Il s’appelle RÉVÉLATION. […] Ils étreignent des nuées, ils appellent à grandes clameurs l’impossible idéal. […] Il s’appelle le Voyage dans les Yeux. […] Dans leurs œuvres ou se reconnaît, on s’appelle, on se sent les coudes. […] Leurs amours s’appellent, leurs yeux pleins de volupté âpre ou lèche.
Tous n’ont pas de nom et plusieurs n’en auront jamais : comment les appellerons-nous ? […] Tailhade se rendit tout à coup célèbre et redouté par les cruelles et excessives satires qu’il appela, souvenir et témoin d’un voyage que nous faisons tous sans fruit, Au pays du Mufle. […] Cette pleine conscience de soi-même peut s’appeler l’originalité de l’âme, — et tout cela n’est dit que pour signaler le groupe d’êtres rares auquel appartient M. […] Lorsqu’il appela un de ses poèmes le Pèlerin passionné, il donna de lui-même, et de son rôle, et de ses jeux parmi nous, une idée excellente et d’un symbolisme très raisonnable. […] Moréas ne comprendra jamais combien il est ridicule d’appeler Racine le Sophocle de la Ferté-Milon.
Il dédaigne ce qu’il appelle « la critique à fresque ». […] Qu’on ne lui parle pas de ce qu’on est convenu d’appeler le vieil esprit gaulois ! […] N’a-t-il pas appelé la Terre de M. […] D’un seul mot, qui dit tout, il l’appelle son Marivaux. […] Becque pourrait être appelée, selon lui, une étude de vice ou une leçon de pathologie.
Je l’appellerai Emma Bovary. […] On peut appeler leurs vies à tous deux des vies manquées. […] On pourrait l’appeler ses Natchez. […] Elle pourrait s’appeler le livre de la solitude et du désir. […] Et la Tentation peut s’appeler le Pourana de Flaubert.
Quiret de Margency, ainsi appelé parce qu’il possédait le château de ce nom, ayant titre et qualité gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, était un ami de Rousseau ; il avait été du monde de d’Holbach et des philosophes, et en était sorti ; on voit que, vers la fin, il avait même passé à une dévotion extrême. […] Même quand il était à l’état de papillon, le gentil Margency avait quelque chose de concerté, et on l’appelait dans son monde « le Syndic des galantins », ou M. le Syndic tout court. Dans les lettres de Mme de Verdelin et de Rousseau, il est souvent appelé « le Docteur73». […] Nous voyons dans cette suite de lettres Mme de Verdelin, toute femme de qualité qu’elle est, se séparer fort nettement de ceux qu’elle appelle les Grands. […] Loin de là, il écrivait à celle qu’il appelait cette fois son amie : « Quatre jours avant l’arrivée de votre dernière lettre, M.
Car cette Thalie, comme il l’appelle, cette verte et agréable beauté de la muse pastorale, à quel âge du monde ira-t-on la demander, si ce n’est à sa jeunesse ? […] » — « Si nous appelions, répond Ménalcas, ce chevrier dont là-bas, près des chevreaux, le chien blanc aboie ? […] » Voilà ce que j’appelle le Raphaël dans Théocrite : trois lignes simples, et l’horizon bleu qui couronne tout. […] Gracieuse Vomvyca, ils t’appellent tous Syrienne, maigre et brûlée du soleil ; moi seul je te trouve la couleur du miel. […] Quant à présent, poursuit-il, il n’a que des actions de grâces à rendre à Cypris d’abord, et puis à celle qui, en l’envoyant appeler, l’a tiré véritablement du feu où il était déjà à demi consumé.
Sidoine Apollinaire, étant évêque, composa un discours en latin, très-travaillé et maniéré selon son usage, pour être récité devant la population réunie de Bourges où il avait été appelé comme médiateur entre les factions opposées qui se disputaient pour le choix d’un évêque. […] De Sainte-Palaye à Méon et même après, nous ne voyons que des fouilleurs, qu’on ne saurait en aucune sorte appeler des guides. […] Je les ai déjà appelés des praticiens ; ils le sont en effet, et des empiriques. […] Ils publièrent textes sur textes, chansons de Geste, chansons proprement dites, lais, fabliaux, miracles et mystères, tout un fonds de littérature longtemps perdu et ignoré, souvent agréable pour le lecteur instruit, et qui appelle surtout l’attention du critique et du philosophe. […] Car, en beaucoup de cas, les mots ne dérivent que médiatement du latin, et il a existé un mot qu’on peut appeler bas-latin et qui sert d’intermédiaire.
