Il prouve tout ce qu’il dit, avec une force et une autorité étonnantes. […] Toute la substance de la théorie, toute la force de la preuve y est contenue. […] Le mathématicien peut aisément démontrer qu’une certaine force, appliquée au moyen d’un certain levier ou d’un certain système de poulies, suffira pour élever un certain poids. […] Ici, comme ailleurs, il est encore orateur et moraliste ; aucun moyen n’a plus de force pour intéresser un lecteur anglais. […] Il n’est pas véritablement philosophe : la médiocrité de ses premiers chapitres sur l’ancienne histoire d’Angleterre le prouve assez ; mais sa force de raisonnement, ses habitudes de classification et d’ordre mettent l’unité dans son histoire.
Tel Saxon libre et propriétaire est devenu « serf de corps sur la glèbe de son propre champ96. » Telle Saxonne noble et riche sent peser sur ses épaules la main d’un valet normand devenu par force son mari ou son amant. […] Ils s’y attachent comme nos vieux érudits aux vers latins ; ils se francisent comme ceux-ci se latinisaient, de force, et avec une sorte de crainte, sachant bien qu’ils ne sont que des écoliers et des provinciaux. […] Un jour, sortant de maladie, sous les murs de Saint-Jean-d’Acre, il veut à toute force manger du porc. […] Même les dures et roides ligatures dans lesquelles le conquérant l’a serrée, ajoutent dorénavant à sa fixité et à sa force. […] Ils font le corps de la nation, le corps laborieux, courageux, qui fournit la force.
Il ne laisse pas parler les objets, il les force à lui répondre. […] Il les monte au ton de son âme, et les force à répéter ses propres cris. […] Il n’y a que les événements qui mettent à l’épreuve la force et le ressort de l’âme ; il n’y a que les actions qui manifestent et mesurent cette force et ce ressort. […] Le dernier jour est venu, et six pouces de fer ont eu raison de toute cette force et de toute cette furie. […] I shall not fall back, though I don’t think them in force and heart sufficient to make much of it.
Cette femme à tout prendre n’est pas celle à qui nous pouvons désormais nous attacher ; elle a de la grâce, d’accord ; mais elle ne possède ni vertu, ni force. […] Rien n’y paraît achevé ou réussi suivant les forces du poète ; on attend toujours quelque chose. […] Beauté, jeunesse, force, santé, voilà pour son corps ; fermeté, courage, bonté, humeur magnanime, c’est la part de son âme. […] Janin se disait critique à toute force ; on voulait le prendre pour tel. […] Il traduit, par exemple, une phrase, un vers, un distique, et vous avertit qu’il force la nuance ; mais qu’est-ce que forcer la nuance, sinon écrire ce qui n’est pas ?
Une abnégation de cette force, si elle existe, n’est possible que par la vertu d’une religion nouvelle, le culte de l’humanité. […] Je ne sais vraiment si l’honneur d’être infligé en pensum à des écoliers ne réalise pas, pour une œuvre littéraire, l’idée de l’immortalité dans sa plus grande force. […] En règle générale, il vaut mille fois mieux s’être élancé dans l’immortalité de toute la force et de toute la vitesse acquises, tant qu’on vivait, par une carrière ininterrompue de luttes et de victoires. […] Personne n’a mis en un plus éclatant relief que l’auteur des Héros le rôle principal des individus dans l’histoire, la souveraine grandeur du génie, la force et la puissance de la volonté libre. […] Le talent a la force de créer ce qui dépasse la faculté de production, mais non la faculté de perception des autres hommes ; aussi trouve-t-il dès le premier moment des gens pour l’apprécier.
Quand Alexandre les réunit de force pour conquérir l’Asie, les Lacédémoniens manquent à l’appel. […] Ajoutez à cet air de force l’air d’aisance et d’élégance ; l’édifice grec ne songe pas seulement à durer comme l’édifice égyptien. […] Selon les Grecs, le plus agréable spectacle que l’on pût donner aux dieux était celui que présentent de beaux corps florissants, développés dans toutes les attitudes qui montrent la force et la santé. […] La sagesse nouvelle ne détruisait pas la religion ; elle l’interprétait, elle la ramenait à son fonds, au sentiment poétique des forces naturelles. […] Pour avoir le sentiment du divin, il faut être capable de démêler, à travers la forme précise du dieu légendaire, les grandes forces permanentes et générales dont il est issu.
