Le peintre, en voyant ainsi, tenait à la main la lampe merveilleuse.
Renan941 a le charme, la grâce, l’imagination, l’ironie, la souplesse délicieuse de l’intelligence, la richesse éblouissante des idées : peintre exquis de paysages, pénétrant analyseur d’âmes, penseur profond ; ce sont qualités et séductions que nul ne conteste à son œuvre.
Et cet officier de marine qui ignorait presque, si on l’en croit, la littérature contemporaine, qui n’avait pas lu une page ni de Flaubert, ni des Goncourt, ni de Daudet, se révéla d’emblée comme un des premiers entre les écrivains pittoresques et comme un des peintres les plus surprenants qu’on eût vus des choses exotiques.
Nos anciens poètes ont bien mérité de la nation comme peintres de mœurs et comme écrivains satiriques.
Ceux qui ont entendu Retz dans les années de sa retraite ont remarqué qu’il aimait à raconter les aventures de sa jeunesse, qu’il les exagérait et les ornait un peu de merveilleux : « Et dans le vrai, dit l’abbé de Choisy, le cardinal de Retz avait un petit grain dans la tête. » Ce petit grain, c’est précisément ce qui fait l’homme d’imagination, l’écrivain et le peintre de génie, l’homme de pratique incomplet, celui qui échouera devant le bon sens et la froide patience de Mazarin, mais qui lui revaudra cela et prendra sa revanche de lui, plume en main, devant la postérité.
Je rapporte ces paroles, moins encore pour peintre Cabanis que Droz lui-même.
Là il s’était donné, avant Louis XIV, Le Vau pour architecte, Le Brun pour peintre, Le Nôtre pour dessinateur des jardins, Molière et La Fontaine pour poètes, Pellisson pour secrétaire, Vatel pour maître d’hôtel, tout ce que Louis XIV aura plus tard à lui (excepté La Fontaine)50.
Un peintre n’aurait qu’à traduire et à copier, pour être fidèle, les lignes mêmes sur lesquelles Marguerite a si heureusement passé.
C’est le sentiment vif de cette incomparable et idéale agonie qui lui inspira un Dialogue entre Platon et Fénelon, où celui-ci révèle au disciple de Socrate ce qu’il lui a manqué de savoir sur les choses d’au-delà, et où il raconte, sous un voile à demi soulevé, ce que c’est qu’une mort selon Jésus Christ : Ô vous, qui avez écrit le Phédon, vous, le peintre à jamais admiré d’une immortelle agonie, que ne vous est-il donné d’être le témoin de ce que nous voyons de nos yeux, de ce que nous entendons de nos oreilles, de ce que nous saisissons de tous les sens intimes de l’âme, lorsque, par un concours de circonstances que Dieu a faites, par une complication rare de joie et de douleurs, la mort chrétienne, se révélant sous un demi jour nouveau, ressemble à ces soirées extraordinaires dont le crépuscule a des teintes inconnues et sans nom !
Au lieu de cela, dans le roman, Regnard est présenté comme peintre (ce qui est infiniment plus noble), et comme jouissant, à la faveur de cet art, de quelque liberté.
Mérimée est un artiste consommé : l’abbé Prévost ne l’est pas du tout, même lorsqu’il est un peintre si parfait de la nature.
Rousseau en a été à la fois le peintre et le révélateur.
« Si j’étais peintre, je voudrais — dit-il encore dans son journal — être un Raphaël noir : forme angélique, couleur sombre. » Mais en réalité il l’était, un Raphaël noir, ce lumineux !
« Le ciel de l’Italie inspire et produit les artistes. » Cela est douteux ; il n’est pas sûr qu’un Groënlandais transporté à Rome à l’âge de six mois, et occupé douze heures par jour à regarder le ciel, devînt un grand peintre.
Ce fut sous le soleil un éclat de couleurs digne de tenter le pinceau d’un peintre. […] J’ai passé une demi-journée en compagnie du peintre Maxime N. […] Ah, si Barrès s’était fait accompagner par l’ombre amie de ce grand peintre ! […] Sais-tu quels sont les écueils évités par les peintres et les statuaires grecs, lesquels cherchaient avant tout à réaliser la beauté absolue ? […] … Nous passâmes près de la modeste et mélancolique chapelle où le bon peintre Cazin dort son dernier sommeil.
Il s’agit des éléments d’un métier, de ce qui s’enseigne aux peintres dans les académies : on peut apprendre cela ; on peut apprendre à écrire correctement à la manière neutre, comme on grava à la manière noire. […] « La description est la peinture animée des objets. » Il veut dire que, pour décrire, il faut se placer comme un peintre devant le paysage, soit réel, soit intérieur. […] Un exemple fort amusant de ces déviations d’idées fut donné récemment par la corporation des peintres en bâtiment à la cérémonie dite du « triomphe de la république ». […] L’abstention du peintre trouverait sans doute des explications moins extraordinaires. […] Rien de moins pieux cependant et de moins édifiant au-delà du premier tome que cette encyclopédie singulière et confuse où on trouve René et des tableaux statistiques, Atala et le catalogue des peintres grecs.
Necker, l’homme à la mode, mais le moins naturel des écrivains ; sa femme, vertueuse mais prétentieuse ; sa fille, madame de Staël, capable de tout comprendre, mais non de tout faire ; Buffon, qui ne pouvait écrire qu’à l’ombre des créneaux de la tour de Montbard, et qui rendait dans ce cénacle les oracles de l’emphase ; Thomas, esprit bon et pur, corrompu par la rhétorique ; l’abbé Galiani, Napolitain de sens exquis, mais qui se nourrissait du sel de l’esprit au lieu de la substance du cœur ; enfin quelques grands artistes du temps, juges de forme plus que de fond, tel que le fameux peintre de marine Vernet, faisaient partie de l’auditoire. […] Il était encore accablé de ce double échec, lorsqu’un homme de génie, le peintre Vernet, vint ranimer son courage, et le rendre à ses études chéries. […] Mon ami, vous êtes un grand peintre, et j’ose vous prédire la plus brillante renommée !
Je ne sais si je me trompe, et si, n’ayant pas le tableau sous les yeux, je ne prête pas au peintre des idées qu’il n’a pas eues ; mais il me semble que la nature particulière de la femme et sa condition particulière sur la terre pendant la loi du Christianisme sont exprimées là avec un art sublime. […] Et Michel-Ange, le sublime peintre, traduisait cette pensée, lorsqu’il représentait ces femmes de son Jugement dernier qui s’élèvent naturellement vers le ciel, comme le fer est attiré vers l’aimant. […] Vos architectes vivent de plagiat ; vos peintres rendent la nature sans vérité et sans idéal, et aucune pensée ne dirige leur pinceau.
Chez les peintres, ce n’est d’ailleurs que d’une partie minime de la hausse d’un tableau qu’ils bénéficient. […] Il est vrai qu’il y avait jadis des couvents où les savants pouvaient travailler presque sans souci matériel, des mécènes qui soutenaient les philosophes et qui s’entouraient de peintres et de poètes. […] Un catalogue n’est pas une publication ; il n’est pas vendu mais distribué4. » C’est pourquoi tel peintre, tel penseur, tel acteur, restent impuissants lorsqu’ils aperçoivent un groupe de badauds arrêtés dans la rue, devant une vitrine où sont exposées, au milieu d’images de la Révolution, d’une signature de Louis-Philippe, d’une tache d’encre de Napoléon, aussi bien une lettre de réclamation à leur propriétaire parce que le chien de leur voisin dépose des ordures à l’entrée de la porte cochère de leur domicile, qu’une missive où ils font part à un psychiatre de leurs angoisses et de leurs doutes.
Et il est surtout un peintre excellent. […] » en réveillant en eux le souvenir de mille modèles qu’ils ont eus sous les yeux exactement comme le peintre lui-même. […] C’est la bonne méthode. « Je voudrais être peintre d’histoire, disait un débutant à Courbet ; je sens que c’est ma vocation. — Et moi je le crois ; en conséquence commencez par mettre trois mois à faire le portrait de M. votre père. » — Flaubert en disait autant à Maupassant : « Mets-toi à ta fenêtre, et quand tu ne pourras plus te défendre contre l’obsession que tu en auras, décris la maison d’en face, le monsieur du second, et la petite femme du cinquième. » Tant y a que c’est ainsi que Gyp débuta, et ce fut exquis. […] La première de ces nouvelles, qui se passe à Londres et qui nous donné, chemin faisant, des aspects de Londres et des paysages londoniens infiniment exacts et tout à fait « amusants », comme disent nos peintres, — c’est-à-dire pittoresques et attrayants pour le regard, — est l’histoire d’un joli, d’un charmant dévouement d’amour. […] Il n’était pas infiniment tendre, et certaines malices à l’égard d’un peintre célèbre, admirable à peindre un mur derrière lequel il se passe quelque chose, sont assez cuisantes.
En effet, une nation dont la morale n’a cessé d’obéir au grand principe : un sou est un sou, comment n’aimerait-elle point à se rappeler qu’en un temps reconnu pour celui où s’exprima le mieux son génie, le peintre officiel des passions, admis à la cour du Grand Roi, dans la théorie des princesses, les unes, larmoyantes, les autres vindicatives, mais toutes uniformément chargées de falbalas, jamais ne reconnut par la bouche de leurs majestueux amants, que des objets de désir. […] Au bout du compte, on en vient à voir dans les sens, non plus un éclairage à très variées et concordantes lumières, mais une marqueterie d’entités, dont, un point plus éclatant rendrait négligeables les autres, tant et si bien que les yeux d’un peintre mis sur un plat demeureraient toujours les yeux de ce peintre, et, de même, l’oreille d’un musicien, pavillon et arrière-boutique détachés de la tête et rangés dans un écrin ouaté. […] Avant l’apothéose masochiste, il y a eu, certes, quelques divertissements, ce que les Français nomment bagatelles de la porte : flirt baptismal avec saint Jean-Baptiste, petite toilette intime et parfumée des mains des Saintes femmes, et surtout, la Cène avec le pain (et le pain long, on sait ce qu’il peut représenter et on sait aussi que, jamais, les peintres qui firent de ce repas, tant de tableaux célèbres, n’ont posé, sur la table, des petits pains fendus, symboliques, eux, du sexe féminin).
On avait beau dire et beau faire, un vers cornélien serait toujours plus sculptural qu’une statue, et la ciselure des mots l’emporterait éternellement sur la ciselure des métaux ou des marbres, et les peintres ne tireraient jamais de leurs palettes que des couleurs bien ternes à côté de celles que le poète, lui, peut extraire de son écritoire. […] Toute son âme, avec ses rêves de sublimités ou ses appétits de bassesses, avec ses amours et ses haines, il la met dans le portrait qu’il croit faire, et ce portrait, toujours, tient beaucoup plus du peintre que du modèle. […] Nous étions un peu semblables à ces jeunes peintres de Venise qui, après avoir passé la nuit à chanter en gondole et à caresser les cheveux roux des belles filles, tout à coup prenaient un air réfléchi, presque austère, pour entrer dans l’atelier du Titien. […] Dans les vestibules, dans les galeries, dans les salles où passeront sans cesse des serviteurs vêtus de brocart et d’or, sous des plafonds peints par un grand peintre d’alors qui s’appellera Georges Rochegrosse, s’accrocheront aux murs les toiles les plus précieuses, Raphaël, Rembrandt, Rubens, et Corot aussi, s’espaceront dans un désordre harmonieux tous les meubles magnifiques ou exquis, toutes les éclatantes ou délicates étoffes, reluiront toutes les merveilles des ors ciselés, des émaux et des mosaïques. […] Qu’adviendra-t-il cependant des poètes, des peintres, des musiciens, des sculpteurs, des artistes en un mot ?
Et puis, quelle injustice ce serait de ne voir dans Mme Sand que le peintre séduisant des égarements ou des sophismes de la passion ! […] À quoi tient cette supériorité de peintre de la nature, qui frappe au premier aspect chez Mme Sand ? […] Un des grands peintres de son temps, M. de Lamartine, avait trop de splendeurs dans son âme pour bien voir au dehors. […] Nul peintre ne l’a pratiquée avec un instinct plus délicat et plus sûr. […] Ce style est d’une transparence merveilleuse, au fond de laquelle on voit la réalité telle que l’a vue le peintre, plus la pensée même du peintre qui l’a interprétée.
Le jeune peintre Mario Cavaradossi, Français par sa mère, élève de David, un peu jacobin, travaille à une fresque dans l’église Saint-Andréa. […] Il la relance dans sa solitude et trouve moyen de se faire présenter à M. d’Arnheim par son ami, le peintre Mertens. […] J’espérais, sur la foi du titre, voir le vieil Anacréon et l’enfant Éros, et quelque petite Phryné, et peut-être même Bathylle, dont Anacréon nous dit si singulièrement, en s’adressant au peintre qui fait le portrait du bel Éphèbe (ode XXIX) : « Mais que ton art est jaloux ! […] Et voici le clan des peintres et des dessinateurs : Steinlein qui aime les chats, Caran d’Ache qui aime les soldats, Rivière qui aime la rue. […] Rodolphe Salis dirige avec verve cet établissement composite qui est à la fois une brasserie, un restaurant, un cénacle littéraire, un atelier de peintre et un théâtre.
Sur tous ces personnages historiques, le prince de Ligne est le témoin le plus juste et le plus rapide, le peintre le plus animé, le plus aisé et le plus au naturel.
C’est un peintre hardi à la fois et discret, qui a voilé une partie de ses personnages et qui s’est dérobé lui-même ; il laisse entrevoir autant de choses qu’il en montre ; on le suivrait volontiers dans sa demi-ombre et dans ses mystères ; on cherche toujours une clef avec lui.
Routiers, voyageant en Suisse (1761), est déjà un disciple de Rousseau ; il cache son nom, il déguise sa condition, c’est un peintre de portraits, et qui fait semblant de chercher des pratiques pour vivre ; les honnêtes gens qui le prennent au mot se donnent de la peine pour lui en procurer ; en un mot, il joue à l’Émile de Jean-Jacques, et avec cela il imite à sa manière Chapelle et Bachaumont.
Mais il en résulte aussi que Thomson est un descriptif plus large et un peintre qui a le coup d’œil d’ensemble ; il y a des masses chez Thomson.
Mme de Choiseul a été saisie et crayonnée par Horace Walpole en quelques traits qui sont bien d’un peintre compatriote de Spencer et de Shakespeare : Ma dernière nouvelle passion, et aussi, je pense, la plus forte, écrivait-il pendant un séjour à Paris (janvier 1766), est la duchesse de Choiseul.