Il est ce qu’on appelle un poète intime, comme Byron de nos jours ; une si puissante et si pathétique individualité, qu’elle envahit tout ce qu’il écrit, et que si l’homme n’existait pas le poète cesserait d’être. […] Le sonnet funéraire de Pétrarque, jeté par lui dans son cercueil et retrouvé quand ce cercueil fut ouvert, atteste ce droit d’Avignon à s’appeler la patrie natale de Laure. […] Une autre ode qu’il adressa à la même époque à Étienne Colonna, et que Voltaire appelle la plus admirable de ses poésies lyriques, éleva sa renommée au-dessus de tous les poètes du temps. […] Mais, à elle seule, elle ne peut rien : l’unité, source de toute force, lui manque ; l’amitié pieuse des races qu’elle appelait jadis barbares lui est nécessaire. […] qui m’appelles des profondeurs du ciel, par la mémoire de ta mort si amère, oh !
C’est assez pour moi de commander à Trilby et d’obtenir qu’elle vienne quand je l’appelle ou que je lui demande la patte. […] J’appelle plaisir la lecture, qui n’est nullement essentielle pour moi. […] Voilà ce qui m’arrive chaque fois qu’il est question de voyage : j’appelle voyage une sortie de huit jours. […] Les petits enfants s’en amusent et les appellent fleurs de mars. […] On appelait quelquefois ainsi dans la famille l’autre sœur, Mimi, Mimin ou Marie.
Et sachiez que moult se tenoit De faire à Dieu prières saintes Et d’appeler et saints et saintes. […] Martial d’Auvergne était appelé le poëte le plus spirituel de son temps. […] Quoique résigné à mourir, comme le jeu ne lui plaisait pas, dit-il gaiement, il eut l’idée d’en appeler, contre l’usage, au parlement de la sentence du Châtelet. […] Il s’en fallut de la clémence de Louis XI, qu’il appelle Loys le Bon, que Villon ne réalisât l’effrayante peinture qu’il avait faite d’un pendu. […] Cet évêque s’appelait Thibault d’Aussigny.
Les prosateurs, qui, tel Jean-Jacques, suivent la dictée d’une voix intérieure et retournent vingt fois dans leur tête les phrases qu’ils construisent ; ceux qui, tel Flaubert, les font passer par leur « gueuloir » pour en éprouver l’euphonie, attachent une légitime importance aux délicates combinaisons de syllabes qui forment ce qu’on appelle « le nombre ». […] La poésie possède une faculté de précision qui manque à la pensée musicale ; elle est donc appelée à formuler l’idée mère du drame, à combiner les événements et les passions dont la rencontre et le conflit amèneront des situations terribles ou plaisantes ; elle détermine ainsi la voie où doit s’engager après elle l’inspiration du compositeur. […] Ce sont, comme on l’a dit, des hommes de musée ; mais de plus ils sont novateurs ; ils sont les chefs d’une école qu’on peut appeler impressionniste. […] Cette liaison est si réelle que la vue seule d’un édifice, d’une chambre appelle l’idée de certaines œuvres et exclut celle de certaines autres. […] On se coiffe à la vierge, ou bien on laisse pendre ses cheveux en longues boucles qu’on appelle des anglaises et qui font penser au feuillage éploré d’un saule élégiaque.
C’est là le danger de la nature du « Barbare », comme les Grecs, malgré ses raffinements de luxe et de mœurs, appelèrent toujours méprisamment l’Asiatique ; il échappe au raisonnement et à la logique. […] Xerxès, effrayé, fit appeler Artabane. […] Le piège appelle le traître ; il s’en trouva un pour l’indiquer à Xerxès. […] L’invasion des « Dragons », comme les Perses s’appelaient eux-mêmes, s’évanouit en un nuage de sauterelles faméliques, rongeant les pousses et les regains du désert. […] L’historien l’appelle Phémé, dont les Romains ont fait leur Fama, la Renommée aux cent bouches et aux cent clairons.
Un agent extérieur, son, lumière, choc, vient-il exciter un nerf, l’équilibre rompu produit un mouvement de dépense nerveuse, qui excite un mouvement de réparation simultanée, comme l’eau qui sort d’un siphon appelle à sa place l’eau qui y monte. […] C’est là, nous l’avons vu, ce que les anciens appelaient le plaisir en mouvement, ἡδονή ἐν ϰινήσει, ce que nous nommons des émotions, des troubles, des perturbations de l’âme. […] D’ordinaire, on appelle indifférence un état de bien-être ou de malaise peu notable. […] Ce qu’on appelle l’indifférence, selon nous, n’est que la neutralisation mutuelle d’une série aboutissant à la peine par une série aboutissant au plaisir ; c’est un état dérivé, une composition de mouvements extérieurs et d’émotions intérieures. […] L’évolution, l’universel « devenir », que les anciens appelaient l’universel « désir », est donc, selon la doctrine profonde de Platon dans le Banquet, « l’enfant de la Richesse » et non pas seulement de la « Pauvreté ».
