Malheureusement, il était trop jeune pour la destinée que les événements lui avaient faite. […] Louis XIV jeune autorisa la représentation du Tartufe ; vieux, il se livra au père Letellier. En laissant de côté les préventions naturelles à des princes longtemps proscrits, et qui, malgré ce qu’on a dit, ne se sont jamais réjouis de nos victoires, par la raison toute simple qu’ils ne pouvaient fonder l’espoir de leur retour que sur nos désastres, on concevra comment la vieillesse de Louis XVIII, et ses infirmités, qui ajoutaient à son isolement d’étiquette, nous ont valu les Cent Jours ; et pourquoi le règne de Charles X a fini par un crime, dont la première compensation sera de nous avoir épargné la vieillesse de M. le duc d’Angoulême, vieillesse qui aurait été d’autant plus déplorable qu’il n’a jamais été jeune. […] Je ne sais quel jeune gentilhomme on plaignait d’avoir été blessé dans une partie de chasse, et qui répondit : « C’est toujours un coup de fusil. » Voilà ce qu’éprouvait la jeunesse parisienne de toutes les classes, qui, pendant deux jours et livrée à elle-même, harcela les militaires avec une tactique et une audace dont ceux qui n’en ont pas été les témoins n’auront jamais une juste idée.
Levallois ; car pour les détails de ce triste amour du grand Corneille vieillissant et dédaigné pour le jeune Racine, beau alors comme le jour à son aurore et qui s’élançait dans la gloire, nous pourrions en suivre la trace dans les œuvres même de Corneille, à la piste de ses plus beaux vers. […] Que le Corneille des jeunes années eût aimé Marie Courant, comme Byron aima Marie Chaworth, et ne fût pas plus heureux que Byron, car Marie Courant épousa un je ne sais qui, comme Marie Chaworth, c’est un malheur que la jeunesse — cette belle Hercule de la jeunesse, qui porterait le ciel sur ses épaules, s’il y tombait ! — peut facilement supporter ; mais aimer quand la vieillesse est venue, quand le cœur, selon la loi vulgaire applicable aux créatures humaines, devrait être froidi et se sent jeune encore, par le fait de la loi d’exception qui s’applique aux créatures supérieures, c’est, à coup sûr, le malheur suprême, et Corneille, le sévère, le majestueux, le Romain Corneille, l’a connu ! Attendrissement inattendu qui vous prend en regardant cette figure d’une si mâle expression de génie qu’il semble qu’on ne l’a jamais vue jeune, quoi qu’elle l’ait été… et quand le grand Corneille est toujours, plus ou moins, le bonhomme Corneille !
M. de Choiseul plaça le jeune Saint-Martin dans le régiment de Foix. Ce régiment, par le plus grand des hasards, se trouva le seul des deux cents régiments de France où le jeune officier pût rencontrer la veine mystique après laquelle il aspirait vaguement. […] C’était en 1765, quelques jours après mon arrivée dans le régiment : je n’étais pas très jeune, il me distingua entre mes camarades et vint à moi sur la place du château Trompette. […] Qu’on se figure le jeune Saint-Martin, âgé de vingt-trois ans, à cette date où il devint l’innocente proie d’une doctrine secrète. […] Les femmes du temps ne s’épargnaient pas à dire à ce jeune mystique « qu’il serait aimable s’il le voulait ».
La jeune noblesse, en particulier, se piquait de marcher en avant et de sacrifier de plein gré ce que nul, en fait, ne lui contestait à cette heure et ce que cette bonne grâce en elle relevait singulièrement. […] Les études sérieuses et positives auxquelles dut se livrer à l’instant le jeune colonel devenu diplomate, témoignaient des ressources de son esprit et marquèrent pour lui l’entrée des années laborieuses. […] Aimable, jeune, empressé de plaire, il était naturel que M. de Ségur traversât à un moment l’idée auguste et mille fois conquérante. […] Quinze jours auparavant, un matin, sur son canapé, quatre vieillards étaient assis, lui, le général La Fayette, le général Mathieu Dumas et M. de Barbé-Marbois ; le plus jeune des quatre était septuagénaire ; ils causaient ensemble de la situation politique et de leurs craintes, des révolutions qu’ils avaient vues et de celles qu’ils présageaient encore. C’était un spectacle touchant et inexprimable pour qui l’a pu surprendre, que cet entretien prudent, fin et doux, que ces vieillesses amies dont l’une allait être bien jeune encore, et dont aucune n’était lassée.
