Clément, [Jean-Marie-Bernard] ancien Professeur au Collége de Dijon, sa Patrie, parent du Prédicateur, né en 1742. […] L’étude des Anciens & des bons Modeles, dont il paroît nourri sera toujours la source de cette aversion que tout esprit vraiment éclairé a pour le faux ou le médiocre, & un préservatif contre les innovations des minces Littérateurs.
Modernes envieux de vos contemporains, jusqu’à quand vous acharnerez-vous à les rabaisser par vos éternelles comparaisons avec les Anciens ? N’est-ce pas une façon de juger bien étrange que de ne regarder les Anciens que par leurs beaux côtés, comme vous faites, et que de fermer les yeux sur leurs défauts, et de n’avoir au contraire les yeux ouverts que sur les défauts des Modernes, et que de les tenir opiniâtrement fermés sur leurs beautés [?]
Dans la Querelle des anciens et des modernes, Perrault a été au-dessous de tout. […] Que signifient ici ces termes d’anciens et de modernes ? […] L’histoire est mangée aux mythes, comme on disait peut-être à l’ancien Tortoni. […] Les partisans des anciens avaient cependant raison en 1680, comme les romantiques en 1830. […] Émile Bouvier se déclare ancien élève de M.
Le beau, c’est l’ancien ; le très beau, c’est l’antique ; le laid, c’est tout ce qui est nouveau. […] Mais la Révolution, en détruisant les provinces, a fait, de l’ancienne capitale monarchique, la capitale de la démocratie. […] Ne doutant point qu’elle voulût parler de l’ancienne Pinacothèque, je lui en vantai les merveilles, peut-être (que Rembrandt me pardonne !) […] Les anciens guerriers, les anciennes assemblées populaires délibéraient debout : cela leur donnait une puissance formidable d’impulsion et d’entraînement. […] Ils ont eu le mérite ou la chance de couronner par un coup d’éclat de longues et anciennes tentatives.
Par quels moyens les Asinius et les Messala parmi les anciens, les Aruntius et les Eserninus, nos contemporains, sont-ils parvenus au faîte des honneurs ? […] A-t-il calomnié ses anciens amis ? […] Sa vitesse rend les secours impraticables dans une ville telle que l’ancienne Rome, coupée de rues tortueuses, étroites, et d’une énorme longueur. […] encore si c’était un Thraséas chez les anciens, un Montausier chez les modernes, qui jugeassent le philosophe, à la rigueur on prendrait patience. […] Telle était encore la bienfaisance chez les anciens Romains, dont l’esprit s’était conservé dans la famille des Sénèque.
Vous parviendrez à faire changer l’ancienne monotonie de notre spectacle qu’on nous a tant reprochée. […] Personne n’a moins connu que Voltaire le goût des anciens : ce poète est éminemment moderne et français. […] Si cette situation se trouve chez les anciens, ce n’est pas celle-là qu’il fallait leur emprunter. […] Les anciens entendaient par liberté un gouvernement où il n’y avait point de roi. […] Brutus et ses pareils étaient fanatiques d’un ancien dogme des petites républiques grecques.
Mahaffy, les anciens Grecs avaient pris Troie. […] Il n’est point fait mention de cette coupe, ni de la broche dite de Tara, dans l’histoire ancienne de l’Irlande. […] Néanmoins, il est dans l’ancien art irlandais certains éléments de beauté que l’artiste moderne ferait bien d’étudier. […] Il semble que le monde ancien revient à la vie pour nous charmer. […] Écriture secrète irlandaise et celtique employée dans les inscriptions anciennes.