On les appelle parfois axiomes logiques, axiomes scientifiques et axiomes métaphysiques, mais les lois directrices de la logique méritent seules le nom d’axiomes. […] C’est précisément cette origine que Lamarck a mise en lumière et que Spencer appelle « l’adaptation fonctionnelle ». […] James, d’appeler du même nom des causes si différentes et de dire que les deux animaux doivent leur bon naturel à ce que Spencer appelle « l’expérience des relations extérieures ». […] Nous n’avons d’autre moyen que de nous le figurer sur le type de ce que nous appelons agir, faire effort, tendre, désirer, vouloir. […] Aussi, pour lier entre eux les différents états du monde, nous faisons circuler de l’un à l’autre une même action causale, que nous appelons assez improprement substance.
Il est curieux de voir ce que fut un tel peuple dans sa littérature virile, au moment où il donna le premier au monde le signal de la renaissance des lettres, après douze siècles de ténèbres et de stérilité répandues en Orient et en Occident sur ce qu’on appelait l’univers romain. […] La troisième et dernière partie est celle où il envisage les hommes parfaits ; et il l’appelle Paradis, pour exprimer la hauteur de leurs vertus et la grandeur de leur félicité, deux conditions hors desquelles on ne saurait reconnaître le souverain bien. […] Ozanam, comme la plupart des commentateurs italiens, voit dans la fable du Dante une philosophie tout entière ; il appelle cette doctrine la philosophie catholique du moyen âge. On l’appellerait plus justement, selon nous, la philosophie spiritualiste de tous les âges, incorporée dans quelques dogmes et dans quelques formes de l’imagination christianisée du temps. […] Si vous m’appelez, je n’ai pas le droit de me plaindre.
Il l’avait trop, en effet, cet esprit facile, que les femmes mêmes ont ou peuvent avoir, pour débuter par cette sévère abstraction du temps où l’on vit qu’on appelle l’étude de l’histoire ; Audin avait la sensibilité et l’imagination d’un artiste. […] C’était le moment de cette chose petite qu’on a appelée la Coalition, — un grand nom qui la fait paraître plus petite encore. […] Cela devait résulter, du reste, des sujets qu’Audin a choisis, et qu’on peut appeler les sujets les plus intellectuels de l’Histoire. […] Heureusement qu’il n’y revint pas au point que ces esprits sans hardiesse auraient appelé l’idéal. […] On ne pouvait pas dire de lui comme de Condorcet, qu’il était un volcan sous la glace ; mais n’y a-t-il pas une fleur qu’on appelle boule de neige et qui annonce le printemps ?
Dès à présent, on appelle de tous ses vœux ou on injurie par avance une résurrection du « classicisme » ou encore de l’« humanisme ». […] Aujourd’hui encore, sous les noms les plus divers, qu’elle s’appelle Religion, Esthétique ou Morale, elle est l’âme de nos civilisations. […] La vie dans son activité plastique est déjà un art qui sollicite le nôtre, elle est aussi un rythme qui appelle le chant. […] Cette intuition des réalités utiles à la vie complétée par le savoir, c’est ce qu’on appelait autrefois l’« humanisme », beau mot dont nous avons à peu près oublié le sens ! […] Ils savent que l’Individu, expression de la race, est la base de tout et que les démocraties elles-mêmes ne peuvent se passer d’individus : la Révolution s’appelle Mirabeau, la Terreur s’appelle Robespierre !