M. de Bonald dit à ce sujet : « Les publicistes modernes veulent que la société soit volontaire et le produit d’un contrat, et la société est obligée et le résultat d’une force, soit de la force de la persuasion, soit de la force des armes, car Orphée était un conquérant comme Alexandre. […] Mais, quand une société ne trouve point en elle-même la force de sortir du désordre où elle est tombée, qu’arrive-t-il ? […] C’est ainsi que, sous l’empire, qui était le règne de la force, plus maîtresse d’elle-même que la force révolutionnaire, d’une force organisée, mais cependant de la force physique encore, on remontait peu à peu, dans les hautes sphères philosophiques, la pente d’un sensualisme qui s’épurait. […] C’est l’impuissance de la force pour organiser quelque chose. […] Calcul et force, chiffre et sabre, tout est là.
Dans ses Controverses contre le Ministre Claude, on admire une dialectique profonde, une méthode lumineuse, un enchaînement de preuves, une variété d’images, une force d’expression, qui captivent l’esprit & l’attachent agréablement. […] Nous le répéterons encore, il est fâcheux que la force, la chaleur & l’énergie du style de cet Homme célebre aient été consacrés à soutenir des rivalités, dont il ne tenoit qu’à lui de se défendre.
Les desseins des rois, les abominations des cités, les voies iniques et détournées de la politique, le remuement des cœurs par le fil secret des passions, ces inquiétudes qui saisissent parfois les peuples, ces transmutations de puissance du roi au sujet, du noble au plébéien, du riche au pauvre : tous ces ressorts resteront inexplicables pour vous, si vous n’avez, pour ainsi dire, assisté au conseil du Très-Haut, avec ces divers esprits de force, de prudence, de faiblesse et d’erreur, qu’il envoie aux nations qu’il veut ou sauver ou perdre. […] L’esprit de Dieu s’étant retiré du milieu du peuple, il ne resta de force que dans la tache originelle qui reprit son empire, comme au jour de Caïn et de sa race.
Un tel parasitisme intellectuel me paraît immoral, parce que chaque individu a le devoir de consacrer ses forces au service de l’ensemble. […] C’est que tous ces gens sont ce qu’ils sont de par une force étrangère, sur laquelle ils ne peuvent rien, qui les gouverne et les dirige. […] Mais c’est une force énorme que de vouloir quelque chose et de savoir ce qu’on veut : M. […] pour tomber au port, car sa flamme intérieure, n’ayant d’autre aliment qu’elle-même, la consume, son héroïsme est une force perdue. […] La littérature n’est plus une profession qu’on exerce avec plus pu moins de succès, elle est une mission qu’on remplit selon ses forces.
C’est ce mystère de la faveur divine que les philosophes expliquent par l’opposition entre les forces spontanées et les forces réfléchies de l’âme. Grâce à cette pitié divine, l’homme est donc visité par des forces qui lui sont inconnues et qui agissent en lui sans son concours. […] Par quel art a-t-il dompté toutes ces forces intellectuelles, de manière à en faire les serviteurs dociles de son esprit ? […] Voilà l’aimable grisette devenue classique par la force de son désir ! […] Quelle force il a pour souffrir !
Vous sentez-vous de force à nous amuser ? […] Il se peut que le ministère, en me frappant, ait rempli par force un devoir administratif. […] Je prouverai que le nombre et la force sont des signes moins trompeurs que vos faibles lumières, des guides plus sûrs que l’intelligence. […] Il n’existe vraiment pas comme force initiale ; il résiste, et il suit. […] La force intérieure de la vérité n’est point ce qui la constitue.
Ces forces étaient contraires. […] C’est que Louis XI avait en lui le trait distinctif où se reconnaît la force de l’intelligence. […] Cette force était donc pour Calvin une faiblesse, en raison même de sa force, et augmentait les difficultés en s’accroissant. […] Dieu seul est une force. […] Il se combattrait ; donc il serait deux forces contraires.
