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399. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre VII. Le Bovarysme essentiel de l’existence phénoménale »

L’unprend conscience de soi-même dans le multipleet l’état de connaissance, mascarade prestigieuse où la vie se délasse, se fonde sur le mensonge d’un être qui, par manière de jeu, se conçoit autre qu’il n’est.

400. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre III. Du temps où vécut Homère » pp. 260-263

Aux funérailles de Patrocle, Achille donne tous les jeux que la Grèce civilisée célébrait à Olympie. — 2.

401. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Le reste consiste en un mélange, ou plutôt en un entassement de poésies de toutes sortes, depuis celles qui portent des noms de genres, jusqu’à ces jeux d’esprit, sans nom et sans nombre, qui sont aux vraies œuvres de l’esprit ce que sont au travail fécond de l’ouvrier vigoureux les tours de force du bateleur. […] Il y avait d’ailleurs dans la poésie qui allait disparaître du bon mêlé au mauvais, et si la mode avait gardé des partisans, c’est grâce au « grain de bon sens » que, même avant le conseil de Balthazar Gracian, nos Français savaient mettre jusque dans des jeux d’esprit qui semblent l’exclure. […] Le même Voiture jouait avec tant d’ardeur, dit Tallemant des Réaux, qu’il était forcé de changer de chemise toutes les fois qu’il sortait du jeu. […] A tous ces jeux d’esprit, où s’évertuait alors tout ce qui tenait une plume, il oppose la raison, le vrai, comme à un siècle déréglé on se contente de rappeler la probité, l’honneur, la foi publique. […] L’aigreur remplaçait l’indignation, et le jeu de mots la plaisanterie.

402. (1925) Dissociations

Ces jeux de la barbe sont en principe des modes barbares. […] Il y a donc maintenant, dans les écoles qui se respectent, une classe de jeu comme il y a une classe d’arithmétique, des cours de thèque, comme des cours de géographie. Bien plus, on a fondé une école normale des jeux et il y aura des professeurs agrégés de jeux. Enfin les jeux serviront à quelque chose et, en jouant au cheval-fondu, un enfant sage pourra avoir conscience de ne pas perdre son temps et même de préparer son avenir. En revanche, on verra des cancres du jeu punis pour avoir raté leur composition en saute-mouton ou des paresseux pour avoir négligé les billes, les barres ou la balle.

403. (1896) Les Jeunes, études et portraits

On s’est intéressé au jeu des phénomènes de conscience. […] On s’amusait au jeu des idées, au spectacle infiniment nuancé de leurs contradictions. […] Les âmes sont plus fortes et ont tout leur jeu. […] À ce jeu, qui est, paraît-il, le nouveau jeu on se fatigue vite ; on est bientôt usé, d’autant que déjà on n’était pas très solide. […] Je n’en veux pour preuve que le jeu auquel se livre chaque semaine M. 

404. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXVII » pp. 153-157

Ce qui est moins noble, c’est qu’on joue à ce jeu-là chez la reine d’Angleterre et malgré elle.

405. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLI » pp. 167-171

Il paraît réellement qu’on a hésité, et que, de peur de déplaire au clergé en acceptant si hautement le grand excommunié, le ministère de l’intérieur avait pensé à retirer son épingle du jeu.

406. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVI » pp. 301-305

Tout s’est passé dignement et avec une parfaite convenance, qui n’a pas nui à la vivacité du jeu.

407. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ch.-V. de Bonstetten : L’homme du midi et l’homme du nord, ou l’influence du climat »

C’est cette série d’actions et de réactions, ce jeu d’influences réciproques, qu’à la rigueur il faudrait poursuivre et démêler chez les différents peuples ; mais, dans un si vaste problème, la multiplicité des termes et l’indétermination de la plupart des données surpassent les forces de toute analyse ; et, d’ailleurs, avoir ainsi posé la question, c’est déjà en avoir donné la solution la plus générale et la plus utile.

408. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 532-537

POMPIGNAN, [Jean-Jacques le Franc, Marquis de] ancien premier Président de la Cour des Aides de Montauban, sa patrie, de l’Académie Françoise, de celle des Jeux Floraux, &c. né en 1709.

409. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre premier. Que le Christianisme a changé les rapports des passions en changeant les bases du vice et de la vertu. »

S’il existait une religion qui s’occupât sans cesse de mettre un frein aux passions de l’homme, cette religion augmenterait nécessairement le jeu des passions dans le drame et dans l’Épopée ; elle serait plus favorable à la peinture des sentiments que toute institution religieuse qui, ne connaissant point des délits du cœur, n’agirait sur nous que par des scènes extérieures.

410. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Appendice. Histoire raisonnée des poètes dramatiques et lyriques » pp. 284-285

Pindare vint au temps où la vertu grecque éclatait dans les pompes des jeux olympiques au milieu d’un peuple admirateur ; là chantaient les poètes lyriques.

411. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

C’était le signal pour les jeux et pour les combats, et, au même instant, les lutteurs, les gladiateurs et les escrimeurs se prirent ensemble. […] Le jeu veut qu’on ne la frappe qu’au galop, et les bons joueurs sont ceux qui, en courant à toute bride, savent renvoyer d’un coup sec une balle qui vient à eux. […] On l’appelle girid-bas, c’est-à-dire le jeu du dard, et voici comme on s’y exerce: Douze ou quinze cavaliers se détachent de la troupe et, serrés en un peloton, vont à toute bride, le dard à la main, se présenter pour combattre. Une pareille troupe qui se détache les vient rencontrer ; ils se lancent le dard l’un à l’autre, et puis se rendent à leur gros, d’où il se fait un autre pareil détachement, et ainsi de suite tant que le jeu dure. […] Il passa le temps à voir les jeux, les combats et les exercices qui se faisaient dans la place, à entendre la symphonie qu’il y avait dans le salon, composée des meilleures voix et des plus excellents joueurs d’instruments qui soient à ses gages, à discourir avec les grands de son État, qui étaient dans l’assemblée, et à boire et manger.

412. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

Ils ont leur tir dans des cabarets, comme nous y avons des jeux de quilles, et ils se réunissent d’habitude vers le soir dans ces endroits où je les ai regardés souvent avec le plus grand plaisir. […] Quand tout le monde avait tiré, chacun allait reprendre sa flèche et on recommençait le jeu. […] Je crois facilement que ce jeu du Brabant est beau. Notre plaisir allemand du jeu de quilles paraît, en comparaison, grossier, commun, et il tient beaucoup du Philistin. […] une des fauvettes, devenue déjà grosse, se mit à donner la becquée aux oiseaux plus petits qu’elle ; cela, il est vrai, un peu par jeu et en enfant, mais cependant avec le désir et le penchant bien marqué d’imiter l’excellente mère.

413. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Croce est trop loyal pour ces jeux-là), mais être victime d’une définition trop étroite. […] Mais, dussé-je paraître vieux jeu aux esthètes les plus récents, j’ajoute : le Beau est la splendeur du Vrai49, et le Vrai c’est aussi le Bien. […] En effet, comment enfermer en 24 heures, en un seul lieu, la genèse et les aventures de plusieurs personnages, le tableau d’une époque (sa philosophie, ses jeux de société et jusqu’à son système monétaire), Jean qui rit et Jean qui pleure, et tout le bouillonnement de la vie totale ? […] Or, comme on a supprimé le truc trop facile des confidents, il faut recourir, pour l’exposition, aux amies et amis indiscrets, aux serviteurs bavards ; tout cela potine et caquette dans une salle de bal, autour d’une table à thé ou d’un jeu de puzzle (qui tend à remplacer le whist), ou entre deux coups de balais ; et puisque tout se passe « comme dans la vie », c’est par de longs méandres qu’on arrive au but ; c’est du temps perdu pour l’action, et c’est un éparpillement de comparses qui nuit à la psychologie des personnages essentiels. […] On m’objectera que Dumas est vieux jeu, et que, membre de l’Académie… L’insinuation serait gratuite ; on pourrait la réfuter avec d’autres exemples ; mais quittons la France, facilement suspecte d’hellénisme, et prenons, dans le Nord, un auteur qui certes n’a pas craint de rompre avec toutes les traditions : Ibsen.

