Et comme les animaux, placés entre les deux extrêmes, l’embarrassent fort, il leur ôte l’intelligence et même la sensibilité ; il ne veut pas qu’ils aient une âme, fût-ce un embryon d’âme ; il les assimile à des horloges ; il en fait de purs automates qui n’ont que l’apparence de la vie. […] Les mots de la langue et les genres littéraires sont divisés en nobles et en roturiers, de même que l’homme est coupé en deux parties, l’une toute animale et l’autre presque divine, de même que la France est séparée en ordres et en castes.
C’est ainsi que, peu à peu, en élargissant sans cesse ses relations, « l’art en est venu à nous mettre en société avec tels et tels héros de Zola. » La cité aristocratique de L’art, au dix-huitième siècle, admettait à peine dans son sein les animaux ; elle en excluait presque la nature, les montagnes, la mer. « L’art, de nos jours, est devenu de plus en plus démocratique, et a fini même par préférer la société des vicieux à celle des honnêtes gens. » Tout dépend donc, conclut Guyau, du type de société avec lequel l’artiste a choisi de nous faire sympathiser : « Il n’est nullement indifférent que ce soit la société passée, ou la société présente, ou la société à venir, et, dans ces diverses sociétés, tel groupe social plutôt que tel autre. » Il est même des littératures, — Guyau le montre dans un chapitre spécial, — qui prennent pour objectif « de nous faire sympathiser avec les insociables, avec les déséquilibrés, les névropathes, les fous, les délinquants » ; c’est ici que « l’excès de sociabilité artistique aboutit à l’affaiblissement même du lien social et moral ». […] Zola comme de Balzac, c’est précisément qu’ils ont voulu peindre les hommes dans leurs rapports sociaux ; c’est qu’ils ont fait surtout des romans « sociologiques », et que le milieu social, examiné non dans les apparences extérieures, mais dans la réalité, est une continuation de la lutte pour la vie qui règne dans les espèces animales. « De peuple à peuple, chacun sait comment on se traite.
Sans ce frein, je les regarderai comme des animaux féroces qui, à la vérité, ne me mangeront pas quand ils sortiront d’un long repas, et qu’ils digéreront doucement sur un canapé avec leurs maîtresses, mais qui certainement me mangeront, s’ils me rencontrent sous leurs griffes quand ils auront faim, et qui, après m’avoir mangé, ne croiront pas seulement avoir fait une mauvaise action. » (Tom. […] La fameuse mosaïque du palais des princes Barberins à Palestrine représente dans sa partie supérieure un pays de montagnes, avec des chasseurs et des animaux : dans la partie inférieure, le Nil qui serpente autour de plusieurs petites îles.
L’histoire naturelle de l’homme, celle des animaux, & particuliérement la connoissance, l’usage & la vertu des plantes & des minéraux, devoient être traités avec soin dans un Dictionnaire qui s’arroge le titre d’universel. […] Ce sont tous ces défauts du Dictionnaire de Trévoux qui ont fait naître l’idée du Grand Vocabulaire françois, contenant l’explication de chaque mot considéré dans ses diverses acceptions grammaticales, propres, figurées, synonimes & relatives ; les loix de l’orthographe, celles de la prosodie ou prononciation, tant familiere qu’oratoire ; les principes généraux & particuliers de la Grammaire ; les regles de la versification, & généralement tout ce qui a rapport à l’éloquence & à la poésie ; la géographie ancienne & moderne ; le blason, ou l’art heraldique ; la mythologie ; l’histoire naturelle des animaux, des plantes & des minéraux ; l’exposé des dogmes de la Religion & des faits principaux de l’histoire sacrée, ecclésiastique & profane ; des détails raisonnés & philosophiques sur l’œconomie, le commerce, la marine, la politique, la jurisprudence civile, canonique & bénéficiale ; l’anatomie, la médecine, la chirurgie, la chymie, la physique, les mathématiques, la musique, la peinture, la sculpture, la gravure, l’architecture, &c.
Un animal à l’étable. […] Chaque aéroplane et chaque dirigeable sera peint, ou camouflé (animaux, machines, maisons) et signé par un peintre futuriste.
Tel l’animal qui mue, qui brise sa carapace trop étroite et s’en fait une plus jeune ; sous son enveloppe nouvelle, on reconnaîtra aisément les traits essentiels de l’organisme qui ont subsisté.
Tout courbé sous les nécessités animales, tout soumis à son ventre, il sent sur sa lourdeur s’agiter des ailes nobles.
Pour la splendeur de ce spectacle, les poètes convoqueront les plantes, les étoiles, les vents et les graves animaux.
