D’avance et à son insu, chaque génération porte en elle-même son avenir et son histoire ; à celle-ci, bien avant l’issue, on eût pu annoncer ses destinées, et, si les détails tombaient sous nos prévisions aussi bien que l’ensemble, on pourrait croire à la fiction suivante que Laharpe converti inventa à la fin du Directoire, en arrangeant ses souvenirs.
Jeunes gens et jeunes filles ne peuvent expliquer les mots les plus usuels : la lecture d’une page de français leur laisse une vague et indécise idée dans l’esprit, et s’ils n’en gardent pas un souvenir précis, s’ils ne peuvent à l’instant même la résumer en substance, c’est moins faiblesse de réflexion, légèreté d’attention, gaucherie d’intelligence, l’ignorance du sens des mots qu’ils ont lus.
Il excelle à nous faire voir des « coins », qui restent dans le souvenir et où l’on voudrait vivre.
Tout ce monde-là se rappelle également ces troublants paysages, les Filaos, souvenir de l’Île natale, et ces Automnes où Le monotone ennui de vivre est en chemin, et ces pièces où le vers revient sans monotonie, forme toute nouvelle, car Baudelaire, qui lui-même a emprunté à Edgar Poe la réitération du vers, se borne, comme son modèle, à en faire un véritable refrain revenant toujours à la même place, tandis que Dierx promène, en écoliers buissonniers, plusieurs vers dans la même pièce, comme un improvisateur au piano qui laisse errer plusieurs notes, toujours les mêmes, à travers l’air qu’il a trouvé, ce qui produit un effet de vague d’autant plus délicieux, que le vers de notre poète est particulièrement fait et très précis, toute flottante que veuille être parfois sa pensée, mystique et sensuelle.
Est-ce en souvenir du séjour que les Fedeli avaient fait à Paris en 1624-1625, ou à l’occasion d’un nouveau voyage de cette troupe, qu’un des organisateurs des divertissements de la Cour eut l’idée de faire danser « un ballet du roi représentant les comédiens italiens » pour lequel Bordier fît des vers 23 ?
Prenez une ville comme Salonique ou Smyrne, vous y trouverez cinq ou six communautés dont chacune a ses souvenirs et qui n’ont entre elles presque rien en commun.
Les montagnes de la Navarre n’avaient-elles point encore quelque druide, qui, sous le chêne, au bord du torrent, au murmure de la tempête, chantait les souvenirs des Gaules, et pleurait sur la tombe des héros ?
Il me souvient bien d’avoir lû dans les écrivains italiens plusieurs passages qui le prouvent, mais je crois devoir épargner au lecteur la peine de les lire, et à moi celle de les retrouver.
Cladel, qui n’invente point, aime la réalité de ses paysans, dont il garde le souvenir et le regret dans l’exil des villes et qui sont peut-être toute sa poésie ; car notre idéal est toujours manqué, et c’est ce qui le fait notre idéal !
Et d’abord souvenons-nous qu’en quelque mesure nous sommes ses élèves et disons avec lui : « Ce que chacun sent lui est propre et particulier comme nature.
D’un côté, elle a grand peur de la passion, parce que le destin de sa sœur est sans cesse présent à son souvenir ; de l’autre elle est très pressée d’aimer, mais elle voudrait prendre ses précautions. […] À ce moment sérieux pour nous, nous ressentons comme une crainte d’avoir été trop sévère, et feuilletant les volumes que nous avons sur notre table, nous nous souvenons des impressions charmantes que nous leur avons dues ; cette pensée nous fait réfléchir. […] On se souvient de ce terrible cri de guerre où M. […] Nicolas Becker, ne professe pas sur lui-même des opinions aussi avantageuses et se souvient fort bien de mille petites circonstances dont il n’est pas sorti aussi immaculé qu’on le veut prétendre. […] Sainte-Beuve a pu se consoler des tribulations inséparables de toute carrière active par le souvenir d’avoir été un des chefs sérieux du Romantisme.
