/ 2957
657. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits de Fénelon. (1850.) » pp. 1-21

Tout ce qui passait de distingué à Cambrai (et presque toute l’armée y passait à chaque campagne, durant ces guerres des dernières années de Louis XIV) voyait Fénelon, était traité par lui ; et, avec cet attrait particulier qui était le sien, il lui restait, de ces connaissances de passage, plus d’une liaison durable. […] La mort du duc de Beauvilliers (31 août 1714) acheva de briser les derniers liens étroits qui rattachaient Fénelon à l’avenir : « Les vrais amis, écrivait-il en cette occasion à Destouches, font toute la douceur et toute l’amertume de la vie. » C’est à Destouches aussi qu’il écrivait cette admirable lettre, déjà citée par M. de Bausset, sur ce qu’il serait à désirer « que tous les bons amis s’entendissent pour mourir ensemble le même jour », et il cite à ce sujet Philémon et Baucis ; tant il est vrai qu’il y a un rapport réel, et que nous n’avons pas rêvé, entre l’âme de Fénelon et celle de La Fontaine. […] Dans sa dernière lettre du 1er décembre 1714 (c’est-à-dire un mois avant de tomber malade de sa maladie finale), il plaisantait encore Destouches sur les jolis repas auxquels le chevalier s’adonnait, au risque de s’en repentir : « C’est à Cambrai, dit-il, qu’on est sobre, sain, léger, content et gai avec règle. » Le ton général de ces lettres aimables est marqué dans ces paroles mêmes. […] J’ai eu l’an dernier ce bonheur ; j’avais comme oublié le Télémaque, et j’ai pu le relire avec la fraîcheur d’une nouveauté.

658. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mme du Châtelet. Suite de Voltaire à Cirey. » pp. 266-285

Non pas précisément ; mais je voudrais aider avant tout à maintenir, à renouer la tradition, sans laquelle rien n’est possible en bonne littérature ; et, dès lors, quoi de plus simple que de tâcher de renouer cette tradition au dernier anneau ? […] S’il vous reste encore quelque pitié pour moi, écrivez-lui ; il ne voudra point rougir à vos yeux : je vous le demande à genoux… Si vous aviez vu sa dernière lettre, vous ne me condamneriez pas ; elle est signée, et il m’appelle Madame ! […]  » La mémoire de Mme du Châtelet avait besoin de la publication de ces lettres pour se réhabiliter un peu du tort célèbre de cette infidélité dernière. […] Mais les cajoleries du roi de Prusse, que Mme du Châtelet avait conjurées de son mieux tant qu’elle avait vécu, revinrent le tenter ; il n’y résista plus, et il alla faire, à l’âge de cinquante-six ans, cette triste et dernière école de Prusse, après laquelle seulement il reparut moins agité et, en apparence, un peu plus sage.

659. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Rulhière. » pp. 567-586

J’ai osé, dans ma dernière, maladie, écrire une lettre à Nicolas Despréaux ; vous avez bien mieux fait, vous écrivez comme lui. […] Dans l’état d’études plus avancées où l’on est aujourd’hui sur le xviie  siècle, on est amené à reconnaître que cette fatale révocation, dont la dévotion finale de Louis XIV fut le moyen et l’occasion, préexistait depuis longtemps, ou du moins flottait dans l’esprit de ce prince à l’état de projet politique, et qu’il ne fit en dernier lieu que réaliser un vœu ancien, dans lequel il fut insensiblement assisté et comme encouragé par une complicité presque universelle. […] Rulhière, chargé en 1768 d’écrire l’histoire de l’anarchie de Pologne, anarchie qui commençait à éclater à cette époque, mais dont les suites se prolongèrent jusqu’au dernier démembrement de la Pologne, consommé en 1797, avait affaire à un sujet qui n’était pas défini, qui était, si l’on peut dire, en cours d’exécution, et qu’il ne pouvait par conséquent embrasser dans son ensemble. […] Lorsqu’il aborde enfin sa vraie matière, qui commence avec l’élection du roi Stanislas Poniatowski, Rulhière a l’inconvénient d’avoir à se prononcer sur des caractères vivants qui n’ont pas eu leur entier développement, sur des personnages qui n’ont pas donné leur dernier mot.

660. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

Il eut une dernière jouissance d’amour-propre, lorsque, le Théâtre-Français ayant repris son drame de La Mère coupable qu’il avait fait en 1791, il se vit appelé à grands cris et entraîné sur le théâtre, où il lui fallut paraître entre Molé, Fleury et Mlle Contat. […] Nous voudrions, par cette impression, effacer celle que laissent d’autres lettres publiques de Beaumarchais, écrites dans le même temps, et où il s’est oublié, par un dernier retour, à d’indignes irrévérences. […] Ce rire venait de source et circulait en quelque sorte à la ronde dans toute la famille Beaumarchais ; l’une de ses sœurs, Julie, non mariée, dans sa dernière maladie se chansonnait elle-même par de gais couplets des plus badins, auxquels chacun des assistants ajoutait le sien ; et Beaumarchais, relisant après la mort de sa sœur ce singulier testament, ajoutait de sa main, au bas, avec une naïveté de tendresse qui fait sourire : « C’est le Chant du Cygne de ma pauvre sœur Julie. » Il mourut lui-même à Paris, dans la nuit du 17 au 18 mai 1799, d’une attaque d’apoplexie, dit-on, que rien n’avait annoncée ; il s’endormit de la mort pendant son sommeil. […] Au fond, il a pour dieux Plutus et le Dieu des jardins, ce dernier tenant une très grande place jusqu’au dernier jour.

661. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

La correspondance de Ducis avec Bernardin, durant ces dernières années, est la plus engageante introduction à une étude sur Ducis ; je la mets de côté à dessein. […] Même lorsqu’il est le mieux traité et le plus choyé dans ses voyages à Paris, lorsque chacun le caresse et veut le retenir, Bernardin ne soupire pas moins après sa solitude champêtre ; il sent que la vie s’écoule, que ses dernières pages à achever le réclament, et il écrit alors naïvement à sa jeune femme : Je suis comme le scarabée du blé, vivant heureux au sein de sa famille à l’ombre des moissons ; mais, si un rayon du soleil levant vient faire briller l’émeraude et l’or de ses élytres, alors les enfants qui l’aperçoivent s’en emparent et l’enferment dans une petite cage, l’étouffent de gâteaux et de fleurs, croyant le rendre plus heureux par leurs caresses qu’il ne l’était au sein de la nature. […] Villemain, dans son rapport public du 19 août dernier, n’avait jugé à propos, par un coup de talent, de rendre un éclat inattendu à cette ancienne séance. […] Quelle émotion grave et presque terrible dans l’assemblée, lorsque le mélodieux orateur, comme le Nestor d’une autre Iliade, mais Nestor qui flattait au lieu d’avertir, avec sa voix encore si accentuée sous la faiblesse de l’âge, abordant le sujet inévitable, retraça les derniers prodiges du Conquérant, qu’il nommait le Libérateur… Puis est venue une citation du discours de Bernardin de Saint-Pierre sur l’aigle, — l’aigle impériale d’alors ; — et là-dessus l’habile orateur, toujours ému et comme entraîné par ses souvenirs, s’est de nouveau écrié : « À cette image hardie, nouvelle, qui semblait suspendre la foudre sur toutes les têtes, l’auditoire se souleva tout entier d’enthousiasme, et ces voûtes parurent s’abîmer au bruit des applaudissements. » — Le morceau achevé, avec tous ses contrastes et ses ironies, M. 

662. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Je choisirai d’habitude et de préférence quelques sujets dans la littérature française des deux derniers siècles (sans toutefois m’y enfermer, et sans exclure absolument les contemporains), et je parlerai aujourd’hui de l’auteur du Voyage d’Anacharsis, de l’abbé Barthélemy. […] Dans mes dernières années, j’ai été plus hardi à l’égard des ouvrages relatifs à la critique et à l’antiquité ; j’avais, par de longs travaux, acquis des droits à ma confiance. […] Elle semble quelquefois se rappeler ce qu’elle n’a jamais appris… » Mais j’aime mieux, pour donner de la duchesse de Choiseul une idée saillante, emprunter les portraits en miniature qu’en a laissés un pinceau moins élégant et moins peigné que celui de l’abbé Barthélemy, mais plus vif en images : Ma dernière passion, dit Horace Walpole, qui ne la connut que quelques années plus tard (en 1766), et, je crois, ma plus forte passion est la duchesse de Choiseul. […] Il était encore à Rome, et dans les derniers temps de son séjour, il avait envie d’une douzaine de petites figures de terre cuite qu’on avait récemment découvertes dans un tombeau de marbre ; mais on en demandait un prix exagéré.

663. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

Heureusement, un des caractères de la vérité est d’être inépuisable ; avec elle, les derniers mots ne sont jamais dits. […] V Son livre de la Douleur vient bien sous ma plume, dans un temps où les derniers philosophes de ce moment du siècle sont Schopenhauer et Hartmann ! […] Ensuite, c’est que même sa métaphysique sort à brûle-pourpoint d’une théodicée, et qu’elle n’est, en dernière analyse, qu’une théologie, dans une époque qui n’admet plus Dieu et où le naturalisme le plus grossier est toute la réalité, en philosophie, et tout l’idéal, en littérature ! […] À une époque où les dernières Philosophies sont des outrages insensés à l’intelligence humaine, si cette intelligence humaine n’était pas profondément et abjectement dégradée, — et dégradée au point d’admettre ces Philosophies ou au moins de les discuter, — Saint-Bonnet a grande chance, avec son livre de la Douleur autant qu’avec ses autres livres, de rester sans aucune influence sur le monde et de continuer autant que jamais, dans l’indifférence universelle, cette belle Harmonie de Lamartine : Le Génie dans l’obscurité.

664. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — II. (Fin.) » pp. 330-342

Dans un très bon chapitre du dernier tome, intitulé « Du déclin de la Ligue », l’historien en vient à un double portrait des deux chefs, du roi de Navarre et de Mayenne, et celui-ci, en cédant le pas au vainqueur, n’est pas du tout sacrifié : Le duc de Mayenne avait une probité humaine, une facilité et libéralité qui le rendait très agréable aux siens ; c’était un esprit judicieux et qui se servait de ses expériences, qui mesurait tout à la raison, un courage plus ferme que gaillard, et en tout se pouvait dire capitaine excellent. […] Un des plus beaux et des plus incontestables endroits de l’Histoire de d’Aubigné en sa dernière partie est la scène de Saint-Cloud et ce qui s’y passe aussitôt après la mort de Henri III (1589). […] Henri IV s’en irrita plus d’une fois ; d’Aubigné nous le dit dans ses Mémoires, et raconte même comment, en une dernière circonstance, il évita de bien peu la Bastille.

665. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Lettres de la mère Agnès Arnauld, abbesse de Port-Royal, publiées sur les textes authentiques avec une introduction par M. P. Faugère » pp. 148-162

Il fallut toute la grâce et les gentillesses de la mère Agnès pour l’apaiser, pour la faire revenir de sa bouderie ; il fallut surtout ce post-scriptum rassurant, — car Mme de Sablé, en enfant gâté, ne se contentait pas de la promesse qu’on ne ferait plus de bougie, elle disait : Vous en ferez, vous en avez besoin, je veux que vous en fassiez, je ne veux pas vous gêner, mais je m’en irai ; il fallait donc lui prouver qu’on en pouvait faire sans que l’odeur lui en arrivât : « Depuis ma lettre écrite, lui disait la mère Agnès dans les dernières lignes, nos sœurs ont été faire la ronde pour chercher un lieu, s’il en faut un absolument pour vous satisfaire ; elles en ont trouvé un dans les derniers jardins, tout à l’autre bout, proche l’apothicairerie. » — Le choix de ce lieu-là hors de toute portée tranquillisa peut-être Mme de Sablé jusqu’à nouvel ordre et nouveau caprice, jusqu’à nouvelle lune. […] Royer-Collard avait réduit ce coin de sa bibliothèque dans ses dernières années.

666. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET (La Confession d’un Enfant du siècle.) » pp. 202-217

M. de Musset avait aussi le mérite de ne pas trop se flatter ; le ton sincèrement modeste de ses dernières préfaces contrastait d’une manière frappante avec la façon cavalière et presque arrogante de ses débuts, et cette modestie si rare, qui accueillait la critique, s’accordait bien avec le dégagement de moins en moins contestable de son talent. […] Si l’auteur avait écrit ce premier chapitre (comme il convient aux préfaces) en dernier lieu et après son livre achevé, nul doute qu’il ne l’eût écrit tout différemment. […] Dans les dernières scènes entre Octave et Brigitte, après l’arrivée à Paris ; dans ce conflit pénible, fatigué, tantôt sourd et tantôt convulsif, d’une jalousie fantasque et d’un amour épuisé, j’ai été frappé d’un inconvénient.

667. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre I. Publicistes et orateurs »

Dans ces dix dernières années semble s’être achevée une évolution de l’éloquence politique, dont le commencement remonte presque aux débuts du régime parlementaire. […] Dans ces dernières années852, un orateur puissant s’est révélé en M.  […] Francisque Sarcey (né en 1828). sorti de l’École Normale en 1851. professeur de 1851 à 1858, puis journaliste, chargé de la critique dramatique au Temps depuis 1867, se fit remarquer par ses conférences dès les dernières années de l’empire. — Éditions : Souvenirs de jeunesse, in-16. 1884 ; Comment je devins conférencier, n-16.

668. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leconte de Lisle, Charles-Marie (1818-1894) »

. — Derniers poèmes (1895). […] Le mal du siècle, sous sa forme dernière, qui est le nihilisme moral, aura rencontré peu d’interprètes de cette âpreté d’accent. […] C’est lui qui a enseveli dans la pourpre celle à qui les Muses ont accordé leur dernier sourire, cette savante et chaste

669. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VII. Maurice Barrès et Paul Adam » pp. 72-89

On sort de la lecture du dernier de ses ouvrages, comme des précédents, assuré qu’il est le plus maître écrivain de langue française. […] L’œuvre du comte Tolstoï, suivant qu’on considère ses derniers ou ses premiers livres, est un exemple de ces deux genres. […] (Je dis imprimée et tomée, parce que des tirailleurs de ces dernières années les courts ouvrages à promesses sont nombreux, mais point les œuvres.

670. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre II » pp. 12-29

Cependant il est nécessaire de revenir sur les dix dernières années du règne de Henri IV, ainsi que sur la régence de Marie de Médicis, et de faire connaître avec détail les mœurs de la cour de 1600 à 1620, pour montrer clairement comment s’échappa de cette cour dissolue la grande exception qui donne naissance à une société de mœurs pures et d’esprits délicats, dont la filiation et les traditions sont venues jusqu’à nous, et dont l’existence a été illustrée par le respect des étrangers. […] Catherine de Vivonne était petite-fille, par sa mère, de Clarice Strozzi, parente de Catherine de Médicis ; elle était donc alliée des trois derniers Valois5, alliée aussi de Marie de Médicis, femme de Henri IV. […] Plusieurs écrivains, et en dernier lieu, M. 

671. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Montalembert orateur. » pp. 79-91

Cette admiration, indépendante du fond même, devenait aisément unanime chez tous ceux qui l’entendaient ; mais les preuves réitérées et diverses qu’il a données de sa puissance oratoire dans ces deux dernières années le classent définitivement parmi les maîtres de la parole. […] Depuis ses derniers discours, qui sont aussi les plus éloquents, M. de Montalembert en a fait l’épreuve ; il a mérité cet éloge, que M.  […] C’est ce même sentiment qui, dans son dernier discours sur les affaires de Rome (19 octobre), lui a fait proclamer avec amertume que le résultat le plus net de l’anarchie, ce n’était pas de détrôner quelques rois, c’était de détrôner la liberté : « Les rois sont remontés sur leurs trônes, s’est-il écrié douloureusement, la liberté n’est pas remontée sur le sien : elle n’est pas remontée sur le trône qu’elle avait dans nos cœurs. » Je n’ai rien à dire de ce dernier discours, qui retentit encore.

672. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — IV »

En dernière instance, il est apparu que la cellule, avec son noyau, n’était que le point central où se tenaient et duquel rayonnaient divers ferments en lesquels se concentre actuellement au regard scientifique la réalité vitale. […] Les vérités scientifiques nous apparurent les dernières venues parmi les créations de l’utilité intellectuelle, elles nous montrèrent aussi, sous leur aspect provisoire de vérités successives, leur valeur purement transitoire, leur caractère de moyen pour atteindre des conceptions nouvelles et des représentations plus complexes. Les vérités morales, c’est-à-dire celles qui, dans l’ordre vital, semblent aussi les dernières venues et se sont constituées, comme les vérités scientifiques, avec la collaboration ou tout au moins sous le regard de la conscience humaine, les vérités morales vont aussi nous laisser voir, malgré le masque rigoureusement dogmatique qu’elles affectent durant le temps de leur règne, leur caractère éphémère et leur rôle secondaire de moyens pour procurer des fins très différentes des buts vers lesquelles elles ordonnent de tendre.

673. (1901) La poésie et l’empirisme (L’Ermitage) pp. 245-260

On a pu croire qu’en ces dix dernières années la frénésie de lettres eût atteint à son paroxysme suprême et qu’elle ne dût désormais que décroître pour la paix, la joie, le salut des véritables écrivains qui font leur œuvre sciemment, légitimement, en silence. — Mais on a cru… parce qu’on espérait. — La politique nous valut une trêve qu’on rêva bienfaisante et qui ne fit en somme, qu’aggraver la confusion. […] Et enfin, comment nos aînés voici quinze ou vingt ans reçurent-ils des mains des derniers Parnassiens, le vers encore si plein naguère, si puissant et si varié de la grande Légende, des Poèmes Barbares, des Fleurs du Mal, en quel état ? […] Les jeunes combattants ne pouvaient se tromper sur la valeur des forces ennemies… Car il est temps de rendre à la poussée lyrique dont la clameur emplit ces quinze ou vingt dernières années, son sens réel et sa juste physionomie.

674. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre IV : Règles relatives à la constitution des types sociaux »

Telles sont la cité, agrégat de tribus, qui sont elles-mêmes des agrégats de curies qui, à leur tour, se résolvent en gentes ou clans, et la tribu germanique, avec ses comtés qui se subdivisent en centaines, lesquelles, à leur tour, ont pour unité dernière le clan devenu village. […] Chez ces dernières l’organisation à base de clans s’est maintenue, quoique effacée, jusqu’au terme de leur histoire, tandis que, à Rome, à Athènes, les gentes et les γένη cessèrent très tôt d’être des divisions politiques pour devenir des groupements privés. […] Il est de règle, en effet, que les sociétés engendrées soient d’une autre espèce que les sociétés génératrices, parce que ces dernières, en se combinant, donnent naissance à des arrangements tout à fait nouveaux.

675. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXII. La comtesse Guiccioli »

Mais dans ces mœurs de cristal, — non par la pureté, mais par la transparence, qui font à présent une espèce d’aquarium de Paris, — personne n’ignora que la main, — beaucoup trop et vainement gantée, — qui avait écrit ce livre sur Byron, était, puisque la main de Byron est glacée, celle de toutes les mains qui avait le plus le droit de récrire, pour être restée dans la sienne… Si les femmes que nous avons aimées deviennent une part de nous-mêmes, c’était une part de Byron, — encore vivante ici-bas, — qui allait continuer les Mémoires et dire leur vérité dernière. […] Je me disais que quand il s’agit de Byron et qu’on eut l’honneur d’en être aimée, il fallait quelque chose de plus… Je m’étais persuadé qu’une femme, au moins d’esprit, qui s’aviserait d’avoir du courage, après avoir si longtemps pensé au danger d’en avoir et qui prenait, au dernier moment de sa vie, le parti de dire le mot de la fin sur Byron, ne voudrait pas, uniquement, nous précipiter dans d’anciennes lectures déjà faites, et nous faire reprendre un bain déjà pris dans la même baignoire et dans la même eau. […] Elle a cru sérieusement qu’avec ses deux volumes d’échos, elle allait dissiper les dernières brumes qui sont peut-être un charme de plus pour nos rêves idolâtres sur l’adorable figure de lord Byron.

676. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Gaston Boissier » pp. 33-50

L’avalanche se ramasse en tombant dans le fond du gouffre ; les dernières pages sont les derniers coups… Il faut empêcher par toute voie que le Christianisme soit un démenti donné à toutes les lois du monde, de la nature et de l’humanité ! […] Ce sont là les dernières évolutions de la philosophie, qui se retournait vers les religions comme elle s’en détourne aujourd’hui.

677. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Camille Mauclair, n’ayant entendu que les dernières phrases de son oraison. […] Nous avons vu, l’an dernier, au Théâtre-Libre, Une Faillite. […] Dans ses dernières années, elle racontait un rêve qu’elle avait fait : « J’étais morte. […] Dernière image : le tombeau de Jésus, creusé dans un roc. […] Je passe rapidement sur les derniers tableaux, triomphe de M. 

678. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Note »

J’avais déjà publié mon Tableau de la Poésie française au xvie siècle, les Poésies de Joseph Delorme, et des articles dans le Globe et dans la Revue de Paris ; il me prit tout d’abord à partie sur un des derniers articles, celui de Jean-Baptiste Rousseau. […] Cet Essai me semblait incomplet, trop classique, ne rendant pas justice aux derniers grands poëtes de l’Angleterre que M. de Chateaubriand ne semblait pas connaître.

679. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « SUR ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 497-504

Toute sa poésie depuis 89 jusqu’en 94, depuis son Jeu de Paume jusqu’aux vers inachevés du dernier ïambe, autorise cette conjecture. […] La poésie, en se faisant simple auxiliaire à la suite des idées philosophiques, avait perdu ses qualités éminentes les plus énergiques et les plus châtiées ; Voltaire, son dernier représentant illustre, avait été son plus grand corrupteur L’entreprise de Chénier fut une œuvre d’étude et de long silence, pleine de secrets labeurs au sein d’une vie de plaisirs, et animée d’un profond amour de cette France, qu’il voulait doter de palmes plus rares.

680. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. L’Angleterre en 1688 et la France en 1830 »

Les mêmes causes, jointes aux intrigues et aux perfidies du parti dominant, retardèrent, sous la Charte, ce progrès salutaire jusqu’en ces dernières années. […] Les Concordats, la création d’une noblesse d’empire, la réhabilitation de l’ancienne noblesse, les dons aux couvents, le milliard d’indemnité, tout cela n’avait refait ni un clergé Corps politique, ni une aristocratie féodale, ni une grande propriété ; la loi d’aînesse, dernière conséquence du système, n’aurait pas eu plus d’efficace20 .

681. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Pour encourager les riches. » pp. 168-175

* * * Donc, la semaine dernière, à propos de la mort d’une dame qui fut évidemment une femme de bien, les journaux abondèrent en louanges si enthousiastes sur la charité de la défunte, que je ne vois guère ce qu’on y eût pu ajouter s’il se fût agi de saint Vincent de Paul ou de la Sœur Rosalie. […] Et donc, dans les vingt dernières années de sa vie, je crois, cette dame consacra, fort intelligemment, de quinze à vingt millions à des fondations de bienfaisance.

682. (1863) Molière et la comédie italienne « Préface » pp. -

Le Pagliaccio n’engendra que vers la fin du siècle dernier le Paillasse de la Foire. […] J’arrive, au contraire, après beaucoup d’autres écrivains du siècle dernier et du siècle présent.

683. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « I »

Dans les derniers temps de l’Empire, il y eut, chez les âmes élevées, chez les évêques éclairés, chez les lettrés, un vrai sentiment de « la paix romaine », opposée au chaos menaçant de la barbarie. […] Que firent les peuples germaniques, en effet, depuis leurs grandes invasions du Ve siècle jusqu’aux dernières conquêtes normandes au Xe ?

684. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Préface » pp. -

Mais il n’en est pas moins certain que le Roman, production toute moderne, a pris en ces dernières années une importance et un développement extraordinaires, qu’aucune forme littéraire n’a plus à un égal degré. […] N’est-ce pas l’épopée dernière des peuples chez lesquels l’individualité reprend la place qu’elle avait à l’origine des sociétés et lutte par les mœurs avec ce qu’on appelle d’un air si suprêmement pédantesque : des Institutions.

685. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Pour les trois derniers, il est probable que je rencontrerais bien peu de contradicteurs. […] Instruit à l’école des trois derniers siècles, il était sûr désormais de trouver pour sa pensée une forme obéissante. […] Les deux derniers livres de ses souvenirs sont très loin assurément d’offrir le même intérêt, la même émotion. […] La touchante figure de Marguerite ne rachète pas la monotonie et la sécheresse de ces deux derniers livres. […] Enfin Toussaint est retranché dans son dernier asile, dans les mornes du Chaos.

686. (1855) Louis David, son école et son temps. Souvenirs pp. -447

Plus qu’aucun autre, David a cédé à l’influence exercée sur les esprits par les gouvernements sous lesquels il a vécu, depuis les dernières années de la monarchie jusqu’à la rentrée des Bourbons en France, en 1815. […] Là, profitant de la bonne humeur qu’avaient fait renaître les derniers événements politiques, il employa toutes les cajoleries de l’éloquence enfantine pour obtenir ce qu’il désirait. […] Mais les dernières paroles que laissa échapper David en résumant ses observations sur l’ouvrage excitèrent l’attention du jeune écolier. […] Mais, trompée dans ses calculs par la prolongation des affaires, elle faisait un dernier effort pour traverser le quai avant le passage du fatal cortège. […] Quant aux trois derniers, ils étaient employés à copier une tête, pour laquelle chaque élève était tenu par les règlements de poser lui-même, ou de fournir un modèle mercenaire à ses frais.

687. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

La correspondance du maréchal publiée par sa famille nous permet de pénétrer dans toute sa vie militaire des dernières années. […] Ceux qui avaient rencontré le général Bugeaud à Paris avant sa grande et dernière renommée ont eu quelque effort à faire avant de le placer dans leur estime à la hauteur où la reconnaissance du pays l’a justement porté. […] C’est alors, après une dernière atteinte plus rude que les précédentes, qu’il recourut à un autre remède, à un auxiliaire puissant qu’on eût été loin d’imaginer. […] Le maréchal Saint-Arnaud a un dernier bonheuraf, et qui assure à son nom une durée ou mieux un rajeunissement continuel que les actions toutes seules ne donnent pas. […] Le maréchal de Saint-Arnaud a un dernier bonheur

688. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Horace, à cette époque, penchait par imagination vers les sceptiques, par vertu vers les stoïciens ; les derniers républicains étaient stoïciens ; c’est par vertu qu’ils voulaient mourir pour conserver l’ancienne liberté romaine, mère des vertus. […] Ces jeunes gens formèrent autour de Brutus la légion sacrée des derniers Romains. […] Béranger leur prêtait sa lyre, comme Horace prêta ce jour-là la sienne aux derniers républicains de Rome. […] Il y avait de l’Arétin dans ses premiers vers, il n’y eut que du Pindare et de l’Anacréon dans les derniers. […] Voltaire, dans ses dernières années, fut aussi spirituel dans ses vers familiers qu’Horace ; mais, quoiqu’il fût plus grand que le solitaire de Tibur, il ne fut jamais aussi gracieux ni aussi aimable.

689. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIe entretien. L’Arioste (2e partie) » pp. 81-160

» Zerbin succombe sous un coup plus mortel ; couché sur l’herbe dans son sang, ses derniers adieux à Isabelle, et ses derniers soupirs recueillis par les lèvres de cette amante sont des sanglots écrits pour l’éternelle consonance des cœurs aimants séparés par la mort. […] Le professeur, toujours enthousiaste de son poète favori, s’efforçait en vain depuis quelques jours de rappeler notre attention par ses inflexions de voix étudiées sur les délicatesses de style des derniers chants. […] Quand je fus à moitié chemin de la descente qui menait de la grotte en rocailles au groupe de pins d’Italie sous lesquels nous avions lu pour la première fois Ginevra, je me retournai pour jeter un long et dernier regard à ce délicieux édifice où je laissais je ne sais quoi de moi-même ; je ne sais pas bien, en effet, si c’était mon imagination ou mon cœur. […] Rectification au dernier entretien sur Machiavel. […] Mais, « au lieu de se borner à offrir au pape un asile sûr et respectueux », ce gouvernement, pendant les dernières heures de sa durée, s’est-il rendu coupable d’intervention en faveur de la souveraineté temporelle ?

/ 2957