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437. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVI. Consultation pour un apprenti romancier » pp. 196-200

Cette nécessité de la ressemblance ne vise pas à satisfaire les curieux de constater « comme c’est bien imité ».

438. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre VIII. Des Églises gothiques. »

Il est même curieux de remarquer que, dans ce siècle incrédule, les poètes et les romanciers, par un retour naturel vers les mœurs de nos aïeux, se plaisent à introduire dans leurs fictions, des souterrains, des fantômes, des châteaux, des temples gothiques : tant ont de charmes les souvenirs qui se lient à la religion et à l’histoire de la patrie !

439. (1855) Louis David, son école et son temps. Souvenirs pp. -447

Pendant les deux jours qui suivirent cette scène, Étienne fut sur les épines, tant il était curieux de voir paraître sa future condisciple. […] Étienne, naturellement fureteur et curieux, mais ignorant alors la langue de nos voisins, ouvrait souvent chez son ami un Shakspeare original. […] Vers deux heures, David vint au milieu d’eux, et s’avançant près de la table du modèle, au centre vide de l’atelier : « Vous êtes curieux, dit-il en souriant plus que de coutume et de manière à laisser voir la tumeur de sa mâchoire supérieure, vous êtes curieux de savoir ce qui s’est passé hier là-haut ? […] En tête s’avançaient les caisses remplies de manuscrits et de livres ; puis celles où l’on avait rassemblé les produits minéraux les plus curieux de l’Italie, et entre autres les fossiles de Vérone. […] Soyez certain, malgré le vif enthousiasme que l’on témoigne ces jours-ci, que les chefs-d’œuvre apportés d’Italie ne seront bientôt considérés que comme des richesses curieuses.

440. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

Les déplacés sont aussi curieux à étudier que les déclassés. […] Remarquez, d’ailleurs, un fait curieux. […] Les esprits curieux trompent ainsi. […] Il fut bien le même, en tout temps, curieux et simplement curieux, sans croire que sa curiosité le menât à rien. […] Le contraste est curieux et instructif.

441. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

En tout cas, il est curieux d’observer que Corneille écrit ces bouffonneries avec la même plume que le Cid. […] Voilà quelques traits seulement de cette pièce étrange et curieuse. […] N’est-ce pas là un fait intéressant et curieux ? […] Tout cela n’est-il pas piquant, singulier, curieux ? […] Ainsi les petits détails de la réalité curieuse s’entremêlent aux choses héroïques avec une agréable liberté.

442. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

C’est un peu le cas, à ce qu’il nous semble, du curieux et consciencieux ouvrage de M. l’abbé Fabre sur la Jeunesse de Fléchier. […] En effet, le document est des plus curieux que nous ayons sur la vie de province au xviie  siècle. […] ou d’une langue en même temps plus franche et cependant plus curieuse ? […] « Hommes doctes et curieux, s’écriait Bossuet avec son impétueuse familiarité, pour Dieu ! […] Nous n’avons pas à faire l’histoire, pour curieuse qu’elle soit, du privilège en librairie.

443. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Que ceux qui ne sont pas un peu curieux me condamnent… je m’absoudrai. […] — Je suis curieux de le savoir. […] Elle est rappelée à la réalité terrible par les cris déchirants de son fils qu’on lui enlève de force sur l’instigation de la vieille douairière de Croix-Saint-Luc, un type très curieux de femme hautaine et impitoyable. […] La forêt est pour nous ; je serais curieuse De savoir si j’ai fait quelque chose à l’yeuse ; Les fleurs n’ont nul motif de nous vouloir du mal. […] Un détail curieux : M. 

444. (1908) Jean Racine pp. 1-325

C’est très curieux. […] Il traduit beaucoup, beaucoup de grec, et même des auteurs simplement curieux, tels que Diogène Laërce, Eusèbe et Philon. […] C’est beaucoup moins de plaisirs qu’il est curieux et avide que de littérature, de poésie, — et de gloire. […] Il y a dans les Dialogues des morts de Fénelon un passage bien curieux. […] Henriette, duchesse d’Orléans, aimait Racine, et elle était curieuse des choses de l’esprit.

445. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

Champfleury, — Un curieux appendice à l’histoire de M.  […] Flaubert est comme descriptif, il faut répéter ce que nous avons dit plus haut : il est curieux, soigneux, patient ; mais de création et de génie, pas l’ombre. […] et les raisons de Corneille sont curieuses. […] Il est curieux de nous, mais ne nous aime pas. […] Mais ce qu’il y a de plus curieux dans le cas de M. 

446. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 2. Caractère de la race. »

Notre nation, ce me semble, est moins sensible que sensuelle et moins sensuelle qu’intellectuelle : plus capable d’enthousiasme que de passion, peu rêveuse, peu poétique, médiocrement artiste, et, selon le degré d’abstraction et de précision que comportent les arts, plus douée pour l’architecture que pour la musique, curieuse surtout de notions intelligibles, logicienne, constructive et généralisatrice, peu métaphysicienne ni mystique, mais positive et réaliste jusque dans les plus vifs élans de la foi et dans les plus aventureuses courses de la pensée.

447. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Daudet, Alphonse (1840-1897) »

. — Les Bottines, Miserere de l’Amour, le Rouge-Gorge, Trois jours de vendanges, les Cerisiers, les Prunes, Dernière amoureuse, tous ces sourires de dessins si divers, tous ces cris où il y a du roucoulement et de la violence, évoquent une physionomie personnelle d’écrivain curieux de sentiments, épris de la musique des mots, habile à faire tenir une longue et complète vision dans une phrase brève, sensuelle, dont la raillerie confine sans cesse à l’émotion.

448. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vacquerie, Auguste (1819-1895) »

Lisant beaucoup, connaissant tout, lettré jusqu’aux ongles, Vacquerie était, en même temps qu’un curieux d’art et un passionné de lettres, un travailleur infatigable, admirable… Toute cette existence fut un exemple… Les lettres françaises garderont, en leur histoire, une place glorieuse à ce disciple qui fut un maître, à ce poète qui, pour avoir marché dans le sillon du grand remueur de mots, de formes et de rythmes de ce siècle et de tous les siècles, n’en a pas moins fait sa gerbe, lui aussi !

449. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Introduction » pp. 5-10

Considérable, car la liste est longue de ceux qui entre dix-huit et trente-six ans on écrit des pages intéressantes, ont participé au mouvement littéraire de ce temps, si fécond en cénacles, si fertile en personnalités curieuses ; dangereux enfin, parce que, malgré deux ans de recherches, nous avons commis des oublis inévitables et surtout parce qu’ayant combattu, nous aussi, dans les rangs de cette jeunesse, nous n’avons pourtant pas hésité à mettre de côté toute camaraderie, toute confraternité, pour présenter un tableau sincère et précis de cette « jeune littérature » dont on parle tant et qu’on connaît si peu.

450. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre II. Vue générale des Poèmes où le merveilleux du Christianisme remplace la Mythologie. L’Enfer du Dante, la Jérusalem délivrée. »

Ajoutons qu’il ne s’est pas assez servi du mahométisme, dont les rites sont d’autant plus curieux qu’ils sont peu connus.

451. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 43, que le plaisir que nous avons au théatre n’est point produit par l’illusion » pp. 429-434

Un curieux d’architecture n’examine une colonne, et il ne s’arrête sur aucune partie d’un palais, qu’après avoir donné le coup-d’oeil à toute la masse du bâtiment, qu’après avoir bien placé dans son imagination l’idée distincte de ce palais.

452. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1867 » pp. 99-182

15 mars Mémoires curieux que ces mémoires de Gavarni. […] Une curieuse lettre, est une lettre adressée à son fils âgé de six ans, où il lui raconte, sur le ton de la plaisanterie, sa promenade de pékin dans tout ça, escorté de son trompette prussien : on ferait quelque chose de charmant de la guerre, ainsi contée par un père à son enfant. […] * * * — Il est assez curieux que jamais un legs n’ait été fait à l’auteur d’un livre, n’ait été fait par un mourant riche à un esprit. […] Le cas est trouvé curieux. […] Pendant les tintements de la messe, dite pour la princesse dans une pièce voisine, tintements coupés, dans le salon où nous sommes, par des blagues d’Arago, Vimercati raconte un curieux départ de la vie d’un de ses amis, le dernier inscrit sur le livre de la noblesse de Venise.

453. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Il est curieux de savoir comment ces observateurs de la vie comprennent la province et les provinciaux. […] Il s’écrit vraiment, en ce temps de lumière, de très curieuses choses. […] Tel est, dépouillé de ses épisodes essentiels, de ses détails charmants ou douloureux, de sa riche parure d’art, ce très curieux livre. […] En quoi ce charmant et trop modeste écrivain, ce précieux artiste, cet ami fidèle, ce spectateur curieux des comédies de la vie, est-il un trouble, un empêchement à la digestion de M.  […] Voici un étrange et curieux livre : Les Mal-Vus, de M. 