Dans cette marche au pas, derrière le corbillard, du boulevard Montparnasse au Père-Lachaise, cette marche qui a duré une heure un quart, tout seul dans mon fiacre, il remonte en moi bien des souvenirs tristes, bien des souvenirs de mort. […] J’ai touché ces temps-ci 12 000 francs, pour droits théâtraux de Germinie Lacerteux, et je me suis souvenu que l’œuvre de ton père de Maherault, avait été acheté en vente publique par Roederer, 12 000 francs. […] Vers ce temps-là, Dugué de la Fauconnerie fonde l’Ordre, et l’appelle au journal, et il a le souvenir — lui qui vient d’écrire la notice de l’exposition de Monnet — que son premier article, fut un article lyrique sur Manet, Monnet, Cézanne, avec force injures pour les académiques : article qui lui fit retirer la critique picturale. […] que de souvenirs des bonnes journées de mon enfance, passées à Neufchâteau. […] Et dire que nous devons le bienfait de cette domination judaïque au grand Français Gambetta, que sur le souvenir de son physique, je continue à croire un juif.
Le souvenir de ces êtres fond, dit-il, et il ne reste dans votre souvenir, que des réminiscences, pour ainsi dire, irréelles. […] Mardi 24 juillet Je relis ici, à Champrosay, La Fiancée de Lammermoor, un roman resté dans mon souvenir des lectures de ma jeunesse. […] Mais dans ses concerts de Londres, qui durent deux heures, et où il est le seul exécutant, c’est surtout la préoccupation, à un moment, de la perte de la mémoire, et, comme il le dit, d’un trou tout noir, se faisant dans le souvenir. […] Ainsi les volumes de Daudet, de Zola ; ainsi le volume de Renan : Souvenirs d’enfance ; ainsi le volume de Madame Bovary, renfermant une page du pénible manuscrit, toute biffée, toute raturée, toute surchargée de renvois : page donnée par Mme Commanville ; ainsi le Mariage de Loti, contenant la page manuscrite de la dernière lettre de la désolée Rarahu ; ainsi l’édition des Diaboliques, de Barbey d’Aurevilly, illustrée d’une page de sa mâle écriture en encre rouge, au bas de laquelle il a jeté une flèche, encore tout imprégnée de poudre d’or, — et au milieu de tous ces imprimés, dévoilant un petit morceau de l’écriture des auteurs, le livre de Ma jeunesse, de Michelet, contenant, à défaut d’une page du manuscrit, un devoir du temps de son adolescence, sur Marius, en marge duquel, le grand historien a écrit : « M. […] Banville, peint à l’huile par Rochegrosse (1890), sur un exemplaire de : Mes souvenirs, un portrait d’une ressemblance à crier.
Les années n’effacent pas ce souvenir. […] Leur souvenir n’a persisté que par la glorification de leur oubli. […] Le souvenir de nos déceptions prend aujourd’hui la même magie qu’autrefois l’attente du bonheur. […] Nous avons introduit des mots pour amener des chocs : l’illusion du désir, la mélancolie du regret… (pour faire pendants) souvenir des déceptions, attente du bonheur… dans l’intelligence, dans le cœur, etc. […] Cité par Granier de Cassagnac dans ses Souvenirs du Second Empire, p. 139.)
Je me souviens encore du charme très doux, très frais et très inattendu que j’y trouvai. […] Mais comme elle n’y vint qu’une fois ou deux, et qu’elle y apparut dans tout l’éclat de sa beauté, les Provençaux gardèrent d’elle un souvenir ineffaçable. […] Vous me direz que nous n’avions qu’à compléter, par nos souvenirs, ces sortes d’« illustrations » animées du célèbre roman. […] Et, enfin, pour bon nombre d’entre nous, ces souvenirs étaient un peu lointains et imprécis. […] Voici : Henri se souvenait, en réalité, de sa fiancée trahie.
