Parmi ces lettres attribuées après coup à de grands hommes, et qui ne sont pas indignes d’eux par le talent et l’art, je n’ose compter les lettres fort nobles de Brutus à Cicéron ; elles méritent trop d’être vraies, et s’il y a moyen de continuer à les croire telles, tenons-nous-y. […] Cependant, tout en errant de porte en porte avec l’air d’abandon d’un mauvais sujet et là démarche incertaine d’un homme ivre, je me retrouvai tout à coup, sans le savoir, dans le marché aux comestibles… » Et quand, errant ainsi à travers la ville, il est venu à rencontrer une dame de qualité, Byrrhène, qui se trouve être une amie de sa famille ; quand cette dame, l’ayant conduit jusque chez elle et le voulant retenir pour hôte, essaye du moins de le mettre en garde contre l’hospitalité du vieux ladre chez qui il est descendu et dont la femme, lui dit-elle, est une magicienne du premier ordre et de la pire espèce, Lucius, à cette nouvelle inattendue, qu’il se trouve logé chez une magicienne, est saisi d’un plus violent désir de chercher précisément ce qu’on lui recommande defuir ; il ne sait que prendre, comme on dit, ses jambes à son cou pour courir de toutes ses forces au danger. […] D’abord révolté, récalcitrant, ruant et fort roué de coups, voulant parler et crier à tous ce qu’il est, ce qu’il a sur le cœur, et ne parvenant qu’à braire, puis soumis et résigné, il n’a pas tardé à s’apercevoir que le plus sage pour lui est encore de faire son métier d’âne en conscience ; peu à peu, la curiosité aidant, il y prend presque plaisir et trouve çà et là, pour prix de sa patience, de petits dédommagements, jusqu’à ce qu’à la fin son mérite singulier le tire du pair et qu’il devienne un âne savant et tout à fait célèbre, un âne à la mode, un âne à bonnes fortunes. […] Bétolaud, le traducteur habile d’Apulée et rapproché de la source, n’a point donné dans ces explications tourmentées et forgées après coup ; mais lui-même il n’a pu s’abstenir de sa supposition gratuite quand il a dit : « Sans doute ce mythe avait originairement, dans la tradition païenne, un sens bien certain et bien complet ; mais il avait été amplifié par différents auteurs, et insensiblement, la forme ayant prévalu sur le fond, ce ne fut plus qu’une espèce de conte fantastique… » Je ne crois pas que les choses se passent ainsi à l’égard de ces charmantes fleurs qu’on appelle les contes populaires ou les contes de fées.
Fior d’Aliza, venez avec moi pour qu’ils ne meurent pas sous le coup ; vous leur resterez, n’est-ce pas ? […] Elle se passa ainsi ; mais enfin nous entendîmes quatre coups du marteau de l’horloge du couvent voisin sonner les matines. […] Les soldats me mirent en joue ; à ce moment, le bourreau, qui était derrière moi, un peu à l’abri par un angle du mur, se jeta tout à coup sur moi, et, m’arrachant d’une main rapide et violente le capuchon et la robe de pénitent jusqu’à la ceinture, me découvrit presque nue aux yeux des soldats et de la foule. […] Le père et la tante écorçaient les châtaignes que les premières gelées avaient fait fendre sous les feuilles jaunies, et l’heureux Hyeronimo relevait avec de la terre légèrement mouillée le bourrelet de glaise durcie que l’été avait desséché sur le coup de hache des bûcherons, quand il avait donné sa vie pour la vie de l’arbre.
Tout à coup un chant s’élève du fond de la basilique, d’une chapelle qu’on ne voit pas, un chant d’enfant de chœur, à la fois grêle et velouté et comme ouaté par la distance. […] C’est assez pour amasser dans un cœur une douleur sans nom, dont chaque goutte devient un torrent, et que font éclater tout à coup d’épouvantables aveux, capables de compromettre et de briser des existences chéries. […] Ouvrez quelque part un cœur qui reçoit les confidences du pécheur fatigué de porter tout seul le fardeau de ses fautes : tout à coup il se fait comme un mystérieux échange, je dis plus, une mystérieuse aliénation. […] Il ne voit plus le sang épongé reparaître A l’heure ténébreuse où le coup fut donné.