Cependant, pour inventer, à la fin du dix-huitième siècle, parmi tous ces fades jeux d’esprit où achevait de s’énerver et de se perdre l’art des vers, une poésie jeune, fraîche, parfumée, qui nous transporte au milieu de vrais champs et nous ramène en nous-mêmes ; pour faire apparaître, parmi toutes ces fleurs de papier peint, un si charmant bouquet de fleurs naturelles, il fallait plus que les grands sentiments d’André Chénier, plus que sa raison supérieure ; il fallait ce qui peut s’appeler du même nom en religion et en poésie, il fallait la grâce. […] Les premiers goûts poétiques d’André Chénier furent pour le bucolique : Vous savez si toujours, dès mes plus jeunes ans, Mes rustiques souhaits m’ont porté vers les champs. […] Aussi, quels chefs-d’œuvre que le Jeune Malade, le Mendiant, l’Aveugle, et, dans un cadre plus restreint, Lydé, Hylas, la Jeune Tarentine ! […] De même que Virgile a vu Vénus, sous les traits d’une nymphe des forêts, apparaissant à Enée, et parfumant les airs de l’ambroisie qui s’exhale de sa chevelure, André Chénier a vu du bois voisin l’aimable manège des Naïades qui entraînent le jeune Hylas En un lit de joncs frais et de mousses nouvelles. Quand la mère, dans le Jeune Malade, invoque le dieu à l’arc d’or, nous nous associons à sa prière.
D’autres disent qu’il ressentit comme une injure la victoire du jeune Sophocle remportant un prix contre lui, Cette jalousie n’a rien qui nous choque. […] Entre les mains de son jeune rival, la tragédie s’était détachée des liens du lyrisme ; elle se pliait aux mouvements et aux variétés de la vie, le nœud dramatique s’était resserré : il accepta ce terrain nouveau. […] Un siècle tient en effet dans cet intervalle, Athènes va vite ; destinée à mourir jeune comme Achille, elle a ses « pieds légers », son rapide élan. La carrière que d’autres peuples mettent des âges à parcourir, sa jeune génération, partie de Salamine, la franchit d’un bond. […] En ce temps-là, les dieux jeunes et beaux, éloquents et nobles qui peuplent les poèmes et les sculptures helléniques, n’existaient encore qu’à l’état brut.
Le futur historien de l’Empire romain était fort jeune lui-même alors ; son père l’avait envoyé à Lausanne pour y refaire son éducation et se guérir « des erreurs du papisme », où le jeune écolier d’Oxford s’était laissé entraîner. […] Mais à peine eut-il vu chez Mme de Vermenou la jeune personne qu’elle amenait de Suisse, qu’il sentit son choix changer d’objet, et ce fut Mlle Curchod qui, après quelques mois de séjour à Paris, devint Mme Necker (1764). […] Dans une lettre où elle s’excuse de ne pouvoir leur présenter deux jeunes Zurichois, elle nous les montre ne pouvant se contraindre dans leurs propos, travaillant le matin dans leur cabinet, puis causant tout le reste du jour : Le matin est consacré à l’étude, et ils ont une si grande liberté de penser, qu’ils ne peuvent se résoudre à rencontrer un visage inconnu dans les maisons qu’ils fréquentent ; car qui dit liberté de penser, sous-entend un désir violent de parler ; j’en vois quelques-uns, et heureusement leurs mœurs, qui sont très honnêtes, corrigent l’impression de leurs principes, sans quoi il vaudrait mieux renoncer à ce genre de société. […] Il y met parfaitement en lumière les deux traits essentiels qui se croisaient en elle et qui la caractérisent, la complication de l’esprit et la rectitude du cœur : Étrangère aux mœurs de Paris, Mme Necker n’avait aucun des agréments d’une jeune Française. […] Aussi vive et aussi impétueuse que sa mère était contenue et prudente, s’agitant à tous les souffles du siècle, et possédée d’un génie qui allait s’aventurer dans bien des voies, elle étonnait, elle inquiétait cette mère si sage, et elle lui suggérait cette pensée involontaire : « Les enfants nous savent ordinairement peu de gré de nos sollicitudes : ce sont de jeunes branches qui s’impatientent contre la tige qui les enchaîne, sans penser qu’elles se flétriraient si elles en étaient détachées. » M.