Shakespeare paraît avoir conservé, de cette circonstance de sa vie, un souvenir trop gai pour qu’on ne suppose pas qu’elle lui procura plus d’un divertissement. […] Ce soin amical et la complaisance avec laquelle Shakespeare reproduit dans la pièce, à propos des armes de Shallow, le jeu de mots qui faisait tout le sel de sa ballade contre sir Thomas Lucy, ont bien l’air d’un tendre souvenir ; et, à coup sûr, peu d’anecdotes historiques peuvent produire, en faveur de leur authenticité, des preuves morales aussi concluantes. […] Le clergé chrétien des Saxons fut saxon lui-même, longtemps grossier et barbare comme ses fidèles, jamais étranger, jamais indifférent à leurs sentiments et à leurs souvenirs. […] Il s’arrête, il regarde ; sa disposition naturelle, ses souvenirs, ses pensées viennent se grouper autour de l’idée principale qui s’offre à ses yeux, et développent en lui par degrés l’émotion toujours croissante qui va bientôt le dominer. […] Écrivain qui vivait environ cinquante ans après Shakespeare, et qui a recueilli des souvenirs et des traditions de son temps.
Vous souvenez-vous qu’autrefois on voyait, dans tous les bals masqués, un diplomate Peau-Rouge ? […] Le moyen, c’est la suggestion : il s’agit de donner aux gens le souvenir de quelque chose qu’ils n’ont jamais vu. […] — Je me souviendrai de ce détail, dis-je en riant. […] Je me souviens que, lors de l’avant-dernier roman de M. […] Si nous avions besoin de quiétude, nous n’aurions qu’à nous souvenir, d’ailleurs.
Thiers, à son aurore, avait surtout et il n’a jamais perdu le culte de ces beaux noms, de ces jeunes gloires, de ces victimes à jamais couronnées : historien, il leur dressera un autel, et, dans des pages dont on se souvient, il s’inspirera éloquemment de leur mémoire. […] Penser fortement, clairement, au fond de son cabinet, est bien bea sans contredit ; mais penser aussi fortement, aussi clairement, au milieu des boulets, est l’exercice le plus complet des facultés humaines. » Thomas, si l’on s’en souvient, en son Éloge de Duguay-Trouin et dans une page qu’on dit éloquente, a décrit les difficultés et les dangers des combats de mer, plus terribles que ceux de terre ; mais ici que le Thomas est loin ! […] » N’est-ce pas ainsi que Cromwell (ce souvenir, bon gré, mal gré, saute tout d’abord à l’esprit) faillit partir un jour pour l’Amérique, à la veille de 1640 ? […] Puisque nous en sommes à refeuilleter ces souvenirs du National, il y a pourtant quelque chose à dire sur la littérature proprement dite et sur la place qu’elle tint dans ce journal influent.
( Souvenirs d’un page de la cour de Louis XVI , par le comte d’Hézecques, 142.) — En 1690, avant la construction de la chapelle et de la salle de spectacle, il coûtait déjà 100 millions. […] Par exemple, l’Almanach de Versailles de 1775 compte seulement 335 hommes dans les écuries, et l’on voit qu’effectivement le nombre était quadruple ou quintuple. — « Avant toutes les réformes, dit un témoin, je crois que le nombre des chevaux du roi allait bien à 3 000. » (Comte d’Hézecques, Souvenirs d’ un page de Louis XVI, 121.) […] Duc de Lévis, Souvenirs et portraits. […] Marquis de Valfons, Souvenirs, 60. — Duc de Lévis, 156. — Mme d’Oberkirch, I, 127 ; II, 360.
