Cet homme de bien, très détaché de lui-même, ne se jugeait pas assez important pour s’occuper exclusivement de lui et pour en occuper les autres ; il se passe habituellement sous silence ; mais, quand il rencontre sur le chemin de ses souvenirs et de sa plume quelqu’une de ces questions historiques qui ont agité et l’Église et le monde, telles que le concordat, le rétablissement du culte en France, le conclave d’où sortit Pie VII, le voyage du pape à Paris pour y couronner Napoléon, l’emprisonnement de ce pontife à Savone, sa dure captivité, sa résidence forcée à Fontainebleau, les désastres de Russie et de Leipsick qui forcèrent l’empereur à tenter sa réconciliation avec Pie VII et à renoncer à l’empire des âmes pour recouvrer à demi l’empire des soldats ; le retour du pape à Rome, l’enthousiasme de l’Italie à sa vue, qui le fait triompher seul à Rome de l’omnipotence indécise de Murat en 1813 ; enfin sa restauration spontanée sur son trône : alors Consalvi, directement ou indirectement mêlé à toutes ces transactions, prend des notes, les rédige et les confie aux archives du Saint-Siège pour éclairer le gouvernement pontifical et traditionnel sur ses intérêts.
On voit à l’accent du récit qu’elle fait de cet événement, dans son livre Dix années d’exil, qu’elle éprouva quelque chose de semblable à ce qu’éprouva Agrippine à la première révélation de l’inhumanité de son fils, une consternation mêlée de joie tragique, parce qu’elle avait enfin le droit de haïr celui qu’elle craignait.
La partie sociale de l’individu est donc entièrement dominée par ce même instinct vital et social, c’est-à-dire par les intérêts et les passions des groupes auxquels l’individu se trouve mêlé, dont il épouse la cause avec plus ou moins d’ardeur et avec le vouloir-vivre desquels il s’identifie plus ou moins complètement.
Musset, qui fut l’enfant terrible du romantisme, s’est amusé à railler ces théories nébuleuses et ces fièvres poétiques où les illusions et les rêveries de la jeunesse x se mêlent toujours à une petite dose d’idées sérieuses et fécondes171.
Il va purifier son âme, la mêler à ce Non-Moi, qui est son âme, encore.
Et là, je trouve un tas de gentilles petites filles, et des vieilles bonnes aux bonnets tourangeaux, et une odeur de pot-au-feu de curé mêlée à une vague senteur de pastilles du sérail : un intérieur à la fois bourgeois et romantique.
J’éprouvai un de ces instincts d’acte extérieur que l’homme sincère avec soi-même éprouve rarement quand il est seul, et que rien de théâtral ne se mêle à la candide simplicité de ses impressions.
La Gaule a disparu sous la France ; et la France elle-même n’est plus qu’une grande mêlée de races, de sang, de langues, de mœurs, de législations, de cultes, qui fond tout ce qu’elle a de divers dans une lente et laborieuse unité.
À cela je réponds qu’on peut exercer et étendre la mémoire des enfants aussi facilement et plus utilement avec d’autres connaissances que des mots grecs et latins ; qu’il faut autant de mémoire pour apprendre exactement la chronologie, la géographie et l’histoire, que le dictionnaire et la syntaxe ; que les exemples d’hommes qui n’ont jamais su ni grec ni latin, et dont la mémoire n’en est ni moins fidèle, ni moins étendue, ne sont pas rares ; qu’il est faux qu’on ne puisse tirer parti que de la mémoire des enfants ; qu’ils ont plus de raison que n’en exigent des éléments d’arithmétique, de géométrie et d’histoire ; qu’il est d’expérience qu’ils retiennent tout indistinctement ; que quand ils n’auraient pas cette dose de raison qui convient aux sciences que je viens de nommer, ce n’est point à l’étude des langues qu’il faudrait accorder la préférence, à moins qu’on ne se proposât de les enseigner comme on apprend la langue maternelle, par usage, par un exercice journalier, méthode très avantageuse sans cloute, mais impraticable dans un enseignement public, dans une école mêlée de commensaux et d’externes ; que l’enseignement