Quand la jeune princesse fut devenue Madame et l’ornement le plus animé de la cour, Mme de La Fayette, bien que de dix ans son aînée, garda l’ancienne familiarité avec elle, eut toujours ses entrées particulières et put passer pour sa favorite. […] Zayde est encore dans l’ancien et pur genre romanesque, quoiqu’elle en soit le plus fin joyau ; et si la réforme y commence, c’est uniquement dans les détails et la suite du récit, dans la manière de dire plutôt que dans la conception même. […] Des naufrages, des déserts, des descentes par mer, et des ravissements : c’est donc toujours plus ou moins l’ancien roman d’Héliodore, celui de d’Urfé, le genre romanesque espagnol, celui des Nouvelles de Cervantes. […] L’ancien chevalier de la Fronde, devenu amer et goutteux, n’était pas au reste ce qu’on pourrait se figurer d’après son livre seul. […] Une vive entrée en liaison avec la jeune Mme de Schomberg donna quelque éveil curieux et jaloux aux autres amies plus anciennes : on ne voit pas que cet effort d’une âme qui semblait se reprendre à quelque chose ait duré.
Les Lettres de Jean-Jacques sur ce sujet lui tombèrent un jour sous la main, et le remirent sur la trace d’un goût déjà ancien. […] Si une fois vous pouviez compter sur une existence agréable et honorable, vous pourriez vous associer une femme de votre choix, et qui parviendrait peut-être à combler le vide qu’a laissé dans votre cœur la perte de vos anciennes affections. […] Maine de Biran lui-même, le métaphysicien profond près de qui il se place, n’a laissé qu’un témoignage imparfait de sa pensée dans son ancien traité de l’Habitude et dans le récent volume publié par M. […] Les anciens doutes et les combats religieux avaient cessé en lui : ses inquiétudes, du moins, étaient plus bas. Depuis des années, les chagrins intérieurs, les instincts infinis, une correspondance active avec son ancien ami le Père Barret, le souffle même de la Restauration, l’avaient ramené à cette foi et à cette soumission qu’il avait si bien exprimée en 1803, et dont il relut sans doute de nouveau la formule touchante.
Il ne cache point que la noblesse et le clergé étaient déchus de leur ancienne position morale. […] Là est la raison de tous les phénomènes que présentent les sociétés anciennes et modernes. […] Il arrivait aussi à l’ancien royaliste ou au chrétien de venir achever dans une pièce de vers un acte de courage commencé dans sa vie publique. […] Ballon, ancien oratorien et ancien professeur de Fontanes ; de M. de Beausset, ancien évoque d’Alais ; de Joubert, l’ami de Fontanes et de Chateaubriand. […] Ballue de Bellanglise, ancien député à l’assemblée législative.
Renart reconnut bien la bête à cette maladresse : il en secoue deux fois la tête, se lève pour mieux voir, et avise là-haut Tiècelin qui était son compère d’ancienne date, tenant le bon fromage entre ses pieds : Par les saints de Dieu, que vois-je là ? […] Un des plus jolis épisodes de l’ancien Renart est l’aventure du maître fourbe avec Chanteclair, le Coq ; les avantages y sont également balancés, et Renart à la fin y trouve sa leçon. […] Ce dernier fabuliste semblerait s’être souvenu, en vérité, de l’ancien apologue, et en avoir tiré quelques-uns de ses traits. Mais la différence qu’il y a entre ces modernes, ceux même qui sont plus exclusivement et plus uniquement fabulistes que La Fontaine, et les anciens trouvères, c’est que ceux-ci se complaisent beaucoup plus aux détails domestiques et familiers, à tout ce qui est du monde et des mœurs des animaux, et qu’ils ne craignent ni de déroger, ni d’ennuyer en y insistant.
