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680. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Grèce antique »

Sans doute, c’est déjà une raison pour n’y plus toucher qu’une chose soit morte parmi les choses humaines. […] Si nous nous préoccupions beaucoup de la chimère de ce siècle, de cette liberté dont il est si follement épris, nous citerions encore Lerminier : « La liberté antique — dit-il — était le triomphe de la forme sur le fond des choses humaines. […] Seulement, toute chose humaine ayant son revers, cette supériorité des Grecs nous a brillamment faussé l’Histoire. […] Par un reste des respects de sa jeunesse, il dit quelque part que Montesquieu avait la passion de l’impartialité, quoique Montesquieu, en fait d’impartialité, n’eût rien de plus qu’un manque absolu de principes et le parti pris de justifier toutes les erreurs du genre humain, enchâssées dans toutes les législations.

681. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes d’Amérique » pp. 95-110

Jusqu’ici, en effet, nous n’avions pas encore rencontré, parmi ces moralistes qui ont retourné l’âme humaine comme un gant, d’homme assez bronzé par les idées fausses et l’amour dépravé des énormités pour s’agenouiller publiquement et ventre à terre devant cette affreuse bête, — qui d’ailleurs est si bête, — et qui de temps immémorial s’appelle le Veau d’Or. […] Disons-le à l’honneur de tout le monde, de ce côté-ci de l’hémisphère personne, même parmi ceux que l’or qu’ils remuent dans leurs mains puissantes devrait fasciner, n’aurait voulu penser tout haut que l’amour de l’argent et sa production fussent le dernier mot de la moralité humaine, l’idéal enfin de la perfection absolue pour les individus et pour les peuples. […] Les ayant étudiées tout en les admirant, il nous en donne le délicieux camée suivant, qui a l’inflexibilité et la plénitude d’une définition : « Les Américaines — dit Bellegarrigue, page 8, — sont des femmes vivant en contemplation d’elles-mêmes, dédaignant les hommes et adorant la monnaie (toujours la monnaie). » Et pour être mieux compris, pour mieux faire briller le diamant de sa découverte psychologique, le foudroyant moraliste ajoute à la page 9, après avoir froncé son terrible front de penseur : « La sensibilité étant inhérente au cœur humain, les Américaines ne l’ont détournée des objets auxquels l’appliquent ordinairement les femmes d’Europe que pour se l’approprier, ce qui revient à dire (bien obligé, nous avions entendu !) […] affirme l’excellence de la nature humaine, qui pense que toute direction morale comme tout gouvernement politique est un abus, et que l’adoration de l’homme par l’homme, ou de la femme par la femme, et la satisfaction de tous les besoins, n’importe à quel prix !

682. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Lamennais »

Pour les curieux de nature humaine, pour les moralistes, pour ceux que la vie et son impatientant mystère préoccupent plus que les babioles menteuses de l’art d’écrire, les correspondances sont les vrais livres et le style qu’elles ont est vraiment l’homme, comme le disait Buffon un peu trop du style en général, Buffon qui, par parenthèse, n’aurait pas su écrire une lettre. […] Lamennais, le grand écrivain et le prêtre écrivain, a toujours porté à la distance de ses livrés le masque éclatant et sombre de son génie ; mais le visage vrai, le visage humain qu’il y avait dessous, qui l’avait vu et qui jamais s’en était douté ? […] … mais la Correspondance est là… une malingre chose humaine, apte aux tendresses du cœur et enfermant sa vie entre deux ou trois amitiés d’hommes et de femmes, qui le consolèrent toujours de tout dans les afflictions de sa gloire. […] Question humaine et littéraire maintenant résolue !

683. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVI. Buffon »

Évidemment il les domina par la faculté la plus élevée d’entre les facultés humaines, quel que soit l’objet auquel on l’applique, — par cette faculté de l’ordre que Voltaire n’eut jamais qu’avec ses domestiques et ses libraires, et que Montesquieu aurait pu avoir, sans cet amour mesquin de l’épigramme qui l’a tant rapetissé ! […] Flourens nous l’a écrite, ainsi qu’un homme d’action qui n’abstrait pas l’action humaine de l’existence du plus grand des contemplateurs. […] Au fond, en effet, Buffon n’était pas, malgré des qualités de génie, un de ces Intuitifs qui sont les premiers en tout génie humain. […] Excepté l’unité du genre humain et la théorie de la terre, les deux plus grandes solidités de Buffon, l’actif de vérité, dans son bilan, est assez petit.

684. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVII. Saint-Bonnet »

Il a traversé rapidement les faits d’expérience que de part et d’autre on s’opposait ; puis, enfonçant la griffe de sa toute-puissante analyse dans les flancs mêmes de la question psychologique, il a substitué une question de nature humaine et d’inévitabilité logique à un rapprochement décevant dont on pourrait également dire : Cela est-il ou cela n’est-il pas ? Conséquent à la manière des grands observateurs, qui généralisent quand ils concluent, anatomiste de la pensée comme Bichat et Cuvier l’étaient des organes, il a pris la tête humaine dans sa main et il a dit : Cette tête étant conformée comme elle est, il est évident que telles idées ou tels sentiments qu’on y infiltre quand elle est vierge encore doivent produire tel effet funeste, — absolument comme le chimiste dit : Tel liquide versé dans un autre liquide doit produire tel précipité à coup sûr ; — et par là il a donné à une argumentation épuisée le degré de solidité qui devait la rendre invincible. […] La fonction de la Raison, en un mot, est de rappeler constamment l’homme des perceptions contingentes et personnelles aux perceptions impersonnelles et immuables ; de la nature physique où le retient le corps, à la Raison éternelle d’où lui descend la vérité. » Une telle faculté, qui soude presque l’homme à Dieu, s’il est permis de parler ainsi, devait être la première que la philosophie du dix-huitième siècle, la philosophie du moi et de la chose exclusivement humaine, dût fausser. […] Saint-Bonnet paraît seul avoir saisi la question là où elle est réellement, c’est-à-dire dans l’état effrayant de la pensée européenne et dans la nature de l’esprit humain.

685. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIX. M. Eugène Pelletan »

La Chute admise, le Progrès ne serait plus ï Les enfants verraient cela… Seulement, pour rendre son soufflet à l’histoire, il fallait rester dans la philosophie, nous donner, d’après la nature de l’homme et l’étude de ses instincts et de Ses facultés, la preuve philosophique de l’impossibilité radicale, humaine, de la chuté. […] En nous tenant en dehors des livres qui sont pour nous la vérité, les premiers développements humains des sociétés, comme M.  […] Certes, c’est ici le cas ou jamais de citer le beau mot du philosophe Jacobi, qui savait, comme Pascal, ce que vaut, sur les questions premières, la philosophie réduite à elle seule : « La philosophie, comme telle seulement, disait-il, est un jeu que l’esprit humain a imaginé pour se désennuyer, mais en l’imaginant, l’esprit n’a pas fait autre chose que d’organiser son ignorance. » Et encore y a-t-il moyen de l’organiser plus ou moins solidement, cette ignorance !… Voyez les grands esprits à système qui se mêlèrent de penser sur le développement des sociétés humaines, Aristote, Platon, Hobbes, Fichte, Hegel et tant d’autres !

686. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

L’imbécilité même, en matière d’idées, n’est pas une innocence ; et l’esprit humain est conformé de sorte que la bêtise peut, dans un jour donné, avoir le triste honneur d’être un fléau. […] Nous n’avons point à faire un travail d’Hercule en sondant les reins ou le cœur des philosophes, ces étables d’Augias humaines. […] Avec la hache de son scepticisme, il a coupé tous les câbles qui attachent la pensée humaine à la tradition. […] Il entrait dans le domaine des discussions humaines, fatalement entrecoupées de ténèbres et de lueurs flottantes, et il y apportait son génie.

687. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Raymond Brucker. Les Docteurs du jour devant la Famille » pp. 149-165

Balzac lui-même, le plus grand et le meilleur de tous, qui amis tout le monde de son temps dans l’immense cercle de sa Comédie humaine soit dans les romans, sous des noms supposés, soit sous les vrais noms, dans ses préfaces, n’a pas, que je me rappelle, écrit une seule fois le nom de Brucker. […] Une fois demandé, il jaillit, comme tout jaillissait dans Brucker, cet homme-source, qui avait en lui tous les agissements et tous les bouillonnements de l’esprit humain… Mélange de tous les genres de livres dans un seul livre, tout à la fois roman et histoire, critique d’idées et de systèmes, invention de caractères et de personnages pour rendre plus vivantes et plus entraînantes ses théories ; dramatique, poétique, descriptif, mettant des tableaux de mœurs dans des paysages, naturel et intime, et, au milieu de tout cela, débordant de questions, d’explanations, d’argumentations, de démonstrations et de conversations qui roulent dans une verve de style semblable à un battement précipité d’artères, ce livre est peut-être un chaos de puissant ces trop alchimiquement entassées, mais c’est un chaos auquel il faut appliquer cet éternel mot de génie qu’on peut appliquer pour tout à Brucker, — à cet ébaucheur rapide et sublime ! […] — tant que ce beau débris de l’histoire du genre humain tout entier ne sera pas rasé de l’âme humaine, de sa conscience et de sa mémoire, et que chez nous il y aura encore autre chose que des bâtards et des institutions qui veulent bâtardiser la France, la Société de tous les temps et de l’Histoire ne sera pas vaincue et l’aveugle et forcené génie de la Révolution n’aura pas dit son dernier mot !!

688. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Gratry »

Or, comme ce système nous ne l’entrevoyons encore qu’à la lumière de ces prodromes, nous ne pouvons dire exactement à quelle hauteur de monument il s’élèvera, et quelle place définitive il assignera au nouveau philosophe de cet Oratoire dont le nom fut illustré déjà par Malebranche ; mais ce que nous savons, c’est que la tendance en est profondément rénovatrice, — historique deux fois, d’abord parce qu’elle nous fait sortir de l’abstraction intellectuelle pour entrer en pleine réalité humaine, et ensuite parce qu’elle reprend la tradition de méthode qui a été la vraie force de la philosophie, depuis Aristote jusqu’à saint Thomas d’Aquin, et depuis saint Thomas d’Aquin jusqu’à Leibnitz. […] Et n’est-ce pas le plus frappant caractère de ce nouveau traité de la Connaissance de Dieu, que d’avoir creusé dans l’être et de n’y avoir vu jamais que ce qu’il y a dans la croyance universelle du monde, dans le sens traditionnel du genre humain, affermi et illuminé par la Révélation chrétienne, sans que la philosophie y puisse trouver un iota de plus ! […] Cette méthode tient toute, il est vrai, dans le vieux procédé de l’induction, le vis-à-vis du syllogisme dans le raisonnement, et ceci menace d’être fâcheux pour les novateurs, qui s’imaginent que l’esprit humain doit procéder comme un joujou à surprise ; mais pour nous, qui savons quelle mince chose c’est, au regard de Dieu, que l’invention permise aux hommes, nous ne nous étonnerons pas de la reprise en sous-œuvre d’un procédé qu’une intelligence véritablement philosophique a su presque métamorphoser, en le grandissant… L’induction, telle que l’entend l’abbé Gratry, n’est plus le simple procédé de la raison décrit dans tous les livres de psychologie par les anatomistes de la pensée, c’est, sous sa plume, une méthode souveraine et d’un emploi sûr, dont on n’a pas jusqu’ici soupçonné la force parce que la rapidité foudroyante de ce procédé naturel a empêché de l’observer et de le fixer par l’analyse. […] Sa distinction si saisissante des attributs de Dieu en attributs métaphysiques et moraux correspondant au dogme de la Sainte-Trinité appartient, il est vrai, à saint Thomas d’Aquin, l’Aristote catholique, mais c’est qu’il n’est guère possible de ne pas se servir de la bêche laissée par ce grand homme, quand on veut défricher dans la pensée humaine et aller un peu plus loin que lui.

689. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXI. De Mascaron et de Bossuet. »

Pleurez donc sur ces faibles restes de la vie humaine ; pleurez sur cette triste immortalité que nous donnons aux héros !  […] Ce défaut, comme on voit, tient à de grandes beautés ; car l’esprit humain est borné par ses perfections mêmes. […] Dans son éloquence sublime, il se place entre Dieu et l’homme ; il s’adresse à eux tour à tour ; souvent il offre le contraste de la fragilité humaine, et de l’immutabilité de Dieu, qui voit s’écouler les générations et les siècles comme un jour ; souvent il nous réveille par le rapprochement de la gloire et de l’infortune, de l’excès des grandeurs et de l’excès de la misère ; il traîne l’orgueil humain sur les bords des tombeaux ; mais après l’avoir humilié par ce spectacle, il le relève tout à coup par le contraste de l’homme mortel, et de l’homme entre les bras de la divinité.

690. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVI. Des éloges académiques ; des éloges des savants, par M. de Fontenelle, et de quelques autres. »

Les premiers regardent ces éloges comme une justice rendue à des citoyens utiles, ou qui ont voulu l’être ; comme une manière de plus d’honorer les arts ; comme un tribut de l’amitié entre les hommes qui ont été unis par le désir de s’instruire ; comme des matériaux pour l’histoire de l’esprit humain ; enfin, comme un encouragement et une leçon qui apprennent aux citoyens de toutes les classes que le mérite peut quelquefois tenir lieu de fortune et attirer aussi le respect. […] Je suis las d’entendre répéter le juste Aristide, disait un paysan d’Athènes ; et l’histoire de ce paysan est presque celle du genre humain. […] Tous les objets dont on s’y occupe sont grands, et en même temps sont utiles ; c’est l’empire des connaissances humaines ; c’est là que vous voyez paraître tour à tour la géométrie qui analyse les grandeurs, et ouvre à la physique les portes de la nature ; l’algèbre, espèce de langue qui représente, par un signe, une suite innombrable de pensées, espèce de guide, qui marche un bandeau sur les yeux, et qui, à travers les nuages, poursuit et atteint ce qu’il ne connaît pas ; l’astronomie, qui mesure le soleil, compte les mondes, et de cent soixante-cinq millions de lieues, tire des lignes de communication avec l’homme ; la géographie, qui connaît la terre par les cieux ; la navigation, qui demande sa route aux satellites de Jupiter, et que ces astres guident en s’éclipsant ; la manœuvre, qui, par le calcul des résistances et des forces, apprend à marcher sur les mers ; la science des eaux, qui mesure, sépare, unit, fait voyager, fait monter, fait descendre les fleuves, et les travaille, pour ainsi dire, de la main de l’homme ; le génie qui sert dans les combats ; la mécanique qui multiplie les forces par le mouvement, et les arts par l’industrie, et sous des mains stupides crée des prodiges ; l’optique qui donne à l’homme un nouveau sens, comme la mécanique lui donne de nouveaux bras ; enfin les sciences qui s’occupent uniquement de notre conservation ; l’anatomie par l’étude des corps organisés et sensibles ; la botanique par celle des végétaux ; la chimie par la décomposition des liqueurs, des minéraux et des plantes ; et la science, aussi dangereuse que sublime, qui naît des trois ensemble, et qui applique leurs lumières réunies aux maux physiques qui nous désolent. […] Leibnitz ne peut sentir de bornes qui le resserrent ; il embrasse tout ce que l’esprit humain peut penser ; mais le plus grand nombre s’empare d’un objet auquel il s’attache, autour duquel il tourne sans cesse.

691. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Rapport sur les primes à donner aux ouvrages dramatiques.] » pp. 518-522

L’effet moral vraiment digne de ce nom, sur une scène élevée, doit sortir du spectacle même de la nature humaine observée et saisie dans le jeu varié de ses passions, dans ses misères et dans ses grandeurs, et jusque dans l’énergique naïveté de ses ridicules. […] Elle est morale enfin, cette impression généreuse et mâle, cette veine d’honnête homme qui court à travers les brusqueries passionnées du Misanthrope, et qui, par lui, nous réconcilie plus qu’il ne pense avec la nature humaine. […] À des degrés inférieurs, il est encore d’honorables places à saisir ; et, quoique le talent se laisse peu conseiller à l’avance, quoiqu’il appartienne à lui seul, dans ce fonds tant de fois remué, mais non pas épuisé, de l’observation naturelle et sociale, de découvrir de nouvelles formes et des aspects imprévus, qu’on nous permette d’exprimer ce seul vœu : c’est qu’il revienne enfin et qu’il s’attache désormais à étudier une nature humaine véritable, une nature saine et non corrompue, non raffinée ou viciée à plaisir, une nature ouverte aux vraies passions, aux vraies douleurs, sujette aux ridicules sincères, malade, quand elle l’est, des maladies générales, et naturelles encore, que tous comprennent, que tous reconnaissent et doivent éviter.

692. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Alaux. La Religion progressive » pp. 391-400

Alaux croit, avec juste raison, que le besoin d’une religion est au plus profond de l’esprit humain. […] Il croit, comme eux, au droit de la raison humaine. […] Il l’affirme comme le seul fait qui puisse maintenant sauver le genre humain de malheurs immenses, et son affirmation n’est fondée que sur son observation de l’état présent de l’univers.

693. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Léon Bloy »

Transporté de honte pour le compte du genre humain, cet homme, qui était un écrivain du talent le plus élevé, résolut d’arracher, dans la mesure de ses forces, Christophe Colomb à la destinée de silence et d’ingratitude qui pesait depuis près de quatre siècles sur sa mémoire, et qui avait mis la grandeur de l’oubli en proportion avec la grandeur du service rendu par lui au monde tout entier. […] Otez, en effet, par la pensée, la personnalité de Christophe Colomb de la synthèse du monde, que, seule, l’Église embrasse, et que seule elle explique, et il ne sera plus qu’un homme à la mesure de la grandeur humaine ; mais avec l’Église et faisant corps avec elle, il devient immédiatement le grand homme providentiel, le bras charnel et visible de Dieu, prévu dès l’origine du monde par les prophètes des premiers temps… Les raisons de cette situation miraculeuse dans l’économie de la création, irréfragables pour tout chrétien qui ne veut pas tomber dans l’abîme de l’inconséquence, ne peuvent pas, je le sais, être acceptées par les esprits qui chassent en ce moment systématiquement Dieu de partout ; mais l’expression de la vérité, qu’ils prennent pour une erreur, est si grande ici, qu’ils seront tenus de l’admirer. Cette partie dogmatique du livre de Léon Bloy est réellement de l’histoire sacrée, comme aurait pu la concevoir et l’écrire le génie même de Pascal, s’il avait pensé à regarder dans la vie de Christophe Colomb et à expliquer la prodigieuse intervention, dans les choses humaines, de ce Révélateur du Globe, qu’on pourrait appeler, après le Rédempteur Divin, le second rédempteur de l’humanité !

694. (1905) Études et portraits. Portraits d’écrivains‌ et notes d’esthétique‌. Tome I.

Avec les pyrrhoniens il admet tous les arguments dirigés contre la nature humaine et la vérité. […] Il a établi que la foi en Dieu est la suprême habileté du calcul humain. […] En nature humaine, tout ce qui est très intense est aussi très compliqué. […] A ses yeux de déterministe absolu, tout, dans ce que nous appelons une âme humaine, est un produit. […] Il y a dans toute pensée humaine une nécessité de limitation, et le procédé de M. 

695. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Dès sa première jeunesse, il s’était joint au parti libéral, et jusqu’au bout il y demeura, espérant bien de la raison et de la vertu humaines, marquant les misères où tombent les peuples qui avec leur indépendance abandonnent leur dignité903. […] Il se confiait en Dieu, comme un être bon et juste qui se sent aux mains d’un être juste et bon ; il vivait volontiers dans sa pensée et en sa présence, et songeait à l’avenir inconnu qui doit achever la nature humaine et accomplir l’ordre moral. […] Un mot d’Addison va la justifier et vous la faire entendre : « L’affaire du genre humain dans cette vie, dit-il, est bien plutôt d’agir que de savoir923. » Or, une pareille philosophie est aussi utile dans l’action que plate dans la science. […] En effet, les classiques des deux derniers siècles n’ont jamais conçu l’esprit humain que comme cultivé. […] Addison revient vingt fois sur son vieux chevalier, découvrant toujours quelque nouvel aspect de son caractère, observateur désintéressé de la nature humaine, curieusement assidu et perspicace, véritablement créateur, n’ayant plus qu’un pas à faire pour se lancer, comme Richardson et Fielding, dans la grande œuvre des lettres modernes, qui est le roman de mœurs.

696. (1904) Essai sur le symbolisme pp. -

Plus les bulbes de la plante humaine s’irradient nombreuses dans le terreau généreux et divergent, plus la fleur de la pensée s’épanouit et baigne dans le soleil. […] À cette question qui définit admirablement l’objet de la métaphysique et de la poésie : « comment l’univers est-il senti, pensé, voulu par la conscience humaine ?  […] De ce Poème total le parnassien ne comprend pas l’esprit, ne saisit pas le sens profond, s’en tient à la lettre, à une version humaine à une Belle infidèle. […] Le second principe de notre école tient tout entier dans la solution de cet énoncé : trouver un rythme adéquat à l’expression des processus psychiques de l’âme humaine. […] Il invente un système de notations arbitraires, qui sont comme les leviers par où l’activité humaine plonge dans les choses et, avec une force centuplée, les plie à ses desseins.

697. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Préface de la première édition du quatrième volume »

Je me suis donc abstenu, attendant que l’ordre, rétabli dans la société et dans les esprits, me permît de les juger, non comme des auxiliaires appelés en de mauvais jours pour des œuvres de destruction, mais comme des maîtres de l’art et comme les guides de l’esprit humain au dix-huitième siècle. J’ignore si je les ai bien jugés ; du moins j’ai la conscience qu’au moment où ces pages ont reçu leur dernière forme, il ne m’était resté aucun ressentiment de l’usage qu’on avait fait des erreurs de ces écrivains contre les vérités conservatrices de la société humaine.

698. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre premier. De l’Écriture et de son excellence. »

Les productions les plus étrangères à nos mœurs, les livres sacrés des nations infidèles, le Zend-Avesta des Parsis, le Veidam des Brahmes, le Coran des Turcs, les Edda des Scandinaves, les maximes de Confucius, les poèmes sanskrit ne nous surprennent point : nous y retrouvons la chaîne ordinaire des idées humaines ; ils ont quelque chose de commun entre eux, et dans le ton et dans la pensée. […] Or, il est certain qu’on trouve dans l’Écriture : L’origine du monde et l’annonce de sa fin ; La base des sciences humaines ; Les préceptes politiques depuis le gouvernement du père de famille jusqu’au despotisme ; depuis l’âge pastoral jusqu’au siècle de corruption ; Les préceptes moraux applicables à la prospérité et à l’infortune, aux rangs les plus élevés, comme aux rangs les plus humbles de la vie ; Enfin, toutes les sortes de styles ; styles qui, formant un corps unique de cent morceaux divers, n’ont toutefois aucune ressemblance avec les styles des hommes.

699. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

Mais c’est une habitude de l’esprit humain de projeter au dehors ses propres états d’âme. […] C’est là l’aspect qu’offre, à la rouge lueur du Crépuscule des Peuples, le tourbillon humain. […] S’il y a une activité humaine qui doive être individuelle, c’est à coup sûr l’activité artistique. […] Nul mot humain de n’importe quelle langue n’est musical en soi. […] C’est retomber de la hauteur de la perfection humaine au bas niveau de la pholade.

700. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

« Gœthe a dit, sur la perfectibilité de l’esprit humain, un mot plein de sagacité : Il avance toujours en ligne spirale. […] Elle a pu être entravée comme toute entreprise humaine, tantôt par les anarchies, tantôt par les despotismes militaires, ces phases habituelles et courtes de toutes les révolutions ; mais elle se continuera jusqu’à ce qu’elle soit parvenue à ses deux fins. […] Il se présentait avec une impudeur que dénote assez son mépris pour la conscience humaine, comme le restaurateur de cette liberté qu’il avait détrônée. […] Mépris de soi-même, ou mépris du genre humain, Benjamin Constant laissa cette énigme à deviner à la postérité. […] C’est le remords de l’esprit humain.

701. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

Naturaliste du plus immonde naturalisme, partant du pied de son moi isolé et individuel, il érige dans ce livre, qu’il appelle assez superbement « La Justice dans la Révolution et dans l’Église », l’opposition entre l’abstraction simple de la justice innée et la réalité, double et vivante, de la justice révélée divinement(comme l’enseigne l’Église) à la conscience du genre humain. […] qu’il n’y avait qu’une faute de comptabilité à corriger pour que le monde actuel fût immédiatement renouvelé dans ses fondements et ses entrailles, lui cachait les lois morales et physiologiques de la nature humaine. […] Malheureusement, je l’ai dit déjà, dans cette Correspondance où je voudrais plus de détails humains, familiers, domestiques, intimes, il y a encore plus le Proudhon que j’abhorre que le Proudhon qu’à quelques-unes de ses pages je serais tenté d’honorer ! […] Avant de tuer les rois, on tue le bon sens, qui est le roi des facultés humaines. […] Il est inhérent à la nature humaine.

702. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Sa religion devenait celle de la souffrance humaine. […] Nous ne formons pas dans la nature un empire dans un empire et il n’y a pas de « règne humain ». […] Existe-t-il un Règne humain ? […] Elle n’est pas humaine, si quelques heures lui suffisent pour anéantir des années ou des siècles de travail humain accumulé. […] Bizarrerie des choses humaines !

703. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Il aimait et pratiquait la vertu, mais une vertu humaine, accessible et simple. […] Taine cherche dans l’histoire les types les plus parfaits des diverses variétés de l’animal humain. […] La religion reçue ainsi, sans intermédiaire humain, fut très forte en moi. […] « La tradition humaine est fixée là-dessus. […] Rome est comme les grandes œuvres de l’esprit humain ; l’impression qu’elle produit est très complexe.