des langues se fait par des rudiments et d’autres livres ; c’est-à-dire qu’elle y est montrée par principes raisonnes, et que je ne connais pas de science plus épineuse ; que c’est l’application continuelle d’une logique très-fine, d’une métaphysique subtile, que je ne crois pas seulement supérieure à la capacité de l’enfance, mais encore à l’intelligence de la généralité des hommes faits, et la preuve en est consignée dans l’Encyclopédie, à l’article CONSTRUCTION, du célèbre Dumarsais, et à tous les articles de grammaire ; que si les langues sont des connaissances instrumentales, ce n’est pas pour les élèves, mais pour les maîtres ; que c’est mettre à la main d’un apprenti forgeron un marteau dont il ne peut ni empoigner le manche, ni vaincre le poids ; que si ce sont des clefs, ces clefs sont trèsdifficiles à saisir, très-dures à tourner ; qu’elles ne sont à l’usage que d’un très-petit nombre de conditions ; qu’à consulter l’expérience et à interroger les meilleurs étudiants de nos classes, on trouvera que l’étude s’en fait mal dans la jeunesse ; qu’elle excède de fatigue et d’ennui ; qu’elle occupe cinq ou six années, au bout desquelles on n’en entend pas seulement les mots techniques ; que les définitions rigoureuses des termes génitif, ablatif, verbes personnels, impersonnels sont peut-être encore à faire ; que la théorie précise des temps des verbes ne le cède guère en difficulté aux propositions de la philosophie de Newton, et je demande qu’on en fasse l’essai dans l’Encyclopédie, où ce sujet est supérieurement traité à l’article TEMPS ; que les jeunes étudiants ne savent ni le grec ni le latin qu’on leur a si longtemps enseigné, ni les sciences auxquelles on les aurait initiés ; que les plus habiles sont forcés à les réétudier au sortir de l’école, sous peine de les ignorer toute leur vie, et que la peine qu’ils ont endurée en expliquant Virgile, les pleurs dont ils ont trempé les satires plaisantes d’Horace, les ont à tel point dégoûtés de ces auteurs qu’ils ne les regardent plus qu’en frémissant : d’où je puis conclure, ce me semble, que ces langues savantes propres à si peu, si difficiles pour tous, doivent être renvoyées à un temps où l’esprit soit mûr, et placées dans un ordre d’enseignement postérieur à celui d’un grand nombre de connaissances plus généralement utiles et plus aisées, et avec d’autant plus de raison qu’à dix-huit ans on y fait des progrès plus sûrs et plus rapides, et qu’on en sait plus et mieux dans un an et demi, qu’un enfant n’en peut apprendre en six ou sept ans.
Je dois ajouter que cette lueur rougeâtre se mêlait si parfaitement avec les lumières, les ombres et les objets du tableau, que je demeurai persuadé qu’elle en était, jusqu’à ce que, le soleil venant à descendre sous l’horizon, l’effet disparût.
Enfin le Parlement se mêla du procès et fit défense aux théâtres de la foire de faire servir leurs établissements à d’autres usages qu’à ceux de leur profession, permettant, en cas de contravention, de démolir leurs salles de spectacles. […] En 1675, il livra à la scène une comédie héroïque en cinq actes et en vers, avec prologue et divertissements, le tout mêlé de musique et de danses. […] La tragédie de Commode eut également le privilège de faire déplacer Louis XIV ainsi que toute la Cour qui vint mêler ses applaudissements à ceux du public. […] Joconde, un des personnages, énumérant les qualités que doit posséder le parfait courtisan, s’exprime ainsi : Il faut qu’il soit beau fils et malin de nature, D’esprit fort corrompu, mais fort bien fait de corps ; Haïssable au dedans, et charmant au dehors ; Qu’il n’ait de la vertu rien que les apparences, Et qu’il mêle aux beaux mots les belles révérences ; Qu’il promette beaucoup et qu’il ne tienne rien. […] Les amis de Racine attribuèrent cette satire, fort méchante, mais spirituelle, au duc de Nevers, qui se mêlait quelquefois d’enfourcher Pégase, comme on disait alors, et qui le montait assez mal.