L’artiste en effet, le peintre qui préparait à tout hasard ses cartons, s’essayait en lui.
C’était diaphane, transparent ; c’était dommage pour mes veux, ce devait être vu par un peintre.
Sans parler des meubles élégants, les murailles étaient revêtues de riches tapisseries de Flandre et décorées de plusieurs tableaux de sainteté ou de famille, dus au Titien, ce peintre favori de l’empereur et dont il avait même un jour, dit-on, ramassé le pinceau.
Un groupe de jeunes écrivains catholiques distingués, de doctrinaires du parti, qui, à l’envi du Globe, s’étaient essayés dans le Correspondant sur la fin de la Restauration, se joignirent, sans s’y confondre, avec le groupe des amis de M. de Lamennais : à côté du vigoureux et sombre Breton, du doux, aimable et savant abbé Gerbet, du brillant et valeureux Lacordaire, du jeune comte leur ami91, alors dans toute la fraîcheur acérée de son talent, on eut Edmond de Cazalès, riche esprit, cœur plus riche encore ; Louis de Carné, esprit sage, écrivain consciencieux, s’instruisant toujours, désireux d’acquérir et de combiner tout ce qui est bien, se nuisant par là peut-être à la longue ; on eut un Franz de Champagny, jouteur sincère, peintre studieux, sévère pour les Césars comme un élève de Tacite qui eût été chrétien ; plusieurs Kergorlay, au nom jadis hostile, mais tous d’une autre génération plus adoucie, tous réconciliés entièrement ou en partie avec le siècle.
» Mais se serait-on attendu, je vous prie, que le peintre dont le crayon railleur a tant dévoilé de misères et de duplicités féminines dans un ordre vulgaire, nous conduirait à étudier sous sa plume discrète une telle femme, une telle distinction maladive de la sensibilité ?
Pour comprendre un tableau et se bien représenter le genre de talent qui l’a conçu et exécuté, on n’est pas un peintre ; pour comprendre l’idée et l’exécution d’une action de guerre, on n’est pas un général : on reste un critique ; l’essentiel est de l’être avec le plus d’ouverture autour de soi et le plus d’étendue qu’on le peut.
Réservons ce beau sujet bien fait pour tenter tout peintre moraliste qui ne craint pas d’entremêler dans une figure les lumières et les ombres.
Le préjugé vulgaire nommait Barbaroux, — « Barbaroux dont les peintres ne dédaigneraient pas de prendre les traits pour une tête d’Antinoüs !
Le rédacteur des Mémoires du Maréchal de Richelieu, qui travaillait sur de bons documents, a parlé d’elle en termes plus choisis et plus convenables, qui s’accordent mieux avec les traits de nos peintres précédents, les Tocqué et les La Tour.
Ce qui est certain, c’est que le chemin qui mène à la maison de la Lisette de Mme de Gasparin est une route des plus salubres, des plus pittoresques, et que cette verdure d’une matinée de mai y est décrite d’une exactitude et d’une vigueur incomparables : « Chaque fleur, chaque ton et chaque nuance de fleur, nous dit le peintre véridique, a son règne dans la campagne, et ce règne est absolu… La teinte est presque toujours uniforme, splendide en son unité.
Si le lecteur me reproche de ne pas l’aider dans cette appréciation, s’il me demande pourquoi je n’enlève pas le rideau pour découvrir le tableau, je répéterai la réponse du peintre Zeuxis à la même question qui lui fut faite, quand il exposa son chef-d’œuvre d’art imitatif : « Le tableau, c’est le rideau. » « Ce que nous lisons maintenant comme poésie et légende était jadis de l’histoire généralement acceptée, et la seule véritable histoire de leur passé que les premiers Grecs pussent concevoir ou goûter.
Je ne m’explique pas très bien qu’à la fin du même article sur Galilée, et pour nous rendre plus sensible la physionomie scientifique du savant personnage, le peintre biographe soit allé chercher je ne sais quelle combinaison imaginaire des génies d’Ampère et d’Arago : j’ai peine à me représenter ce qui en résulte pour la ressemblance.
Un peintre moraliste comme Saint-Simon ne se trompe jamais complètement : il a du flair.
Jules Cousin, en ne se donnant que pour un compilateur, est le peintre qui se cache derrière ce tableau tout composé de pièces industrieusement rapportées et qui s’ajustent.
De plus, lorsqu’un poëte, un peintre, a un style à lui et une manière reconnue, on lui passe d’ordinaire quelque mélange : ainsi La Fontaine se laisse souvent aller dans ses plus franches peintures à je sais quelles teintes du goût Mazarin.
La Fontaine, peintre des champs et des animaux, n’ignorait pas du tout la société, et l’a souvent retracée avec finesse et malice.
Si jamais l’auteur a marié quelque part l’observation du moraliste avec l’animation du peintre, s’il a élevé le roman jusqu’au poëme, c’est dans Eugène de Rothelin qu’il l’a fait.
Marivaux est un peintre délicieux de la femme : ses Silvia, ses Araminte, ses Angélique sont exquises de sensibilité et de coquetterie, d’abandon ingénu et d’égoïsme en défense, de grâce tendre et d’esprit pétillant.
Les Allemands disent de Jean Paul qu’il réunit les qualités les plus diverses, à la fois poète, philosophe, naturaliste, peintre de mœurs.
Guizot est-il peintre en histoire ?
Moins peintre que La Bruyère, Vauvenargues a un plus grand dessein, un dessein plus philosophique : il ne veut pas simplement observer les hommes de la société dans leurs variétés, en donner des portraits, des médaillons finis, en faire le sujet d’une suite de remarques profondes et vives ; il envisage l’homme même, et voudrait atteindre au point où bien des maximes qu’on a crues contradictoires se rejoignent et se concilient.
Il y eut jusqu’à trois personnes qui purent croire qu’Estelle était faite à leur image, qu’elles étaient à la fois la muse et le modèle qu’avait eu en vue la galanterie du peintre.
Quinault lui paraît supérieur à Racine, et le peintre Le Brun (ô sacrilège !)
Théophile Gautier, qui se plaît à déployer plus que jamais dans ses rimes de sculpteur ou de peintre les opulences de la nature corporelle et de la matière vivante ; c’est le luxe et la floraison du genre porté au dernier degré de l’épanouissement.
Je m’arrête dans la citation de ce portrait que l’inépuisable peintre ne termine pas si tôt.
Bernardin était un peintre qui se disait un ignorant en se croyant mieux informé que les savants, et dont toute la théorie ne devait aboutir qu’à se décrire à lui-même en mille façons variées ses impressions naturelles.
Sayous ne nous retrace pas avec moins de finesse et de vérité l’aspect naturel du pays en Savoie, ces frais paysages jetés dans un cadre grandiose, cette espèce d’irrégularité et de négligence domestique, et ce laisser-aller rural que peut voir avec regret l’économiste ou l’agronome, mais qui plaît au peintre et qui l’inspire insensiblement : « L’imagination, dit-il, est plus indulgente : elle sourit à ce spectacle qui a sa grâce, et l’artiste jouit en reconnaissant un instinct de l’art et comme un goût de nature dans ce confus arrangement qui semble avoir été abandonné au hasard. » Nous connaissions déjà, depuis les peintures de Jean-Jacques Rousseau, ce charme des vallons et des vergers de Savoie, si frais et si riants au pied des monts de neige ; mais, avant d’en venir à saint François de Sales, il était bon de nous le rappeler.
Les gardiens du constitué sont d’accord sur toute la ligne ; les Académies de poésie, de musique, de danse et de morale et tous les octrois de la muraille de Chine mobilisent toutes leurs forces, et si l’on se demande plus tard comment l’union hétérogène du symbolisme put durer quelques années, forte, nous l’avons dit, de poètes dissemblables, de romanciers comme Adam, fréquentée de peintres comme Seurat, c’est que toutes les idées nouvelles se solidarisent en raison de l’identique et solidarisée résistance.
Ce sont les deux mêmes qualités qui feront le grand sculpteur, le grand peintre, le grand compositeur, — le grand écrivain : la ligne et la couleur.
J’ai signalé le peintre après le moraliste dans Les Patriciennes de l’Amour, mais il fallait qu’il y eût encore le romancier, et il n’y est pas.
Désormais, au lieu de ces poëmes flottants, rattachés les uns aux autres sous l’agrafe d’un même nom et d’une même pensée, paysages bretons, peints à la sépia, un peu tremblés par la main du peintre, mais qui nous pénètrent pourtant de leur touchante couleur brune, Brizeux publiera des vers ouvragés et creux, sous des titres tout à la fois ambitieux et vulgaires.
Je viens de voir la forêt ; un peintre l’eût vue mille fois mieux.
C’est une étude de grand peintre, plutôt qu’une œuvre originale et librement conçue.
C’est là le titre de gloire de Voltaire dans sa prose, et dans cette partie de ses poésies que le sujet, le temps, la libre humeur du peintre, pouvaient rendre quelque peu prosaïques, sans les laisser moins originales.
Cette époque sans seconde de Louis XIV nous offre le spectacle miraculeux d’un architecte capable de construire un palais avec les pierres d’une maison bourgeoise ; d’un peintre auquel une couleur suffit pour faire une toile éblouissante ; d’un virtuose dont les deux mains peuvent exprimer la symphonie de tout un orchestre ; d’un écrivain composant un long chef-d’œuvre avec une cinquantaine de mots. […] Cette thèse paradoxale, que la poésie n’a pas pour grande affaire de peindre, mais de moraliser, et la façon dont il a prêché d’exemple par ses vers faiblement colorés, mais éloquents et purs, voilà ce qui fait son originalité dans la poésie et dans la critique contemporaines ; car M. de Laprade est un critique en même temps qu’un poète, et je n’ai garde de nier ce qu’il peut y avoir de partiellement vrai dans cette page remarquable d’un de ses écrits en prose : « L’excès de la couleur qui prédomine aujourd’hui chez les poètes, chez les peintres, chez tous les écrivains et les artistes à la mode, n’est rien de plus qu’une couche épaisse de fard appliquée sur l’intelligence malade. […] Les passions véhémentes de l’âme, la haine, la colère, l’indignation, le mépris, ne semblent être là, pour ainsi dire, que comme la palette du peintre et la gamme du musicien. […] Ce père des hommes et des dieux fait le crépuscule et l’aurore ; il allume le soir la clarté des étoiles ; il est aussi assembleur de nuages, et sauf les jours de pluie, où décidément il n’est point aimable, les peintres trouvent qu’il s’entend à merveille à ménager l’ombre et la lumière. […] Le courage et la toilette s’étaient approprié en France l’expression qui, en Allemagne, désignait seulement ce qui était bon ; par une altération complète du sens primitif, ce qui, en Italie, s’appelait au xvie siècle un bravo, c’était un assassin à gages, et maintenant ce mot s’applique par excellence à un peintre, à un chanteur.
Amarante, dans le Portrait du peintre de Boursault, considère le discours d’Arnolphe comme une parodie du sermon et cette parodie comme une impiété : Au seul mot de sermon, nous devons du respect, C’est une vérité qu’on ne peut contredire. […] Corneille n’était pas seulement le poète sublime de la raison et de la volonté : c’était aussi le peintre exact de l’esprit de son temps ; il y avait en lui, outre le génie tragique que nous savons encore admirer, une faculté d’observation exacte que nous n’apercevons plus et que tout le monde alors comprenait. » Vivante encore, la tragédie de Racine. […] Lanson nous disait tout à l’heure que les tragédies de Corneille étaient choses vivantes, parce que Corneille était « le peintre exact de l’esprit de son temps. » Eh bien ! […] Mais surtout les tableaux de Manet sont, éminemment, des tableaux de peintre : au lieu que les drames de Diderot ne sont, à aucun degré, des pièces d’auteur dramatique. […] Ses personnages sont grecs à peu près comme le sont les dieux et les déesses des peintres de la Renaissance.
Maturin est proposé au pinceau des peintres comme le type de la frénésie ; il faut le représenter l’écume à la bouche. […] Mackenzie n’est pas seulement un inventeur du premier ordre, un psychologiste profond, un observateur attentif, un peintre fidèle des sentiments les plus délicats et les plus fins ; c’est aussi un prosateur serré, un écrivain concis, qui résume et condense en peu de mots une pensée complexe, qui ne livre au hasard de sa plume aucune phrase flottante et indécise. […] Mais à coup sûr le modèle que l’élève de Rubens nous a transmis n’a pas volontairement livré au pinceau du peintre le secret de ses gestes et de sa nature intime et personnelle. […] Ce qui me semble plus vraisemblable, c’est que M. de Lamartine, à la vue des Moissonneurs de Robert, ait senti se réveiller en lui un confus souvenir des spectacles champêtres auxquels il avait lui-même assisté, et qu’il ait trouvé dans le triomphe unanime du peintre un motif d’émulation et de courage. […] Quant aux femmes, il a pour elles une admiration de poète, de peintre et de statuaire.
Ô peintre, la nature t’apparaissait par grandes masses concrètes. […] Daudet raconte qu’un an durant le monde des peintres ne jura que par Manette Salomon 31. […] Il est peintre d’âme autant et plus que de figure ; c’est un psychologue avant qu’un physiologiste. […] Il a réellement le don qui fait les bons peintres : il abstrait et généralise sans ôter à la vie. […] Ce dernier livre met en scène un peintre homme du monde de l’avenue de Villiers.
J’ai visité le musée de la Révolution, organisé avec beaucoup d’art et de méthode par l’excellent peintre Fernand Calmettes, qui est, par surcroît, un érudit et un écrivain. […] Il n’y a pas à dire, j’aime la romance, la romance roucouleuse et geignarde, chère aux peintres en bâtiments. […] L’Orient est, pour nous-mêmes, pour nos poètes et nos peintres, le pays somptueux et pittoresque par excellence. […] Il n’y a rien de plus beau (le peintre Duez le sait bien), que des bœufs se profilant sur la mer et sur le ciel. […] Quand l’enfant fut guéri, Félizet, qui l’avait pris en affection, lui demanda : — Est-ce que ça t’amuserait d’être peintre, de faire des tableaux ?
Un peintre fait un portrait de fantaisie, qui n’est d’après aucun modele. […] On dit un habile peintre, un habile sculpteur, parce que ces arts supposent un long apprentissage ; au lieu qu’on est poëte presque tout d’un coup, comme Virgile, Ovide, &c. […] On cite sur-tout cet artifice avec lequel un peintre mit un voile sur la tête d’Agamemnon dans le sacrifice d’Iphigénie ; artifice cependant bien moins beau que si le peintre avoit eu le secret de faire voir sur le visage d’Agamemnon le combat de la douleur d’un pere, de l’autorité d’un monarque, & du respect pour ses dieux ; comme Rubens a eu l’art de peindre dans les regards & dans l’attitude de Marie de Médicis, la douleur de l’enfantement, la joie d’avoir un fils, & la complaisance dont elle envisage cet enfant. En général les imaginations des Peintres, quand elles ne sont qu’ingénieuses, font plus d’honneur à l’esprit de l’artiste qu’elles ne contribuent aux beautés de l’art ; toutes les compositions allégoriques ne valent pas la belle exécution de la main qui fait le prix des tableaux.