En 1807, il eut à subir une révolution intérieure, un vrai coup d’État. […] Il faut convenir que celui qui sent de la sorte, quand il vient à porter un coup juste, doit l’assener vigoureusement. […] Dussault, qui venait de lui porter ce coup, était un bon humaniste aussi, mais moins foncièrement que Geoffroy. […] Le coup pourtant lui fut pénible et sensible, surtout à titre de procédé : ce fut la seule douleur de ses dernières années, si consolées d’ailleurs et si heureuses.
À partir de 1837 environ, sa main se gâta ; ses coups de pinceau devinrent plus heurtés, plus brisés dans leur énergie dernière. […] On serait tenté un moment de le croire, et même M. de Chateaubriand va, selon moi, trop loin quand il dit : « Nous étions bien stupides sans doute, mais du moins nous avions notre rapière au vent… » Cependant je tourne la page, et je vois qu’il semble prendre fait et cause pour l’émigration : « On crie maintenant contre les émigrés, dit-il ; à l’époque dont je parle, on s’en tenait aux vieux exemples, et l’honneur comptait autant que la patrie. » Encore un coup, avons-nous affaire à l’émigré convaincu et resté croyant à son droit, ou à l’émigré qui s’appelle lui-même stupide, et qui a l’air de se moquer de tout ce qu’il a enduré alors pour la plus grande gloire de la monarchie ? […] » Un très bon juge me disait à ce sujet, et je ne puis mieux faire que de rapporter ses paroles : « Quant au fond, M. de Chateaubriand se rappelle sans doute les faits, mais il semble avoir oublié quelque peu les impressions, ou du moins il les change, il y ajoute après coup ; il surcharge. […] L’imagination aussi vient trop fréquemment chez lui gâter le plaisir, celui même qu’elle nous a fait ; une imagination imprévue, bizarre, exorbitante, grandiose certes et enchanteresse souvent, retrouvant à souhait jeunesse et fraîcheur, mais inégale, saccadée, pleine de brusqueries et de cahotements : le vent tout à coup saute, et l’on est à l’autre bout de l’horizon.
Mme du Châtelet soupçonne que cette menace pourrait bien avoir été un coup monté contre elle, pour effrayer Voltaire, pour l’éloigner et déconcerter leur bonheur. On voit dans chacune de ses lettres combien elle se méfie de la sagesse du poète quand il est loin d’elle, abandonné sans conseil à toutes ses irritations, à ses premiers mouvements et à ses pétulances : « Croyez-moi, dit-elle à d’Argental, ne le laissez pas longtemps en Hollande ; il sera sage les premiers temps, mais souvenez-vous Qu’il est peu de vertus qui résistent sans cesse. » Si elle avait lu La Fontaine autant que Newton, elle citerait, pour le coup, ces vers charmants du bonhomme, qui vont si bien à Voltaire et à toute la race : Puis fiez-vous à rimeur qui répond D’un seul moment ! […] Au souffle d’une passion imprévue, on dirait que cette âme, longtemps contrainte, renaît tout à coup et se réjouit ; elle recommence. […] Il fut près de faire un coup de tête.
Tout y fermente, il y a chaos ; chaque coup de soleil y fait orage. […] Et, loin de s’abattre et de maudire le sort de l’avoir fait naître en un âge si orageux, il s’en félicite tout à coup : « Sachons gré au sort de nous avoir fait vivre en un siècle non mol, languissant ni oisif. » Puisque la curiosité des sages va chercher dans le passé les confusions des États pour y étudier les secrets de l’histoire et, comme nous dirions, la physiologie du corps social à nu : « Ainsi fait ma curiosité, nous déclare-t-il, que je m’agrée aucunement de voir de mes yeux ce notable spectacle de notre mort publique, ses symptômes et sa forme ; et, puisque je ne la puis retarder, je suis content d’être destiné à y assister et m’en instruire. » Je ne me permettrai pas de proposer à beaucoup de personnes une consolation de ce genre ; la plupart des hommes n’ont pas de ces curiosités héroïques et acharnées, telles qu’en eurent Empédocle et Pline l’Ancien, ces deux curieux intrépides qui allaient droit aux volcans et aux bouleversements de la nature pour les examiner de plus près, au risque de s’y abîmer et d’y périr. […] Dans le chapitre « Des menteurs », par exemple, après s’être étendu en commençant sur son défaut de mémoire, et avoir déduit les raisons diverses qu’il a de s’en consoler, il ajoutera tout à coup cette raison jeune et charmante : « D’autre part (grâce à cette faculté d’oubli), les lieux et les livres que je revois me rient toujours d’une fraîche nouvelleté. » C’est ainsi que, sur tous les propos qu’il touche, il recommence sans cesse, et fait jaillir des sources de fraîcheur. […] Ce style bref, mâle, qui frappe à tout coup, qui enfonce et qui redouble le sens par le trait, ce style duquel on peut dire qu’il est une épigramme continuelle, ou une métaphore toujours renaissante, n’a été employé chez nous avec succès qu’une seule fois, et c’est sous la plume de Montaigne.