Ce manque de culture générale sera le principal défaut des jeunes écoles. […] Et s’il nous arrive dans l’exubérance de notre jeune foi de prendre à notre insu des postures d’apôtres, l’on voudra bien nous pardonner, considérant que nos exagérations ne servant pas notre propre gloire ne peuvent provenir d’un hypocrite calcul mais plutôt d’un débordement de nos bonnes volontés. […] Marc Sangnier et ses amis du Sillon d’un autre, s’opposent les jeunes rédacteurs de la Petite République, de l’Aurore, des Pages Libres, en politique et en littérature. […] Qu’il vienne, le maître de la pensée et du verbe, la jeune âme française lui obéira et le suivra. […] 1º L’ignorance encyclopédique des jeunes écrivains, leur manque de culture générale.
La jeune Romaine y essayait ses premiers pas et ses premiers sourires. […] Nous sortions rêveurs de la soirée, promenant aux clartés de la lune, dans la rue de la Paix, l’image encore dansante, aux sons prolongés de l’orchestre, de cette figure de jeune Romaine sur un camée de Pompéia. […] Je n’aurais jamais imaginé que la jeune France pût vouloir la paix à tout prix, et qu’elle ne jetât par la fenêtre les ministres qui lui mettent un commissaire anglais à Bruxelles et un caporal autrichien à Bologne. […] « Après vingt-cinq ans », lui écrivait le jeune Hugo qui s’éblouissait alors de sa propre splendeur, « après vingt-cinq ans, il ne reste que les grandes choses et les grands hommes : Napoléon et Chateaubriand. […] Je ne l’ai connue que par ses amis et je ne l’ai admirée que par sa fille, madame la duchesse de Rauzan, très jeune femme alors, en qui sa mère semblait, dit-on, revivre.
La jeune comtesse Héléna G***, fille du prince G*** des États-Romains, était veuve d’un officier supérieur des armées italiennes, mort de ses blessures en Espagne. […] « Il ne faut pas le lui faire lire, dit le canonico : il est trop jeune, il y a trop d’amourettes, trop d’Alcine, trop de Zerbin, trop d’Angélique, trop de Médor. […] À son aspect, des assassins, prêts à immoler une jeune et belle victime, s’enfuient en laissant leur crime inachevé. […] Elle aimait secrètement un jeune chevalier italien accompli, venu à la cour de son père avec son frère, et comblé de faveurs par la famille royale d’Écosse. […] Elles continuèrent à jouer ainsi l’une avec l’autre devant moi, comme une jeune brebis avec son agneau devant un enfant qui les contemple.
Tel était le sentiment qu’inspirait le jeune Cicéron aux enfants d’Arpinum. […] Tel était l’état de la république romaine quand le jeune Cicéron revêtit la robe virile pour prendre son rôle de citoyen, d’orateur, de magistrat sur la scène du temps. […] Une femme illustre, maîtresse d’un des jeunes patriciens associés au complot, court dans la nuit avertir Cicéron de fermer le lendemain sa maison aux sicaires. […] Clodius était ami du jeune César. […] Éprise du génie et de la renommée de son second père, cette jeune Romaine l’aima et en fut aimée avec une passion qui effaça la distance des années.
On se borna à me faire poursuivre ces études classiques, sans but déterminé, qui sont le premier aliment de nos intelligences et l’exercice de nos jeunes facultés. […] Voici comment, sous le nom de Jocelyn, j’exprimais plus tard en vers moins novices ces inexprimables extases qui s’élèvent de l’âme jeune à Dieu. […] Par quelle inconcevable magie ce vieil astre, qui s’endort fatigué et brûlant dans la poudre du soir, est-il dans ce moment même ce jeune astre qui s’éveille humide de rosée, dans les voiles blanchissants de l’aube ? […] L’approche de la mort, qui attendait le poète à la porte de sa prison sur l’échafaud, avait changé le diapason de ce jeune Grec en diapason moderne. […] Voilà le secret de cette élégie tragique de la Jeune Captive, qui ne ressemble en rien à cette famille d’élégies grecques que nous avons lues plus tard dans ses œuvres.