Childe Harold, Lara, le Giaour, le Corsaire, Manfred, Sardanapale, Caïn, son Tasse, son Dante et le reste sont toujours un même homme, représenté sous divers costumes, dans plusieurs paysages, avec des expressions différentes, mais comme en font les peintres, lorsque par des changements de vêtements, de décors et d’attitudes, ils tirent du même modèle cinquante portraits. […] Prenez-vous-en à la nature humaine, mes chers moralistes ; ce n’est pas moi qui l’ai faite ainsi ; si vous voulez gronder, adressez-vous plus haut ; nous sommes ici peintres, et non pas fabricants de marionnettes humaines, et nous ne répondons pas de la structure de nos pantins. […] Vous venez d’en avoir une, et digne d’un peintre ; est-ce qu’elle ne vaut pas celle d’un alderman ?
Bref, le poète, le peintre, le sculpteur, le musicien obéira aux lois subtiles de l’Équilibre et de l’Harmonie, dont le seul goût de l’artiste peut décider. […] Le Comte — fine silhouette tenant du muguet, de l’abbé de cour, du dandy, du lieutenant de hussards et de l’artiste peintre affable, reçoit l’Enquêteur. […] Désormais les poètes n’auront plus à être jaloux des musiciens ou des peintres : chacun pourra vraiment crier sa forme.
Les amis du peintre ont donné à ce fidèle employé le nom de Garde-motif. […] Je ne sais plus quel peintre répondait à un amateur qui s’étonnait du prix très haut auquel il avait vendu un portrait enlevé en quelques séances : « Mais voilà trente ans que j’y travaille ! […] Geffroy en général, mais on ne peut nier qu’il les défende avec l’arme la plus persuasive que possède le critique, c’est-à-dire la conviction qui a fait de lui un écrivain comme elle a fait un peintre de M. […] Il semble qu’il ne raconte que ce qu’il a vu ou entendu, et fait en sorte qu’en voyant et en admirant le tableau qu’il vous montre, on ne songe qu’à la peinture, en oubliant le peintre. […] C’est ainsi que nous montre Séverine un peintre de grand talent, M.
C’était le procédé du plus grand peintre de physionomies qu’ait eu la France, — La Bruyère, — c’était celui de Stendhal, de Mérimée et de Flaubert. […] Nous attendons en ce moment en France la venue de l’écrivain qui soit à Balzac ce qu’un de ces grands peintres fut à Giotto. […] Le peintre des mœurs contemporaines se démode avec ces mœurs. […] On y devine bien une antipathie irréductible entre le peintre de chevalet qu’était Sainte-Beuve, et le peintre à fresque qu’était Balzac. […] C’est un peintre, et que Saint-Simon n’a pas surpassé.
Il n’est qu’un moyen de jeter une lumière plus vive sur les énergies que le peintre des mœurs s’est proposé de définir et de caractériser. […] Tous les portraits de Pasteur se ressemblent, à travers les différences entre les âges du modèle et la facture des peintres, par l’expression du regard, si étonnamment attentif. […] Son génie intérieur l’avertissait qu’avant tout, un peintre a besoin de se choisir un modèle. […] Si vous parcourez le sommaire de cet autre recueil d’études : Portraits de femmes et d’enfants, vous constatez la variété des figures historiques qui ont posé devant le peintre, autant dire la diversité singulière et l’ampleur de son érudition. […] Ce romancier-ci — et c’est le troisième trait par lequel il est vraiment un exemplaire très significatif de sa génération — n’est pas seulement un peintre savoureux des mœurs locales et un intellectuel dressé aux meilleures disciplines.
Il n’y a même de tout à fait injuste dans ce jugement que l’avantage décidé que le critique accorde au peintre sur le romancier. […] Nous ne savons si le peintre des Pyrénées, Ramond, a fait une description plus fidèle ; il n’en a pas rencontré assurément de plus transparente et de plus limpide : « Tandis que je gravissais, dit le voyageur, par une ma tinée très-froide, le sentier escarpé qui conduit à Saint-Savin, un brouillard épais remplissait l’atmosphère.
Des peintres comme Watteau ont passé leur vie à s’en régaler. […] Il faut la voir dans Rubens, il est le peintre et le poëte du climat plantureux et humide ; mais on la découvre aussi chez les autres, et, dans cette magnificence de Thompson, dans ce coloris surchargé, luxuriant, grandiose, on retrouve quelquefois la grasse palette de Rubens.
» Cependant, à la requête de la duchesse d’Étampes, le roi fit venir de Bologne à Fontainebleau, son séjour habituel, le célèbre peintre Primatice, pour lui confier la galerie du palais. […] Mais les éloges qui me flattèrent le plus furent ceux des maîtres de l’art, des peintres Jacobo de Puntormo, de l’habile Bronzino, qui ne se contenta pas de compliments, et qui y joignit de beaux vers.
Suivant eux tout respire, tout agit dans ses Poëmes ; c’est le Peintre de la nature. […] Bien différent de ce Peintre admirable dont Pline fait mention, qui donnoit toujours plus de choses à penser aux spectateurs qu’il n’en exprimoit, Ovide ne laisse rien à déviner.
On y distingue pourtant une Visite chez un grand homme, c’est-à-dire chez le poète Le Brun-Pindare qui habitait alors au Louvre un de ces logements si peu dignes du lieu, et qu’on accordait aux peintres, aux gens de lettres.
C’est cette union qui manque essentiellement chez Rousseau, et par toutes sortes de raisons qui font peine à ses admirateurs : ce peintre aux larges et puissantes couleurs vit et habite dans un intérieur souillé.
L’originalité de La Bruyère n’est pas d’avoir fait des portraits tels quels, à la diable, et dessinés plus ou moins couramment à la plume, par manière de jeu de société, comme on les brochait avant lui, mais de les avoir faits serrés, profonds, savants, composés, satiriques, en un mot tels qu’un grand peintre seul les pouvait faire.
Mais tout est gâté par une continuelle préoccupation de l’applaudissement : vous croiriez qu’elle pose toujours pour son portrait devant le biographe. » Voilà le défaut saisi et marqué par un peintre sarcastique.
Un des peintres les plus favorables à Marie-Antoinette, Senac de Meilhan, a dit d’elle que son esprit n’avait rien de brillant et qu’elle n’annonçait à cet égard aucune prétention ; « Mais il y avait en elle, observe-t-il, quelque chose qui tenait à l’inspiration et qui lui faisait trouver au moment ce qu’il y avait de plus convenable aux circonstances ainsi que les expressions les plus justes : c’était plutôt de l’âme que de l’esprit que partaient alors ses discours et ses réponses. » Ici, elle n’en est pas encore à la représentation ; elle n’est que Dauphine et n’a pas à faire de ces réponses qu’on remarque.
Saint-Simon enfin, le grand peintre, — et aussi grand par là qu’il est hasardé en ses anecdotes, — a achevé de le fixer au vif dans la mémoire, quand il a dit à l’occasion de sa mort (22 février 1712) : « J’ai si souvent parlé du maréchal Catinat, de sa vertu, de sa sagesse, de sa modestie, de son désintéressement, de la supériorité si rare de ses sentiments, de ses grandes parties de capitaine, qu’il ne me reste plus à dire que sa mort dans un âge très-avancé [74 ans], sans avoir été marié, ni avoir acquis aucunes richesses, dans sa petite maison de Saint-Gratien, près Saint-Denis, où il s’était retiré, d’où il ne sortait plus depuis quelques années, et où il ne voulait presque plus recevoir personne.
Il faudrait être un peintre pour donner du relief et de la valeur à de semblables tableaux.
« Mon père était peintre en armoiries ; il peignait des équipages, des ornements d’église. — Sa maison tenait au cimetière de l’humble paroisse Notre-Dame, à Douai.
Cette Revue a publié, de la plupart des poëtes et romanciers du temps, des portraits qui, eu égard au peintre comme aux modèles, ne peuvent être considérés en général que comme des portraits de jeunesse : Juvenis juvenem pinxit.
Chateaubriand (suite) XXXIII Cet épisode eut plus de charme que le poëme : la société contemporaine, en retrouvant son pays et ses mœurs, sentit mieux la grandeur du peintre et l’universalité du pinceau.
A vrai dire, il n’est pas moraliste, mais peintre, voilà sa vraie vocation et son réel talent.
C’est un peintre de mœurs charmant, délicat, ingénieux ; c’est un maître écrivain, qui excelle à mettre en scène, comiquement, un travers, un préjugé : mais son observation a la portée du Français à Londres de Boissy, et du Cercle de Poinsinet.
Beaucoup d’écrivains de notre temps se sont épris des arts plastiques ; plusieurs se sont fait des yeux de peintres et par là ils ont mieux joui de l’immense Cybèle.
Ce portrait de Fontenelle par La Bruyère est pour nous une grande leçon : il nous montre comment un peintre habile, un critique pénétrant, peut se tromper en disant vrai, mais en ne disant pas tout, et en ne devinant pas assez que, dans cette bizarre et complexe organisation humaine, un défaut, un travers et un ridicule des plus caractérisés n’est jamais incompatible avec une qualité supérieure.
Saint-Évremond ne croit en rien à l’avenir, et toutes ses espérances, comme tous ses bonheurs, se terminent pour lui au moment prochain ou présent : « Je n’ai pas en vue la réputation, dit-il… je regarde une chose plus essentielle, c’est la vie, dont huit jours valent mieux que huit siècles de gloire après la mort… Il n’y a personne qui fasse plus de cas de la jeunesse que moi… Vivez ; la vie est bonne quand elle est sans douleur. » Lui, qui a si bien pénétré le génie des Romains, voilà pourtant ce qui lui a manqué peut-être pour être leur peintre durable et définitif ; il a laissé cet honneur à Montesquieu.
Voulant dire, par exemple, que les rois ne voient jamais le mal et le danger qu’à la dernière extrémité, et qu’on le leur déguise au travers de mille nuages : « La Vérité, dit-elle, que les poètes et les peintres représentent toute nue, est-toujours devant eux habillée de mille façons ; et jamais mondaine n’a si souvent changé de mode que celle-là en change quand elle va dans les palais des rois. » À propos du chapeau de cardinal qu’on avait promis depuis des années à l’abbé de La Rivière, favori de Monsieur, et que réclamait tout à coup le prince de Condé pour son frère le prince de Conti, elle dira que « la Discorde vint jeter une pomme vermeille dans le cabinet ».
Saint-Simon était un grand peintre et un profond moraliste ; Louis XIV fut un roi.
Richelieu, dans la description de ces scènes qui suivirent le meurtre du maréchal d’Ancre, est un grand peintre d’histoire.
Si jamais cette indulgence pour les poètes, les peintres, les musiciens, devient générale dans le public, c’est une marque que le goût est absolument perdu… Les gens qui admirent si aisément les mauvaises choses ne sont pas en état de sentir les belles.
Necker n’est pas peintre, et il faut attendre, pour le réveil et le triomphe des images chrétiennes, que Chateaubriand soit venu.
Par un art fantasque, par des réticences, des demi-indications, des dialogues notés dans leurs temps, leurs arrêts, leurs inflexions, il esquisse peu à peu, comme un peintre dont on suivrait le travail, quelque physionomie plus complexe, qui ressort par brusques lumières sur un fond vague et brouillé.
Que l’on compare ces descriptions à celles de la maison de la Goutte-d’Or et du boulevard extérieur, à midi, dans l’Assommoir ; du retour du Bois dans là Curée, et de ce rose cabinet de toilette où Mme Saccard laisse de sa mince nudité, à mille autres tableaux encore prodiguement épars dans l’œuvre du peintre le plus complet de la vie moderne un même procédé sera reconnu, de séparer en tout spectacle ses nombreux composants réels, de les énumérer en un détail merveilleusement visible, de les recombiner par une phrase compréhensive de l’ensemble.
Que dirait-on si l’on voyait aujourd’hui l’Italie répudier avec mépris Raphaël, Léonard de Vinci, le Guide, le Corrége, pardonnera peine à Michel-Ange en faveur de ses défauts et n’avoir d’enthousiasme que pour les peintres du Nord, Rubens, Van Dyck et Rembrandt ?
Orateur ardent et grave, peintre passionné des angoisses philosophiques, après avoir construit plusieurs morceaux de la science, il a souffert qu’une équivoque involontaire, fruit d’un penchant secret, vînt rompre le tissu serré et savant de sa morale.
Je l’ai vue dans l’Histoire des Peintres, de Charles Blanc. […] Cette composition est-elle aussi dans l’Histoire des Peintres ? […] Le tombeau de Platen à Syracuse en fait foi ; Winckelmann, et après lui les plus grands peintres contemporains, quittent le pays natal, le foyer, la religion des ancêtres, toutes choses aimées, par désir de la beauté romaine. […] Ne ferait-il pas mieux, suivant l’avis de plusieurs, de tâcher de devenir un bon peintre paysagiste, de s’appliquer à rendre quelques traits de cette belle et grande nature qu’il chérit, qu’il adore au-dessus de toutes choses ? […] Si, en retombant, le couteau s’abîme aux flots de la Lahn, Gœthe sera peintre de paysage ; si la lame fatidique reste suspendue au branchage des saules qui bordent la rive, il quittera la palette et les pinceaux.
Il était peintre, musicien, philosophe, autant que poète. […] Il nous apprend d’abord que, pour être d’origine flamande, comme son homonyme le peintre J. […] Froude n’était pas, comme Pater, un musicien, mais plutôt un peintre. […] Lapidoth, un critique d’art connu surtout pour ses études sur les peintres et graveurs français. […] Pas davantage que les vieux peintres hollandais, M.
L’ordre de la société qui classe les rangs et les professions, où les habitudes contractées se dessinent nettement, n’est donc pas moins nécessaire au succès de l’art des peintres comiques que la liberté de leur pinceau. […] Où voit-il grimacer les figures du peintre ? […] Les applaudissements que chacun de ces morceaux attire au talent du plus grand peintre des ridicules, n’éblouissent pas les connaisseurs sur le défaut de leur inutilité. […] J’ajoute qu’un peintre si ferme et si délicat du ridicule devait sentir trop vivement ce qui l’imprime pour supporter qu’on l’en flétrît. […] « — La représentation de cette comédie (celle du Portrait du peintre, dirigée contre Molière), aura besoin d’être appuyée, et les comédiens de l’hôtel… « — Mon Dieu !
