D’abord il y a la sotie, la moralité ; nous n’avons guère de textes antérieurs au xve siècle ; simple lacune qui s’explique par la forme primitive et grossière ; le Jeu du prince des Sots de Gringore (1511) est un exemple de ce que peut l’art d’un individu pour la conservation d’une œuvre8 ; comme fond et tendance les pièces de ce genre ont dû abonder.
N’a-t-il pas ceux qui sont toujours mécontents de la cour, ces suivants inutiles, ces incommodes assidus, ces gens, dis-je, qui pour services ne peuvent compter que des importunités et qui veulent qu’on les récompense d’avoir obsédé le prince dix ans durant ? […] Rien de plus ; donc la comédie, laissant seulement à la tragédie les empereurs, les rois et les princes, les hommes publics et qui sont mêlés aux intérêts publics, peindra les mœurs, toutes les mœurs, ridicules ou odieuses, comiques ou tragiques, des bourgeois et des hommes du peuple ; c’est le drame.
Mon père vivait à Athènes, à la cour du roi Othon le prince bavarois que nous avons reçu des mains des grandes puissances. […] Partout, sous la surface un peu morne et morose de son livre, on entend bruire les eaux vives de la poésie ; et, enserré dans les profondeurs, un courant passionné de lyrisme cherche péniblement une issue, jusqu’à ce que la voix plaintive du fleuve prisonnier arrive à se faire jour dans l’exclamation finale : « Toi seul, ô maître, si tu existes quelque part, axiome, religion ou prince des hommes. » Chez Barrès, ce ne fut pas le poète seul qui tressaillit d’enthousiasme à l’appel du général Boulanger. […] J’aime à me le figurer dans une société analogue à celle qui se rassemblait autour de Laurent de Médicis, prince élégant si je m’en souviens, mais qui lui aussi ne souffrait pas d’un surcroît de santé.
Moréas nous quittait parfois pour aller au café des Lilas, où trônait depuis des années le prince des poètes, Paul Fort. […] Parmi les habitués du salon de la rue Commaille, je dois un souvenir spécial au prince des poètes, Léon Dierx, un des hommes les plus modestes et tes plus honnêtes que j’ai rencontrés. […] Nous le vénérions tous comme le prince officiel des poètes et un des grands survivants de l’école Parnassienne.
Et « le prince des librettistes » lui parut, mieux que beau, superbe ; ah ! […] Il arriva au bout de son récit, put dire adieu à son prince, l’ensevelir, le complimenter d’être mort en héros et le plaindre de n’être pas, malgré son vœu, mort pour la France. […] Ce temps où les satiristes ébauchaient l’encyclopédie, où les cathédrales s’édifiaient, somme de tous les arts, où les communes imposaient au prince la réunion des États généraux, où les moines défricheurs réalisaient le socialisme conventuel !
» Car c’est le cri des Français dans les dangers extrêmes, ainsi que dans les grandes joies ; comme si, dans les dangers, ils appelaient leur prince à leur secours, ou comme s’ils voulaient témoigner alors qu’ils sont prêts à périr pour lui.
Un jour, on a fait demander des Tuileries, à la Bibliothèque, toutes les pièces du Collier ; un autre jour le petit prince, mené chez un peintre, l’a interrogé sur la mort de Louis XVII, au Temple.
« On comptait sans un jeune vainqueur qui devait sauver la révolution et l’asseoir quelques années plus tard sur le trône qu’aucun des princes français n’avait tenté de conquérir avec l’épée d’Henri IV dans cette Vendée qui s’épuisait pour eux. » La doctrine des temps semble ici gagner l’auteur. […] Victor Hugo, par la bouche de son conventionnel, le jeune Dauphin était petit-fils de Louis XV, qui ne valait pas mieux que Cartouche. » D’abord, il était fils de Louis XVI, ce roi d’un cœur si bienveillant et si paternel, petit-fils du premier Dauphin, ce prince qui, sans sa mort prématurée, aurait donné un grand roi à la monarchie, l’héritier de ces illustres Capétiens qui ont fait la France, par leurs alliances et par leurs guerres, par leur politique et par leurs victoires, qui l’ont empêchée de devenir anglaise au quatorzième et au quinzième siècle, espagnole au seizième, par les règnes de Charles V, de Charles VII, de François Ier et de Henri IV. […] Il n’a jamais demandé à ce prince un acte de rigueur contre les protestants, et il en a obtenu des bienfaits pour tous les protestants qui réclamaient son crédit et son intérêt. » Voilà ce que Mgr Myriel, qui ne trouva pas de riposte, aurait pu répondre au conventionnel, et si celui-ci avait conservé quelques doutes, les preuves n’auraient pas manqué à l’évêque.
