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976. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — I. » pp. 201-219

Il n’y a pas plus de xviiie  siècle complet sans Beaumarchais que sans Diderot, Voltaire ou Mirabeau ; il en est un des personnages les plus originaux, les plus caractéristiques, les plus révolutionnaires. […] Un écrivain de nos jours qui s’est fait connaître avec distinction dans le genre de la biographie, M. de Loménie, professeur suppléant au Collège de France, a consacré cette année plusieurs leçons à Beaumarchais, et il a éclairé le caractère de ce personnage extraordinaire à l’aide de documents particuliers qu’il tient de la famille même.

977. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

J’aime à croire que Franklin, s’il n’avait suivi que son penchant, et s’il avait dû choisir parmi nous son personnage de prédilection et son idéal, serait plutôt allé embrasser M. de Malesherbes, « ce grand homme », comme il l’appelle, qui venait le voir à Passy, et qui, renonçant à la vie publique et s’amusant à de grandes plantations, désirait obtenir par lui les arbres du Nord de l’Amérique non encore introduits en France. […] Ses amis plus particuliers étaient, parmi les personnages connus, Turgot, le bon duc de La Rochefoucauld, Lavoisier, le monde de Mme Helvétius à Auteuil, l’abbé Morellet, Cabanis, etc.

978. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

L’étude en est complète et le personnage reste sympathique en dépit de sa chute. […] Dans ce nouveau roman, recueil de la correspondance de ses personnages entre eux, M.  […] C’est dans ce milieu qu’évoluent les personnages de Gyp, que nous connaissons déjà tous par ses œuvres précédentes. […] Tout le monde a connu au moins une fois dans sa vie un de ces personnages dont la grande vie étonne, en raison des faibles ressources qu’on leur sait. […] Son attention fut attirée par deux personnages qu’il ne s’attendait pas à rencontrer là.

979. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Autre affaire à Berlin, d’un autre genre, mais qui n’éclaire pas moins tout un côté du personnage. […] D’une manière générale, il a donné trop d’importance au personnage politique du poète. […] Elle n’est pas pour eux, comme pour les personnages du roman contemporain, ce qui leur peut arriver de pire. […] Paul Bourget mêle ensemble la description des lieux et l’analyse aiguë des états d’âme de ses personnages. […] Leurs personnages ont donc enfin quelque chose de moins matériel.

980. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettre sur l’orthographe » pp. 427-431

Mais que Mgr le public est donc heureux, pensais-je, et que c’est un grand personnage !

981. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LVIII » pp. 220-226

Si l’histoire du saint personnage n’est écrite de main habile et par une tête qui soit au-dessus de toutes vues humaines, autant que le ciel est au-dessus de la terre, tout ira mal.

982. (1874) Premiers lundis. Tome I « Fenimore Cooper : Le Corsaire Rouge »

Je dirais, si je l’osais, que dans ce roman les deux navires sont les deux personnages principaux, et que le Dauphin intéresse plus que le corsaire lui-même.

983. (1875) Premiers lundis. Tome III « Eugène-Scribe. La Tutrice »

Presque en même temps, une dame modestement vêtue, aux manières élégantes et simples, descend dans l’auberge, qui ressemble décidément, à ne pas s’y tromper, au terrain vague, rendez-vous si commode de tous les personnages du vieux théâtre.

984. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre premier. De l’invention dans les sujets particuliers »

La valeur de chaque scène, de chaque mot vient de son rapport direct au type idéal qu’avait conçu Molière et sur lequel il dessinait le personnage.

985. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Villiers de L'Isle-Adam, Auguste de (1838-1889) »

dit un de ses personnages, nous sommes pareils à ces cristaux puissants où dort, en Orient, le pur esprit des roses mortes, et qui sont hermétiquement voilés d’une triple enveloppe de cire, d’or et de parchemin. » Une seule larme de leur essence conservée ainsi dans la grande amphore précieuse (fortune de toute une race et que l’on se transmet par héritage, comme un trésor sacré tout béni par les aïeux) suffit à pénétrer bien des mesures d’eau claire.

986. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Lucrèce Borgia » (1833) »

À ceux qui trouvent, par exemple, que Gennaro se laisse trop candidement empoisonner par le duc au second acte, il pourrait demander si Gennaro, personnage construit par la fantaisie du poète, est tenu d’être plus vraisemblable et plus défiant que l’historique Drusus de Tacite, ignarus et juveniliter hauriens.

987. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VI. Des dictionnaires Historiques » pp. 220-228

On discute des anecdotes, on donne des idées plus justes du caractère de certains personnages qu’on avoir ou trop loués, ou trop critiqués.