Mariée à dix-sept ans au duc d’Alençon, prince insignifiant, elle gardait tout son dévouement et toute son âme pour son frère ; aussi, lorsqu’à la dixième année du règne arriva le désastre de Pavie (25 février 1525), et que Marguerite et sa mère apprirent la destruction de l’armée française et la captivité de leur roi, on conçoit le coup qu’elles reçurent. […] Ce sage monarque de la littérature, ce véritable empereur de la latinité à son époque, choisissant pour consoler Marguerite le moment où elle était sous le coup du désastre de Pavie, lui écrivait : Il y a longtemps que j’ai admiré et aimé en vous tant de dons éminents de Dieu, une prudence digne même d’un philosophe, la chasteté, la modération, la piété, une force d’âme invincible, et un merveilleux mépris de toutes les choses périssables. […] Le joli petit roman de Jehan de Saintré, où l’idéal chevaleresque se peint encore au début dans ce qu’il a de plus mignon, et qui prétend offrir un petit code en action de la politesse, de la courtoisie, de la galanterie, en un mot de l’éducation complète d’un jeune écuyer du temps, ce joli roman est rempli aussi de préceptes pédantesques, d’articles d’un cérémonial minutieux, et, vers la fin, il tourne tout à coup à la grossièreté sensuelle et au triomphe du moine selon Rabelais. […] Le beau moment est celui où, par une inclinaison soudaine de la saison, les lumières et l’esprit se répandant tout d’un coup d’une manière plus riche et plus égale sur toute une génération d’esprits vigoureux, l’on revient vivement au naturel et où l’on peut s’y abandonner sans contrainte.
Il n’y a pas jusqu’aux circonstances de leur publicité qui n’aient porté bonheur aux Mémoires du duc de Saint-Simon et fait faire coup double à leur renommée. […] Et cependant, ne nous y trompons pas, ni le talent qui est suprême en ces Mémoires, — qui va jusqu’au génie, quand il ne s’agit que de peindre, mais qui n’y va pas, quand il s’agit de juger, — ni le sujet de ce récit, grand, varié, et pour nous, les démocrates du xixe siècle, déjà merveilleux comme une lointaine épopée, ni les hasards d’une publication qui a aiguisé le goût public et l’a fait attendre avant de le satisfaire, ni même, ce que nous ne comptions pas tout d’abord, la rareté des livres sur le siècle de Louis XIV, rareté étonnante et qui vient de la peur qu’inspirait Voltaire, lequel l’avait pris pour sa part de lion et faisait trembler d’y toucher les superstitieux de son génie, ne peuvent suffisamment expliquer l’amour que Saint-Simon, presque inconnu, presque dédaigné au xviiie siècle, a trouvé tout à coup parmi nous. […] Des improvisateurs de progrès, de fulminants ouvriers de révolutions, qui en soixante-six ans en ont dépêché six, ne comprennent pas plus, ne doivent pas plus comprendre que ce frondeur en retard, tombé après coup dans la monarchie de Richelieu, parachevée par Louis XIV, ce rayonnement de l’autorité unitaire qui calme et rassied les nations. […] Ou c’est la plus complète fermeture aux choses du gouvernement, ou c’est du puritanisme raccourci, un sens moral épais qui bouche le cerveau et la vue, et dans les deux cas, c’est l’homme politique des Mémoires qui reste sur la place, mort du coup !