Mais il représentait admirablement, avait l’air d’un prince de la maison d’Este, et savait l’italien. […] Il regarda la Révolution de 1830 en spectateur sceptique, ne se croyant lié par ses traditions de famille qu’à la personne des princes, se donnant à lui-même sa parole qu’il descendrait dans la rue si le roi montait à cheval, manque de cela restant chez soi, et voyant le nouveau gouvernement s’installer sans en prendre grand souci. […] Ce qui ne l’empêche pas de donner, et plus volontiers encore, l’impression du trait plus appuyé, de la description vigoureuse et large d’Homère : Il tombe ; la bruyère écrasée est remplie De cette monstrueuse et vaste panoplie ; Relevée en tombant, sa chemise d’acier Laisse nu son poitrail de prince carnassier, Cadavre au ventre horrible, aux hideuses mamelles, Et l’on voit le dessous de ses noires semelles98.
* Le bureau de la Revue fantaisiste, passage des Princes, alors passage Mirès, était un lieu passablement extraordinaire. […] Nana elle-même, je vous le dis, n’a jamais mangé de cerises à l’eau-de-vie derrière les vitres du café des Princes, ni commandé une douzaine d’Ostende dans le grand salon des cabarets nocturnes.
Je lui adressais donc des déclarations ; prenant le rôle d’un jeune homme, un prince naturellement, qui lui proposait de l’enlever et de l’emmener dans son château, où elle s’amuserait à toutes sortes de choses, et ne serait plus jamais religieuse. […] J’ai gardé le souvenir, toujours attendri, d’un jeune prince étranger, pâle et blond, qui était mon ami plus que les autres.
Les Mérovingiens sont, comme on l’a dit, de « vrais princes romains » ; c’est l’imperium qu’ils exercent, sans contrôle possible de la part de la nation, c’est de Romains qu’ils s’entourent et dont ils subissent l’influence, et c’est dans les cadres de la société romaine que s’organise et se développe le jeune Etat. […] Et, dans ce but, il voulait l’arracher à l’étreinte du romanisme — représenté par les princes et les évoques, tyrans et flétrisseurs, suppôts d’une idée anti-nationale — et réveiller sa conscience profonde endormie. « Ma nation jadis si grande, disait-il, chantée par les Romains eux-mêmes, et connue par ses hauts faits, est misérablement esclave, manquant du pain spirituel aussi bien que du pain matériel… Les véritables Turcs sont en Italie ; le Sultan, c’est le pape, et son armée, c’est le clergé. » L’entreprise de Hutten en elle-même, qui était d’unir les bourgeois des villes, la petite noblesse et le peuple contre la féodalité d’esprit romain, échoua à la vérité : mais le succès de ses innombrables pamphlets contre Home et en faveur de la réforme morale et sociale de l’Allemagne prouve du moins qu’un sentiment correspondait au sien dans les profondeurs de la nation.
« Les lecteurs exigeaient en ce temps-là, nous dit-il, qu’on les tirât de la réalité ; qu’on leur montrât des fortunes réalisées en un jour ; des princes se promenant incognito avec des diamants plein leur poche ; des amours triomphales, enlevant les amants dans le monde adorable du rêve ; enfin tout ce qu’on peut imaginer de plus fou et de plus riche, toute la fantaisie d’or des poètes. » Où a-t-il vu cela, je le demande, si ce n’est dans le roman-feuilleton, à moins peut-être que ce ne soit dans le roman de Balzac ? […] Où sont-ils, dans Werther, dans René, dans Oberman, dans Adolphe, ces « princes qui se promènent incognito avec des diamants plein leur poche » ? […] Ils démarquent alors l’événement et dénaturent l’intrigue ; ils déguisent les principaux personnages et griment les simples comparses ; on voit passer dans leurs récits des rois imaginaires et des princes fantastiques ; puis ils opèrent des mélanges, ils brouillent, ils amalgament, ils combinent et, concentrant tout cela sous l’enveloppe d’un style extraordinairement travaillé dans sa négligence, ou bizarrement précieux dans sa brutalité voulue, ils nous offrent des œuvres si parisiennes qu’elles cessent d’être humaines ; si pleines d’allusions que pour les lire il faudrait avoir sous la main la collection des faits divers de l’an dernier ; si fragiles enfin, qu’une fois ôtées les parties d’actualités qui les soutiennent huit jours, elles croulent et s’évanouissent tout entières. […] Zola, qui s’est si éloquemment moqué du roman d’aventures, de ce roman « où les princes se promenaient incognito avec des diamants plein leurs poches », que peut-il bien penser, dans le secret de son cœur, de ce lord Annandale ?
