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418. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre VI. Le beau serviteur du vrai »

Qu’il rentre dans l’homme après en être sorti. […] Une clarté sort de leurs cils sévères. […] À en croire la légende, forme de l’histoire aussi vraie et aussi fausse qu’une autre, c’est grâce à la poésie que Colgrim, assiégé par les bretons, est secouru dans York par son frère Bardulph le Saxon ; que le roi Awlof pénètre dans le camp d’Athelstan ; que Werburgh, prince de Northumbre, est délivré par les gallois, d’où, dit-on, cette devise celtique du prince de Galles : Ich dien ; qu’Alfred, roi d’Angleterre, triomphe de Gitro, roi des Danois, et que Richard-Cceur-de-Lion sort de la prison de Losenstein. […] Un jour, Racine, un peu poussé par madame de Maintenon, s’avisa de sortir de la chambre du roi et de regarder le galetas du peuple. […] Avoir abrité sous ses escarpements ce serment redoutable de trois paysans d’où sort la Suisse libre, cela n’empêche pas l’immense Grütli d’être, à la nuit tombante, une haute masse d’ombre sereine pleine de troupeaux, où l’on entend d’innombrables clochettes invisibles tinter doucement sous le ciel clair du crépuscule.

419. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

ô qu’il est doux de plaindre Le sort d’un ennemi quand il n’est plus a craindre Notre ami M.  […] c’est encore nous, sortis de l’école contraire, qui sommes les premiers et le plus souvent les seuls à demander qu’on le maintienne, à sa date, à titre de témoin et d’autorité. […] Rivarol disait de lui : « Il fait un sort à chaque vers, et il néglige la fortune du poème !  […] Absent et plus hardi de loin, Delille avait été dans quelques vers jusqu’à invoquer la vengeance des rois de l’Europe contre la France : cela sortait de la pitié. […] C’était le fruit des vingt années précédentes ; de plus, Delille aveugle ne sortait guère, et, en tutelle de sa femme, versifiait sans désemparer.

420. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLe entretien. Littérature villageoise. Apparition d’un poème épique en Provence » pp. 233-312

Il me promit de m’envoyer un des premiers exemplaires de son poème ; il sortit. […] Nous, nous ne sortons jamais de notre pigeonnier. […] « Ô sort cruel, qui m’accables d’ennuis ! […] Il pourrait en sortir des Béranger ; mais des Homère et des Théocrite, non ! […] La grande poésie est de même race que la grande beauté : elle sort de la mer.

421. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

Ses anxiétés sur le sort du drame à la représentation sont fiévreuses d’amitié. […] Tout ce que le sort changeant jette parmi les enfants de la terre montera vers cette couronne de métal et la fera vibrer au loin. […] Mais, avant de le laisser sortir, répétez comme une prière une pieuse sentence. […] La philosophie du monde futur couve là dans son berceau ; il en sortira quelque Platon. […] L’homme est sorti par l’ignorance d’un état plus parfait qu’on a appelé un Éden, il y rentrera par la science.

422. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VII, seconde guerre médique. »

La nuit qui suivit le conseil entre Artabane et Mardonios, un Songe sortit donc par la porte d’ivoire des visions funestes, et visita Xerxès dormant sur son trône. […] Ils sortirent terrifiés du gouffre d’hommes qu’ils avaient sondé, criant et prédisant le naufrage. […] La vapeur des trépieds était noire comme une nuée d’orage ; il n’en sortait que des éclairs sinistres illuminant un abîme. […] Au lieu de l’encouragement espéré, l’anathème en sort ; le sanctuaire rugit comme un antre. […] C’est de sa cendre féconde que le Parthénon et l’Erechteion sont sortis.