L’éléphant se gonfla pour accroître sa taille, le bœuf imita l’éléphant ; la grenouille eut la même manie, qui remonta d’elle à l’éléphant ; et, dans ce mouvement réciproque, les trois animaux périrent : triste, mais image réelle d’une nation abandonnée à un luxe, symbole de la richesse des uns, et masque de la misère générale du reste.
Il en est de même des environs d’une place de guerre, du campement d’une armée, d’un champ de bataille, d’une plante nouvelle, d’un animal extraordinaire, d’une machine, enfin de tous les objets sur lesquels la curiosité peut s’exercer.
Le peuple, par des évenemens qui ne sont pas de notre sujet, s’y étant encore multiplié plus qu’il ne l’a fait en aucun autre endroit de l’Europe, le besoin et la facilité d’avoir des légumes et du laitage dans une prairie continuelle, la facilité d’avoir du poisson au milieu de tant d’eaux douces et salées, ont accoutumé les habitans à se sustenter avec ces alimens flegmatiques, au lieu que leurs anciens prédecesseurs se nourrissoient de la chair de leurs troupeaux, et de celle des animaux domestiques devenus sauvages, dont on voit par Tacite et par d’autres écrivains de l’antiquité que leurs bois étoient remplis.
Cet animal d’huissier qui sort d’ici n’a pas l’air de se douter de ces choses-là, lui… Que faire ?
À ce nom, tous les rapports surgissent entre l’animal royal, sultanesque (Sultan Léopard, dit La Fontaine), tout-puissant, magnifique, cruel et gracieux, que ce nom exprime, et le génie du poète à qui le Hasard l’a donné, le Hasard, cet imbécille, qui n’en fait jamais d’autres, qui appelle Renard le franc, le joyeux, le généreux Fox, l’homme le moins vulpin qui ait certainement jamais existé !
Il faut avoir lu Lysistrata, la fête des Thesmophories dans Aristophane, pour imaginer ces emportements de la vie animale, pour comprendre qu’on célébrait publiquement les Dionysiaques, qu’on dansait la cordace sur le théâtre, qu’à Corinthe mille courtisanes desservaient le temple d’Aphrodite, et que la religion consacrait tout le scandale, tout le vertige d’une kermesse et d’un carnaval. […] Ils n’ont point eu l’abnégation du savant moderne qui emploie tout son génie à éclaircir un point obscur, qui observe dix ans de suite une espèce animale, qui multiplie et vérifie incessamment ses expériences, qui, confiné volontairement dans un labeur ingrat, passe sa vie à tailler patiemment deux ou trois pierres pour un édifice immense dont il ne verra pas l’achèvement, mais qui servira aux générations futures. […] Moins artificiel, moins spécial, moins éloigné de l’état primitif, le Grec agissait dans un cercle politique mieux proportionné aux facultés humaines, parmi des mœurs plus favorables à l’entretien des facultés animales : plus voisin de la vie naturelle, moins assujetti par la civilisation surajoutée, il était plus homme. […] En outre, une statue est solide, ses membres et son torse ont un poids ; on peut tourner autour d’elle, le spectateur a conscience de sa masse matérielle ; d’ailleurs elle est le plus souvent nue ou presque nue ; le statuaire est donc obligé de donner au tronc et aux membres une importance égale à celle de la tête, et d’aimer la vie animale autant que la vie morale. […] Toutes les grandes puissances naturelles sont divines en Grèce, et il ne s’est point encore fait dans l’homme de divorce entre l’animal et l’esprit.
De tous les romanciers, le seul Paul de Kock, souverainement méprisé par les aigles du roman, a su retrouver un peu de la gaieté animale et débordante de Rabelais et de nos vieux conteurs. […] On peuplait, lors de la publication d’Atala, le Jardin des Plantes de Paris d’animaux sauvages importés d’Égypte et enlevés de la Hollande : ils excitaient la curiosité des Parisiens, qui couraient en foule les contempler, les observer et qui lisaient avec avidité les détails fournis par les journaux sur leurs mœurs, leur attachement aux gardiens. […] Les lecteurs retrouvaient, dans Atala et René, ces animaux sauvages qui les occupaient.
Qui donc encore a dit des Chansons des rues et des bois qu’elles étaient « le plus bel animal de la langue française » ? […] Incomparables de vérité, sans analogues dans l’histoire de notre poésie — comme les animaux de Barye le sont dans l’histoire de la sculpture, — toutes ces descriptions ont un sens et une portée philosophiques. Dans les appétits ou dans les instincts des animaux le poète se plaît à nous montrer l’origine lointaine, la genèse obscure des nôtres, et en effet, nous nous y reconnaissons. […] qu’entre le cri de l’animal et le langage de l’homme elles mettent ou elles creusent un abîme sur la profondeur duquel on ne jettera jamais aucun pont ? […] Mais comment donc, après l’avoir établie, retombant aussitôt au sophisme des sociologues, a-t-il remis dans l’homme, avec sa théorie des races, l’animal qu’il semblait en avoir voulu d’abord ôter ?