On aurait ainsi, non pas précisément un document historique ajouté à tant d’autres, mais une grande chronique de mœurs, un ardent commérage de société par celle qu’on peut appeler le Gui Patin ou le Tallemant des Réaux de la fin du xviie siècle et des premières années du xviiie ; on aurait un livre vivant, spirituel et brutal, qui ferait pendant et vis-à-vis à Saint-Simon sur plus d’un point. […] Elle était ce qu’on appelle une bonne maîtresse, et plus on l’approchait, plus on la regretta : Saint-Cloud, écrivait-elle dans l’automne de 1717, n’est qu’une maison d’été ; beaucoup de mes gens y ont des chambres sans cheminée ; ils ne peuvent donc y passer l’hiver, car je serais cause de leur mort, et je ne suis pas assez dure pour cela ; ceux qui souffrent m’inspirent toujours de la pitié. […] Cependant « Le Malade imaginaire n’est pas celle des comédies de Molière que j’aime le mieux, disait-elle ; Tartuffe me plaît davantage. » Et dans une autre lettre : « Je ne puis vous écrire plus long, car on m’appelle pour aller à la Comédie ; je vais voir Le Misanthrope, celle des pièces de Molière qui me fait le plus de plaisir. » Elle admirait Corneille, elle cite La Mort de Pompée ; je ne sais si elle goûta Esther : elle aurait aimé Shakespeare : « J’ai souvent entendu Son Altesse notre père, écrivait-elle à sa demi-sœur, dire qu’il n’y avait pas au monde de plus belles comédies que celles des Anglais. » Après la mort de Monsieur et durant les dernières années de Louis XIV, elle avait adopté un genre de vie tout à fait exact et retiré : « Je suis ici fort délaissée (5 mai 1709), car tous, jeunes et vieux, courent après la faveur ; la Maintenon ne peut me souffrir ; la duchesse de Bourgogne n’aime que ce que cette dame aime. » Elle s’était donc faite absolument ermite au milieu de la Cour : Je ne fraye avec personne si ce n’est avec mes gens ; je suis aussi polie que je peux avec tout le monde, mais je ne contracte avec personne des liaisons particulières, et je vis seule ; je me promène, je vais en voiture ; mais depuis deux heures jusqu’à neuf et demie, je ne vois plus figure humaine ; je lis, j’écris, ou je m’amuse à faire des paniers comme celui que j’ai envoyé à ma tante. […] Bref, elle aimait fort ce jeune homme, qu’elle appelait son abbé de Saint-Albin, qui fut depuis archevêque de Cambrai, et lorsqu’il soutint sa thèse en Sorbonne (février 1718), elle y voulut assister en grande cérémonie, déclarant ainsi à la fois et honorant la naissance illégitime de cet enfant.
Je vous demande donc, mon très cher père, si l’on conserve dans Saint-Victor la même mortification intérieure et extérieure, telle qu’elle était dans son origine… Je vous demande encore si les frères de Saint-Victor, c’est ainsi qu’on les appelait, allaient à la campagne chez leurs amis, chez leurs parents, passer des trois semaines entières et des mois entiers ; s’ils allaient par la ville rendre des visites ; s’il en recevaient de toutes personnes et de tout sexe ; s’ils changeaient d’habits, s’ils en prenaient de plus propres et de plus mondains quand ils sortaient pour se montrer en public ; s’ils affectaient de ces airs libres et dégagés, pour ne pas dire licencieux, qui sont si contraires à la tristesse sainte de la modestie religieuse ; s’ils parlaient indifféremment et sans scrupule dans les lieux réguliers ; s’ils s’entretenaient de contes, d’affaires, d’histoires du monde, de plaisanteries, de nouvelles, qui sont choses qui doivent être entièrement bannies des cloîtres. […] Mais il y avait d’autres choses encore dans l’épitaphe ; il y disait d’Arnauld qu’il revenait de l’exil, ayant triomphé de ses ennemis, « exul, hoste triumphato » ; il l’appelait le défenseur de la vérité, l’oracle du juste, Arnaldus veri defensor, et arbiter aequi. […] Toute la jeune cavalerie légère des jésuites (« pubes jesuitica sagittaria », comme il l’appelait) était à ses trousses et le houspillait. […] Ce Bâillon fut ce qui mordit le plus au sang la langue du malheureux Santeul ; il demanda quartier par une élégie où il en appelle à la charité chrétienne.
Nommé professeur de rhétorique après concours, mais en province, puis placé à Paris, puis désigné pour faire partie de l’École d’Athènes à sa fondation, et retenu au moment du départ, appelé comme précepteur auprès d’un des petits-fils du roi Louis-Philippe (1847), Rigault éprouva, par suite de ce choix, plus de vicissitudes qu’il n’avait dû s’attendre à en rencontrer. […] Nous sommes obligés de connaître Rome, comme des petits-fils de connaître leur vieille mère. » Il montrait que ce n’est pas tant à l’Université qu’il faut s’en prendre des maladies morales de la jeunesse qu’aux familles elles-mêmes, à l’esprit public et à l’air vicié du dehors, à la littérature enfin ; et faisant allusion à la grande plaie, selon lui régnante, au roman, il appelait de ses vœux un roman pareil à Don Quichotte, c’est-à-dire qui mît à la raison tous les mauvais romans du jour ou de la veille, et en sens inverse de Don Quichotte ; car, en ce temps-là, c’était la chevalerie, avec sa fausse exaltation idéale, qui était la maladie à la mode, et du nôtre c’est le contraire : « c’est le goût du bien-être personnel, c’est l’amour des jouissances positives, c’est l’égoïsme, c’est Sancho, en un mot, et non pas Don Quichotte. […] Quand un grain de passion politique ou universitaire s’y mêle, quand l’adversaire prête flanc par une surface prolongée, quand le journaliste professeur est à l’aise pour se déployer derrière ses lignes classiques et pour ajuster sûrement son monde, il s’en donne en homme d’esprit plein de malice ; et à ce jeu il se serait rompu à la longue ; le naturel aurait pris le dessus sur le concerté et le compassé ; ce qu’un adversaire des plus fins, mais irrévérent36, a appelé l’amidon de son style, ce que nous nommons tout uniment l’apprêt, aurait disparu. […] Rigault moraliste nous appelle ; ç’a été un des aspects de son talent critique, et par où il prétendit à une sorte d’originalité.