« Nous donnerons à Dieu le titre de producteur ; au menuisier le titre d’ouvrier, au peintre quel nom ? […] Par exemple s’il est question de brides et de mors, il y a l’écuyer qui s’en sert, le sellier et le forgeron qui les fabriquent, le peintre qui en jette sur sa toile une apparence. […] Pourquoi demande-t-elle au dramatiste ce qu’il est très évident qu’elle ne demande pas à un peintre ? […] Il ne prend ses exemples, d’ordinaire, que dans les arts littéraires, et c’est moi qui lui ai fait dire, conformément du reste à sa théorie, que le sculpteur, le peintre et l’architecte doivent être des moralistes. […] Un sculpteur ou un peintre est excellent, est aristos par comparaison à un foulon, à un cordonnier et encore plus à quelqu’un qui ne fait rien du tout.
Les grands peintres sont des hommes auxquels remonte une certaine vision des choses qui est devenue ou qui deviendra la vision de tous les hommes. […] Le peintre l’a isolée ; il l’a si bien fixée sur la toile que, désormais, nous ne pourrons nous empêcher d’apercevoir dans la réalité ce qu’il y a vu lui-même. […] Elle le mit entre les mains du peintre Broc, peut-être aussi du dessinateur Chassériau, qui fréquentait la maison. […] C’est là que le peintre s’est placé. […] L’art du peintre ne consiste donc pas, pour Léonard de Vinci, à prendre par le menu chacun des traits du modèle pour les reporter sur la toile et en reproduire, portion par portion, la matérialité.
Le cuisinier de l’ambassadeur de Rome ne sera pas moins en réputation, et Bernis dut un jour en écrire à M. de Choiseul pour répondre à de sots bruits qu’on faisait courir sur le luxe de sa table : « Un bon ou mauvais cuisinier fait qu’on parle beaucoup de la dépense d’un ministre ou qu’on n’en dit mot ; mais il n’en coûte pas moins d’être bien ou mal servi, quoique le résultat en soit fort différent. » Or, il est constant que Bernis, au milieu de cette table somptueuse qu’il offrait aux autres, ne vivait lui-même que frugalement et d’une diète toute végétale : J’ai été dîner avec Angelica Kaufmann (le peintre célèbre) chez notre ambassadeur, écrit Mme Lebrun dans ses Mémoires : il nous a placées toutes deux à table à côté de lui ; il avait invité plusieurs étrangers et une partie du corps diplomatique, en sorte que nous étions une trentaine à cette table dont le cardinal a fait les honneurs parfaitement, tout en ne mangeant lui-même que deux petits plats de légumes.
Croyez que par là on retrouverait ce qu’on a eu, des poètes, des auteurs, des généraux, des peintres, des politiques, des prédicateurs, etc.
Les Anglais osent de ces choses dans leur poésie, dans leur peinture, et c’est pourquoi leurs poètes peintres ont souvent plus de relief et de vérité que les nôtres.
La conclusion prudente et toute politique du baron de Dietrichstein était : « Don Carlos est un prince infirme et faible ; mais, en revanche, il est le fils d’un puissant monarque. » Les envoyés vénitiens, ces grands diplomates qui se trouvent être aussi de grands peintres, écrivaient de leur côté à leur Sénat, avec encore moins de façons et d’ambages : « Le prince don Carlos est très petit de taille.
encore une fois, sans doute, il est certaines beautés naturelles, simples, éternelles, de ces grands peintres du cœur humain, qui ont été senties de tout temps ; mais, dans les intervalles et pour l’ensemble de l’œuvre, que de restrictions, que de méprises, que de blâmes ou d’admirations à côté, avant que la critique historique fût venue pour éclairer les époques, les mœurs, le procédé de composition et de formation, tout le fond et les alentours de la société au sein de laquelle se produisirent ces grands monuments littéraires !
C’est ainsi que dans son pays natal, où Jomini était loin d’avoir toujours été prophète, le conseil d’État du canton de Vaud décida à son tour que le portrait de son illustre concitoyen serait placé au musée de Lausanne ; et ce portrait s’y voit aujourd’hui, de la main de l’excellent et généreux peintre Gleyre.
Dans cette confiante indifférence, le présent échappait inaperçu, la fantaisie allait ailleurs ; le vrai Moyen-Âge était étudié, senti, dans son architecture, dans ses chroniques, dans sa vivacité pittoresque ; il y avait un sculpteur , un peintre parmi ces poëtes, et Hugo qui, de ciselure et de couleur, rivalisait avec tous les deux.
On arriverait naturellement à cette conséquence assez singulière, que, sous une telle forme sobre et dissimulée, l’esprit poétique, intime, précis, et en tant qu’il touche aux racines mêmes, existe plus peut-être que dans d’autres manières bien autrement brillantes et spécieuses, où le critique écrivain se rapproche et s’inspire davantage de l’orateur et du peintre.
Mais un Frédéric d’Urbin, un Laurent de Médicis, et tant d’autres princes bien petits devant un roi de France, lui avaient par leurs exemples inculqué cette croyance, qu’un souverain accompli se doit à lui-même de protéger toutes les formes de l’esprit et de la science, d’orner son règne de philosophes et d’hellénistes aussi bien que de peintres et de poètes.
Il y faut un génie particulier qu’il serait puéril de juger inférieur, par la qualité, à celui du grand peintre ou du grand écrivain.
Pourtant, de ce qu’aucun peintre n’a pu faire un portrait tout à fait ressemblant, devons-nous conclure que la meilleure peinture soit de ne pas peindre ?
Baju avait pour collègue notamment Théodore Chèze qui, dans un livre amer, L’Instituteur, a dit les rancœurs de sa profession, et le peintre Aimé Pinault, qui a publié des études remarquées sur la perspective et la théorie des couleurs.
Un écrivain ayant osé donner je ne sais plus à qui le nom de « roi des peintres », le jésuite protestait avec indignation ; n’était-ce pas un délit de lèse-majesté que le nom de roi attribué à un simple « artisan », comme on disait alors ?
Béranger a de ces vers heureux qui sont d’un vrai poète et d’un peintre, de ces coins de tableaux frais et riants, à condition qu’ils ne se prolongent pas.
Si nous croyions à la métempsycose, nous dirions que l’âme de quelque peintre de paysage, malheureux en amour, avait passé dans le corps de ce noble cerf, tant il s’est montré artiste dans toutes ses promenades et jusque dans sa chute… Tout cela est poussé un peu loin, un peu marivaudé peut-être ; le conteur s’amuse et abuse : il tient à son joli dire, et, une fois mis en train, il ne le lâche pas.
C’était un talent laborieux, flexible, facile, actif, abondant, se contentant beaucoup trop d’à-peu-près dans l’ordre de la poésie et de l’art, et y portant du faux, mais plein de ressources, d’idées, et d’une expression élégante et précise dans tout ce qui n’était que travail littéraire ; de plus, excellent conteur, non pas tant dans ses Contes proprement dits que dans les récits d’anecdotes qui se présentent sous sa plume dans ses Mémoires ; excellent peintre pour les portraits de société, sachant et rendant à merveille le monde de son temps, avec une teinte d’optimisme qui n’exclut pas la finesse et qui n’altère pas la ressemblance.
L’industrie, après avoir été ainsi l’art primitif des hommes, s’est subtilisée toujours davantage : elle a travaillé sur des matériaux de moins en moins grossiers, depuis le bois et le silex, façonnés par l’artisan des premiers âges, jusqu’aux couleurs mêlées de nos jours sur la palette du peintre ou aux phrases arrangées par le poète et l’écrivain.
L’art n’est plus, comme l’a promulgué le chef du naturalisme, la Nature vue à travers un tempérament, c’est la Nature elle-même qui se volatilise, se transverbe ou s’immobilise, selon que le musicien, le poète ou le peintre l’envisage.
Des peintres et des sculpteurs grecs sont installés en Espagne, des orfèvres asiatiques en Gaule.
Monsieur, Il nous a paru intéressant de rechercher l’état psychique, essentiel et comparé, des artistes (peintres, musiciens, poètes, romanciers), et des scientistes (naturalistes, biologistes, philosophes, sociologues, etc…). […] Hamon et René Ghil, ces derniers ont, désormais, leur vie durant, des volumes tout faits sur la planche… La statistique nous apprend, en effet, qu’il existe, rien qu’en France et dans la principauté de Monaco, quatre cent quatre mille peintres, sans en excepter M. […] Avec un tel luxe de précautions empiriques, pas d’erreurs possibles : on peut, d’ailleurs, en avoir un aperçu, réduit, chaque semaine, dans Le Figaro, où les peintres, invités à établir leur état psychique, essentiel et comparé, à dresser rapidement la nomenclature de leur anthropométrie morale, ne parlent que de leur merveilleux génie et des exceptionnels prodiges que sont leurs facultés picturales, visuelles, auditives, olfactives, tactiles, gustatives, intellectuelles, amoureuses et littéraires, comme M. Benjamin Constant, lequel, interrogé dévotement sur les sensations que lui cause sa propre peinture, déclarait modestement ceci : — Oui, je suis le plus grand peintre de ce temps, et peut-être de tous les temps… Mais, que voulez-vous ? […] C’est une petite revue fort ennuyeuse, qui est toute imprégnée de ma pensée, et qui organise les expositions des Peintres de l’âme.
D’ailleurs les peintres les plus fameux de la Renaissance ont-ils travaillé autrement ? […] Il s’accomplit d’une manière si intimement mêlée à la personnalité qu’un Claude Bernard, un Pasteur, un Cauchy, un Le Verrier, un Henri Poincaré, sont des génies aussi individuels, chacun dans leur domaine, que ces peintres et ces écrivains dont je citais tout à l’heure les noms. […] Ces peintres de génie créaient leur œuvre personnelle en acceptant cette servitude. […] Dans un code conforme à la nature, il ne devrait pas plus pouvoir l’aliéner d’une manière totale, que le peintre ses tableaux, ou le sculpteur ses statues. La chose est si évidente que nous trouvons injustifiable que telle toile d’un Millet ou d’un Degas, payée un certain prix, soit revendue un autre prix, sans que le peintre ou ses héritiers prélèvent une part sur la plus-value.
— Aussi, chez ces derniers, les portraits sont exacts et tristes comme des signalements de police ; ceux d’un Rastignac ou d’un Marsay sont transformés, glorifiés par la vision intérieure du peintre. […] Comme Atala, la pauvre Lise inspira tous les artistes, depuis les peintres jusqu’aux porcelainiers. […] Dans cette nombreuse galerie de coquins, aucun ne pose pour l’ensemble, comme disent les peintres ; l’artiste ne dessine de ses personnages qu’un seul trait, identique chez tous, il les met à contribution pour un vice unique. […] Il s’y lia étroitement avec le peintre Ivanof ; cet artiste étrange et puissant, retiré chez les Capucins du mont Soracte, travaillait depuis vingt ans au tableau qu’il n’acheva jamais, l’Apparition du Christ. […] Corot, Rousseau, Millet donneraient une idée assez exacte de la tendance commune et des nuances personnelles dans les trois talents que nous déchiffrons ; la préférence que l’on garde a l’un de ces peintres préjuge le goût que l’on ressentira pour l’un de ces romanciers.
Son dernier livre, Flirt, dont la critique s’est beaucoup occupée, correspond un peu aux élégances délicates jusqu’à la gracilité de l’américanisme anémique du peintre Jacques Blanche. […] Il y a de grands peintres, tels que Puvis de Chavannes et Eugène Carrière, qui expriment cette vérité et que le public admet et même glorifie, parce qu’il ne la comprend pas. […] D’autres préférences : les poètes anglais Swinburne, Rosetti, William Morice, le peintre Burne-Jones ; en France, Puvis de Chavannes, Baudelaire, Laforgue, les Cahiers d’André Walter. […] Même pour une figure de rêve pur, un peintre est tenu à respecter l’anatomie à ne pas faire divaguer les lignes, à ne pas plaquer d’impossibles couleurs, à ne pas s’abandonner à des perspectives chinoises. […] Et il est clair, au moins, celui-là, et c’est avec cela un peintre d’une couleur et d’une intensité extraordinaires.
Imaginez au-delà du pont deux ou trois fermes, un colombier, des tourterelles, une trentaine de masures séparées par des jardins, par des haies de chèvrefeuilles, de jasmins et de clématites ; puis du fumier fleuri devant toutes les portes, des poules et des coqs par les chemins : voilà le village du Pont-du-Ruan, joli village surmonté d’une vieille église pleine de caractère, une église du temps des croisades, et comme les peintres en cherchent pour leurs tableaux. […] Son air exprimait une simplesse, jointe à je ne sais quoi d’interdit et de songeur qui ramenait à elle comme le peintre ramène à la figure où son génie a traduit un monde de sentiments.
Vous consultez un peintre qui a composé quelques poèmes… plastiques. Il a ses préférences… de peintre et il pense, rêve et s’émeut devant les éblouissantes toiles de Th.
S’étant fait accompagner de vingt-cinq peintres d’égal talent, Topffer les installe au milieu d’une prairie où paît un âne. […] Topffer, Réflexions et menus propos d’un peintre genevois, livre 4, chap.
Si le peintre n’était que peintre, cela serait facilement monotone et fastidieux ; mais le peintre est poète dans l’invention et dans la description de ses sujets.
J’arrachai la lame au furieux, la brisai sur mon genou et confiai, devant rentrer de très bonne heure chez moi, le « gamin », à moitié dégrisé maintenant, au peintre bien connu, Michel de l’Hay, alors déjà un solide gaillard en outre d’un tout jeune homme des plus remarquablement beaux qu’il soit donné de voir, qui eut tôt fait de reconduire à son domicile de la rue Campagne-Première, en le chapitrant d’importance, notre jeune intoxiqué, de qui l’accès de colère ne tarda pas à se dissiper tout à fait, avec les fumées du vin et de l’alcool, dans le sommeil réparateur de la seizième année. […] Car le poète n’est-il pas littéralement — et non pas latéralement, comme quelques amateurs de la discorde l’ont prétendu — le confrère du peintre et du sculpteur, aussi bien que du musicien ? — Et, d’autre part, le peintre, le sculpteur, non moins que le musicien, ont le droit, contestable, mais absolu, de répudier cette solidarité entre leur art et le nôtre, à titre, dame !
