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473. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

La naissance de cet amour, ses progrès, ce souffle de tous les sentiments purs qui y conspirent, remplissent à souhait toute la première moitié : des scènes variées, des images gracieuses, expriment et figurent avec bonheur cette situation d’un amour orageux et dévorant à côté d’une amitié innocente et qui ignore. […] … » On le voit, Mme de Krüdner, en substituant ici son expérience à celle de Gustave, s’exprime déjà dans cette page avec le sérieux de ses prédications futures. […] On sut d’ailleurs un gré médiocre à Mme de Krüdner, dans le monde allemand poétique, d’avoir déserté sa langue pour la nôtre, et Goëthe a lui-même exprimé quelque part le regret qu’une femme de ce talent eût passé à la France. […] Vous n’êtes point captive dans les liens de la mort, comme tout ce qui n’a eu que le domaine du mal pour régner ou pour servir. » Et elle finit en montrant la Croix laissée dans ces lieux comme un autel magnifique qui doit tout rallier, et qui dira : « Ici fut adoré Jésus-Christ par le héros et l’armée chère à son cœur : ici les peuples de l’Aquilon demandèrent le bonheur de la France. » Ces pages expriment clairement en quel sens Mme de Krüdner concevait et conseillait la sainte-alliance ; mais ce qui était son rêve, ce qui fut un moment celui d’Alexandre, se déconcerta bientôt, et s’évanouit en présence des intérêts contraires et des ambitions positives, qui eurent bon marché de ces nobles chimères. […] Dans André Chénier, imitant quelque épigramme grecque, le seul sentiment exprimé est celui de la beauté superbe et des rivaux confus.

474. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Jouffroy »

Jouffroy a dit qu’il y a dans l’air qu’on respire quelque chose qui procure aux esprits l’étendue, ce n’est, je le crains, qu’un même fait diversement exprimé ; car cette étendue si précoce, cette intelligence ouverte et traversée, qui se laisse, faire et accueille tour à tour ou à la fois toutes choses, est l’inverse de la concentration nécessaire au génie, qui, si élargi qu’il soit, tient toujours de l’allure du glaive. […] Aussi je lui dirai à peu près comme Paul-Louis Courier disait de l’histoire : « Pourvu que ce soit exprimé à merveille, et qu’il y ait bien des vérités, de saines et précieuses observations de détail, il m’est égal à bord de quel système et à la suite de quelle méthode tout cela est embarqué. » Ce n’est donc pas le philosophe éclectique, le régulateur de la méthode des faits de conscience, le continuateur de Stewart et de Reid, celui qui, avec son modeste ami M.  […] Jouffroy sur les Lettres de Jacopo Ortis, inséré au Courrier Français en 1819, je trouve exprimé à nu, et avec une fermeté de style à la Salluste, ce sentiment d’opposition aux conquêtes et à la force militaire : « Un peuple ne doit tirer l’épée que pour défendre ou conquérir son indépendance. […] Jouffroy exprimait si énergiquement en 1819, il ne le sentait pas moins vivement en 1815, sous le coup d’une première invasion et à la menace d’une seconde. […] Jouffroy s’exprimait ainsi.

475. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre quatrième »

Voilà, si je ne me trompe, la première fois que la philosophie chrétienne, qui bégaye dans les poésies de Marguerite de Valois, et qui ne s’y peut dégager des obscurités de la théologie, s’exprime dans un langage clair, frappant et durable. […] Toutes les tendances de l’esprit français, tous les progrès que la poésie avait encore à faire, sont exprimés dans ce manifeste, excellent écrit où, malgré une certaine exagération de jeunesse, quelques contradictions, trop peu d’ordre, la langue est ferme, le tour vif et naturel les expressions durables, suscitées par les bonnes raisons. […] Nous ne pouvons imiter des anciens que les vérités générales, qu’on n’imite pas, mais que chaque grande nation exprime à son tour dans la langue de son pays. […] Le poëte de génie, celui qui a le don de voir d’une vue claire et d’exprimer en termes durables la vérité, se voit lui-même tout d’abord et tel qu’il est ; et, soit qu’il s’approuve ou se blâme, il ne tire que de lui-même l’opinion qu’il a de ses ouvrages. […] Ses vers si fort admirés, et ses préceptes si obéis, attirèrent les esprits à ces études fécondes où nous devions prendre le goût d’ouvrages plus parfaits que les siens ; cet enthousiasme, même mal exprimé, pour ce qui a fait depuis lors le fond de notre éducation intellectuelle, a de la vie.

476. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Appendices de, la deuxième édition »

« Si l’on se place en dehors de la théorie de la Relativité, il n’y a aucun inconvénient à s’exprimer comme tout le monde, à dire que Pierre et Paul existent en même temps comme êtres conscients, voire comme physiciens, l’un étant absolument immobile et l’autre absolument en mouvement. […] On reconnaîtrait que les formules de Lorentz expriment tout simplement ce que doivent être les mesures attribuées à S′ pour que le physicien en S voie le physicien imaginé par lui en S′ trouver la même vitesse que lui à la lumière. […] On ne saurait s’exprimer avec plus de précision. […] Il est vrai que le texte cité nous montre précisément l’impossibilité où l’on se trouve, dans la théorie de la Relativité, d’exprimer mathématiquement cette distinction. […] On voit à quel point le philosophe peut être induit en erreur par une manière de s’exprimer qui est devenue courante dans la théorie de la Relativité.

477. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

Je m’excuse de l’exprimer en termes aussi philosophiques. […] J’ai dit que Combray, la première partie de Swann, était l’endroit où ce besoin s’exprimait le plus nettement, le plus fortement. […] Il parle, c’est-à-dire qu’il s’exprime, c’est-à-dire qu’il se vide pour ainsi dire de lui-même. […] La nature humaine a été sollicitée par lui dans sa profondeur et amenée au grand jour, exprimée, fixée. […] À mesure que le livre avance, on trouve ces lois du cœur humain exprimées sous une forme de plus en plus abstraite, et même de plus en plus didactique.

478. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre III. La poésie romantique »

Il chanta, avec plus de force et de fougue qu’on n’aurait cru, les grandes idées démocratiques, la fraternité des peuples, le cosmopolitisme humanitaire, et c’est ainsi qu’aux premiers jours de 1848 il fut maître de la France : il en exprimait toutes les illusions naïvement généreuses, en laissant tomber sur les foules les consolantes idées dont il avait toujours vécu. […] Comme toutes ces formes narratives et dramatiques lui servaient à enfermer, à révéler son intime état de souffrance ou de volonté, ainsi ses poèmes, où il semblait devoir s’exprimer plus directement, ne sont lyriques aussi que par l’émotion subjective qui les a fait germer : ce sont des légendes mystiques, des contes épiques, des récits dramatiques. […] Il n’y a guère que deux ou trois pièces où il s’exprime sans l’aide d’une fiction. […] Affectant un certain mépris de la forme et de l’art, il posa que toute l’œuvre littéraire consiste à ouvrir son cœur, et pénétrer dans le cœur du lecteur : émouvoir en étant ému, voilà toute sa doctrine ; et si l’émotion est sincère, communicative, peu importe quelle forme l’exprime et la convoie. […] Il exprimait de son mieux les idées du bourgeois de son temps : de là son succès.

479. (1856) Cours familier de littérature. I « VIe entretien. Suite du poème et du drame de Sacountala » pp. 401-474

Ce tableau lui donne un vertige de tendresse qui s’exprime en vers incohérents mais délicieux. […] Dans les drames indiens, dit le philosophe que nous citons, le dialogue est en prose lorsqu’il exprime des pensées tempérées ; mais cette prose est si harmonieuse, si riche, si élégante, qu’elle pourrait servir de modèle à une belle expression poétique. […] Les animaux eux-mêmes, par leur attitude à l’aspect de ces enfants mystérieux, exprimaient leur étonnement et leur attrait. […] » On voit, à ces pittoresques descriptions de la nature opulente et majestueuse de l’Inde, des arbres, des ondes, des animaux, que le sentiment du paysage dans la poésie, et de la mélancolie dans l’âme, ne sont point, comme on le dit, des inventions récentes de notre poésie, mais que la plus haute antiquité sentait et exprimait avec la même force l’œuvre de Dieu et le cœur de l’homme. […] Toujours à ma mémoire se représentent tes charmes enfantins, ton visage frais comme le lotus, orné tour à tour de sourires ou de larmes, tes premiers efforts pour exprimer ta pensée par des paroles.

480. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Sur la reprise de Bérénice au Théâtre-Français »

Guillaume de Schlegel, dans laquelle il compare la Phèdre de Racine et celle d’Euripide ; il y exprime admirablement le genre de beauté de celle-ci, ce caractère chaste et sacré de l’Hippolyte, qu’il assimile avec grandeur au Méléagre et à l’Apollon antiques. […] Titus donc exprime en lui le caractère tragique, en ce sens qu’il soutient une lutte généreuse, qu’il sort du penchant tout naturel et vulgaire ; qu’il a le haut sentiment de la dignité souveraine et de ce qu’on doit à ce rang de maître des humains. […] S’il fallait exprimer l’ordre de structure employé ici, je dirais que c’est simplement une longue galerie en cinq appartements ou compartiments, et le tout revêtu de peintures et de tapisseries si attrayantes au regard, qu’on passe insensiblement de l’une à l’autre sans trop se rendre compte du chemin.

481. (1894) Propos de littérature « Chapitre III » pp. 50-68

L’immobilité de l’attitude, en niant toute idée de temps, garde à l’œuvre une grandeur qu’on peut alors sentir pérennelle et que certifie l’équation parfaite de la chose à exprimer avec le mode qui l’exprime. […] Vielé-Griffin sacrifie à l’expression directe plus souvent qu’il ne faudrait ; il ne s’abaisse pourtant jamais à copier la nature, mais il l’imagine à nouveau, je crois, et recrée tel détail qu’il exprime avec force et fidélité.

482. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Voici comment M. de Beaussel, dans son Histoire de Bossuet, s’exprime sur ce sujet113. […] Une lettre que madame de Maintenon écrit à Gobelin, de Versailles, sans date, mais qui est de peu de temps postérieure à son retour des eaux, exprime la tristesse qu’elle éprouvait alors. […]   L’année 1675 peut se résumer ainsi : Elle commence par la manifestation de la bienveillance royale, exprimée par le changement du nom de Scarron en celui de madame de Maintenon.

483. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Raphaël, pages de la vingtième année, par M. de Lamartine. » pp. 63-78

» Et, si épris, si enivré que fût son amant, il ne s’exprimait point encore alors comme il fait aujourd’hui : J’ouvrais les bras à l’air, au lac, à la lumière, comme si j’eusse voulu étreindre la nature et la remercier de s’être incarnée et animée pour moi dans un être qui rassemblait, à mes yeux, tous ses mystères, toute sa bonté, toute sa vie, tout son enivrement ! […] Dans aucun cas, elle ne saurait s’exprimer comme personne n’avait l’idée de s’exprimer à cette date.

484. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre troisième. L’appétition »

L’idée du saut, à la corde, restant une simple idée, ne fournit pas à l’activité qu’elle commence de quoi l’achever ; c’est ce qu’on exprime en disant qu’un désir veut être comblé, rempli, satisfait. […] James Ward, développant une hypothèse que Bain avait exprimée, puis finalement rejetée, considère les mouvements appétitifs et intentionnels comme une différenciation et une évolution des mouvements primitifs et immédiats d’expression. […] Ce qui est vrai, c’est que la notion abstraite et générale d’activité n’exprime point une faculté réelle et distincte de ses actes concrets, une entité métaphysique.

485. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre douzième. »

Cela pourrait être mieux exprimé. […] Ce vers, dont le tour est très-hardi, est fort beau pour exprimer la rapidité avec laquelle Louis XIV fit plusieurs conquêtes, celle de la Franche-Comté, par exemple ; le secret du roi avait été impénétrable jusqu’au moment où l’on se mit en campagne. […] Il ne songeait point à une vérité triste qu’un autre poète a, depuis La Fontaine, exprimée dans un vers très-heureux ; la voici : Quand on n’a que son cœur, il faut s’aller cacher.

486. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre premier. Considérations préliminaires » pp. 17-40

Considérations préliminaires Je ne prétends m’ériger ni en censeur des gouvernements, ni en précepteur des peuples ; ma tâche, est, en quelque sorte, celle d’un historien sans affection et sans haine, comme s’exprime Tacite : je laisse aux habiles un soin qui est au-dessus de mes forces, celui de tirer les conséquences et de déduire les préceptes pratiques. […] Ainsi ma manière de voir et de sentir n’aura d’autorité que la candeur et la simplicité avec lesquelles je tâcherai de m’exprimer. […] Je n’ignore point tout ce que les idées nouvelles présentent d’opposition au sentiment que je viens d’exprimer ; mais je sais aussi que nulle base de la société ne peut être enlevée sans danger : je sais que lorsqu’une de ces bases vient à manquer, la Providence se hâte toujours de la remplacer ; je sais enfin que ce qui a été, même lorsqu’il n’est plus, est encore la raison de l’existence pour ce qui est.

487. (1936) Réflexions sur la littérature « 6. Cristallisations » pp. 60-71

Cristallisations C’est une grande chose que de trouver, pour exprimer une idée ancienne, permanente, humaine, une image élégante et neuve. […] Ce livre n’a pas eu besoin d’être habillé de vert par Alcan pour exprimer une philosophie authentique et pour proposer sur l’éternel sujet des idées neuves et bien pesantes. […] " la cristallisation de Stendhal, dit-il, ne définit qu’un amour unilatéral : elle exprime ce qui se passe dans le moi d’un être songeant à rechercher un autre être, elle n’explique pas la réciprocité de cette recherche et c’est en quoi elle n’est pas complète.

488. (1855) Louis David, son école et son temps. Souvenirs pp. -447

Ils pensaient, et ils avaient raison, que l’idée dans les arts est bien plus dans la manière dont on la rend, dont on l’exprime, que dans l’idée elle-même. […] L’étonnement des élèves parut grand ; mais il ne fut exprimé que sur la physionomie de chacun, qui resta muet. […] je le répète, mon cœur le sent vivement, mais il m’est impossible de l’exprimer : mon art ne consiste pas en paroles, mon art est tout en action. […] Le lendemain de la mort de Marat, anniversaire du 14 juillet, une députation vint exprimer à la Convention les prétendus regrets du peuple. […] Un seul homme eut une idée contraire et le courage de l’exprimer : ce fut David.

489. (1902) La formation du style par l’assimilation des auteurs

Est-ce à dire qu’ils ne sentent pas ce qu’ils ne peuvent exprimer ? […] L’originalité réside dans la façon nouvelle d’exprimer des choses déjà dites. […] C’est la façon de les exprimer, de les développer qui constitue la valeur littéraire. […] C’est qu’on exprime par elle non pas le premier moment de la perception, mais le dernier. […] Ils croyaient dire quelque chose, et n’exprimaient que des formules.

490. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

Je n’ai pas à exprimer d’avis là-dessus. […] Ce n’est pas un poète dont les beautés soient communes ; elles ne vieillissent point, et ses formes hautaines n’ont cessé de séduire les esprits délicats. » C’est là l’opinion, très bien exprimée, d’un romantique de 1830, mais, il est vrai, d’un romantique normand126. […] J’aime mieux insister sur les parties de l’ode où il exprime des sentiments qu’il nous est permis et facile de partager. […] Quelle absurdité serait-ce qu’aux jugements que font les Cours souveraines de nos biens et de nos vies les avis fussent libres, et qu’ils ne le fussent pas en des ouvrages dont toute la recommandation est de s’exprimer avec quelque grâce, et tout le fruit de satisfaire à la curiosité de ceux qui n’ont rien de meilleur à s’entretenir ? […] Mais quand il vit que cette vilaine chose ne pouvait s’exprimer sans un hiatus, il révoqua sa permission.

491. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

Chacun d’eux exprime un des côtés de la vie humaine, qui chez beaucoup d’êtres humains peut devenir dominant, presque exclusif, et qui a le droit d’animer aussi plus ou moins exclusivement certaines œuvres d’art. […] Et le réel est loin d’être toujours entendu, contenu, exprimé surtout, dans un réalisme exagéré. […] Ce que la vérité semble alors perdre sur la forme, elle le regagne sur le fond, et, si la force des images peut être un peu altérée d’une part, elle est d’autre part augmentée par la croyance à l’idée qu’on lui fait exprimer. […] Vivre, c’est agir, c’est se traduire, s’exprimer, mettre en harmonie les organes intérieurs et extérieurs de soi. […] Le plaisir attaché à ce qui est historique a été poétiquement et exprimé par Th.

492. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre I. La Renaissance païenne. » pp. 239-403

Il est tiré éternellement et invinciblement par la même pensée, et les comparaisons qui semblent lointaines ne font qu’exprimer la présence incessante et la puissance souveraine de l’image dont il est obsédé. […] Ils ne sont point préoccupés, comme nous, de théories ; ils ne se travaillent point pour exprimer des idées philosophiques ou morales. […] Il retire l’épopée du terrain ordinaire, celui où, sous la main d’Homère et de Dante, elle exprime des croyances effectives et peint des héros nationaux. […] Comme Rubens, il crée de toutes pièces, en dehors de toute tradition, pour exprimer de pures idées. […] Ce qui les frappe, ce ne sont plus les traits généraux des choses ; ce qu’ils tâchent d’exprimer, ce n’est plus la nature intime des choses.

493. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

C’est de moi qu’elles ont appris les malheurs de leur ancienne patrie ; leurs yeux ont exprimé la douleur lorsque je leur ai parlé de mon aïeul ; mais le plaisir les entraînait, elles ont fini par m’inviter à leurs danses… » Le reste de l’ouvrage n’est qu’à louer. […] Aucun poète plus que Camoëns ne fut inspiré par les grands spectacles des tropiques : c’est à l’Inde qu’il emprunte ses plus riches descriptions ; son imagination, frappée des trombes, des tempêtes et des divers aspects de l’Océan, les a exprimés avec une vérité et une vigueur qui répandent sur ses écrits un charme éternel.

494. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VI. De la littérature latine sous le règne d’Auguste » pp. 164-175

Les écrivains qui ont existé pendant la république, ne s’étant jamais permis d’exprimer les affections qu’ils éprouvaient, c’est dans le court passage des mœurs les plus sévères à la plus effroyable corruption, que les poètes latins ont montré une sensibilité plus touchante que celle qu’on peut trouver dans aucun ouvrage grec. […] Lorsque je parlerai de la littérature des modernes, et en particulier de celle du dix-huitième siècle, où l’amour a été peint dans Tancrède, La Nouvelle Héloïse, Werther et les poètes anglais, etc., je montrerai comment le talent exprime avec d’autant plus de force et de chaleur les affections sensibles, que la réflexion et la philosophie ont élevé plus haut la pensée.

495. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Grosclaude. »

Figurez-vous un homme dont toutes les pensées, même les plus intimes et les plus personnelles, revêtiraient d’elles-mêmes les formes consacrées d’une élégance imbécile ; qui aurait volontairement créé et développé en lui cette infirmité et qui serait décidé à mourir sans avoir une fois, une seule fois, exprimé directement sa pensée… Ô prodige d’ironie ! […] » — et que le mépris s’exprimât par le monosyllabe « zut ! 

496. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mistral, Frédéric (1830-1914) »

Depuis André Chénier, on n’a rien vu, — si ce n’est les chants grecs publiés par Fauriel, — d’une telle pureté de galbe antique, rien de plus gracieux et de plus fort dans le sens le plus juste de ces deux mots, qui expriment les deux grandes faces de tout art et de toute pensée. […] Théophile Gautier Chacun a lu Mirèio, ce poème plein d’azur et de soleil, où les paysages et les mœurs du Midi sont peints de couleurs si chaudes et si lumineuses, où l’amour s’exprime avec la candeur passionnée d’une idylle de Théocrite, dans un dialecte qui, pour la douceur, l’harmonie, le nombre et la richesse, ne le cède en rien au grec et au latin.

497. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre II. Recherche des vérités générales » pp. 113-119

Or, de nos jours l’homme est, si l’on peut s’exprimer ainsi, rentré dans la nature ; on a compris qu’il n’est pas isolé au centre de l’Univers ; qu’il est soumis à des lois qui lui sont communes avec les êtres environnants. […] Il voit que les œuvres de Rousseau, qui sont les premières à prêcher en langue française l’amour des champs, paraissent de 1750 à 1760 ; il constate que les Anglais, Thomson, par exemple, ont exprimé les mêmes sentiments plus de vingt ans auparavant.

498. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XI » pp. 89-99

La plus humble des fleurs sera la plus superbe. » Toutes les fleurs ne s’expriment pas aussi heureusement que la violette ; mais toutes paient un tribut plus ou moins flatteur. […] Tous y accouraient comme à une école de vertu. » C’est ainsi que s’exprimait Petit dans la Ve de Montausier 36.

499. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 239-252

En méditant, en approfondissant un Modele, on acquerra, non l’habitude d’inventer, de penser, de procéder & de s’exprimer comme lui ; mais la force nécessaire pour inventer, penser, procéder & s’exprimer, à son tour, aussi bien que lui : Les Ouvrages des Grands Maîtres, d’après Longin, sont comme autant de sources sacrées, d’où il s’éleve des vapeurs heureuses qui se répandent dans l’ame de leurs Imitateurs & animent les esprits les moins échauffés *.

500. (1927) André Gide pp. 8-126

Ses livres ne sont que des confidences, où il a exprimé par une sorte de besoin personnel un moment de sa pensée, et qui par la suite ne lui paraissent pas plus importantes que les paperasses jaunies ou les fleurs fanées. […] Le Retour de l’Enfant prodigue, variation sur le thème de la parabole évangélique, exprime une fois de plus l’incoercible individualisme de M.  […] Enfin la nature se complaît dans sa splendeur avec une superbe indifférence pour nos maux et nos fautes ; peut-être est-elle encore plus belle qu’un Beethoven lui-même n’est capable de le comprendre et de l’exprimer. […] Ainsi le mot sera délivré de toute signification, et l’on obtiendra « l’inanité sonore, l’insignifiant absolu », qu’expriment si bien ces deux syllabes : Dada. […] A l’appui de ses flottements, si l’on peut ainsi s’exprimer, il cite en épigraphe ce texte de Fénelon : « Je ne puis expliquer mon fond.

501. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Et je crois que la pièce a une morale, bien que cette morale ne soit pas directement exprimée. […] Il doit être très difficile, dans cette langue-là, d’avoir un style personnel, plus difficile encore d’exprimer des idées un peu abstraites. […] Le coq-à-l’âne est un tremblement de terre dans un cerveau, si j’ose m’exprimer ainsi. […] C’est ainsi que Paul exprime le fond de son âme de jeune littérateur. […] je serai Mme Leveau. » Le malheur, c’est que ce que je sous-entends devait apparemment être exprimé pour être compris, et que je n’avais aucun moyen de l’exprimer ici dramatiquement.

502. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Qu’il est vivant, ce chœur qui, selon l’usage de la tragédie grecque, est, au fond, le chœur des « mufles », si j’ose m’exprimer ainsi. […] Cela a été magnifiquement exprimé par Lamartine dans une pièce des Harmonies : le Mont-Blanc. […] Et c’est parce que Son Ombre plane de nouveau sur les planches où les colonels de Scribe exprimèrent tant de nobles sentiments qu’il faut aller voir l’Homme à l’oreille cassée. […] tâché d’exprimer ma tendresse pour l’auteur du Mariage de Loti, du Roman d’un spahi et de Mon frère Yves, et je crois qu’il en avait été touché. […] il s’exprime à présent on « homme supérieur » ; cela veut dire qu’il est mûr pour les pires faiblesses.

503. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Hennique a exprimée magnifiquement et qui donne à tout son livre un sens large et profond. […] Il a çà et là exprimé discrètement, avec une sorte de pudeur, son attachement à ses amis. […] Je ne sais comment exprimer ce qui pénètre dans mon être entier. […] Ajoutons que sous ces formes antiques un sentiment sincère s’exprime aisément. […] Il me permettra, tout mage qu’il est, de lui en exprimer ma tristesse sincère.

504. (1899) Arabesques pp. 1-223

Je suis heureux de lui en exprimer ici ma reconnaissance. […] J’ai exprimé, à plusieurs reprises, cette répulsion pour l’auteur du Contrat social. […] Je crois que l’art doit exprimer tout ce qui préoccupe l’humanité. […] Il exprime la force triomphante à l’encontre des êtres et des choses. […] mon fils, la volonté n’exprime qu’un poignant désir de perfection dont la vie se sert pour te duper.

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