […] écrit-il à son amante, contemple la belle nature et calme ton âme, qui se révolte contre la nécessité… Notre amour est un édifice divin et éternel comme les citadelles célestes. » Au reste, s’il en faut croire un autre de ses biographes et amis, les passions amoureuses de Beethoven ne duraient pas longtemps.

1600. (1905) Études et portraits. Portraits d’écrivains‌ et notes d’esthétique‌. Tome I.

L’affirmation catégorique, entière que Jésus-Christ n’est pas mort pour tous les hommes ; la conviction que les bonnes œuvres ne servent de rien sans la grâce, et que la prédestination divine nous a, dès l’aurore du monde, sauvés ou damnés ; l’enfer éternel au bout de quelques années, de quelques semaines peut-être, dans l’irrémissible écoulement de tout ce que nous possédons ici-bas, telles sont les préoccupations jansénistes. […] Le bonheur éternel, c’est-à-dire tout. […] Eloa, descendue jusqu’à l’abîme, demande à celui qu’elle a voulu consoler au prix de son salut éternel :‌ « Seras-tu plus heureux du moins ? […] La croyance que Dieu existe, c’est-à-dire que la vie humaine a un sens supérieur, notre volonté un résultat durable, notre caducité un point d’appui éternel, se rencontre au contraire dans l’arrière-fond de tout optimisme. […] C’est à elles qu’il a demandé son pain dans sa jeunesse, c’est à elles qu’il a demandé son arme dans sa guerre sociale, et, par une contradiction suprême, ce sont elles aussi, ces Lettres indulgentes et immortelles, qui garderont sans doute son nom de prosateur, âpre et violent, contre l’éternel oubli.‌

1601. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

Si l’Académie n’avait en que la prétention ridicule de régler le goût, de conserver intactes les traditions de la langue, il y a longtemps qu’elle serait morte obscurément et enterrée sans fracas ; mais, comme en réalité elle détient un dépôt précieux, — celui de la vanité collective de ses membres, — j’ai bien peur qu’elle ne soit éternelle, sous cette forme ou sous une autre ; car c’est sa stérilité qui la perpétue et son impuissance qui la féconde. […] J’assistais avec mon ami Villemessant, dans une baraque de la foire d’Auteuil, à une représentation de ce chef-d’œuvre éternel de l’enfance, qui a nom Geneviève de Brabant. […] Puisque le théâtre de Molière a pu vieillir et Molière rester éternel, il faut en conclure que ce grand homme a écrit autre chose que des pièces de théâtre.

1602. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

On affirme très sérieusement aujourd’hui que les espèces ne sont pas éternelles, mais ont leur histoire. […] on répond : Elles n’ont pas été faites, puisque dans leur fond elles ne changent pas et sont éternelles. […] L’être est fait de deux pièces : la vérité, empire de l’éternel et du nécessaire, et le phénomène, matière instable, incapable de se fixer dans aucune forme.

1603. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

Le séjour de Rome fut fécond pour Ampère ; il y avait fait, depuis 1824, bien des voyages, mais dans les dernières années la ville éternelle lui était devenue une patrie. […] « Un de mes amis, qui l’a beaucoup connu à Rome, me contait dernièrement des choses très-intéressantes sur lui pendant son séjour dans la ville éternelle.

1604. (1927) André Gide pp. 8-126

L’un des affidés, jouant le rôle de facchino, lui offre de le conduire dans un hôtel paisible et le mène dans une maison malfamée des bords du Tibre, où la vertu du nouveau reine-thor succombe aux séductions non pas même d’une fille-fleur, mais de la Carola avec qui Lafcadio cohabitait naguère à Paris, et qui congédiée par lui, a émigré dans la Ville Eternelle où elle est gouvernée par Protos. […] Sera-t-il sauvé comme Faust par l’éternel féminin ?