Racine et Despréaux accompagnent à merveille le règne de Louis XIV dans toute sa partie jeune, brillante, galante, victorieuse ou sensée. […] Louis XIV, jeune encore, le soutint dans ses tentatives hardies ou familières, et le protégea contre tous. […] Mascarille était encore assez jeune et garçon, Sganarelle est essentiellement marié. […] Shakspeare, jeune, inconnu encore, attendait dans la chambre d’une auberge l’arrivée de lord Southampton, qui allait devenir son protecteur et son ami. Il écoutait en silence le poëte Marlowe, qui s’abandonnait à sa verve bruyante sans prendre garde au jeune inconnu.
C’est au milieu de ce quatrième acte, que sa belle maîtresse vient à lui préférer un jeune Anglais, parent de ce sir John Bikcrstaff qui n’a que trois millions de rente. […] C’est une bonne fortune pour nos jeunes poètes. […] Voulez-vous absolument que vos contemporains parlent de vous tandis que vous êtes jeune ? […] Depuis la Charte, lorsqu’un jeune d’entre dans un salon, il y fait naître un sentiment de malveillance ; lui-même est embarrassé. […] Napoléon affublé du manteau impérial en 1804 n’était plus le jeune général de 1796 qui cachait sa gloire sous la redingote grise qui sera son costume dans la postérité.
Une nation si jeune, si vive, si exaltée, qui dans ce moment fait une litière d’épines au-dessus des roses qu’elle veut étouffer, tiendra-t-elle des engagements de manège ? […] J’étais victorieux, aimé et jeune ! […] Un jour qu’il était allé à Schönbrunn où était le jeune roi de Rome, l’enfant, à qui le vieux maréchal (car le prince de Ligne avait ce titre) agréait beaucoup, se mit à jouer aux soldats devant lui ; le maréchal se prêta au jeu et commanda la manœuvre. […] Un jour qu’il avait reçu un de ces affronts comme la vieillesse la plus aimable n’en saurait éviter lorsqu’elle s’obstine à vouloir être toujours jeune, il lui échappa, à lui si bienveillant, quelques paroles contre la jeunesse : « Mon temps est passé ; mon monde est mort… Mais enfin quel est donc aujourd’hui le mérite de la jeunesse pour que le monde lui prodigue ainsi toutes ses faveurs ? » Ce mérite, c’était simplement d’avoir le sourire et d’être jeune à son tour.
Sur la fin de l’année 1543, M. de Botières, qui commandait un peu mollement en Piémont, fut remplacé par le comte d’Enghien, jeune prince de qui l’on attendait beaucoup et qui rendit à l’armée de vives espérances. […] C’est chose trop importante pour la remettre à la cervelle d’un jeune Gascon. » Par parenthèse, Montluc avait au moins quarante ans alors et n’était pas plus jeune que bien des hommes mûrs. […] » En sortant de la chambre du conseil, n’oublions pas que Montluc se voit entouré des meilleurs de la jeune noblesse, et qui brûlent, s’il y a combat, de courir en volontaires pour y être à temps ; il leur répond moitié en français, moitié en gascon, et les conviant de se dépêcher s’ils veulent « en manger » et être de la fête. […] Ce jeune prince était si fort au désespoir, « que deux fois il se donna de la pointe de l’épée dans son gorgerin, se voulant offenser soi-même. […] Ce qui est touchant, c’est la tristesse de M. d’Enghien, ce jeune vainqueur, lorsque Montluc l’aborda ; il avait encore dans le cœur et sur le front une ombre de l’impression désespérée qui l’avait si longtemps et si cruellement oppressé.