Il s’est plu à s’ériger une royauté sur les critiques, et il a dû s’amuser beaucoup quand il a vu ses prétentions bruyamment soutenues par l’opposition frénétique de ses confrères qui ne voulaient pas avoir de prince.
Mercredi 22 mai De même que les banquiers ont un choisisseur de tableaux, d’objets d’art, de même les princes devraient avoir un avertisseur, pour les éclairer sur la propreté morale des gens qui approchent d’eux.
« Ce fut, dit Holman Hunt, par un petit esprit de paradoxe que nous convînmes que Raphaël, le prince des peintres, était l’inspirateur de l’art du jour ; car nous savions bien à quel point la pratique des peintres contemporains diffère de celle du maître qu’ils invoquaient… Ni alors ni plus tard nous n’avons nié qu’il n’y ait eu beaucoup d’art sain et grand après l’époque de Raphaël ; mais il nous semblait que l’art postérieur était si souvent entaché de corruption, que c’était seulement dans les œuvres plus anciennes que nous pouvions trouver la santé avec une méthode absolue. » Constitué donc sur cette double base du retour aux procédés exacts et patients des quattrocentistes et à l’inspiration sérieuse des trécentistes, le petit groupe recruta trois nouveaux adhérents, le sculpteur Thomas Woolner, et les peintres F. […] Là, la rue devient place, le trottoir devient rue, la boutique devient musée ; le café est un théâtre ; l’élégance, du faste ; la splendeur, un éblouissement ; la vie, une fièvre… » Et les métaphores se succèdent pendant des pages : il y a « de grandes inscriptions d’or qui courent sur les façades des maisons comme les versets du Coran sur les parvis des mosquées » ; on passe sans interruption devant « les hôtels des princes et des Crésus ».
le triste empire des lettres, pour manquer d’empereur reconnu et de princes, n’est point cependant une république ! […] On l’a vu prince dans Giselle, svelte, fier, éperdu de noble douleur, rugissant.
S’agit-il des princes ? […] » Il revient aux princes.
Préface. De la sincérité littéraire Ce livre provient pour la plus grande part d’un enseignement oral : presque toutes ces pages ont été écrites pour être parlées ; nous n’avons pas cherché à leur donner ici un autre caractère. La parole didactique, destinée surtout à s’emparer de la raison, n’est pas astreinte à la brièveté, à l’audace d’un article de journal, qui a besoin de frapper fort et vite ; elle ne comporte pas la concision et l’art savant d’un livre, qui doit forcer l’attention et la soutenir longuement. Mais l’esprit s’assimile avec plus de facilité et de sûreté les idées formulées pour la voix ; les effets du style contemporain sont trop souvent calculés pour le plaisir des yeux. Pénible à suivre par l’intelligence dans ses contours saccadés, ce style ciselé, comme on l’appelle, en multipliant les facettes de la pensée lui fait perdre son large rayonnement ; il éblouit plus qu’il n’éclaire ; il fatigue l’esprit pour avoir trop raffiné le plaisir de l’imagination ; le cerveau se lasse plus vite à cet exercice ; les organes s’y énervent souvent ; jamais la raison ne s’y fortifie.
Nous n’ignorons pas que la responsabilité du cataclysme de 89 incombe aux dirigeants qui n’ont rien su diriger, à une noblesse qui n’a pas substitué le service civil au service militaire, à un clergé qui a manqué de vertus sacerdotales, à des princes qui n’ont pas fait leur métier de roi. […] III Une famille qui monte lentement, patiemment ; qui, des métiers manuels, s’élève à des travaux moins serviles, puis à une fonction plus haute ; des mœurs nationales qui se prêtent à ce développement et qui assurent à l’héritier génial du forgeron, de l’aubergiste, du tailleur et du légiste, la protection d’un prince intelligent, après avoir assuré aux aïeux la sécurité d’une ville libre, telles furent les conditions où Gœthe a évolué. […] Il laissait simplement passer dans ses strophes l’acclamation de la France épuisée de guerres et de convulsions, et saluant dans ses princes héréditaires sa tradition renouée, pour si peu de temps, hélas !
Le prisonnier vaincu, lanciné par le brutal vainqueur qui le suit, les paquets de butin en désordre, les filles insultées, tout un monde ensanglanté, malheureux et abattu, le reître puissant, roux et velu, la gouge qui, je crois, n’est pas là, mais qui pouvait y être, cette fille peinte du moyen âge, qui suivait les soldats avec l’autorisation du prince et de l’Eglise, comme la courtisane du Canada accompagnait les guerriers au manteau de castor, les charrettes qui cahotent durement les faibles, les petits et les infirmes, tout cela devait nécessairement produire un tableau saisissant, vraiment poétique.