1605. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Il explique toutes choses, quelles qu’elles soient, par une seule et même méthode, les règles éternelles, universelles de la nature. […] Si les grands courants qui forment l’esprit d’un peuple ou d’un siècle, ne suffisent pas à nous expliquer l’existence et la nature d’une œuvre, à l’histoire nous ajouterons la biographie, et nous finirons bien par éprouver dans tous les cas réels et possibles l’éternelle vérité de cet axiome nouveau, parce qu’il est méconnu : que tout phénomène a sa cause.

1606. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLe entretien. L’homme de lettres »

On vit alors un objet digne d’une éternelle pitié: une jeune demoiselle parut dans la galerie de la poupe du Saint-Géran, tendant les bras vers celui qui faisait tant d’efforts pour la joindre. […] Pour Virginie, d’un port noble et assuré, elle nous faisait signe de la main, comme nous disant un éternel adieu.

1607. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1865 » pp. 239-332

La fête d’une éternelle saison de bonheur palpite dans les orangers, pleins de fleurs et de fruits, cachant dans des boutons d’argent l’or rond d’une orange, pendant que de grands bœufs roux passent sous la verdure, emportant sur leur croupe comme l’effeuillement blanc d’un bouquet de mariée. […] Les minutes sont éternelles.

1608. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

II 13 floréal an 11 (3 mai 1803) Corneille , dit La Bruyère, peint les hommes tels qu’ils devraient être ; Racine les peint telsqu’ils sont  : je suis surpris qu’un esprit aussi ferme, aussi droit que celui de La Bruyère, se soit plié à ces petites antithèses, aliment éternel des comparaisons qu’on s’amuse quelquefois à faire entre les auteurs : Mais à l’humanité, si parfait que l’on fût, Toujours par quelque faible on paya le tribut. […] Voltaire et La Harpe ont accumulé les plus mauvais raisonnements, les critiques les plus insidieuses contre ce monument éternel de la gloire de notre théâtre ; mais ils n’ont pu l’ébranler. […] Il lui conseille d’éviter ces femmes Que le son d’un écu rend traitables à tous ; mais il l’avertit en même temps de ne point s’arrêter à ces fières princesses auprès desquelles on pousse inutilement d’éternels soupirs : Aussi, que vous cherchiez de ces sages coquettes, Où peuvent tous venant débiter leurs fleurettes, Et qui ne font l’amour que de babil et d’yeux ; Vous êtes d’encolure à vouloir un peu mieux. […] On ne peut nier que ceux qui exercent la profession des armes n’inspirent un goût particulier aux femmes : la faiblesse du sexe cherche naturellement une protection ; sa sensibilité est émue par les dangers qui environnent le guerrier ; des grâces mâles et fières, un caractère vif, entreprenant, qui abrège le combat, excuse la défaite, tout cela est fait pour séduire ; et peut-être, par un sentiment secret d’inconstance, les femmes préfèrent-elles l’amant passager qui promet des plaisirs vifs et rapides, à l’amant éternel dont l’attachement solide annonce un long et insipide bonheur. […] M. de La Harpe n’établit ce dogme que pour favoriser les lamentations, les complaintes, les éternelles tirades, soi-disant pathétiques, d’auteurs verbeux et stériles, abondants en paroles et dénués d’invention, qui feront deux cents vers médiocres plutôt qu’ils n’auront imaginé un incident et une situation.

1609. (1890) Le massacre des amazones pp. 2-265

Une note de presse l’accompagne qui affirme que Mlle Berthe Reynold publie « sous son nom » cet Éternel Pierrot. […] » Hâtez-vous de traduire en langage plus abstrus : « L’orbe des sensations ne doit être fragmenté. » Continuez avec un geste solennel : « De la cime perdue de nos effluves sensoriels effilés vers l’astral, à la base charnelle de notre corps, lourde argile qui retient, hors du vol éternel, notre vague de vie… » Si vous avez fait une déclaration et qu’on vous réponde mariage, donnez-vous le temps d’inventer quelque empêchement absolu et esthétique en vous écriant : « Le mot que vous venez de prononcer rétrécit l’envergure de mon envolement. […] *** Paul Redonnel, hautain poète et métaphysicien dans les Chansons éternelles, est parfois un critique bien irrespectueux. […] *** Le bas-bleu est éternel.