988. (1761) Salon de 1761 « Peinture — M. Pierre » pp. 122-126

Cette douleur attache toute l’action des autres personnages du Carrache, et des vôtres.

989. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Première partie. Les idées anciennes devenues inintelligibles » pp. 106-113

C’est ainsi que la scène tragique nous fait compatir tous les jours aux malheurs de personnages entièrement placés en dehors de toutes nos affections.

990. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Émile Augier »

Mais l’idée et le canevas de cette pièce, qui, comme toutes les comédies politiques, a le tort de n’être qu’un pamphlet d’occasion, n’appartiennent pas plus à Émile Augier que ses personnages.

991. (1904) Zangwill pp. 7-90

Avons-nous à étudier, nous proposons-nous d’étudier La Fontaine ; au lieu de commencer par la première fable venue, nous commencerons par l’esprit gaulois ; le ciel ; le sol ; le climat ; les aliments ; la race ; la littérature primitive ; puis l’homme ; ses mœurs ; ses goûts ; sa dépendance ; son indépendance ; sa bonté ; ses enfances ; son génie ; puis l’écrivain ; ses tâtonnements classiques ; ses escapades gauloises ; son épopée ; sa morale ; puis l’écrivain, suite ; opposition en France de la culture et de la nature ; conciliation en La Fontaine de la culture et de la nature ; comment la faculté poétique sert d’intermédiaire ; tout cela pour faire la première partie, l’artiste ; pour faire la deuxième partie, les personnages, que nous ne confondons point avec la première, d’abord les hommes ; la société française au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; le roi ; la cour ; la noblesse ; le clergé ; la bourgeoisie ; l’artisan ; le paysan ; des caractères poétiques ; puis les bêtes ; le sentiment de la nature au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; du procédé poétique ; puis les dieux ; le sentiment religieux au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; de la faculté poétique ; enfin troisième partie, l’art, qui ne se confond ni avec les deux premières ensemble, ni avec chacune des deux premières séparément ; l’action ; les détails ; comparaison de La Fontaine et de ses originaux, Ésope et Phèdre ; le système ; comparaison de La Fontaine et de ses originaux, Ésope, Rabelais, Pilpay, Cassandre ; l’expression ; du style pittoresque ; les mots propres ; les mots familiers ; les mots risqués ; les mots négligés ; le mètre cassé ; le mètre varié ; le mètre imitatif ; du style lié ; l’unité logique ; l’unité grammaticale ; l’unité musicale ; enfin théorie de la fable poétique ; nature de la poésie ; opposition de la fable philosophique à la fable poétique ; opposition de la fable primitive à la fable poétique ; c’est tout ; je me demande avec effroi où résidera dans tout cela la fable elle-même ; où se cachera, dans tout ce magnifique palais géométrique, la petite fable, où je la trouverai, la fable de La Fontaine ; elle n’y trouvera point asile, car l’auteur, dans tout cet appareil, n’y reconnaîtrait pas ses enfants. […] « Me voici donc à l’aise, libre de rechercher toutes les causes qui ont pu former mon personnage et sa poésie » ;… Toutes les causes qui ont pu former son personnage et sa poésie, quelle prodigieuse audace métaphysique sous les modestes espèces d’un programme littéraire ; mais pour aujourd’hui passons. […] J’ai donc bien le droit, j’ai le devoir de chercher dans Renan et dans Taine la première pensée du monde moderne, la pensée de derrière la tête, comme on dit, qui est toujours la pensée profonde, la pensée intéressante, la pensée intérieure et mouvante, la pensée agissante, la pensée cause, la source et la ressource de la pensée, la pensée vraie ; et pour trouver l’arrière-pensée de Renan, passant à l’autre bout de sa pleine carrière, on sait que c’est dans les dialogues et les fragments philosophiques, dans les drames qu’il faut la chercher ; je me reporte aux Dialogues et fragments philosophiques, par Ernest Renan, de l’Académie française, quatrième édition ; je sais bien que la citation que je vais faire est empruntée à la troisième partie, qui est celle des rêves ; certitudes, probabilités, rêves ; je sais que mon personnage est celui de Théoctiste, celui qui fonde Dieu, si j’ai bonne mémoire ; je sais que les objections lui sont présentées par Eudoxe, qui doit avoir bonne opinion ; je n’oublie point toutes les précautions que Renan prend dans sa préface ; mais enfin mon personnage dit, et je copie tout au long ; je passe les passages où ce Théocrite rêve de la Terreur intellectuelle ; nous y reviendrons quelque jour ; car ils sont extrêmement importants, et graves ; et je m’en tiens à ceux où il rêve de la Déification intellectuelle : « Je vous ai dit que l’ordre d’idées où je me tiens en ce moment ne se rapporte qu’imparfaitement à la planète Terre, et qu’il faut entendre de pareilles spéculations comme visant au-delà de l’humanité. […] Dans sa grande franchise et netteté universitaire il passe d’un énorme degré les anticipations précautionneuses de Renan ; Renan ne donnerait pas prise à de tels reproches ; il ne donnerait pas matière à de telles critiques ; il ne donnerait pas cours à de tels ridicules : Renan n’était point travaillé de ces hypertrophies : lui-même il endossait trop bien le personnage de ses adversaires, de ses contradicteurs, de ses critiques éventuels ; toute sa forme de pensée, toute sa méthode, tous ses goûts, tout son passé, toute sa vie de travail, de mesure, de goût, de sagesse le gardaient contre de telles exagérations ; il n‘a jamais aimé les outrances, et, juste distributeur, autant et plus averti sur lui-même que sur les autres encore, il ne les aimait pas plus chez lui-même et pour lui-même qu’il ne les aimait chez les autres ; il aimait moins les outrances de Renan que les outrances des autres, peut-être parce qu’il aimait Renan plus qu’il n’aimait les autres ; comme Hellène il se méfiait des hommes, et des dieux immortels ; comme chrétien, il se méfiait du bon Dieu ; comme citoyen, il se méfiait des puissances ; et comme historien, des événements ; comme historien des dieux, et de Dieu, mieux que personne il savait comment en jouer, et quelles sont les limites du jeu ; il était un Hellène, un huitième sage ; il connaissait d’instinct que l’homme a des limites ; et qu’il ne faut point se brouiller avec de trop grands bons Dieux ; il s’était donc familièrement contenté de donner à l’humanité, à l’historien, les pouvoirs du Dieu tout connaissant ; il n’eût point mis à son temple d’homme un surfaîte orgueilleux et qui bravât la foudre.

992. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1865 » pp. 239-332

Un gros personnage ne s’abaisse pas à parler avec un petit, un ministre avec un monsieur qui n’est pas décoré, un illustre avec un anonyme. […] Giraud, debout, peint le ciel d’un panneau faisant partie d’une décoration à personnages du Directoire, qu’il exécute pour l’escalier du château. […] Puis, dit-il, quand il a le bonheur de pouvoir raccorder la pensée de l’auteur avec un type vivant qu’il a en vue : c’est fait, il tient son personnage. […] Ils n’ont pas l’air d’être quelqu’un ; mais les personnages qu’ils travaillent à être. […] C’est la recherche et la trouvaille du geste qui est le geste de la parole qu’on dit, la formation des groupes, les communications établies ou brisées entre les personnages, tous les soulignements mis sous les paroles, le naturel à se lever, à s’asseoir, qui demande des dix reprises de la scène : toutes petites choses si absolues, si positives, d’une vérité si flagrante, qu’elles font crier, aussitôt trouvées : « C’est cela ! 

993. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Ils ont publié Diderot parce que c’est Diderot et que Diderot est un gros personnage, enflé comme une bulle de savon par la Critique moderne, et même à l’état du ballon pour l’énormité… La Critique moderne, la Critique romantique, a placé Diderot à une hauteur où son propre siècle — le siècle de l’Encyclopédie pourtant ! […] Dans son Jacques le fataliste, sous le personnage de ce valet insupportablement philosophe, c’est lui, Diderot, qui prêche contre le libre arbitre de l’homme. […] On ne sait pas un mot de ce qu’en son âme et conscience il était… On ne sait de lui que son génie, et son génie, c’est tous les personnages de ses drames, les uns après les autres. […] On le connaît, on l’entend, on ne peut l’oublier, ce moi bouillonnant et retentissant de Diderot, cette nappe enflée d’un bavardage immense, cette inondation, ce déluge qui passe par-dessus tous les personnages de ses drames ! […] Si le multiple et l’infini Shakespeare est tous les personnages de ses drames, les personnages des drames de Diderot sont tous Diderot, l’éternel Diderot, monotone et ennuyeux ; car en fait d’ennui Diderot a précédé Gœthe, le plus grand ennui qui ait jamais, depuis le commencement du monde, fait bâiller les hommes sur la terre… Le critique Geoffroy écrivait, en 1811 : « On a sifflé le Père de famille.

994. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

et au contraire, dans presque toutes les histoires de la littérature, n’a-t-on pas un peu surfait le personnage des Ampère et des Rémusat, des Dubois et des Magnin ? […] On s’est rendu compte qu’il ne saurait y avoir de théâtre sans un sujet dont l’intérêt soit vraiment général, mais surtout sans une certaine « aliénation de soi-même », qui arrache le poète à la préoccupation de son individualité pour l’incarner dans ses personnages. […] Ajoutez que l’amour ne tient pas plus ici de place qu’il n’en occupe effectivement dans la vie, — je ne dis pas la femme, je dis l’amour, — et en revanche la haine, la vanité, l’ambition, l’avarice, toutes les passions humaines y jouent leur personnage. […] L’attitude de Balzac en présence de ses personnages ou du sujet de ses tableaux est celle du naturaliste en présence de l’animal ou de la plante qu’il étudie, patiente et attentive, « soumise à son objet », libre de tout parti pris personnel. […] La Contagion] ; — et tout cela, si ce n’était pas du contre-romantisme, — c’était cependant autre chose que le romantisme. — En second lieu, pour en faire du réalisme, — il a imaginé des intrigues « actuelles » ou contemporaines ; — dont les personnages étaient imités de ceux de Balzac [Cf. 

995. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

(défroques du romantisme sans doute), représentent l’allégorie, c’est-à-dire que tous ces personnages des basses classes sont ceux que l’artiste aime à peindre, en s’inspirant de la misère des misérables. […] Tous les personnages en sont vivants. […] Champfleury, — le coryphée jusqu’ici de ce petit groupe, — s’est levé un beau matin en rêvant aux moyens de devenir un personnage littéraire et de fonder une école (oh ! […] Ce costume Louis treize, tant admiré, est lourd, incommode ; il engonce les personnages. […] Mélingue, qu’il faut étudier : le portrait de Cinq-Mars de Le Nain démontre suffisamment l’embarras des personnages dans ces beaux habits.

996. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVI » pp. 256-263

Ce ne serait que Henri IV qui, descendu de Robert de France, sixième fils de Louis IX, aurait enfin fait rentrer la couronne dans la lignée directe du saint roi. » Le fait est qu’une quarantaine d’années après la mort ou la prétendue mort de ce petit roi Jean, parut en France un aventurier qui se donna pour lui, qui raconta toute une histoire romanesque à laquelle plusieurs puissances et personnages politiques d’alors ajoutèrent foi, notamment Rienzi.

997. (1874) Premiers lundis. Tome II « Étienne Jay. Réception à l’Académie française. »

Ils peuvent avoir eu à certains moments, et pour la vulgarisation de certaines idées justes, leur genre d’utilité, qu’il nous appartient moins qu’à personne de leur dénier ; mais, comme écrivains, comme personnages littéraires distincts, ils ne sont pas.

998. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre I »

« Cet analyste minutieux, dit le vicomte de Vogüe (Le roman russe, 1888, p. 93), ignore ou dédaigne la première opération de l’analyse, si naturelle au génie français ; nous voulons que le romancier choisisse, qu’il sépare un personnage, un fait, du chaos des êtres et des choses, afin d’étudier isolément l’objet de son choix.

999. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre cinquième. »

N’est-il pas plaisant de supposer que ce soit un effet nécessaire et une suite naturelle de la royauté, de n’avoir d’égard ni pour les choses ni pour les personnages ?

1000. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre X. Suite du Prêtre. — La Sibylle. — Joad. — Parallèle de Virgile et de Racine. »

Cependant dans les peintures douces et tendres, Virgile retrouve son génie : Évandre, ce vieux roi d’Arcadie, qui vit sous le chaume, et que défendent deux chiens de berger, au même lieu où les Césars, entourés de prétoriens, habiteront un jour leurs palais ; le jeune Pallas, le beau Lausus, Nisus et Euryale, sont des personnages divins.

1001. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

C’est en retraçant les habitudes et les actions de ses personnages qu’il nous donne ordinairement la mesure des sentiments et des désirs qui les animent. […] Sans doute, il existe un petit nombre de seigneurs qui ne rappellent en rien cet odieux et ridicule personnage, et l’auteur en dépeint loyalement plusieurs dans ses récits, mais, ce ne sont là que des accidents heureux, comme on l’a dit du pouvoir. […] Dans la première, l’homme sombre et impitoyable que l’auteur nous dépeint est esquissé rapidement, mais le fantasque personnage qui figure dans la seconde est étudié avec beaucoup de soin. […] Une des roues de derrière de la téléga 7 qui portait le cuisinier s’étant enfoncée dans un pont nouvellement réparé, ce personnage important eut l’abdomen légèrement comprimé. […] Quelques nouveaux personnages se trouvaient aussi dans la chambre ; mais Diki-Barine n’y était plus.