Mais il est encore moins facile de traiter avec les puissances spirituelles qu’avec les puissances temporelles, car les batailles gagnées n’y suffisent pas, et c’est l’honneur de la pensée humaine de ne pouvoir être vaincue que par la force accompagnée de la persuasion. C’est ce difficile travail de la persuasion jointe à la force que le vainqueur de Rivoli et de Marengo avait entrepris auprès de l’Église romaine pour la réconcilier avec la République française. […] Qu’est-ce que cette déclaration de la nécessité de maintenir par la force des gouvernements l’unité des religions établies ? […] il conclut contre la cause monarchique qu’il vient d’exposer avec tant de force ; il s’arrête entre les deux partis, c’est-à-dire dans l’impossible ; il prend la moitié des deux vérités, c’est-à-dire un mensonge ; il emprunte à la république le pouvoir absolu et à la monarchie le pouvoir temporaire, et il établit comme préférable à la république ou à la monarchie, quoi ? […] “Ce sont là, lui dit-il, les palais que Votre Majesté me force d’habiter depuis trois mois. — Ce séjour vous réussit assez, lui répliqua le monarque autrichien, pour que vous n’ayez pas le droit de m’en vouloir.”
Ce contraste criant est une preuve tragique de la force de pénétration qu’ont les notions et les sentiments enfoncés dans la molle argile des âmes adolescentes. […] Une lutte nécessaire s’établit entre deux forces, l’une intérieure qui tend à la maintenir dans ses opinions et ses habitudes, l’autre extérieure qui tend à la mettre en harmonie avec les changements opérés autour d’elle. […] Notre siècle nous montre les mêmes efforts passionnés contre les inventeurs de formes ou de pensées nouvelles, les mêmes soumissions tardives à la force des choses. […] Très vive est la lutte entre les deux forces opposées. […] Le progrès littéraire est la résultante du combat qui se livre entre les forces contraires.
Ce premier élément de la force, l’intensité, a donc sa racine dans la vie même et dans l’appétit, dont il est un caractère essentiel. […] Mais, ceci étant admis (et il faut l’admettre par force), nous n’avons plus besoin du cadre à priori. […] C’est la force de conservation qui se concentre et se dispose avant de s’exercer et de se répandre par le mouvement. […] C’est en ce sens que l’idée d’espace est une idée-force, l’espace étant le milieu même des forces en mutuelle action et réaction. […] L’onde réflexe retourne ainsi vers son point de départ, à la périphérie de l’organe externe, qui est en relation immédiate avec les forces excitatrices.
Douloureuse, malgré l’auréole, malgré la souveraine rigidité de l’attitude, malgré le sourire de la force consciente, qui se joue sous ses moustaches de tigre, malgré la pénétration suraiguë de ce regard félin que rien au monde ne fit baisser. […] Nous en avions de fatalistes, et ce sont même les plus communes, dans lesquelles l’innocentation des crimes et des criminels était admise en vertu de l’irrésistible force des choses et d’une négation, en hypocrite sourdine, de la liberté morale et de la divine Providence. […] Même l’adoration de la Nature et de ses forces est encore trop pour M. […] Ainsi encore, après Théroigne de Méricourt, une figure moins terrible, une sainte plus douce, Mme Kéralio, Mme Robert, une fille noble, mal mariée, devenue ambitieuse et tombée à force d’abjection et de folie dans le mépris de Mme Roland et si bas que M. […] Peintes par un homme de talent, qui sans être austère, aurait eu le chaste pinceau de la force, quelle galerie magnifique elles auraient formée devant le petit Panthéon de terre cuite de M.
Delacroix n’est pas encore de l’Académie, mais il en fait partie moralement ; dès longtemps il a tout dit, dit tout ce qu’il faut pour être le premier — c’est convenu ; — il ne lui reste plus — prodigieux tour de force d’un génie sans cesse en quête du neuf — qu’à progresser dans la voie du bien — où il a toujours marché. […] Cette couleur est d’une science incomparable, il n’y a pas une seule faute, — et, néanmoins, ce ne sont que tours de force — tours de forces invisibles à l’œil inattentif, car l’harmonie est sourde et profonde ; la couleur, loin de perdre son originalité cruelle dans cette science nouvelle et plus complète, est toujours sanguinaire et terrible. — Cette pondération du vert et du rouge plaît à notre âme. […] Ce portrait dénote un coloriste de première force. […] — Il serait bon d’en finir tout de suite. — On veut à toute force nous présenter M. […] Nous ne savons comment louer sa statue — elle est incomparablement habile — elle est jolie sous tous les aspects — on pourrait sans doute en retrouver quelques parties au Musée des Antiques ; car c’est un mélange prodigieux de dissimulations. — L’ancien Pradier vit encore sous cette peau nouvelle, pour donner un charme exquis à cette figure ; — c’est là certainement un noble tour de force ; mais la nymphe de M.