1610. (1903) Le problème de l’avenir latin

Ou sait ce que Rome représente pour l’Italien de pure souche ; alors même que la « Ville Eternelle » ne serait plus qu’une nécropole et un musée où planerait un silence de sépulcre, troublé seulement par les allées et venues des touristes et des archéologues, il ne prétendrait pas moins voir en elle la souveraine présente et future du monde et la reine des cités. […] L’éternel argument sophistique, dont usent les réformistes eux-mêmes contre ceux qui, bien rares, réclament une moins anachronique pédagogie, est que les nations latines — la France par exemple — ont un rôle sacré à remplir, qui est de conserver et d’exprimer l’esprit latin. […] Un phénomène éternel comme la marée ou le cycle des saisons s’accomplirait tout simplement à nos dépens, comme il s’est manifesté aux dépens de cent autres, nos prédécesseurs dans le grand cimetière des peuples. […] Ce sont là des choses éternelles comme la vie et dont le monde latin ne détient pas le monopole.

1611. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

. — Le mot de Bossuet sur « ce qu’on ne confie rien d’éternel à des langues toujours changeantes » ; — et, à ce propos, de la fausse comparaison d’une langue avec un organisme. — Qu’il y a de la différence entre « immobiliser », une langue, et la « fixer » : — Vaugelas a voulu « fixer » l’usage ; — et dans quelle mesure il y a réussi. […] « Afin de réduire l’action à l’Universel, suivant les préceptes, et de ne la priver pas du sens allégorique par lequel la Poésie est faite un des instruments de l’architectonique, j’ai disposé toute ma matière de telle sorte que… la France représente l’Âme de l’homme, … le roi Charles la Volonté, … l’Anglais et le Bourguignon les transports de l’appétit irascible, … Amaury et Agnès l’appétit concupiscible, … Tanneguy l’Entendement, … la Pucelle la Grâce divine », etc. — Que de telles préoccupations eussent pu refroidir une imagination plus ardente que celle de Chapelain. — Prosaïsme de ses vers [Cf. son Père éternel, ch.  […] Bouilhet] ; — et qu’en même temps que le décousu de l’existence de La Fontaine elle explique le caractère unique de ses Fables en leur temps. —  Corneille a eu des intentions ; — Molière a soutenu des thèses et des combats ; — La Fontaine ne s’est proposé que de peindre ce qui lui plaisait ; — ou même ne s’est rien proposé du tout, que de se faire plaisir. — Explication par là du caractère de sa prétendue satire ; — et exagération de Taine à ce sujet. — Que les hommes soient pervers et les femmes bavardes ; — que les riches soient insolents et que les pauvres soient habituellement plats ; — que les grands soient tyranniques et que les petits soient complaisants ; — ou que le lion soit enfin le roi des animaux et que l’âne en soit l’éternelle dupe, rien de tout cela n’indigne ou n’irrite La Fontaine ; — ce qui est pourtant la première condition de la satire. — Il n’y a point de satire sans intention morale. — Mais La Fontaine « constate » et ne juge jamais. — Sa malice ne va pas au-delà de l’amusement qu’un pauvre diable de philosophe trouve à prendre un des grands de ce monde en flagrant délit de sottise ; — il estime d’ailleurs que tout ce qui est humain, étant « naturel », a les mêmes droits à l’attention du peintre ; — et c’est ainsi que son épicurisme d’artiste le conduit insensiblement au naturalisme. […] Au point de vue pédagogique, — si les Anciens demeureront les instituteurs éternels de l’humanité ? […] — C’est ce que La Bruyère a finement démêlé dans son Discours sur Théophraste ; — en fondant l’empire de la tradition sur ce que les Anciens contiennent d’éternelle vérité ; — comme étant plus près de la nature ; — et comme ayant exprimé des idées dont nous reconnaissons encore la justesse après trois mille ans écoulés ; — dans un si grand changement des mœurs, — des habitudes, — et de la manière même de concevoir la vie. — En second lieu : B.