Cela pourrait-il être une raison, parce que l’auteur des Jugements nouveaux nous a exprimé, à la tête de son livre, une franche sympathie d’idées et de sentiments littéraires, pour que la critique, qu’il a la bonté d’estimer, lui manque tout à coup, et qu’il soit privé de sa part d’examen sous le prétexte, de peu de courage, que notre éloge serait suspect de reconnaissance et notre blâme d’ingratitude ? […] Encore un coup d’aile dans cette voie, encore un bout d’ascension dans cette profondeur de ciel, et la critique était arrivée, je ne dis pas à sa vérité de fait et de découverte, — car Aubryet peut se tromper et même il se trompe quelquefois dans l’idée générale qu’il dégage d’un homme ou d’une œuvre pour le faire mieux ressortir sur ce fond de lumière, — mais elle était arrivée à sa vérité d’essence et de direction. […] Enfin, je l’ai déjà comparé à madame de Staël, mais c’est une madame de Staël changée en un Roméo littéraire qui serait très bien monté au balcon de l’autre, et que l’autre madame de Staël — la non transformée — aurait préféré pour la vitalité, la verve et toutes les diableries de l’expression, à ce sceptique blond de Benjamin, ce nom fade et faux qui sent le benjoin, tandis qu’il y a comme un coup de cymbale dans le nom tintant et frémissant de Xavier, qui sonne, pour Aubryet, comme un écho de son esprit ! […] Il n’a pas tout à fait l’humeur brusque d’Alceste, ni ses colères sanguines, ni ses coups de boutoir, ni même ses boutades.
En France, un homme qui a manqué son coup ne s’appelle jamais qu’un homme malheureux… Or, l’essayisme anglais n’est pas une infortune. […] VII Ainsi, Macaulay n’est pas seulement un homme de talent qui se lève tout à coup dans le xixe siècle, et qui, plus heureux que les hommes de talent ne le sont d’ordinaire, y prend sa place sans attendre, c’est de plus une influence certaine dans l’histoire de la Critique et de ses progrès. […] Doué de l’imagination la plus opulente, qui saisit et reproduit avec éclat toutes les analogies et toutes les différences, puissant par la vaste étendue de l’esprit et par une étendue non moins vaste de connaissances, Macaulay pourrait être regardé comme un critique complet s’il avait le jugement souverain, qui est le coup de hache définitif et mérité par lequel le critique ressemble à l’homme d’État, et dont l’un ne peut pas plus se passer que l’autre. […] Né d’un père très riche, il débuta par le coup de tonnerre de son article sur Milton dans la Revue d’Édimbourg, qui ouvrit toutes les portes à son ambition éveillée.
Voilà que tout à coup quelque chose s’en vint de Bretagne, un chant, — simple, avant tout, agreste et triste aussi ; car la poésie moderne, même celle qui vit aux champs et qui les aime, est vouée à d’indicibles et fatales tristesses. […] Ce n’est pas même là le Brizeux auquel on s’attendait ; Brizeux le Brisé, brisé de cœur, de voix, de rythme, de talent aussi, car son talent éclate parfois tout à coup et se brise dans une fêlure. […] Brizeux avait enlevé celle de ce poème, avec une grande légèreté de main, au monde du sentiment et au monde de la sensation, mais ni l’un ni l’autre de ces deux mondes n’y avaient été exprimés de manière à porter dans les esprits, où il éveille d’immortels échos, ce violent coup de l’originalité qui est comme la détonation du génie ! […] Malheureusement, pourquoi faut-il que dans cette idylle élégiaque de Marie l’unité de sentiment ne soit pas plus respectée que l’unité de composition, et qu’entre deux tableaux d’un amour naïf, dans un pays fruste, il nous tombe tout à coup sur la tête un Hymne à la Beauté, dédié à M.
Mais voici le tour piquant qui commence, et le bel esprit enjoué qui va se mêler jusque dans la mysticité religieuse : elle va faire semblant tout d’un coup de s’être méprise, d’avoir à se rétracter, et tout ce que M. […] le coup était porté : Mme de Sablé voulait quitter Port-Royal pour ne pas gêner, disait-elle, puisqu’on n’avait pas d’autre lieu, et aussi pour ne pas rester exposée aux atteintes. […] Celui-ci, ancien chevalier de Malte, brave guerrier, duelliste, frondeur, donnant des collations aux dames, s’était tout d’un coup retiré, après être devenu veuf, et s’était fait arranger un corps de logis près de Mme de Sablé dans les dehors de Port-Royal de Paris.