» Le sans concours était une gentillesse universitaire qui réussit beaucoup ; les jeunes candidats sont peu disposés, en général, à se permettre de ces plaisanteries quand ils sont sous le couteau. […] Nous nous soucions peu maintenant de délivrer les princesses des mains des enchanteurs, peu nous importe Dulcinée ; mais nous voulons tous être gouverneurs de Barataria…. » Dans la bouche d’un jeune professeur, tout cela était à sa place, d’une justesse convenable, d’un tour neuf et piquant. […] Dans le premier, il commit une faute par excès de préoccupation morale : à force de vouloir éviter la chronique scandaleuse, il se jeta dans la chronique vertueuse et raconta comment des demoiselles de sa connaissance, millionnaires, prenaient leurs maris parmi des jeunes gens distingués et sans fortune, précepteurs de leurs jeunes frères. […] Ceux même qui, tout en lui accordant beaucoup, mesuraient leur suffrage, ne furent pas des derniers à sentir quelle perte c’était pour la littérature que celle de ce talent jeune, déjà maître en bien des parties, et qui, sur le reste, était en travail, en effort constant et en progrès. […] Soyez un homme pur, moral, régulier, adonné dès vos jeunes ans à tous les justes devoirs, à toutes les bonnes et louables habitudes, à tous les nobles exercices qui entretiennent et qui préservent la santé de l’esprit, et vous êtes frappé dans la force de la jeunesse ; vous l’êtes comme ne l’est pas toujours celui qui s’est livré à tous les excès, qui a usé et abusé de tout !
Le jeune Louis XIV donne, durant cette maladie, des marques de son courage et de sa constance, ce qu’on ne cessa de voir en lui à tous les âges. […] Voici un portrait peu connu de Louis XIV jeune, qui, au milieu de tout ce qu’il contient de flatteur, nous atteste la vérité en passant : « Le roi est grand, les épaules un peu larges, la jambe belle, danse bien, fort adroit à tous les exercices. […] On a beau être roi, on est homme, on est jeune homme et sujet à tous les maux et à toutes les disgrâces des jeunes fils d’Adam. Le bon Vallot paraît tout épouvanté, au mois de mai 1655, de découvrir une incommodité du jeune roi qui lui paraît singulière, presque surnaturelle, et que la description qu’il en fait nous montre fort commune au contraire et des plus simples dans son genre. […] Louis XIV jeune n’était pas un valétudinaire, mais il avait une santé qui, en taillant sans ménager dans le plein de la vie, était avertie bientôt et punie des excès, et qui acquérait peu à peu des infirmités durables.
Il faut que les choses en effet aient bien marché, que les générations se soient bien renouvelées, et que quelques-uns des nouveaux et spirituels rédacteurs des Débats soient bien jeunes (heureux défaut !) […] Il y a trente-trois ans environ de cela : les messieurs Bertin, très attentifs à tout ce qui se produisait et s’annonçait, même de hasardé et de contesté, avaient l’œil sur la jeune école dite romantique. […] Bertin de Vaux, à table, silencieux observateur, et qui nous regardait courir et nous répandre en discours, comme de jeunes chevaux lâchés. […] Il y eut en effet au xviie siècle une génération puissante et forte, et en quelque sorte privilégiée : c’est celle qui ayant vu la fin du régime de Richelieu, de ce despotisme patriotique qu’on détesta de près sans le comprendre, se trouva jeune encore pour jouir de la régence d’Anne d’Autriche, et qui ensuite assista ou prit part à la Fronde : elle put avoir elle-même ses illusions, elle fit ses fautes, elle commit bien des actes odieux ou ridicules ; elle les vit passer du moins et les toléra ou y trempa ; mais elle y gagna de l’expérience, et, quand l’autorité de Louis XIV fut venue enfin tout pacifier et tout niveler, elle conserva quelque temps sous ce règne égal et superbe un vif ressouvenir du passé, qui lui permit de faire tout bas des comparaisons et des réflexions dont les écrits, indirectement, profitèrent. […] Le ci-devant Roi des halles, chef des importants et des frondeurs, le prince du sang, victorieux et altier, sans mesure et sans scrupule, qui avait songé à détrôner le jeune roi, tout cela redevenu domestique et respectueux et humble, c’était à faire louer Dieu de la paix présente, ajoute la sage Mme de Motteville.