704. (1905) Promenades philosophiques. Première série

Historiquement, on ne constate aucune évolution du cerveau humain. […] Joyau considère le temps est plus humaine. […] Quel est le but de l’activité humaine ? […] Il serait parti de l’instinct de reproduction, cause de toutes les activités humaines. […] Il ne croit pas aux catégories selon lesquelles nous classons les actions humaines.

705. (1903) Le problème de l’avenir latin

Quoi de plus naturel et de plus humain que ce reproche ? […] Tout acte humain est fondé sur la chair. […] C’est dans les assises physiques de l’être que gît la mystérieuse raison des victoires humaines. […] Pourquoi, lorsqu’il s’agit d’êtres humains, la même logique n’est-elle pas observée ? […] Hod est comme la capitale de l’agonie humaine.‌

706. (1898) La cité antique

C’est vraiment le Dieu de la nature humaine. […] Ils ne se présentaient pas comme étant les dieux du genre humain. […] Tous ces dieux prenaient souvent la forme humaine et se montraient aux mortels. […] Elle est humaine, et nous la croyons dieu. […] En elles ils ne voyaient pas une œuvre humaine.

707. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 2-5

On seroit d’abord tenté de croire que sa réputation est plutôt l’effet du caprice de l’esprit humain, que celui d’un mérite réel. […] Et pour cela, il faut en revenir à la nature du cœur humain : la gaieté le captive, la malignité a toujours su lui plaire, & la licence n’est pas toujours propre à le révolter, parce qu’elle flatte en quelque maniere un fond de corruption qui en est inséparable.

708. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

Ce gain se manifeste, aussitôt, pour toute âme humaine, dans le caractère spécial donné par Beethoven à la forme essentielle de toute musique : la Mélodie. À la mélodie, il regagne la plus haute simplicité naturelle ; il lui rend la source où, en toute époque et toute tentative, elle se pourra renouveler et approcher au type de l’expression humaine le plus pur et le plus riche. […] Les voix y jouent le rôle d’instruments humains, le texte sert, seulement, à revêtir les morceaux d’un caractère religieux plus défini. […] Un troisième complément était prévu : Sur le féminin dans l’être humain, auquel Wagner travaillait encore au moment de sa mort. […] La recherche du « purement humain » est une notion essentielle dans les textes en prose de Wagner.

709. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

Là même où il a son cours rigide et son flot impérieux, il y roule des trésors d’éternelle morale humaine. […] On eût dit qu’il respectait d’avance lui-même l’autorité future de son nom, de son ministère, et qu’il ne voulait pas qu’il y eût une tache humaine à essuyer sur l’homme de Dieu quand il entrerait de plain-pied du siècle dans le tabernacle. […] Il montre ce Sauveur qui cherche avant tout la misère et la compassion, évitant de prendre la nature angélique qui l’en eût dispensé, sautant par-dessus en quelque sorte, et s’attachant à poursuivre, à appréhender la misérable nature humaine, précisément parce qu’elle est misérable, s’y attachant et courant après quoiqu’elle s’enfuît de lui, quoiqu’elle répugnât à être revêtue par lui ; voulant pour lui-même une vraie chair, un vrai sang humain, avec les qualités et les faiblesses du nôtre, et cela par quelle raison ? […] Bien qu’en tout ceci Bossuet ne fasse qu’user des termes de l’Apôtre, et peut-être de ceux de Chrysostome, il s’en sert avec une délectation, un luxe, un goût de redoublement qui déclare la vive jeunesse : Il a, dit l’apôtre, appréhendé la nature humaine ; elle s’enfuyait, elle ne voulait point du Sauveur ; qu’a-t-il fait ?

710. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La Divine Comédie de Dante. traduite par M. Mesnard, premier vice-président du Sénat et président à la Cour de cassation. » pp. 198-214