Le présent volume, digne du précédent, contient trois excursions pédestres, l’une ancienne, de 1833, à la Grande-Chartreuse, l’autre à Gênes et à la Corniche ; mais surtout on y voit la dernière grande excursion que Töpffer a conduite au cœur de la Suisse, la plus importante, celle du moins où, comme en prévision de sa fin prochaine, il a rassemblé le plus de souvenirs, de résultats d’observation ou d’expérience, son Voyage de 1842 autour du Mont-Blanc et au Grimsel. […] Le paysage, considéré comme genre à part et comme objet distinct de l’art, n’est pas chose très ancienne. […] Ils découvrirent ce que les anciens n’avaient qu’à peine soupçonné par le pinceau ; ils réalisèrent aux yeux ce charme que les grands poètes, Homère, Théocrite ou Virgile, avaient su mettre aux choses simples. […] Aussi trouvé-je toujours du plaisir à m’entretenir avec eux des choses qui sont à leur portée. » De cette observation attentive du langage campagnard et paysanesque, combinée avec beaucoup de lecture, de littérature tant ancienne que moderne, tant française que grecque76, est résulté chez Töpffer ce style composite et individuel que nous goûtons sans nous en dissimuler les imperfections et les aspérités, mais qui plaît par cela même qu’il est naturel en lui et plein de saveur.
Sa famille, une des anciennes du pays, comptait des magistrats, des échevins, des curés de la ville, des militaires. […] Le buste avait été placé pour ce jour en dehors de l’hôtel de ville, dont le caractère primitif a dès longtemps disparu sous les restaurations diverses, mais qui a conservé de son ancien style une espèce de tribune en saillie à deux étages et avec dôme : c’est ce qu’on appelle la Bretèche, terme fort en usage dans les coutumes d’Artois pour désigner « le lieu où se font les cris, publications et proclamations de justice ». […] Duchange, ancien officier et président de la Société académique de Laon. […] Après un long exil de sept ans, rentré en France en 1735, retiré quelque temps, pour la forme, à l’abbaye de La Croix-Saint-Leufroy au diocèse d’Évreux, chez l’abbé de Machault, où il voyait bonne compagnie, et d’où il correspondait avec Thieriot et avec l’abbé Le Blanc, qui lui donnaient des nouvelles littéraires ; ayant achevé sa courte pénitence spirituelle à Gaillon ; puis devenu l’hôte et l’aumônier commode et tout honoraire du prince de Conti, l’abbé Prévost, quoique souvent aux expédients jusque sous le toit d’un prince, vivait toutefois d’une existence relativement heureuse au prix de son ancienne vie errante, lorsqu’au commencement de 1741, un service de correction de feuilles, qu’il rendit imprudemment à un nouvelliste satirique, l’obligea de quitter de nouveau Paris et le royaume.
Malgré les découvertes et les exhumations qu’on n’a cessé de faire dans cette étude de notre Moyen Âge, malgré les publications nombreuses dont il a été l’objet depuis quelques années, on peut dire encore avec l’ancien bénédictin don Brial et avec Daunou qu’à part quelques écrits de petite dimension, quelques textes de lois, quelques sermons, et sans parler des traductions de livres sacrés, la relation de Villehardouin est le premier ouvrage original étendu qu’on ait en prose française. […] — Geoffroy de Villehardouin naquit en Champagne ; sans doute dans le château de son nom, à sept lieues de Troyes, entre Arcis et Bar-sur-Aube, d’une famille ancienne et distinguée à la cour des seigneurs et comtes du pays. […] La revanche des Vénitiens avait été complète, et l’ancien serviteur de Louis XI avait trouvé cette fois des maîtres jouteurs plus habiles que lui. […] Daru, que cette quatrième croisade n’eut guère pour résultat définitif que d’agrandir la suprématie maritime de Venise : « Le reste de l’Europe y perdit beaucoup de vaillants hommes et de monuments précieux, et n’y gagna que l’introduction de la culture du millet, dont le marquis de Montferrat envoya des graines en Italie. » S’il était vrai que la prise de Constantinople par les croisés et le sac de cette ville eussent fait périr, comme il est trop probable, des monuments de l’ancienne littérature grecque qui avaient échappé précédemment, il faudrait, nous les lettrés et les disciples des doctes, le déplorer avec regret, avec amertume : mais vouloir que toute une époque soit heureuse de la manière dont nous l’entendons, et que les chevaliers du siècle de Villehardouin conçoivent l’emploi de leurs facultés et de leur temps comme les hommes de cabinet de nos jours, c’est demander beaucoup trop.