Octave s’en aperçoit, les interroge, découvre la souffrance de Brigitte, reconnaît que tant de coups qu’il lui a portés ont tué en elle cet amour où elle ne voit plus qu’un devoir. […] Plus tard, il y a un moment où tout d’un coup, à propos d’une grande promenade nocturne, nous découvrons que Mme Pierson, pour ces longues courses, prend une blouse bleue et des habits d’homme. […] Bien des paillettes pourtant, placées çà et là, annoncent le cousinage de Crébillon fils, de même que des métaphores un peu franches, qui se dressent tout à coup, attestent le culte enflammé du grand Shakspeare.
C’est la ruade et l’étincelle, Le coup de poing et le coup d’aile ; Ça fredonne, même en ronflant. […] Ces Idylles prussiennes, sur lesquelles je veux particulièrement insister, ne sont pas seulement les plus belles poésies du volume, mais elles portent avec elles un caractère de nouveauté si peu attendu et si étonnant, qu’en vérité on peut tout croire de la puissance d’un poète qui, après trente ans de la vie poétique de la plus stricte unité, apparaît poète tout à coup dans un tout autre ordre de sentiments et d’idées, — et poète, comme certainement jusque-là il ne l’avait jamais été ! […] mais j’aime mieux l’y voir rire que de l’y voir gambader… Nous arrivons à ces Idylles prussiennes qui ont fait tout à coup surgir de Banville comme un Banville qu’on ne connaissait pas… Toutes les pièces de ce recueil d’Idylles sont superbes et d’un pathétique d’autant plus grand que le désespoir y est plus fort que l’espérance ; qu’il y a bien ici, à quelques rares moments, des volontés, des redressements et des enragements d’espérance, mais tout cela a l’air de s’étouffer dans le cœur et la voix du poète, et on épouse sa sensation… Les hommes sont si faibles et ont tant besoin d’espérer, que c’est peut-être ce qui a fait un tort relatif aux Idylles prussiennes de M.
Ce qui n’avait été qu’à l’état de haute aspiration personnelle, dans Mme de Staël, prit tout à coup, sous l’action du saint-simonisme, l’impérieuse généralité et la décision incisive du dogme. […] En posant la thèse de l’Égalité entre les époux, implicitement, du même coup, Mme Sand appelait toutes les autres égalités. […] Ce fut à dater des romans de Sand qu’on vit pulluler toutes sortes de livres en prose et en vers, écrits par des plumes féminines sur l’inégalité des conditions entre l’homme et la femme, et que le bas-bleu apparut, — le véritable bas-bleu, bien autrement foncé qu’en Angleterre, où le mariage, — une sauvegarde contre le bas-bleuisme, — est resté en honneur et où le mari s’appelle Lord encore… Comme il est beaucoup plus aisé de changer d’habit que de sexe, jamais, autant qu’en ce temps-là, on ne vit plus de femmes en habit d’homme, comme l’avait fait Mme George Sand, dont la redingote de velours noir, illustrée par Calamata, fut célèbre et qui s’appela longtemps George Sand tout court (le voyou, comme elle le disait elle-même dans ses Lettres d’un Voyageur) ; George Sand qui devait redevenir Mme Sand et presque Mme Dudevant dans sa vieillesse, — quand le terrible coup de locomotive de la vieillesse passe sur toutes les prétentions et les rafle, et qu’on acquiert la preuve alors qu’on n’était, de toute éternité, qu’une femme et que l’homme qu’on croyait faire n’a jamais dépassé le gamin !
Theiner, avec son histoire, serait de moitié dans le coup… Nous ne sommes pas tellement loin de la révolution française, de la révolution romaine et de toutes les autres révolutions qui ont fait ressembler l’Europe à la terre rompue d’un volcan, pour que la supposition d’un tel fait puisse être traitée de peur chimérique. […] Leurs missions par tout l’univers, leurs conquêtes, leurs miracles, leur enseignement, leurs travaux de savants et d’apôtres, et, on peut le dire de cet ordre si profondément unitaire et qui donna au monde un modèle de gouvernement que l’ancienne Rome n’avait pas égalé, leur génie collectif, retrempé sans cesse aux sources de l’obéissance, auraient dû les préserver, à ce qu’il semblait, des coups d’un pouvoir qu’ils n’avaient jamais pensé qu’à défendre. […] Faute si grande, qu’il n’importe guères à présent de savoir au juste si le pontife agit par haine ou bien sans haine ; car une pareille faute, au bout d’un certain temps, fait toujours équation à un crime, et le temps à attendre où le crime qui ne s’était pas nettement dressé dans la conscience de Clément XIV a surgi, tout à coup, évident dans la conscience des hommes, ce temps à attendre n’a pas été long !