N’allez point l’appeler, par mégarde, un éminent écrivain60 : « c’était un des hommes les plus fertiles en expédients dramatiques » Tel qu’il était, il n’est pas remplacé. […] Thiers, de l’appeler « un Marco Saint-Hilaire éloquent. » Il a essayé, depuis, de réparer cela et de recouvrir ce mot malencontreux par de longs et vastes articles sur l’Histoire de L’Empire. […] Ce singulier kiosque, fait en marqueterie, d’une originalité concertée et composite, qui, depuis quelque temps, attire les regards à la pointe extrême du Kamtchatka romantique, j’appelle cela la folie Baudelaire. […] Poujoulat pouvait se croire appelé, M. de Carné pouvait espérer d’être élu, lorsqu’un nouveau nom, positivement déclaré, est venu les décourager tous et mettre comme à néant toutes les autres conjectures et candidatures : Le Soleil est levé, retirez-vous, Étoiles !
Le Journal commence par la petite vérole du roi en 1647 ; il n’avait alors que neuf ans ; Vallot n’était pas encore premier médecin, mais, appelé en consultation par Vaultier, il fut très-utile, prépondérant même par ses avis, et gagna la confiance de la reine et du cardinal Mazarin. […] Ô classe moyenne et aisée de nos jours, n’enviez pas l’hygiène ni le régime du grand roi dans ce qu’on appelle le plus poli des siècles. […] On corrigeait en partie ce mauvais effet par l’usage de ce qu’on appelait le Rossolis du roi, breuvage composé d’eau-de-vie faite avec du vin d’Espagne, dans laquelle on faisait infuser des semences d’anis, de fenouil, d’anet, de chervis, de carotte et de coriandre, à quoi l’on ajoutait du sucre candi, dissous dans l’eau de camomille et cuit en consistance de sirop. […] Louis XIV mangeait beaucoup ; ce lui était une nécessité sans doute pour se soutenir ; c’était aussi, pour l’appeler de son vrai nom, une gourmandise et une intempérance.
Ce qu’on appelle la trempe ne résulte que d’éléments ou de qualités opposées et combinées, qui se tiennent en échec l’une l’autre. […] Renan croit fermement que l’homme individuel a un but, « une perfection morale et intellectuelle à atteindre. » Il professe avec énergie ces hautes doctrines ; et, si on le presse, si on le chicane, si on lui oppose ses propres recherches, sa propre méthode, ce qu’il y a d’inexorable dans les résultats ou les inductions de l’analyse positive, il n’hésite pas à s’arrêter, à réserver l’avenir, à poser au terme de tout examen critique, et en présence du grand inconnu, ce qu’il appelle un doute inébranlable, mais un doute qui est tout en faveur des plus nobles suppositions et des hypothèses les plus conformes à la dignité du genre humain. […] Il lui semble que cette aberration laborieuse de l’esprit humain, qu’on a pu comparer à un cauchemar pesant, a été fructueuse et féconde : « Le sentiment de l’infini a été, pense-t-il, la grande acquisition faite par l’humanité durant ce sommeil apparent de mille années. » Il lui est arrivé, à certains jours, en même temps qu’il jugeait sans grande estime ce que nous appelons notre ère immortelle de 89, et où il ne voyait, en haine des badauds, qu’un fait purement français de vulgarisation égalitaire, de regretter, tout à l’opposite, je ne sais quelle époque du haut Moyen-Âge où, derrière les mille entraves et sous leur abri peut-être, l’intelligence des forts s’exerçait et se développait avec plus de vigueur et d’élévation solitaire. […] Renan a bien raison de sourire en 1862 de ce qu’on appelle les conquêtes de 89 !
On l’appelait « le dénicheur de saints. » Chaque curé avait peur qu’il ne prît à partie celui de son église, et plus d’un lui tirait fort bas son chapeau, du plus loin qu’il le voyait. […] Il était réservé à la protestante Allemagne de faire, de ce qu’on appelle l’exégèse ou examen critique des Écritures, une science régulière, et de donner à sa marche la justesse, la précision, la certitude définitive qu’a le génie militaire dans l’attaque méthodique des places fortes. […] Ce n’était pas à dire, malgré tout, que l’état des esprits, même dans ce qu’on peut appeler la masse ou la majorité, ne fût devenu bien différent de ce qu’il était au XVIIIe siècle et pendant les premières années de la Restauration. […] Chaque époque désire et appelle la forme d’écrivain philosophe qui lui convient.