On ne l’obtiendrait pas pure si l’on ne prenait pas la précaution d’introduire assez profondément le tube métallique ; car, près de l’embouchure du canal de Sténon, dans la cavité buccale, il existe quelquefois de petites glandes qui s’abouchent dans ce conduit et mêlent le liquide visqueux qu’elles sécrètent au liquide parotidien. […] Chez le chien, ce précipité dans la salive parotidienne ne se voit pas quand elle est mêlée d’un peu de salive visqueuse. […] La commission d’hygiène pense en outre que l’albumine, dont elle évalue la proportion à 20 pour 100 environ dans le coagulum, n’y est pas à l’état pur, mais mêlée à une petite proportion de phosphate et de carbonate de chaux. […] Ils ont pris une assez grande quantité de salive humaine qu’ils ont épuisée par l’alcool ; ils ont filtré, puis ils ont distillé l’alcool ; après quoi ils ont mêlé le résidu alcoolique avec de l’acide phosphorique et distillé de nouveau au bain-marie. […] 2° Avec 15 grammes environ du suc pancréatique frais recueilli sur un chien on a mêlé quelques grammes de graisse de porc récemment préparée et rigoureusement neutre.
Le goût est nécessairement mêlé, subordonné aux idées, et le seuil acte d’autonomie qu’il puisse faire, c’est d’accepter franchement la société et la suprématie de l’intelligence
Il faut que, naturellement et sans qu’il s’en mêle, un homme de ce monde trouve de l’or dans ses poches, un habit galant sur sa toilette, des valets poudrés dans son antichambre, un carrosse doré à sa porte, un dîner délicat sur sa table, et qu’il puisse réserver toute son attention pour la dépenser en grâces avec les hôtes de son salon.
Les moines alors se mêlaient à tout ; les cordeliers s’étaient divisés en deux sectes, dont l’une voulait s’abstenir totalement du droit de propriété, dont l’autre voulait conserver ses biens immenses.
C’est au nom du Tien qu’on agit ; c’est sa justice qui doit diriger : on ne doit y mêler aucune vue particulière.
Je suis allé hier dîner à Saint-Cloud avec madame de Chateaubriand et Hyacinthe (son secrétaire) ; je me suis un peu promené dans ces grands bois où j’ai perdu il y a longtemps bien des années : je ne les y ai pas retrouvées… ; sans vous je m’en voudrais d’avoir traînassé si longtemps sous le soleil. » Il retrouvait cependant un peu de déclamation et de faux enthousiasme en parlant dans quelques billets de ce Napoléon qu’il avait jadis écrasé vivant d’invectives dans ses brochures et qu’il déifiait aujourd’hui d’apothéoses : c’était le ton du jour ; il fallait, pour être de mode, affecter de confondre l’idolâtrie du despotisme militaire avec le fanatisme de la liberté : mêlée menteuse d’opinions et de principes, de morts et de vivants, où Dieu reconnaîtra les siens, comme dit le proverbe.
« Presque tout ce qu’on fait pour la créature est perdu, à moins que la charité ne s’y mêle.
La Physique en deux volumes, souvent mêlée de métaphysique transcendante, tient plus à la haute philosophie.
C’est ainsi que tous les livres de philosophie, d’esthétique, de philologie, d’histoire que Wagner a pu consulter ou dont il a pu subir l’influence, tous les ouvrages des personnes dont la vie a été mêlée à la sienne, toutes les histoires de la Révolution de 1849, les brochures sur les théâtres que Wagner a dirigés ou fréquentés, etc : tout cela agit pêle-mêle dans ces armoires de M.
Sur cette déclaration il y a une mêlée générale, où tout le monde parle et crie, et l’on entend, sur cet orage de paroles, se détacher le chantonnement de la voix de Gautier, répétant dans son indifférence de la discussion : « Moi je suis fort, j’amène 357 sur la tête de Turc et je fais des métaphores qui se suivent.
On suppose même qu’il a pu exister des faunes et des flores dont l’organisme élaborait des substances siliceuses, comme les faunes et les flores plus récentes ont élaboré le calcaire, et que leurs détritus seraient mêlés jusque dans les roches métamorphiques et granitoïdes, sans qu’il nous soit jamais possible d’en connaître ou d’en reconstruire les formes perdues.
. — Considérés en eux-mêmes, les états de conscience profonds n’ont aucun rapport avec la quantité ; ils sont qualité pure ; ils se mêlent de telle manière qu’on ne saurait dire s’ils sont un ou plusieurs, ni même les examiner à ce point de vue sans les dénaturer aussitôt.