La fermeté et la persuasion agirent et obtinrent de sa part ce qu’en de semblables tumultes scolaires il est toujours excessif et odieux de demander à la force. […] Or, comme la chaleur est la source du mouvement, il est naturel que le cœur et les artères battent avec plus de force que dans l’état normal. […] Je maintiens de toute la force de la conscience scientifique que, dans l’enseignement de la physiologie comme des autres sciences, les faits résultant de l’observation et de l’expérience doivent être acceptés, quels qu’ils soient : les déductions dernières à en tirer appartiennent ensuite à chacun. […] Sire, Sire, m’écrierai-je, (et je voudrais que ma voix qui n’est que l’écho de milliers de voix eût assez de force pour être entendue), Sire, redoublez de fermeté dans voire sagesse : tenez bon, Sire ; tenez toujours en respect et à distance ces périlleux alliés, impérieux et intéressés, qui ont été de tout temps, pour qui les a écoutés, des conseillers de malheur. […] Je n’examine point si cela est bon ou mauvais pour le résultat, pour le fond des choses, pour la force et l’intégrité des études ; mais enfin, en Belgique, l’ascendant que le clergé catholique possède en certaines provinces est contrebalancé par l’esprit d’autres provinces voisines.
Parce que nous les acceptons de confiance, elles n’en sont pas moins saintes, et elles n’en deviennent que plus saintes lorsque, soumises à l’examen et suivies à travers l’histoire, elles se révèlent à nous comme la force secrète qui, d’un troupeau de brutes, a fait une société d’hommes En général, plus un usage est universel et ancien, plus il est fondé sur des motifs profonds, motifs de physiologie, d’hygiène, de prévoyance sociale. […] D’autre part, on essayerait en vain de l’arracher ; les mains qui se porteraient sur elle n’atteindraient que son enveloppe ; elle repousserait après une opération sanglante ; son germe est trop profond pour qu’on puisse l’extirper. — Si enfin, après la religion et la coutume, nous envisageons l’État, c’est-à-dire le pouvoir armé qui a la force physique en même temps que l’autorité morale, nous lui trouvons une source presque aussi noble. […] Pour entrer dans la pratique, pour prendre le gouvernement des âmes, pour se transformer en un ressort d’action, il faut qu’elle se dépose dans les esprits à l’état de croyance faite, d’habitude prise, d’inclination établie, de tradition domestique, et que, des hauteurs agitées de l’intelligence, elle descende et s’incruste dans les bas-fonds immobiles de la volonté ; alors seulement elle fait partie du caractère et devient une force sociale. […] Ouvrons la prison où le préjugé les enferme ; donnons-leur l’espace et l’air libre ; qu’ils se déploient dans toute leur force, et tout sera bien. […] Mais « un pistolet aux mains d’un brigand est aussi une puissance » ; direz-vous qu’en conscience je suis obligé de lui donner ma bourse Je n’obéis que par force, et je lui reprendrai ma bourse sitôt que je pourrai lui prendre son pistolet.
Loin d’absoudre la France des excès de la révolution, il la force de s’en déclarer responsable ; et comme le confesseur qui presse le condamné, jusque sous le couteau, d’avouer et de se repentir, l’inexorable vengeur de la justice éternelle demande, jusque sur la charrette, une confession au malheureux qu’on mène à l’échafaud. […] Il n’est aucune iniquité individuelle qui ne les affecte grièvement, aucun mauvais exemple qui ne grossisse cette force destructive qui les ébranle ou les renverse. […] La pensée ne s’y joue pas autour du cœur ; elle veut y entrer de force, et il semble qu’elle y entre par les sens. […] Arrivé au terme de cette trop rapide revue, la gloire de mon temps m’attire vers d’autres côtés, et je me sens pris d’un dernier doute sur le mérite d’un plan qui me force d’omettre tout ce qui n’est pas de pure littérature. […] Là est la force du génie français, et la valeur de chaque esprit sera toujours proportionnée à la part qu’il aura reçue de la nourriture commune147.