Inconnu et sans précédents littéraires, l’auteur s’est trouvé tout à coup célèbre. […] A coup sûr, M. […] Flaubert, qui doit être, sauf erreur, un incrédule, nous montre à travers un curé ridicule et stupide, rencontre au spectacle, où son mari la mène pour la distraire, ce jeune homme aimé et désiré autrefois ; et alors tous deux, ayant cessé d’être novices, se reprennent tout à coup l’un à l’autre avec la fureur du regret de ne s’être pas saisis plus tôt !
Sous le coup des vents la mer est bouleversée, elle, quand rien ne l’agite, la plus uniforme de toutes les choses. […] Lorsque, tombant au premier rang, il a perdu la vie, il comble de gloire la ville, ses concitoyens et son père ; car, à travers la poitrine, le bouclier et la cuirasse, il est percé de coups par devant. […] Que de sa dextre il darde les coups impétueux de sa lance, et qu’il agite sur sa tête une menaçante aigrette !
Leur cœur bat plus fort que le nôtre, et souvent à coups désordonnés. […] S’ils ont un bloc ou un carton sous la main, rapidement ils y lanceront quelques coups de pinceau. […] D’un coup de crayon il trace une silhouette. […] On ne trouve pas l’idéal du beau d’un coup de génie, pas plus qu’on ne fait une statue d’un coup de pouce. […] Le coup de crayon n’est pas le même : il est plus hardi, plus net, plus impérieux.
Puis, d’un seul geste en coup de fouet, elle lui sabra le visage de son ombrelle, qui se brisa en deux, lacérant la peau qui saigna. […] — Tout à coup, dans la nuit, un violon lointain Chanta. […] Enfin, tout le coteau fut sillonné d’un zigzag de flamme, pareil à ces coups de foudre qu’on voit tomber du ciel noir, dans les images. […] Les soldats le virent tombant droit à côté de l’étendard, demeurant un moment comme planté au sol après ce bond dans le vide, puis, tout à coup, chancelant. […] Mais nous ne sûmes cela qu’après coup ; nous ne sûmes également qu’après coup que l’instrument du crime était une machine.
Et du coup, naissent la chevalerie et les cours d’amour. […] Non pour le plaisir et par caprice d’artiste, mais pour qu’elle éblouisse et qu’elle porte coup. […] Peu s’en faut qu’il ne pardonne à Camille Desmoulins son Vieux Cordelier, en considération de certaines pages d’âpre invective, de quelques coups de plume qui « déchiquètent et ressemblent à des coups de couteau ». […] Et, quelques jours après, l’avocat chambérien, traîtreusement attiré dans une impasse par un camarade du gentilhomme d’outre-monts, se voit tout à coup entouré d’ordonnances qui lui administrent une volée de coups de fouet. […] Malgré les coups de soleil provençal qui traversent son style, Joseph de Maistre est un Savoyard authentique.
Que ces disparitions réitérées, ces coups mystérieux qui frappent comme à dessein des groupes révérés, des génies au faîte, les derniers chefs d’un mouvement accompli ; que tous ces coups soient autant d’avertissements religieux aux générations nouvelles pour se hâter, pour se serrer dans les voies où elles marchent et où elles n’ont bientôt plus de guides qu’elles-mêmes !
Mais il fait preuve surtout de résolution et d’audace lorsqu’à bord du Vétéran, en route pour la Martinique, dans l’escadre de l’amiral Willaumez, séparé tout d’un coup de l’escadre par une tempête, rejeté vers les côtes de France, serré de près par l’amiral Keith, il se détermine à tout plutôt que d’admettre qu’il puisse amener son pavillon. […] On réussit, on entre, on a échappé par ce coup hardi à l’escadre anglaise qui se croyait assurée de sa capture.
