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409. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre II : Examen critique des méditations chrétiennes de M. Guizot »

Ces hommes, si éminents qu’ils soient par l’esprit et le caractère, que sont-ils dans l’Église ? […] Littré, avec son double caractère, la réalité et l’inaccessibilité. » Mais, dira-t-on, l’école positiviste rejette Dieu et l’âme comme des hypothèses arbitraires et provisoires. […] D’autre part, la science n’est pas plus le caractère de la religion que de la philosophie44. […] D’un autre côté, il est évident que le livre n’a pas un caractère dogmatiquement catholique. […] On serait plutôt frappé, en lisant son livre, du caractère rationaliste de sa philosophie chrétienne.

410. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

« Rien, a-t-on dit, n’égale la dignité de la langue latine… Elle fut parlée par le peuple-roi, qui lui imprima ce caractère de grandeur unique dans l’histoire du langage humain C’est la langue de la civilisation. […] Caractères communs de ces œuvres ; — [Cf.  […] Grévin, 1560 ; — La détermination des caractères de la tragédie [Cf.  […] — Raisons d’en douter ; — dont la principale est la licence qui régnait alors dans la satire. — On en peut trouver une seconde dans l’indétermination du caractère national : — ce qui fait rire une race n’en faisant pas rire une autre, et le caractère français étant à peine formé. […] 3º Composition et caractère du livre des « Essais ».

411. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Nous avons pris un caractère, prenons maintenant une idée abstraite. […] Le poète doit peindre des caractères, cela est vrai, mais ces caractères ne doivent pas être artificiellement, conçus : ils doivent être le résultat même de la vie. […] Son caractère irrésolu, son langage mélancolique, l’ont fait accuser de manquer d’énergie : c’est une erreur. […] De là souvent le vague de notre langage et l’indécision de notre caractère. […] Est-il un caractère plus sympathique à l’imagination du lecteur ?

412. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

C’est là le caractère de Descartes ; ce sera encore, vingt ans après, avec des circonstances particulières, le caractère de Pascal. […] Il y a reconnu le signe même de l’évidence ; or, l’évidence étant le caractère du vrai, et notre raison seule pouvant recevoir et juger l’évidence, voilà la raison établie juge suprême du vrai et du faux. […] Ce n’est ni la sienne, ni la mienne, ni la vôtre, avec les différences qu’elle reçoit du caractère de chacun, du pays, du temps, mais la raison universelle, impersonnelle et absolue. […] Est-ce l’individu, dans ce qui le distingue de tout le monde, les particularités de son caractère, ses humeurs, ses dispositions qui changent selon les variations de sa santé ? […] La même langue, parlée par deux hommes avec la même exactitude, reçoit du caractère de chacun quelque variété qui en fait la grâce.

413. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

N’est-ce pas l’étude des langues primitives qui nous a révélé les caractères primitifs de l’exercice de la pensée, la prédominance de la sensation, et cette sympathie profonde qui unissait alors l’homme et la nature ? […] Quoi qu’il en soit, il est certain que l’existence du livre sacré est le critérium qui doit servir à classer les religions, parce qu’il est l’indice d’un caractère plus profond, l’organisation dogmatique. […] Un autre caractère non moins essentiel, et qui peut servir aussi bien que le livre sacré à distinguer les religions organisées, c’est la tolérance ou l’exclusivisme. […] Enfin les religions organisées se distinguent des cultes mythologiques par un plus grand caractère de fixité et de durée. […] Je vis un jour un enfant quelque temps pensif, puis tout à coup affirmer sérieusement et avec un étrange caractère d’insistance qu’il avait vu quelques jours auparavant une tête humaine dans le soleil.

414. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

N’est-ce pas l’influence des raisonnements de notre âge qui a refroidi les tableaux offerts à sa raison suprême, et substitué la métaphysique des maximes au mouvement des caractères ? […] Il me semble que la contestation n’a point de fondement, et que la conclusion épique peut être heureuse ou malheureuse selon là nature du sujet, et les caractères qui en occupent le premier plan. […] Une épopée ne commence pas, comme une tragédie : le poème débute par un exorde qui annonce nettement le sujet, et le drame par une exposition de faits et de caractères qui le font seulement pressentir. […] Tant de périls lui font mesurer tout ce que peut affronter et vaincre la constante fermeté d’âme, dont il imprime le caractère dans un grand nombre de ses poétiques octaves. […] Il y avait entre les caractères de ces deux poètes la même différence qu’en leur système de versification.

415. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

L’éducation de son caractère s’est faite de seize à vingt-cinq ans et n’a point corrigé son caractère ; elle l’a outré. […] Ses souvenirs d’enfance, écrits à quarante ans d’intervalle, ont le même caractère. […] Il faut même dire : dès lors il n’a point de caractère ; car ce sont les difficultés de la lutte et l’éloignement du but, combinés avec son ambition, qui ont fait le caractère de Julien. […] De ce fait il a étudié les caractères, cherché les causes, prévu les conséquences. […] Décidément, ici encore, il était très fidèle aux habitudes de son caractère.

416. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre troisième. »

La Fontaine se plaît toujours à développer le caractère du renard, et il le fait sans cesse d’une manière gaie et comique. […] La Fontaine ne manque pas ces nuances, qui marquent les caractères et les passions. […] Mot qui exprime à merveille un des grands caractères de l’ingratitude, qui compte pour un bienfait le mal qu’elle ne fait pas.

417. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame de La Fayette ; Frédéric Soulié »

Nul plus que Soulié ne montra ce qu’on dépense de force pour combiner des événements et des caractères. […] Si, comme nous le croyons, c’est un bon bâton de longueur pour mesurer la grandeur de l’homme que son aptitude à la métaphysique, Soulié, qui était investi de dons d’organisation formidables, aurait pu, en s’y appliquant, traiter les idées comme il traita les passions et les caractères. […] Il avait jusque dans le plus mauvais de son talent, laborieux et déréglé, comme dans son caractère, quelque chose de magnanime, et pourtant il ne sera point compté parmi les grands artistes ; car qui n’a pas de style doit périr.

418. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre I. De la sagesse philosophique que l’on a attribuée à Homère » pp. 252-257

Voilà le poète incomparable dans la conception des caractères poétiques ! […] Ses caractères les plus sublimes choquent en tout les idées d’un âge civilisé, mais ils sont pleins de convenance, si on les rapporte à la nature héroïque des hommes passionnés et irritables qu’il a voulu peindre. […] Ces mœurs sauvages et grossières, fières et farouches, ces caractères déraisonnables et déraisonnablement obstinés, quoique souvent d’une mobilité et d’une légèreté puériles, ne pouvaient appartenir, comme nous l’avons démontré (livre II, Corollaires de la nature héroïque), qu’à des hommes faibles d’esprit comme des enfants, doués d’une imagination vive comme celle des femmes, emportés dans leurs passions comme les jeunes gens les plus violents.

419. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

Son caractère. […] Sa vie et son caractère. […] Le caractère de Lamartine était déjà formé. […] Sa vie et son caractère. […] Son caractère.

420. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

Cette définition, qui enlève à l’action tout caractère esthétique, nous semble inacceptable. […] Nous croyons que ces diverses fonctions peuvent toutes revêtir un caractère esthétique. […] Ils ne s’intéressent pas à l’analyse des caractères. […] Un peu d’attention nous y fera découvrir déjà un caractère esthétique. […] Si toute sensation peut avoir un caractère esthétique, quand et comment acquiert-elle ce caractère ?

421. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Au théâtre, la situation doit dépendre des caractères et non vice-versa ; et alors, si vos caractères à vous ne vivent pas, et que mes personnages à moi marchent et agissent, de quel droit venez-vous me reprocher les lignes tout extérieures d’une « situation » identique à la vôtre ? […] Reprendre un point de départ identique, se plagier soi-même, et faire une œuvre toute nouvelle par une modification des caractères, voilà le tour de force qui, à lui seul, révèle le pur artiste. […] L’explication est à chercher non plus seulement dans le tempérament artistique mais aussi dans le caractère moral du poète. […] Les récits et les situations, souvent empruntés, sont sans rapport avec les caractères et n’ont forcément que des solutions factices. […] Les Latins en ont copié les caractères extérieurs, tout en modifiant profondément le contenu, et dans quel sens !

422. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre II. L’antinomie psychologique l’antinomie dans la vie intellectuelle » pp. 5-69

« Il est évident que la complication et la mobilité sociales ont pour résultat immédiat de contrecarrer la loi de l’hérédité, et de rendre impossible l’hérédité des caractères acquis. […] S’il était fini, la discussion n’aurait pas lieu ; car la complexité et l’instabilité sociales, poussées à la limite, auraient à jamais rendu impossible l’hérédité des caractères acquis et par cela même auraient confirmé la théorie de Weismann. Cette dernière n’en reste pas moins virtuellement vraie, malgré le démenti que lui donne le présent… Le regrès de l’hérédité des caractères acquis est un fait nécessaire ; il est même déjà constatable. […] N’exagérons pas toutefois le caractère asocial de l’intuition bergsonienne et n’attribuons pas surtout à cette philosophie un caractère antisocial qu’elle n’a pas. […] Cette dissociation rentre dans une autre dissociation d’un caractère plus général et plus métaphysique : celle de l’instinct de connaissance et de l’instinct vital.

423. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

Le dessin du caractère de Mme Bovary présente tous ces procédés. […] Leur caractère commun est aisé à démêler, et rarement, du style à la composition, de la description à la psychologie, des « mots aux faits, un artiste a fait preuve d’une plus rigide conséquence. […] Sa science des causes qui produisent les grands traits du caractère est merveilleuse, comme le montrent les antécédents parfaitement calculés d’Emma et de Charles Bovary, la vague adolescence de Frédéric Moreau. […] Car dans les caractères mêmes de la syntaxe et du vocabulaire de Flaubert, sont incluses les contradictions plus générales que développe son œuvre. […] Enfin sa façon de joindre ces sortes de mots déterminèrent les autres caractères de son art.

424. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Mais la société laïque, l’aristocratie féodale avait pourtant déjà ses poèmes qui l’enchantaient, des chansons, et surtout des récits de caractère épique : seulement on ne les écrivait pas. […] Voilà qui lui suffit pour définir ses caractères. […] Comme les faits, les caractères se dénaturent, se transportent et se transposent : les traîtres sont stéréotypés d’après Ganelon ; Vivien n’est qu’une seconde épreuve de Roland. […] Le seul poème complet antérieur sans doute à cette forme du Roland est le Pèlerinage de Charlemagne à Jérusalem (vers 1060), poème d’un caractère assez spécial. […] C’est le Fragment de la Haye, publié par Pertz qui n’en avait pas reconnu le caractère, réédité et expliqué par G.

425. (1856) Cours familier de littérature. I « Digression » pp. 98-160

Ce temps de cataclysme où elle avait vécu seyait à son caractère ; elle était Romaine plus que Française. […] Sa jeunesse avait mûri sans rien perdre de sa fraîcheur ; et de plus, par une exception que méritait son caractère, en acquérant beaucoup d’éclat, elle n’avait pas perdu une amitié. […] Son esprit observateur et pénétrant ourdissait un de ces grands drames de caractère, qu’elle avait la force de nouer et de dénouer d’une main sûre. […] Ceux d’entre eux qui l’ont vue comme moi dans ces derniers temps, étaient frappés du caractère solennel, majestueux et serein qu’avait contracté sa beauté plus mûre. […] Elle aurait été une grande mère pour un fils, elle aurait eu le lait des lions ; car le trait dominant de son caractère, c’était l’héroïsme.

426. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Deuxième leçon »

Mais il est clair que des conceptions jusqu’à présent aussi incomplètes ne doivent point entrer, comme partie essentielle, dans un cours de philosophie positive qui ne doit comprendre, autant que possible, que des doctrines ayant un caractère fixe et nettement déterminé. […] Ce sont évidemment, en effet, deux travaux d’un caractère fort distinct, que d’étudier, en général, les lois de la vie, ou de déterminer le mode d’existence de chaque corps vivant, en particulier. […] Dans l’étude de chaque science les considérations historiques incidentes qui pourront se présenter auront un caractère nettement distinct, de manière à ne pas altérer la nature propre de notre travail principal. […] (2) Un second caractère très essentiel de notre classification, c’est d’être nécessairement conforme à l’ordre effectif du développement de la philosophie naturelle. […] Car la leçon prochaine sera entièrement consacrée à la détermination exacte de son véritable caractère général, et par suite à la fixation précise de son rang encyclopédique.

427. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires sur la mort de Louis XV »

Sa position, et plus encore son caractère, l’engageaient à tout ménager, et, ne voulant rien mettre contre lui, il ne pouvait pas avoir cette conduite franche et assurée, cette décision ferme et inébranlable qu’a l’honnêteté désintéressée. Le caractère brusque et décidé de La Martinière lui donnait cette force. […] Quoique L…… soit un homme vil et sans honneur, il ne faut pas confondre sa bassesse avec celle de M. d’A….. ; elle est d’un caractère un peu plus noble, au moins plus hardi. […] Les médecins l’étaient comme tout le monde, et leur silence l’annonçait ; ils ne parlaient qu’entre eux, et remettaient encore au lendemain à vouloir prononcer sur le caractère de la maladie. […] Il fut donc décidé qu’on ne parlerait point au roi du caractère de sa maladie, qu’on ne la lui nommerait point, mais qu’on ne l’empêcherait pourtant pas de la deviner, si le traitement qu’on lui ferait et les boutons qui se multiplieraient lui en donnaient connaissance.

428. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

L’opinion, si vacillante sur les événements réels de la vie, prend un caractère de fixité quand on lui présente à juger des tableaux d’imagination. […] L’art d’observer les caractères, d’en expliquer les motifs, d’en faire ressortir les couleurs, est d’une telle puissance sur l’opinion, que, dans tout pays où la liberté de la presse est établie, aucun homme public, aucun homme connu ne résisterait au mépris, si le talent l’infligeait. […] Ailleurs, de certaines barrières factices empêchent la confusion totale des diverses éducations ; mais lorsque le pouvoir ne repose que sur la supposition du mérite personnel, quel intérêt ne doit-on pas mettre à conserver à ce mérite tous ses caractères extérieurs ! […] Ce qui permet aux guerriers de jeter quelque dédain sur les hommes de lettres, c’est que leurs talents ne sont pas toujours réunis à la force et à la vérité du caractère. […] Un caractère élevé redevient content de lui-même, s’il se trouve d’accord avec ces nobles sentiments, avec les vertus que l’imagination même a choisies, lorsqu’elle a voulu tracer un modèle à tous les siècles.

429. (1892) Boileau « Chapitre IV. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » » pp. 89-120

Le seul caractère sur lequel tous les hommes puissent tomber d’accord, dans un poème, c’est la conformité de l’expression à l’objet, si l’objet est pris dans la nature. […] Ce caractère est sensible dans la poésie de Racine, et dans toute la littérature du siècle. […] Néron est beau comme « monstre naissant » : affadi par Quinault, il serait moins « plaisant » parce qu’il aurait moins de caractère. […] Elle a pour objet les lois et les types, les rapports essentiels et les caractères spécifiques. […] Car, si l’imitation de la nature, et de la nature qu’aperçoivent et reflètent tous les esprits, est la loi souveraine, il semble bien que l’œuvre d’art doive avoir ces deux caractères : objectivité et impersonnalité.

430. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Dès la première lettre écrite du château de Mirabeau (juillet 1737), le caractère du marquis se dessine. […] Il est évident que Vauvenargues inspirait à tous ceux qui le voyaient d’un peu près un grand respect de sa personne, une admiration de ses talents (préalablement à toute application), et encore plus de son caractère. […] Pour ne pas faire tort à ce caractère original et ne pas se prendre exclusivement à quelques contradictions et quelques ridicules, il importe de bien se rappeler ce que fut le marquis de Mirabeau dans l’ensemble de sa carrière. […] J’aurais tort de ne pas connaître votre caractère et qu’il n’y a plus de retour avec vous. […] Dans la jeunesse, quand le brillant y était encore, et avant que ces humeurs impétueuses et ces fougues eussent acquis au caractère toutes ses aspérités, il pouvait y avoir sinon du charme, du moins bien de l’intérêt dans le commerce d’un tel homme : un air de grandeur revêtait les défauts.

431. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par. M. le Chevalier Alfred d’Arneth »

Elle parle du futur Louis XVIII comme d’un caractère faux, dissimulé, cauteleux, mêlé par goût dans des intrigues et y mêlant sa femme qui, « peur, bêtise ou inclination », le suit. […] Madame est Italienne de corps et d’âme ; le caractère de Monsieur y est très-conforme : notre pli est pris, nous vivrons toujours sans division ni confiance, et je crois que le roi est comme moi sur cet article. (14 juillet 1775.) » Cet article des deux beaux-frères revient fréquemment sur le tapis. […] Marie-Antoinette remet les choses à point et leur fait leur juste part à l’un et à l’autre : « Il est bien vrai qu’il (Monsieur) n’a pas les inconvénients de la vivacité et turbulence du comte d’Artois ; mais à un caractère très-faible il joint une marche souterraine et quelquefois très-basse ; il emploie, pour faire ses affaires et avoir de l’argent, de petites intrigues dont un particulier honnête rougirait. […] Son caractère est vrai, et quoiqu’il est gauche, il a toutes les attentions et complaisances possibles pour moi. (15 décembre 1775.) » Gauche et empêché, c’était, je le répète, le seul défaut de Louis XVI vis-à-vis de cette jeune princesse : il avait d’ailleurs toutes les bonnes intentions et toutes les vertus, excepté cette force qui est l’essence de la vertu même. […] Cette dernière n’était pas au-dessus, par son caractère, des inimitiés d’antichambre, et elle a bien pu y céder dans ce qu’elle dit de l’abbé.

432. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

« Prend-il le caractère de la victime ? […] Plus la fortune nous abaisse, plus il faut nous élever, si nous voulons sauver notre caractère. […] Nous supportons l’adversité non d’après tel ou tel principe, mais selon notre éducation, nos goûts, notre caractère, et surtout notre génie. […] Molé, très-jeune encore, mais déjà mûr d’idées et souple de caractère ; M.  […] Femme d’esprit, d’un caractère épineux et difficile, elle laissait son mari libre et vivait çà et là avec ses belles-sœurs, délaissées comme elle.

433. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

La poésie : Bertaut ; Vauquelin de laFresnaye ; Régnier, son caractère et son génie. — 2. Caractères généraux de cette période : restauration monarchique et catholique ; ordre et tolérance ; rationalisme et éloquence ; détermination des objets littéraires ; stoïcisme chrétien ; sincérité et naturel. […] Les pointes qui lui échappent ne changent pas le caractère de son œuvre : il a un naturel mou, qui parfois étale des grâces nonchalantes, souvent, il faut le dire, se dilue en prolixité plate. […] Il a et il donne par le physique la sensation du moral : il saisit au vol le geste ou l’accent significatifs d’un caractère ou d’une profession. […] Et nous voyons précisément ces caractères apparaître dans les écrivains dont j’ai parlé.

434. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — I. » pp. 224-245

Il les a distribuées par ordre chronologique ; il y a joint les notes et éclaircissements qu’on peut désirer, une introduction historique où il envisage le caractère et le rôle du personnage, et une préface où il rend compte du procédé matériel de l’écrivain. […] On le retrouve mieux dans son caractère et dans le ton qui lui est facile, lorsqu’il écrit la lettre suivante à un de ses grands vicaires, qui s’était un peu trop émancipé auprès de lui : (1610.) […] Là pourtant où il se sent maître, il applique déjà sa méthode et fait sentir la marque de son caractère. […] Avenel fait remarquer en même temps ce terme bref de huit jours : quelque chose du caractère impérieux du cardinal se retrouve, même quand il s’agenouille et s’humilie : il semble prescrire un terme à Dieu même32. […] Elle choisit pour cette exécution Thémines, dont Henri IV lui avait dit « qu’il était homme à ne reconnaître jamais que le caractère de la royauté », et à n’obéir qu’à elle : qualité qui devenait si rare !

435. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Arnault est un de ceux qui ont une physionomie et un caractère ; il est bien de sa date, et il en est avec esprit, avec naturel et sans fadeur. […] On a remarqué qu’en général il y a peu d’action, peu de drame, point de caractères dessinés, et que l’auteur n’a pas le détail fertile. […] Vos Fables ont un caractère à vous. […] Arnault et qui servais alors sous des drapeaux littéraires tout différents, j’ai pu me convaincre de la réalité de l’éloge en ce qui touche le caractère. […] Voici une anecdote vraie que je m’étais retranchée d’abord : on y verra le contraste de deux humeurs et de deux caractères.

436. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

Tourguénef pose ses créatures, les façonne en un coup de main, nous explique leurs mobiles, leur caractère, et nous voilà entraînés à suivre l’existence d’un étranger, dont le visage nous est devenu familier et dont l’âme va nous être révélée jusque dans son essence. […] Cet art de clair-obscuriste, où des touches de lumière, placées, comme il semble, au hasard, font conjecturer des perspectives infinies, — une série de conversations, de petits faits insignifiants, des traits de caractère sans conclusion, un chuchotement, un serrement de mains, un coup d’œil, suffisent à M.  […] Tourguénef, de son procédé par lumières subites, de sa maîtrise à faire saillir d’un fond d’ombre le caractère individuel de l’objet ou de l’être qu’il reproduit, du mystère enveloppant de son style, de cette poésie de demi-jour qui rend ses livres doux et comme parfumés. […] S’il tombe amoureux, c’est en luttant violemment pour cette intégrité de son caractère qui se trouve entamée par l’adoration et la dépendance d’autrui. […] En sorte que ses fluctuations de caractère le perdent du même coup à ses yeux et dans l’esprit de sa fiancée.

437. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Les pièces de Marivaux semblent faites pour tenter ainsi et susciter, de temps à autre, des acteurs et des actrices qui cherchent la distinction, et qui sont destinés aux caractères fins et de bonne compagnie. […] Les valets et les soubrettes de Marivaux, ses Frontin et ses Lisette ont un caractère à part entre les personnages de cette classe au théâtre. […] Mais sauf quelques rares exceptions qu’offrirait ce talent fertile, l’amour, qui est le caractère dominant dans le théâtre de Marivaux, est bien tel chez lui qu’il s’est plu à le représenter dans une de ses plus agréables feuilles ; il ne le veut point constant, même lorsqu’il finira par être fidèle et par revenir là d’où il est parti : En fait d’amour, dit-il, ce sont des âmes d’enfants que les aima inconstantes. […] C’est une qualité dans un amant bien traité que d’être d’un caractère exactement constant ; mais ce n’est pas une grâce, c’est même le contraire… En amour, querelle vaut encore mieux qu’éloge. […] Ce prélat parla, ce me semble, assez bien de Marivaux ; il le loua d’abord, non pas tant pour ses écrits que pour son caractère : « Ce n’est point tant à eux, dit-il, que vous devez notre choix, qu’à l’estime que nous avons faite de vos mœurs, de votre bon cœur, de la douceur de votre société, et, si j’ose le dire, de l’amabilité de votre caractère. » En venant aux ouvrages, il s’exprime plutôt comme par ouï-dire, afin de n’avoir point, lui homme d’Église, à se prononcer directement en ces matières légères de roman et de théâtre : « Ceux qui ont lu vos ouvrages racontent que vous avez peint sous diverses images, etc.

438. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

Le pape régnant, Clément XIV, se refusa à le reconnaître sous le caractère officiel de roi et reine d’Angleterre. […] Le caractère de la reine était plus français qu’allemand. […] Elle avait vingt-cinq ans, un goût très-vif pour les lettres et les beaux-arts, un caractère d’ange, et, malgré toute sa fortune, des circonstances domestiques pénibles et désagréables, qui ne lui permettaient d’être ni aussi heureuse ni aussi contente qu’elle l’eût mérité. » Ces circonstances, on peut assez les préciser aujourd’hui. […] Il avait même assez pris sur son caractère et sur son humeur pour être en bons termes avec le mari, et il avait réussi à lui agréer. […] Quelqu’un, qui la rencontra alors dans un de ces cercles brillants, nous la montre ainsi, moins en peintre qu’en observateur et en moraliste : « La comtesse d’Albany était, par sa figure, ses manières, son esprit, son caractère et son sort, la femme la plus généralement intéressante.

439. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite.) »

Les personnages mis en scène sont si bien venus et si vivants, ils sont nés sous une si heureuse étoile, ils sont d’une physionomie si originale et ont un caractère si marqué (y compris leurs deux montures, inséparables des deux maîtres), qu’on s’attache et qu’on s’affectionne à eux tout d’abord, indépendamment de la moralité finale que l’auteur prétend tirer de leurs actions. […] Je n’entends point parler ici de maint anachronisme ni des inadvertances de détail qu’on a relevés et qui sont échappés à la plume rapide de l’auteur ; je ne parle que de l’ensemble des caractères et de l’action. […] Mais le même caractère, qui est admirable pris d’un point de vue élevé, est risible, considéré de la terre… L’on sent déjà pourquoi quelques personnes ont considéré Don Quichotte comme le livre le plus triste qui ait jamais été écrit ; l’idée, fondamentale, la morale du livre, est en effet profondément triste… » Il n’est, on le voit, que manière de prendre les choses. […] On ne saurait aller plus loin dans cette voie d’attrister et de mélancoliser Don Quichotte : « Le caractère de Gœtz de Berlichingen, nous dit l’auteur, a été évidemment inspiré par celui de Don Quichotte. […] « Démontrer que Gœthe s’est inspiré de Cervantes serait déjà un sujet de critique assez piquant, mais c’est une raison plus forte qui me pousse à insister sur la filiation des deux caractères.

440. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

Le caractère du siècle reçoit alors son trait final, et « l’homme sensible » apparaît. […] Insuffisance du caractère ainsi formé. — Adapté à une situation, il n’est pas préparé pour la situation contraire. — Lacunes dans l’intelligence. — Lacunes dans la volonté. — Ce caractère est désarmé par le savoir-vivre. […] Où trouver la résistance dans un caractère formé par les mœurs qu’on vient de décrire   Avant tout, pour se défendre, il faut regarder autour de soi, voir et prévoir, se munir contre le danger. […] Le fonds et la ressource manquent à ce caractère ; à force de s’affiner, il s’est étiolé, et la nature, appauvrie par la culture, est incapable des transformations par lesquelles on se renouvelle et on se survit  L’éducation toute-puissante a réprimé, adouci, exténué l’instinct lui-même. […] Corinne, par Mme de Staël : Caractère du comte d’Erfeuil. — Mémoires de Malouet, II, 297.

441. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Les regrets. » pp. 397-413

Le grand malheur des révolutions fréquentes et périodiques auxquelles notre France s’est vue sujette depuis quarante ans, a été de faire de vastes coupes réglées dans les générations qui formaient la tête de la société, de les déposséder presque en masse du pouvoir en un seul jour, et de donner aux générations survenantes le caractère d’une conquête et d’une invasion. […] On pouvait croire, au premier abord, qu’il y avait de leur côté de la ressource, parce que leurs caractères n’étaient point usés, et parce qu’ils avaient vécu en dehors du tourbillon qui entraînait l’Europe. […] Du temps de la monarchie et de la Cour, elle se confondait avec la maladie du courtisan disgracié ou de la perte de la faveur ; depuis l’émancipation de la société et la participation plus ou moins directe d’un grand nombre à l’exercice du pouvoir, la maladie, dans sa forme simple, s’est fort répandue, et il y a des moments où elle a le caractère d’une épidémie. […] C’est ici que la différence des humeurs et des caractères se déclare, et aussi celle de l’éducation. […] C’est l’homme du monde que j’envie davantage : il a un caractère unique. » Maurepas se consolait par la légèreté et la satire, et en faisant collection de tous les noëls moqueurs où l’on chansonnait les gens.

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