A force d’être embellie et efféminée, elle peut être faussée. […] Faut-il énumérer les forces de la nature qui sont alors asservies, disciplinées, utilisées par le génie humain ? […] Mots qui à force d’être savants deviennent barbares et sont en certains cas de vrais monstres ; tel le mot potassium, qui, semi-germanique et semi-romain, ressemble aux fabuleux centaures ; tel le mot centimètre, qui est le résultat d’un alliage imprévu entre Rome et la Grèce ; tels les mots kilomètre et myriamètre, enfants mal venus, estropiés en naissant par des accoucheurs maladroits. […] Et en effet, j’admets volontiers que les mythes d’autrefois ont eu leur raison d’être, leur grandeur et leur grâce ; que les dieux et les déesses de l’Olympe, les fées et les lutins des légendes populaires, les anges et les démons de la religion chrétienne ont pu être, aux yeux de nombreuses générations, de commodes incarnations des forces inconnues qui agissent autour de nous et sur nous. […] Les enfants prêtent la vie à tout ce qui les entoure ; ils se figurent comme des êtres bienfaisants ou malfaisants ces forces invisibles dont ils sentent les effets ; ils injurient le feu qui ne veut pas brûler ; ils se mettent en colère contre la porte qui s’obstine à ne pas s’ouvrir.
On en peut dire presque autant de la doctrine moderne d’une force vitale ou de forces vitales ; ce n’est aussi qu’une abstraction réalisée243, un terme qui sert à voiler notre ignorance. […] La vie d’un animal d’organisation supérieure est la somme des activités de toutes les forces en jeu, et sa complexité est en proportion de la complexité de l’organisme. […] C’est qu’il y a une vie de chaque partie, et une vie de l’organisme entier ; chaque cellule microscopique a son existence indépendante, fournit sa carriéré de la naissance à la mort, et la totalité de ces vies forme ce que nous appelons la vie de l’animal : l’unité est un agrégat de forces et non une force supérieure. […] Tout ce que le physiologiste peut faire, c’est d’indiquer les rapports de cette forme de la conscience, avec les forces intérieures et les parties du système nerveux qui lui servent d’organes. […] De même pour l’identité de la matière et de la force.
Il descendoit souvent des sujets les plus sublimes aux moins sérieux ; et il se sçavoit sans doute aussi bon gré de la grace qu’il donnoit aux uns, que de la force qu’il donnoit aux autres. […] Un poëte n’auroit plus qu’à exprimer avec force toutes les pensées qui lui viendroient successivement et au hazard : il se tiendroit dispensé d’en examiner le rapport, et de se faire un plan dont toutes les parties se prêtassent mutuellement des beautés. […] C’est même quelquefois la briéveté qui fait la plus grande force des traits qui passent pour merveilleux ; et il ne faut au contraire qu’un mot superflu pour énerver la pensée la plus vive, et la dégrader du sublime. […] Les epithétes dans les poëtes médiocres contribuent beaucoup à cette lâcheté de style ; comme elles sont aux bons auteurs un moyen de force et de précision. […] Ils regardent ceux qui portent ce jugement comme idolâtres d’eux-mêmes, et s’attribuant, au mépris des anciens, une force de raison et une supériorité de génie, qu’ils n’avoient pas.
Il a débuté par des bégaiements dont je me suis un peu moqué (La Confession de Claude), mais la voix, qui manquait de justesse et de force, lui est venue. […] , d’un vertige continu de nausée et d’une force terrible d’asphyxie. […] Zola, cet homme de mots, cet écrivain d’un temps de trissotinisme et de décadence, n’en est pas moins — comme tous les amollis et les ramollis de son temps — l’ennemi de toutes les forces qui le gênent. Et quelle force plus grande que le catholicisme a jamais gêné davantage la lâcheté des hommes, qui voudraient vivre animalement au courant de leurs sensations ? […] Son livre semble n’avoir pour but que de peindre la nature et d’exalter les forces physiques de la vie.