L’Académie française, il faut lui rendre cette justice, n’a pas été des dernières à appeler les esprits dans cette voie plus libre et à la proclamer ouverte désormais. […] Qu’on appelle cela style ou langue peu importe, car qui dit langue dit aussi tours et locutions. […] Assez d’autres soins nous appellent. […] Vinet était éloquent : écoutons-le sur Rotrou, sur ce poète généreux que Corneille, modeste cette fois, appelait son père en matière de théâtre, et en qui M.
La Presse était devenue, comme on l’appelait, « le journal conservateur de la République. » Pour être conservateur dans un ordre de choses qui allait si vite et qui se déplaçait à chaque moment, il fallait se mettre au pas et se multiplier : c’est alors que M. de Girardin prit cette fameuse devise : Une idée par jour ! […] Le général Cavaignac, dictateur, pour couper court à ce qu’il appelait « les publications imprudentes » de M. de Girardin, fît poser les scellés sur le matériel de son journal et donna l’ordre de mettre le rédacteur à la Conciergerie. […] C’est à cette prison de la Conciergerie qu’il dut de lire à tête reposée les Œuvres de Turgot, et dans cette persécution qui ennoblit, qui épure les caractères et les retrempe quand elle ne les aigrit pas, lui qui avait souvent écouté des économistes plus habiles, mais d’une inspiration moins élevée et moins sévère, lui qui avait pris ses premières notions financières du célèbre Ouvrard, le Law de notre temps, il acquit le droit d’appeler désormais Turgot son maître, son ami. […] Sans doute, le courant de ce qu’on appelle l’opinion publique se décide par la suite et le concours de tant de causes générales et particulières, que chacune des particulières compte pour infiniment peu, — ou très-peu.
Tout appelle un chef, un maître, un dictateur. […] Zeller hésite un peu sur ce point ; mais il n’hésite pas quand il attribue à César l’idée de fonder, sous un nom ou sous un autre, une monarchie populaire, universelle et, en quelque sorte, humaine : « Étendre le droit de cité à tous les hommes libres de l’Empire, régner sur le monde pour le monde entier, non pour l’oligarchie ou la démocratie quiritaires ; abaisser les barrières entre les classes comme entre les nations, entre la liberté même et la servitude, en favorisant les affranchissements et en mettant le travail en honneur ; avoir à Rome une représentation non du patriciat romain, mais du patriciat du monde civilisé ; fondre les lois de la cité exclusive dans celles du droit des gens ; créer, répandre un peuple de citoyens qui vivent de leur industrie et qu’on ne soit pas obligé de nourrir et d’amuser : voilà ce qu’on peut encore entrevoir des vastes projets de celui qu’on n’a pas appelé trop ambitieusement l’homme du monde, de l’humanité ; voilà ce dont témoignent déjà les Gaulois, les Espagnols introduits dans Rome, Corinthe et Carthage relevées, et ce qu’indiquent les témoignages de Dion Cassius, de Plutarque, de Suétone, bien qu’ils aient pu prêter peut-être à César quelques-unes des idées de leur temps. » César (s’il est permis d’en parler de la sorte à la veille d’une publication par avance illustre), César, au milieu de tous ses vices impudents ou aimables, de son épicurisme fondamental, de ce mélange de mépris, d’indulgence et d’audace, de son besoin dévorant d’action, et de cet autre besoin inhérent à sa nature d’être partout le premier, César, à travers ses coups de dés réitérés d’ambitieux sans scrupule et de joueur téméraire, avait donc une grande vue, une vue civilisatrice : il n’échoue pas, puisque son idée lui survit et triomphera, mais il périt à la peine, parce qu’il avait devancé l’esprit du temps, tout en le devinant et le servant, parce qu’il vivait au milieu de passions flagrantes et non encore domptées et refoulées. […] Je connais quelqu’un qui n’appelle jamais ce siècle des Antonins que le magnifique été de la Saint-Martin de l’ancienne philosophie. […] On jouit, sauf quelques menaces et des veilles pénibles aux frontières, de l’unité incontestée du monde romain, de ce qu’on a appelé « la majesté de la paix romaine. » Un écrivain qui n’est pas suspect d’optimisme, Tertullien, comparait l’univers, en ce siècle heureux, au verger riant d’Alcinoüs : « Le monde, disait-il, est comme le jardin de l’Empire. » Adrien, on le sait, rassemblait dans la villa magnifique qui porte son nom des échantillons de toutes les merveilles du monde : le monde à son tour, du temps d’Adrien et de ses deux successeurs, n’était pour le Romain qu’une magnifique villa, une villa Adriana en grand.