« Laissez-la fichée, me dit Goethe, elle y restera pendant quelques jours et sera un souvenir de notre partie. » XI Un second jugement de lui sur Byron est d’une justesse qui diminue l’enthousiasme, le voici : Il n’est pas juste que la haine et l’immoralité reçoivent la récompense de la charité et de l’amour. […] Ici, on se sent grand, libre comme la grande nature que l’on a devant les yeux ; on est comme on devrait être toujours. — Je domine dans ce moment une foule de points auxquels se rattachent les plus abondants souvenirs d’une longue existence. […] — Tout à l’heure, retournez donc chez Schrœn, et faites-vous montrer la mansarde que Schiller a habitée. » Le déjeuner, dans cet air pur et à cette heureuse place, nous parut excellent : Schiller était avec nous, du moins dans notre esprit, et Goethe rappela encore avec bonheur maint bon souvenir de lui. […] Cousin a tracé en 1817 (dans ses Souvenirs d’Allemagne) : « “Goethe est un homme d’environ soixante-neuf ans, il ne m’a pas paru en avoir soixante.
Le convoi s’avance à travers une haie de troupes et une muraille de peuple ; pas un pavé qui ne porte un homme attendri, pas une fenêtre qui ne regarde passer en pleurant le char, pas un toit qui ne vocifère son cri d’adieu ou son acclamation d’amour, pas un pan du ciel d’où ne tombe sur le suaire une pluie de couronnes d’immortelles, fleurs funèbres qui n’ont pour rosée que des larmes, et qui n’ont de parfum que dans le souvenir et dans l’éternité ! […] Un lit, un canapé, une table ronde où les journaux et les brochures du jour faisaient place à leur heure à la bouteille de verre noir et au frugal repas du matin, une cheminée au fond de laquelle couvait un petit feu de fagots dans un massif de cendres, une ou deux gravures pendues à des clous contre la muraille, représentant les amis de sa jeunesse, dieux lares de son cœur : Manuel, le favori de ses souvenirs, près de qui il doit lui être doux de reposer dans son tombeau d’emprunt ; Laffitte, le Mécène bienfaisant des factions, dans un temps où les factions vendaient et achetaient la gloire ; Chateaubriand, qu’il avait cru aimer, et dont il avait pris les morosités monarchiques pour des convictions républicaines ; Lamennais, dont il estimait le courage, mais dont il aimait peu le caractère ; un masque mort du premier Napoléon couché sur le grabat de Sainte-Hélène, relique obligée chez ce dévot railleur à la grande armée : ce masque est moitié pathétique et moitié lugubre. […] Si Béranger avait eu à émouvoir l’âme aventureuse et voluptueuse du peuple qui gémit, de souvenirs et de tristesse, au bord des quais de Venise, il aurait écrit des stances d’Arioste et du Tasse, en vers dignes d’être soupirés sous ce beau ciel, et il les aurait jetés, comme réminiscence classique, dans la mémoire des gondoliers. […] Ma famille a conservé précieusement les titres de cette filiation dans nos pauvres archives domestiques ; elle s’en est toujours entretenue, à portes fermées, avec une certaine vanité pieuse de grandeur déchue, qui est de la niaiserie, si vous voulez, mais la niaiserie vénérable des souvenirs.
Quand on dit qu’un objet occupe une grande place dans l’âme, ou même qu’il y tient toute la place, on doit simplement entendre par là que son image a modifié la nuance de mille perceptions ou souvenirs, et qu’en ce sens elle les pénètre, sans pourtant s’y faire voir. […] Enfin, dans la joie extrême, nos perceptions et nos souvenirs acquièrent une indéfinissable qualité, comparable à une chaleur ou à une lumière, et si nouvelle, qu’à certains moments, en faisant retour sur nous-mêmes, nous éprouvons comme un étonnement d’être. […] Peu à peu, et à mesure que l’état émotionnel perdra de sa violence pour gagner en profondeur, les sensations périphériques céderont la place à des éléments internes : ce ne seront plus nos mouvements extérieurs, mais nos idées, nos souvenirs, nos états de conscience en général qui s’orienteront, en plus ou moins grand nombre, dans une direction déterminée. […] Mais faites abstraction de vos souvenirs et de vos habitudes de langage : ce que vous avez aperçu réellement, ce n’est pas une diminution d’éclairage de la surface blanche, c’est une couche d’ombre passant sur cette surface au moment où s’éteignait la bougie.
