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290. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

Sa science des causes qui produisent les grands traits du caractère est merveilleuse, comme le montrent les antécédents parfaitement calculés d’Emma et de Charles Bovary, la vague adolescence de Frédéric Moreau. […] Et voici qui met sur la voie de la cause de cette opposition : « Je ne sais plus comment il faut s’y prendre pour écrire, et j’arrive à exprimer ’la centième partie de mes idées après des tâtonnements infinis. » (76, p. 17.) […] Analyses des faits ; causes. […] Par une cause inconnue, probablement en partie par suite de lectures exclusivement romantiques, Flaubert possédait un grand nombre de mots beaux, harmonieux, vagues, exprimant de la réalité certaines abstractions faites pour plaire plus que les choses, aux sens et à l’esprit humains. […] Généralisation sur les causes : L’on remarquera que cette altération du langage qui produisit chez Flaubert de si belles et maladives fleurs, est analogue si l’on abstrait de ses développements ultimes, à celle qui cause chez tout un groupe d’écrivains nommés par excellence les « artistes », ce qu’on appelle encore par excellence, le « style ».

291. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

Le jansénisme est un effet parmi les autres, et non la cause, de cette reprise vigoureuse de vitalité par laquelle la religion, si menacée naguère, va ressaisir la domination du siècle. […] La licence des opinions et de la vie a deux causes principales. […] L’autre cause est le débordement des tempéraments, que favorisent en France les guerres civiles et religieuses. […] L’autorité civile, se souvenant du siècle précédent, craignit que la secte religieuse ne contînt le germe d’un parti politique, et crut de son intérêt de faire cause commune avec les jésuites, servant ainsi ceux qui devaient la combattre et persécutant ceux qui devaient la défendre dans ses rapports avec Rome. […] Mais si l’on veut prendre rapidement une idée de la profondeur de Pascal et de l’avance qu’il avait sur son siècle, qu’on s’arrête à la question qu’il pose sur la cause de l’amour.

292. (1839) Considérations sur Werther et en général sur la poésie de notre époque pp. 430-451

La maladie de l’imagination que madame de Staël voyait déjà si marquée dans Werther prend dans Byron un caractère plus intense, et sa cause se révèle plus clairement. […] Il y a une route, sans doute, et nous la trouverons ; mais qui oserait dire que le courage et la force de celui qui a pu s’élever si haut pour la chercher ne sera pas cause de notre courage pour la chercher à notre tour, nous qui sommes restés dans la plaine, et ne nous servira pas ainsi prodigieusement à la découvrir ! […] Goethe est trop occupé des mille petits accidents intimes de sa vie, de tous les petits ruisseaux qui ont amoncelé peu à peu dans son cœur la source d’où Werther a jailli : il oublie les causes générales et les horizons éloignés d’où ces ruisseaux découlaient. Toute peinture ainsi faite par l’auteur d’un ouvrage, dans le but d’expliquer cet ouvrage, devient personnelle au point de manquer de largeur et de lumière : au lieu de la Providence qui enfante les chefs-d’œuvre de l’esprit humain, on ne découvre plus que le hasard des causes accessoires. […] La grande cause qui a fait produire Werther à Goethe, c’est cette double impulsion de la France et de l’Allemagne dont nous parlions tout à l’heure ; c’est la lutte dans son esprit de deux puissants génies, venus l’un du Midi, l’autre du Nord.

293. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre sixième. »

Des causes de la popularité de Montaigne. […] Nous sommes les fils des Latins ; là est la cause principale de la préférence que nous donnerons toujours au génie latin. […] Il y a d’ailleurs des causes générales de ce goût de Montaigne pour les auteurs des époques de décadence. […] Les mêmes causes qui font qu’il n’y en a plus aux époques de décadence, font qu’il n’y en a pas encore aux époques de renaissance. […] Des causes de la popularité de Montaigne.

294. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre deuxième. Le développement de la volonté »

Les liaisons rationnelles par excellence sont celles de principe à conséquence, de cause à effet, de moyen à fin. La volonté raisonnable est celle qui, outre qu’elle conserve sciemment sa conséquence logique avec soi selon le principe d’identité, conçoit une série de causes et d’effets comme étant en même temps une série de moyens pour atteindre une certaine fin. […] Au point de vue de la série des causes et effets, nous avons conscience d’être, par notre idée, par notre désir, par l’effort qui en résulte, la première condition d’une série aboutissant à réaliser tel effet ; au point de vue de la série des moyens et des fins, nous avons conscience d’avoir en nous-mêmes une idée et un désir constituant la fin dernière de l’action. […] De là l’attribution du vouloir au moi, tandis que nous attribuons le désir proprement dit à des causes qui ne sont plus le moi conscient et réfléchi. […] Non seulement, avant d’agir, nous trouvons de bonnes ou mauvaises raisons pour faire ce qui nous plaît, mais, alors même que nous avons agi sans connaître les vraies causes de nos actes, nous leur imaginons encore telles et telles raisons.

295. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

S’il s’efforce de discerner la loi de ces développements, et la cause de cette opulence, s’il tente de classer les idées d’un alinéa*, les aspects d’une description, les traits d’une physionomie et les phases d’une œuvre, il découvrira aussitôt que la principale habitude de style et de composition chez M.  […] Une autre catégorie d’œuvres à laquelle ressortissent la plupart des Orientales, la Légende des siècles, une pièce comme les Burgrave s et un roman comme Notre-Dame de Paris, fait se demander par quelle prodigieuse disposition sentimentale, le poète parvient à se faire le porte-voix, presqu’ému, d’une suite de personnes étrangères et mortes, dont il épouse les causes et les passions avec une infatigable versatilité. […] Cette nullité, cette simplification et ce grossissement du fond, sont unis aux propriétés caractéristiques de la forme non par des relations de causes à effets ou d’effets à cause, mais par un rapport indissoluble qui permet de considérer ces deux ordres de faits comme résultant à la fois d’une cause unique. […] En d’autres termes aux anomalies d’expression et de pensée qui sont devenues manifestes au cours de cette étude, pouvons-nous assigner pour cause une ou plus d’une anomalie interne du mécanisme intellectuel connu, qui, admise sur hypothèse, paraisse être à l’origine de tous les caractères marqués de l’œuvre de M.  […] Enfin, et par une cause plus profonde, M. 

296. (1833) De la littérature dramatique. Lettre à M. Victor Hugo pp. 5-47

Quel moment plus favorable aurais-je pu choisir pour plaider ma cause, que celui où les tribunaux retentissent encore du bruit de votre dernier ouvrage ? […] Mais avant de signaler les causes de la décadence du théâtre, je dois faire connaître en peu de mots les personnes auxquelles nous les devons. […] Vous trouvez peut-être que dans mes récriminations je me mets trop en cause, que je parle trop de moi. […] Au reste, comme ma cause est celle de tous les gens de lettres bannis du Théâtre-Français, en la plaidant avec franchise et politesse, je crois aussi plaider la leur. […] Ce n’est que dans un parallèle des moyens dramatiques que j’ai adoptés et de ceux que vous employez pour arriver plus vite, que je puis tirer des conséquences utiles à ma cause ; mais le désir que j’ai de la gagner ne me rendra point injuste à votre égard.

297. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Appendice »

Aussi ma première question en arrivant à Saint-Sulpice fut pour vous demander afin d’apprendre la cause de ce silence, et plus encore afin de m’entretenir avec vous. Jugez de la peine que j’éprouvai quand j’appris qu’une maladie grave avait été la cause qui avait entravé votre correspondance. […] Croiriez-vous que j’ai envié votre sort, et que j’appelais de mes vœux une cause quelconque qui retardât pour moi mon entrée dans le tourbillon de la vie active, en prolongeant l’assoupissement de la vie domestique si calme, si insoucieuse. […] Je ne suis pas, mon cher, de ceux qui prêchent sans cesse la tolérance aux orthodoxes ; c’est là, pour les esprits superficiels de l’un et de l’autre parti, la cause d’innombrables sophismes. […] Nous n’avons pas de vigoureux hommes, mais nous pourrions en avoir : cela ne fait rien à la vérité intrinsèque. » Je réponds : 1ºune bonne preuve, surtout en critique historique, est toujours bonne, de quelque manière qu’elle soit présentée ; 2º si la cause était absolument la vraie, elle aurait de meilleurs défenseurs.

298. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre VI. De la politique poétique » pp. 186-220

Maintenant recourons à ces preuves divines dont on a parlé dans le chapitre de la Méthode ; examinons combien sont naturels et simples les moyens par lesquels la Providence a dirigé la marche de l’humanité, rapprochons-en le nombre infini des phénomènes qui se rapportent aux quatre causes dans lesquelles nous verrons partout les éléments du monde social (les religions, les mariages, les asiles et la première loi agraire), et cherchons ensuite entre tous les cas humainement possibles, si des choses si nombreuses et si variées ont pu avoir des origines plus simples et plus naturelles. […] Solon, dans sa législation, permit, dit-on, les associations pour cause de piraterie. […] Cette coutume barbare dura si longtemps chez les nations les plus policées, qu’au rapport de Polybe, les Romains imposèrent aux Carthaginois, entre autres conditions de paix, celle de ne point passer le cap de Pélore pour cause de commerce ou de piraterie. […] Si la variété de tant de causes et d’effets observés jusqu’ici dans l’histoire de la république romaine, si l’influence continue que ces causes exercèrent sur ces effets, ne suffisent pas pour établir que la royauté chez les Romains eut un caractère aristocratique, et que la liberté fondée par Brutus fut restreinte à l’ordre des nobles, il faudra croire que les Romains, peuple grossier et barbare, ont reçu de Dieu un privilège refusé à la nation la plus ingénieuse et la plus policée, à celle des Grecs ; qu’ils ont connu leurs antiquités, tandis que les Grecs, au rapport de Thucydide, ne surent rien des leurs jusqu’à la guerre du Péloponnèse79. […] Cet héroïsme ne peut désormais se représenter, pour des causes toutes contraires à celles que nous avons énumérées, et qui ont produit deux sortes de gouvernements humains, les républiques populaires et les monarchies.

299. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Il était malade du mal du temps, du mal de la jeunesse d’alors ; il pleurait sans cause comme René ; il disait : « Je suis rassasié de tout sans avoir rien connu. » Son énergie refoulée l’étouffait. […] Elle ne demande au ciel et à la terre qu’une grande cause à servir par un grand dévouement ; l’amour y surabonde avec la force. » Il était alors voltairien comme sa génération, déiste, non pas sceptique et indifférent, remarquons-le bien : même quand il ne croyait pas, la forme de sa pensée était toujours nette et tranchée. […] Par la charité, il n’y eut pas de cœur où l’Église ne pût pénétrer ; car le malheur est le roi d’ici-bas, et, tôt ou tard, tout cœur est atteint de son sceptre… Désormais l’Église pouvait aller avec confiance conquérir l’univers, car il y a des larmes dans tout l’univers, et elles nous sont si naturelles, qu’encore qu’elles n’eussent pas de cause, elles couleraient sans cause, par le seul charme de cette indéfinissable tristesse dont notre âme est le puits profond et mystérieux. […] Je ne dirai point les causes de cette catastrophe ; outre qu’elles ne sont pas de mon sujet, il répugne au fils de la patrie de creuser trop avant dans les douleurs nationales, et il laisse volontiers au temps tout seul le soin d’éclaircir les leçons renfermées par Dieu même au fond des revers.

300. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Rulhière. » pp. 567-586

Il est à la piste de son sujet ; il n’est occupé que de cela, et aussi de faire preuve de finesse, tout en faisant sentir légèrement la griffe à celui avec qui il cause. […] Comme historien et comme écrivain honorablement sérieux, il prit rang en 1788 par ses Éclaircissements historiques sur les causes de la révocation de l’édit de Nantes et sur l’état des protestants en France. […] Rulhière, dans son ingénieux et savant écrit, rechercha quelles avaient été les causes et les circonstances qui avaient amené en octobre 1685 la révocation de l’édit de Nantes. […] Obéissant en ceci encore aux dispositions naturelles de son esprit, autant qu’à l’intérêt de la cause qu’il prenait en main, il s’appliqua, à l’aide de rapprochements fins et peut-être forcés, à rapporter ce grand acte, qui fut l’erreur de tout un siècle, à des causes secondaires accidentelles, et à en diminuer le dessein primitif ; c’était une manière d’en rendre plus facile, plus acceptable à tous, la réparation.

301. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — I. » pp. 84-104

Qu’aurait-il fait s’il avait vécu, s’il avait assisté au triomphe de sa cause, de ce qui paraissait sa cause ? […] Étant en garnison à Marseille, il allait quelquefois à Aix pour y visiter les étudiants et tâcher d’en rallier le plus qu’il pourrait à la bonne cause. […] Mais il prit ce prétexte pour envoyer sa démission, et, peu de jours après (mars 1823), il partait sur un bateau-pêcheur pour Barcelone, où il offrait ses services et son épée à la cause constitutionnelle espagnole. […] Pour mieux dégoûter du suicide, l’ami ne craint pas de nous montrer l’impression d’horreur que cause même aux indifférents la vue d’un homme jeune et beau, d’une noble créature qui a ainsi attenté contre elle-même, et qui a tout fait pour dégrader et dévaster son image (jusque dans les traits qu’une mort ordinaire et naturelle sait respecter.

302. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre deuxième. Rapports du plaisir et de la douleur à la représentation et à l’appétition »

D’après toutes ces théories, la représentation intellectuelle serait antérieure à l’émotion sensible, elle ferait partie de ses conditions mêmes, de ses éléments, de ses causes. […] Ce n’est pas la représentation d’un changement d’état utile ou nuisible à la vie qui cause le plaisir ou la douleur ; c’est au contraire le plaisir ou le déplaisir qui, étant par lui-même et indépendamment de notre représentation un changement agréable ou pénible, provoque le discernement et la représentation de ce changement utile ou nuisible. […] En premier lieu, nous l’avons vu, le sentiment n’est pas la représentation même, ni un rapport de représentations, il n’a pas non plus pour cause unique la représentation ; mais, selon nous, la représentation à quelque degré, ou plutôt, comme disent les Allemands et les Anglais, la présentation accompagne toujours le plaisir ou la peine et, sans en être la condition unique, elle est cependant une de ses conditions. […] II Rapport du plaisir et de la peine à l’appétition On dispute encore de nos jours, comme au temps des épicuriens et des stoïciens, pour savoir si le plaisir résulte de l’inclination active, ou l’inclination active du plaisir, s’il existe en nous des tendances innées antérieures au sentiment et causes du sentiment même, ou si c’est au contraire le sentiment qui est la cause première des tendances.

303. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 33, que la veneration pour les bons auteurs de l’antiquité durera toujours. S’il est vrai que nous raisonnions mieux que les anciens » pp. 453-488

L’unique cause de la perfection des sciences naturelles, ou, pour parler avec précision, l’unique cause qui fait que ces sciences sont moins imparfaites aujourd’hui qu’elles ne l’étoient dans les temps antérieurs, c’est que nous sçavons plus de faits qu’on n’en sçavoit alors. […] Il en fit part à ses amis, mais sans la rapporter à sa cause véritable, laquelle il ne devinoit pas encore. […] Je le repete, les hommes ajoutent foi bien plus fermement à ceux qui leur disent, j’ai vû, qu’à ceux qui leur disent, j’ai conclu. or, le dogme de la circulation du sang par les lumieres qu’il a données sur la circulation des autres liqueurs, et par des découvertes dont il est cause, a plus contribué qu’aucune autre observation à perfectionner l’anatomie. […] Si nous sommes plus habiles que les anciens dans quelques sciences indépendantes des découvertes fortuites que le hazard et le temps font faire, notre superiorité sur eux dans ces sciences, vient de la même cause qui fait que le fils doit mourir plus riche que son pere, supposé qu’ils aïent eu la même conduite, et que la fortune leur ait été favorable également.

304. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

En nous tenant strictement ici à ce qui concerne le fondateur de la Revue des Deux Mondes (et cette fondation est le vrai titre d’honneur de M.Buloz), nous pourrions bien lui affirmer que ce n’est point tant à cause des inconvénients, des imperfections et des défauts que toute œuvre collective et tout homme de publicité apportent presque inévitablement jusqu’au sein de leurs qualités et de leurs mérites, qu’il est attaqué et injurié avec cette violence en ce moment, mais c’est précisément à cause de ses qualités mêmes (qu’il le sache bien et qu’il en redouble de courage, s’il en avait besoin), c’est pour sa fermeté à repousser de mauvaises doctrines, de mauvaises pratiques littéraires, et pour l’espèce de digue qu’il est parvenu à élever contre elles et dont s’irritent les vanités déchaînées par les intérêts. […] Quelles qu’en puissent être les causes très-complexes, le fait subsiste ; il s’est élevé depuis lors toute une race sans principes, sans scrupules, qui n’est d’aucun parti ni d’aucune opinion, habile et rompue à la phrase, âpre au gain, au front sans rougeur dès la jeunesse, une race résolue à tout pour percer et pour vivre, pour vivre non pas modestement, mais splendidement ; une race d’airain qui veut de l’or. […] Leurs déportements se jugent d’ailleurs par le fait même ; au bout de quelques jours, le public, d’abord excité, s’en dégoûte, sans avoir besoin d’être averti, et il ne reste d’irréparable, après de tels éclats, que les atteintes profondes que les violents se sont portées, qu’ils ont portées aussi à la cause littéraire qu’ils semblaient dignes de mieux servir. […] Puisse du moins le sentiment croissant de la cause à défendre, la conscience de la vérité et de la dignité en littérature, contribuer entre nous à le resserrer !

305. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre premier. De la première époque de la littérature des Grecs » pp. 71-94

Dans ces diverses branches de la littérature, il faut distinguer ce qui appartient à l’imagination, de ce qui appartient à la pensée : il est donc nécessaire d’examiner jusqu’à quel point l’une et l’autre de ces facultés sont perfectibles ; nous saurons alors quelle est la principale cause de la supériorité des Grecs dans les beaux-arts, et nous verrons ensuite si leurs connaissances en philosophie ont été au-delà de leur siècle, de leur gouvernement et de leur civilisation. […] La philosophie, c’est-à-dire, la connaissance des causes et de leurs effets, porte l’admiration des penseurs sur l’ensemble du grand ouvrage de la création ; mais chaque fait particulier reçoit une explication simple. […] Le paganisme des Grecs était l’une des principales causes de la perfection de leur goût dans les arts ; ces dieux, toujours près des hommes, et néanmoins toujours au-dessus d’eux, consacraient l’élégance et la beauté des formes dans tous les genres de tableaux. […] Après avoir essayé de montrer quelles sont les causes premières des beautés originales de la poésie grecque, et des défauts qu’elle devait avoir à l’époque la plus reculée de la civilisation, il me reste à examiner comment le gouvernement et l’esprit national d’Athènes ont influé sur le rapide développement de tous les genres de littérature.

306. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VIII. De l’éloquence » pp. 563-585

Les individus des mêmes partis, liés entre eux par des intérêts d’une importante solidarité, se sont accoutumés en France à ne regarder les discours que comme le mot d’ordre qui doit rallier des soldats servant dans la même cause. […] Si vous parlez au nom de la puissance, ils vous écouteront avec respect, quel que soit votre langage ; mais si vous réclamez pour le faible, si votre nature généreuse vous fait préférer la cause délaissée par la faveur et recueillie par l’humanité, vous n’exciterez que le ressentiment de la faction dominante. […] Frappé de tous les abus qu’on a faits de la parole depuis la révolution, l’on déclame contre l’éloquence ; l’on veut nous prémunir contre ce danger qui, certes, n’est pas encore imminent ; et comme si la nation française était condamnée à parcourir sans cesse tout le cercle des idées fausses, parce que des hommes ont soutenu violemment et souvent même grossièrement de très injustes causes, on ne veut plus que des esprits droits appellent les sentiments au secours des idées justes. Je crois, au contraire, qu’on pourrait soutenir que tout ce qui est éloquent est vrai ; c’est-à-dire que dans un plaidoyer en faveur d’une mauvaise cause, ce qui est faux, c’est le raisonnement ; mais que l’éloquence proprement dite est toujours fondée sur une vérité : il est facile ensuite de dévier dans l’application, ou dans les conséquences de cette vérité ; mais c’est alors dans le raisonnement que consiste l’erreur.

307. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Deux tragédies chrétiennes : Blandine, drame en cinq actes, en vers, de M. Jules Barbier ; l’Incendie de Rome, drame en cinq actes et huit tableaux, de M. Armand Éphraïm et Jean La Rode. » pp. 317-337

Ce dernier type n’est pas dans Corneille, et pour cause, non plus que le vague christianisme lyrique, humanitaire et sourdement sensuel qui s’exhale de l’âme lettrée de ces Leuconoés, un peu tournées en Lélias. […] Ils étaient comme des athlètes émérites, endurcis à tout… Le martyre apparaissait de plus en plus comme une espèce de gymnastique, ou d’école de gladiature, à laquelle il fallait une longue préparation et une sorte d’ascèse préliminaire. » Peu s’en faut que Renan ne dise : « Le martyre était un sport. » — Il est certain que, d’être regardé, c’est une grande force : cela donne le courage de souffrir beaucoup, même pour des causes chétives et frivoles. Que sera-ce quand la cause est sublime, et quand les témoins sont tout un peuple en face duquel on confesse Dieu ! […] pleurez et jetez des cris, à cause des malheurs qui vont tomber sur vous !

308. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

Il est peut-être utile à notre cause que ce soit nous qui offrions à nos adversaires l’exemple de la courtoisie et de la modération. […] Cependant, à n’envisager la question pour un instant que sous le point de vue privé, la confiscation censoriale dont il s’agit cause encore plus de dommage peut-être à l’auteur de ce drame qu’à tout autre. […] Ce sont la de hauts et sérieux intérêts ; et, quoique l’auteur soit obligé d’entamer cette importante affaire par un simple procès commercial au Théâtre-Français, ne pouvant attaquer directement le ministère, barricadé derrière les fins de non-recevoir du conseil d’état, il espère que sa cause sera aux yeux de tous une grande cause, le jour où il se présentera à la barre du tribunal consulaire, avec la liberté à sa droite et la propriété à sa gauche.

309. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre IV. De la méthode » pp. 81-92

. — Ces trois sortes de preuves peuvent se ramener à une seule : Dans toute la série des choses possibles, notre esprit peut-il imaginer des causes plus nombreuses, moins nombreuses, ou autres, que celles dont le monde social est résulté ? […] Ainsi nous aurons prouvé par le fait aux Épicuriens que leur hasard ne peut errer selon la folie de ses caprices, et aux Stoïciens que leur chaîne éternelle des causes à laquelle ils veulent attacher le monde, est elle-même suspendue à la main puissante et bienfaisante du Dieu très grand et très bon. […] Ces traditions ayant été suivies si longtemps, et par des peuples entiers, doivent avoir eu un motif commun de vérité (axiome 16). 6º Les grands débris qui nous restent de l’antiquité, jusqu’ici inutiles à la science, parce qu’ils étaient négligés, mutilés, dispersés, reprennent leur éclat, leur place et leur ordre naturels. 7º Enfin tous les faits que nous raconte l’histoire certaine viennent se rattacher à ces antiquités expliquées par nous, comme à leurs causes naturelles. — Ces preuves philologiques nous font voir dans la réalité les choses que nous avons aperçues dans la méditation du monde idéal.

310. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Préface »

Il faut donc admettre qu’une cause particulière détermine le succès de ces livres, le succès des révolutions littéraires qu’ils ont provoquées. […] Tandis que ce penseur s’est appliqué à rechercher les causes formatrices des grands hommes dans l’hérédité, l’influence de la race, du milieu, de l’habitat, nous laissons comme insoluble actuellement ce problème d’origine et c’est de l’ascendant des conducteurs spirituels de peuples que nous nous préoccupons, de la carrière de leurs idées et de leurs paroles, du fait et du sort de leur prestige.

311. (1864) Études sur Shakespeare

Par des causes qui se lient à toute l’histoire de notre civilisation, le peuple français a toujours pris à la moquerie un extrême plaisir. […] Quoi qu’il en soit, il est plus difficile de démêler les causes qui déterminèrent son départ de Londres, que d’entrevoir celles qui avaient pu y prolonger son séjour. […] Plusieurs causes contribuèrent à prolonger pour Shakespeare cet intervalle de froideur et presque d’oubli. […] Il est aisé d’en démêler la cause. […] Nous avons besoin d’y croire pour nous y livrer, et nous n’y croirions pas sans leur attribuer une cause digne de les exciter.

312. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Ils considéraient leur cause comme un très noble préjugé. […] C’est encore indiquer des causes. […] Il les discernait pourtant, ces causes. […] Celle de Balzac s’explique d’un mot : il a pensé la société par les causes. […] Voilà aussi la possibilité de les attaquer dans leur cause.

313. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Ce sont quelques-unes de ces causes que je voudrais dégager à mon tour, après M.  […] Par une hypothèse de cause, étant donné que nous prenons ce mot de cause dans son sens le plus modeste, celui de phénomène antécédent. […] Derrière les effets il aperçoit les causes, et que ces causes sont des idées agissantes. […] Il y a de vastes causes sociales derrière les plus simples destinées privées. […] La cause demeure et l’effet se produit le même.

314. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre II. Le Roman (suite). Thackeray. »

Le roman de mœurs pullule en Angleterre, et il y a de cela plusieurs causes : d’abord il y est né, et toute plante pousse bien dans sa patrie. […] La Russie fut mise d’emblée hors de cause, et le traité de Kabobanople fut signé. […] Si l’on préfère la bonté dévouée et les affections tendres, on prend en aversion l’arrogance et la dureté ; la cause de l’amour est aussi la cause de la haine, et le sarcasme, comme la sympathie, est la critique d’une forme sociale et d’un vice public. […] Quand dans le roman pur il parle en son nom propre, c’est pour faire comprendre un sentiment ou marquer la cause d’une faculté ; dans le roman satirique, c’est pour nous donner un conseil moral. […] Notre véritable essence consiste dans les causes de nos qualités bonnes ou mauvaises, et ces causes se trouvent dans le tempérament, dans l’espèce et le degré d’imagination, dans la quantité et la vélocité de l’attention, dans la grandeur et la direction des passions primitives.

315. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

Le public de Schopenhauer ; causes de sa popularité. […] Il s’agit de déterminer les causes de l’adultère dans la bourgeoisie. […] Comment pourrions-nous agir sur les causes qui nous font bons ou mauvais, puisque nous en dépendons ? […] On le taxe d’immoralité ; cause principale de ce malentendu : M.  […] Quelles sont donc les causes de ce malentendu ?

316. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Note. »

M. de Loménie prit en main avec courtoisie la cause de Benjamin Constant, et il fut en cela l’organe de l’Abbaye-aux-Bois. […] Achat avec mon gain de la maison rue Neuve-de-Berry, première cause de mon éligibilité. — Mme Récamier se met en tête de me rendre amoureux d’elle.

317. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre IV. Pourquoi les Français n’ont que des mémoires. »

Il s’enthousiasme pour telle ou telle cause, tel ou tel personnage ; et, tantôt insultant le parti opposé, tantôt se raillant du sien, il exerce à la fois sa vengeance et sa malice. […] On a voulu la rejeter sur des causes politiques : on a dit que si l’histoire ne s’est point élevée parmi nous aussi haut que chez les anciens, c’est que son génie indépendant a toujours été enchaîné.

318. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

— Mais la cause, ô grand Dieu ! la cause pendante à votre tribunal, ils n’y ont plus pensé ! « La cause ? […] c’est le droit qu’il aurait de vivre. — La cause ? c’est le pain qu’on ne lui donne pas. — La cause ?

319. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIIe entretien. Cicéron (2e partie) » pp. 161-256

Il s’éleva aux causes politiques, les seules qui rendent historique le nom d’un orateur. […] Cependant c’était là encore le début de Cicéron dans les causes politiques. […] Dieu, l’âme du monde, la providence ou la fortune (appelée ainsi parce qu’elle fait naître mille événements imprévus dont les causes existent, mais dont nous ne pouvons apercevoir de si bas ni prévoir ces causes) gouverne l’univers. […] Quand nous fûmes arrivés dans un si beau lieu, et qui n’est pas célèbre sans cause, nous y trouvâmes toute la solitude que nous voulions. […] Car enfin ce n’est pas le hasard, ce n’est pas une cause aveugle qui nous a créés : mais nous devons l’être certainement à quelque puissance, qui veille sur le genre humain.

320. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIII : Affinités mutuelles des êtres organisés »

La cause de ce groupement hiérarchique est la même parmi les variétés que parmi les espèces ; elle dépend toujours de la connexion généalogique plus ou moins étroite avec divers degrés de modification. […] Il n’est pas de tentative plus vaine que de vouloir expliquer cette identité de plan chez tous les membres de la même classe, par un but quelconque d’utilité ou par la doctrine des causes finales. […] La question est donc ici de savoir non pas à quelle période ont agi les causes de variations, mais à quelle période leurs effets se manifesteront pleinement. […] C’est le défaut d’exercice qui me semble devoir être la cause principale de ces phénomènes d’atrophie, en agissant sur la suite des générations, de manière à réduire graduellement certains organes, jusqu’à ce qu’ils deviennent complétement rudimentaires. […] Il y a, ou l’ordre de succession dans le temps, ou l’ordre de succession dans l’espace, ou les rapports de cause à effet, et d’antécédent à conséquent, qui interviennent.

321. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre IV. De la philosophie et de l’éloquence des Grecs » pp. 120-134

L’une des principales causes finales des grands événements qui nous sont connus, c’est la civilisation du monde. […] Antagoniste de Platon sur plusieurs autres sujets, il n’imagine pas que l’esclavage puisse être un objet de discussion ; et, dans le même ouvrage, il traite les causes des révolutions et les principes du gouvernement avec une supériorité rare, parce que l’exemple des républiques grecques lui avait fourni la plupart de ses idées. […] Les faits inspiraient alors une telle avidité, qu’on ne reportait point encore sa pensée vers les causes.

322. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVI. De l’éloquence et de la philosophie des Anglais » pp. 324-337

Peut-être aussi que la principale cause du grand plaisir attaché à cette lecture, c’est l’admiration qu’on éprouve pour la liberté d’un pays où l’on pouvait attaquer ainsi les ministres et le roi lui-même, sans que le repos et l’organisation sociale en souffrissent, sans que les dépositaires de la puissance publique eussent le droit de se soustraire à la plus véhémente expression de la censure individuelle. […] Parcourons rapidement les causes de ces différences. […] Plusieurs des causes que je viens d’énoncer devraient s’appliquer également au gouvernement représentatif en France ; mais les premières époques de la révolution ont offert à ses orateurs des sujets d’éloquence antique.

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