La langue du monde, telle que ces deux personnes d’une raison si charmante et leur ancienne 483 amie Mme de Maintenon la parlèrent et la firent, était le suprême de cette exquise et simple élégance où le soin disparaît dans la facilité. […] Le petit écrit de la vicomtesse de Noailles n’est pas seulement une peinture de cette ancienne politesse et de cette finesse comme naturelle du ton et du langage, il en est presque partout un modèle. […] Ce sont les idées qui me venaient à l’esprit en lisant les lettres de Mme de Créqui à M. de Meilhan, et en réfléchissant sur cette ancienne société dont elles nous rendent un moment la note rapide et précise, le dernier mot aigu et arrêté. […] Elle se refit une société composée de quelques anciens amis et de parents.
De plus, il a pu se dire ancien élève de Louis-le-Grand pour mieux gagner sa confiance. […] Pour cela, les anciennes manufactures n’étaient rien : plusieurs, situées sur les frontières, étaient envahies par l’ennemi. […] Ainsi, point de corporations enseignantes, elles ressemblent à ces statues antiques qui servaient autrefois à guider les voyageurs, et dont le doigt immobile indique encore, après des milliers d’années, des routes qui n’existent plus. » Voilà du talent. — Je me suis étendu à dessein sur le plus ancien et le plus chaleureux des écrits de M. […] Il est assez singulier toutefois que, reproduisant avec autant de soin ses anciens titres littéraires, il ait précisément omis celui qui fut et qui est encore le plus vivant, celui qui mérite d’être cité, comme il l’a été, en effet, dans toute histoire littéraire un peu complète de la Révolution.
L’ouvrage n’étant qu’une attaque à fond, une guerre déclarée aux romans de chevalerie dont n’entendirent jamais parler ni Aristote, ni Cicéron, ni saint Basile, il n’est pas plus à propos de venir citer ces grands noms que de s’inquiéter des règles de la rhétorique auxquelles un tel sujet, né si tard et si étranger aux anciens maîtres, échappe naturellement. […] Ce pauvre Don Quichotte, répétant les exploits des anciens chevaliers avec une si parfaite bonne foi et une candeur si unique, donne jour à une telle variété de rencontres et d’aventures, — l’écuyer Sancho, dès la seconde sortie, accompagne et double si grotesquement son maître, avec ce perpétuel contraste de demi-bon sens et de demi-bêtise qui ne feront que s’accroître et se solidifier en avançant, — l’auteur, par des stations ménagées à propos, sait si naturellement entremêler d’autres récits et nous intéresser, chemin faisant, par les côtés passionnés et romanesques de notre nature, — il profite si justement et avec une si légitime hardiesse des instants lucides de son héros qui n’extravague que sur un point, pour le faire noblement et fermement discourir des matières que lui-même avait le plus à cœur de traiter, — tout cet ensemble vit, marche, se déduit si aisément, d’un cours si large, si abondant, et avec une telle richesse de développements imprévus et d’embranchements inépuisables, qu’on est bien réellement en plein monde, en plein spectacle, en plein air sous le ciel, qu’on nage dans un courant de curiosité humaine de tous côtés excitée et satisfaite, et que rien ne sent ni ne rappelle l’application critique et satirique née dans le cabinet. […] Cervantes fut frappé de la richesse que lui offrait l’idée d’un enthousiaste héroïque qui se croit appelé à ressusciter l’ancienne chevalerie : C’est là le germe de tout son ouvrage, Il sentit en poëte tout ce qu’on pouvait faire de cette idée… » Un autre critique distingué par son savoir et ses consciencieuses lectures, mais doué aussi d’une ingénuité de jugement parfois excessive, Sismondi, dans son Cours sur les littératures du Midi, professé à Genève devant un auditoire qui riait peu, se chargea de reprendre et de développer la pensée de Bouterwek. […] Cervantes a fait un chef-d’œuvre sans obscurité, d’une clarté parfaite, agréable, sensé, où la chimère n’a rien à faire que pour y être raillée, un de ces livres qu’eût goûté Horace comme le goûtait Saint-Évremond, un chef-d’œuvre pourtant sans analogue chez les Anciens, d’une étoffe toute moderne, aussi vif et aussi amusant en son genre que celui de l’Arioste dont il est le vrai pendant.
