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483. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « L’abbé de Choisy. » pp. 428-450

Et en effet, pendant les années qui suivirent, l’abbé de Choisy, livré à lui-même, et hors de toute contrainte, fit la belle tant qu’il voulut, et s’abandonna follement à toute la bizarrerie de ses goûts. […] L’abbé de Choisy poussait les choses beaucoup plus loin, et je me garderai bien de le suivre dans les incroyables épisodes de sa jeunesse. […] Il put, pendant des mois ou des années, s’établir dans le faubourg Saint-Marceau, y prendre maison, carrosse, avoir un banc à la paroisse, y suivre les offices avec honneur, être même un jour prié de faire en cérémonie la quêteuse, et tout cela sous l’habit et le nom de la comtesse de Sancy, bien qu’on soupçonnât fort ce qu’il était réellement. […] Ce coadjuteur de nouvelle sorte s’embarqua donc à Brest, le 3 mars 1685, le plus joyeux, le plus allègre des hommes, obéissant à ses curiosités, à ses inconstances, fuyant peut-être ses créanciers, et croyant suivre un rayon de la grâce. […] L’avare (Le Tellier) amassa de l’argent ; l’orgueilleux (Colbert) fronça le sourcil ; le voluptueux (Lionne) ne se cacha plus dans les ténèbres. » Suivent les portraits détaillés de Fouquet, de Le Tellier et de Lionne.

484. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

Dans le donjon de Vincennes, il écrivait pour lui seul, dans son cahier de notes et d’extraits, divers passages de Plaute, qu’il lisait beaucoup alors, et il en faisait l’application à sa félicité perdue ; tout ce joli passage du Pseudolus, par exemple, qui fait partie de la lettre d’une maîtresse à son ami : Nunc nostri amores, mores… « Voilà que nos plaisirs, nos désirs, nos entretiens, avec les ris, les jeux, la causerie, le suave baiser… tout est détruit ; plus de voluptés ; on nous sépare, on nous arrache l’un à l’autre, si nous ne trouvons, toi en moi, moi en toi, un appui salutaire. » Mais j’aime mieux cet autre passage, également emprunté de Plaute, où le sentiment domine : « Lorsque j’étais en Hollande , écrit Mirabeau, je pouvais dire : Sibi sua habeant regna reges, etc. », et tout ce qui suit, « Rois, gardez vos royaumes, et vous, riches, vos trésors ; gardez vos honneurs, votre puissance, vos combats, vos exploits. […] Du moment que Mirabeau est arrêté et enfermé dans le donjon de Vincennes, on peut le suivre jour par jour dans sa longue et rigoureuse captivité. […] Il écrivait au jour le jour, par besoin, par nécessité, s’aidant de tous les moyens à sa portée : « Il semble que ma fatale destinée soit d’être toujours obligé de tout faire en vingt-quatre heures. » Pourtant, à travers les inégalités et les obstacles, sa puissante nature intérieure suivait sa pente et poussait sa voie. […] Il serait curieux, et je le ferai peut-être un autre jour, de suivre les variations, les luttes, les contradictions violentes de ce père à la fois irrité, humilié, et, à de rares instants, enorgueilli de son fils, durant ces années d’une célébrité si mélangée et encore douteuse, par où celui-ci préludait à la gloire. […] (Suivent quelques détails techniques.

485. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Correspondance entre Mirabeau et le comte de La Marck (1789-1791), recueillie, mise en ordre et publiée par M. Ad. de Bacourt, ancien ambassadeur. » pp. 97-120

Après quelques visites qui suivirent le dîner de Versailles, ils se perdirent quelque temps de vue, et ne se retrouvèrent qu’aux États généraux. […] Membre de l’ordre de la noblesse, et ayant cru devoir suivre les premières démarches du corps auquel il appartenait, il ne rencontra Mirabeau à l’Assemblée qu’après la réunion des trois ordres. […] Mais ces écarts et, pour tout dire, ces échappées, par où il déjoue et rompt parfois sa ligne générale, se réduisent de beaucoup, aujourd’hui qu’on a la clef de tout, et qu’on peut, durant cette période dernière, le suivre presque jour par jour, et sur le théâtre, et derrière la scène. […] M. de La Marck, après s’être bien assuré du fond de la situation, et particulièrement que Mirabeau ne trempait en rien, comme ses ennemis l’en accusaient, dans le parti d’Orléans, ne trouvant en lui qu’un homme du plus haut talent et de la première capacité entravé par des « embarras subalternes », résolut de l’aider à en sortir et à reconquérir dignité, liberté d’action, indépendance : ce point gagné, le reste devait suivre immanquablement. […] Il sent bien qu’on ne s’y rend pas : « On m’écoute avec plus de bonté que de confiance ; on met plus d’intérêt à connaître mes conseils qu’à les suivre. » Bien souvent l’impatience le prend, et même le mépris pour cet aveuglement royal : « On dirait que la maison où ils dorment peut être réduite en cendres sans qu’ils en soient atteints ou seulement réveillés. » À quoi M. de La Marck lui répond : « Vous les conseillez trop comme s’ils avaient une partie de votre caractère.

486. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le comte-pacha de Bonneval. » pp. 499-522

Il s’y distingue, mais il y oublie trop celle qui le suit de ses vœux, de ses inquiétudes, et qui, au milieu de tous les torts dont elle est l’objet, reste glorieuse de son nom et fière de sa gloire : Mon inquiétude augmente chaque jour, en même temps que votre inexactitude, lui écrit-elle (25 juillet 1717), et je suis aussi constante à me tourmenter que vous l’êtes à me négliger. […] Entre lui et Prié, c’est une guerre à mort ; il se figure que l’Europe entière est attentive à ce démêlé et à l’éclat qu’il en a fait : Je dois songer à la grande affaire qui est de vaincre, écrivait-il à un ami de Bruxelles pendant sa détention au château d’Anvers (16 septembre 1724) ; le moyen que j’ai pris et mes mesures m’y conduisant tout droit, il n’importe pas si cela se fait exactement suivant le goût et la règle des cours, puisqu’un homme de courage hasarde volontiers une petite mortification de la part de son maître pour arriver à un plus grand bien, et qu’il doit suivre sans aucun égard les routes les plus courtes, pourvu que ce soient celles des gens de bien, quand on y devrait chiffonner sa perruque, déchirer ses habits, perdre son chapeau et le talon de ses souliers en sautant les fossés… Au reste, si vous lisez attentivement mes lettres à Sa Majesté, vous verrez qu’elles présagent les pas que j’ai faits avec toute la franchise d’un soldat qui ne craint rien, pas même son maître, quand il y va de son honneur, que je n’ai jamais engagé ni n’engagerai de ma vie à aucun des rois de la terre. […] Après quelques premières politesses et quelques réflexions philosophiques sur le bonheur d’être jeune et de courir le monde avec insouciance, comme la lettre du cardinal annonçait Casanova pour homme de lettres, Bonneval se leva en disant qu’il voulait lui faire voir sa bibliothèque : Je le suivis au travers du jardin, et nous entrâmes dans une chambre garnie d’armoires grillées, et derrière le treillis de fil de fer on voyait des rideaux : derrière ces rideaux devaient se trouver les livres. Tirant une clef de sa poche, il ouvre ; et, au lieu d’in-folio, je vois des rangées de bouteilles des meilleurs vins, et nous nous mîmes tous deux à rire de grand cœur : « C’est là, me dit le pacha, ma bibliothèque et mon harem ; car, étant vieux, les femmes abrégeraient ma vie, tandis que le bon vin ne peut que me la conserver, ou du moins me la rendre plus agréable. » Les détails qui suivent montrent que le spirituel pacha avait cherché à tirer tout le meilleur parti de sa position nouvelle ; qu’il avait réuni autour de lui ce qu’on pouvait appeler les honnêtes gens de là-bas, et fait rendre à la Turquie tout ce qu’elle renfermait de ressources de société. […] Dès sa retraite chez l’empereur, Bonneval s’accoutume à être renégat et à ne suivre pour loi qu’un prétendu honneur personnel dont il se fait juge, et qui n’est que la vanité exaltée.

487. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIV. »

La chute et les légendes héroïques de l’Empire ouvrirent une source nouvelle aux imaginations françaises ; et, sans partialité contemporaine, il faut, dans l’époque qui suivit, reconnaître un âge poétique. […] Quel que soit le hasard ou le calcul qui réglait ce mélange, c’étaient là les semences de feu que, dans cette fournaise où il forgeait sa pensée, le poëte remuait incessamment et revêtait de mille formes, comme Virgile a peint ces ouvriers divins, lançant pêle-mêle, pour former la foudre, trois jets de pluie tordue, trois rayons du rapide Auster, et la colère avec les flammes qui la suivent : Tres imbris torti radios, tres alitis Austri Miscebant operi, flammisque sequacibus iras. […] Mon âme se confond à méditer sur ce torrent, que ma vue le troublée cherche en vain à suivre, aux bords étroits du précipice : mille vagues, dont la vitesse dépasse a toute pensée, se choquent et se combattent ; mille autres vagues les atteignent, et, entre l’écume et le bruit, disparaissent à mesure qu’elles arrivent. […] Des couronnes de fleurs tombèrent aux pieds de l’auteur ; des sérénades la suivirent à sa demeure, et on la nomma la Melpomène castillane. […] Son désir audacieux s’épouvante de sa faiblesse ; et, arrêtée par un profond vertige, elle épuise sa force en convulsions, déprimant aujourd’hui ce qu’hier elle exaltait, et faisant inutilement trembler le monde. » Nous n’osons suivre le poëte dans toute sa pieuse ferveur, ne pouvant lui emprunter le charme de son harmonie.

488. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Note III. Sur l’accélération du jeu des cellules corticales » pp. 400-404

Elle défila pendant plus de cinq heures ; enfin la file se termina et fut suivie par une immense quantité de voitures d’artillerie chargées de cadavres déchirés, mais encore palpitants ; une odeur infecte de sang et de bitume m’étouffait… quand tout à coup la grille se referma avec violence et je me réveillai. […] C’était une forêt de sapins dont les branches inférieures n’avaient presque pas de feuilles, étant à moitié desséchées, grisâtres, couvertes de poussière, d’où pendaient de ces lichens gris filamenteux qu’on nomme barbes de capucin, et entre lesquelles étaient tendues beaucoup de toiles d’araignée ; j’y marchais, ayant conscience de suivre un guide que je ne voyais pas.

489. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre III. Du meilleur plan. — Du plan idéal et du plan nécessaire. »

Dans une composition littéraire, la sensibilité de l’écrivain, celle de l’auditeur ou lecteur, l’occasion, mille circonstances, l’information plus ou moins complète, le penchant de l’esprit vers tel ou tel genre de preuves, interviennent sans cesse et font que, sur chaque sujet, il y a autant de plans possibles qu’il y a de gens pour le traiter, et que le même homme, à deux moments différents, peut suivre deux différents plans. […] On ferait des têtes de chapitres sous lesquelles on n’aurait rien à mettre ; ces trous, devant lesquels le lecteur serait brusquement arrêté, l’empêcheraient de nous suivre où nous voulons le mener, et lui ôteraient toute confiance.

490. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Georges de Bouhélier (1876-1947) »

. — L’Hiver en méditation ou les Passe-Temps de Clarisse, suivi d’un opuscule sur Hugo, Richard Wagner, Zola et la Poésie nationale (1896). — Églé ou les Concerts champêtres, suivi d’un épithalame (1897). — La Route noire (1900). — La Tragédie du nouveau Christ (1901).

491. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Lettre a monseigneur le duc de**. » pp. -

Si je l’ai suivi dans plusieurs choses, je ne l’ai point imité dans celle-ci. […] Je ne me sais point astreint, dans l’arrangement de mon Livre, à l’ordre que les Bibliographes suivent ordinairement.

492. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une conspiration sous Abdul-Théo. Vaudeville turc en trois journées, mêlé d’orientales — Deuxième journée. Les conspirateurs » pp. 225-233

Entre Champfleury, armé des pieds à la tête, et suivi de Max Buchon et Duranty, équipés en guerre. […] Nul de vous ne reculera d’un pas, j’en ai la certitude ; vous me suivrez toujours dans le chemin de… Ah !

493. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff (suite) » pp. 317-378

Tout à coup, sur le même chemin, parurent quelques hommes bientôt suivis d’un plus grand nombre, et finalement d’une foule entière. […] Je mis pied à terre, et suivis la voiture. […] Elle ira par le chemin que suivent les autres… Mieux vaut dormir. » Et Lavretzky ferma les yeux. […] Et tout cela est suivi d’un morne silence. — Plus un souffle, plus le moindre bruit. […] Il salua froidement Lise, il lui gardait rancune de lui faire attendre sa réponse, et s’éloigna ; Lavretzky le suivit.

494. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

À quatorze ans, il suivait seulement l’ornière banale des études de collège, grec et latin. […] » Le Cocu imaginaire suivit les Précieuses ridicules. […] Elle était suivie d’un officier éperdument amoureux d’elle et qui lui mangeait son bien tout en l’adorant. […] L’ombre de l’envie suit les vrais grands hommes jusqu’au seuil de l’autre monde. […] Qui suit bien ses leçons goûte une paix profonde, Et comme du fumier regarde tout le monde.

495. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Ballanche, l’évolution de ce beau et difficile génie est tellement spontanée dans sa lenteur, que c’est un charme infini de le suivre à travers les essais et les préparations, tandis qu’il s’ignorait encore lui-même. […] Grâce à cette poétique conception et à un sentiment d’espérance qu’il nourrissait, la durée du siège se passa pour lui assez heureusement ; mais la terreur qui suivit n’en fut que plus accablante ; il s’enfuit à la campagne avec sa mère, et y souffrit de toutes les privations. […] Sur les pas des chœurs de Sophocle, et inspiré par la muse de la douleur, le poëte s’attachait à peindre l’histoire même de l’homme, de cet être qui, aux termes de l’énigme, n’a qu’une voix et n’est debout qu’un instant, l’histoire de ses misères, de ses faiblesses, de ses félicités trompeuses, suivies d’amers retours. […] Dans l’effervescence de la réaction qui suivit la mort du duc de Berry, il terminait son élégie commémorative en s’écriant : « Dynastie glorieuse, illustre maison, hâtez-vous de vous identifier avec nos destinées qui vous réclament ; hâtez-vous, car il est de la nature de nos destinées d’être immortelles !  […] Ballanche qui suivirent l’Essai sur les Institutions ; il faudrait dire imprimé aux frais de l’auteur, et distribué à quelques amis et à quelques juges.

496. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

Il lui fallait des races ailées à peindre, à observer, à détailler, à aimer ; des concerts à écouter dans les bocages ; des plumes brillantes à reproduire ; des ailes vagabondes à suivre dans leurs courbes et dans leurs spirales. […] Rien ne m’étonnait plus que leur changement de costume ; et dans cet ensemble de faits à peine indiqués je trouvais un roman infiniment varié, toujours nouveau, dont mon esprit suivait attentivement les détails. […] Je suivais un vieux sentier indien ; le soleil s’abaissa sous l’horizon, sans que j’aperçusse un toit, un abri, un asile que ma lassitude cherchait. […] L’Indien me suivait de l’œil. […] Nous déliâmes leurs pieds, mais nous laissâmes leurs mains garrottées, et nous les forçâmes de nous suivre.

497. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

Et comme cette rigueur concise exclut de la langue de Flaubert toute superfluité, des lacunes existent, ou le semblent, entre les unités dernières de son œuvre ; les paragraphes se suivent sans se joindre, et les livres s’étagent sans soudure. […] Les pages qui le suivent consolent par d’augustes spectacles d’avoir vu et pénétré la vie. […] Ainsi mêlées en des alliages où chaque élément prédomine alternativement, les deux passions de Flaubert, la beauté exaltée jusqu’au mystère, et la vérité suivie de pessimisme, composent les livres que nous analysons. […] Le souci du vrai et la réussite à le rendre que montrent la psychologie et les descriptions réalistes de Flaubert, le suivent dans ses œuvres d’imagination. […] Quand Flaubert dit à la première phrase de Madame Bovary : « Nous étions à l’étude quand le proviseur entra suivi d’un nouveau, habillé en bourgeois, et d’un garçon de classe qui portait un grand pupitre, … » il dit simplement, en le moins de mots nécessaires, et en des mots simplement justes, un fait dont son imagination contenait l’image.

498. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — I. » pp. 343-360

Il faut y voir plutôt une noble construction, conçue en idée et en présence de l’Histoire naturelle de Buffon : des discours généraux en tête, puis une narration suivie, faite pour être lue et, jusqu’à un certain point, entendue de tous, des gens du monde comme des savants ; la discussion des faits, les preuves ou éclaircissements étaient rejetés dans une seconde partie du volume, plus particulièrement destinée aux astronomes et aux savants, mais nullement inaccessible au reste des lecteurs, pour peu qu’ils fussent attentifs et curieux. […] Il importe, pour le suivre dans sa discussion ingénieuse, de nous bien poser la question dans ses termes généraux, et M.  […] Quand je trouverai chez un peuple une connaissance qui n’aura été précédée d’aucun germe, ni suivie d’aucuns fruits, je dirai que cette connaissance a été transplantée et quelle appartient à une nation plus avancée et plus mûre. […] Sans l’y suivre en détail, il est impossible de ne pas noter le tour piquant, la manière vive et tout à fait légère dont il se gouverne en ces graves sujets.

499. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. (Tome XII) » pp. 157-172