C’est un doux et pur sujet d’étude que la figure et la vie de Marie Leckzinska, et l’on comprend qu’une jeune femme de mérite s’y soit arrêtée. […] On se résolut à rompre l’union de famille contractée avec l’Espagne, à éconduire et à renvoyer l’Infante beaucoup trop jeune. […] Le malheur de la reine (qu’on hésite à appeler la jeune reine, puisqu’elle avait six ou sept ans de plus que le roi), ce fut de voir tomber, presque en arrivant, le prince ministre qui l’avait appelée, à qui elle devait reconnaissance, et de voir succéder celui qui la craignait avec une jalousie de vieillard et qui devait tout faire pour établir une glace entre les époux. […] La reine ne déplaisait pas au jeune roi : plutôt suffisante que charmante, il n’était pas homme encore à faire des comparaisons. […] La reine avait de la tendresse et une passion des plus vives pour son jeune époux ; le roi, même dans le temps où il se contenait dans le devoir, ne lui marquait que peu de tendresse ; ces froideurs d’alors, nous assure-t-on, étaient moins éloignement pour la reine que timidité de la part du roi.
Bref (puisqu’il faut articuler le mot fatal), le jeune Siècle, ou du moins ce qui se nommait le jeune Siècle encore il y a dix ans, a aujourd’hui, l’un portant l’autre, quarante ans à peu près : grand âge climatérique pour les tempéraments littéraires comme pour les autres. […] C’est l’âge ou jamais, on en conviendra, pour l’ensemble des générations suffisamment contemporaines qui se sont longtemps laissé intituler le jeune Siècle, de prendre un dernier parti. […] Un des plus clairs résultats des doctrines vagues qui se rattachent au mot de Saint-Simonisme a été négatif, comme cela arrive souvent : elles ont eu pour effet de neutraliser, de couper chez beaucoup de jeunes esprits la fièvre flagrante du libéralisme, et de les placer dans une habitude plus calme, plus pacifique, plus ouverte aux idées et aux combinaisons véritablement sociales. […] Qu’ils suivent chacun leur ligne pour les œuvres individuelles, et consentent à coexister dans de certains rapports de communauté et de confins dans les jugements ; qu’on pratique ainsi la vraie égalité et indépendance, l’estime mutuelle du fond avec les réserves permises : voilà des mœurs littéraires de juste et saine démocratie, ce semble, et qui seraient d’un utile exemple à offrir aux jeunes hommes survenants, lesquels ne trouvent rien où se rattacher, que l’ambition illimitée égare ou déprave, dont quelques-uns tombent du second jour aux vices littéraires, les plus bas de tous, et dont on voit quelques autres plus généreux rôder dans la société comme de jeunes Sicambres, des Sicambres plume en main et sans emploi. […] Et certes, un sentiment moral et patriotique, ami des lettres, ami du pays qui a été si offensé dans cette chère portion de lui-même, est bien fait aussi pour devenir une inspiration à l’égal de quelque conviction plus jeune et plus absolue.
À propos de cette manie encyclopédique qui la posséda de tout temps et qui ne fit que s’accroître avec les années, un de ses spirituels amis disait : « Elle se réserve de refaire l’Encyclopédie dans sa vieillesse. » En attendant, jeune mariée et à peine enceinte, vite elle écrivait un livre intitulé Réflexions d’une mère de vingt ans, quoiqu’elle n’en eut que dix-neuf. […] Elle se trouva bientôt liée avec la jeune et facile princesse par une véritable amitié, et il fut décidé entre elles qu’elle deviendrait la gouvernante de ses filles, et (contre l’usage) leur gouvernante dès le berceau. […] À la promenade, un pharmacien botaniste suivait les jeunes princes pour leur apprendre les plantes. […] Un autre inconvénient encore, c’est de ne pas laisser aux jeunes esprits qui en sont le sujet un seul quart d’heure pour rêver, pour se développer en liberté, pour donner jour à une idée originale ou à une fleur naturelle qui voudrait naître. […] À cette époque, le jeune duc d’Orléans commençait à revenir de sa soumission absolue aux idées de son gouverneur.
» Mais ce jeune roi, âgé de vingt-deux ans, n’attendait en réalité personne, et Fouquet débutait dans ce nouveau règne par la plus grande des illusions, s’il se croyait nécessaire. […] Le jeune roi était prévenu contre lui, ou plutôt éclairé sur lui. […] À vingt ans, le jeune Fouquet eut une charge de maître des requêtes ; à trente-cinq ans, il était procureur général auprès du parlement de Paris. […] Girardin, le plus hardi des hommes d’affaires, avait promis deux millions d’avance, mais il était malade à l’extrémité ; Monnerol le jeune, qui ne lui cédait ni en crédit ni en courage, pour quelque indisposition était aux eaux de Bourbon, etc. […] Si un tel plaidoyer, au lieu d’être simplement imprimé, avait été prononcé devant Louis XIV, le jeune roi n’aurait pu y résister, je le crois, et, à cet endroit-là, il lui serait arrivé comme à César, le jour où l’arrêt de condamnation de Ligarius échappa de ses mains.