Molé devient chaque jour un des plus rares représentants de l’ancienne. […] Cette fois, les sollicitations, les efforts désespérés du jeune homme ne purent rien ; il passait sa vie à épier à la sortie quelques membres du tribunal ou de la Convention, quelque ancienne connaissance, telle que Hérault de Séchelles, qu’il avait vu chez son père. […] Exempt d’infirmités et de mélancolie, comme un ouvrier robuste, vers la fin de sa tâche, il s’endormit. » En cette renaissance de toutes choses, on reprenait quelques anciens livres oubliés ; Balzac redevint de mode un instant ; on en publia des pensées, on en causait beaucoup. […] Perrault, qui mettait les modernes si fort au-dessus des anciens, comptait parmi les plus beaux avantages de son siècle cette cérémonie académique dont il était le premier auteur : « On peut assurer, dit-il, que l’Académie changea de face à ce moment : de peu connue qu’elle étoit, elle devint si célèbre qu’elle faisoit le sujet des conversations ordinaires. » Les Grecs avaient les jeux olympiques, les Espagnols ont les combats de taureaux, la société française a les réceptions académiques.
C’était elle qui allait faire la France de Henri IV et de l’ancien régime, catholique mais gallicane, la royauté absolue, mais servie et contenue par le tiers état. […] Mais il faut noter qu’ici encore la guerre civile et l’actualité ont aidé les esprits à secouer le joug de l’érudition, et fait passer en quelque sorte l’imitation de l’extérieur à l’intérieur de l’œuvre littéraire ; la nécessité d’être lu, compris et goûté de tous a fait que les auteurs de la Ménippée, et parmi eux un lecteur royal, n’ont plus pris aux anciens que ce qu’ils ont senti être conforme à leur raison, ce qui pouvait rendre leur pensée ou plus forte, ou plus sensible, ou plus agréable aux simples Français. Et ainsi la Ménippée tient sa place dans l’histoire de la pénétration de l’esprit français par le génie ancien. […] Pithou (1539-1596) de Troyes, avocat, plus tard procureur général au Parlement de Paris, grand érudit, Florent Chrestien (1540-159J), ancien précepteur de Henri IV.
Il n’a rien dit de bien neuf, ni de bien profond : il a dit ce qu’il avait lu dans Montaigne et dans les anciens. […] Le culte souvent aveugle des formes anciennes était le dogme fondamental de cette critique : et elle parvint à l’imposer à la légèreté indépendante de la société polie. l’homme qui nous représente éminemment l’influence des doctes sur le monde, l’homme qui fit plus que personne pour opérer la transformation des théories savantes en préjugés mondains, fut le bonhomme Chapelain291, qui se place entre Ronsard et Boileau, comme ayant fait faire un progrès décisif à la doctrine classique. […] Il ne parle que de bon sens, de raison, de jugement, et il ne parle que des règles, qu’il a trouvées dans les anciens, et qu’il impose aux modernes. […] Voilà pourquoi il écrit en français, non pas en latin : le bon sens n’est pas le privilège des savants qui, au contraire, sont souvent en ces matières plus aveuglés que les autres par un faux respect des anciens.