Dans l’intervalle, elle reprenait peu à peu confiance dans sa force morale, et croyance dans sa propre éternité. […] Ces ingénieux écrits n’eurent qu’un demi-succès, parce qu’ils ne rentraient dans aucune des écoles régnantes et qu’ils n’étaient pas de force à en fonder une ; avec du vague dans l’ensemble, ils renferment bien de précieux détails, de fines observations sur les âges, sur les passions, sur la conversation, sur l’ennui, sur le bonheur…, et ils tendent en général à faire valoir le sentiment, trop sacrifié par les idéologues. […] La force de ce gouvernement reposant sur d’antiques opinions, l’immobilité semble faire partie de sa dignité même. […] Fondé uniquement sur la force, il ne ramena point ce qui pouvait blesser l’égalité nouvellement acquise. […] Plus que je n’ai maintenant d’années : quatre-vingt-dix. » La tâche d’écrire tant de notices, et puis de les lier dans la trame d’une narration personnelle, était évidemment au-dessus des forces d’un octogénaire : toutefois le cahier par lequel Bonstetten commença, le seul qu’il lui fut donné de publier, offre encore un grand intérêt.
M ignet, au contraire, se plaçant derrière la Révolution, tandis qu’elle tonnait comme le plus terrible des Gracques, faisait en quelque sorte l’office du joueur de flûte de l’antiquité : il la remettait au ton, il remettait au pas ce qui s’était fait tumultueusement, il en marquait la mesure au nom de la force supérieure et de l’idée philosophique. […] Ainsi déjà l’avait conçu De Maistre, lorsqu’au début de ses Considérations il disait : « Ce qu’il y a de plus frappant dans la Révolution française, c’est cette force entraînante qui courbe tous les obstacles. Son tourbillon emporte comme une paille légère tout ce que la force humaine a su lui opposer ; personne n’a contrarié sa marche impunément. La pureté des motifs a pu illustrer l’obstacle, mais c’est tout ; et cette force jalouse, marchant invariablement à son but, rejette également Charette, Dumouriez et Drouet. » Nous aimerions mieux citer d’autres noms ; mais peu importe, l’idée est la même. […] Il y régla donc son récit et ses jugements ; il fit saillir la force principale et en dégagea fermement les résultats.
Voilà ce qui arrive toujours aux gens douillets ; ils sont comme les menteurs : à force d’avoir abusé de la crédulité des autres, ils perdent le droit d’être crus quand ils devraient réellement l’être. […] Quelque désir qu’eût Lemonnier de faire revenir le roi à Versailles, il n’avait pas la force de s’opposer à la volonté de Mme Dubarry. […] Le caractère brusque et décidé de La Martinière lui donnait cette force. […] Cependant la fièvre se soutint dans la nuit avec assez de force, il y eut même de l’augmentation ; les douleurs de tête devinrent plus fortes, et nous apprîmes à huit heures du matin qu’on allait saigner le roi. […] C’est une espèce de fou qui ne manque pas d’esprit, à qui les caresses de Mme Dubarry et la confiance du roi dans cet horrible rapport avaient tourné la tête, qui se croyait un personnage, un homme à crédit, que cette idée disposait à tout faire pour l’avantage de cet indigne fripon, mais qui au moins était capable de mettre plus de force et plus d’intrépidité dans ses infamies ; homme d’ailleurs d’une crapule indécente, d’une déraison choquante et d’une insolence brutale.
II En dehors de ces États mal assis, Rome, enrichie par ses alliances pontificales et fortifiée par ses alliances temporelles, tenait d’une main habile la balance de la politique italienne ; elle croissait en force et en ascendant sur le monde. […] Leur architecture dite cyclopéenne, où la main de l’homme conserve dans ses ouvrages l’empreinte monumentale et divine de la force des temps et de la rusticité de la nature, l’élégance dorienne de leurs ruines de temples, le dessin inexpliqué de leurs vases, plus grecs que la Grèce elle-même, et aussi naïfs que l’âge primitif de l’homme, tout cela atteste qu’une science inconnue de l’humanité civilisée a coulé aux bords de l’Arno des rochers de la Toscane. […] IV Les Romains les entraînèrent aisément dans leur courant de force et de gloire. […] Il appuie son opinion par une telle variété d’exemples, qu’il est aisé d’apercevoir que, bien que le but de Landino, sous le nom d’Alberti, fût d’établir les purs dogmes du platonisme, c’est-à-dire que la contemplation abstraite de la vérité constitue seule l’essence du vrai bonheur, Laurent avait élevé des objections auxquelles l’ingénuité du philosophe, dans la suite de l’entretien, n’ôte presque rien de leur force. […] On peut juger, d’après le récit qu’il a fait de l’origine de sa passion, que Lucretia était la maîtresse du poëte, et non de l’homme : il cherchait un objet propre à fixer ses idées, à leur donner la force et l’effet nécessaires à la perfection de ses productions poétiques, et il trouva dans Lucretia un sujet convenable à ses vues, et digne de ses louanges ; mais il s’arrêta à ce degré de réalité, et laissa à son imagination le soin d’embellir et d’orner l’idole à son gré.