Necker, le long séjour qu’il fit à Paris, jeune et non marié encore, Mme de Staël a pu dire : « Quelquefois, en causant avec moi dans sa retraite, il repassait ce temps de sa vie dont le souvenir m’attendrissait profondément, ce temps où je me le représentais si jeune, si aimable, si seul ! […] Il y a une inspiration antique dans cette figure de jeune femme qui s’élance pour parler à un peuple, le pied sur des décombres tout fumants. […] Nous tous du jeune siècle, nous jugeons Ferney en descendant de Coppet. […] Rocca lui rendit encore un peu de l’illusion de la jeunesse ; elle se laissait aller à voir dans le miroir magique de deux jeunes yeux éblouis le démenti de trop de ravages. […] L’influence de pensée que par cet ouvrage Mme de Staël exerça sur le jeune parti libéral philosophique, sur celui que la nuance du Globe représenta plus tard, fut directe.
que de finesse et de grâce dans la scène où Lélio se trouve pour la première fois en tête-à-tête avec la jeune Alezia ! […] C’est l’hommage d’un écrivain qui, parmi les jeunes, est un de ceux qui l’ont le plus et le mieux aimée. […] Vous aviez l’air de ne pas vous en douter, vous étiez si jeune ! […] C’est contre cette école que George Sand use les dernières armes de sa dialectique toujours jeune malgré l’âge. […] Un jeune graveur malade, recueilli chez elle.
Le jeune prince avait, d’ailleurs, une obstination douce contre laquelle aucune autorité ne pouvait rien. […] dit, en une charmante page, la jeune femme ; faites-en l’essai et écrivez-lui ceci. […] La plupart, mal atteints par les jeunes apprentis bourreaux, n’étaient pas tués sur le coup. […] Waliszewski nous y montre la jeune cour, la lutte pour le trône et la victoire qui le donna à Catherine. […] La fable : le Vieillard et les trois Jeunes Hommes est un beau soir d’octobre.
Il y a beaucoup de finesse dans cette observation ; il n’est pas dans la nature qu’une mère préfère un époux mort à un fils vivant ; mais la fidélité aux cendres d’un mari est si touchante dans une jeune veuve ! […] Les critiques se sont élevés contre un amant brutal, qui dit à une jeune veuve : Épouse-moi, ou ton fils est mort. […] Ne désirez-vous rien de plus mâle, de plus sûr, de plus animé dans les expressions de ce jeune Ottoman qui se voit entre Roxane et l’empire, entre Atalide et la mort ? […] Quel contraste que celui d’un vieux guerrier sombre et cruel, à côté d’une jeune beauté douce et modeste ! […] Il eût été plus conforme aux bienséances qu’elle fit prier, par Arbate, le jeune prince de passer dans son appartement.
Il est vrai que voilà bien des années déjà qu’il ne s’est point produit d’œuvre poétique qui ait appelé à un haut degré l’attention du grand public et qui lui ait fait saluer une jeune gloire. […] Il ne faut pas laisser lire notre douleur Par les indifférents dont le regard épie Tout ce qui sert de proie à leur sarcasme impie : Si jeune, ô mon enfant, tu l’as compris déjà ! […] Une jeune Espagnole aux grands yeux pénétrants ; Et sa voix se mêlait à la voix des rafales Qu’on entendait mugir au-dessus des torrents… Si j’osais conjecturer, je dirais que par toutes ces figures diverses qu’a évoquées autour d’elle l’imagination de l’ouvrière-poète, elle s’est plu à multiplier, comme dans un miroir légèrement enchanté, des images d’elle-même, et elle n’a changé que juste ce qu’il fallait pour pouvoir dire : Ce n’est pas moi !