1002. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

La tragédie, qui emprunte ses personnages aux traditions héroïques ou à l’histoire, peut naître et fleurir même aux époques d’agitation politique. […] Entre deux personnages qu’unissaient, dans une prodigieuse inégalité extérieure, tant de rapports d’âge, de figure, d’esprit, quand l’accord vint à être troublé, ce fut au plus petit et au plus sensible à en porter la peine. […] C’est, pour la comédie, qu’à ce moment unique la société française réunissait tous les grands traits de toute société civilisée, tous les rapports des caractères, toutes les diversités des esprits, toutes les physionomies : c’est, pour la tragédie, que le personnage héroïque qui lui servait d’idéal réunissait les principaux traits des hommes à qui Dieu a donné l’empire sur les autres. […] Il est fort différent, surtout pour la comédie, d’avoir à peindre ses personnages au repos, dans le naturel de leurs habitudes, où d’être forcée de les saisir dans quelque mêlée, au passage, dans le flot qui les pousse avec le poète lui-même. […] La société, telle que l’avait faite Louis XIV, a inspiré les premiers, et les mêmes causes générales qui ont donné à Molière un théâtre ont fourni des personnages à La Fontaine pour son ample comédie à cent actes divers, comme il appelle ses fables.

1003. (1912) Enquête sur le théâtre et le livre (Les Marges)

Ce n’est donc pas un sujet de pièce qu’il cherche, mais un personnage ressemblant à l’acteur, ou une situation faisant valoir l’acteur. Le personnage ou la situation inventée, il construit une pièce autour. […] Peu importe que tout soit sacrifié à un seul personnage !

1004. (1913) La Fontaine « I. sa vie. »

Ne croyez pas que ce soit que je sois heureux que La Fontaine fût à demi Poitevin, non, ce n’est pas ma raison, mais c’est que, quand on a affaire à un homme qui a deux ascendances, deux pays différents et très différents, on est absolument dispensé de faire l’étude ethnographique et de se demander quelle est l’influence de la race sur le personnage en question. […] Lorsque, plus tard, Racine et Boileau sont devenus des personnages officiels, des historiographes du roi, des gentilshommes ordinaires du roi, La Fontaine, qui n’a jamais été aimé à Versailles, que le roi, en définitive, n’a jamais pu souffrir, cessa de les fréquenter et la société fut rompue. […] C’est peut-être elle que Molière a visée dans le personnage de Philaminte, qui est aussi scientifique que littéraire, et c’est elle que, certainement a visée Boileau dans le portrait de la femme savante de la Satire sur les femmes.

1005. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

Et cela, avec son personnage de Madame Bovary, qui est la femme-type du genre de corruption le plus particulier à la femme du xixe  siècle, lui valut ce succès sur lequel il a toujours vécu et vit encore, mais qu’il ne recommencera plus. […] C’est avec le noir animal de sa Bovary que Flaubert a fait ses femelles de L’Éducation sentimentale, et c’est ce connu, c’est ce manque de nouveauté, dans les personnages comme dans la manière, c’est cette répétition affaiblie, comme toute répétition, des mêmes formes et du même fond d’idées, — si idées il y a, — qui sera l’empêchement dirimant du grand succès annoncé, mais qui ne viendra pas, et qui déjà, comme vous voyez, se fait attendre ! […] Ce qui révolte seulement bien plus que l’odieuse crudité des paroles, c’est la froideur avec laquelle on les écrit ou on les fait dégoiser à ses personnages.

1006. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — III. (Fin.) » pp. 175-194

Cette idée avait déjà pris dans le personnage héroïque de Jeanne d’Arc une popularité ineffaçable. […] Henri IV mort, Sully manque de chef ; personnage considérable, homme d’État puissant, mais, somme toute, secondaire, il s’est plu lui-même à reconnaître que, dans tout ce qu’il a exécuté et imaginé de bien, il y avait du fait de Henri IV autant et plus que du sien propre ; cet aveu l’honore, mais il a du vrai.

1007. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

Chapelle est, des deux, le personnage le plus littéraire, et qui joue son rôle parmi les illustres du grand siècle. […] Il faut lui savoir gré du moins d’être un personnage aussi essentiel dans le groupe de son temps : à côté de Boileau, c’est une figure réjouissante, c’est un interlocuteur qui le contrarie, l’excite, et quelquefois le déconcerte et l’entraîne jusqu’à l’enivrer ; à côté de Molière, c’est un confident de ses chagrins, et qui, même par ses consolations incomplètes, oblige le grand homme à se déclarer tout entier devant lui et devant nous dans ses tendresses jalouses et dans ses passions.

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