Un ancien négociant de Marseille, nommé Blanc, ruiné par le maximum, était venu en Égypte pour rétablir sa fortune, et avait fait l’expédition avec le titre et les fonctions d’ordonnateur des lazarets ; mais le mal du pays l’avait pris ; il ne rêvait que France et retour ; c’était plus qu’une maladie, c’était un délire. […] Un jour, l’ancien aide de camp du maréchal, M. de La Rue, était allé à Vienne ; le jeune prince s’entretenait avec lui et lui faisait raconter cette circonstance de la guerre d’Espagne, quand les grenadiers de la Garde royale imaginèrent de donner au prince de Carignan, qui servait comme volontaire, les épaulettes de laine, pour le féliciter de sa bravoure à l’attaque du Trocadéro. […] Ancien gouverneur d’Alexandrie en 1798, il est accueilli par Méhémet Ali avec distinction, avec une confiance entière, une amitié qui ne se démentira pas, et qui ira le chercher plus tard à Vienne, dans la crise de 1839. […] En effet, après le premier moment passé, il dédaigna toujours les justifications et les apologies : « Je ne puis paraître vouloir me justifier, disait-il ; je ne veux surtout pas laisser croire que j’en sens le besoin. » Le gouvernement de Juillet ne fut jamais bien pour Marmont ; d’anciens camarades maréchaux mirent peu d’empressement et de bonne volonté à le servir.
Je ne parlerai que des personnages allegoriques de la premiere espece, c’est-à-dire des aînez ou des anciens. […] Revenons aux personnages allegoriques anciens, et voïons l’usage qu’il est permis d’en faire dans les compositions historiques. […] Les anciens eussent dit que la pieté l’avoit inspiré et que c’étoit elle qui lui avoit suggeré le moïen d’éterniser le souvenir de ces grandes actions, en témoignant qu’il le vouloit éteindre. […] Michel-Ange fut universellement blâmé pour avoir mêlé avec ce qui nous est revelé du jugement universel les fictions de l’ancienne poësie, dans la répresentation qu’il en peignit sur le mur du fonds de la chapelle de Sixte IV.
Il y eut de tout temps, en matière poétique, les novateurs et les conservateurs, les anciens et les modernes. […] Toutes leurs opinions étoient puisées de la boutique de quelque rêveur qu’ils suivoient en tout et partout… Ils vinrent à dire beaucoup de mots anciens, qui leur sembloient fort bons et très utiles en notre langue et dont ils n’osoient pourtant se servir, parce que l’un d’entre eux1 qui étoit leur coryphée, en avoit défendu l’usage. […] Enfin, il y en eut un, plus hardi que tous, qui conclut qu’il falloit mettre en règne, tout ensemble, des rimes anciennes que l’on renouvelleroit, ou d’autres que l’on inventeroit, selon que l’on connoitroit qu’elles seroient nécessaires. » J’arrête ici la citation. […] À mesure qu’on s’approche du xive siècle, on prend l’habitude d’user des rimes alternées dans les pièces à chanter, comme on peut le voir en parcourant les poésies de Charles d’Orléans, ou celles, plus anciennes, de ce Colin Muset, dont M.
Lainé jeune, plus libéral que l’ancien, plus libéral que les ci-devant libéraux eux-mêmes, leur mettant sous les yeux à l’occasion et développant aux yeux de tous leurs inconséquences, leurs imprudences et leur manque de vue (comme il fit dans ce magnifique discours au sujet des cendres de Napoléon), — un M. […] « J’avais cessé presque entièrement de le visiter dès 1839, le traitant un peu comme une ancienne maîtresse qu’on craint de revoir pour ne pas retomber sous le charme. » « — Lamartine est l’homme qui a su dire le plus de fois dans sa vie : Ce qui n’est plus pour l’homme a-t-il jamais été ? […] Si nous en valons la peine, on nous nomme, on nous caractérise en deux mots, et voilà la page de notre vie dans un siècle. » Dans les temps d’orage, au contraire, « dans ces drames désordonnés et sanglants qui se remuent à la chute ou à la régénération des empires, quand l’ordre ancien s’est écroulé et que l’ordre nouveau n’est pas encore enfanté, dans ces sublimes et affreux interrègnes de la raison et du droit,… tout change ; la scène est envahie, les hommes ne sont plus des acteurs, ils sont des hommes… Tout a son règne, son influence, son jour ; l’un tombe, parce qu’il porte l’autre ; nul n’est à sa place, ou du moins nul n’y demeure ; le même homme, soulevé par l’instabilité du flot populaire, aborde tour à tour les situations les plus diverses, les emplois les plus opposés ; la fortune se joue des talents comme des caractères ; il faut des harangues pour la place publique, des plans pour le Conseil, des hymnes pour les triomphes… On cherche un homme !
