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962. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes maudits » pp. 101-114

Un sonnet sera ce paysage sous vos yeux. » Certes, Corbière et Rimbaud ont leur part de vérité, et le Sage, réfléchissant, en vient à penser que l’art suprême serait de concilier les deux théories, d’apparence ennemies.

963. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Conclusions » pp. 169-178

Ennemi de l’étiquette, on le voyait prendre la tête des cortèges en jaquette et en chapeau melon, ce qui clouait de stupeur indignée son prédécesseur M. 

964. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre III. Soubrettes et bonnes à tout faire »

Il toucha une grosse part dans les cinq milliards d’indemnité de guerre payés à nos ennemis les historiens de 1870.

965. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 140-155

Il annonce même une plus grande étendue de lumieres, plus de profondeur dans les pensées, une éloquence plus nerveuse ; mais il est aisé d’y reconnoître un Philosophe sombre, trop ardent à profiter de la dextérité de son esprit, pour invectiver la Nature humaine, trop ennemi de la Société, trop porté à n’en voir que les vices, & trop empirique dans les remedes qu’il propose.

966. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le marquis de Grignan »

Tous, comme lui, apprenaient d’abord à danser, pour danser aux menuets du roi, puis à faire danser leurs chevaux dans les carrousels, puis à manier le mousquet et la pique, pour faire danser l’ennemi à son tour !

967. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Louis Nicolardot » pp. 217-228

Vous l’auriez vu, lui qui, un jour, brutalisa à la chasse un de ses gentilshommes qui se mettait entre lui et la bête furieuse, crier comme son aïeul Henri IV à Ivry : « Vous m’empêchez de voir l’ennemi, messieurs ! 

968. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Sand »

je défie bien qu’on puisse expliquer que ces lettres, meurtrières pour la personnalité intellectuelle et morale de Madame Sand, soient publiées par d’autres que par des ennemis, heureux de la trouver, pour la première fois, plate et ennuyeuse, et d’un ennui et d’une platitude qu’on ne lui connaissait pas !

969. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

Orgueilleux, mobile, fantasque et farouche, qui de bonne heure avait porté au pouvoir, pour lequel il n’était pas fait, une instabilité d’opinion qui était comme la nostalgie de son génie même, ce prieur de Florence qui ne devait être que le poète de Florence, ce Guelfe devenu Gibelin sans motif que puisse articuler l’Histoire, ce sombre déserteur qui passa à l’ennemi et mérita bien l’exil contre lequel il a rugi comme il aurait rugi contre toute autre chose, ce lion inévitable, s’il n’avait pas été exilé, enfin ce majestueux Dante, idéalisé par son poème, était au fond une assez insupportable réalité.

970. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « V. Saint-René Taillandier »

Saint-René Taillandier, qui écrit cela, soit un ennemi du christianisme.

971. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VIII. De Platon considéré comme panégyriste de Socrate. »

Socrate se justifie en conversant avec ses ennemis et avec les Athéniens ; c’est l’homme sage qui montre la raison et parle en paix à ceux qui la condamnent.

972. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XIX. »

« Avant le jour, le voleur pèche impunément, sous le honteux abri des ténèbres ; mais la lumière, ennemie de la fraude, ne permet plus de cacher le larcin.

973. (1923) Au service de la déesse

Il composait, en français, en grec, en latin, des chansons narquoises, où il fourrait de rudes calembours et des calembredaines insolentes pour ses ennemis, les ennemis de ses idées. […] Libre, Athènes résiste à la licence des factions : ennemie implacable de la tyrannie, elle se soumet volontairement à l’autorité d’un grand homme. […] C’est mal : les amis des lettres n’ont pas le droit d’être les ennemis de la philologie. […] Précisément, le roi d’Angleterre était ennemi de la sorcellerie et de la magie. […] Pierre Hamp est grand ennemi de l’amour et des femmes, qu’il déclare, dans la préface de Vieille histoire, une calamité aussi atroce que la guerre.

974. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Ses ennemis ne manquèrent pas de le traiter de fanfaron et de poseur. […] Un jour vient où l’ennemi redouté surgit. […] Une troupe de soldats, mourant de faim et de froid, s’engage dans les défilés du Jura pour ne pas tomber aux mains de l’ennemi. […] Ce qui les énerve, c’est justement de deviner l’ennemi autour d’eux et de ne jamais le voir. […] Il s’agit de soutenir les feux d’une batterie et d’entraver les progrès de l’ennemi.

975. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

Vous avez un ennemi mortel. […] Puis viennent les fameux banquets, l’agitation entretenue par des passions aveugles ou ennemies. […] » — Enfoncez l’ennemi, criait-il sur le champ de bataille, à Nansouty, chargeant à la tête de la cavalerie de la garde, faites-les périr, s’il le faut, je ne les ai pas dorés pour eux ! […] La honte, la formidable honte de cette révolte en présence de l’ennemi, ces cris de : « Vive la paix !  […] Il se peut que les frères connus ou inconnus qui veillaient sur eux aient détruit par le feu la dépouille de leur maître, pour la soustraire à la profanation des ennemis.

976. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Jules Lemaître à un tempérament nonchalant et ennemi de l’effort. […] L’écrivain de France qui a le plus d’ennemis. […] Brunetière, mais j’aurai donné déjà quelque idée de son caractère, de la nature de son talent, de la façon dont s’exerce son influence, quand j’aurai dit qu’il est aujourd’hui l’écrivain de France qui a le plus d’ennemis. Lisez : d’ennemis déclarés et acharnés, qui lui veulent mal de mort, et à qui il suffit d’entendre prononcer son nom pour entrer dans un état voisin de la rage. […] C’est ce guide qui nous fait défaut quand il s’agit d’une histoire étrangère. — La difficulté se double d’une autre quand ce pays étranger est un ennemi, et cet ennemi, un vainqueur.

977. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

C’est donc Molière que Brunetière, à la manière de Gorenflot, baptise critique, et la victoire de Molière sur Chapelain, c’est une victoire de la critique sur un ennemi de la critique. […] Juvénal signifie les Châtiments, Job signifie l’Exilé, Patmos signifie Guernesey, Tacite signifie l’ennemi de Napoléon III. […] Nous devons nous défendre contre la précision ainsi que contre le plus dangereux ennemi du goût et d’une saine appréciation sur le goût. […] Et l’abstraction, qui était sa faculté maîtresse, devint son idée ennemie. Avec le fanatisme logique des idéologues, il en fit l’idée ennemie de la France, le principe de ses révolutions et de ses malheurs.

978. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

Il aime la France pour d’autres raisons, par exemple parce que, retranchées les nations hérétiques et schismatiques, et l’Autriche, ennemie naturelle du Piémont, il ne reste qu’elle. […] Comme homme, il ne l’est pas ; il est un animal ennemi : tel est l’ordre humain ; il faut qu’il le soit comme participant à Dieu, comme communiant dans la pensée divine, pour qu’il y ait au moins une image de l’ordre divin réalisée sur la terre. […] D’une part, il dissipe cette illusion, née de l’histoire et de l’histoire naturelle, ses deux ennemies personnelles, que le monde est très ancien. […] Je dis que cela était original, car personne, il me semble, du moins parmi les hommes en lumière, n’avait repris la grande polémique chrétienne de ce côté-là ; et c’était fort à propos ; car ce que de Bonald a très bien vu (en 1800), c’est qu’on pouvait négliger Voltaire et tout le voltairianisme, comme petite guerre brillante, mais dont la portée était courte et dont l’influence sur les esprits n’irait pas loin, tandis que, quoique bien plus obscur et comme bégayant encore, le transformisme, l’évolutionnisme était l’ennemi redoutable, l’ennemi fait pour grandir, cet ennemi de demain qu’on oublie toujours d’étouffer aujourd’hui. […] Il la connaît mal, il tranche bien vite par des « doctrines abjectes » ou par des épigrammes qui, chose amusante, rappellent tout à fait Voltaire, ennemi, lui aussi, superficiel et dédaigneux, des théories évolutionnistes naissantes.