Plutôt que d’admettre la présence, dans tous les cas, des deux éléments mêlés dans des proportions diverses, il aime mieux dissocier ces deux éléments, et attribuer ainsi aux objets extérieurs d’une part, aux états internes de l’autre, deux modes d’existence radicalement différents, caractérisés chacun par la présence exclusive de la condition qu’il faudrait déclarer simplement prépondérante.
Et c’est pourquoi, pas plus pour un particulier que pour un général, il ne saurait être question de se prétendre au-dessus de la mêlée. La pensée, mais où irait-elle se promener, si elle sortait de cette mêlée qu’elle a justement pour mission de démêler.
Quant à l’auditif pur qui se mêlerait d’écrire, ce serait un simple perroquet ; de même que le type visuel (celui qui voit les idées et les choses sous la forme d’un mot imprimé) serait un simple copiste. […] Un hourl hourl continuel en sort, jusqu’à ce que, tête basse, il plonge du poignard de son bec au fond d’une fleur, puis d’une autre, en tirant les sucs et, pêle mêle, les petits insectes26 ; tout cela d’un mouvement si rapide que rien n’y ressemble ; mouvement âpre, colérique, d’une impatience extrême, parfois emporté de furie contre qui ? […] L’art n’a pas encore perdu en France toutes ses vieilles libertés et il est encore permis, ce que les nations protestantes répriment sévèrement, comme un retour au paganisme, de mêler & l’ingénuité des fleurs et des feuillages la nudité idéale de l’homme et de la femme.
Le sophisme s’est comme mêlé à leur sang, jusqu’à faire partie intégrante de leur vie. […] Si, chaque année, on envoyait dans les pays de forte civilisation ou simplement de remarquable santé physique et mentale — par exemple aux Etats-Unis, en Norvège, en Hollande, en Australasie, en Prusse, en Suisse — quelques milliers d’enfants français, espagnols ou italiens, de dix ans à dix-huit ans, qui vivraient là séparément, chacun à un nouveau foyer, mêlés à une société différant profondément de la leur, pense-t-on que, revenus au pays natal, ces adolescents tout imprégnés d’habitudes et de sentiments nouveaux, nourris d’un air plus pur et plus fortifiant, n’auraient pas sur leurs compatriotes et sur le milieu une influence décisive, qu’ils ne seraient pas comme des ferments de santé, d’énergie et d’intelligence ? […] Aucun bas sentiment de vindicte, d’injure ou de cruauté, ne devrait s’y mêler.
Je dirai : il y a deux races de la guerre qui n’ont peut-être rien de commun ensemble et qui se sont constamment mêlées et démêlées dans l’histoire. […] Ces deux races de la guerre se sont plus ou moins liées et déliées, mêlées et démêlées, tissées et détordues dans l’histoire militaire et dans l’histoire politique. […] De tout temps les deux races de la guerre se sont mêlées et démêlées, de tout temps elles se sont liées et déliées, de tout temps les deux systèmes se sont mordus et démordus sans qu’on puisse dire que l’un ait jamais éliminé l’autre. […] Partout, et longtemps, sinon toujours, ces deux idées se sont combattues et peut-être plutôt débattues, ces deux idées se sont liées et déliées, mêlées et démêlées, jointes et désunies, distinguées et confondues, l’une que le roi serait le premier des barons, l’autre que le roi serait le premier des maîtres.
Elle est pénétrée de je ne sais quelle force mêlée de sagacité. […] Déjà ne vient-il pas se mêler un peu au désespoir de sa noblesse ? […] Il ne se mêle pas aux choses, il ne se dépense pas en elles, il garde contre elles une sorte d’hostilité et rejette toute possession.
On a cherché à expliquer par des circonstances accidentelles cette révolution morale dans un homme d’une pensée supérieure et d’une sensibilité exquise, comme si l’esprit human, quand il s’élève et que l’orage du cœur s’en mêle, avait un si grand nombre de chances entre les solutions.
Lorsqu’il s’est éveillé ce matin à neuf heures, il ne savait où il était, ni comment il était parvenu sur son lit ; il n’avait pas fait un mouvement de toute la nuit. » Ces lettres sont pleines de ces minuties de père, de mère, de nourrice, qui se mêlent comme dans la vie commune aux miracles de l’enfance du génie.
Quelque chose de sardonique dans son sourire se mêlait, sur ses lèvres, à un désir visible de séduction ; ce sourire semblait indiquer en lui l’arrière-pensée de se jouer des hommes en les charmant ou en les gouvernant.