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827. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIII. Éloges donnés aux empereurs, depuis Auguste jusqu’à Trajan. »

Si quelqu’un veut éprouver toute l’indignation que la flatterie inspire ; s’il veut apprendre comment on ne laisse échapper aucune occasion de louer un homme puissant ; comment on s’extasie sur ses bonnes qualités, quand il en a ; comment on dissimule les mauvaises ; comment on exagère ce qui est commun ; comment on donne des motifs honnêtes à ce qui est vicieux ; comment on rabaisse avec art, ou sans art, les ennemis ou les rivaux ; comment on interrompt son récit par des exclamations qu’on veut rendre passionnées ; comment on se hâte de louer en abrégé, en annonçant que dans un autre ouvrage on louera plus en détail ; comment, et toujours dans le même but, on mêle à de grands événements, de petites anecdotes ; comment on érige son avilissement en culte ; comment on espère qu’un homme si utile et si grand, voudra bien avoir longtemps pitié de l’univers ; comment, enfin, dans un court espace, on trouve l’art d’épuiser toutes les formules, et tous les tours de la bassesse, il n’y a qu’à lire ces soixante pages, et surtout les vingt dernières.

828. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Que le plus beau livre de Rousseau ait été sa confession, c’est-à-dire le récit de sa vie la plus intime et la description de son « moi » le plus secret, c’est déjà très curieux. […] C’est le protestant pur, je veux dire conséquent avec le principe de la Réformation, qui écrira le récit de la mort de Julie, la Profession de foi du Vicaire Savoyard, les Lettres de la Montagne. […] Tel est le récit de Rousseau. […] L’ouvrage, vu de loin, prend, avec un peu de bonne volonté, des aspects de récit biblique, de mythe religieux. […] Tout ce que je retiendrai de son récit, c’est qu’il a conçu Julie au printemps, parmi les fleurs et les arbres, pendant des mois de rêverie et d’exaltation sentimentale, et que c’est avant tout son propre roman qu’il a rêvé.

829. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 3665-7857

Quelques modernes, comme la Fontaine, ont distingué les répliques par les noms des interlocuteurs ; mais cet usage ne s’est introduit que dans les récits en vers. […] Dans l’églogue en récit, ou c’est le poëte, ou c’est l’un de ses bergers qui raconte. […] ) c’est l’imitation, en récit, d’une action intéressante & mémorable. […] combien les mouvemens qu’excite en lui-même ce qu’il raconte, communiquent à ses récits de chaleur & de véhémence ! […] En général, si la plûpart des poëmes manquent d’intérêt, c’est parce qu’il y a trop de récits & trop peu de scenes.

830. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Cérès leur répond par un récit mensonger, et leur demande de lui trouver dans la ville un emploi de servante ou de nourrice. […] Mais Charles II, à table devant sa femme, la regardait avec la stupeur d’un spectre dînant avec une vivante. — « Le roi, dit Mme de Villars, regarde manger la reine et trouve qu’elle mange beaucoup. » Nous avons aussi un récit touchant de la visite que Mme d’Aunoy lui fit à la même époque. […] Son récit ressemble au procès-verbal d’un crime impuni, dressé d’après des ossements exhumés d’un endroit secret. […] Je dirai, en passant, par l’expérience que j’ai faite de vingt ans durant et plus en l’une et l’autre manière, que cette connaissance est une des meilleures clés de toutes les autres, et qu’elle manque toujours aux histoires, souvent aux Mémoires, dont les plus intéressants et les plus instructifs le seraient bien davantage s’ils avaient moins négligé cette partie, que celui qui n’en connaît pas le prix regarde comme une bagatelle indigne d’entrer dans un récit. […] Je l’ai vue plusieurs fois au Mail, emportée des instants par un récit ou par la conversation, marcher un peu plus lentement que le roi et se trouver à quatre ou cinq pas en arrière, le roi se retourner, elle à l’instant même regagner son côté en deux sauts, et y continuer la conversation ou le récit commencé avec le peu de seigneurs qui la suivaient, et qui, comme elle, et moi avec eux, regagnaient promptement aussi ce si peu de terrain qu’on avait laissé perdre. » — La confession même ne l’isolait pas.

831. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

Si, dans un récit tout historique, des rapprochements étaient permis, on dirait ici avec raison que cette élection fut semblable à un feu d’artifice dont les étincelles passent d’une fusée à l’autre avec la rapidité de l’éclair. […] Je ne veux pas l’oublier au milieu de ce récit. […] « Je pourrais ici terminer ce récit, qui a pour objet l’histoire du conclave, car il finit avec l’élection du pape.

832. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

C’était un homme doué du sentiment religieux et poétique, et qui par ses récits éveillait en moi l’instinct qui l’animait lui-même. […] Son récit les fait revivre de temps en temps comme quand le pèlerin fatigué s’asseoit sur la fin du jour pour contempler plus à loisir l’horizon du soir et du lendemain. […] Pendant les longues excursions de notre naturaliste, des dangers d’une autre espèce vinrent aussi le menacer ; le récit suivant ne serait pas déplacé dans un des romans de Cooper : Après avoir parcouru le haut Mississipi, dit-il, je fus obligé de traverser une de ces immenses prairies, steppes de verdure qui ressemblent à des océans de fleurs et de gazon.

833. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

Boccace, son maître, a mille fois plus d’imagination, plus de souplesse, plus de pittoresque, plus de sourire fin dans le récit. […] XXI Quant à l’histoire, elle n’avait encore ni assez d’âge, ni assez d’indépendance, ni assez de profondeur, ni surtout assez de politique ; elle ne connaissait dans le récit que le conte, le poème ou la chronique : son Tacite inculte, Saint-Simon, trop passionné pour être imitateur de personne, lui donna tout à coup l’originalité de son propre caractère. […] Ce n’est plus le récit, c’est le drame ; ce n’est plus la draperie, c’est le nu ; ce n’est plus le portrait, c’est l’homme ; l’homme avec tous ses traits vivants, calqués sur les beautés comme sur les difformités de sa nature ; la photographie du siècle ; un roi, une cour, des flatteurs, des courtisans, des ambitieux, des hypocrites, des hommes de bien, des méchants, des femmes, des pontifes, une nation tout entière saisie au passage dans son mouvement le plus accéléré, et reproduite, non pas seulement par l’art, mais par la passion.

834. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid, (suite.) »

On a un récit du siège et de ses vicissitudes par un témoin oculaire arabe. […] Il est piquant, dans ce récit à sa louange, de l’entendre se proclamer par sa propre bouche Mon Cid.

835. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Il amuse son frère par le récit de la mort du comte de Saint-Pol. […] En supposant (ce qui me paraît fort possible) que l’abbé d’Olivet ait été bien informé, et que son récit, consigné dans les Mémoires de D’Artigny, mérite quelque attention, il en résulterait que Bayle, âgé de vingt-huit ans alors, dérogea un moment, auprès de la femme avenante du ministre, aux habitudes de son humeur et au régime de toute sa vie.

836. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires sur la mort de Louis XV »

d’Aumont ; elles tiendront quelque place dans ce récit. […] Ce que je rapporterai de l’intérieur de Mme Dubarry dans tout le cours de ce récit, je le tiens de Bordeu, qui m’a toujours assuré me dire la vérité.

837. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

Ayant donc fait appeler dans son appartement Contessina, son épouse, et Pierre, son fils, il leur fit le récit de toute sa conduite dans l’administration des affaires publiques, leur donna des détails exacts et très-circonstanciés sur ses immenses relations de commerce, et s’étendit sur la situation de ses intérêts domestiques. […] On peut juger, d’après le récit qu’il a fait de l’origine de sa passion, que Lucretia était la maîtresse du poëte, et non de l’homme : il cherchait un objet propre à fixer ses idées, à leur donner la force et l’effet nécessaires à la perfection de ses productions poétiques, et il trouva dans Lucretia un sujet convenable à ses vues, et digne de ses louanges ; mais il s’arrêta à ce degré de réalité, et laissa à son imagination le soin d’embellir et d’orner l’idole à son gré.

838. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

Parmi les plus anciens écrits scientifiques en langue vulgaire se rencontrent un lapidaire, un bestiaire, compilations de récits merveilleux et puérils sur les pierres précieuses et sur les animaux : science plus fantastique, plus stupéfiante que toutes les aventures des chevaliers de la Table ronde. […] Dès le xiie  siècle encore, et même avant (car le Poème de la Passion est du xe ), on fit passer en langue vulgaire tantôt par des traductions, tantôt par des imitations, tantôt, et d’abord, en vers, tantôt, et de bonne heure, en prose, les principaux récits de la Bible et de l’Évangile : au point que l’Église s’inquiéta parfois de voir les sources du dogme trop libéralement ouvertes à l’ignorance téméraire des laïcs.

839. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre II. Le théâtre du quinzième siècle (1450-1550) »

Parmi tous les mystères indépendants où un événement particulier, une destinée individuelle sont exposés, trois compositions d’un caractère plus général se détachent : le Mystère du Vieil Testament, qui, en près de 50 000 vers, nous mène du Paradis terrestre jusqu’au temps d’Auguste ; le Mystère de la Passion, qui, en près de 35 000 vers dans l’œuvre de Gréban. embrasse tous les récits des Évangiles, et le Mystère des Actes des Apôtres, qui, en plus de 60 000 vers, expose la diffusion de la religion nouvelle et le martyre des premiers serviteurs du Christ. […] Tout n’est donc pas à mépriser dans les mystères : il reste vrai pourtant qu’ils valent par leurs sujets, et moins que leurs sujets, moins aussi à l’ordinaire que les récits qu’ils traduisent.

840. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre II. La jeunesse de Voltaire, (1694-1755) »

Voltaire débrouille lestement les faits, et nous donne un récit qui court, léger et lumineux, rejetant le détail oiseux, et dégageant les actions caractéristiques. […] Il condense toute son information en récits courts, clairs, saisissants, qui parfois ont forcé l’admiration de Michelet.

841. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Francisque Sarcey »

Il détache son récit du fond de la réalité ambiante ; mais il néglige ce fond plutôt qu’il ne le supprime. […] De là, dans l’ancien théâtre et, sous une autre forme, dans le théâtre contemporain, la convention des récits, de l’exposition, des confidents, des monologues.

842. (1894) Propos de littérature « Chapitre V » pp. 111-140

Les pleines gerbées de fables, de traditions, de récits mythiques rassemblées chaque mois par les recueils de folklore prouvent que le génie de la France s’y prête à l’égal du génie germanique. […] Ce ne seront plus, alors, les devoirs de littérature qu’on écrivit trop souvent chez nous ; ce ne sera pas non plus la ballade unie et assez vaine de Bürger, ni le récit uniquement pittoresque de Hugo ; mais puisque les hantises de la philosophie ont invinciblement enlacé nos esprits, puisqu’ils s’accoutument à susciter des choses la signification cachée, une Légende, une Chanson doivent se révéler, vivantes et nouvelles, où la spontanéité jaillira toute ingénue dans le rythme, où notre inquiétude d’art s’exercera à des plastiques sûres mais non dominatrices, — où notre idée s’affirmera plus claire en une mélodieuse simplicité.

843. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Appendice »

Je n’entreprendrai pas de vous en faire un récit détaillé, ce sera l’objet de nos futures conversations. […] Je vous épargne le récit de ces complications qui vous seraient aussi ennuyeuses qu’elles me furent pénibles.

844. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre VIII »

Au point de vue de la scène, il n’y avait qu’un dénouement dans ce beau récit, plutôt imaginé qu’observé, coloré d’une teinte romanesque, visant à la moralité de la parabole. […] L’indignité du personnage est telle, qu’elle gâte, sur la scène, le beau dénouement du récit.

845. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1879 » pp. 55-96

C’est vraiment curieux la parenté du récit de Judith, allant trouver Holopherne, avec le récit de Salammbô, se rendant au camp de Mathô.

846. (1913) La Fontaine « III. Éducation de son esprit. Sa philosophie  Sa morale. »

C’est un récit qui a été fait à La Fontaine par un de ses savants amis fréquentant chez Mme de La Sablière, qui le tenait de certains religieux. […] Ecoutez ce récit, Que je tiens d’un roi plein de gloire.

847. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Lorsque de nombreux esprits sont captivés et retenus par un récit, au lieu de s’étonner et de rire de la banalité de l’histoire et de la simplicité des lecteurs, il vaut mieux chercher, comme une leçon, le mérite de l’écrivain. […] Dans ce milieu familier et doux, où beaucoup de rêve flotte parmi beaucoup de silence, quels devront être les récits qui viendront nous trouver ?

848. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XI. »

le récit épique des vieux temps s’était tenu plus près de la sévérité future du drame que ne le faisait le premier grand inventeur tragique. […] Sophocle avait fait une ode adressée à Hérodote, sans doute l’immortel historien, celui dont les récits lus à Olympie excitaient les larmes jalouses du jeune Thucydide.

849. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — V » pp. 123-131

Villars en a consigné le récit dans son journal, et comme cette version est la plus circonstanciée et la plus exacte qu’on ait de l’aventure, je la mets ici, d’autant plus que je ne vois pas qu’aucun biographe soit allé la chercher dans Villars : Dans le même temps (avril 1726), Voltaire fut mis à la Bastille, séjour qui ne lui était pas inconnu.

850. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Note »

comme j’aurais voulu avoir connu de près les auteurs, les inspirateurs de ces récits !

851. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Relation inédite de la dernière maladie de Louis XV. »

de pareils récits et les turpitudes mêmes où ils font passer ont un sens sérieux : la nécessité et la légitimité de 89 sont au bout, comme une conséquence irrécusable.

852. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française. IXe et Xe volumes »

Thiers poursuit son récit à partir de l’an V, et le termine au 18 brumaire.

853. (1874) Premiers lundis. Tome II « Quinze ans de haute police sous Napoléon. Témoignages historiques, par M. Desmarest, chef de cette partie pendant tout le Consulat et l’Empire »

Desmarest, le récit le plus explicatif de la conduite de Bonaparte en cette déplorable affaire.

854. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Note sur les éléments et la formation de l’idée du moi » pp. 465-474

. — À mon sens, ceci est décisif, et je trouve le petit récit qu’on vient de lire plus instructif qu’un volume métaphysique sur la substance du moi.

855. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre I. Un retardataire : Saint-Simon »

Son récit est grouillant de vie, et l’impression a cette netteté qu’un art supérieur peut seul donner.

856. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VI. Le charmeur Anatole France » pp. 60-71

Pas à une page, le souci de vivre, en fait, la peine de l’argent n’écorche un seul personnage du récit.

857. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XI. Trois bons médanistes : Henry Céard, Joris-Karl Huysmans, Lucien Descaves » pp. 145-156

En ménage était, avec un relief unique, le récit goguenard et résigné des misères moyennes et sans issues, la vôtre, celle de l’auteur, la mienne.

858. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre II. Enfance et jeunesse de Jésus. Ses premières impressions. »

L’omission de ce récit dans Marc, et les deux passages parallèles, Matth, XIII, 54, et Marc, VI, 1, où Nazareth figure comme « la patrie » de Jésus, prouvent qu’une telle légende manquait dans le texte primitif qui a fourni le canevas narratif des évangiles actuels de Matthieu et de Marc.

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