1612. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

— Sire, ma reconnaissance sera éternelle. […] À sa place, une, deux, puis trois, puis quatre, tout un champ d’étoiles scintillèrent, fleurirent, pures, fraîches, éternelles. […] En été, le parfum des feuilles neuves, l’odeur du bois frais, l’humidité de la mousse, l’embrun des cascades et cette imperceptible rosée qui perle en poussière de diamant aux touffes et aux bouquets des jeunes pousses, entretiennent sous ces futaies merveilleuses, l’arôme et la douceur d’un éternel printemps. […] L’opinion publique est disposée, plus que jamais, à écouter la protestation du droit méconnu, l’inlassable plainte que certaines défaillances ne peuvent interrompre, l’écho de l’éternel procès que rien ne saurait prescrire. […] La vie, en ces terres où la nature aplatit l’humanité, se mêle perpétuellement à la mort, comme si l’homme, affligé des limites que lui impose la durée, aspirait sans cesse aux perspectives illimitées du repos éternel.

1613. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

Dans le poëme d’Éloa, cette vierge-archange est née d’une larme que Jésus a versée sur Lazare mort, larme recueillie par l’urne de diamant des séraphins et portée aux pieds de l’Éternel, dont un regard y fait éclore la forme blanche et grandissante.

1614. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

Dans la première scène, Pénélope dit à Télémaque, qui voudrait encore espérer : Le séjour qui d’Ulysse a retenu les pas, O mon fils, est un lieu d’où l’on ne revient pas, Dont nul homme jamais n’apporta de nouvelle ; Formidable séjour de la vie éternelle, Et dont les habitants, pâles et désolés, Sont de leur doux pays à jamais exilés.

1615. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

La plaisanterie comporte toutes les nuances, depuis la bouffonnerie jusqu’à l’indignation ; il n’y a point d’assaisonnement littéraire qui fournisse tant de variétés et de mixtures, ni qui se combine si bien avec le précédent  Les deux ensemble ont été, dès le moyen âge, les principaux ingrédients dont la cuisine française a composé ses plus agréables friandises, fabliaux, contes, bons mots, gaudrioles et malices, héritage éternel d’une race grivoise et narquoise, que La Fontaine a conservé à travers la pompe et le sérieux du dix-septième siècle, et qui, au dix-huitième siècle, reparaît partout dans le festin philosophique.

1616. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

À chaque pas on croit trouver un produit nouveau, et, dans le trouble de son esprit, il arrive souvent que l’on ne reconnaît pas ceux qui sont le plus communément dans nos jardins botaniques et nos collections historiques. » Le brouillard de l’atmosphère lui voilait le fameux pic de Teyde à Ténériffe, que de loin déjà Humboldt s’était réjoui de contempler, et, comme ce rocher n’est pas couvert de neiges éternelles, il est visible à une distance prodigieuse, lors même que son sommet en pain de sucre reflète la couleur blanche de la pierre ponce qui le recouvre, d’autant plus qu’il est en même temps entouré de blocs de lave noire et d’une vigoureuse végétation.

1617. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

Celui que les liens du malheur lui rendaient encore plus cher, le protecteur, le garant de son sort et de celui de ses enfants, cet homme, dont le courage et la bonté semblaient avoir doublé de force et de charme à l’approche de la mort, dit à son épouse, à sa céleste sœur, à ses enfants, un éternel adieu ; cette malheureuse famille voulut s’attacher à ses pas, leurs cris furent entendus des voisins de leur demeure, et ce fut le père, l’époux infortuné qui se contraignit à les repousser.