La coquille fossile dit quelle sorte d’animal l’habita ; l’œuvre dit quelle sorte d’homme la fit. […] Ce que fait l’homme en se vêtant pour échapper aux influences caloriques de son habitat, tout animal le fait à sa manière, ou meurt. […] Cela suppose une certaine idée de l’homme, distincte de toute autre, de celle de l’animal, par exemple, et j’y ai attaché une signification de dignité, de noblesse, d’excellence. […] Je dis donc : « L’homme vaut mieux que l’animal », et je sais en quoi il vaut mieux. […] Mais quel sens de la vie, quelle oreille attentive à toutes ses pulsations, où qu’elle palpite, dans des artères d’animaux ou dans des vaisseaux de plantes !
J’ai là devant moi un bronze japonais, un canard qui a la parenté la plus extraordinaire avec les animaux antiques du Vatican. […] Charles Blanc. — Je vous dis que la qualité des tapis persans, c’est le suint, la vie animale, dont est encore imprégnée la laine, quand on la teint, tandis que chez nous, la laine est morte, lorsqu’on l’emploie. […] Les hommes faits ont de petits gloussements de satisfaction animale, leurs blanches et roses femmes rayonnent dans un abrutissement ébriolé, et l’on voit les garçonnets et boys sourire amoureusement à la viande. […] Le premier, il a rendu la sérénité ennuyée du roi des animaux.
» Buffon demande aussi aux animaux et aux plantes : — Avez-vous de la grandeur, de la proportion, de l’élégance ; avez-vous, en un mot, le decor des Latins ? […] Dans les métaphores, qui ne doivent être que des métamorphoses rationnelles, des symboles de l’universelle transformation des choses, le poète peut passer quelques-uns des degrés insensibles de la vie, non les sauter à plaisir ; il peut comparer la machine à la bête, l’être immobile à l’être qui se meut, l’animal inférieur à l’animal supérieur ; mais ce n’est que bien haut dans l’échelle des êtres qu’il peut, en général, chercher des points de comparaison avec l’homme52. […] La poussière, aussi éternelle en Egypte que le granit, avait moulé ce pas et le gardait depuis plus de trente siècles, comme les boues diluviennes durcies gardent la trace des pieds d’animaux qui la pétrirent.
« Si la nature n’avait allumé ces vastes fourneaux sur les rivages de l’Océan, ses eaux seraient couvertes d’huiles végétales et animales… La nature purge les eaux par les feux des volcans… Elle brûle sur les rivages les immondices de la mer. » Savez-vous pourquoi « la vache a quatre mamelles quoiqu’elle ne porte qu’un veau et bien rarement deux »?
La belle Camille, qui n’est qu’un joli et tendre animal, d’une douceur toute moutonnière et passive, se laisse prendre, presque sans résistance ni révolte, par un hardi garçon, un officier d’artillerie, qui disparaît lorsqu’il la sait enceinte.
Il suit de là que l’histoire a plus d’un point de contact avec les sciences naturelles et que le développement de l’humanité, malgré sa complexité plus grande, peut être éclairci par ce que l’on sait déjà de l’évolution des plantes et des animaux.
Il avoit mis dans un de ses ouvrages : Il y a quelques petits moines qui sont dans l’église, comme les rats & les autres animaux imparfaits étoient dans l’arche.
Et les oiseaux et les nuances dont leur plumage est teint ; et les fleurs et leur velouté ; et les arbres et leurs différentes verdures ; et l’azur du ciel et la vapeur des eaux qui les ternit ; et les animaux et les longs poils et les taches variées de leur peau, et le feu dont leurs yeux étincellent.
Les animaux ont peu de maladies.
mais l’animale, la sensuelle, la physiologique, celle qui vient, comme la toison de nos poitrines, plus du tempérament que de la pensée, mais, après tout, l’inspiration spontanée et fougueuse, qui a fini, hélas !
Assurément, il y a du Burns sous son écorce, du Burns qui c’est pas encore sorti de sa tige, dans le poète qui nous a donné Les Sapins, Le Braconnier, La Vache blanche, Le Lavoir, Le Bûcheron, La Fille du Cabaret, La Chanson de la soie, même Les Bœufs, populaires pourtant, mais comme toute poésie inférieure, Les Bœufs, dont l’inspiration est brutale, car la femme et la fille y sont grossièrement et sordidement sacrifiées aux animaux, et enfin Le Tisserand, dont le refrain est idéal d’imitation pittoresque et d’harmonie !