Combien on l’eût étonné cependant, ce grand seigneur bel-esprit, si on lui eût dit que son immortalité tiendrait un jour, qui n’était pas loin, — uniquement à cette gloire : qu’il serait reconnu un des grands écrivains de son siècle ; et comme on l’eût fâché si l’on eût ajouté : Monseigneur, ces hommes dont vous parlez si légèrement, ces peintres, ces poètes, ces musiciens, ces architectes, ces philosophes, ce comédien Molière, — et plus tard, ce fils de votre notaire, Arouet, que vous voulez bien appeler un garçon d’esprit, survivront tout bonnement, non seulement par leurs chefs-d’œuvre, mais encore par les plus simples bagatelles de leur génie, à cette imposante société française qui, pour vous M. le duc, commençait au roi, et s’arrête aux ducs et pairs […] puis quel charmant peintre de genre ! […] Le peintre Damon qui est son ami, et qui devait faire le portrait de cette adorable personne, l’envoie à sa place chez le Sicilien ; comme il manie le pinceau, contre la coutume de France qui ne veut pas qu’un gentilhomme sache rien faire, il aura au moins la liberté de voir cette belle à son aise. […] » Précepte excellent dont nos peintres de portraits se devraient souvenir un peu plus.
Les pages où le peintre Jules Breton conte son enfance sont exquisement vraies. […] *** Blanche Leschassier présente des jeunes filles raisonnables et dévouées et qui savent sacrifier leur amour au bonheur de leurs nièces, à des peintres timides qui taisent cinq ans la plus vive des passions et qui, si on remarque leur tristesse, se hâtent de « mettre sur le dos du temps et de la saison la véritable raison de leur mélancolie ». […] *** Joseph de Nittis fut un peintre charmant. […] Manoël de Grandfort — qui fit une œuvre charmante et émue, puisqu’elle est la mère de Marni — tresse des couronnes aux auteurs de livres nouveaux et Pauline Vigneron rédige les réclames pour peintres. […] *** Impunément aussi, Jeanne Amen, peintre de fleurs et directrice d’un cours de peinture, m’aura, parmi des conseils techniques probablement utiles, conté tant d’anecdotes indifférentes de professeur aimable et bavard.
Tout ce qu’il nous montre a été vu et bien vu par lui ; c’est pour moi plus un poète qu’un romancier, plus un peintre peut-être aussi qu’un poète ; pour être juste, il faudrait, je crois, lui décerner ces trois qualités à la fois, mais, attendons l’avenir qui ne peut manquer de consacrer par le succès, son talent fait d’émotion et de simplicité. […] La gloire de Delacroix, comme peintre, est trop grande pour qu’on ait à la discuter aujourd’hui ; c’est l’homme qu’il faut connaître dans l’intimité ; les lettres qu’on va lire et qui ont été réunies avec soin, pour être publiées chez Quantin, donneront une juste idée de la finesse de l’esprit, de la supériorité de l’intelligence et de la vaillance du cœur d’Eugène Delacroix.
Les beautés de l’entrée et du hall central, pour lesquelles, je le déclare avec joie, beaucoup de peintres, de décorateurs, d’harmonistes auraient été convoqués autour de chefs d’équipe, dont je serais, je pense, seraient augmentées de l’inconnu de salles encore non terminées, et dont nous annoncerions l’ouverture pour la prochaine exposition. […] Il n’y a plus guère de bons peintres flamands ; il n’y avait plus, dès longtemps, de poètes. […] Et la pauvre Godelieve aux yeux de lac, au teint de lait, n’est-elle pas de la famille de ces douces femmes closes dans une quotidienne simplicité, enrichissant de profondeur tout détail de vie qu’elles touchent, à travers qui les peintres primitifs ont effigié les saintes femmes, celles qui pleurent aux pieds du Christ et les madones un peu lourdes et gauches, mais d’un si intime recueillement, auprès de qui l’enfant Jésus tourne les pages d’un livre ? […] L’École réclamait, contre un modernisme assez lâche, le droit à l’évocation des mythes, à l’ésurrection historique, à l’exotisme ; ses alliances allaient vers les peintres symboliques et les préraphaélites, et aussi défendaient les premiers impressionnistes ; son engouement se précisait musicalement vers Wagner ; en prose les adeptes voulaient suivre Théophile Gautier et Banville dans leur art de la nouvelle un peu ailée, contemporaine, mais de haut. […] Il y a un poème auquel il dut attacher de l’importance, car il le publia à part, c’est une Marie-Madeleine, contée selon l’imagerie populaire et comme un conte tout moderne, avec un Christ apparaissant, comme Uhde, le peintre bavarois, en peignit dans des intérieurs modernes d’ouvriers et de paysans, tout près, il est vrai, d’Oberammergau.
Lassay, tout en s’en faisant honneur, reconnaissait que ce portrait était flatté, et il répondait au peintre par un mot du maréchal d’Ancre : « Tu me flattes, mais ça me fait plaisir (Tu m’aduli, ma mi piace). » La vieillesse fut son bel âge.
Scheffer étonné appela dans son atelier l'enfant qui marquait ces heureuses dispositions, lui dit de revenir tous les jours et en fit un peintre de mérite, qui tient aussi de la bonté de sa mère.
Vinet quand il devient du meilleur aloi : car c’est alors un écrivain plutôt encore graveur que peintre.
Les grands et éternels peintres, qui certes savaient le mal aussi, les Shakspeare, les Molière, l’ont- ils jamais exprimé dans ces raffinements d’exception, dans cette corruption calculée ?
Toutefois, malgré la parenté des religions et la communauté de certaines croyances, il y a dans le judaïsme un élément à part, intime, primitif, oriental, qu’il importe de saisir et de mettre en saillie, sous peine d’être pâle et infidèle, même avec un air d’exactitude : et cet élément radical, si bien compris de Bossuet dans sa Politique sacrée, de M. de Maistre en tous ses écrits, et du peintre anglais Martin dans son art, n’était guère accessible au poëte doux et tendre qui ne voyait l’ancien Testament qu’à travers le nouveau, et n’avait pour guide vers Samuel que saint Paul.
J’aimerais à le voir quelquefois, à l’entendre établir et revendiquer ici quelques-uns des principes de la société nouvelle, dût-on l’écouter en frémissant… Mais ce n’est point de cela qu’il s’agit en ce moment ; j’aimerais, dis-je, que le prince Napoléon fût présent, car ce serait à lui plus qu’à personne qu’il appartiendrait de venger le grand écrivain, le grand peintre, la femme cordiale et bienfaisante dont il est l’ami.
Les géomètres, les physiciens, les peintres et les poètes recevraient des encouragements sous le règne de rois tout-puissants, tandis que la philosophie politique et religieuse paraîtrait à de tels maîtres la plus redoutable des insurrections.
Malgré tout, Guillaume de Lorris est plus poète qu’orateur, et plus peintre que moraliste.
Sarcey sont peut-être les mêmes raffinés qui se piquent d’apprécier les tableaux et les statues en peintres et en statuaires et qui n’y veulent point de « littérature ».
On peut sans doute distinguer le Hugo d’avant les Contemplations et celui d’après, mais c’est tout ; et si vous cherchez à saisir ses « manières » successives, vous trouverez que ce sont justement celles que le dictionnaire Bouillet signale chez je ne sais quel grand peintre : « Première manière : il se cherche ; deuxième manière : il s’est trouvé ; troisième manière : il se dépasse. » Ainsi, la poésie de Hugo s’enrichit d’un vocabulaire de plus en plus vaste, se fait un bestiarium de mots et d’images toujours plus fourmillant, plus rugissant et plus fauve.
s’il pouvait tout réduire en cubes, comme font les peintres, l’univers ne serait plus qu’un jeu d’enfant et la pensée nous deviendrait légère comme la plume au vent !
Personne n’a peint un tapis de Turquie aussi bien que Gérard Dow, mais il est resté un peintre de genre.
À douze ans, dans un grenier, Rimbaud a connu toutes les femmes des anciens peintres.
C’est à l’historien de mettre en parallèle la situation qui leur’ fut faite à chaque époque avec la représentation qu’en ont donnée les peintres attitrés des mœurs.
La vie débraillée, hasardeuse, débauchée se rencontre plus fréquemment parmi les nobles, les peintres, les gens de lettres que dans un milieu de commerçants qui ont un intérêt trop puissant à être prudents et rangés.
Or cette prédominance des associations synchroniques produit une tendance à concevoir les choses sous des formes concrètes, colorées, riches d’attributs et de détails : disposition d’esprit qu’on appelle l’imagination et qui est une des facultés du peintre et du poëte.
Tous les arts de ce temps portent son cachet ; le grand peintre Watteau, venu trop tôt pour elle, créant un monde pastoral enchanté, semble ne l’avoir décoré et embelli que pour qu’elle en prenne possession un jour et qu’elle puisse s’y épanouir et y régner.
Il s’est enthousiasmé d’un idéal d’art et de littérature : il voit dans cet enthousiasme une vocation, et il attend la révélation soudaine du don qui va le sacrer poète, peintre ou romancier, tout au moins critique d’art, économiste, historien.
Les traducteurs sont comme les peintres de portraits ; ils peuvent embellir la copie, mais elle doit toujours ressembler à l’original.
Le peintre espère vivre au moyen de la toile où son talent se prouve ; le modèle espère vivre aussi dans cette même toile où son image est fixée. […] Pascal découvrant la géométrie à l’âge de douze ans était sûrement né pour les mathématiques ; les plus grands poètes et les plus grands peintres du monde auraient pu se pencher sur le berceau de l’enfant et diriger tes premières études du jeune homme, sans incliner son austère génie vers la poésie ou vers la peinture. […] Comme l’a remarque Stuart Mill, la supériorité des anciens peintres soi les modernes est due à ce « qu’un grand nombre d’hommes doués d’un esprit de premier ordre s’adonnaient alors à la peinture. Au xive et au xve siècle, les peintres italiens étaient les hommes les plus accomplis de leur temps. […] Dans un certain sens et à un certain degré, toute la peinture est symbolique, puisque l’art même n’est que symbole ; mais il y a des peintres dont le symbolisme est conscient et voulu, comme Chenavard et Cornélius ; il y a des toiles si profondément imbues de pensée qu’elles offrent aux méditations du moraliste une inépuisable matière.
Cette réaction, si naturelle chez les âmes généreuses, a trouvé dans M. de Lamartine un observateur studieux, un peintre fidèle. […] Le style de Raphaël ressemble à ces ébauches où le peintre, délibérant avec lui-même, n’ayant encore rien décidé d’une manière définitive, essaie tour à tour les lignes et les tons qui se présentent à sa pensée. […] La pièce à un Riche exprime aussi bien que la Soirée en mer une idée vraie ; personne ne contestera que l’intelligence de la nature, la faculté de jouir de la splendeur du ciel, de la verdure des forêts, donne au peintre, au rêveur, au poète, une félicité souvent supérieure à celle du riche qui possède, sans les comprendre, le murmure et l’ombre de ses bois.
« Ce sont là, dit-il, les petites chicanes de petits esprits : un poète néglige la distinction accidentelle du pays et de la condition, comme un peintre, satisfait de la figure, s’occupe peu de la draperie. » Il est inutile de relever le mauvais ton et la fausseté de cette critique. […] Non seulement, elle en réprime l’énergie dangereuse et les ennoblit par des motifs plus purs, mais elle les élève, par la règle même quelle leur impose, à une hauteur encore plus héroïque qui assure la prééminence des caractères que nous admirons dans nos histoires modernes. » On peut appliquer ici pour jugement à l’auteur la comparaison qui suit immédiatement ce morceau, aussi bien pensé que bien écrit : « C’est ainsi que dans les ouvrages immortels auxquels nous sommes toujours ramenés par un attrait inépuisable, on reconnaît l’expression d’une belle imagination, soumise à une raison forte et sévère, mais enrichie de ses privations mêmes, et qui venant à se déclarer par intervalles, atteste toute la grandeur de la conquête. » Le reste de la vie de Rollin est rempli par ces petits détails qui plaisaient tant à Plutarque, et qui lui faisaient dire : « Comme les peintres qui font des portraits, cherchent surtout la ressemblance dans les traits du visage, et particulièrement dans les yeux où éclatent les signes les plus sensibles des mœurs et du naturel, il faut qu’on me permette de rechercher dans l’âme les principaux traits, afin qu’en les rassemblant je fasse de la vie des grands hommes un portrait vivant et animé56. » On nous saura gré de citer en entier le mouvement oratoire par lequel l’auteur termine son ouvrage : « Louis XVI, frappé d’une renommée si touchante, a acquitté ce que nous devions à la mémoire de Rollin : il a élevé son nom jusqu’aux noms les plus fameux, en ordonnant qu’on lui dressât une statue au milieu des Bossuet et des Turenne. […] Pour faire un portrait aussi fidèle, il ne suffisait pas d’avoir le modèle sous les yeux ; il fallait encore posséder, dans un degré éminent, le talent du peintre.
Peut-être n’est-il pas sans opportunité de remarquer combien le plus sagace peintre de mœurs paru chez nous, depuis Molière, allait à l’encontre des sophismes que professent aujourd’hui, avec un esprit plus sectaire que jamais, les héritiers des Jacobins. […] C’est quelque peintre espagnol d’un dur et âpre réalisme, un Zurbaran, un Valdès Leal. […] Voilà le secret de ces débuts minutieusement descriptifs, celui d’Eugénie Grandet, celui du Père Goriot, celui de Béatrix, où la plume de l’écrivain rivalise avec le pinceau du peintre pour brosser un tableau : vieille rue abandonnée de province, coin perdu d’un antique quartier parisien. […] Un peintre merveilleusement doué, mais chez qui l’esprit critique fonctionne avec une énergie égale à celle du génie, s’est tellement acharné, et pendant tant d’années, à mettre sur une toile toutes les intentions entrevues dans sa pensée, qu’il a peu à peu détruit son œuvre en croyant la rendre parfaite. […] Pareillement, peintres incomparables de la passion, ils n’en ont jamais montré qu’une : la leur.
Le Licencié, le Maître d’école, la Vieille Marquise, la Procureuse, le Peintre des femmes… — Ch. […] On peut regretter à ce propos que l’auteur de Turcaret n’ait pas glissé dans ce volume la moindre allusion au Système, et que l’étrange carnaval dont Law mena le branle n’ait pas trouvé son peintre dans Le Sage ; mais le romancier n’a-t-il pas peut-être fait encore mieux que cela ? […] Après s’être défait avantageusement de ses toiles, c’est un peintre qui vend ses études, puisqu’aussi bien son nom ne laisse pas d’y mettre du prix. […] Rencontre singulière, à coup sûr, qu’une telle idée appartienne en propre à l’homme que l’on considère plutôt comme le peintre achevé des élégances mondaines du xviiie siècle ! […] cette verve, presque cynique, du peintre ordinaire des Dorante et des Lélio, des Araminte et des Silvia ?
