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661. (1890) Nouvelles questions de critique

C’est ce que l’on pourrait discuter ; et c’est en tout cas ce que l’on ne pourrait dire sans commencer par définir ce que l’on entend sous ce mot de sincérité. […] Dans l’histoire de toutes les langues, l’histoire de la littérature commence avec l’histoire de l’art d’écrire, et c’est celle des victoires du talent sur l’érudition. […] On s’en ressouvint quand les artistes eurent commencé de le dire. […] Grâce à lui, ce que le théâtre avait commencé, le roman l’acheva. […] J’aime donc mieux finir comme j’ai commencé, et, après avoir montré à M. 

662. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

Ils commencent par demander un prix assez élevé d’un seul objet, et ils finissent par en laisser quatre ou cinq pour la même somme. […] Il commence par des considérations sur le rôle de la critique, qui seront toujours actuelles. […] Je commence à prendre gaiement ce malheur. […] Les boutiques, les cafés commençaient à s’illuminer, quelques rares réverbères brillaient déjà. […] Depuis l’aube jusqu’à l’aurore où le hibou commence à ululer, il consulte ses livres.

663. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre I. De l’évolution de la vie. Mécanisme et finalité »

Nous ne saurions en revivre une parcelle, car il faudrait commencer par effacer le souvenir de tout ce qui a suivi. […] Ces dernières commencent par le dédoublement du centrosome, petit corps sphérique situé à côté du noyau. […]commence alors, où finit le principe vital de l’individu ? […] Or, pour agir, nous commençons par nous proposer un but ; nous faisons un plan, puis nous passons au détail du mécanisme qui le réalisera. […] Mais ici commence précisément la difficulté.

664. (1886) Le roman russe pp. -351

Le siècle commence toujours pour ceux qui ont vingt ans. […] Biélinsky déclara aussitôt que l’âge de la poésie lyrique était passé sans retour, et que le règne du roman commençait. […] À l’âge où d’autres commencent leur tâche, il terminait la sienne ; la rapide usure de l’homme russe avait triomphé de lui. […] La terre noire commence ; elle allonge à l’infini des plaines ses gras labours, changés l’été en mer de froment. […] Après Terres vierges, le repos du déclin commença.

665. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

Parfois il lui arrive de ne pas terminer un vers commencé. […] Il commence le Louvre, bâtit les châteaux de Fontainebleau, de Chambord et de Madrid. […] Il commence par avouer son ignorance ; mais son aveu le met à l’aise. […] La discussion, une fois commencée, ne s’arrête plus. […] Sténio commence à soupçonner la profondeur de l’abîme qu’il a voulu sonder.

666. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Il va d’un primitif qui n’a jamais commencé à un définitif qui ne finira jamais. […] à l’égard de Méry je commence à avoir de la méfiance. […] Le dualisme a vécu, l’unité peut commencer. […] C’était là que les difficultés commençaient. […] Il suit un mouvement commencé bien avant lui.

667. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Arvède Barine a commencé de faire dans le sien ; c’est enfin ce que M.  […] N’est-ce pas aussi bien où il faut que l’art aboutisse, quand on commence par poser en principe qu’il doit se suffire à lui-même ? […] Paul Verlaine ont commencé par suivre assez docilement ses traces. […] Gumplowicz, et, pour la mieux résoudre, il commence par la transformer. […] La presse a fait beaucoup de bien, elle en fait même tous les jours encore ; et je commencerais par le déclarer.

668. (1894) Études littéraires : seizième siècle

C’est ici pour lui que le mystère commence. […] Les écrivains antiques ont commencé par rendre d’assez mauvais services aux nôtres. […] C’est là que commença une amitié qui devait être de toute la vie. […] Ils aiment une antiquité d’abord facile et de commence commode. […] Personne n’est moins dogmatique que Montaigne qui a commencé ses études à quatre ans, pour ne pas dire à six mois ; personne n’est plus dogmatique que Rousseau qui a commencé les siennes vers la quarantaine.

669. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

C’est alors que commence le roman. […] On commence par lui. […] « La communion commençait ! […] Il commençait à suivre la route inconnue, sans but, sans retour probable. […] On le voit commencer sa carrière militaire.

670. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

Les conquérants du Nouveau-Monde commencèrent par s’emparer du cœur des Sévillanes. […] C’est vers ce temps qu’il commença d’écrire. […] Les femmes commencent à écouter les dangereuses confidences des romanciers et des poètes. […] Il commença par être élève de l’École des chartes. […] Borel, éditeur ingénieux et hardi, pense, avec raison, qu’en toutes choses il faut commencer par le commencement.

671. (1887) Essais sur l’école romantique

Sont-ce des institutions qu’on commence, ou seulement des ruines qu’on n’achève pas ? […] Je ne comprenais plus les livres que j’avais aimés, et je commençais à aimer les livres que je n’avais pas encore compris. […] Malheur donc à tous ceux dont la province commence à dire : « Ils sont amusants !  […] C’est contre ces trois branches de la littérature facile que la réaction commence, et félicitons-en tout le monde. […] Mais la critique qui se nomme est devenue sévère ; les plus indulgents et les plus engagés commencent à regimber.

672. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

Et, pour commencer, M.  […] Il a commencé par faire connaître les diverses sortes de caractères et la manière de les fabriquer. […] L’étude des premiers est toujours excellente, mais le modèle à costume commence à devenir fatigant dans les tableaux modernes. […] Il a commencé un prélude à des thèmes plus amples. […] Crawford, dans sa très intéressante préface, revendique pour les Finlandais le mérite d’avoir commencé, avant toute autre nation européenne, à recueillir et conserver leur antique folklore.

673. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1892 » pp. 3-94

Très câline, avec une note blagueuse dans la voix, elle commence par me dire que le premier dessin qu’elle a fait, a été une copie d’un dessin de mon frère. […] Une brise s’élève, et les fruits commencent à tomber. […] Alors, devenu plus grand je commençai à perdre la petite appréhension timide, que j’éprouvais aux côtés de ma tante, je commençai à me familiariser avec sa douce gravité et son sérieux sourire, remportant au collège des heures passées près d’elle, sans pouvoir me l’expliquer, des impressions plus profondes, plus durables, plus captivantes, toute la semaine, que celles que je recevais ailleurs. […] À une heure, je suis au Gymnase, où Méténier commence la lecture de Charles Demailly. […] La collation des rôles commencée, Koning est, tout le temps, avec une obstination qui porte sur les nerfs, à trouver le mari, trop dur, trop mal élevé, laissant clairement voir son intention de chercher par des atténuations imbéciles, à faire de cette femme sans cœur et sans esprit, un rôle sympathique.

674. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (3e partie) » pp. 249-336

« Comme un fleuve qui a commencé à percer une digue l’emporte bientôt tout entière, la masse de nos escadrons, ayant une fois entamé l’infanterie des Russes, achève en peu d’instants de renverser leur première ligne. […] La bataille commencée, interrompue, reprise trois fois avec un courage indomptable, mais avec une imprévoyance fatale, est trois fois suspendue par la crue des eaux du Danube et par la rupture des ponts. […] ” « La malveillance, qui commençait à se déchaîner contre Napoléon, et qu’il n’avait, hélas ! […] Thiers, ici aussi sévère que le destin, prend en pitié l’homme politique et commence à douter du génie au spectacle de tant de démence. […] On avait lu aux troupes, qui étaient pleines d’ardeur, une proclamation courte et énergique, conçue dans les termes suivants : « “Soldats, la seconde guerre de Pologne est commencée…” » « Ainsi le sort en était jeté !

675. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

VII Ce volume commence par une des épîtres les plus éthérées de la littérature française. […] Né à Mantoue, n’ayant eu d’autre maître de poésie que la nature agreste de la Lombardie, il commence tout jeune ses Églogues, qui sont aussi ses chefs-d’œuvre. […] C’est par Théocrite, en ami des champs, qu’il commença. […] n’avais-je pas ouï dire (c’est l’un des bergers qui parle) que depuis l’endroit où les collines commencent à s’incliner en douce pente, jusqu’au bord de la rivière et jusqu’à ces vieux hêtres dont le faîte est rompu, votre Ménalque, grâce à la beauté de ses chansons, avait su conserver tout ce domaine ?  […] En partant de ce lieu pour aller à Mantoue, lorsqu’on arrivait à l’endroit où le Mincio s’étend en un lac uni, on était à mi-chemin ; c’est ce que nous apprend le Lycidas de la neuvième églogue, en s’adressant au vieux Mœris, qu’il invite à chanter : “Vois, le lac est là immobile, qui te fait silence ; tous les murmures des vents sont tombés ; d’ici, nous sommes déjà à moitié du chemin, car on commence à apercevoir le tombeau de Bianor.”

676. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre quatrième. L’idée du temps, sa genèse et son action »

Voilà deux vers qui commencent par le même hémistiche : Regrettez-vous le temps… Comment se fait-il que je termine le second en ajoutant : où nos vieilles romances, au lieu de le terminer comme le premier en ajoutant : où le ciel sur la terre ? […] Le besoin, l’appétit est un effort et un mouvement commencé pour traverser un intervalle. […] La perception de la gravure commençait de diminuer en intensité lorsque est venue la sensation du vent, et cette perception de la gravure, avec le degré précis d’intensité qu’elle avait à ce moment, s’est fondue dans la conscience avec la sensation nouvelle et forte du vent. […] Il y a là, avec une lutte mécanique de tendances, de mouvements commencés et arrêtés, une lutte logique d’idées. […] On ne commence pas par concevoir une sorte de temps spirituel et mental : le temps est d’abord une perspective d’images sensibles disposées par rapport à nous dans un ordre particulier, qui d’ailleurs n’est pas la juxtaposition spatiale ; la série temporelle n’en est pas moins composée d’une suite de tableaux dans l’espace.

677. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

Puis aussitôt commence le défilé des cent vingt-cinq gouaches, dont Tissot fait le boniment à voix basse, comme on parle dans une église, avec parfois, détonnant dans sa parole religieuse, des mots d’argot parisiens, disant d’une étude de la Madeleine encore pécheresse : « Vous voyez, elle est un peu vannée !  […] Je lui ai écrit à propos de la pièce de Monsieur Betsy, de Paul Alexis, qu’elle se refuse à jouer, et au sujet d’une très jolie étude de sa personne, commencée par Tissot, et qu’il va remonter au grenier, si elle ne revient pas poser. […] Ils commencent par avoir la religion d’un ton, par exemple feuille de rose dans du lait (Boucher) ; peau de lièvre (Chardin) ; lie de vin (Delacroix). […] On peut commencer n’importe quelle histoire, elle vous donnera immédiatement la réplique. […] Et nous allons, Ajalbert et moi, très nerveux prendre un verre de chartreuse, au café voisin, où je dis à l’auteur de la pièce : « Avec ce public, n’en doutez pas un moment, le premier acte va être emboîté, et la seule chance que nous puissions avoir, c’est qu’Antoine relève la pièce au second acte. » Au lever de la toile, je suis au fond d’une baignoire, où j’ai devant moi, des jeunes gens qui commencent à pousser des oh !

678. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

On commença par le vague et on finit par le triste. […] On publie, en le scindant, un livre qui devait être fini dans la pensée de l’auteur quand il a commencé de l’écrire, et par là on embarrasse mortellement la Critique, qui, pour juger une œuvre, doit l’étreindre toute dans la profondeur de son unité et la précision accomplie de son contour. […] Et si celui-là continue son livre comme il l’a commencé, il fera un délicieux roman, et probablement le plus délicieux qui soit jamais sorti de sa plume. […] Seul, l’auteur pourrait répondre à cette question, et révéler le mystère d’une composition qui, comme toute composition, a son mystère, et où deux histoires vraies peuvent s’entrelacer et se fondre, comme dans beaucoup de romans et de poèmes, pour n’en faire qu’une, sans que l’on sache bien où l’une de ces histoires finit et où l’autre commence. […] Ce n’en est pas une, puisqu’on n’a pas marché, que le récit, qui commence le roman à venir et finit le volume actuel, de cette mort d’un père pénétrant des premières impressions chrétiennes l’âme d’un enfant qui les retrouvera un jour dans son âme et qui redeviendra chrétien.

679. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Le premier acte commence à 11 heures du matin ; le deuxième suit immédiatement, et le troisième se passe à 5 heures du soir. […] Le premier commence au soir, le deuxième le lendemain matin à 10 heures, et le troisième vers 5 heures de l’après-midi. […] Le premier commence tard dans la soirée, le deuxième remplit la matinée du lendemain et le troisième suit immédiatement. […] Le premier acte commence la veille de Noël, au soir ; le deuxième, dans l’après-midi du lendemain, et le troisième un jour après, au soir. […] Le drame commence au soir et dure environ quatre heures, le temps de la représentation.

680. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

À dater de ce jour, commença mon initiation à l’école romantique des poètes. […] Véron, et j’y commençai la série de mes Lundis, que j’y continuai sans interruption pendant trois ans jusqu’à la fin de 1852. […] « Cher Monsieur, « Je commence à m’acquitter et je me mets sans plus différer à vous donner le canevas le plus exact de ma biographie et de ma bibliographie. […] Le docteur Véron lui proposa immédiatement de commencer dans le journal le Constitutionnel qu’il dirigeait une série d’articles littéraires paraissant tous les lundis. […] Avec Virgile, nous rentrons dans l’un des goûts de prédilection de toute sa vie et qui avaient commencé au collège : Homère, Virgile, Racine, Lamartine. — Lamartine !

681. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre I. De l’action »

Tout d’abord il est frappé du « portrait fidèle » par lequel commence le récit. […] Car, comme de nous-mêmes nous ne sommes capables que de mal faire, sans leur secours nous ne saurions faire du bien. » (L’idée est vraie, le barbare commence bien, il n’y a qu’un moyen de parler d’un ton supérieur à un plus puissant que soi, c’est de prendre son appui sur un plus puissant que lui. […] La Fontaine bâille, cesse de lire et commence à feuilleter.) […] Il ne salue pas, comme dans Cassandre ; du premier coup, il prend l’ascendant, « le sénat est là pour l’écouter. » Il n’amplifie pas comme Cassandre ; son premier mot commence un raisonnement serré qui va droit jusqu’à la menace. […] Ce discours un peu fort     Doit commencer à vous déplaire.

682. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Avant ces trois hommes de lettres incomparables il n’y a presque rien de digne d’attention dans la littérature latine, excepté Lucrèce ; après eux il n’y a plus rien ; aussi la décadence commence. […] J’ai commencé aussi à déclamer en grec sous Cassius ; mais, pour le latin, je m’exerce plus volontiers avec Bruttius. […] Ils commencèrent par immoler de concert tout ce qui leur était suspect de regretter la liberté. […] De plus il était pauvre, il avait le goût du luxe et du plaisir ; il lui fallait grossir (il l’avoue lui-même) son modique revenu par le prix de ses vers ; le public de Rome, comme celui de Paris, achetait avec plus de faveur les livres d’opposition que les livres dictés par les triumvirs ; l’ami de Mécène et d’Auguste commença donc par être le poète badin de l’opposition républicaine. N’avons-nous pas vu de nos jours les trois poètes horatiens de la France et de l’Allemagne, Béranger, Heine et Musset, commencer de même et assaisonner du sel de l’esprit d’opposition, et quelquefois d’un sel très âcre, les libertinages de verve, d’esprit ou de cœur de la poésie de jeunesse, de table ou de vin ?

683. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

« Le cardinal Negroni ne put pas refuser ; il vit même qu’il commençait notre fortune en nous plaçant sous la protection d’un aussi puissant personnage. […] « C’était un homme que le Pape aimait et qui, par ses rapports favorables sur les talents et les études de plusieurs de mes compagnons, avait commencé leur fortune. […] Les vacances de la Rote commençaient aux premiers jours de juillet ; elles finissaient en décembre. […] Ce martyre du pape, terminé par sa mort, commence. […] On commença le matin même la recherche des voix ; en un moment cette tâche fut accomplie.

684. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

La science vraiment élevée n’a commencé que le jour où la raison s’est prise au sérieux et s’est dit à elle-même : « Tout me fait défaut ; de moi seule viendra mon salut. » C’est alors qu’on se met résolument à l’œuvre ; c’est alors que tout reprend son prix en vue du résultat final. […] L’islamisme qui, par un étrange destin, à peine constitué comme religion dans ses premières années est allé depuis acquérant sans cesse un nouveau degré de force et de stabilité, l’islamisme périra par l’influence seule de la science européenne, et ce sera notre siècle qui sera désigné par l’histoire comme celui où commencèrent à se poser les causes de cet immense événement. […]commence l’originalité individuelle, qu’il faut souverainement respecter. […]commence la décadence de Rome ? Les esprits étroits, préoccupés de la conservation des mœurs anciennes, diront que c’est après les guerres puniques, c’est-à-dire précisément au moment où, les préliminaires étant posés, Rome commence sa mission et dépouille les mœurs de son enfance devenues impossibles.

685. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre premier. Le Moyen Âge (842-1498) » pp. 1-39

Ce qu’en tout cas nous pouvons dire, c’est que maître Jehan Froissart, qui avait commencé d’écrire ses Chroniques en vers, pour faire plus d’honneur à Prouesse, les remet en prose ; — et voilà l’histoire à la fois détachée de l’épopée et distinguée du roman. […] En même temps, dans la classe aristocratique, plus instruite, quoiqu’elle ne le soit guère, l’individu, sous la double influence des Romans de la Table-Ronde et de l’exemple des troubadours provençaux, commence à prendre conscience de lui-même ; et le lyrisme naît. […] Mais c’est aussi pourquoi, si la pompe quasi liturgique des Mystères a d’abord continué dans la rue les cérémonies que l’on célébrait dans l’intérieur de l’église ; s’ils ont été, comme les processions, une manière d’intéresser les sens du populaire, son avidité naturelle de divertissements et de spectacle à la durée de la religion ; et enfin, s’ils ne sont morts, comme on le montrerait, que de l’anathème que l’Église a jeté sur eux, on peut dire et il faut dire que, comme la poésie, courtoise exprimait l’idéal de la noblesse et les Fabliaux celui du vilain, pareillement les Mystères ont commencé par exprimer l’idéal du clergé. […] Mais ne l’est-il pas presque autant de l’esprit italien, tel que celui-ci commence alors de se déterminer dans la Divine Comédie, par exemple, ou dans les Sonnets de Pétrarque ? […] Si la littérature du Moyen Âge n’était pas morte, elle agonisait depuis deux cents ans ou davantage quand l’esprit de la Renaissance commença de souffler sur le monde.

686. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Edgar Poe37 I38 La Bibliothèque des chemins de fer a eu l’heureuse idée de publier en un volume deux Nouvelles d’un homme récemment célèbre dans son pays, et dont la renommée commence de frapper l’opinion publique dans le nôtre. […] Dans le Scarabée d’or, après avoir commencé par les vertiges de l’incompréhensible, Edgar Poe finit par s’asseoir paisiblement dans les explications naturelles. […] Car voilà, en fin de compte, tout le dénoûment, très vulgaire et très raisonnable, du Scarabée d’or, de cette Nouvelle qui commence si bien, dans les nuées irisées du fantastique et du mystère, que, même ces nuées dissipées sous le souffle raccourci du bon sens, l’imagination en rêve les couleurs encore ! […] Pour notre compte, nous regrettons que Baudelaire ait interverti l’ordre normal de sa publication, et n’ait pas commencé par les œuvres fortes. […] Elle commença pour lui par cette courte et enivrante aurore, que suit la trahison des mauvais jours.

687. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

Un prix d’académie commença de le mettre en lumière, car Ulysse s’était comme perdu dans le bruit des circonstances politiques. […] La jeune école de Mme de Staël commençait à percer dans le monde ; la jeune École normale, M. […] Schlegel, est allé en porter la nouvelle à la Diète assemblée… » Ceci, pour commencer, n’était pas tout à fait juste ; le succès de M. […] C’est là qu’est mon pays ; là l’Écosse commence. […] L’impatience du parterre commença à se faire sentir à une scène de l’acte second, laquelle, au contraire, paraissait alors à de très-bons juges d’un charme sans exemple sur notre scène, et comparable seulement à l’entrevue de Juliette et de Roméo ; la fameuse scène de doña Sol, depuis, rentra dans cette situation.

688. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVe entretien. Vie de Michel-Ange (Buonarroti) »

On voit, dans la suite de la vie de Michel-Ange, que ce tombeau, conçu, commencé, interrompu, repris, abandonné, presque achevé, jamais fini, fut l’œuvre capitale et favorite du grand artiste, le rêve, le réveil, l’espoir et le désespoir de sa vie, poëme de marbre dont les vicissitudes du sort déchiraient les pages à mesure qu’il les avait composées et qu’il s’efforçait de les réunir. […] On commence par le trouble, on arrive à l’enthousiasme, on finit par l’anéantissement. […] Le pape, après un long entretien avec lui sur l’agrandissement de Saint-Pierre de Rome, lui permit d’aller mûrir ses idées sur cet édifice en achevant à Florence les tombeaux des Médicis commencés. […] Michel-Ange, déjà las d’un art muet et qui commençait à cultiver l’art qui parle, consterné en ce moment des guerres civiles et des tyrannies qui désolaient sa patrie, répondit, au nom de la statue de la Nuit, à son interlocuteur anonyme, par ces vers qui valent un coup de ciseau ou un coup de poignard : Il m’est doux de dormir, et plus doux d’être de pierre Pendant que le malheur et la honte de l’Italie durent ! […] Mais Michel-Ange l’affermit, le simplifia, l’éclaira, donna à ses piliers les muscles qui leur manquaient pour porter un Panthéon dans le ciel, le décora de son unité, de sa lumière, de son harmonie, ces trois attributs de la Divinité qu’il renferme, et mit, pour ainsi dire et pour la première fois, le christianisme en plein jour et en plein firmament ; enfin il fit le modèle, il commença les premières courbes de cette immense et sublime coupole qui écraserait le sol, si elle ne paraissait soutenue par le miracle de la pensée qui l’éleva dans les airs ; il attacha à jamais ainsi son nom et sa mémoire au plus grand acte de foi que l’humanité moderne ait construit en pierres.

689. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre IV. Shakespeare l’ancien »

C’est par l’immensité que le drame commence, il y a quatre mille ans, dans Job, que nous venons de rappeler, et, il y a deux mille cinq cents ans, dans Eschyle ; c’est par l’immensité qu’il se continue dans Shakespeare. […] Au reste, c’est Chœrilus qui, par sa tétralogie des Curetés, a commencé le mal. […] L’action commence par un voleur et finit par un incendiaire. […] Quatorze trilogies : les Prométhées, dont faisait partie Prométhée enchaîné ; les Sept Chefs devant Thèbes, dont il nous reste une pièce ; la Danaïde, qui comprenait les Suppliantes, écrites en Sicile et ayant trace du « sicélisme » d’Eschyle ; Laïus, qui comprenait Œdipe ; Athamas, qui se terminait par les Isthmiastes ; Persée, dont le nœud était les Phorcydes ; Etna, qui avait pour prologue les Femmes Etnéennes ; Iphigénie, qui se dénouait par la tragédie des Prêtresses ; l’Éthiopide, dont les titres ne se retrouvent nulle part ; Penthée, où étaient les Hydrophores ; Teucer, qui s’ouvrait par le Jugement des armes ; Niobé, qui commençait par les Nourrices et s’achevait par les Gens du cortège ; une trilogie en l’honneur d’Achille, l’Iliade tragique, composée des Myrmidons, des Néréides et des Phrygiens ; une en l’honneur de Bacchus, la Lycurgie, composée des Édons, des Bassarides et des Jeunes hommes. […] le mal, qui commence la souffrance par lui, car être le mal c’est pire que le faire, les peines, les douleurs, les larmes, les cris, les rumeurs ; dans l’ombre, le problème muet, l’immense silence, d’un sens inexprimable et terrible.

690. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure  »

Et pour commencer par Boileau, il est un de ceux qui virent le plus assidûment l’illustre poète dans sa vieillesse. […] Dans son Épître à M. de Lamoignon sur les plaisirs de la campagne, Boileau commence par dire qu’il habite en ce moment un petit village ou plutôt un hameau, et il met en note : « Hautile, petite seigneurie près de La Roche-Guyon, appartenante à mon neveu l’illustre M.  […] Il laisse deux millions de biens à sa fille unique, mariée au président Gilbert… » Il me semble que l’épithète d’illustre, appliquée à Dongois, commence à s’expliquer ; il y a greffier et greffier. […] Je commence par celui où vous m’apprenez que mon Dictionnaire n’a point déplu à M. 

691. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville (suite et fin.) »

Il faut faire assurément la guerre dans telle conjoncture, aisée à prévoir ; mais une pareille guerre no doit pas être désirée ni provoquée, car nous ne saurions en commencer une avec plus de chances contre nous. […] Vous savez quel goût j’ai pour les grands événements, et combien je suis las de notre petit pot-au-feu démocratique et bourgeois. » Lorsque ensuite, après s’être avancé, on recule, et que la nation se croit, à tort ou à raison, profondément humiliée et déchue du rang qu’elle tenait en Europe ; lorsqu’elle commence à en vouloir au Gouvernement de son choix et au prince qu’elle accuse personnellement de lui avoir créé cette situation indigne d’elle, Tocqueville est des premiers à sentir que le péril de l’avenir est là, non ailleurs, et tout le talent de parole dont fait œuvre le ministère de M.  […] J’ai l’intention de continuer ce que j’avais déjà commencé à Tocqueville cet été, avec beaucoup d’entrain et de plaisir, qui était un récit de ce que j’avais vu dans la révolution de 1848 et depuis, choses et hommes. […] Les libres jugements que j’v porte et sur mes contemporains et sur moi-même rendraient cette publication impraticable, quand même il serait dans mon goût de produire ma personne sur un théâtre littéraire quelconque, ce qui assurément n’est, pas. » Ainsi il y a de lui un livre commencé sur la Révolution de 1848 ; les Œuvres dites complètes aujourd’hui ne le sont que provisoirement : il restera encore beaucoup à y ajouter, et pour la Correspondance et pour les fragments d’histoire.

692. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

La méritant si peu, je ne la regrette pas plus que je ne l’avais souhaitée et demandée. » Son oncle Constant Desbordes, le peintre, lui écrivait en septembre, pour l’avertir qu’on était fort surpris au ministère de la maison du roi qu’elle ne se fût point présentée ou quelqu’un de sa part, car il y avait neuf mois que cette pension datant de janvier avait commencé de courir ; il avait dû déjà la gronder auparavant de paraître se soucier trop peu d’une faveur, « qui, disait-il, n’a rien que d’honorable ». […] Elle s’était mise au latin et était arrivée à entendre les odes d’Horace ; elle lisait l’anglais et avait traduit en vers quelques pièces de William Cowper, notamment celle des Olney Hymns, qui commence ainsi : God moves in… ; une poésie qui rappelait les Cantiques de Racine et toute selon saint Paul. […] Et maintenant laissons-la parler elle-même ; parcourons avec elle quelques-unes des branches les plus particulières et les plus intimes de sa correspondance, à commencer par celle qui s’adresse à ce frère si peu favorisé, Félix Desbordes, administré de l’hôpital général à Douai : « (14 janvier 1843)… L’aînée de mes filles est toujours en Angleterre, à ma grande affliction74, car cette absence commence à me devenir insupportable.

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