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649. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

Son génie lui parla ; un état médiocre ne lui parut point valoir assez pour être mis en balance avec cette destinée nouvelle qu’il tenait entre ses mains : « Il vaut mieux, pensa-t-il, déroger à sa qualité qu’à son génie » ; et, se reportant aux grandes actions qu’il avait été donné à d’autres plus heureux d’exécuter, il se dit : « Qu’il paraisse du moins, par l’expression de nos pensées et par ce qui dépend de nous, que nous n’étions pas incapables de les concevoir. » Cette prédominance, cette préoccupation toujours présente de l’action et de l’énergie vertueuse, supérieure et préférable à l’idée elle-même, est un des caractères du talent littéraire de Vauvenargues, et elle contribue à conférer aux moindres de ses paroles une valeur et une réalité qu’elles n’auraient pas chez tant d’autres, en qui l’auteur se sent à travers tout. […] Et c’est alors qu’il y a tout lieu de dire vraiment avec lui : « Les maximes des hommes décèlent leur cœur. » Il n’avait rien publié encore lorsqu’il s’annonça à Voltaire par une lettre écrite de Nancy (avril 1743), dans laquelle il lui soumettait un jugement littéraire sur les mérites comparés de Corneille et de Racine. […] En lui répondant par quelques conseils littéraires, en le redressant et en l’éclairant doucement sur quelques points, il ne parle tout d’abord à ce jeune officier de vingt-huit ans que comme à un égal, à un ami, à l’un de ceux qui sont à la tête du petit nombre des juges. […] » Il a résumé toute sa théorie à cet égard dans ce mot si souvent cité, et qui, déjà dit par d’autres13, restera attaché à son nom, comme au nom de celui qui était le plus digne de le trouver et de le dire : « Les grandes pensées viennent du cœur. » Comme critique littéraire, et dans les jugements qu’il porte au début sur les écrivains qui ont été le sujet favori de ses lectures, Vauvenargues n’est pas sans inexpérience : sur Corneille, dont l’emphase lui répugne jusqu’à lui masquer même les hautes beautés, sur Molière dont il ne sent pas la puissance comique, Voltaire le redresse avec raison, avec une adresse de conseil délicate et encore flatteuse : Vauvenargues reprend ses avantages quand il parle de La Fontaine, de Pascal ou de Fénelon. Dans ses premiers jugements on peut dire que Vauvenargues fait son éducation littéraire plume en main, et que nous y assistons.

650. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Tâchons du moins que la critique littéraire, sous le jeune et nouvel Empire, ne paraisse pas trop au-dessous de ce qu’elle était sous l’ancien. […] La critique littéraire, qui doit être heureuse et fière de s’élever toutes les fois qu’elle rencontre de grands sujets, se plaît pourtant, par sa nature, à ces sujets moyens qui ne sont point pour cela médiocres, et qui permettent à la morale sociale d’y pénétrer. […] Il eut, dès le collège, des succès brillants, et montra des goûts déjà académiques : il avait reçu, comme en naissant, un sentiment littéraire très prononcé. […] En supposant que l’abbé Barthélemy, pour rendre son récit plus gai, exagère un peu sa vénération et son tremblement, on voit du moins dans quel sens était sa vocation et cette religion littéraire qui lui était comme infuse. […] Lui-même, il a l’honneur, je le crois, de ne pas être une seule fois nommé dans les œuvres de ce monarque et de ce despote littéraire du siècle.

651. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Saint François de Sales. Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. Sayous. 1853. » pp. 266-286

Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M.  […] Sayous, si honorablement connu comme éditeur et rédacteur fidèle des Mémoires de Mallet du Pan, continue aujourd’hui en France d’intéressantes études littéraires qu’il avait autrefois commencées à Genève. […] Sayous ; il lui trouve, à défaut d’une littérature nationale, un certain génie littéraire qui se marque volontiers dans les productions de tout enfant du pays : Ce génie chez les Savoyards, dit-il, a pour caractères essentiels la grâce et l’enjouement, une sensibilité qui n’a rien de triste, et une bonhomie qui n’est pas exempte de malice. Nous rencontrerons plus d’une fois, ajoute-t-il, l’expression de ces qualités toutes savoisiennes, mais jamais plus complètes que chez les deux écrivains qui, dans l’ordre des dates, sont aux deux termes extrêmes de l’histoire littéraire de leur pays, saint François de Sales qui l’ouvre au xviie  siècle, et Xavier de Maistre qui la termine de nos jours. […] Mais aujourd’hui je ne puis insister que sur le grand succès littéraire et moral par lequel il se rattache à la langue française de son temps, je veux parler de son Introduction à la vie dévote, qui parut d’abord en 1608, et dont l’effet fut soudain et universel.

652. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — II. (Fin.) » pp. 476-495

Jordan, né à Berlin en 1700, avait douze ans de plus que le roi ; sa grande passion était pour les livres et pour les miscellanées littéraires, pour ce genre d’érudition ou de critique qui était une continuation et comme un débris du xvie  siècle, et qui, remplacé chez nous par une culture plus brillante au début du règne de Louis XIV, ne subsistait plus dans tout son honneur que hors de France, en Hollande, à Genève, à Berlin. […] Sous son français un peu lourd et déjà dépaysé, Jordan a un coin de la philosophie d’Horace : Ma bibliothèque, écrivait-il au roi, fait mes délices, parce que, en la feuilletant, je me persuade de plus en plus que tout est frivole dans le monde littéraire. […] Il y a des éclairs d’Annibal qui percent à travers ce fatras de rimes et dans ces confidences presque toutes littéraires entre amis. […] À l’histoire seule appartient le devoir de l’apprécier dans son ensemble, de marquer avec impartialité les mérites, les grandeurs et les défauts du souverain, et de prendre toute sa mesure : c’est assez pour la critique littéraire, si elle a pu rendre sur un point un hommage et une justice bien dus au plus littéraire des rois.

653. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

D’intelligence forte et saine, ayant au plus haut degré la volonté du bien, il a mis son grand, son très grand talent, son impeccable probité littéraire au service des vertus de la classe moyenne. […] * *   * Rien ne faisait pressentir, à ses débuts, quelle immense place Émile Augier était appelé à occuper dans les préoccupations littéraires de la bourgeoisie. […] Mais elle admirera comme nous la puissance dramatique, la sincérité d’exécution, la probité littéraire, la fermeté et la pureté de la forme du grand auteur dramatique et de l’homme de bien qui vient de mourir. […] On n’a pas découvert qu’Émile Augier fût autre chose qu’Émile Augier, c’est-à-dire un génie solide et clair, d’une probité littéraire égale à sa loyauté personnelle, un vrai Français, de style et d’âme, un maître depuis longtemps classique et qui dans sa retraite volontaire, son glorieux bonheur intime, goûta, de son vivant, la gloire incontestée et reçut le respect de la postérité. […] Nos travaux, littéraires sont très opposés ; donc je ne puis émettre une opinion sur l’œuvre de M. 

654. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

Saint-Marc Girardin, qui a brûlé en Sorbonne tant d’hérétiques littéraires, et qui dressa — vers 1856 ou 1857 un autodafé spécial pour les Calvin et les Jean Huss de l’autobiographie. […] J’en viens, par une pente toute naturelle, à songer que Balzac, lui aussi, a consacré deux tableaux de son drame universel à la Bohême littéraire. […] — Le Laid seul est littéraire, et je suis son prophète, —  telle est la devise de M.  […] Du reste, Henry Murger semble l’avoir compris ; car, avant la fin même du volume, il est rentré dans son monde d’artistes par une petite nouvelle de vingt pages intitulée Biographie d’un inconnu qui… Je l’appellerais volontiers un chef-d’œuvre, si les camaraderies et les complaisances intéressées n’eussent fait de ce mot une ridicule banalité. — Croyez-moi, quand on prononce de tels actes de contrition, on mérite l’absolution la plus entière, eût-on sur la conscience les deux cents volumes de péchés littéraires de M.  […] Je ne demande pas à la police littéraire de fermer l’hôtel de Rambouillet, mais je veux que Murger seul y ait la parole.

655. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Un nouveau schisme littéraire se manifeste aujourd’hui. […] et le premier corps littéraire de la France appréhendera-t-il de se compromettre, en intervenant dans une dispute qui intéresse toute la littérature française ? […] Voilà pourquoi la question du romantisme allemand, considéré comme une innovation littéraire, n’est autre chose qu’une question dramatique. […] Rien, dans notre système littéraire, ne s’oppose à ce qu’on pénètre plus avant encore, s’il se peut, dans les causes mystérieuses et infinies de notre sensibilité morale. […] Le romantisme n’est donc rien comme système de composition littéraire ; ou plutôt le romantisme n’existe pas, n’a pas une vie réelle.

656. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

Il a été, assurément, l’un des héros de comédie d’après lesquels s’est faite et s’est transmise la physionomie littéraire du provincial. […] Et, à mon avis, ni Flaubert, ni Maupassant, qui sont venus après lui, n’ont comblé cette grande lacune littéraire. […] Et il faut bien avouer que l’extrême centralisation littéraire est bien faite pour perpétuer ce préjugé. […] Dans l’autre, qui comprend le Midi, la presse locale a une tout autre diffusion, et surtout une importance incomparablement plus grande, l’esprit est plus régionaliste, les conversations n’obéissent plus servilement à la direction parisienne, et, par exemple, s’il nous était donné d’entendre les propos échangés entre les convives d’un grand propriétaire de Montpellier ou de Béziers, nous constaterions qu’il n’est pas pour eux de question politique, littéraire ou mondaine qui puisse retenir longuement les esprits, tandis qu’on discutera à perte de vue celle des vendanges dernières, du plâtrage, du sucrage et des cours du vin rouge. […] Elles deviennent négligeables, tant à cause de ce que j’appellerai l’usure littéraire d’un pareil moyen, que pour cette autre raison qu’il est tiré de l’histoire ancienne plus que de la réalité présente.

657. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Quatre moments religieux au XIXe siècle. »

La critique littéraire, avec ses respects et ses réserves, s’arrête étonnée devant de tels élans enthousiastes ; elle y regarde à deux fois avant de les contrarier. […] À peine eus-je ouvert le livre et laissé mon cœur à sa merci, que les larmes me vinrent aux yeux avec une abondance qui ne m’était pas ordinaire, et, rappelant mes souvenirs sous le charme de cette émotion, je compris que je n’étais plus le même homme et que, loin d’avoir perdu de ma tendresse littéraire, elle avait gagné en profondeur et en vivacité. […] Les Païens eux-mêmes, tels que Platon, Plutarque, Cicéron et beaucoup d’autres, sont mille fois préférables à la plupart de nos écrivains modernes ; c’étaient des gens religieux, pénétrés de respect pour la tradition… Depuis trois ou quatre siècles, la littérature est dans un état de rébellion contre la vérité. » Ainsi voilà trois siècles littéraires rayés d’autorité, et, ce qui est plaisant, rayés au nom de la tradition même. […] Vingt pages suffisent pour en apprécier le mérite littéraire et la pauvreté morale et philosophique.

658. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre III »

« Est-ce curieux, notent les de Goncourt à propos de Belot, est-ce curieux : cet homme qui, dans la souffrance, a des sensations distinguées, assaisonnées de remarques et de réflexions presque littéraires, lorsqu’il écrit est absolument dénué de littérature et ne se doute pas du tout de ce qui fait la beauté d’un livre. »41 Si l’être qui souffre n’est plus un médiocre, le résultat s’élève d’autant. […] Cette sorte de testament littéraire devait s’appeler Mes Douleurs. […] Il serait dès lors déplacé, inexact et injuste, de s’obstiner à retrouver l’auteur derrière le moindre geste de son protagoniste littéraire : un cas de neurasthénie évoluant dans une mentalité d’artiste et d’érudit peut être initiateur d’un tableau plus complet. […] Son règne littéraire a vu naître et passer les écoles et les genres.

659. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre V. L’antinomie esthétique » pp. 109-129

Quant à l’intolérance proprement esthétique, elle ne se rencontre guère que dans les écoles artistiques et littéraires, les chapelles, les cénacles qui décernent aux artistes amis ou dissidents des brevets de talent ou de sottise. Les cénacles littéraires ou artistiques restent d’ailleurs assez indifférents en général au côté social et moral de l’art. L’ancienne critique dogmatique, telle que la concevaient Boileau, La Harpe, Nisard ou Brunetière, la critique qui fixait des étalons moraux, sociaux, littéraires et qui reconnaissait aux œuvres plus ou moins de valeur suivant qu’elles se conformaient plus ou moins à ces étalons semble de plus en plus abandonnée. […] Les haines littéraires et artistiques, nous l’avons dit déjà, ne sont pas les moins ardentes.

660. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Appendice. [Rapport sur les primes à donner aux ouvrages dramatiques.] » pp. 497-502

La Commission de l’année dernière pas plus que celle de cette année ne se l’était dissimulé : la grande difficulté littéraire que rencontre l’institution présente, c’est que le but moral qu’elle réclame avant tout puisse tomber d’accord, dans les ouvrages dramatiques d’un ordre élevé, avec toutes les autres conditions de grâce, d’élégance, d’émotion, de divertissement et de distinction légère que le monde proprement dit a droit de son côté d’exiger ; c’est que le but moral, si on l’y introduit, ne s’y affiche pas d’une manière contraire à la vérité des choses ni au goût, et qu’un genre prétendu honnête mais faux, comme en d’autres temps, n’aille pas en sortir. […] Le résumé de ce qui s’est dit à ce sujet dans plusieurs séances formerait assurément la critique littéraire la plus complète de la pièce, et l’auteur n’aurait pas à s’en plaindre puisque son ouvrage en est sorti triomphant. […] La Commission a dû s’arrêter là dans les propositions de cette année : elle eût trouvé, sans doute, parmi les productions qui lui étaient présentées, à distinguer d’autres pièces encore pour des qualités d’esprit, de talent littéraire ou de mouvement dramatique, mais elle n’eût pu les faire rentrer, sans complaisance et sans un véritable contresens, dans l’esprit de l’institution dont elle était l’organe.

661. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Note »

Je ne saurais mieux définir le sentiment de profonde affection et comme de piété que je portais alors jusque dans la critique littéraire, qu’en rappelant un passage de mon roman de Volupté, où Amaury s’écrie (chap. xxi) : « … Dans les Lettres mêmes, il est ainsi des âmes tendres, des âmes secondes, qui épousent une âme illustre et s’asservissent à une gloire : Wolff, a dit quelqu’un, fut le prêtre de Leibnitz. […] Dans les divers projets dont vous m’avez autrefois entretenu, celui du roman populaire, d’un Gil Blas moral, m’a souvent souri, comme allant à merveille à votre rôle et devant compléter votre œuvre. — Il se prépare ici une saison assez littéraire, assez poétique même : nous allons avoir dans une quinzaine un volume lyrique de Hugo ; il y aura des vers d’amour ; malgré toutes les hésitations, il se décide à son coup de tête, et bien que ce soit une unité de plus qu’il brise dans sa vie poétique (l’unité domestiqueaprès à politique et la religieuse), peu importe à nous autres frondeurs des unités et au public qui ne s’en soucie plus guère : les beaux vers, comme seront les siens, je n’en doute pas, couvriront et glorifieront le péché. […] L’Ombre de Napoléon projetée sur les nuages grossissants de l’horizon de l’avenir, voilà pour la réalité historique ; une inspiration orientale nous arrivant à travers les Nibelungen, et faisant pour la première fois invasion dans notre poésie, c’en est assez le caractère littéraire.

662. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « EUPHORION ou DE L’INJURE DES TEMPS. » pp. 445-455

D’ingénieux érudits dressent chaque jour l’histoire littéraire des écrivains, là même où précisément cette histoire semble le plus faire défaut ; les poëtes grecs ou latins, dont tout le bagage a péri dans le naufrage des temps, retrouvent des investigateurs d’autant plus curieux et presque des sauveurs. […] Mais de ce que Properce est érudit et quelque peu difficile à entendre par endroits jusqu’au sein de la passion, la perte de ses étincelantes élégies serait-elle moins pour l’homme de goût une calamité littéraire ? […] Un Homère entr’ouvert sur ma table, et que j’avais lu la veille avant l’Euphorion, me montra qu’il y avait encore une Providence jusque dans les plus grands hasards littéraires, et me remit un peu.

663. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. De l’influence de la philosophie du xviiie  siècle sur la législation et la sociabilité du xixe . »

Lerminier, reste pourtant oratoire, et il ne faut pas s’en plaindre ; de grandes beautés littéraires, à côté des défauts, ressortent de cette forme presque nécessaire d’éloquence dans laquelle il est si à l’aise. […] Lerminier, c’est un grand talent littéraire qui s’affermit, s’assouplit et se perfectionne de jour en jour. […] Sainte-Beuve : Chateaubriand et son groupe littéraire sous l’empire ; mais elles ont été imprimées, toutes, au complet, dans une édition de l’Essai sur les Révolutions, donnée par M. 

664. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les petites revues » pp. 48-62

« Il ne se fera, quoi qu’on en ait dit, l’organe d’aucune coterie, d’aucune secte : il n’a pas de couleur littéraire ; il est et restera ouvert à toute tentative originale, il prêtera son concours le plus entier à tous ceux qui luttent pour arriver au jour, à une époque où il devient de plus en plus difficile de percer la couche épaisse de sottise qui sépare les jeunes écrivains du grand public. ». […] La nouvelle série s’ouvre par un manifeste : la Décadence, où on lisait ceci : « Notre époque, fleurie de crimes habilement forfaicturés, de cabarets et de tavernes aux prétentions littéraires et aux vitraux peints, de prostitution étonnamment raffinée, de perversité cruelle et de blasement général, nous est l’image fidèle de l’ère des derniers Césars… Notre fin de dix-neuvième siècle, en notre Paris fait un peu de Rome, s’écartant de l’ornière creusée par le Roi-Soleil, dans les lettres, devait être taxée de Décadence. […] Dans un article : les Symbolistes, il écrivait : « À qui suit de près la jeunesse littéraire et se rend compte de la totalité de son effort, il n’apparaît point que les esprits soient tournés plutôt vers le Symbolisme que vers n’importe quoi.

665. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 140-155

Nous allons hasarder quelques conjectures, pour donner, s’il est possible, l’explication de ce phénomene moral & littéraire. […] Il n’est donc que trop tristement démontré par l’expérience, que l’abus des connoissances littéraires est le plus dangereux de tous les maux qu’un Etat puisse éprouver. […] Il est seulement à propos de remarquer que dans ses débats, soit littéraires, soit personnels, en montrant toujours autant de génie que de sensibilité, il ne s’est jamais écarté des regles de l’honnêteté & de la décence.

666. (1856) Cours familier de littérature. I « IIe entretien » pp. 81-97

VIII Pour quiconque lit attentivement les chefs-d’œuvre littéraires des époques que nous appelons la naissance des lettres, il est évident que ces chefs-d’œuvre ou ces fragments de chefs-d’œuvre que nous croyons des commencements, n’étaient que des continuations ou des renaissances de littératures dont les monuments ne nous sont pas parvenus. […] Rien ne naît de rien dans ce monde, pas même le génie : quand vous apercevez un grand monument littéraire, soyez sûrs qu’il n’est pas isolé, et que derrière ce monument il y a une littérature invisible par la distance dont ce monument est le chef-d’œuvre, mais non le commencement. […] X Cet inventaire de l’esprit humain, à l’heure où nous sommes, comprend l’Inde, la Chine, l’Égypte, la Perse, l’Arabie, la Grèce, Rome, l’Italie moderne, la France, l’Espagne, le Portugal, l’Allemagne, l’Angleterre, l’Amérique elle-même naissante à la littérature comme à la vie, en un mot tous les peuples du globe qui ont apporté ou qui apportent un contingent littéraire à ce dépôt général de l’esprit humain.

667. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Sand »

À la lire, en beaucoup de ses écrits (particulièrement en ses Souvenirs et Impressions littéraires), elle s’est dite ignorante, inconsciente, spontanée, une pauvre tête poétique, quoiqu’elle ne soit pas aussi poétique qu’elle le dit, la rusée ! […] Devant ce public qu’elle n’oublie jamais et qui lui donnait sa tenue littéraire, elle est, après tout, un écrivain d’un certain ordre, qui a droit à un classement quelconque. […] Madame Sand, que littérairement on déshonore par cette correspondance, honteuse pour la femme la plus vulgairement littéraire, n’y est point du moins déshonorée d’une autre manière, et les tableaux qu’on y rêvait dans des perspectives imaginaires ne s’y trouvent pas.

668. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lessing »

Aussi fut-ce pour l’améliorer — si l’on peut dire améliorer pour dire : faire quelque chose de rien, — que quelques esprits littéraires entreprirent de fonder un théâtre à Hambourg, — à Hambourg, précisément la ville où, plus tard, on se mettait à trois pour comprendre un mot de Rivarol ! […] C’est là l’intérêt, le grand intérêt de ce livre, qui n’est plus que de l’histoire littéraire. […] Un homme dont il parle dans sa Dramaturgie avec le sentiment du respect le plus profond, mais de l’apparition duquel dans l’histoire littéraire il n’a pas tiré les conséquences qu’il aurait fallu, aurait dû lui apprendre que l’ancien monde dramatique était clos et forclos, et qu’il sortirait de cet homme-prodige une théorie qui ne serait même plus une théorie et qui emporterait les théories anciennes, comme des pailles dans un ouragan !

669. (1875) Premiers lundis. Tome III « Viollet-Le-Duc »

Viollet-Le-Duc1, le possesseur spirituel et érudit de cette bibliothèque vient de publier un curieux volume d’histoire et de biographie littéraire encore plus que de bibliographie. […] Dans l’ouvrage qu’il publie aujourd’hui, l’auteur, en décrivant à la manière des bibliographes sa collection précieuse, trouve surtout dans ce travail un prétexte à des renseignements biographiques, à des appréciations littéraires, à des citations.

670. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Barbey d’Aurevilly, Jules (1808-1889) »

Mais… « la justice du peuple » est souvent tardive, surtout en matière littéraire, et je ne l’attendrai certes pas pour saluer en M.  […] [Documents littéraires (1881).]

671. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Blémont, Émile (1839-1927) »

Émile Blémont et Léon Valade est une très joyeuse et très littéraire farce, qui amuse par la bouffonnerie des incidents et charme par la grâce et l’inattendu du style. […] [L’Année littéraire (7 juin 1887).]

672. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Guerne, André de (1853-1912) »

[D’après l’Enquête sur l’évolution littéraire, p. 285 (1891).] […] Mais sa vie littéraire n’était point scellée dans la tombe des dieux disparus, et, par une métamorphose qui surprendra seulement les niais, le vicomte de Guerne s’est montré dès lors le poète le plus voisin de nous et le plus préoccupé, maintenant, du monde qui peine autour de lui vers les destins inconnus.

673. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Roumanille, Joseph (1818-1891) »

[Causeries littéraires (1854).] […] Paul Mariéton Avant Mistral, Joseph Roumanille, son précurseur, se servant de la langue vulgaire pour être compris de son milieu de naissance (1845), trouvait, nouveau Malherbe, des accents littéraires dans un idiome qui ne servait plus qu’à traduire des grossièretés ou des thèmes burlesques.

674. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVI. Consultation pour un apprenti romancier » pp. 196-200

Triompher à la table du bachot tout ensemble et dans le lit de sa bonne atteste une expérience littéraire et un us féminin d’une valeur petite, mais réelle. […] Un médaniste me confiait, dans le sourire de sa sagesse ingénue : « Moi, j’écrirais Peau d’Âne que je croirais l’inventer. » — Laissez vierge, mon jeune ami, votre mémoire littéraire.

675. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Lettre-préface à Henri Morf et Joseph Bédier » pp. -

Vers 1895 j’étais nettement positiviste, déterministe, et, par une conséquence dont la logique m’apparut plus tard, je n’aimais plus la France, n’ayant eu pour elle qu’une affection purement littéraire. […] Je pourrais citer l’œuvre de Henri Poincaré à Paris, de Benedetto Croce à Naples, de Karl Vossler à Munich, de Vossler qui livre au positivisme en linguistique la même bataille que je livre au positivisme en histoire littéraire.

676. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

Il résulte de tout ceci que le réalisme artistique et littéraire n’est pas un phénomène isolé, dont il serait presque inutile de tenir compte, puisqu’il romprait l’harmonie générale. […] La loi, en exigeant que l’écrivain assume la responsabilité de son écrit, lui rend, même dans l’ordre littéraire, ce caractère particulier au génie du dix-neuvième siècle. […] Deviner les hommes et les œuvres dix ans avant la majorité, pure affaire de dandysme littéraire qui fait perdre beaucoup de temps. […] Champfleury, — le coryphée jusqu’ici de ce petit groupe, — s’est levé un beau matin en rêvant aux moyens de devenir un personnage littéraire et de fonder une école (oh ! […] Qu’on juge par là combien est artificielle et à la surface, la vie artistique et littéraire dans notre pauvre France.

677. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Han Ryner (1861-1938), pseudonyme littéraire de Henri Ner, écrivain français, professeur, anarchiste individualiste et franc-maçon. […] Ce polygraphe a écrit, entre autres, des poèmes, des romans, des ouvrages de critique littéraire et plusieurs traités d’occultisme. […] Le livre est publié en 1919 par la Société littéraire de France (Paris). […] Il est estimé du milieu littéraire et Gide le fait entrer à la Revue blanche. […] Ces entretiens parus dans les Nouvelles littéraires sont publiés en six volumes de 1924 à 1933.

678. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLI » pp. 167-171

. — Heureusement ce triste épisode du carnaval littéraire est déjà une mystification de l’autre année. […] Ce petit fait tout littéraire peut donner la mesure de la décision et de la hauteur de vue de nos hommes d’État dans les questions de conflit qui vont se présenter. — L'Académie française, par l’organe de M.

679. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Avertissement de la première édition »

Avertissement de la première édition Je continue de mettre ordre de mon mieux à ce que j’appelle mes affaires littéraires. […] — Tels qu’ils sont, on trouvera incontestablement dans ces portraits de bonnes indications de vérités, et une grande masse de faits et de notions apportés en tribut à l’histoire littéraire contemporaine.

680. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 2. Caractère de la race. »

Car il s’en faut que, dans la latinité de l’époque impériale, les écrivains gaulois fassent un groupe aussi tranché, aussi caractérisé que les Espagnols et surtout les Africains ; et l’on ne trouverait rien chez eux qui ne se rencontre fréquemment chez des Italiens ou chez des Grecs : tout ce qu’il est permis d’inférer de la littérature gallo-romaine, c’est l’aptitude et le goût de la race pour l’exercice littéraire. […] Voilà les ressources et les dispositions principales que l’esprit français apporte pour faire sa littérature, sans parler des autres caractères qui se rapportent moins directement à cet objet : voilà les traits principaux et permanents qu’il a dégagés pendant dix siècles d’intense production littéraire.

681. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vacquerie, Auguste (1819-1895) »

[La Vie littéraire (1891).] […] Paul Meurice rappelle ces grandes crises littéraires de leur jeunesse ; d’un œil plus froid aujourd’hui, le grand défenseur du romantisme considère les jours de lutte pour les Burgraves et l’arrivée de Ponsard, posé imprudemment par « l’école du bon sens » en adversaire de Victor Hugo ; Ponsard, dit M. 

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