454. (1930) Le roman français pp. 1-197

Et, chose curieuse qu’on n’a pas jusqu’ici assez bien marquée, cet héroïsme, même dans son Michel-Ange, rend un son wagnérien. […] Il se passe alors dans notre esprit un phénomène assez curieux. […] C’est très curieux. […] C’est très curieux… Il doit encore y avoir ici quelque influence baudelairienne. […] C’est tout à fait curieux.

455. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

Cette préoccupation chez un esprit aussi pratique, et qui s’en est montré assez dégagé depuis, pourra paraître singulière à ceux qui ne savent pas combien ces natures actives qu’on voit aboutir ensuite sur tel ou tel point ont été capables, dans leur avidité première, de toutes sortes d’essais, d’entrains curieux en tous sens et de préparations studieuses. […] Il y a bien dés manières sans doute d’écrire dignement l’histoire ; mais, dans les manières plus curieuses de forme, il court risque de se glisser quelque imitation, quelque pastiche de l’antiquité. […] Mais n’admirez-vous pas cette activité en tous sens, et comment cet esprit curieux, entraîné, se portant d’instinct aux grands sujets comme à son niveau, jette tout son feu d’universalité avant d’entrer dans l’œuvre pratique ? […] je crois que tous ceux qui participèrent alors à l’œuvre d’opposition et bientôt de délivrance, qui y mirent plus ou moins du leur, soit de leurs actes, soit de leurs vœux, ont encore droit de se dire : « Non, nous n’avons pas erré, » et qu’ils ont aussi le devoir d’ajouter : « Si nous avions à recommencer, même en sachant avenir, ce serait encore à refaire. » Ceci dit une fois et pour nous mettre la conscience tout à fait à l’aise, l’étude de l’attaque, au point de vue tout à fait stratégique, nous devient singulièrement curieuse : rien de plus instructif, de plus dramatique aujourd’hui que cette lecture du National. […] Thiers d’être l’esprit le plus net, le plus vif, le plus curieux, le plus perpétuellement en fraîcheur et comme en belle humeur de connaître et de dire.

456. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

Un de nos jeunes et curieux amis a fait, il y a bien des années déjà, une étude de Naudé en cette Revue 223 ; il s’est appliqué à toute sa vie, s’est étendu sur ses divers ouvrages, et a pris plaisir autour de l’érudit. […] En 1624, le Père Garassus avait publié le livre de la Doctrine curieuse des Beaux-Esprits modernes, dans lequel il cherchait partout des libertins et des athées ; Naudé put en prendre l’idée de venger, par contre-partie, les grands esprits de l’antiquité qui avaient, d’ailleurs été compromis, il nous l’apprend positivement, dans les suites de cette querelle. […] Les conseils de modération qu’il y mêle ne font que mieux ressortir l’immoral du fond ; on croirait par moments qu’il se joue : c’est comme un chirurgien curieux qui assemble des exemples de tous les jolis cas, ou comme un chimiste amateur qui étiquette avec complaisance tous ses poisons, en inscrivant sur chacun la dose indispensable et suffisante. […] Quelques curieux les recherchent ; on les lit peu, on les consulte çà et là. […] Ruiné et criblé de dettes, on lui conseillait d’écrire ses Mémoires et de raconter tant de choses curieuses qu’il savait sur la haute société, dans laquelle il avait passé sa vie ; un libraire de Londres lui promettait bien des guinées pour cela ; quelques amis même le pressaient : « Non, c’est impossible, répondit le comte : je ne trahirai jamais des gens avec qui j’ai diné. »  — Le comte d’Orsay et Gabriel Naudé !

457. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Granier de Cassagnac » pp. 277-345

Avec Carnot, ce curieux mélange de puritanisme et de bucolique ; avec Pichegru, ce héros qui déshonore son casque en le tendant à l’argent de la trahison ; avec La Révellière-Lépeaux, ce Quasimodo de la cathédrale sans cloches de la théophilanthropie et dont Cassagnac nous a levé une empreinte si dédaigneusement burlesque ; avec madame de Staël, qui ne l’éblouit pas et qu’il sait regarder dans ses beaux yeux sans perdre la fermeté d’un homme qui juge une femme et sait la placer un peu au-dessous de sa gloire, Cassagnac nous a donné un Babeuf qu’on ne connaissait pas, et qu’il faudra désormais apprendre quand il s’agira d’en parler. […] Ce n’étaient pas seulement les événements auxquels touche ce livre : la chute de Louis-Philippe et l’érection de l’Empire sur une République en poussière, que l’on était curieux de voir retracés par une main compétente et profondément renseignée, mais c’était l’écrivain, c’était l’homme, aux prises avec ce grand sujet. […] Livre curieux, aussi inattendu que curieux, l’Histoire des Origines de la langue française n’est pas tout à fait de mon département, mais il m’est impossible de n’en pas parler. […] Et, franchement, quoi de plus curieux pour une critique qui pense et qui veut faire penser ?

458. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Boutmy est extrêmement curieux et probant : « Plusieurs propositions abstraites de suite lui causaient à la fin une sorte de malaise. […] Il est vrai qu’il est bien curieux, le mécanisme de ce circulus vital qui, parti de la sensation, y retourne éternellement et nécessairement ! […] Une page sans clichés estime suite d’énigmes ; cela rebute l’esprit le plus curieux, l’« œdipe » le plus patient. […] Et si un curieux s’y jette, aura-t-il présentes à la mémoire les quinze lignes que je viens d’en extraire ? […] Ils sont plus curieux que respectables.

459. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

C’est de l’art sensationnel, et il est au moins curieux qu’avec une pareille formule il ait des prétentions à l’idéalisme. […] C’est un livre de pleine maturité ; et le curieux, c’est que M.  […] On le connaît et on l’estime très justement pour sa critique pesée, réfléchie et curieuse. […] On le savait curieux, léger, sceptique. […] Curieuse, Le Livre suprême, L’Initiation sentimentale, etc.

460. (1885) L’Art romantique

Je puis vous fournir un curieux exemple de cette brièveté féconde et poétique. Vous avez comme moi, sans doute, lu ces jours derniers, dans la Presse, une très curieuse et très belle étude de M.  […] » N’est-il pas curieux de voir l’auteur de si grandes choses jalouser presque celui qui n’excelle que dans les petites ? […] Mais ce qu’il y a certainement de plus beau et de plus curieux dans cette collection, c’est les trois bronzes de Michel-Ange. […] Berlioz (9 février 1860). « Le foyer du Théâtre-Italien était curieux à observer le soir du premier concert.

461. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Et cette histoire restera une page curieuse et instructive de l’histoire littéraire de ce temps-ci. […] Deux hommes seulement, dans toute la presse, n’ont pas vu ce soir-là de cabale dans la salle : ce sont M. de Biéville, du Siècle, et M. de Béchard, de la Gazette de France. — Le rapprochement de ces deux extrêmes nous semble assez curieux pour le noter en passant. […] Appendice [deux lettres de 1865] Nous donnons ici, sans commentaires, ces deux pièces curieuses à confronter : Paris, 7 décembre 1865. […] Une autre pièce a un certain intérêt pour les gens qui sont curieux de l’histoire littéraire des auteurs qu’ils aiment.

462. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Les Chants modernes, par M. Maxime du Camp. Paris, Michel Lévy, in-8°, avec cette épigraphe. « Ni regret du passé, ni peur de l’avenir. » » pp. 3-19

Plume habile, savante en couleurs, curieuse en nuances, cherchant l’art pour l’art, ayant moins à dire qu’à décrire, il a fait dans son genre des miracles de hardiesse et d’adresse ; il a fait rendre à notre langue plus qu’elle ne pouvait jusque-là. […] Sa préface est des plus curieuses.

463. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — I — Vauvenargues et Fauris de Saint-Vincens » pp. 1-16

Je n’ai jamais été contre ; mais il y a des incrédules dont l’erreur est plus profonde : c’est leur esprit trop curieux qui a gâté leurs sentiments… Je n’ai jamais été contre est, je crois, le mot le plus vrai pour Vauvenargues. […] Gilbert a remarqué toutes ces choses dans sa complète et curieuse édition ; je ne fais que les répéter après lui et les étaler.

464. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier » pp. 303-319

Voici un livre dont j’aurais dû parler depuis longtemps, d’abord parce qu’il est consacré à la mémoire d’une femme qui est restée charmante et unique dans la pensée de tous ceux qui l’ont connue et qu’elle a honorés de sa bienveillance, ensuite parce que c’est le livre qui, le mieux fait pour la rappeler fidèlement aux amis qui l’ont regrettée et qui la regrettent encore, est le plus propre à donner d’elle une juste idée, une idée approchante du moins, aux générations curieuses qui n’avaient su jusqu’ici que son nom. […] Ainsi la description du château de Maintenon, malgré l’intérêt qui s’attache à un si noble séjour, méritait d’être supprimée : la plume de M. de Chateaubriand, en ces derniers écrits, n’est plus elle-même. — L’observation faite, il n’en est pas moins vrai que ces deux volumes nous offrent sur une femme qui fut un modèle de beauté et de bonté, et sur le monde qu’elle eut le charme et l’art de grouper jusqu’à la fin autour d’elle, une quantité de pièces intimes, agréables, imprévues, qui permettent aux nouveaux venus, s’ils en sont curieux, de vivre pendant quelques soirées dans une intimité inespérée et des plus choisies.

465. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — II » pp. 107-121

M. de Tocqueville, non content d’écrire et de méditer, entra dans la politique active et fut nommé député en 1839 ; il s’était présenté aux électeurs dès 1837, et un incident curieux signala cette première candidature. […] Pour celui qui étudie les formes différentes et caractéristiques des esprits, il est curieux de suivre M. de Tocqueville en Allemagne, dans son voyage à la recherche de cet ancien régime qui le préoccupe tant : il ne parvient pas d’abord à trouver ce qu’il espérait, et à découvrir un ordre de symptômes précurseurs de 89 et corrélatifs aux nôtres.

466. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

Arago serait à faire, et, en en retranchant même ce qui ne paraîtrait pas digne de tous deux, il y aurait lieu d’y caractériser deux natures d’esprit et de tempérament tout à fait opposées, et qui devaient presque nécessairement en venir à se contredire et à se combattre : — Arago, ardent, puissant, robuste, doué de génie et capable d’invention, mais qui en fut trop distrait par d’autres qualités qui le tentèrent, par le besoin d’influer, par le talent d’exposer et d’enseigner, par un zèle aussi qu’on peut dire généreux à populariser la science, à en ouvrir à tous les voies et moyens, à en répandre et en propager les résultats généraux ou les applications utiles ; — Biot, esprit étendu, mais nature plus curieuse et plus déliée que riche et féconde, au sourire fin, à la lèvre mince, à la dent aiguë et mordante, dédaigneux du public sur lequel il avait peu de prise, jaloux de garder la science pour les seuls et vrais savants, pour ceux qu’il estimait dignes de ce nom. […] J’ai dit, en me faisant l’écho des voix les plus autorisées, que l’invention n’était pas son fort ; mais il était très curieux et très empressé a se porter du côté où s’annonçaient des découvertes nouvelles.

467. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

Mais il est curieux d’entrevoir l’intérieur des coulisses d’alors : l’abbé de Pradt, évidemment, causait beaucoup avec M. de Senfft, et pendant ce séjour même de Bayonne où il servait la politique de Napoléon, il la dénigrait et parlait contre dans le tête-à-tête ; l’ancien émigré, l’ancien constituant, le futur auteur de l’Ambassade de Varsovie, reparaissaient ou se révélaient en lui, et bouillonnaient, pétillaient, s’entrechoquaient pêle-mêle dans les apartés où il laissait son masque de courtisan. […] Pendant que M. de Senfft, à la veille de l’éclatant démenti de l’histoire, se montre ainsi à nous un peu la dupe des confidences de Fouché qui, évidemment (comme l’abbé de Pradt, et avec plus de malice), était entré dans ses vues, avait médit du pouvoir qu’il servait et ne s’était pas fait faute de gémir sur les folies du maître, il m’a paru curieux de citer une lettre de Napoléon adressée, vers ce temps, à son ministre de la police, et qui, dans sa sévérité encore indulgente, va droit au défaut de l’homme, rabat fort de cette haute idée trop complaisante et remet à son vrai point ce prétendu génie du duc d’Otrante, un génie avant tout d’ingérence audacieuse et d’intrigue.

468. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine »

Ce passage, qui avait été publié pour la première fois par un curieux bibliophile suisse, M.  […] Puis il terminait en disant (car il avait eu depuis peu des soupçons sur la fidélité de la poste, et il avait craint que quelque curieux ou malveillant ne s’immisçât pour intercepter la correspondance) : « Après de telles réflexions que vous faites, monsieur, et que vous me mettez en voie de faire aussi, voyez si je n’ai pas grand sujet de désirer que vos lettres me viennent en leur entier et que Dieu continue de me faire par vous, jusqu’à la fin de votre vie ou de la mienne, le bien qu’il a daigné me faire durant près de trente ans par feu monsieur votre frère, mon très-honoré père en Jésus-Christ et mon très-libéral bienfaiteur104.… » J’abrège un peu, car il le faut, mais j’ai toujours quelque regret, je l’avoue, à ne pas laisser les phrases de ces dignes gens dans toute leur longueur, afin de mieux respecter aussi l’intégrité de leurs sentiments.

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