A la mort qui tend sans cesse à l’éteindre, elle oppose la génération qui tend sans cesse à l’accroître, et sa perpétuité se fonde sur l’équilibre des deux forces en conflit. […] La Nature n’a pas fait les rois : le roi est un homme comme les autres, ni plus grand ni plus fort ; bien au cou traire, Car sa force ne vaut deux pommes Contre la force d’un ribaut. […] Fatigués de la barbarie primitive, où la lutte de tous contre tous est l’état naturel, où chacun ne prend et ne garde que selon sa force actuelle, les hommes ont constitué l’État, le pouvoir civil, gardien de la propriété et de la justice ; le roi n’est leur maître que pour leur service et leur sûreté : c’est le gendarme de Taine : Un grand vilain entre eux élurent Le plus ossu de tant qu’ils furent, Le plus corsu et le plus grand : Si le firent prince et seigneur. […] La raison ne distingue les individus que selon l’inégalité naturelle : la force physique, que notre penseur est loin de mépriser, mais surtout l’intelligence et la science, voilà ce qui élève les hommes et leur confère une dignité supérieure. […] Ce bouillonnement d’idées et de raisonnements qui se dégorgent incessamment pendant dix-huit mille vers, sans un arrêt, sans un repos, cette verve et cet éclat de style, net, incisif, efficace, souvent définitif, cette précision des démonstrations, des expositions les plus compliquées et subtiles, cette allégresse robuste avec laquelle le poète porte un énorme fardeau de faits et d’arguments, le mouvement qui, malgré d’inévitables langueurs, précipite en somme la masse confuse et féconde des éruditions scolastiques et des inventions hardiment originales, tout cela donne à l’œuvre un caractère de force un peu vulgaire, qui n’est pas sans beauté.
La dureté du gouvernement de Calvin rendit de la force et de l’audace au parti des libertins, et la lutte recommença entre eux et Calvin. […] Les émigrés faisant la principale force, et comme l’armée de Calvin, ils leur ôtèrent le droit de bourgeoisie et les désarmèrent. […] Il était le plus habile, le plus patient, et il avait affaire à un parti mal dirigé qui ne savait opposer à la force d’une croyance ardente et à la popularité d’une chose nouvelle que le souvenir de la licence des anciennes mœurs, ou le regret de prérogatives abolies. […] L’étude que Calvin avait faite des anciens et particulièrement de Cicéron, dont la méthode est si naturelle et si agréable, lui avait donné le secret de ce grand art d’approprier une matière à l’intelligence du lecteur, de la proportionner à son attention, de raisonner avec force, sans abuser de l’appareil du raisonnement. […] Cette force de logique lui donne des fumées au cerveau ; il s’en enivre, il en triomphe.
Une d’elles est régente ; une autre est presque reine de Paris insurgé ; une autre entre de vive force dans Orléans. […] Comment les femmes, à force d’être logées au ciel empyrée et transformées en divinités, n’auraient-elles pas été prises de vertige ? […] N’est-ce pas elle qui anime, excite, soutient son pâle amant, qui le force à tenir ses promesses, quand il est près de renoncer au complot où elle l’a jeté ? […] Il n’a point jusqu’ici tyrannisé les âmes ; Mais l’empire inhumain qu’exercent vos beautés Force jusqu’aux esprits et jusqu’aux volontés. […] L’antique sévérité, où il y avait à la fois de la rudesse et de la morgue, s’est quelque peu relâchée ; les parents sont devenus plus jaloux d’affection que de vénération ; en un mot, dans la famille comme dans la société, le principe d’autorité commence à perdre de sa force.