1618. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre I. Le quatorzième siècle (1328-1420) »

Rien n’est moins éternel que la littérature du xive  siècle, tantôt expression de sentiments épuisés ou factices, tantôt forme vide et laborieux assemblage de signes sans signification, où rien n’est réel, solide et viable, pas même la langue : car ce n’est pas encore la langue moderne, et ce n’est plus la langue du moyen âge.

1619. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Voilà une poésie qui est la résonance d’une pauvre âme, battue d’outrageuses misères, et qui n’est que cela : et dans cette voix bouffonne ou plaintive, qui crie son vice ou son mal, passe parfois le cri de l’éternelle humanité : nous, honnêtes gens, paisibles bourgeois, ce louche rôdeur du xvie  siècle parle de nous, parle pour nous, nous le sentons, et c’est ce qui le fait grand.

1620. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

De chaque côté de cette souveraineté, pour en assurer le jeu et en restreindre l’abus, il institue l’inamovibilité des juges694, représentation de l’éternelle morale, et la liberté de la presse695, représentation de l’irrésistible démocratie.

1621. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Paul Verlaine et les poètes « symbolistes » & « décadents ». »

»    En réalité, ce qu’il traduit ainsi, ce n’est pas l’impossibilité d’aimer Dieu, mais celle de le concevoir tel qu’il puisse être aimé, ou (ce qui revient au même) l’impuissance à l’imaginer dès qu’on essaye de le concevoir comme il doit être : principe des choses, éternel, omnipotent, infini… Comment donc faire ?

1622. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Mme Desbordes-Valmore » pp. 01-46

Ne te semble-t-il pas, mon ange, que la raison vacille plus devant ces prodiges humains que devant les merveilles incompréhensibles de l’Auteur éternel ?

1623. (1912) Enquête sur le théâtre et le livre (Les Marges)

Tragédie dans la rue, comédie au salon, tout finit par la pose, et la photographie indiscrète double d’une ombre éternelle, hélas, les attitudes les plus éphémères, sinon les plus ridicules.

1624. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

Printanière, dans l’aube éternelle du rêve Et dans l’aurore assise, Elle tisse en rêvant Des choses qu’Elle sait, et sourit ; et, devant Elle, au gré de sa main agile, court sans trêve La navette laborieuse, et le doux vent D’avril emmêle ses cheveux qu’Elle soulève Et rejette sur son épaule ; et, relevant La tête, Elle fredonne un air qu’Elle n’achève… De l’ombre, Elle apparaît, comme en un cadre d’or : Derrière Elle l’azur et des plaines qu’arrose Un fleuve ; et, sur sa tête, un rameau de laurose Étend ses fleurs contre l’azur clair ; — et l’effort Du métier, comme un chant monotone et morose Se plaint très doucement : — on envierait le sort De celui qui baiserait la main qu’Elle pose Négligemment, parfois, et lasse de l’effort… Mais moi, la voyant rire en rappelant sans doute Quelque doux jour mort de sa joie un soir de mai, Je songeai que, peut-être, pour avoir aimé Son rire, d’autres ont repris la lente route Tristes d’un souvenir et le cœur affamé D’un mets où nulle lèvre impunément ne goûte.

1625. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIV » pp. 126-174

Madame de Sévigné allait aussi voir mademoiselle de Scudéry ; mais elle se moquait tout doucement de ses romans éternels , quand elle écrivait à madame de Grignan54, comme elle se moquait de ceux de La Calprenède55.

1626. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVII, l’Orestie. — les Euménides. »

Autrefois esclave du foyer, encore sujette de son époux, pupille de ses fils lorsqu’elle était veuve, exclue de l’héritage, mineure éternelle, la femme traînait toujours à son pied un anneau de sa vieille chaîne.

/ 1793