423. (1909) De la poésie scientifique

En pleine lutte, m’apportant l’aide de leur talent et de leur âme ardente, ils répondaient aux attaques : « Sait-on si l’école poétique qui tuera la bêtise idéaliste et sa reviviscence symbolique ne sortira pas de M.  […] De concept plus philosophique en même temps qu’instinctivement ému, et de verbe plus pittoresque et souple, que Verhaeren  Viélé-Griffin, cependant, ne sortira pas seulement du sens égotiste pour s’exprimer en un sens général de vie. […] Mais, si elle meut elliptiquement, par l’Ellipse elle se sort éternellement, et illimitée, de la nécessité primordiale du Cercle : elle évolue avec progrès. […] Sa science produit continuement sa Conscience : savoir, étant être… Mais l’Ellipse sort péniblement et par intermittences, à travers les vicissitudes inhérentes aux conditions de durées partielles, de ce Cercle primordial par quoi nous suggérons la Matière unique. […] Gaston Moreilhon, rentré dans le silence après des poèmes et une campagne critique dont toute la valeur demeure, en la Revue Indépendante ( 1889 à 1893), mais qui en sortait en même admirable poète et critique lors de la réapparition pour une année des Écrits pour l’Art (1905-1906), et, nous le souhaitons ardemment pour l’art, en voudra sortir encore, avec tout ce qu’il a médité et écrit  L’autre, de la génération qui monte, M. 

424. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Relégué par l’indifférence sur ces hautes matières dans les grandes études théologiques de son état, le prêtre ne peut guère en sortir. […] Tel est, au xixe  siècle, le sort du prêtre, — du lettré divin, — de l’enseigneur par excellence. […] Il se remue dans je ne sais quel amnios dont il n’est sorti que plus tard. […] Le monde moderne est surtout sorti de Calvin, ce fils de scribe qui n’avait rien de prêtre ; il en est sorti plus que de Luther, qui a du moine encore, même après son apostasie. […] Un jour, les critiques distraits sortiront de leur distraction, et, clignant comme le dieu Siva ces yeux de lynx qui dorment du sommeil des marmottes, finiront par découvrir le monument de science et d’art qui s’était élevé pendant dix ans sans qu’ils l’eussent vu.

425. (1903) La renaissance classique pp. -

La moindre chose leur était une découverte qui les bouleversait ou les faisait sortir hors de leurs gonds. […] Il faut faire le départ entre ce qui est viable et sain et ce qui est voué à la stérilité ou à la corruption, et rejeter tout le résidu aux réceptacles impurs d’où il n’aurait jamais dû sortir. […] S’il veut sortir de lui-même et de ses mélancolies, il en sera réduit à l’imitation de l’étranger ou à l’exploitation charlatanesque des pires excentricités. […] nous sortons à peine d’un long cauchemar de trente années, — courte période qui pèsera autant sur notre avenir que les siècles les plus sombres de notre gestation nationale. […] Quiconque sort de France et visite ces jeunes nations récemment colonisées, ces pays d’immigration où se confrontent les races, est atterré par l’infériorité des nôtres.

426. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Il ne savait pas sortir du livre qu’il examinait. […] Que sortira-t-il de lui ? […] Ce passionné ne sort pas de la raison. […] … Et quel sort ! […] Tout est plaqué chez lui, rien ne sort des entrailles.

427. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

Dès qu’il fut entré dans le monde fabuleux que son génie avait découvert, il ne voulut plus en sortir. […] Lorsqu’il sortit de cet ermitage, il était devenu presque indifférent aux élégances du siècle. […] Ils étaient tous les deux mécontents de leur sort et avides d’amour. […] Il fit un sort à tous ses professeurs. […] À peine sorti du quartier Latin et déjà professeur, M. 

428. (1902) La formation du style par l’assimilation des auteurs

Quelle justification sortira de notre bouche ? […] Il nous dit : « Un jet de sang sortit de sa narine ». […] Une fois sortis de la ville, nous nous arrêtons. […] Les points de vue sortent d’un sujet que tout le monde comprend de même façon. […] Nous n’avons pas un bon écrivain classique qui ne soit sorti de Montaigne.

429. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (3e partie) » pp. 5-79

Pas du tout ; lisez : « Jean Valjean sortit de la ville, comme s’il s’échappait. […] « Il la fit responsable du sort qu’il subissait, et se dit qu’il n’hésiterait peut être pas à lui en demander compte un jour. […] Écoutez, messieurs les juges, un homme aussi abaissé que moi n’a pas de remontrance à faire à la Providence ni de conseils à donner à la société ; mais, voyez-vous, l’infamie d’où j’avais essayé de sortir est une chose nuisible. […] « Il sortit, et la porte se referma comme elle avait été ouverte, car ceux qui font de certaines choses souveraines sont toujours sûrs d’être servis par quelqu’un dans la foule. […] On sort de cette lecture ivre et anéanti comme un enfant qui s’essouffle à suivre un géant.

430. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Mais est-ce de là que sortent les Précieuses, Sganarelle, ces petits actes, ses premiers chefs-d’œuvre, dans lesquels il prend conscience de son idéal ? Ne sortent-ils pas plutôt de ces farces qu’il composait aussi en province, et dont quelques titres et canevas nous sont connus. […] On entrevoit le peuple, par quelques silhouettes de rustres, porteurs de chaise ; un monde louche d’intrigants, entremetteuses, spadassins, se laisse deviner, c’est de là que sortent et là qu’ont leurs attaches les valets impudents et fripons. […] Regardez les Femmes savantes, et de la plus innocente en apparence des manies vous verrez sortir le dessèchement ou la perturbation des affections naturelles, le naufrage matériel et moral d’une famille d’honnêtes gens. […] La jeune fille de qui sortira une telle femme, ce sera la sensée, l’aimable Léonor, ce sera l’exquise Angélique du Malade : ce sera surtout Henriette.

431. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

Une autre fois, à Paris, il sortait d’une maison où il était invité, au moment de se mettre à table, en voyant arriver M. de Calonne, l’ennemi de La Chalotais. […] Je n’entrerai pas ici dans la discussion du genre de torts intimes que Mme d’Épinay a reprochés à Duclos, et qui sont trop voisins de l’alcôve : en réduisant ces torts à ce qui en rejaillit sur le caractère général de l’homme, il paraît certain que Duclos dans son habitude journalière, sorti de chez lui dès le matin et passant sa vie dans le monde, aimait à s’installer chez les gens, et qu’une fois implanté dans une maison, il y prenait racine, y dominait bientôt, s’y comportait comme chez lui, donnant du coude à qui le gênait, et y portait enfin, avec les saillies et les éclats de son esprit, tous les inconvénients de son impétuosité et de son humeur. […] Le souvenir qu’on en garde ailleurs nuit souvent au plaisir qu’on aurait de vivre chez soi, si l’on n’en était pas sorti. […] Il n’est pas favorable aux religieux des ordres mendiants, mais il n’est pas contre toute espèce de communautés religieuses, et il les croit compatibles avec l’ordre politique moyen qu’il conçoit : Les religieux rentés, en France, sortent communément d’une honnête bourgeoisie, dit-il, paraissent peu dans le monde et sont, malgré beaucoup de plates déclamations, plus utiles à l’État qu’on ne le pense.

432. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

Louis XIV, son fils, son frère, n’ont plus qu’à sortir à cheval le matin, et à avoir l’œil à ce qui s’exécute. […] Il n’avait jamais eu l’honneur de manger avec le roi. » La garnison, composée d’environ cinq mille hommes, sort de la place le lendemain 10 ; Monseigneur assiste au défilé : « Le gouverneur salua Monseigneur de l’épée, et sans mettre pied à terre ; il lui dit qu’il était bien fâché de n’avoir pu tenir plus longtemps, afin de contribuer davantage à la gloire du roi. » Ainsi tout se passait de part et d’autre en parfait honneur et en courtoisie. […] La mort soudaine de Louvois au sortir d’un travail avec Louis XIV (16 juillet 1691) est un des endroits de Dangeau que Saint-Simon commente le plus ; il fait de ce grand ministre un admirable portrait, où cependant, à force de vouloir tout rassembler, il a introduit peut-être quelques contradictions et des jugements inconciliables, comme lorsque après l’avoir représenté si absolu, si entier, il veut qu’il n’ait été bon qu’à servir en second et sous un maître. […] Lundi 28, à Versailles. — Le roi ne sortit point de tout le jour, non plus qu’hier.

433. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Appendice » pp. 453-463

Le temps a manqué, et de la foule des admirateurs (cela n’a rien d’étonnant), il n’est pas sorti du premier coup un bon juge. […] elle a répondu avec ardeur, avec feu et sur tous les tons, à l’appel et au vœu des fondateurs du concours, non pas qu’il soit sorti de cette mêlée générale, où 251 concurrents étaient aux prises, une œuvre achevée, complète, et qui réunisse toutes les conditions que les législateurs d’autrefois en ces matières eussent exigées pour une parfaite couronne ; mais il y a nombre de pièces, et même parmi celles qu’on a eu le regret de devoir éloigner, où s’est montrée l’empreinte du talent, le signe distinctif du poète ; et quelques-unes enfin dans lesquelles, d’un bout à l’autre, un souffle heureux a circulé. […] On nous les montre de loin en voyage ; mais, arrivés à Paris, une voix, qui sort de toutes parts, s’élève et leur dit : C’est ici qu’on cherche l’or, ne le voyez-vous pas ? […] Le fait de cet esprit d’union désintéressée et de concorde intelligente est aussi l’un des résultats et des produits du concours, et j’aurais cru ne pas avoir rendu justice à tout ce qui en est sorti, si je ne l’avais signalé en m’honorant d’en avoir été l’organe.

434. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Il nous représente bien, en effet, avec toutes leurs qualités et dans leur bel enthousiasme, ces jeunes hommes enfants de Révolution, sortis de la classe moyenne éclairée, ces volontaires de 92, patriotes, républicains francs et sincères, mais instruits, bien élevés ; non moins opposés à tout regret et retour royaliste qu’à tout excès terroriste et au genre sans-culotte ; ces Girondins aux armées et qui n’eurent point à y commettre de faute. […] Cette lettre à Cervoni finit par un retour et un regret sur le passé : Incertitude, dégoût, fatigues, tel est le sort du militaire actuel ; il est bien différent de celui de nos premières années, où nous guerroyions en chantant. […] Le malheur du jeune général que nous verrons sortir si brillamment victorieux, si intrépide et si habile dans les luttes prochaines où il n’était que lieutenant et en second, ce fut, à une certaine heure, d’avoir été poussé au premier rang, d’y être arrivé dans tous les cas trop tôt, et par le jeu des partis qui s’inquiètent peu de vous compromettre et de vous briser, pourvu que vous leur serviez d’instrument un seul jour. […] Je l’ai vu en passant à Sospello, une amie le soignait ; et comme tout le monde longtemps m’avait cru mort, il avait, dans ses douleurs souvent parlé de moi et souvent envié mon sort.

435. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

Destitué lui-même par le Directoire peu après le rappel de Brune, et remplacé par Rivaud qui lui apportait l’ordre de sortir de l’Italie : Je n’en tins aucun compte, dit-il, persuadé que le Directoire n’avait pas le droit de m’empêcher de vivre en simple particulier à Milan. […] Nous pensons qu’il vaut mieux rentrer dans les montagnes, d’où l’on n’aurait pas dû sortir, et se préparer à s’y défendre ; car les raisons qui doivent nous porter à ne point livrer une bataille avant la jonction de l’armée des Alpes doivent décider l’ennemi à nous attaquer avant qu’elle soit effectuée ; mais les positions que nous devons occuper nous sont bien connues ; ce n’est pas une affaire de quelques heures qui pourra décider les succès de l’ennemi ; là, il ne s’agira pas d’une seule bataille, mais de vingt combats plus ou moins acharnés, sur des points difficiles, où leur nombreuse artillerie et leur cavalerie se trouveront à peu près paralysées. […] Il dit à Pérignon et à Saint-Cyr qu’il les priait de l’excuser, qu’il ne s’était jamais vu d’une telle faiblesse ; qu’il avait été plus d’une fois utile par ses conseils au général Bonaparte dans des moments très difficiles, et qu’il ne concevait pas d’où provenait l’extrême irrésolution d’où il ne pouvait sortir. […] Aux premières balles qu’il entendit, il courut leur demander le secret du sort ; il voulut se dédommager par son intrépidité de grenadier de son irrésolution comme général.

436. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Doré a donc refait un Don Quichotte espagnol : il l’a défrancisé, déflorianisé le plus possible, et, en le rendant si neuf, il ravive en nous les sources de fraîcheur, de joie même et de poésie, qui sortent chaque fois de cette incomparable lecture ; il nous y convie, en renouvelant les impressions que trop d’habitude émousse ; et, pour ne parler que de moi, il me donne envie, en m’aidant de M.  […] La branche castillane dont il sortait, et qui, au xve  siècle, s’était alliée par un mariage avec les Saavedra, était des plus déchues au xvie , et les parents de Michel vivaient pauvrement à Alcala de Hénarès, petite ville à quatre lieues de Madrid. […] Cervantes dut ressentir bien vivement le bonheur d’une liberté si longuement attendue, si chèrement achetée, et il s’en ressouvenait sans doute après tant d’années lorsqu’il faisait dire par Don Quichotte à Sancho, au sortir d’une captivité, toute gracieuse cependant et hospitalière : « La liberté, Sancho, est un des dons les plus précieux que le Ciel ait fait aux hommes. […] Mais enfin le mauvais sort, au moins pour quelque temps, allait être conjuré, et la première partie de Don Quichotte, menée à bien et terminée au milieu de ces traverses et de ces empêchements de mille sortes, paraissait au jour en 16055.

437. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine »

Vuillart fut arrêté un matin (2 octobre 1703) comme coupable de correspondre avec le Père Quesnel et comme agent d’intrigues ; qu’il fut mis à la Bastille, où il ne demeura pas moins de douze ans et d’où il ne sortit qu’en 1715, après la mort de Louis XIV, pour mourir lui-même presque aussitôt, à l’âge de soixante-seize ans passés, on ressent une indignation profonde de ces iniquités qui flétrirent la fin d’un grand règne, et l’on conçoit une horreur nouvelle pour les hypocrites ou les fanatiques qui les conseillèrent. […] Il en sortit une demi-poilette (palette) de pus bien cuit. Il n’en est point sorti depuis, mais il lui faut quelques jours pour se former. […] Son gendre et sa sœur, Mlle de Moramber, sont sans cesse à le servir avec son fils et son épouse, et tous se surpassent, chacun en sa manière. » Et dans la même lettre, reprenant la plume le lendemain (car le jour du courrier n’était que le jeudi) : « Ce 25 mars, vers le soir. — Je sors de chez le pauvre M. 

438. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Sur la reprise de Bérénice au Théâtre-Français »

Ainsi de Racine lui-même qui, au sortir des douceurs premières, s’élevait à Burrhus et aspirait à Phèdre. […] Pourtant, dès qu’Antiochus s’est enhardi à parler pour son propre compte, elle sait l’arrêter d’une parole vibrante et fière : on sort du ton de l’élégie ; la note tragique se fait sentir. […] Titus donc exprime en lui le caractère tragique, en ce sens qu’il soutient une lutte généreuse, qu’il sort du penchant tout naturel et vulgaire ; qu’il a le haut sentiment de la dignité souveraine et de ce qu’on doit à ce rang de maître des humains. […] Quand un plus long discours hâterait trop l’action, on s’arrête, on sort sans s’expliquer, dans un trouble involontaire : Quoi ?