Une femme, jeune, jolie, et qui paraît n’avoir pas été du tout une mauvaise fille, est morte ensanglantée par deux opérations chirurgicales. […] Ce qu’avaient fait cette jeune femme qui est morte et cet homme qui s’est suicidé, est qualifié de crime et par la morale religieuse et par le Code. […] Corollairement, et pour enlever à ces meurtres, s’il se peut, un reste d’excuse, il faudrait qu’il devînt « de bon ton » de n’être pas dur aux filles-mères, — ni même aux jeunes veuves du monde qui se trouvent subitement « dans l’embarras ».
. — La Jeune Belgique. […] Charles Frémine : Vieux airs et Jeunes chansons. […] Victor Pittié : Les Jeunes Chansons.
Stanislas de Guaita Je trouve divertissantes les Muses gamines du jeune ami et successeur de Valade, M. […] Rodolphe Darzens Il débuta par une plaquette, l’Éternelle chanson (1884), qui contient des triolets d’une jeune et saine gaîté ; puis parurent les Horizontales (1884), recueil de parodies humoristiques ; enfin Pentecôte (1885), poème rustique plein de saveur.
À quelques pas de moi, une jeune femme turque pleurait son mari sur un de ces petits monuments de pierre blanche dont toutes les collines autour de Jérusalem sont parsemées ; elle paraissait à peine avoir dix-huit ou vingt ans, et je ne vis jamais une si ravissante image de la douleur. […] Ces trois femmes, toutes les trois jeunes et belles aussi, aux formes sveltes et au profil aquilin des nègres de l’Abyssinie, étaient groupées dans des attitudes diverses comme trois statues tirées d’un seul bloc. […] Quand les sanglots de la jeune veuve arrivaient jusqu’aux enfans, ceux-ci se prenaient à pleurer, et les trois esclaves noires, après avoir répondu par un sanglot à celui de leur maîtresse, se mettaient à chanter des airs assoupissants et des paroles enfantines de leur pays pour apaiser les deux enfants. […] Mais nous ne sommes pas à ces temps : le monde est jeune, car la pensée mesure encore une distance incommensurable entre l’état actuel de l’humanité et le but qu’elle peut atteindre ; la poésie aura d’ici là de nouvelles, de hautes destinées à remplir. […] Une douleur que vos vers ont pu endormir un moment, un enthousiasme que vous avez allumé le premier dans un cœur jeune et pur, une prière confuse de l’âme à laquelle vous avez donné une parole et un accent, un soupir qui a répondu à un de vos soupirs, une larme d’émotion qui est tombée à votre voix de la paupière d’une jeune femme, un nom chéri, symbole de vos affections les plus intimes, et que vous avez consacré dans une langue moins fragile que la langue vulgaire, une mémoire de mère, de femme, d’amie, d’enfant, que vous avez embaumée pour les siècles dans une strophe de sentiment et de poésie !
L’abbé de Saint-Pierre s’était fort lié, dans son cours de philosophie au collège des jésuites de Caen, avec un de ses jeunes compatriotes, Varignon, qui allait s’illustrer dans la géométrie et qu’Euclide conduisit directement à Descartes. […] Ces camarades, qu’il ne nomme pas, outre Varignon, l’ardent géomètre, c’était quelquefois l’abbé de Vertot, Normand aussi et d’une imagination vive, qui venait les visiter et loger sous leur toit ; c’était ce penseur fin et neuf, et alors très hardi, Fontenelle : J’étais leur compatriote, nous dit celui-ci, et j’allais les voir assez souvent, et quelquefois passer deux ou trois jours avec eux : il y avait encore de la place pour un survenant… Nous nous rassemblions avec un extrême plaisir, jeunes, pleins de la première ardeur du savoir, fort unis et, ce que nous ne comptions peut-être pas alors pour un assez grand bien, peu connus. […] Que d’idées devaient en effet s’essayer, s’agiter dans ce jeune monde, et de celles qu’on n’est pas accoutumé à attribuer au xviie siècle ! […] Ainsi de tout temps : à côté et au-dessous des réputations établies et qui font illusion au gros du monde en se prolongeant, il y a les jeunes groupes fervents et féconds, les cénacles cachés qui seront le règne et la pensée du lendemain. […] La Bruyère fut surtout frappé chez le jeune abbé du manque absolu de tact, de la confiance à se mettre en avant soi et ses idées, de la distraction sur tout le reste, et de ce parfait oubli des nuances sociales.