Cette comédie, ou plutôt cette plate satire, n’eut pas les honneurs de la scène, malgré l’empressement avec lequel les comédiens de l’Hôtel de Bourgogne, jaloux d’Élomire 36 saisissaient toutes les occasions de contrarier ses succès ; ils le prouvèrent en donnant Le Portrait du peintre, ou la Contre-Critique de l’École des femmes, comédie en un acte et en vers, de Boursault, qui avait cru se reconnaître dans le portrait de Licidas. […] Cette année vit naître et le meilleur modèle que nous ayons dans le genre gracieux, Le Sicilien, ou l’Amour peintre, et le chef-d’œuvre comique de tous les lieux, de tous les temps, Le Tartuffe. […] Le Sicilien, ou l’Amour peintre. La reprise du Ballet des Muses ayant eu lieu à Saint-Germain, au mois de janvier, fournit à Molière l’occasion d’en retirer les Pastorales qu’il avait données l’année précédente, et dont il était aussi mécontent que ses amis ; il substitua, à ces deux ouvrages indignes de sa plume, Le Sicilien, ou l’Amour peintre. […] Je sais qu’un comédien qui, en parlant à son interlocuteur, le regarderait constamment entre deux yeux, ferait une des gaucheries les plus contraires à son art, parce que, dans le monde, ce n’est point l’usage ; parce que la partie des spectateurs à laquelle il tournerait le dos, ne pourrait ni l’entendre distinctement, ni voir l’expression de son visage ; mais je sais aussi que les acteurs, en pareil cas, ont, comme les peintres, la ressource des trois quarts : le Cléante dont je parle me semble négliger un peu trop cette règle.
L’extrême beauté de ses lèvres a toujours échappé à tous les peintres et à tous les sculpteurs. […] Encore aujourd’hui, si je viens à penser à l’expression qu’un grand peintre devrait donner au génie, cette tête sublime reparaît tout à coup devant moi. » Et dans une autre occasion : « J’eus un instant d’enthousiasme.
Verdurin disait au peintre : « Je crois que ça chauffe. » Et la présence d’Odette ajoutait en effet pour Swann à cette maison ce dont n’était pourvue aucune de celles où il était reçu : une sorte d’appareil sensitif, de réseau nerveux qui se ramifiait dans toutes les pièces et apportait des excitations constantes à son cœur. […] Elle rappelait ainsi plus encore qu’il ne le trouvait d’habitude, les figures de femmes du peintre de la Primavera. […] Je sentais chez Proust dès ce moment l’héritier direct de nos grands peintres de caractères. […] Verdurin disait au peintre : « Je crois que ça chauffe. » Et la présence d’Odette ajoutait en effet pour Swann à cette maison ce dont n’était pourvue aucune de celles où il était reçu : une sorte d’appareil sensitif, de réseau nerveux qui se ramifiait dans toutes les pièces et apportait des excitations constantes à son cœur.
voilà ton raisonnement qui a le nez cassé. » Enfin Molière, en peintre impartial, laisse à son don Juan les deux vertus essentielles du gentilhomme, le courage et le, sentiment de l’honneur, dans la scène de grande allure où il défend contre des voleurs le frère d’Elvire et, reconnu, se met à sa disposition. […] C’est ce que ne veulent jamais les peintres de l’amour au théâtre : cela serait pourtant aussi vrai que le contraire. […] Heureux même les ouvriers des arts plastiques, peintres ou sculpteurs !
Les armures dont se revêtent les rois d’Argos, de Thessalie, et les princes d’Ilion, ont reparu dans tous les tableaux de nos peintres, qui ne nous les ont fait voir sur la toile qu’après les avoir vues chez les poètes grecs et latins. […] Ces tragiques événements, et quelques autres qui les suivent, se détachent en haut relief sur le tableau que le docte peintre a semé de groupes habilement distribués sur les divers plans, afin que des couleurs distinctes et des traits vivement prononcés échappassent à la confusion de mille objets horribles. […] Ces sortes d’épreuves, dont les lecteurs honnêtes frissonnent pour les héroïnes, m’ont convaincu qu’elles ne doivent entrer qu’épisodiquement dans l’épopée sérieuse ; la vaillante effronterie de ces belles aventurières les relègue chez les muses grivoises du Roland furieux et de la Pucelle ; car, dans la poésie et dans la peinture homérique, la plus noble cavalière ne sied pas si bien qu’une Hélène inspirant la volupté, qu’une Andromaque pleurant sur le malheur des combats, et qu’une Hersilie séparant des guerriers par la seule puissance des larmes, cette Hersilie qui inspira l’un des plus beaux tableaux au grand peintre des Horaces et de Léonidas ! […] Le peintre d’une autre discorde civile, Lucain, a dans une vue différente, mais avec un succès pareil, épisodiquement offert une leçon aussi recommandable ; il présente aux réflexions des Romains, faisant consister leur gloire à servir des tyrans, l’exemple de Sœva, longtemps soldat obscur, et nommé centurion dans l’armée de César. […] Le luxe, la beauté des caractères typographiques, soutenus d’un tirage égal et pur, et sortis de l’imprimerie de Firmin Didot, l’élégance et la correction des gravures exécutées sur des dessins dirigés par le goût exquis de Gérard, l’un de nos grands peintres, la vie du poète, et le commentaire du poème, recommandent cet ouvrage aux yeux comme à la pensée.
Leurs théories esthétiques, qu’établissaient Tieck et les Schlegel, rompaient avec celles que Goethe soutenait : ils célébraient les peintres primitifs, opposant Albert Dürer à Raphaël, admirant les fresques devant lesquelles Goethe passait, en Italie, avec un si tranquille dédain ; ils adoraient la poésie populaire, la vraie, celle dont Clément Brentano et Achim d’Arnim recueillaient de si curieux spécimens ; ils exhumaient Calderon et le proclamaient supérieur à Shakespeare, à cause de la Dévotion à la croix ; ils se pâmaient dans les nuages de la philosophie des Fichte, des Schelling, des Schleiermacher, leurs vrais maîtres ; ils étaient patriotes enfin avec passion : les Arndt, les Rückert, les Koerner sortaient de leurs rangs. […] Il y marche dès ses premières années, dès l’époque où le peintre Oeser lui enseignait que la sérénité est le caractère essentiel des œuvres d’art, où il se passionnait pour Winckelmann et pour la sculpture grecque. […] Le joyeux stagiaire de Wetzlar, le brillant rédacteur des Annonces littéraires de Francfort, le volage amant de Frédérique qui, huit jours après avoir quitté Charlotte, l’oubliait auprès de Maximilienne, peintre du sentiment, de la mélancolie, du désespoir d’aimer, du mal de vivre ! […] Et puis, sans compter les faux frères que nous connaissons, vint la série interminable des imitations, dans toutes les langues : une armée de sous-Werther, plus ou moins exactement calqués sur le modèle, s’exprimant comme lui, agissant comme lui, battant la menue monnaie de ses propos, de ses pensées, de ses sensations : Jacopo Ortis, Saint-Alme, Le Peintre de Salzbourg, Werthério Stellino, le Nouveau Werther (comme on avait écrit le Nouveau Robinson), et combien d’autres ! […] Parmi les hommes, il faut citer, à côté de Wieland, en partie absorbé par le souci de sa nombreuse famille, le capitaine prussien Knebel, chargé jusqu’alors de l’instruction militaire des jeunes princes ; le professeur Musäus, auteur du Grandison allemand, qui avait renoncé au roman sentimental pour recueillir de précieux récits populaires ; Bertuch, qui traduisait Don Quichotte ; le peintre Kraus, élève de Greuze et de Boucher ; le ministre Fritzsch, président du Conseil, homme de confiance de la Duchesse-mère, dont l’astre allait bientôt pâlir, etc.
Un peintre, fort amoureux de son talent, disait à ceux qui l’entouraient en regardant un paradis qu’il venait de terminer pour la représentation d’un Mystère. […] — Anecdote d’un peintre à propos de cette tragédie. […] Il fit prix avec le peintre ; mais on prévint ce dernier que le comédien était un mauvais payeur. […] Le peintre feignit d’être très-content de ce qu’on lui offrait et engagea l’acteur à passer plusieurs fois sur le tableau une éponge imbibée de vinaigre, pour lui donner plus d’éclat. […] Évidemment il était né poëte, comme d’autres sont nés mathématiciens, peintres ou sculpteurs.
Quoi qu’il en soit des hypothèses qu’on a formulées sur les lendemains de la guerre, une nouvelle France va naître, dont il est malaisé de prévoir et le bonheur et les travaux : cette nouvelle France aura ses peintres attentifs. […] Mais, dissimulé même, le sentiment du peintre, on l’aperçoit. Ceci le révèle : la manière du peintre change selon que, toujours attentif, il copie l’humanité ou la nature. […] Un peintre, un artiste : elle a eu la certitude de n’être pas née pour épouser ce frivole. […] Le peintre n’a épargné ni les vives couleurs, ni les lignes hardies.
Encore un coup, l’honneur de Du Bellay est de susciter de pareils rapprochements et de les supporter sans trop avoir à s’en repentir : « Ce n’est pas toujours en troupes que ces oiseaux visitent nos demeures, disait le grand peintre de notre âge ; quelquefois deux beaux étrangers, aussi blancs que la neige, arrivent avec les frimas : ils descendent, au milieu des bruyères, dans un lieu découvert, et dont on ne peut approcher sans être aperçu ; après quelques heures de repos ils remontent sur les nuages.
Car que d’atermoiements, si l’on s’en souvient ; et, une fois la discussion commencée, que d’amendements, que de correctifs, que de repentirs, comme disent les peintres !
Quand Raphaël eut pris le premier rang parmi les peintres, le Corrège, pour ne pas étudier les fresques du Vatican, alla-t-il chercher des modèles sur les gothiques vitraux des églises ?
Cette fable des Lapins, malgré des traits charmants, est de ses plus faibles ; outre qu’on ne s’attend pas à y voir le peintre et l’ami des lapins à l’affût sur un arbre, Poudroyant à discrétion Un lapin qui n’y pensait guère.
Ce que je connais de mieux en ce genre, c’est celle de Satan dans le Paradis perdu. » Mais il était difficile, on en conviendra, à l’ancienne société de deviner cet orgueil de Satan dans le sensible et anodin auteur de La Jeune Indienne, ou dans le peintre tragique si adouci de Zéangir.
Peut-être, sans moi, se serait-il fait peintre, et doué comme il l’était, il aurait fait son nom, sans s’arracher la cervelle… et il vivrait.
Taine a écrit d’admirables études d’ensemble sur l’art en Grèce, en Italie, aux Pays-Bas ; mais vouloir connaître le génie propre et personnel de tel sculpteur ou de tel peintre d’après ces études de milieux extérieurs, c’est comme, si on voulait déterminer l’âge d’un individu d’après la moyenne d’une statistique, pu les principaux événements d’une vie par l’histoire d’un siècle.
Leurs vertus sont peintes avec d’autant plus de sincérité qu’elles respiroient dans la personne du peintre, ainsi que dans ses écrits.
D’un autre côté, après avoir peint tant d’esprits dont les proportions ne font du peintre qui les reproduit qu’un faiseur de pastels ou de miniatures, quelle que soit d’ailleurs la supériorité de son art, l’auteur des Portraits littéraires était digne de nous dérouler quelque grande toile où le génie épique de Virgile se fût dressé dans toute sa stature et eût respiré de vie dans sa tranquille immortalité.
S’agit-il non plus seulement des habits ou des usages, mais des arts, on remarquera que les arts n’ont presque plus de patrie, qu’un peintre italien peint comme un belge, que les styles s’universalisent, — et d’autre part que chacun veut sa manière, qu’il n’y a plus d’écoles, que les artistes, divisés sur tout, n’ont plus qu’un parti pris commun, celui de l’individualisme148.
ce restaurateur de la naïveté homérique, ce peintre des champs et de la vie pastorale fut d’abord un poëte de cour.
Les autres arts, celui du peintre, par exemple, ou du sculpteur ou la musique, évitent cette confusion. Les mauvais peintres, sculpteurs et musiciens sont pourtant des peintres, sculpteurs et musiciens ; et tout écrit n’est pas de la littérature. […] On ne peut opposer l’art à la vie. » Et, dans Le Voyage du condottière : « Il n’y a pas de grands peintres, ni de grands poètes : il n’y a que de grands hommes. » Ailleurs encore, dans la troisième série des essais Sur la vie : « Les mots vivants font le poète et l’écrivain. […] Les peintres les plus attentifs à noter fortement l’aspect des heures incertaines peignent des matins qui ont l’air de soirs ; et ils peignent des soirs si roses qu’on les prendrait pour des matins.
Vainement consultera-t-on la nature, si l’on n’a pas appris à l’interroger, à la voir sous mille aspects : on ne saura copier ses traits, si l’on n’a pas acquis l’art et l’habitude de ses premiers peintres. […] « Ce peintre, qui d’Alceste a tracé les vertus, « Ton Molière immortel admire mon Plutus. […] C’est là qu’un peintre des hommes peut répandre toutes les couleurs de sa palette, et disposer en son plan une mobile et riche ordonnance ; c’est là que se déploie la force comique, tant par les discours que par les faits ; c’est là que le vice ou le ridicule, traîné en personne sur le théâtre, y est publiquement fouetté par Thalie. […] Cette nécessité d’observer la mesure propre à l’action est tellement considérable que la beauté des drames en dépend ; ainsi que la perfection des statues ou des figures d’un peintre résulte de la proportion correcte de leur dessin.
Il serait très inexact d’admettre une influence quelconque des peintres dits impressionnistes sur la poésie de Mallarmé, comme d’ailleurs, en général, d’une peinture sur une poésie. […] Le rappel intermittent de ces lieux communs lui paraît une convention acquise de l’art, comme aux mêmes peintres le contour dessiné des objets apparaît une abstraction d’optique. […] Un Corneille, un Racine, un La Fontaine, n’ont prétendu à rien autre qu’à traiter consciencieusement un sujet précisé : ils sont, en ce sens, les frères de leurs contemporains, les peintres hollandais. […] Quand on observe qu’impressionniste il fut épris de logique, on doit, pour ne pas s’en étonner, se souvenir que les impressionnistes eux aussi furent des peintres logiciens. […] La couleur préférée de Mallarmé, celle qui sans cesse revient dans ses images, — lys, cygnes, neiges, glaces — c’est le blanc, à la fois synthèse, pour l’œil, des couleurs, et, pour le peintre, leur absence.