Le comte Vitzthum a insisté avec raison sur l’importance du maréchal de Saxe à la Cour de France, à l’heure où ses victoires concouraient ainsi avec le mariage royal de sa nièce, et où il allait de plus, à l’aide de ce qu’il appelait un pétard, faire sauter l’incongru ministre des affaires étrangères, d’Argenson. […] J’en demande bien pardon au comte Vitzthum, mais j’en appelle à son esprit judicieux et je l’attends à une seconde révision. […] Revenons vite au mariage que chacun appelait de ses vœux et dont Louis XV pressait la conclusion, désirant qu’il pût se célébrer avant le carême de 1747. […] Ce qu’on a appelé le siècle de Louis XV se partage en deux ; la fin de la première moitié demeure assez belle : la figure du maréchal de Saxe apparaît de loin dans nos dernières victoires et perce le nuage ; il rejoint la chaîne historique, il tend la main aux Kléber ; malgré des défauts, malgré des vices, il est d’une ampleur et d’une générosité de nature qui le fait sympathique à la France nouvelle, et de lui aussi on peut dire avec quelque vérité : C’est le Mirabeau des camps.
. — Sont venus ensuite les Girondins, et j’appelle ainsi tous les hommes du second moment, ceux d’après la fuite de Varennes, la plupart provinciaux, s’échauffant et s’enflammant à mEsure que les premiers se refroidissaient, et qui sont entrés dans l’arène politique avec des pensées républicaines honnêtes, avec la conviction arrêtée de l’incompatibilité de Louis xvi et de la Révolution, apportant d’ailleurs dans la discussion et la conduite des affaires plus d’ardeur et de générosité ou d’utopie que de réflexion et de prudence, depuis Brissot, Roland et sa noble femme, jusqu’à Condorcet. — Puis les Montagnards : ceux-ci violents, exaspérés, partant d’un principe extrême, s’inspirant d’une passion outrée, mais bon nombre également sincères, patriotes, d’une intégrité exemplaire, ne songeant dans l’établissement de leur terrible dictature temporaire qu’à la défense du territoire et au salut de la Révolution : Carnot, Cambon, Robert Lindet, Jean-Bon Saint-André, d’autres moins en vue comme Levasseur, Baudot… Pour les juger avec équité, il faut faire la part du feu, la part de la fièvre, et sacrifier sans doute beaucoup des idées applicables aux temps ordinaires ; mais, historiquement, à leur égard, ce n’est que justice. — Puis, la Terreur passée, il y a eu les hommes fermes, modérés, honorables, qui ont essayé de fonder l’ordre et le régime républicain en dépit des réactions, les hommes de l’an iii, Thibaudeau, Daunou, La Revellière-Lépeaux… — Je compterai ensuite une autre génération d’hommes politiques, ceux de 1797, de la veille de Fructidor, très honnêtes gens d’intention, un peu prématurés d’action et d’initiative, qui voulaient bien peut-être du régime légalement institué, mais qui le voulaient avec une justice de plus en plus étendue et sans les lois d’exception : les Barbé-Marbois, les Portalis, les Camille Jordan. — Enfin il y eut, à la dernière heure du Directoire, les hommes qui en étaient las avec toute la France, qui avaient soif d’en sortir et qui entrèrent avec patriotisme dans la pensée et l’accomplissement du 18 brumaire : Rœderer, Volney, Cabanis… Je crois que je n’ai rien omis, que tous les moments essentiels de la Révolution sont représentés, et que chacun de ces principaux courants d’opinion vient, en effet, livrer à son tour au jugement de l’histoire des chefs de file en renom, des hommes sui generis qui ont le droit d’être jugés selon leurs convictions, selon leur formule, et eu égard aux graves et périlleuses circonstances où ils intervinrent. […] Un oncle, homme de mérite, qu’il avait dans l’Oratoire et qui était régent de philosophie, l’avait appelé à quatorze ans au collège de Juilly, et le jeune Malouet s’était cru lui-même, dans le premier moment, de la vocation pour être oratorien. […] Il y avait vingt-cinq ans qu’il n’avait mangé de pain, ni bu de vin ; Malouet lui fit faire un bon repas qui réveilla ses souvenirs : « Il me parla de la perruque noire de Louis xiv, qu’il appelait un beau et grand prince, de l’air martial du maréchal de Villars, de la contenance modeste du maréchal de Gatinat, de la bonté de Fénelon, à la porte duquel il avait monté la garde à Cambrai. […] « Il m’avait reçu d’abord avec de grandes démonstrations de joie ; mais, lorsque je fus près de le quitter, son visage vénérable se couvrit de larmes ; il me retint par mon habit, et prenant ce ton de dignité qui sied si bien à la vieillesse, s’apercevant, malgré sa cécité, de ma grande émotion, il me dit : « Attendez » ; puis il se mit à genoux, pria Dieu, et, m’imposant ses mains sur la tète, il me donna sa bénédiction. » Ce vieux soldat, Jacques Des Sauts, comme on l’appelait (probablement parce qu’il habitait près de la chute de l’Oyapock), est-il réellement l’original qui a suggéré l’idée de Chactas, également aveugle, également contemporain du siècle de Louis xiv, et qui se souvenait toujours de Fénelon, « dont il avait été l’hôte ?