Mais il y a loin de cet attachement à la cité, groupement encore placé sous l’invocation du dieu qui l’assistera dans les combats, au patriotisme qui est une vertu de paix autant que de guerre, qui peut se teinter de mysticité mais qui ne mêle à sa religion aucun calcul, qui couvre un grand pays et soulève une nation, qui aspire à lui ce qu’il y a de meilleur dans les âmes, enfin qui s’est composé lentement, pieusement, avec des souvenirs et des espérances, avec de la poésie et de l’amour, avec un peu de toutes les beautés morales qui sont sous le ciel, comme le miel avec les fleurs. […] Qu’on nous permette d’évoquer un souvenir. […] On prétend qu’il existe chez la femme des mécanismes spéciaux d’oubli pour les douleurs de l’accouchement : un souvenir trop complet l’empêcherait de vouloir recommencer. […] Son rôle est d’accomplir en toute occasion la démarche utile ; précisément pour cela, il doit écarter de la conscience, avec les souvenirs qui n’éclaireraient pas la situation présente, la perception d’objets sur lesquels nous n’aurions aucune prise 29.
Et puis, cette prompte et facile consolatrice, la jeunesse, lui tenait lieu de tout ; nul n’était fait pour en jouir mieux que lui ; tous les contemporains nous ont parlé des avantages de sa personne et des agréments de sa figure : « Je me souviens toujours de vos grâces, de votre belle physionomie, de votre esprit », lui écrivait Voltaire après des années. […] On dit que ce cardinal était l’homme du monde le plus aimable, qu’il aima la littérature toute sa vie, qu’elle augmenta ses plaisirs ainsi que sa considération, et qu’elle adoucit ses chagrins, s’il en eut… Puis, d’autres fois, il revient sur les souvenirs de Babet « qui remplissait son beau panier de cette profusion de fleurs » ; il joue, il badine, il retourne la critique en éloge.
Daru ne restait pas lié aux souvenirs les plus honorables de la littérature de son temps comme il l’est aux plus grands événements de notre histoire. […] Quels doux souvenirs elle m’a rappelés sur ce bon compagnon de ma vie, de mes beaux jours !
Ce que j’atteste, c’est que je n’ai jamais fait de mal à personne ; que le peu de crédit que j’avais n’a jamais, par ma volonté, tourné à mon profit ; que je ne l’ai employé qu’au profit de mes parents, de mes amis et de mes connaissances ; et que je n’ai pas laissé de rendre de grands services, dont on s’est souvenu, — si l’on a voulu. […] douce, simple, m’aimant uniquement, crédule sur ma conduite qui était un peu irrégulière, mais dont la crédulité était aidée par le soin extrême que je prenais à l’entretenir, et par l’amitié tendre et véritable que je lui portais. » Mme Du Deffand est très bien traitée dans ces Mémoires, et s’y montre presque sans ombre, sous ses premières et charmantes couleurs ; mais la personne évidemment que le président a le plus aimée est Mme de Castelmoron, « qui a été pendant quarante ans, dit-il, l’objet principal de sa vie. » La page qui lui est consacrée est dictée par le cœur ; il y règne un ton d’affection profonde, et même d’affection pure : « Tout est fini pour moi, écrit le vieillard après nous avoir fait assister à la mort de cette amie ; il ne me reste plus qu’à mourir. » On raconte que dans les derniers instants de la vie du président et lorsqu’il n’avait plus bien sa tête, Mme Du Deffand, qui était dans sa chambre avec quelques amis, lui demanda, pour le tirer de son assoupissement, s’il se souvenait de Mme de Castelmoron : Ce nom réveilla le président, qui répondit qu’il se la rappelait fort bien.
On entrevoit par sa correspondance avec le chevalier Falkener quelles liaisons fortes et tendrement graves il y avait contractées, et combien intime et durable il en garda le souvenir. […] Souvenez-vous de l’amitié tendre que vous avez eue pour moi ; au nom de cette amitié, informez-moi par un mot de votre main de ce qui se passe, ou parlez à l’homme que je vous envoie, en qui vous pouvez prendre une entière confiance.