Ozanam, doué d’enthousiasme, et les yeux dirigés vers un soleil qui l’éclairait plus vivement sur quelques points, et qui l’éblouissait peut-être sur quelques autres, a porté l’admiration plus loin qu’il n’est donné à de moins ardents de la concevoir et de la soutenir pour ces formes si compliquées de l’esprit humain au Moyen Âge : il a du moins rassemblé tout ce qui peut aider à faire mieux comprendre le monument poétique dans l’explication duquel il a gravé son nom. […] Dans une langue qui ne savait guère encore, comme il le dit, que bégayer papa et maman, il trouva moyen d’exprimer le fond de l’univers et la cime des subtilités divines. — Pour nous il a fait plus : il a fait entrer dans le langage du genre humain nombre de ces paroles décisives qui marquent les grands moments de la vie et de la destinée, ou qui fixent la note inimitable de la passion, et qui se répéteront telles qu’il les a dites, tant qu’il y aura des hommes. […] De sorte que si Dante avait écrit lui-même le commentaire de son grand poème, comme il l’a fait pour d’autres de ses poèmes moindres, il aurait pu soutenir doublement qu’en effet Béatrix était bien la Béatrix qu’il avait aimée, la fille de Folco de’ Portinari de Florence, et qu’elle n’en était pas moins aussi, en définitive, la Théologie sublime, revêtue de rayons, et dirigeant l’œil humain, qui la considère et qui l’étudie, vers les plus hautes vérités. Mais nous autres que la philosophie du Moyen Âge intéresse moins que ce qui y perce d’imagination gracieuse et d’éternelle sensibilité humaine, ce sera toujours à un point de vue plus réel et plus ému que nous nous plairons, au milieu de toutes les difficultés et des énigmes du voyage, à noter des endroits comme ceux-ci, où le poète, guidé par Béatrix dans les cercles du ciel, et approchant de la dernière béatitude, se montre ingénument suspendu à son regard, et nous la montre, elle, dans l’attitude de la vigilance et de la plus tendre maternité : Comme l’oiseau, au-dedans de son feuillage chéri, posé sur le nid de ses doux nouveau-nés, la nuit, quand toutes choses se dérobent ; qui, pour voir l’aspect des lieux désirés, et pour trouver la nourriture qu’il y va chercher pour les siens et qui le paiera de toutes ses peines, prévient le moment sur la branche entr’ouverte, et d’une ardente affection attend le soleil, regardant fixement jusqu’à ce que l’aube paraisse : ainsi ma dame se tenait droite et attentive, tournée vers l’horizon, etc., etc. […] Toutefois c’est encore dans les exemplaires grecs et latins, ou dans les productions chrétiennes appartenant à des âges plus doux, qu’on retrouve le genre de beautés le plus direct, le plus naturel et, pour nous, le plus aisé à sentir, le plus exempt de toutes les ligatures et de tous les emboîtements pédantesques qui, en le reconstituant, ont déformé à de certains siècles et mis à la gêne l’esprit humain.

711. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — II » pp. 231-245

Rousseau, dans le récit qui nous occupe, s’est attaché à montrer, durant une belle nuit d’été, le premier homme qui s’avisa de philosopher et de réfléchir, et il a prêté à cette philosophie naissante tout le charme, au contraire, de l’admiration et de la foi, toute l’ivresse d’un premier ravissement : Ce fut durant une belle nuit d’été que le premier homme qui tenta de philosopher, livré à une profonde et délicieuse rêverie et guidé par cet enthousiasme involontaire qui transporte quelquefois l’âme hors de sa demeure et lui fait, pour ainsi dire, embrasser tout l’univers, osa élever ses réflexions jusqu’au sanctuaire de la nature et pénétrer, par la pensée, aussi loin qu’il est permis à la sagesse humaine d’atteindre. […] Il essaye, pour y répondre, d’hypothèses diverses : l’arrangement fortuit, la nécessité du mouvement de la matière, l’infinité de combinaisons possibles dont une a réussi… Il hésitait, il commençait à se troubler : placé entre des explications incomplètes et des objections sans réplique, il allait, s’il n’y prenait garde, trop accorder à la raison, au raisonnement ; il sentait poindre l’orgueil en même temps que s’accroître les obscurités, quand tout à coup… mais laissons-le parler lui-même sa plus belle langue : Quand tout à coup un rayon de lumière vint frapper son esprit et lui dévoiler ces sublimes vérités qu’il n’appartient pas à l’homme de connaître par lui-même et que la raison humaine sert à confirmer sans servir à les découvrir. […] C’est dans ce songe qu’il va voir figurer les religions diverses, depuis les plus grossières jusqu’à la plus pure, depuis les formes les plus brutales du naturalisme et de la sensualité jusqu’à la révélation de la parole la plus simple, la plus divine, la plus humaine, celle du sermon sur la montagne. […] A-t-il voulu simplement marquer que la nature humaine et l’esprit humain ne comportent la première manière de voir que chez un petit nombre d’individus, et que l’histoire n’admet point le triomphe de la philosophie pure ?

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