Thiers, en tête de ce tome xiie , que les circonstances avaient retardé et qui sera suivi rapidement de trois autres, a mis une préface vive, animée, dans laquelle il expose sa manière d’entendre et d’écrire l’histoire, et où il parle aussi de lui-même et des choses présentes avec dignité et convenance. […] Je ne prendrai pas pour exemple, dans ce volume même, tout ce qui tient au blocus continental et à ces questions de douanes qu’il fait suffisamment comprendre, à la seule condition d’y donner tout leur développement : mais si l’on s’attache à cette expédition de Masséna en Portugal, expédition ingrate s’il en fut, pleine de mécomptes, où tout avorte, où les combats acharnés restent indécis, où personne n’a d’illusions, et où, si peu qu’on en ait, le résultat trouve encore moyen de tromper un reste d’espérance ; si l’on suit cette expédition dans l’Histoire de M.  […] Masséna arrivait à son quartier général avec trop peu d’appareil, accueillant ses lieutenants déjà mécontents avec une simplicité amicale, mais peu empressée, suivi d’un entourage fâcheux, et notamment d’une courtisane, se plaignant indiscrètement de sa fatigue, ne captiva ni l’affection ni le respect de ceux qui devaient le seconder. […] Mais aussi il y a un historien des plus heureusement doués dont le procédé est autre : il lit, il étudie, il se pénètre pendant des mois et quelquefois des années d’un sujet, il en parcourt avec étendue et curiosité toutes les parties même les plus techniques, il le traverse en tous sens, s’attachant aux moindres endroits, aux plus minutieuses circonstances ; il en parle pendant ce temps avec enthousiasme, il en est plein et vous en entretient constamment, il se le répète à lui-même et aux autres ; ce trop de couleur dont il ne veut pas, il le dissipe de la sorte, il le prodigue en paroles, en saillies et en images mêmes qui vaudraient souvent la peine d’être recueillies, car, plume en main, il ne les retrouvera plus : et ce premier feu jeté, quand le moment d’écrire ou de dicter est venu, il épanche une dernière fois et tout d’une haleine son récit facile, naturel, explicatif, développé, imposant de masse et d’ensemble, où il y a bien des négligences sans doute, bien des longueurs, mais des grâces ; où rien ne saurait précisément se citer comme bien écrit, mais où il y a des choses merveilleusement dites, et où, si la brièveté et la haute concision du moraliste font défaut par moments, si l’expression surtout prend un certain air de lieu commun là où elle cesse d’être simple et où elle veut s’élever, les grandes parties positives d’administration, de guerre, sont si amplement et si largement traitées, si lumineusement rapportées et déduites, et la marche générale des choses de l’État si bien suivie, que cela suffit pour lui constituer entre les historiens modernes un mérite unique, et pour faire de son livre un monument.

500. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

qu’ils sont beaux ces bruits de la nature, ces bruits répandus dans les airs, qui se lèvent avec le soleil et le suivent, qui suivent le soleil comme un grand concert suit un roi ! […] Je révèle cela, monsieur, à votre amitié, à cet intérêt chrétien qui suit l’âme dans l’autre vie. » Et comme cet ami (M. 

501. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française à l’étranger pendant le xviiie  siècle, par M. A. Sayous » pp. 130-145

Les écrivains de Port-Royal font une tribu distincte dans la littérature française et au cœur du grand siècle : Pascal seul a éclaté pour tous ; si l’on veut bien connaître les autres, il faut y regarder de très près et les suivre longtemps dans leur monotonie apparente, dans leur demi-obscurité. […] Ce fut la ligne que suivirent les Cramer, les Calandrini, les Abauzit, et qu’observa lui-même dans sa belle et juste carrière Charles Bonnet, le dernier de tous et le plus en vue. […] Lorsqu’on a fermé ces deux volumes dans lesquels ont passé devant nous tant de figures sérieuses, souriantes à peine, originales et modestes, une pensée vous suit ; on se fait à soi-même une question. […] Mais faut-il donc, pour cette république studieuse et intelligente, parce qu’elle est devenue démocratique dans sa forme, dans son ménage intérieur, lui faut-il renoncer à l’idée de voir sortir désormais de son sein des continuateurs et de dignes héritiers de ces hommes qui ont exercé sur leur temps une action si suivie, si salutaire, qui ont rempli dans le monde savant une telle fonction, plus efficace et plus utile encore que brillante ?

502. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Napoléon s’aperçut bientôt qu’il ne pouvait monter à cheval sans être suivi et gardé à vue. […] Qui n’a lu ses admirables Précis des campagnes de Turenne, de Frédéric, de César, suivis d’observations détaillées, — tout l’art et la science de la guerre résumés en quelques pages concises, et ramenés à des principes fixes, supérieurs, qu’il n’appartient pourtant qu’au génie ou au talent de savoir, à des degrés divers, mettre en pratique et appliquer ? […] Que cela vous plaise ou non, que cela étonne et désoriente plus ou moins les lettrés dans leurs habitudes, il faut, de nos jours, s’accoutumer à suivre dans leur détail les opérations de guerre ; c’est d’une nécessité absolue pour s’intéresser à toute une branche de l’histoire. […] Privé de l’exercice du cheval par l’impatience qu’il avait de se sentir espionné et suivi, il essaya d’y substituer un autre travail, un autre mode de fatigue : il se fit brusquement jardinier et planteur, et il s’y porta avec l’ardeur qu’il mettait à tout.

503. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre II »

Cette affirmation ne me touche guère parce que j’ai la conscience de l’avoir plus aimé qu’aucun de ceux qui diront cela n’ont jamais aimé aucune créature humaine ; … mais, renfonçant toute sensibilité, j’ai pensé qu’il était utile pour l’histoire des lettres, de donner l’étude féroce de l’agonie et de la mort d’un mourant de la littérature… »16 Et, cette justification achevée, suit une des plus poignantes et douloureuses observations cliniques qui aient jamais été recueillies par un cerveau dressé à l’analyse et tout proche de l’être souffrant : Observation α. […] Puis l’observation devient plus suivie. […] …” Suivit bientôt un instant de calme, de tranquillité, ses regards doux, souriants, fixés sur moi. […] Mais ils se raidirent, suivirent la visite avec pourtant « un sentiment de la rotule dans les genoux et du froid dans la moelle des tibias. » 22.

504. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Notes sur l’Ancien-Régime »

Les renseignements qui suivent sont extraits d’un acte de partage et d’estimation dressé le 6 septembre 1783, et dont je dois la communication à l’obligeance de M. de Boislisle. […] La terre, humide et très bonne, produirait à volonté des haies vives ; pourtant on clôt les champs avec des haies sèches contre les bestiaux « et cette charge, suivant le rapport des fermiers, est évaluée au tiers du produit des fonds »  Ce domaine, tel qu’on vient de le décrire, est évalué comme il suit : 1. […] (Telle est) l’éducation ridicule à tant d’égards que reçoivent en général les personnes de ce rang ; dès leur enfance, toujours suivies, aidées, escortées, prévenues, (elles) sont ainsi privées de la plus grande partie des facultés que leur a données la nature. » (Mme Campan, Mémoires, I, 18, 28.) […] Ce chiffre n’est pas donné par l’assemblée provinciale ; pour suppléer à cette lacune, j’ai pris le dixième de la taille, des accessoires et de la capitation taillable ; c’est le procédé que suit l’assemblée provinciale du Lyonnais.

505. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre II. Rapports des fonctions des centres nerveux et des événements moraux » pp. 317-336

Si notre intelligence et nos sens étaient assez perfectionnés, assez vigoureux, assez illuminés, pour nous permettre de voir et de sentir les molécules mêmes du cerveau ; si nous pouvions suivre tous les mouvements, tous les groupements, toutes les décharges, électriques, si elles existent, de ces molécules ; si nous connaissions parfaitement les états moléculaires qui correspondent à tel ou tel état de pensée ou de sentiment, nous serions encore aussi loin que jamais de la solution de ce problème : Quel est le lien entre cet état physique et les faits de la conscience ? […] On a vu que la sensation proprement dite est un composé d’événements successifs et simultanés de même qualité, eux-mêmes composés de même ; qu’au terme de l’analyse, l’expérience indirecte et les analogies montrent encore des événements de même qualité, successifs et simultanés, tous soustraits à la conscience et à la fin infinitésimaux ; que les actions réflexes indiquent des événements rudimentaires analogues et qu’on les suit jusqu’au bas de la série animale, même en des animaux159, comme le polype d’eau douce, en qui l’on ne découvre aucune trace du système nerveux. — Mais on peut les suivre plus loin encore ; car chez plusieurs plantes comme la sensitive et le sainfoin oscillant du Bengale, chez les anthérozoïdes des cryptogames et chez les zoospores des algues, on rencontre des actions réflexes tout à fait semblables à celle que produit le tronçon d’une grenouille décapitée. […] Que le lecteur suive la comparaison jusqu’au bout ; elle exprime la chose dans tous ses détails.

506. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

La littérature française est bien riche, si on la suit dans ces genres un peu secondaires (journaux, correspondances, mémoires), qui tiennent à la société et au train même de la vie ; c’est le moyen, en y revenant souvent, de la pénétrer et de la traverser en bien des sens. […] « Je suis si convaincue, disait-elle encore, que le malheur me suivrait en paradis, si j’y allais, que je me livre de bonne grâce à mon sort, et ne me plains que du peu. […] Quand Voltaire écrivait cela, en mars 1735, il venait d’avoir quarante et un ans, et les quatorze années qui suivirent, il les passa dans cette union intime qui remplit tout le milieu de sa vie. […] Il voudrait qu’on nous montrât Zilia française, après nous l’avoir fait voir péruvienne ; qu’on la montrât non plus jugeant selon ses préjugés, mais comparant les siens et les nôtres ; qu’on lui fît remarquer combien elle avait tort d’être d’abord étonnée de la plupart des choses ; qu’on lui fît suivre en détail les causes de ces mesures tirées de l’antique constitution du gouvernement, et tenant à la distribution primitive ou graduelle des conditions, ainsi qu’aux progrès des connaissances.

507. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie Stuart, par M. Mignet. (2 vol. in-8º. — Paulin, 1851.) » pp. 409-426

Dargaud, qui sont trop dans le goût du jour pour ne pas se recommander d’elles-mêmes, je demanderai à suivre de préférence un historien plus sévère, et dont le jugement et la marche m’inspirent toute confiance. […] Ici, je ne saurais admettre le troisième reproche de Mme Sand, qui s’adresse à l’oubli de Marie Stuart pour Bothwell ; je vois, au contraire, dans les traverses et les périls qui suivirent immédiatement ce dernier mariage, que Marie n’a d’autre idée que de n’être point séparée de ce violent et subjuguant époux. Elle l’aimait si follement (avril 1567) qu’elle disait, à qui voulait l’entendre, « qu’elle quitterait la France, l’Angleterre et son propre pays, et le suivrait jusqu’au bout du monde, vêtue d’une jupe blanche, plutôt que de se séparer de lui ». […] Et pourtant elle mérite toute cette pitié, et il suffit, pour la lui rendre insensiblement, de la suivre dans la troisième et dernière partie de sa vie, durant cette longue, injuste et douloureuse captivité de dix-neuf années (18 mai 1568 — 5 février 1587).

508. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Seconde partie. Nouvelles preuves que la société a été imposée à l’homme » pp. 243-267

La femme aussi ne doit-elle pas quitter son père et sa mère pour suivre l’époux de son choix ? […] Les inventions qui ont été faites pour ainsi dire sous nos yeux, ou dont nous pouvons encore suivre la trace, sont dues à des hommes inconnus, dont les procédés pour y parvenir sont ignorés, ou appartiennent incontestablement au hasard, connue si la Providence eût voulu nous prouver visiblement que nous n’inventons rien. […] Il a dit au chien : « Tu garderas les troupeaux de l’homme, tu veilleras autour de sa demeure, tu le suivras dans ses voyages, tu trahiras ton propre instinct pour te faire l’ennemi des autres animaux lorsque ton maître voudra prendre les plaisirs de la chasse ; et, s’il devient pauvre, misérable, privé de la vue, tu dirigeras ses pas sur les bords du précipice pour le lui faire éviter, ou parmi les flots d’une multitude insouciante pour qu’il reçoive le pain de l’aumône que tu partageras avec lui. » Croyez-vous que cet instinct des animaux marqués pour la domesticité ne prouve pas l’intention du Créateur qui leur donna cet instinct, et qui, ainsi, l’ajouta en quelque sorte aux organes mêmes de l’homme ? […] Le despotisme, tel qu’il existe en Orient, paraît suivre la règle posée par Samuel, lorsqu’à la demande du peuple juif il institua la royauté.

509. (1900) Le lecteur de romans pp. 141-164

Il suffit qu’il soit possible de la suivre, et cela n’est pas douteux. […] Oublions pour un instant la manière dont sont lus la plupart des romans, prêtés un jour, rendus le lendemain, dévorés par des yeux souvent jolis, mais qui ne savent pas lire, qui ne savent que suivre un héros à travers les pages d’un livre, comme un passant qui s’éloigne sur le sable d’une promenade. […] Veuillez me suivre dans ce domaine moins familier aux critiques superficiels, et où se rencontrent cependant les plaisirs les plus vifs d’un lettré, les originalités les plus fortes d’un écrivain. […] Le plus véridique des artistes, le plus réaliste, — dans le sens de voisin du réel, — sera l’écrivain qui donnera l’impression constante de la présence des choses, qui les mêlera à la vie, et qui ne confisquera pas à leur profit l’attention qui ne doit pas cesser de voir les âmes et de les suivre.

510. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la révolution française — I. La Convention après le 9 thermidor. »

Lui, qui jusque-là avait suivi avec une infatigable constance le mouvement républicain, quelque part qu’il allât, pourvu qu’il allât en avant, il aurait pu ne pas se prêter aussi bien à la brusque retraite de cette Révolution qui, venue à son terme et s’effrayant d’elle-même, reculait en désordre devant ses propres excès. […] Mais l’insurrection du 1er prairial, qui suivit de près, leva les scrupules qui restaient et déchaîna les haines. […] Lorsque enfin les sections eurent à grand’peine décidé, sur le soir, la défaite des factieux, et que l’Assemblée, dans sa séance de nuit, put repasser à loisir les attentats du jour, l’indignation éclata unanime ; on cherchait des yeux, on montrait au doigt, on traînait à la barre les députés de la Montagne qui avaient siégé, délibéré et voté selon le vœu de la multitude : instruments bien plutôt que complices, ils avaient suivi le mouvement populaire, sans l’avoir provoqué ni prévu.

511. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre IV »

Dans un festin donné par un prince du sang789, la table de cent couverts, dressée sous une tente immense, était servie par les grenadiers, et l’odeur qu’ils répandaient offusqua la délicatesse du prince. « Ces braves gens, dit-il un peu trop haut, sentent diablement le chausson. » Un grenadier répondit brusquement : « C’est parce que nous n’en avons pas », et « un profond silence suivit cette réponse » […] — Pendant les vingt ans qui suivent, l’irritation couve et grandit : les soldats de Rochambeau ont combattu côte à côte avec les libres milices de l’Amérique et s’en souviennent. […] Pour celles qui ont été averties, les avocats, procureurs et notaires des petites villes voisines ont fait leurs doléances de leur chef, sans assembler la communauté… Sur un seul brouillon, ils faisaient pour toutes des copies pareilles qu’ils vendaient bien cher, aux conseils de chaque paroisse de campagne. » — Symptôme alarmant et qui marque d’avance la voie que va suivre la Révolution : l’homme du peuple est endoctriné par l’avocat, l’homme à pique se laisse mener par l’homme à phrases.

512. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire de la Révolution »

Pour lui, l’histoire de la Révolution ne contient pas que l’histoire de la Révolution proprement dite, elle contient encore celle de tous les gouvernements qui l’ont suivie : le Directoire, le Consulat, l’Empire, la Restauration, le Gouvernement de Juillet, la République de 1848, et l’Empire encore, et elle doit s’écrire d’une volée ! […] Si ceux qui vont le suivre ne contiennent pas plus de matière historique, — et pourquoi en contiendraient-ils davantage ?  […] La reine, légère, belle, imposante comme une divinité mythologique, le suit, tenant son fils par la main.

513. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Marquis Eudes de M*** »

L’énorme mémoire que nous indiquons à la curiosité publique sera suivi d’un second non moins considérable, — car l’auteur est un de ces esprits vigoureux et persistants, un de ces mordeurs d’idées qui n’abandonnent pas le sujet dans lequel ils ont mis la dent. […] Nous la transcrivons tout entière : « Il peut y avoir vingt ans, — dit l’auteur, — dans l’église Saint-Étienne-du-Mont, un vieux prêtre faisait le prône à une grand’messe le dimanche ; l’auditoire était nombreux, attentif, ce qui n’empêchait pas tous les regards de se porter involontairement sur un grand jeune homme qui, debout en face de la chaire et les bras croisés, semblait suivre avec la plus grande attention tous les raisonnements du prédicateur. […] « Cependant, nous le répétons, son attention paraissait tout à fait captivée par les paroles du vieux prêtre, et chacun pouvait suivre sur son visage la marche et les progrès de la pieuse influence.

514. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXX. De Fléchier. »

Supposez l’homme dont parle Lucrèce, et qui, des bords de la mer, contemple un vaisseau qui fait naufrage, et suit de l’œil les mouvements de tant de malheureux qui périssent : si ce tableau a porté le trouble et l’agitation dans son âme ; si ses entrailles se sont émues ; si au moment où le vaisseau s’est enfoncé, il a senti ses cheveux se dresser d’horreur sur sa tête ; en peignant à d’autres le spectacle terrible dont il a été le témoin, cherchera-t-il à le relever par des oppositions et des contrastes étudiés ? […] Je passe rapidement sur tous les discours, pour venir à celui qui a, et qui mérite en effet le plus de réputation ; c’est l’éloge funèbre de Turenne, de cet homme si célèbre, si regretté par nos aïeux, et dont nous ne prononçons pas encore le nom sans respect ; qui, dans le siècle le plus fécond en grands hommes, n’eut point de supérieur, et ne compta qu’un rival ; qui fut aussi simple qu’il était grand, aussi estimé pour sa probité que pour ses victoires ; à qui on pardonna ses fautes, parce qu’il n’eut jamais ni l’affectation de ses vertus, ni celle de ses talents ; qui, en servant Louis XIV et la France, eut souvent à combattre le ministre de Louis XIV, et fut haï de Louvois comme admiré de l’Europe ; le seul homme, depuis Henri IV, dont la mort ait été regardée comme une calamité publique par le peuple ; le seul, depuis Du Guesclin, dont la cendre ait été jugée digne d’être mêlée à la cendre des rois, et dont le mausolée attire plus nos regards que celui de beaucoup de souverains dont il est entouré, parce que la renommée suit les vertus et non les rangs, et que l’idée de la gloire est toujours supérieure à celle de la puissance. […] J’ai eu un peu de peine ; je vous souhaite le bon soir ; je vais me mettre dans mon lit » ; et cette humanité envers un soldat qu’il trouve au pied d’un arbre, accablé de fatigue, à qui il donne son cheval, et qu’il suit lui-même à pied.

515. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVII. Sort des ennemis de Jésus. »

Hérodiade le suivit dans ses disgrâces 1224. […] Pendant près de trois cents ans, il suivra sa voie sans se douter qu’à côté de lui croissent des principes destinés à faire subir au monde une complète transformation.

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