Pour expliquer la vie de Mark Twain, il y a son talent et son caractère ; il y a aussi, comme en toute destinée humaine, le hasard, prince de nos jours et de nos nuits ; et il y a ses créanciers : ils composent l’unité de son existence. […] Les personnages de l’Embarquement pour Cythère ne sont qu’au premier aspect des princes charmants et des dames de féerie.
Pour finir cette série qui pouvait être innombrable des poètes maudits, mais que Verlaine a dû borner et a bien fait de borner, il clôt la série, c’est lui le mélancolique Pauvre Lélian, un nom d’une bonne comédie de Shakespeare, pour désigner quelque pauvre et brillant et un peu vaincu prince, cheminant sous déguisement forcé à la conquête de son royaume. […] C’est lui, le prince, qui l’a rencontrée près de la fontaine où elle gardait ses moutons ; il l’a regardée, elle l’a aimé, il l’a caressée, elle s’est donnée, et tout le village a envié sa gloire grande d’être la mie du roi.
C’est l’ambitieux vulgaire, pâlissant au nom du prince, courbé devant le favori, prêt à tout sacrifier aux intérêts de sa place. […] Racine se rend bien compte de la complexité, si intéressante pour un moraliste tel que lui, de ce personnage : « J’y ai inséré, dit-il dans sa préface, tout ce qui pouvait mettre au jour les mœurs et les sentiments de ce prince, sa haine violente contre les Romains, son grand courage, sa finesse, sa dissimulation, et enfin cette jalousie qui lui était si naturelle. » Racine a bien raison, et, en effet, tout cela se trouve dans le rôle si délicat du Roi de Pont. […] Quand Athalie songe à supprimer Joas, Abner, qui ne sait pas ce qu’est Joas, n’est qu’un homme humain et pitoyable en la détournant de ce dessein, et cependant il a endormi les soupçons d’Athalie, servi Joad. — Quand Athalie vient au temple avec le vague dessein d’enlever Joas, Abner n’est qu’un ami fidèle de Josabeth en lui disant : « Princesse, assurez-vous, je le prends sous ma garde. » Cependant, il se trouve ainsi s’être engagé envers le prince par le service même qu’il a rendu à l’enfant inconnu.
Je voudrais qu’à chaque janvier on saluât un nouveau prince de la littérature. […] Je prise fort le Symbolisme, sobre et en filigrane, qui préside à certains chefs-d’œuvre des princes Mæterlinck, Henri de Régnier, Viellé-Griffin, Gabriel Randon, Stuart-Merrill. […] Une chose regrettable, c’est le systématique blasphème des Princes de la Férule envers les Gueux du Verbe.
Mon cœur déconcerté se trouble, quand je vois Ton front pensif de prince, et tes yeux bleus de vierge, Tantôt l’un, tantôt l’autre et les deux à la fois.
Notre ancienne littérature classique est tout à fait aristocratique, et si les gens ne sont seulement pas princes, on trouve que ce n’est pas la peine de s’en occuper.
Avec une façon si corporelle et si personnelle de faire la guerre, les premiers citoyens, les princes eux-mêmes étaient tenus d’être bons athlètes.
Et cette magistrature, presque démesurément puissante, tous relèvent d’elle : le prince du sang est cité à sa barre comme le manant.
Nos Politiques ne cherchaient point à pénétrer dans le cabinet des Princes, à combiner leurs intérêts différens ; mais ils s’occupaient des intérêts de l’humanité en général, & du bien de leur Patrie en particulier.
» Le Christ les console : « Ne pleurez pas, mes petits frères, je vous donnerai une montagne d’or, une rivière de miel, je vous laisserai des jardins plantés de vignes, des fruits et la manne du ciel… » Mais l’apôtre Jean l’interrompt : « Ne leur donne pas la montagne d’or, les princes et les boyars la prendront, ils la partageront entre eux et ne laisseront pas approcher nos petits frères. […] Le prince-gouverneur, ce prince « ennemi de la fraude » qui anéantit les fonctionnaires coupables et ramène le règne de l’équité dans sa ville, l’auteur l’a ressuscité des vieux contes moraux.
Laissant faire à d’autres, — ses compères et ses dupes, — la toilette de son esprit, il n’a d’autre souci en apparence que de faire celle de son cœur ; mais lorsqu’il se dit lui-même le père des hommes de lettres, il a bien soin de prêter l’oreille, afin de s’entendre appeler le prince des critiques.
Mais point n’était besoin du génie des poètes : un décret du prince pouvait suffire à faire ou à défaire des dieux.