Il y a des Classiques qui ne sachant pas le grec se ferment au verrou pour lire Homère en français, et même en français ils trouvent sublime ce grand peintre des temps sauvages. […] Étienne et tous les censeurs de la police impériale n’auraient-ils pas frémi à la vue du jeune paysan illustré par son épée, dans les campagnes de la révolution, fait comte de Stettin par Sa Majesté l’Empereur, et s’écriant lorsque sa fille veut épouser un peintre : « Jamais, non jamais l’on ne s’est mésallié dans la famille des Stettin » ?
C’est le Peintre du cœur, le Poëte de toutes les ames sensibles, qui, dans ses ouvrages, a porté la langue Françoise au dernier degré de perfection & de pureté. […] Le Peintre charmant de Ververt & de la Chartreuse n’a pas moins mérité les suffrages du goût, lorsqu’il a mis sur le Théâtre sa Comédie du Méchant.
On y voit l’art des plus grands Orateurs & le coloris des plus grands peintres. […] Ce que j’en ai lu par-ci par-là, me donne l’idée d’un homme plus sçavant que judicieux, d’un écrivain médiocre & d’un foible peintre.”
Après quelques tâtonnements, que l’art du peintre cherche à nous épargner en nous donnant des indications assez claires13, l’emboîtement se fait. […] Le peintre nous montre une surface grise sur laquelle se détache en noir la silhouette de quelques roseaux ; au-dessus un ciel sombre, qui s’éclaire seulement à l’horizon d’une vague lueur. […] Certains peintres aiment à nous faire entrevoir les objets dans un clair-obscur ou à travers une sorte de brume qui les rend mystérieux (Léonard de Vinci, Rembrandt, Carrière). […] D’autres peintres feront travailler leur imagination sur un thème littéraire, comme Burne Jones dans ses allégories ; ou bien, comme Gustave Moreau, ils reprendront les mythes qui ont autrefois passé par l’imagination humaine où ils se sont chargés de poésie, et s’ingénieront à les réaliser en visions intenses, à la fois précises et fantastiques ; ou bien encore, comme Klinger en quelques-unes de ses admirables gravures, ils traduiront en symboles expressifs leur conception de la vie humaine.
IV Si je me borne à désigner par leur titre d’autres volumes publiés à peu près à la même date, Bonshommes de Paris, les Souvenirs d’un peintre, L’art de regarder les tableaux, ce n’est pas que je me sois dispensé de les lire ou que je les aie lus sans plaisir. […] Ce sont des images de poètes, Swinburne, Jean Lahor, Albert Samain, Jean Moréas ; de romanciers, Bjœrnstjerne-Bjœrnson, Édouard Rod, Mark Twain, Charles-Louis Philippe ; d’historiens, Cesare Lombroso, Albert Vandal, Mgr Duchesne ; de philosophes, Émile Boutroux, Henri Poincaré ; d’académiciens, le vicomte de Vogüé, M. de Freycinet, Jules Lemaître, Maurice Donnay ; de statuaires ou de peintres, Frémiet, Saint-Marceaux, Aman Jean ; de compositeurs, Gabriel Fauré, Charles Bordes. […] À propos d’un manuscrit du poète13 Je dois à l’obligeance de mon ami, le peintre Félix Bouchor, d’avoir pu étudier tout à fait à loisir un document qu’apprécieront les esprits curieux de reconnaître et de scruter les origines littéraires d’un poète. […] Or ce n’est pas impunément qu’à l’âge où l’esprit est si facile à façonner et même à déformer, cereus in vitium flecti, l’adolescent précoce a entendu, a retenu ces invitations à l’ivresse, Le Vin des Chiffonniers, Le Vin des Amants, Le Vin de l’Assassin, Le Vin du Solitaire : Tout cela ne vaut pas, ô bouteille profonde, Les baumes pénétrants que ta panse féconde Garde au cœur altéré du poète pieux ; Tu lui verses l’espoir, la jeunesse et la vie, Et l’orgueil, ce trésor de toute gueuserie, Qui nous rend triomphants et semblables aux dieux Et si Verlaine, en 1868, écrit le petit livre, Les Amies, qu’il n’ose pas, pourtant, produire au jour sans déguiser son visage de jeune auteur et sans abandonner l’honneur, plutôt suspect, de ces sonnets « artistes », mais libidineux, au licencié de Ségovie Pablo de Herlañez ; s’il s’est complu, comme un peintre de la décadence florentine, à perpétrer ces études de musée secret, c’est pour avoir sans doute été de très bonne heure initié par l’édition princeps des Fleurs du mal à des égarements voluptueux, exaltés dans des vers d’une harmonie alliciante : Lesbos, terre des nuits chaudes et langoureuses, etc.
Tout comme il y a des peintres qui, uniquement préoccupés d’écraser de grasses et de brillantes masses de couleurs sur leurs toiles, se soucient fort peu de la convenance du sujet qu’ils doivent traiter, M. […] On reconnaissait les serruriers à leurs bourgerons bleus, les maçons à leurs cottes blanches, les peintres à leurs paletots, sous lesquels de longues blouses passaient. […] Nos grands peintres de Munich vont se disputer l’honneur de vous représenter en Apollon, et le sculpteur qui fera votre statue l’appellera l’Antinoüs germain.
La figure fade, douce, souriante toujours, inoffensive et circonspecte, du bon ministre, atteste dans le peintre un moraliste rival des Johnson et des Swift ; jamais l’insignifiance d’un visage n’a pris autant de consistance aux yeux.
Lyon offrait, à cette époque, une réunion de personnes du sexe très-remarquables par les talents en tous genres, et, à ne consulter que les poésies de Marot, on y trouve célébrées les deux sœurs Sybille et Claudine Sève, parentes de Maurice, la savante Jeanne Gaillarde, toutes plumes dorées, comme il dit, et les sœurs Perréal, qui étaient peintres.
Dans l’Atelier du peintre, Désaugiers a des traits du grotesque Saint-Amant ; c’est la charge du genre David dans sa défroque et son mobilier.
Une petite rivière brillante, aux ondes perlées, encaissée à merveille, et courant sur un lit de sable fin sous une atmosphère transparente, a son prix, et comme beauté, à l’œil du peintre, elle est supérieure au fleuve plus large, mais inégal, brisé, et tout d’un coup vaseux ou brumeux.
Colin, jeune peintre français, d’un caractère aimable et facile, d’un talent bien vif et bien franc, se trouvait à Ischia en même temps que Farcy ; tous deux se convinrent et s’aimèrent.
Dans des observations qui suivent, on répond fort bien à ce gentilhomme flamand, un peu puriste, que, s’il est bon de bannir de la conversation et des écrits ces mots aventuriers dont parle La Bruyère, qui font fortune quelque temps, il ne faut pas exclure les expressions que le besoin introduit ; et à propos de distingué tout court qui choquait alors beaucoup de gens et que beaucoup d’autres se permettaient, on le justifie par d’assez bonnes raisons : « On parle d’un peintre et on dit que c’est un homme distingué : on sait bien que ce doit être par ses tableaux ; pourquoi sera-t-on obligé de l’ajouter ?
La contemplation des tableaux des grands peintres ou des statues des grands sculpteurs, qui gravent, en immortelles attitudes, leur pensée dans l’œil de leurs admirateurs, avait convaincu la jeune fille que l’effet de la beauté vivante ne serait pas moins impressionnant que celui de la beauté morte, et que la chair était au moins l’égale de la pierre, ou du bronze, ou du marbre.
Le dessinateur est exagéré sans doute, mais le peintre est le Salvator Rosa des forêts et des fleuves.
La plus étendue et la plus intéressante de ces Études a appelé sur l’œuvre du plus doux et du plus expressif de nos peintres, Eustache Lesueur, un retour de célébrité auquel est associé désormais le nom de son historien145.
Léon Leroy ; il y avait encore, par hasard, un étudiant en chimie et un peintre qui, paraît-il, étonna la salle par l’exubérance de son enthousiasme.
La dernière séance, organisée par l’Association Wagnérienne Universelle, dans l’atelier du peintre Constantin Meunier, a eu un très vif succès.
Vorandt de Darmstadt pour la machinerie, et le peintre J.
Edmond Evenepoel (1846-1931), musicologue, haut fonctionnaire belge, grand wagnérien, était le père du peintre Henri Evenepoel.
Quand, dans l’asile d’Earlswood, un imbécile peut répéter exactement une page de n’importe quel livre, lue bien des années auparavant et même sans la comprendre ; quand un autre sujet peut répéter à rebours ce qu’il vient de lire, comme s’il avait sous les yeux une « copie photographique des impressions reçues » ; quand Zakertorf joue, les yeux bandés, vingt parties d’échecs à la fois, sans regarder autre chose que des échiquiers imaginaires ; quand Gustave Doré ou Horace Vernet, après avoir attentivement contemplé leur modèle, font son portrait de mémoire ; quand un autre peintre copie de souvenir un Martyre de saint Pierre par Rubens avec une exactitude à tromper les connaisseurs, on devine bien que la conservation et la reproduction si exactes des impressions reçues doit avoir ses causes dans les organes.
Le Carache n’est pas moins peintre dans ses tableaux ciniques, que dans ses tableaux chrétiens ; et de même, pour revenir à la poësie, La Fontaine n’est pas moins poëte dans ses contes que dans ses fables ; quoique les uns soient dangereux et que les autres soient utiles.
Ce qui est délicieux, ce qui rappelle les peintures les plus charmantes des peintres de l’amour les plus suaves, c’est ce que je vais vous lire.
En exposant, il caractérise, et l’on est bien heureux qu’il ait ce don-là, car, s’il ne l’avait pas, s’il ne savait pas mettre l’empreinte du mot sur des événements si effacés, s’il n’attachait pas le rayon du peintre à cette masse de massacres et de massacreurs obscurs qui font une nue si épaisse et si sombre dans son histoire, on rejetterait de tels récits, et je ne crois pas qu’on allât consciencieusement jusqu’à la fin de ces fatigantes Révolutions d’Italie.
François Baudry, neveu du peintre célèbre, était un jeune savant de vingt-quatre ans.
Vous ne nierez pas que les caractères de Shakespeare ne soient frappants et que Shakespeare ne soit un grand peintre de caractères ! […] Edmond Aubé, intitulée Epitres (1904), une ode d’un « peintre verrier » qui est un renseignement assez précis, quoique isolé, pour que je le sauve de l’oubli en le faisant entrer dans la collection de ce journal. […] Aubé le peintre verrier Gustave Dupin écrivait le 7 mai 1883 : Sans doute l’amitié, c’est une sainte chose, Car elle ennoblit ceux qui lui sont asservis, Et rien n’est plus touchant que les soins qu’elle impose A deux cœurs indivis, Mais, hélas !
Non, sans doute, Lamartine n’est pas le premier en date de nos grands « peintres de la nature ». […] Lamartine voit la nature comme le grand peintre Puvis de Chavannes (j’ai déjà fait ce rapprochement, qui me paraît inévitable). […] Tout cela cependant, chair meurtrie, sang qui coule, hurlements, sanglots, douleur élémentaire de la femme devant qui sont martyrisés son époux et son enfant, tout cela pourrait encore ébranler nos nerfs, comme les ébranlent tels tableaux des cruels peintres espagnols, ou les vastes, exactes et lancinantes descriptions de tortures physiques où se complaît Flaubert l’impassible dans Salammbô : les quatre cents mercenaires contraints de s’entr’égorger, le sacrifice à Moloch, l’armée mourant de faim dans le défilé de la Hache, et le supplice de Mathô.
Inversement, j’ai traité les états de l’âme d’Amiel comme des paysages, où j’ai, comme tous les peintres, mis un peu du mien : des paysages de vie intérieure, encadrés par le paysage extérieur de Genève. […] Le peintre ne revendique que le mérite de la sympathie (sympathie critique, bien entendu) avec son modèle, ses modèles. […] Il y a à l’hôtel un peintre parisien.
. — Notre jeune peintre est dans les montagnes. […] Revoil et Richard étaient les deux peintres les plus distingués de l’école lyonnaise ; M.
C’est à ces souvenirs qu’il s’adresse ; il les rend encore plus précis par des peintures et des statistiques ; il marque les couleurs et les qualités ; il est passionné pour l’exactitude ; ses descriptions sont dignes à la fois d’un peintre et d’un géographe ; il écrit en homme qui voit l’objet physique et sensible, et qui en même temps le classe et l’évalue. […] Là, on voyait assis l’un à côté de l’autre, le plus grand peintre et le plus grand érudit de l’époque.
La curiosité a dû être égale des deux parts, ce qui veut dire que le peintre a posé tout autant que le modèle, et qu’il y a eu, d’un côté comme de l’autre, exagération, affectation et spectacle. […] Un vieux médecin matérialiste, converti par les grâces, la douceur et la piété de sa jeune pupille, quel thème délicieux pour un peintre sincère des délicatesses du monde intérieur et des mouvements mystérieux de l’âme ! […] Un auteur sifflé gravit son Calvaire ; un peintre refusé par le jury porte sa croix ; un saltimbanque enfariné n’est pas un artiste, il est un martyr de l’art ; un artiste n’est pas amusant, intelligent, pathétique, il est sacré ; un comédien ne demande pas qu’on l’applaudisse, mais que l’on salue son sacerdoce ; une femme auteur, arrivée à la quarantaine et à son vingtième amant, parle de ses douleurs saintes, de ses saintes tendresses, et elle y mêle volontiers un grain de religion et de maternité. […] Il était tout simple que, poursuivant toute espèce de dogme et de culte positif, il arrivât à ne plus vouloir d’autre église que la voûte des cieux ou des arbres ; il était tout naturel que, pour prier, prêcher, officier et bénir dans ces églises en plein air, les poëtes, les musiciens et les peintres, voire même les histrions sublimes, lui parussent très suffisants. […] Il a su, en définitive, faire de la bonne et belle histoire, tout en restant biographe et peintre, et en observant exactement la loi de proportion et de valeur relative entre l’héroïne et son cadre.
Les peintres et les sculpteurs qui les ont décorés de la base au faîte ont travaillé pour la Nuit et pour le Silence. […] Son explication la plus simple est celle d’un peintre généralisant un modèle. […] Un portrait de Marie-Louise d’Orléans fit le miracle : il aima subitement et passionnément la jeune princesse, sur la foi du peintre, et demanda sa main à Louis XIV, qui venait de signer avec l’Espagne le traité de Nimègue. […] « Tu veux que je danse, et je ne sais pas marcher encore. » La procession funèbre se termine ordinairement par l’Enfant, mais le peintre de la Danse Macabre de Bâle y a ajouté un saisissant épilogue. […] Et le vieux peintre se lève pour entrer, à son tour, dans la ronde funèbre qu’il vient d’évoquer.