414. (1925) Proses datées

De tout temps, nos jeunes gens, étudiants ou artistes, ont montré un réel goût pour la farce et se sont plu à tels jeux bruyants et facétieux. […] A ce jeu, on a chance de se montrer à son avantage et de donner de soi une idée favorable. […] Un jeu de cartes servit à cet usage. […] La troisième, avec des parterres à la française, offrait aux visiteurs une orangerie, une volière et un jeu de bagues. […] Les courtiers d’amour avaient beau jeu et le jeu allait même parfois un peu loin, jusqu’à proposer parfois à un mari sa propre femme.

415. (1890) Le massacre des amazones pp. 2-265

Je ne me laisse point prendre à vos simagrées ; et j’étudie sans émotion vos horreurs de surface et de jeu. […] Elle est complexe et artificielle, toute en jeux de surface, pauvre Isis faite de voiles abondants, de roides broderies dressées autour de rien. […] Et recommence pendant trois cents pages et plus le jeu fuyant et énervant qui nous entraîne à la conquête de rien, comme les coquetteries engageantes et refuseuses de quelque Bélise. […] Sans doute, j’ai tort de lire des rondels, d’essayer de m’intéresser à ce puéril jeu de société. […] *** La comtesse Diane joue avec grâce le noble jeu archaïque.

416. (1887) George Sand

Elle veut mettre la nature elle-même dans son jeu et la contraindre à son caprice ; elle virilise autant qu’elle peut sa manière de vivre, son costume, ses goûts, ses opinions, son talent. […] Elle se plaît, dans les jeux de son imagination, à rapprocher les conditions et à préparer (elle le croit du moins) la fusion des castes par l’amour. […] Comment se combinent en elle la puissance d’invention, qui est si variée et si féconde, avec l’expérience de la vie réelle, dans les différentes situations qu’elle décrit et les caractères qu’elle met en jeu ? […] On a beau jeu pour nous dire qu’après quarante ou cinquante années, ce style, au moins dans certaines parties, a vieilli comme d’autres parties de l’œuvre. […] Elle n’avait jamais été bavarde, elle l’était moins encore en vieillissant, hormis les jeux de famille et les contes aux enfants.

417. (1914) Une année de critique

Henry Bidou cesse vite les jeux de virtuose où pourrait s’exercer la subtilité de sa pensée et s’affirmer la richesse de ses connaissances esthétiques. […] Contempler, sur les ruines de la Foi et de l’Espoir, la ronde des idées et des formes, le souple jeu des apparences périssables, voilà le dernier mot de la sagesse. […] En tout cas, ni l’art ni l’amour ne gagnent beaucoup à ces jeux compliqués. […] Pour les ennemis de l’ancien régime, qui seraient tentés d’approuver le jeu de massacre auquel se livre M.  […] Il nous montre à quelle beauté peuvent atteindre les jeux mêlés des idées et du style.

418. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

Elle n’a pas de date ; c’est sans doute le moment où les légions d’Auguste allaient chercher les légions du fils de Pompée pour jouer au jeu des batailles le dernier sort de Rome. […] Rien ne surpasse, dans la poésie grecque, l’énergie descriptive de ces jeux de la Fortune qui joue avec les trônes, qui élève et abaisse à son caprice les heureux. […] XV Il revient dans l’ode familière suivante à lui-même, et dit comment il devint favori de la muse légère : « Sur les rives du Vulturne, qui poursuit son cours au-delà de l’Apulie où je suis né, un jour que, fatigué par mes jeux et vaincu par le sommeil, des colombes prophétiques me parsemèrent d’un feuillage printanier ; ce prodige étonna ceux qui habitent le nid d’aigle escarpé du village d’Achérontie, les précipices boisés de Brantium, et ceux qui labourent les gras territoires de l’obscur Férente, émerveillés de ce que je sommeillais à l’abri des ours et des morsures des noires vipères, sans autre défense que les rameaux de myrte et de laurier, enfant à qui les dieux seuls pouvaient inspirer tant de confiance !  […] Elles m’ont, dis-je, ravi les joies, les amours, les festins, les plaisirs du jeu, et maintenant elles se préparent à m’enlever même la poésie.

419. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Et, dès lors, le charme tour à tour plaisant et douloureux de la comédie est dans l’ajustement des deux rôles, dans le jeu de la fine et sèche coquette contre l’ardent et loyal amant, tour à tour grondant et trompé, clairvoyant et dompté, jusqu’à ce qu’un dernier coup semble le jeter hors du joug. […] Voilà Tartufe, le maître hypocrite : son hypocrisie corrompt Orgon, corrompt en lui l’amour de sa femme, de ses enfants, les sentiments élémentaires de bonté, de justice, d’honneur, le fait égoïste sottement, durement, honteusement ; même les âmes honnêtes et pures sont viciées à ce contact, et la douce Elmire en vient à jouer un jeu après lequel son mari doit demeurer à jamais avili à ses yeux. […] Il y a là des jeux d’intérêts, de vanités, que Dancourt a décrits sans rien atténuer, et sans rien prendre au tragique. […] Il a porté cette vérité même dans son jeu, qu’il a rendu le plus naturel possible.

420. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre quatrième. Les émotions proprement dites. L’appétit comme origine des émotions et de leurs signes expressifs. »

Certains psychologues ont cherché la première origine des émotions dans le domaine de l’intelligence et ont voulu les expliquer par un simple jeu d’idées. […] D’après lui, l’énergie du sentiment, quelle qu’en soit la nature, se manifeste toujours par une énergie de mouvement : on danse de joie, dit Spencer, comme on piétine de colère ; on ne peut pas plus rester en place dans la détresse morale que dans l’exaltation délicieuse ; il y a des cris d’angoisse comme il y a des cris de volupté ; souvent les bruits que font les enfants au milieu de leurs jeux laissent les parents dans le doute si c’est le chagrin ou le plaisir qui en est la cause. — Soit, mais toutes ces manifestations d’activité ne se ressemblent que pour un spectateur lointain ou superficiel ; il est difficile d’admettre que le plaisir et la douleur, dès le début, se manifestent l’un comme l’autre par un même accroissement général d’activité. […] On dit de même, et avec raison, que le cœur et les poumons se dilatent, que leur jeu est rendu plus facile ; les fonctions cérébrales s’accomplissent avec plus de rapidité et d’aisance : l’intelligence est plus animée, la sensibilité plus expansive, la volonté plus bienveillante. […] « Les lèvres sont relâchées, dit Charles Bell ; la mâchoire inférieure s’abaisse, la paupière supérieure tombe et recouvre à moitié la pupille de l’œil ; les sourcils s’inclinent comme le fait la bouche. » Il est vrai qu’en même temps d’autres muscles se tendent et entrent en jeu, par exemple le sourcilier, l’orbiculaire, les lèvres, surtout le canin abaisseur de l’angle de la bouche, que Bell appelait même « le muscle de la peine ».

421. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

La confiance d’un grand succès était dans tout le théâtre ; et le succès paraissait éclater déjà aux dernières répétitions, devant l’admirable jeu des scènes d’amour. […] Nous disons, nous autres, ce que nous avons sifflé ; que les partisans de la pièce nous disent ce qu’ils ont applaudi, en dehors du magnifique jeu des acteurs, un seul acte, une seule scène, une situation, un mot, et nous nous déclarons satisfaits. […] si nous avions pu écrire une seconde pièce d’amour, celle-là, je vous en réponds, eût été balayée de tout jargon romantique ou livresque, et l’on n’y eût pas rencontré une phrase comme celle-ci : « Vous étiez dans mes rêves comme il y a du bleu dans le ciel », une phrase pas mal rédigée tout de même, mais appartenant au vieux jeu. […] De cruels jours pour le système nerveux des gens, et des jours éternels, que ces jours d’attente ; et je donne ici une note que je retrouve écrite sur un bout de papier : « Mercredi 21 octobre 1857. — Un mauvais sommeil et le matin la bouche sèche comme après une nuit de jeu.

422. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

Il réalise ce qu’il peut de la fortune de sa femme, la laisse achever en Bretagne toute seule sa lune de miel et file sur Paris : en un rien de temps il gaspille dans des maisons de jeu et de débauche l’argent de sa légitime. […] La malheureuse Ernesta épouse un Barbe-Bleu, espèce de géant, ne connaissant que la généalogie du duc de Saxe-Gotha, dont il est le grand-veneur ; il ne parle que chiens, loups, sangliers, cartes et dés ; il se ruine au jeu, vole les diamants de sa femme, l’injurie, la maltraite, la traîne par les cheveux : d’un coup de pied il lance sa fillette de deux ans contre la muraille ; il vit publiquement avec une catin, oblige Ernesta à la recevoir, emprisonne son épouse dans un sombre château de la Forêt-Noire et meurt assassiné par sa maîtresse en proclamant l’innocence de sa légitime : une sainte. […] À côté de ces pièces d’actualité qui transformaient la scène en journal parlé, le public ne tolérait que des opéras-comiques assaisonnés de jeux de mots et de calembours et des tragédies bourrées de meurtre : en voici deux spécimens. […] » La fortune lentement amassée par le travail, c’était le vieux jeu, la vieille morale, la vieille routine.

423. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — I. » pp. 131-146

Au demeurant, il était ami des exercices, adroit aux armes, savant aux jeux, accort aux assemblées, et partout ingénieux, admiré pour son esprit, et redouté pour son courage. […] Il était assez faible pour que le moindre succès l’enflât, pour qu’un secours promis par l’Espagne le rendît moins traitable ; il avait assez d’honneur pour qu’une défaite éprouvée le piquât au jeu et lui parut un motif de plus de persévérer : il avait assez de bon sens d’ailleurs et d’honnêteté pour sentir les misères et les assujettissements de sa position, et peut-être aussi les misères des peuples et de l’État.

424. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — I — Vauvenargues et Fauris de Saint-Vincens » pp. 1-16

Il considérait, en effet, ces morceaux comme des jeux d’esprit, ou du moins des exercices de rhétorique dans lesquels le jeune auteur avait essayé de se former et de se rompre aux divers styles, et il en parlait ainsi d’un air de certitude et comme le tenant de bonne source. […] Autant pour tous ceux qui sont de l’espèce de Figaro, de Gil Blas et de Panurge, de ce Panurge « sujet de nature à une maladie qu’on appeloit en ce temps là faute d’argent, c’est douleur sans pareille (et toutefois, dit Rabelais, il avoit soixante et trois manières d’en trouver toujours à son besoin, dont la plus honorable et la plus commune étoit par façon de larcin furtivement fait) » ; — autant pour cette bande intrigante et peu scrupuleuse, la question d’argent est à la fois importante et légère, objet avoué de poursuite et de raillerie, un jeu et une occupation continuelle, et à toute heure sur le tapis, autant c’est un point sensible et douloureux pour ces natures pudiques et fières, timides et hautes, qui n’aiment ni à s’engager envers autrui ni à manquer à personne, qui ont souci de la dignité et de l’indépendance autant que les autres de l’intérêt.

425. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

On dirait d’un instrument plus perfectionné ; le rayon avec ses jeux et ses reflets y est saisi et fixé tout vif ; à chaque instant le soleil est pris sur le fait. […] L’esprit, du moins, avec son jeu délicat, y fait les frais de ce qui y manque.

426. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite et fin.) »

Il est accueilli en ami ; on lui propose toutes sortes de jeux, la danse, le chant, les dés, les cartes : il préfère le jeu de conversation, des demandes et réponses sur des cas d’amour, en un mot, faire assaut de bel esprit.

427. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

Il suivit de près son maître et se mit en route pour Dresde le 5 février 1810 : « Il quittait, après un séjour de près de quatre ans, nous dit-il, cette France, pays privilégié du Ciel, à tant de titres, où la civilisation, plus ancienne et plus complète qu’ailleurs, a donné aux lois de l’honneur et de la probité cette fixité d’axiomes qui, sans les faire peut-être observer davantage, ne laisse en problème ni en discussion rien de ce qui appartient aux bases des rapports sociaux et du commerce des hommes entre eux ; pays où le langage a une valeur mieux déterminée, où tous les ressorts de la vie sociale ont un jeu lus aisé, ce qui en fait, non comme ailleurs un combat, mais une source de jouissance. » J’aime de temps en temps ces définitions de la France par un étranger ; elles sont un peu solennelles sans doute et ne sont pas assurément celles que nous trouverions nous-mêmes ; nous vivons trop près de nous et trop avec nous pour nous voir sous cet aspect ; le jugement d’un étranger homme d’esprit, qui prend son point de vue du dehors, nous rafraîchit et nous renouvelle à nos propres yeux : cela nous oblige à rentrer en nous-mêmes et nous fait dire après un instant de réflexion : « Sommes-nous donc ainsi ?  […] Singulier mélange, en effet, que cet abbé de Pradt, instruit de tant de choses et qui croyait s’entendre à toutes ; homme d’Église qui l’était si peu, qui savait à fond la théologie, et qui avait à apprendre son catéchisme ; publiciste fécond, fertile en idées, en vues politiques d’avenir, ayant par moments des airs de prophète ; écrivain né des circonstances, romantique et pittoresque s’il en fut ; le roi des brochuriers, toujours le nez au vent, à l’affût de l’à-propos dans les deux mondes, le premier à fulminer contre tout congrès de la vieille Europe ou à préconiser les jeunes républiques à la Bolivar ; alliant bien des feux follets à de vraies lumières ; d’un talent qui n’allait jamais jusqu’au livre, mais qui avait partout des pages ; habile à rendre le jeu des scènes dans les tragi-comédies historiques où il avait assisté, à reproduire l’accent et la physionomie des acteurs, les entretiens rapides, originaux, à saisir au vol les paroles animées sans les amortir, à en trouver lui-même, à créer des alliances de mots qui couraient désormais le monde et qui ne se perdaient plus ; et avec cela oublieux, inconséquent, disparate, et semblant par moments sans mémoire ; sans tact certainement et sans goût ; orateur de salon, jaseur infatigable, abusant de sa verve jusqu’à l’ennui ; s’emparant des gens et ne les lâchant plus, les endoctrinant sur ce qu’ils savaient le mieux ; homme à entreprendre Ouvrard sur les finances, Jomini sur la stratégie, tenant tout un soir, chez Mme de Staël, le duc de Wellington sur la tactique militaire et la lui enseignant ; dérogeant à tout instant à sa dignité, à son caractère ecclésiastique, avec lequel la plupart de ses défauts ou, si l’on aime mieux, de ses qualités se trouvaient dans un désaccord criant ; un vrai Mirabeau-Scapin, pour parler comme lui, un archevêque Turpin et Turlupin.

428. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

Toutes les circonstances, au reste, eu préparaient la riche et facile floraison : tandis que le baron du Nord, entre les murs épais de sa maussade forteresse, menacé et menaçant, ne rêvait que la guerre, les nobles du Midi, en paix et pacifiques sous deux ou trois grands comtes, riches, hantant les villes, épris de fêtes, la joie dans l’âme et dans les yeux, l’esprit déjà sensible au jeu des idées, et l’oreille éprise de la grâce des rythmes se faisaient une littérature en harmonie avec les conditions physiques et sociales de leur vie. […] Leur affaire est de jouer avec des idées : jeu bien français.

429. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre V. La Fontaine »

J’aime le jeu, l’amour, les livres, la musique, La ville et la campagne, enfin tout : il n’est rien Qui ne me soit souverain bien, Jusqu’aux sombres plaisirs d’un cœur mélancolique. […] De la tradition gauloise, c’est-à-dire purement française, il tient l’esprit, le récit leste et vif, la raillerie subtile et pénétrante, sans parler de l’immoralité qui est un jeu de l’esprit plutôt qu’une fougue des sens.

430. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre XI. Quelques philosophes »

Mais il va bientôt, de lion destructeur devenu un enfant qui joue « le jeu divin de la création », forger au monde et à l’individu des chaînes aussi lourdes que les anciennes. […] Remy de Gourmont n’a pu s’amuser longtemps au jeu de « la dissociation des idées » sans constater que la plupart des hommes, cerveaux paresseux soumis à des ventres exigeants, sacrifient la vérité au « bonheur » et « qu’ils ont bien plus souci de raisonner selon leur intérêt que selon la logique ».

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