Le monde marche vers une sorte d’américanisme, qui blesse nos idées raffinées, mais qui, une fois les crises de l’heure actuelle passées, pourra bien n’être pas plus mauvais que l’ancien régime pour la seule chose qui importe, c’est-à-dire l’affranchissement et le progrès de l’esprit humain. […] Le plus mauvais état social, à ce point de vue, c’est l’étai théocratique, comme l’islamisme et l’ancien État pontifical, où le dogme règne directement d’une manière absolue. […] Supposons ce progrès obtenu (si c’est là une utopie pour la France, ce n’en est pas une pour l’Europe, où le goût de la liberté anglaise devient chaque jour dominant) ; nous n’aurions réellement pas grand’chose à regretter des faveurs que l’ancien régime avait pour l’esprit.
Cela a l’air d’un tableau qu’on a suspendu dans une cheminée pour le rendre ancien. […] Le scrupule des anciens là-dessus est inconcevable ; et ce panégyrique si vanté de l’abbé Séguy, ce morceau qui lui a ouvert la porte de notre académie, aurait fait fuir tout un auditoire de romains ou d’athéniens. […] Malgré ma prédilection pour le poëte grec, l’Amphitrite du poëte latin me paraît plus grande encore que sa Discorde, dont le grand critique ancien a dit qu’elle était moins la mesure de la déesse que celle de l’élévation du poëte.
Un des avantages de la philosophie appliquée aux matières de goût, est de nous guérir ou de nous garantir de la superstition littéraire ; elle justifie notre estime pour les anciens en la rendant raisonnable ; elle nous empêche d’encenser leurs fautes ; elle nous fait voir nos égaux dans plusieurs de nos bons écrivains modernes, qui pour s’être formés sur eux, se croyaient par une inconséquence modeste fort inférieurs à leurs maîtres. […] Les deux causes d’erreur dont nous avons parlé jusqu’ici, le défaut de sensibilité d’une part, et de l’autre trop peu d’attention à démêler les principes de notre plaisir, sont la source éternelle de la dispute tant de fois renouvelée sur le mérite des anciens. […] La simplicité de nos aïeux était peut-être plus fortement remuée par les pièces monstrueuses de notre ancien théâtre, que nous ne le sommes aujourd’hui par la plus belle de nos pièces dramatiques ; les nations moins éclairées que la nôtre ne sont pas moins heureuses, parce qu’avec moins de désirs elles ont aussi moins de besoins, et que des plaisirs grossiers ou moins raffinés leur suffisent : cependant nous ne voudrions pas changer nos lumières pour l’ignorance de ces nations et pour celle de nos ancêtres.
En attendant les Bâtards célèbres, qu’un ancien journaliste, dit-on, va publier, il est un bâtard qu’on réédite avec beaucoup de soin, c’est Chamfort14, Chamfort, le plus spirituel et le plus malheureux peut-être de tous ces malheureux qui veulent porter aussi haut le vice de leur naissance que si c’était une vertu, et qui ne savent pas s’en faire une ! […] Il fut la perfection du genre, et il est resté le type le plus éclatant et le plus complet de tous ces révoltés au ventre, comme l’aurait dit l’ancienne législation avec son énergie romaine, qui ne peuvent par donner à l’ordre moral et social d’avoir été violé par eux du fait même de leur naissance. […] Les anciens ont dit quelque part que le serpent meurt lorsqu’on lui crache sur la tête.