Né à Béziers en 1624, originaire de Castres, d’une famille protestante très distinguée dans la robe, ayant fait ses études dans le Midi, il y prit un grand goût pour les bons auteurs latins, Cicéron, Térence, et ne s’aperçut, au sortir du collège, que l’on pouvait bien écrire aussi en français, que lorsqu’il eut vu quatre ouvrages dont il garda toujours un souvenir reconnaissant : les Huit Oraisons de Cicéron alors récemment traduites, Le Coup d’État de Sirmond, un volume des lettres de Balzac, et les charmants Mémoires de la reine Marguerite. […] J’entends parler surtout de l’ancienne Académie détruite en 1793 ; car, pour la nouvelle, les documents et les souvenirs surabondent.
Je laisse les souvenirs de Rouen comme trop lointains et trop vagues ; mais, depuis sa translation au siège de Paris, depuis qu’il avait changé de théâtre, comme il lui était échappé un jour de le dire, il n’avait pas changé de jeu, et les chansons n’avaient cessé de pleuvoir : À Paris comme à Rouen, il fait tout ce qu’il défend ; et bien d’autres refrains qu’il faut chercher dans le Recueil de Maurepas et qu’on ne peut redire. […] Il appréhendait que « ces discours qui avaient charmé dans sa bouche n’eussent pas le même succès quand ils seraient sur le papier. » Legendre, qui avait eu l’idée de les rédiger, est forcé de convenir que le prélat avait raison : « J’ai de lui des sermons qui avaient charmé quand il les avait prononcés et qui réellement ne m’ont paru, en les lisant, que des pièces assez ordinaires. » Les fameuses Conférences restèrent donc à l’état de pure renommée et de souvenir ; si glorieuses qu’elles fussent pour le prélat, elles avaient cessé du jour où il avait pensé que l’effet était produit et son nom remis suffisamment en honneur.
N’aimer en littérature qu’à s’occuper du présent et du livre du jour, c’est aimer la mode, c’est suivre et courir le succès, ce n’est pas aimer les Lettres elles-mêmes, dont le propre est la perpétuité, la mémoire et la variété dans le souvenir. […] Sortons quelquefois de nous ; accordons aux autres un peu de ces souvenirs et de ces retours bienveillants dont, demain, nous aurons besoin nous-mêmes.
Je ne sais si je me trompe, mais autour de moi on a l’air de s’en souvenir ; et si le bon duc s’en souvenait, c’était pour m’indiquer en quelques petits mots, souvent indirects, mais pas équivoques, les moyens de le faire oublier.
Ce n’est point seulement par ce discours, dont le thème philosophique était « les vérités et les sentiments qu’il importe le plus d’inculquer aux hommes pour leur bonheur », que le nom de Bonaparte se trouve à bon droit rattaché au souvenir de l’abbé Raynal : le jeune lieutenant d’artillerie, dans sa première veine d’enthousiasme, avait désiré connaître le célèbre écrivain et lui avait rendu visite en passant à Marseille. […] L’année dernière vous vous entreteniez avec plaisir de la Corse ; daignez donc jeter un coup d’œil sur cette esquisse de son histoire ; je vous présente ici les deux premières lettres : si vous les agréez, je vous en enverrai la fin… » (Voir Souvenirs diplomatiques de Lord Holland, à l’Appendice.)
Votre Altesse se souviendra sans doute que je lui ai adressé encore cet hiver la prière de me faire donner une destination dans la seule arme dont le service fût compatible avec l’état de ma santé. […] J’abrège les misères de cette retraite, ces affreuses scènes « dont le souvenir seul, disait-il, fait dresser les cheveux. » — Berthier écrivait de Kœnigsberg au ministre Clarke, à la date du 27 décembre, pour le prévenir qu’un congé de convalescence de trois mois était accordé à Jomini pour se rendre à Paris.