Et d’ailleurs si, dans l’appréciation des œuvres des poètes, il fallait tenir compte de leurs vertus civiques, Lamartine opposant son corps à l’émeute triomphante et la domptant par sa parole, ferait presque aussi bonne figure, je pense, que Victor Hugo au lendemain du coup d’Etat. […] « En peignant ainsi la nature à grands traits et par masses, en s’attachant aux vastes bruits, aux grandes herbes, aux larges feuillages, et en jetant au milieu de cette scène indéfinie et sous ces horizons immenses tout ce qu’il y a de plus vrai, de plus tendre et de plus religieux dans la mélancolie humaine, Lamartine a obtenu du premier coup des effets d’une simplicité sublime, et a fait, une fois pour toutes, ce qui n’était qu’une seule fois possible. » Loué soit-il à jamais !
Un paysan inconnu combattait à côté de lui, armé d’un manche de charrue dont il frappait les ennemis ; à chaque coup, il traçait autour de lui un cercle de morts. […] On composa donc avec Artémis ; au lieu de six mille abattues d’un coup, il fut décidé que cinq cents chèvres lui seraient sacrifiées chaque année.
Mais que nous le disions, nous, ici, que nous disions tristement, car c’est une chose fort triste, que l’intelligence de tout un pays est en danger de s’atrophier sous les sensations dont on l’enivre depuis trente années, et que déjà ce qu’il y avait dans cette intelligence de plus charmant, de plus fin et de plus sonore, — l’esprit, ce chant et ce coup de bec du colibri ! […] Pour lui, c’était un coup d’État… ou d’éclat, de ranger autour de sa personne toute la littérature, — foule de satellites dont il serait le soleil !
Tout à coup, un homme sort d’une chapelle. […] Sa cruauté est simple et directe comme un coup de couteau. […] Et Blanche… sentez-vous venir le coup ? […] tout cela, on ne s’en aperçoit qu’après coup, à la réflexion. […] ceux qu’on envoie d’un coup d’éventail !
Nous abandonnerions volontiers la mêlée après avoir reçu un coup d’épingle ; ils y recevaient sans déserter des coups de poignard. […] S’il fut sifflé à Limoges, le coup dut, il est vrai, lui être sensible. […] Mais, encore un coup, que Molière dépasse ceux qu’il imite ! […] C’est tout au plus s’il ne roua point la Guérin de coups, comme Lauzun battait la grande Mademoiselle. […] Qu’est-ce que ces piqûres d’épingle comparées aux coups de couteau empoisonnés que reçut Molière ?
Tout à coup… . […] Tout à coup, M. […] Tout à coup il devient pâle, la sueur mouille son visage, il frappe du poing. […] On ne l’obtient pas du premier coup. […] Cette passion comprimée, presque inavouée, éclate tout à coup.
C’est le quartier-général, en effet, la discipline seule qui de bonne heure a manqué à ces recrues généreuses et faciles, à ces ardentes levées de bande qui eurent leur coup de collier chacune, mais qui, trop vite, la plupart, ont plié. […] J’ajourne pour un instant les échappées politiques : littérairement on le possède dès ce moment-là, d’une manière complète et circonstanciée, dans quelques petits ouvrages de lui qui furent conçus sous ces coups de soleil ardents, sous ces premières lunes sanglantes et bizarres. […] Toujours mêmes couleurs éparses, mêmes complaintes égarées, même affreuse catastrophe, L’inconnu, auteur supposé des Tristes, se tue d’un coup de lime au cœur, comme Charles Munster (le peintre de Saltzbourg) se noyait dans le Danube, comme Gaston dans Adéle se fait, je crois, sauter la tête. […] Nodier y connut beaucoup Benjamin Constant, qui avait à Dôle une partie de sa famille : leurs esprits souples et brillants, leurs sensibilités promptes et à demi brisées devaient du premier coup s’enlacer et se convenir. […] On l’a vu, vingt ans auparavant, le plus matinal au téméraire assaut et séparé tout d’un coup de ceux-là, à jamais inconnus, qui probablement eussent aidé et succédé.
Dans un coin un voyageur ramollit sa chaussure à coups de maillet. […] Un bord de rivière où une femme à la clarté de la lune blanchit avec son garçonnet de la toile, à grands coups de battoir. […] Des dessins de premier coup, de la brutalité la plus savante, faisant mépriser le joli et le fini du petit art. […] Dessin de premier coup, fait avec un nuage d’aquarelle. […] Kakémono ironique, enlevé par les rapides coups d’un pinceau chargé d’encre de Chine, avec quelques tons de chair dans la tête du Darma.