Croyez-vous que l’homme, après s’être toujours fait une solution du problème humain et divin, soit arrivé, de progrès en progrès, à une époque où il vivra sur la terre, comme l’animal, sans conscience et sans souci de la destinée générale ? […] La liberté naturelle est celle des animaux, qui obéissent à leurs instincts. […] « Dans la vie, dit Hippocrate, tout concourt et tout consent. » C’est une des plus profondes définitions qu’on ait encore données de la vie ; et elle s’applique aussi bien à la vie collective ou sociale qu’à la vie organique de l’individu ; elle est vraie de l’être métaphysique société, comme de l’être physiologique qu’on appelle animal, elle est vraie de cette création secondaire qui est donnée à l’homme, et dont le chef-d’œuvre est incontestablement la SOCIÉTÉ, comme de la création divine, prise soit dans son ensemble, soit dans chacun de ses détails ; elle est vraie, en un mot, que vous considériez une plante, un animal, une œuvre d’art, une machine, une société, ou l’univers. […] Ainsi un bel animal, chef-d’œuvre de la création : il marche, il s’élance, il franchit les hautes montagnes ; il respire, il sent, il a de la mémoire, il aime, il engendre.
Sans doute il est avantageux, pour bien agir, de penser à ce qu’on fera, de comprendre ce qu’on a fait, de se représenter ce qu’on aurait pu faire : la nature nous y invite ; c’est un des traits qui distinguent l’homme de l’animal, tout entier à l’impression du moment. […] Dirat-on que les exigences de la vie sont analogues chez les hommes, les animaux et même les plantes, que notre méthode risque donc de négliger ce qu’il y a de proprement humain dans l’homme ? […] Sans doute, dans la presque totalité des cas, et probablement chez tous les animaux autres que l’homme, abstraction et généralisation sont vécues et non pas pensées. […] Concevoir ou plutôt percevoir ainsi la généralité est d’ailleurs aussi le fait de l’homme en tant qu’il est animal, qu’il a des instincts et des besoins. […] Alors apparaîtrait l’unité qui relie les êtres les uns aux autres, l’unité d’une pensée que nous voyons, de la matière brute à la plante, de la plante à l’animal, de l’animal à l’homme, se ramasser sur sa propre substance, jusqu’à ce que, de concentration en concentration, nous aboutissions à la pensée divine, qui pense toutes choses en se pensant elle-même.
Chaque vie, végétale, animale, humaine, est faite de milliers de morts sans lesquelles elle ne serait pas. […] Animaux mangeurs d’animaux, homme tyran des espèces animales, homme homicide, crime, échafaud et guerre, tout cela c’est bien de l’injustice, mais enfin on s’y accoutume ; cela paraît être simplement la question du mal sur la terre ; c’est l’injustice immanente, la fatalité, elle devrait inquiéter éternellement » ; cependant à cause de son éternité même, on n’y songe guère. […] L’homme est un animal traditionnel. […] L’homme est un animal social ; il est né avec l’instinct de conservation, comme tous les animaux ; en tant qu’il est animal social, son instinct de conservation est social comme tous ses grands instincts, et, dans chaque individu, compte sur les autres ; de là le cri d’appel dans le danger, le cri de l’enfant vers la mère, de la femme vers l’homme, de l’homme vers son semblable. […] Les animaux n’ont-ils pas aussi des sociétés et des langages ?
Vous les chercheriez en vain sur les eaux du grand fleuve, comme quelques-uns l’ont voulu faire, ces îles flottantes où des animaux multicolores ont l’air de s’être assemblés tout exprès pour plaire à nos yeux. […] crève, animal ! […] ce que Locke n’avait pas vu : ce désir, devenant passion, fait la supériorité de l’homme sur les animaux. L’animal, en effet, éprouve seulement le désir d’écarter tout sentiment désagréable, tandis que l’homme, plus compliqué, ayant observé les effets de la mort sur ses semblables, ajoute au désir d’éloigner la douleur le désir de se conserver vivant. […] Condillac, « Traité des animaux », Œuvres, 1798, III, 597.
Entre les conditions subalternes de la société, il n’y en a point à laquelle l’histoire naturelle ne fût plus ou moins utile ; tout ce qu’on voit, tout ce qu’on touche, tout ce qu’on emploie, tout ce qu’on vend, tout ce qu’on achète, est tiré des animaux, des minéraux ou des végétaux. […] Les animaux nous servent ou nous nuisent, et ils sont bons à connaître et pour les avantages que nous en retirons, et pour les dommages que nous en avons à craindre. […] Le chimiste Becker a dit que les physiciens n’étaient que des animaux stupides qui léchaient la surface des corps, et ce dédain n’est pas tout à fait mal fondé.