979. (1908) Après le naturalisme

Et cependant, comme elle eut dû paraître fausse cette théorie issue de la spécialisation de l’art qui, méconnaissant les causes dont il naît, les reniant, se créait arbitrairement en face d’elles, une vie propre, ennemie de tout ce qui n’était pas lui, de tout ce qui pouvait le contrarier. […] L’ennemi, c’est l’élément destructeur, agent de la mort. […] Pour elles les forces matérielles ne valent rien, sont l’ennemi. […] Quiconque prépare ou préconise le moyen de la guerre sociale, quelles qu’en soient les intentions, celui-là doit être tenu pour un fou ou pour un ennemi du genre humain. […] Antoine Nau, La Force ennemie.

980. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre II. Lord Byron. » pp. 334-423

Faute d’ennemis, il s’en prend à la société et lui fait la guerre. […] À ses yeux, en ce moment, l’Église et la constitution sont choses saintes : gardez-vous d’y toucher, si vous ne voulez point devenir ennemi public ! […] Comme si ce n’était pas assez des haines politiques, il se charge encore des inimitiés littéraires, attaque le corps entier des critiques1251, diffame la nouvelle poésie, déclare que les plus célèbres sont des « Claudiens, des gens du bas empire », s’acharne sur les lakistes, et garde un ennemi venimeux et infatigable dans Southey. […] Il a senti vingt fois le voisinage de la mort : en Morée, dans les angoisses de la solitude et de la fièvre ; à Suli, dans un naufrage ; à Malte, en Angleterre et en Italie, dans des menaces de duel, dans des projets d’insurrection, dans des commencements de coups de main, en mer, armé, ou à cheval, ayant vu à sa porte, et plus d’une fois, l’assassinat, les plaies, l’agonie. « Je vis ici, écrivait-il, exposé tous les jours à être assassiné1276, car je me suis fait un ennemi d’un homme puissant qui n’a pas de conscience. […] Les hommes — mouraient, et leurs os étaient sans tombe comme leur chair. —  Les maigres étaient dévorés par les maigres. —  Même les chiens assaillirent leurs maîtres, tous sauf un ; —  et celui-ci fut fidèle au cadavre, écartant — les oiseaux, et les bêtes, et les hommes affamés, par ses hurlements, —  jusqu’à ce que la faim leur eût serré la gorge, ou que les morts qui tombaient — eussent alléché leurs mâchoires maigres. —  Lui-même n’alla point chercher de nourriture, —  mais d’un piteux et perpétuel gémissement, —  avec des cris pressés et désolés, léchant la main — qui ne lui répondait point par une caresse, il mourut. —  La foule périt de faim par degrés ; mais deux hommes — dans une énorme cité survécurent, —  et ils étaient ennemis.

981. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

Tous les contemporains sont là pour l’attester, l’impuissance avec prétention, l’ennui avec scandale, telle fut l’impression universelle, décisive, constatée non par les ennemis de Balzac, mais par le vrai public. […] Comment ne pas ranger cet homme parmi les plus haïssables praticiens de l’intolérance, parmi les plus implacables ennemis de la liberté ? […] Quels ont été, à cette première date de l’alliance entre les pouvoirs terrestres et l’Église, du règne officiel de la religion chrétienne sur les âmes, les ennemis, les périls de cette religion dans le monde ? […] On peut donc éprouver à la fois une prédilection historique pour Mazarin et un attrait romanesque pour sa belle ennemie, en suivant, sur les traces de M.  […] Mais entre ces deux objets de son égale affection, elle rencontre le terrible cardinal, qui s’est déclaré l’implacable ennemi de la reine, et qui ne veut d’influences auprès du roi que celles qu’il pourra diriger.

982. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Les quatre victimes qu’il prit à son piège étaient ses ennemis mortels ; ils avaient éprouvé dix fois la duplicité de sa parole ; le pressentiment d’une catastrophe les agitait à l’avance. […] Il lui apprend à tisser les ruses, à machiner les embûches, à étouffer ses ennemis avant qu’ils n’aient eu le temps de lui nuire, à ne voir dans les autres hommes que des instruments à employer ou des obstacles à faire disparaître. […] Souvent la mer l’a noyé, l’ennemi l’a pris ; quelquefois même la flotte d’un prince créancier l’a confisqué insolemment en pleine mer. […] Elle est froide et sérieuse, fort dangereuse ennemie, gardant la gravité espagnole, sans faire un pas ni une démarche qui ne soient compassés. […] Elles jouent dans ces lugubres cérémonies le rôle des Prophètes de mauvais augure, que les rois de la Bible envoyaient chercher pour anathématiser leurs ennemis.

983. (1910) Victor-Marie, comte Hugo pp. 4-265

Je n’ai jamais outragé que de très dangereux ennemis publics. […] Tout est adversaire, tout est ennemi aux personnages de Racine, ils sont tous ennemis les uns des autres et ils ne parlent jamais que pour mettre l’adversaire dans son tort et ainsi justifier d’avance ensemble, en dedans, les cruautés qu’ils exerceront sur lui, comme lui-même a déjà justifié les cruautés qu’il exercera sur eux. […] Plus ils sont ennemis, plus ils se battent, moins aussi, moins donc ils se veulent du mal, moins ils se veulent de mal, moins ils se blessent et ils veulent se blesser. […] — Tout est adversaire, tout est ennemi aux personnages de Racine ; les hommes et les dieux ; leur maîtresse, leur amant, leur propre cœur. […] Le judicium, c’est mon ennemi, mon aversion, mon horreur.

984. (1894) Critique de combat

Vos amis ont dû vous féliciter, monsieur, de votre élection comme député ; vos ennemis, si vous en avez, ceux qui vous appellent le grand pontife des idées troubles, auraient peut-être lieu de s’en réjouir également. […] Telle région, au sol fertilisé par le rude labeur de nombreuses générations, peut voir tarir, sous le suçoir d’un ennemi presque invisible, la source de ses généreux produits. […] Quant au peuple, il est par nature ennemi de tout ce qui rend plus ardue la communication de la pensée. […] Mais sied-il, quand on affiche l’intention d’apprécier une époque « sans rigueur et sans complaisance », de reprendre et d’adopter comme un arrêt définitif la formule étroite et passionnée de ses pires ennemis ? […] N’y retrouve-t-on pas encore en mille endroits le puritain ennemi du luxe, le Genevois ami des petits États, le Suisse partisan du système fédératif ?

985. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

Ennemi de tout ce qui est, il faut le mettre d’accord avec lui-même avant de s’accorder avec lui ; il le faut écouter, non le croire. […] Dans la guerre qu’il déclare aux incrédules, son unique but est de les conduire au bonheur: il ne veut pas écraser ses ennemis, il veut les émouvoir et les convaincre. […] lorsque ses autels s’élevèrent au milieu de nos forêts ensanglantées par les couteaux des druides, que les opprimés vinrent en foule y chercher des asiles, que des ennemis irréconciliables s’y embrassèrent en pleurant, les tyrans émus sentirent, du haut des tours, les armes tomber de leurs mains: ils n’avaient connu que l’empire de la terreur, et ils voyaient naître celui de la charité. […] Caton, le plus sage des hommes, fut accusé quarante-quatre fois ; et ces accusations n’eurent d’autre résultat que de forcer ses ennemis à reconnaître quarante-quatre fois sa vertu.

986. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

Il portait que le lieutenant du pacha qui était devant la forteresse de Ruchs s’étonnait de ce qu’il ne venait point se soumettre à lui et lui rendre l’hommage, puisque la Mingrélie appartenait au Grand Seigneur ; que le pacha avait ordonné d’en bien user avec ceux qui se joindraient aux Turcs, mais de traiter en ennemis ceux qui refuseraient de le faire ; que s’il voulait sauver ses biens, sa vie, son château et tout ce qui était dedans, il eût à aller recevoir promptement les ordres du pacha. […] Le vizir lui mandait tous les jours de tenir bon, et qu’il était prêt à aller fondre sur l’ennemi. […] Le pis pour moi était qu’on parlait de la lui rendre et de le rétablir, parce qu’étant, d’un côté, fort ennemi des chrétiens et des Européens, et qu’étant, d’un autre, inaccessible aux recommandations et aux présents, ayant toujours fait paraître durant son emploi qu’il n’avait rien plus à cœur que de grossir le trésor de son maître, je devais craindre qu’il ne l’empêchât d’acheter les pierreries que j’avais apportées par l’ordre exprès du feu roi son père, et sur les dessins qu’il m’en avait donnés de sa propre main. […] Cela n’est pas fort aisé, parce que la bande ennemie arrête les boules et les chasse à l’autre bout.

987. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

Janikan (Djâny-khân) ne voyant, à cause de cela, aucun moyen de sauver son parent, rompit ouvertement avec le premier ministre et se déclara hautement son ennemi ; mais le ministre se contentait de pousser sa pointe. […] Ce jour-là, il fut de bonne heure au palais, et, tirant à part ce qu’il y trouva de gens qu’il savait être ennemis du grand vizir, entre lesquels le plus considérable était le grand maître de l’artillerie, il leur dit qu’il avait ordre du roi d’aller prendre la tête du premier ministre, et les pria de l’accompagner. […] Il était, à la vérité, un des grands ennemis du mort ; mais, faisant réflexion sur le crime et sur le danger de l’entreprise, dont il était moralement impossible d’éviter la punition tôt ou tard, il résolut de la découvrir au roi, ne voyant point d’autre voie de se tirer du mauvais pas où il s’était engagé. […] La mère du roi, se voyant défaite de ses principaux ennemis, étendit sa vengeance sur la maison de Daoud-Kan, comme l’auteur de toute cette longue et cruelle tragédie.

988. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIe entretien. Sur le caractère et les œuvres de Béranger » pp. 253-364

Sous une ligue ennemie Les Français sont abattus. […] Autour de moi pleurent ses ennemis. […] Cette généreuse indignation était soulevée en moi par cette coalition malséante des hommes de 1815, des hommes de la République, des hommes de l’anarchie et des hommes sortis le plus récemment des conseils de Louis-Philippe, tout courbés sous ses faveurs et devenus tout à coup des Coriolans de ministères ameutant de la voix et du geste les ennemis les plus acharnés de leur prince, et menant la France à l’assaut de cette royauté dont ils étaient les fondateurs. […] De grandes questions vont se poser, de gros orages s’accumulent ; il faudra me dessiner par mes votes et par mes actes pour ou contre le peuple accoutumé à voir en moi sa personnification : si je me dessine pour lui, je donnerai de la force à ses excès et je contribuerai à le perdre ; si je me dessine contre lui, je me trouverai groupé avec les royalistes et les réactionnaires qu’il regarde comme ses ennemis, et je ne conserverai plus dans le peuple que le renom d’un traître ou d’un apostat.

989. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « en tête de quelque bulletin littéraire .  » pp. 525-535

Si Racine, dans les vingt-six années environ qui forment sa pleine carrière depuis les Frères ennemis jusqu’à Athalie, avait eu le temps de voir une couple de révolutions politiques et littéraires, s’il avait été traversé deux fois par un soudain changement dans les mœurs publiques et dans le goût, il aurait eu fort à faire assurément, tout Racine qu’il était, pour soutenir cette harmonie d’ensemble qui nous paraît sa principale beauté : il n’aurait pas évité çà et là dans la pureté de sa ligne quelque brisure.

990. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre IV. De la philosophie et de l’éloquence des Grecs » pp. 120-134

Alcibiade et Thémistocle ont voulu se venger de leur patrie en lui suscitant des ennemis étrangers ; jamais un Romain ne se fût rendu coupable d’un tel crime.

991. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVI. De l’éloquence et de la philosophie des Anglais » pp. 324-337

Burke, le plus violent ennemi de la France, a, dans son ouvrage contre elle, quelques rapports avec l’éloquence française ; mais quoiqu’il ait des admirateurs en Angleterre, on y est assez tenté d’accuser son style d’exagération autant que ses opinions, et de trouver sa manière d’écrire incompatible avec des idées justes.

992. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre V. Des personnages dans les récits et dans les dialogues : invention et développement des caractères »

S’il vous est arrivé jamais de concevoir l’idée d’un enfantillage, d’une équipée, d’une folie, pure fantaisie de l’esprit inquiet et désœuvré, et de passer à l’exécution sans autre raison que l’idée conçue, sans entraînement, sans plaisir, mais fatalement, sans pouvoir résister ; — si vous avez repoussé parfois de toutes les forces de votre volonté une tentation vive, si vous en avez triomphé, et si vous avez succombé à l’instant précis où la tentation semblait s’évanouir de l’âme, où l’apaisement des désirs tumultueux se faisait, où la volonté, sans ennemi, désarmait ; — si vous avez cru, après une émotion vive, ou un acte important, être transformé, régénéré, naître à une vie nouvelle, et si vous vous êtes attristé bientôt de vous sentir le même et de continuer l’ancienne vie ; — si par un mouvement de générosité spontanée ou d’affection vous avez pardonné une offense, et si vous avez par orgueil persisté dans le pardon en vous efforçant de l’exercer comme une vengeance ; — si vous avez pu remarquer que les bonnes actions dont on vous louait n’avaient pas toujours de très louables motifs, que la médiocrité continue dans le bien est moins aisée que la perfection d’un moment, et qu’un grand sacrifice s’accomplit mieux par orgueil qu’un petit devoir par conscience, qu’il coûte moins de donner que de rendre, qu’on aime mieux ses obligés que ses bienfaiteurs, et ses protégés que ses protecteurs ; — si vous avez trouvé que dans toute amitié il y a celle qui aime et celle qui est aimée, et que la réciprocité parfaite est rare, que beaucoup d’amitiés ont de tout autres causes que l’amitié, et sont des ligues d’intérêts, de vanité, d’antipathie, de coquetterie ; que les ressemblances d’humeur facilitent la camaraderie, et les différences l’intimité ; — si vous avez senti qu’un grand désir n’est guère satisfait sans désenchantement, et que le plaisir possédé n’atteint jamais le plaisir rêvé ; — si vous avez parfois, dans les plus vives émotions, au milieu des plus sincères douleurs, senti le plaisir d’être un personnage et de soutenir tous les regards du public ; — si vous avez parfois brouillé votre existence pour la conformer à un rêve, si vous avez souffert d’avoir voulu jouer dans la réalité le personnage que vous désiriez être, si vous avez voulu dramatiser vos affections, et mettre dans la paisible égalité de votre cœur les agitations des livres, si vous avez agrandi votre geste, mouillé votre voix, concerté vos attitudes, débité des phrases livresques, faussé votre sentiment, votre volonté, vos actes par l’imitation d’un idéal étranger et déraisonnable ; — si enfin vous avez pu noter que vous étiez parfois content de vous, indulgent aux autres, affectueux, gai, ou rude, sévère, jaloux, colère, mélancolique, sans savoir pourquoi, sans autre cause que l’état du temps et la hauteur du baromètre ; — si tout cela, et que d’autres choses encore !

993. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VI. La commedia sostenuta » pp. 103-118

La pièce où ce type du pédant est le plus outré, le plus chargé, est sans contredit celle de ce révolté fantasque, de ce grand ennemi d’Aristote, Giordano Bruno, qui fut une des victimes de l’Inquisition romaine.

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