439. (1890) L’avenir de la science « XII »

Si les plus hautes vérités peuvent sortir de l’alambic et du creuset, pourquoi ne pourraient-elles résulter également de l’étude des restes poudreux du passé ? […] Car, en abordant un ordre de recherches, on ne peut deviner par avance ce qui en sortira, pas plus qu’on ne sait au juste, en creusant une mine, les richesses qu’on y trouvera. […] Aucune recherche ne doit être condamnée dès l’abord comme inutile ou puérile ; on ne sait ce qui en peut sortir, ni quelle valeur elle peut acquérir d’un point de vue plus avancé. […] Chaix-d’Est-Ange ne sortira pas des colonnes du journal du lendemain.

440. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Poésies nouvelles de M. Alfred de Musset. (Bibliothèque Charpentier, 1850.) » pp. 294-310

Quel sort peut-on prédire à cet enfant du ciel ? […] Les défauts et les qualités sont sortis en toute licence, et la postérité aura à faire le départ. […] Ainsi de cette terre, humide encor de pluie, Sortent, sous tes rayons, tous les parfums du jour : Aussi calme, aussi pur, de mon âme attendrie               Sort mon ancien amour.

441. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie-Antoinette. (Notice du comte de La Marck.) » pp. 330-346

Son idéal de bonheur évidemment (chacun a le sien) était, au sortir des scènes de cérémonie qui l’ennuyaient, de trouver un monde aimable, riant, dévoué, choisi, au sein duquel elle parût oublier qu’elle était reine, tout en s’en ressouvenant bien au fond. […] L’affaire du Collier fut le premier signal de ses malheurs, et le bandeau qui lui couvrait jusque-là les yeux se déchira, Elle commença à sortir de son hameau enchanté, et à découvrir le monde tel qu’il est quand il a intérêt à être méchant. […] Au moment où elle sortait du Temple pour être transférée à la Conciergerie, elle se frappa la tête au guichet, n’ayant point songé à se baisser ; on lui demanda si elle s’était fait du mal : « Oh ! […] Quand on pense qu’un siècle dit de lumières, et de la plus raffinée civilisation, aboutit à des actes publics de cette barbarie, on se prend à douter de la nature humaine et à s’épouvanter de la bête féroce, aussi bête que féroce en effet, qu’elle contient toujours en elle-même et qui ne demande qu’à sortir.

442. (1874) Premiers lundis. Tome II « Théophile Gautier. Fortunio — La Comédie de la Mort. »

Théophile Gautier n’est pas du tout sorti de la même école que M.  […] Il sortit donc de ces années préparatoires avec un renfort de couleur, une science de tons et une décision d’images à tout prix, qui, après quelques essais moins remarqués, ont trouvé enfin leur cadre et leur jour : dans l’école, aujourd’hui renouvelée, de M. 

443. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Racan, et Marie de Jars de Gournai. » pp. 165-171

Enfin, après un quart d’heure de conversation, il sortit, & laissa mademoiselle de Gournai fort satisfaite d’avoir vu M. de Racan. […] Il ne faisoit que de sortir, lorsque M. de Racan, en original, demanda à parler à mademoiselle de Gournai.

444. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Théâtre français. » pp. 30-34

Sur le bord du théâtre, on avait placé l’enfer : c’était une gueule de dragon par laquelle les diables entraient ou sortaient. […] Peu de temps après, il se sent envie de manger du pâté de venaison ; il le fait faire : on le lui apporte, il l’ouvre avec empressement ; aussitôt, il en sort un gros crapaud qui lui saute au visage et s’y attache.

445. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

le sort de Chalais, de Montmorency, de ces illustres décapités, semblait seulement le piquer au jeu. […] Sa belle-fille132, la duchesse de Nemours, qui, elle, n’en sortait pas, Argus peu bienveillant mais très-clairvoyant, nous la montre telle dans les Mémoires si justes, qu’on voudrait toutefois moins rigoureux. […] A peine embarqué dans une affaire, il se montrait impatient d’en sortir : sa pensée essentielle n’était pas là135. […] Il retombe dans la vie privée et s’enfonce dans le fauteuil pour n’en plus sortir. […] Les grands monuments de prose, les éloquents ouvrages oratoires qui consa crent le règne de Louis XIV, ne sortirent que depuis 1669, à commencer par l’Oraison funèbre de la reine d’Angleterre.

446. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

Sa physionomie même et la forme de ses traits exprimaient, accusaient un peu fortement peut-être ce sérieux intérieur dans les goûts qu’il ne faudrait pas pourtant exagérer, et qui ne sortait pas des limites de son âge. […] On peut dire de Mme d’Houdetot que son idéal d’existence ne sortit jamais de cette vallée de Montmorency où la flamme de Jean-Jacques a comme gravé son souvenir en chiffres immortels. […] Dans un voyage qu’elle fit à Cauterets pour sa santé en 1806, l’isolement où elle se trouva au sortir d’une cour qui avait hâté son expérience, lui donna lieu d’en rassembler les fruits déjà tristes et amers. […] Je me hâte d’en sortir, car je vois d’ici les vrais témoins, les seuls qui ont vécu et qui savent, et ils sourient. […] Elle sortit pour les mettre en sûreté chez un ami ; mais ne l’ayant pas trouvé, elle rentra précipitamment et les jeta au feu.

447. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIIe entretien. Poésie lyrique. David (2e partie) » pp. 157-220

« Une fumée sortit de ses narines, « La flamme de sa bouche. […] « Ils se partagent mes habits entre eux et sur mon manteau ils jettent le dé du sort ! […] « À force de graisse leurs yeux sortent de leurs orbites ; leurs désirs satisfaits débordent. […] Nous ne vîmes que quatre convois funèbres sortir en silence de la porte de Damas et s’acheminer le long des murs vers les cimetières turcs ; et près de la porte de Sion, lorsque nous y passâmes, qu’un pauvre chrétien mort de la peste le matin, et que quatre fossoyeurs emportaient au cimetière des Grecs. […] En prêtant plus attentivement l’oreille je distinguai la récitation cadencée des psaumes du poète, qui sortait du couvent des moines latins de Terre-Sainte, et qui, de terrasse en terrasse, venait mourir au tombeau du harpiste de Dieu.

448. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

Loin de nous amollir, que ce sort nous retrempe ! […] Je gémis sur le sort de ma fille, qui malheureusement pour elle reste vivante, jeune, sans direction, entre les mains de ses ennemis, sans autre ami que son misérable père, pauvre, âgé, loin d’elle et disgracié de la fortune. […] Mon pauvre vieux père n’a plus que nous deux, et, depuis que le sort lui a enlevé sa fortune et une femme qu’il aimait plus que son âme, il ne peut penser sans désespoir à être privé par la cupidité de ses oncles d’une fille chérie, dans le sein de laquelle il espérait reposer le peu de jours qui lui restent à vivre. […] Heureusement pour lui, le duc d’Urbin, qui estimait son caractère et son talent, apprit par hasard son passage à travers ses États ; il l’arrêta à Pesaro et lui donna l’hospitalité dans une maison de campagne située sur les collines qui entourent la ville, où les prairies, les bois, les eaux et la vue de la mer Adriatique, formaient un horizon inspirateur pour le poète fatigué des vicissitudes du sort. […] XIII La publication du poème d’Amadis n’améliora pas le sort des deux proscrits.

449. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE IX »

Il y avait un drame dans son récit, il en est sorti sans effort, comme la vie sort de la vie. […] Une fois vendu, il entre, pour n’en plus sortir, dans la circulation des choses monnayées ! […] Le sort en est jeté, il a raté sa vie. […] Et puis, quand tout ce monde est sorti et qu’elle se retrouve seule avec l’amant, pour la gloire duquel elle vient d’endurer ce martyre, alors ce sont des ardeurs, des humilités, des tendresses ! […] Paul offre un duel, pour en finir, et de remettre au sort des armes la possession de cette femme si cruellement tiraillée.

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