À mesure que chacun des grands esprits qu’on a vus débuter avec éclat s’avance dans la vie, il rompt ses unités, multiplie ses bigarrures et ses aventures : cela, chez quelques-uns, peut s’appeler progrès ; car toute chose a deux noms. […] Ce que nous appelions progrès, il y a peu d’années encore, nous paraîtrait plutôt une déviation aujourd’hui, non pas peut-être qu’au dehors l’état de choses du talent ait beaucoup changé, mais parce que surtout nous le revoyons nous-mêmes avec moins de soleil. […] Plusieurs pièces pourtant sont d’une grande beauté ; car ce n’est pas le talent du poëte qui diminue en rien, veuillez le croire : il se poursuit, dans toute la largeur du souffle, dans l’entière puissance de la veine ; mais c’est l’emploi et l’écart de ce talent qui appellent une sorte de répression. […] Au nombre des mots que j’appelle discordants, on peut noter cette comparaison avec la poule qui gratte… ceci tient à toute une innovation des plus contestables dans le talent de M. de Lamartine.
Il y a un certain nombre de sentiments ou émotions que nous appelons esthétiques ; quelle en est la nature ? […] « Les objets que nous appelons sublimes sont, pour la plupart, tels d’aspect et d’apparence qu’ils expriment une grande puissance, énergie ou immensité, et sont par là capables d’élever l’esprit par un sentiment emprunté de puissance. […] C’est une nécessité que la force nerveuse existant à chaque instant, et qui produit d’une manière inexplicable ce que nous appelons sentiment, suive l’une de ces trois directions : exciter de nouveaux sentiments, agir sur les viscères, produire des mouvements. […] L’auteur l’a vue, posée, l’appelle même une difficulté « formidable en apparence » : j’ose dire qu’il ne l’a nullement résolue.
— c’est à cette heureuse expérience d’un homme lettres illustrant un enseignement universitaire, que je dois sans doute l’honneur d’avoir été appelé ici. […] Tant qu’on a considéré le Beau littéraire comme un absolu, ou, plus exactement peut-être, tant qu’on n’a pas tenté l’analyse du Beau littéraire, la critique a pu demeurer ce qu’elle avait été à ses débuts, ce qu’on la voit dans les « Examens » de Corneille et de ses contemporains, dans le « Spectator » d’Addison, dans la « Dramaturgie de Hambourg » de Lessing : une discussion conduite en vue de rechercher si l’œuvre étudiée s’éloigne ou se rapproche d’un certain type d’œuvre admis comme type idéal ; si elle respecte ou viole certaines règles, tirées de l’examen des chefs-d’œuvre antiques et acceptées par une convention d’ailleurs tout arbitraire ; ou même, simplement, si elle plaît ou déplaît, soit au critique lui-même, soit à un groupe de personnes qu’il croit représenter, et qu’il appelle suivant les époques les « bons esprits » les « lettrés », le « public ». […] L’autre, qu’on a appelé romantique, qu’on pourrait presque appeler barbare, est l’apport des races nouvelles qui sont venues, si je puis m’exprimer ainsi, greffer leur civilisation naissante sur le vieil arbre des civilisations antiques, uni à celui de la religion chrétienne qui a remplacé le paganisme corrompu de la décadence romaine.
C’est ici qu’éclate, à l’état aigu, ce qu’il faudrait appeler « le cas de M. de Cygneroi », ce cas impur, presque obscène, qui fait le fond de la pièce, et qui s’y étale dans toute sa hideur. […] Le monde, qui l’honore et qui l’aime, l’appelle « la princesse Georges », avec une sorte de familiarité respectueuse et tendre. […] Voilà pourquoi, par un télégramme hâtif et désolé comme le glas d’un tocsin, elle a appelé auprès d’elle sa mère, douairière frivole, un peu étonnée du ton tragique que met sa fille à ses confidences. […] La princesse fait appeler son mari ; elle lui dit qu’elle sait tout, elle le confesse, elle l’adjure.