Julien réunit ces deux genres de mérite ; mais remarquons que cet avantage, si rare aujourd’hui, l’était beaucoup moins chez les anciens. […] Constantin, enfin, unissant les usages de l’ancienne Rome à ceux de l’église, et les droits de l’autel à ceux du trône, devenu chrétien, fut tout à la fois empereur et orateur sacré. […] Ils comblent le prince de tout ce qu’ils peuvent accorder à l’homme ; et quand sa carrière est finie, alors ils l’appellent pour habiter avec eux dans les palais célestes ; il monte, et sa gloire reste sur la terre. » Il me semble qu’il y a peu de morceaux chez les anciens qui vaillent celui-là pour la raison, la justesse et la vérité.
L'Athénée royal, l’ancien Lycée, fondé à la fin du xviiie siècle dans les années qui précédèrent la Révolution et où La Harpe avait commencé à professer son cours si célèbre ; cet Athénée qui revit le même La Harpe en bonnet rouge pendant la Terreur, puis repentant et faisant amende honorable de ses excès philosophiques ; cet Athénée pourtant qui était resté le centre de la philosophie du xviiie siècle, où les Garat, les Tracy, les Chénier, les Ginguené, les Daunou allaient causer du moins, quand ils n’y professaient pas ; qui eut la primeur des leçons de chimie des Lavoisier, des Fourcroy, et plus tard les cours de physiologie des Gall et des Magendie ; cet Athénée qui, sous la Restauration, était resté un foyer d’opposition libérale et l’antagoniste de la Société des Bonnes Lettres ; où Benjamin Constant jusqu’à la fin faisait des lectures ; où Mignet (il y a vingt ans) débutait par une leçon sur la Saint-Barthélemy qu’on lui redemandait d’entendre une seconde fois à huitaine (tant on la trouvait à la hauteur du moment)… eh bien ! […] Bonnellier, ancien sous-préfet destitué, auteur de plats romans, et qui a débuté récemment comme acteur à l’Odéon, sous le nom de Max, et ces messieurs font des motions ; et ils expliquent comme quoi ils sont catholiques, comme quoi Voltaire est le fils du jansénisme, et autres vérités de cette saveur.
Toujours fidèle à l’à-propos, M. de Ségur rappelle, au sujet de M. de Calonne, ancienne créature du duc d’Aiguillon, l’affaire La Chalotais et l’opinion publique qui en poursuivait encore les auteurs. […] Court de Gébelin, Olavidès, d’Eprémesnil, de Jaucourt, de Chastellux, de Choiseul-Gouffier, de La Fayette, et de bien d’autres encore, on croirait vraiment, ceci soit dit sans reproche, qu’en dépit des railleries des incrédules et même des siennes propres, M. de Ségur n’est pas complètement revenu de ce péché de jeunesse, et que son ancienne foi magnétique, non moins que sa foi politique, a résisté à la mode des conversions.
Paris vient de faire de l’un des romans du cycle de Charlemagne, tel que le poëte Adenès l’a arrangé et rimé vers la fin du xiiie siècle, nous nous garderons de revenir en rien sur une polémique déjà ancienne dans laquelle nous n’avions pas hésité à prendre parti. […] La pensée de notre jeune et savant collaborateur consistait à rechercher dans les anciennes épopées françaises, non pas seulement les imaginations plus ou moins gracieuses des conteurs et des poètes, non pas le mérite et l’agrément littéraire de leurs romans, mais les croyances diverses des populations, les récits historiques altérés, les invasions mythologiques qui avaient laissé des traces.
Elles lui vinrent, par une chaîne ininterrompue, des plus anciennes productions de notre langue ; elles arrivèrent jusqu’à lui en droite ligne par les fabliaux, par les conteurs du quinzième et du seizième siècle, par Rabelais, Montaigne, Régnier. […] Or les Mystères et les Moralités étaient de vastes compositions entre lesquelles la Farce fluette ne se faisait qu’une toute petite place : pour quelques scènes de Maître Pathelin, combien de lourdes Moralités comme celle des Blasphémateurs du saint nom de Dieu, ou d’immenses Mystères comme ceux de l’Ancien et du Nouveau Testament !