Raphaël est merveilleusement compris de Gobineau, qui présente la plus adorable image de cet être céleste, de ce jeune fils des dieux, peintre de la candeur et de la lumière, universellement aimé, comblé de dons et de biens, en outre parfaitement doux, bon et modeste, empressé à reconnaître ce qu’il doit à ses maîtres ou devanciers et à s’incliner devant le génie farouche de Michel-Ange. […] Barrès se déclare plus soucieux d’éthique que d’esthétique ; il loue cette jeune Russe d’avoir évité la poussière des bibliothèques ; et il va jusqu’à écrire ceci : Le suffisant dédain eût enseigné à Marie Bashkirtseff à considérer les peintres, les écrivains, les artistes, simplement parce qu’ils ressentent des émotions qu’elle éprouvait elle-même. […] Un poète lyrique, un philosophe, un peintre paysagiste, un architecte, un musicien de symphonie et de musique de chambre, ne pourrait donc jamais être un créateur ! […] Charles de Pomairols a le charme tendre de certains peintres des seizième et dix-septième siècles, du Corrège, du Dominiquin ou du Poussin.
*** L’inconvenance et l’incivilité sont, avec les portraits non ressemblants, la spécialité du peintre B… Dans un café où il va tous les soirs, B… venait de scandaliser la réunion, qui n’a cependant pas la réputation d’être bégueule. — Au lieu de s’excuser, il s’emportait au contraire avec vivacité à propos des reproches qu’il venait de s’attirer. […] L’Asiatique donne alors à ses administrés un nouveau spectacle de ses fureurs grandioses, qui eussent été si profitables à contempler pour un peintre de tempêtes. […] On demandait au peintre G… son opinion sur un de ses confrères qui passe pour avoir des terres dans le royaume des pauvres d’esprit. […] *** Tout le monde connaît la paresse proverbiale du peintre C…, duquel on a dit qu’il devait être fils d’un lézard et d’une ligne horizontale.
S’il en est ainsi et si c’est sur ce musée que l’on nous juge au loin, il y a vraiment lieu d’exprimer notre gratitude au peintre. […] On pourrait répliquer qu’il y a aussi des peintres qui donnent à toutes choses la nuance épinards sous prétexte qu’ils voient vert. […] Tout au plus pourrait-on dire à ce peintre fidèle qu’il est un peintre terrible ; quant à incriminer ses intentions, c’est autre chose. […] Elles nous intéressent par elles-mêmes : elles nous intéressent plus encore parce que tel de leurs traits, tour à tour grossi ou atténué, témoigne de la disposition du peintre à leur endroit et de l’état de son âme à ce moment-là.
Guizot, M.de Barante, un peu M. de Fontanes, Gérard le peintre, plus tard M.
Il y a un système particulier d’impressions et d’opérations intérieures qui fait l’artiste, le croyant, le musicien, le peintre, le nomade, l’homme en société ; pour chacun d’eux, la filiation, l’intensité, les dépendances des idées et des émotions sont différentes ; chacun d’eux a son histoire morale et sa structure propre, avec quelque disposition maîtresse et quelque trait dominateur.
« Dumouriez, qui avait entrevu le jeune duc de Chartres à l’armée de Luckner, l’observa attentivement dans cette occasion, fut frappé de son sang-froid et de sa lucidité dans l’action, pressentit une force dans cette jeunesse, et résolut de se l’attacher. » XII La lutte des Girondins avec Marat s’ouvre par un portrait que j’ai copié sur l’image de Marat mort dans sa baignoire, peint par le peintre David, qui osa se déclarer l’ami de ce forcené.
De plus grands hommes dans tous les arts ne sont pas nés et ne renaîtront jamais : architectes, artistes, pontifes, poètes, tailleurs de marbre, peintres, sculpteurs, mosaïstes, ont été réunis en faisceau de foi, de puissance, de conception, de richesse, de génie, de volonté, d’inspiration, d’enthousiasme pour enfanter ce miracle !
Lamennais est un grand poète683 : il est peintre et prophète ; tous ses écrits sont éclairés de paysages sobrement, puissamment décrits, avec un frémissement étrange de vie et de sensation.
En quoi l’objectivité des peintures, à laquelle ils tendent loyalement et non sans effort, implique-t-elle l’insensibilité, le dédain ou l’ironie du peintre ?
Comme les peintres japonais, il semble parfois jeter au hasard des touches inconnexes que relie subitement en un tout le rapide trait final.
Votre Eschyle n’est qu’un peintre, un décorateur, un faiseur de fracas, un charlatan, un machiniste.
Oui, je suis obligé de le dire, Corneille n’a presque jamais été le peintre des passions : il était né avec beaucoup plus de force dans l’esprit que de sensibilité dans l’ame.
De là vient que les grands musiciens et surtout les grands peintres, enfin tous les artistes distingués sont bien plus sensibles à la poésie, et par conséquent, en sont bien meilleurs juges que les hommes de lettres proprement dits.
Voilà le type même de la fable de La Fontaine peintre de la vie des champs.
Le félibre, d’après Théodore Aubanel, c’est le poète qui pleure en lisant Arnaud Daniel, c’est l’historien qui s’émeut en narrant les combats de Suffren ou de Forbin ; c’est le sculpteur, c’est le peintre qui frémit en contemplant l’œuvre de Puget, des Vernet ou de Sigalon, c’est le musicien qui tressaille aux accords de Félicien David9. […] Il est de Santander, et fort lié avec le romancier José Maria de Pereda, le peintre incomparable des mœurs de la Montagne, et Juan Valera, à la fois romancier, quand il écrit Pepita Jimenez ou Le Commandeur Mendoza, et philosophe, quand il étudie les doctrines de Vivès ou de Lulle, mais avant tout, grand seigneur écrivain, styliste par nature et sans étude, immensément instruit, bien qu’il se prétende un apprenti helléniste dans la préface de cette traduction de Daphnis et Chloé, qui est le bijou littéraire de l’année. […] Incompréhensibles pour le vulgaire, rebutants, parfois, pour notre société choisie, à laquelle ils ont eu l’art de faire accepter comme thème de leurs observations les petites gens : servantes, modèles de peintres, sœurs de charité, ils étaient les ouvriers de la première heure et devaient être moins récompensés de leurs labeurs que ceux de la onzième. […] Pauvre Manet qui, mourant, laisse sur cent peintres soixante qui, sans bruit, sans éclat, sans le dire, souvent en criant bien fort contre l’initiateur, profitent de ses trouvailles, empruntent ses procédés, glanent parmi ses découvertes. […] Hurtado de Mendoza, Cervantès, Vicente Espinel, Quévedo, Velazquez et Goya, sont de la même famille de génies ; et un des peintres de l’Espagne du siècle d’or, qui était aussi un critique, Pacheco, n’avait point oublié, dans ses traités didactiques, de mentionner, à côté des fantaisistes et des idéalistes, une troisième école qui se consacrait à la traduction de la nature et qu’il qualifiait los naturalistas.
Tel d’entre eux, le plus condamnable peut-être à vos yeux, et comme artiste indifférent à la moralité de l’œuvre, et comme pessimiste radical, et comme peintre tranquille et complaisant des pires hontes de l’humanité, est personnellement le plus charitable, le plus serviable, le plus dévoué des hommes, et de ceux dont la vie est une force morale et presque un exemple. […] Nous ne trouvons point beaux les rhinocéros, hippopotames et éléphants (excepté quand nous sommes un peu raffinés et par une sorte d’esthétique réfléchie et un peu voulue), parce qu’ils sont trop grands, trop gros, lourds, massifs. — Et remarquez que l’éléphant qui n’est lourd qu’en apparence, dès que nous le voyons courir, nous le trouvons beau, et c’est dans cette attitude que les peintres le prennent toujours. […] Bourgeois est, décidément, trop déformé par l’animadversion du peintre, M. […] Il avait cette idée, sans doute, que le génie épique lui manquait pour ce sujet formidable, et que, peintre satirique avant tout, il risquait de rapetisser la grande figure tout eu en mettant en un relief qui eût été très vif certains aspects. […] L’actualiste le plus décidé, le maître peintre des choses contemporaines, Daudet, rêvait de romans historiques : Napoléon, Talleyrand.
Et telle est en effet cette cour : elle imite celle de Louis XIV comme un faiseur d’enseignes copie un peintre. […] Enfin ils entendirent chanter le coucou folâtre, dont la note proclamait la fête du printemps792. » On démêle sous ses vers réguliers une âme d’artiste793 ; quoique rétréci par les habitudes du raisonnement classique, quoique roidi par la controverse et la polémique, quoique impuissant à créer des âmes ou à peindre les sentiments naïfs et fins, il reste vraiment poëte ; il est troublé, soulevé par les beaux sons et les belles formes ; il écrit hardiment sous la pression d’idées véhémentes ; il s’entoure volontiers d’images magnifiques ; il s’émeut au bruissement de leurs essaims, au chatoiement de leurs splendeurs ; il est au besoin musicien et peintre ; il écrit des airs de bravoure qui ébranlent tous les sens, s’ils ne descendent pas jusqu’au cœur.
Théophile Gautier nous dit qu’il a été peintre ; il aurait dû comprendre en quittant la toile pour le papier, que les différents arts ont mieux à faire que de se doubler, et que, dans une transformation, le vieil homme devait disparaître. […] Nous ne savons pas si pour être peintre il est indispensable d’approfondir la nature morale ; nous sommes peut-être disposés à croire que le Titien connaissait encore mieux le coloris d’un beau visage que les mouvements d’un noble cœur, mais nous sommes persuadés qu’un écrivain se passe à merveille de juger sainement en peinture ou en sculpture ; qu’il peut fort bien, comme Molière, comparer Raphaël à Mignard, et cela pour faire honneur au Sanzio ; mais, dans tous les cas, ce même écrivain ne peut se dispenser de savoir manier dans ses livres et les sentiments et les passions de l’homme.
qu’il vienne, qu’il s’élève de quelque part ce libre esprit et peintre à la fois, ce génie dramatique incisif, amer et éloquent !
Ce sont les propres paroles de Rousseau (Rousseau juge de Jean-Jacques, troisième dialogue, 193). « D’où le peintre et l’apologiste de la nature, aujourd’hui si défigurée et si calomniée, a-t-il pu tirer son modèle, si ce n’est de son propre cœur ?
Un seigneur de la cour ayant vu le tableau de Doyen, Sainte Geneviève et les pestiférés, fait le lendemain venir le peintre dans sa petite maison chez sa maîtresse509 : « Je voudrais, lui dit-il, que vous peignissiez madame sur une escarpolette qu’un évêque mettrait en branle ; vous me placeriez, moi, de façon que je sois à portée de voir les jambes de cette belle enfant, et même mieux, si vous voulez égayer davantage votre tableau. » La chanson si leste sur Marotte « court avec fureur » « au bout de quinze jours que je l’ai donnée, dit Collé, je n’ai rencontré personne qui n’en eût une copie ; et c’est le vaudeville, je veux dire l’assemblée du clergé, qui fait toute sa vogue » Plus un livre licencieux est irréligieux, plus il est goûté ; quand on ne peut l’avoir imprimé, on le copie.
Un peintre, un architecte, un sculpteur, un poète faisait pencher la balance entre Rome, Florence, Ferrare, Naples, Milan ; c’était le génie qui donnait la supériorité et la gloire.
Villemain, dans ses souvenirs de cette époque, pour que nous laissions peindre à un autre qu’à ce grand peintre les angoisses d’une femme qui furent en ce moment les angoisses de toute une nation.
Jules Méline Au plus grand peintre de la nature, l’Agriculture reconnaissante.
Mais à qui s’applique moins l’idée du naturel par excellence qu’à Montaigne, à cet homme occupé à se peindre, et par conséquent à se farder ; à s’analyser, et par conséquent à se prêter ou à se retrancher certains traits, par la subtilité même de son esprit, et par cette curiosité qui se crée un spectacle ; penseur à la suite d’autrui, à propos d’une lecture qui le pique ; qu’une idée ingénieuse attache tout un jour, et qu’une citation fait changer de chemin ; qui suspecte la nature universelle et ne se plaît qu’en la nature variable ; qui pense plus pour le plaisir d’écrire, qu’il n’écrit pour éclaircir ses pensées ; auquel ses amis reprochent d’épaissir sa langue, comme on reprocherait à un peintre d’empâter ses couleurs, par trop d’attention donnée au détail ?
Je sais bien qu’elle touche à des choses brûlantes : mais le bourgeois qu’elle met en scène représente bien moins une classe sociale qu’un vice caractéristique : celui de la sottise ambitieuse, mesquine, égoïste, pétrie de vulgarités et de prosaïsmes, aussi étrangères aux idées de générosité et de grandeur d’âme qu’un peintre chinois peut l’être aux lois de la perspective.
La différence des ténèbres à la lumière n’est assurément pas analogue aux ténèbres mêmes, ni à la lumière, la différence n’est pas une donnée des cinq sens ; mais ce n’est pas une raison pour croire qu’elle ne puisse se sentir, car on pourrait appliquer le même raisonnement au bien-être et au malaise, à la chaleur, au mal de tête ou, plus généralement, au sentiment d’une vie facile, d’une vie entravée, toutes choses qu’un peintre serait bien embarrassé de dessiner.
Cela forme une série d’ouvrages où son originalité de peintre inimitable de l’exotisme s’est montrée toujours grandissante : les Reflets sur la sombre route, Vers Ispahan, la Troisième Jeunesse de Mme Prune, l’Inde (sans les Anglais), les Derniers Jours de Pékin, etc.
Alexandre ; César, Brutus, Athalie, Zaïre & Arlequin sont réprouvés chez nous ; & les peintres, les statuaires ne le sont pas.
… L’auteur des Pauvres gens, cette poésie à la Crabbe, mais d’une touche bien autrement large et émue que celle du réaliste Anglais, le peintre de La Rose de l’infante, ce Vélasquez terminé et couronné par un poète, préfère peut-être à ces chefs-d’œuvre et à tant de pièces que nous avons indiquées déjà les deux morceaux qui terminent le recueil, intitulés Pleine terre et Plein ciel, ces deux morceaux dont je me tairai par respect pour cette Légende des siècles dans laquelle j’ai retrouvé vivant M.
D’ailleurs, personne ne l’ignore, les de Goncourt, qui sont presque des peintres et qui ont écrit sur la peinture, ont dû vivre beaucoup dans les ateliers.
Rome ne songe pas encore à transporter le dôme du Panthéon, à créer des chefs-d’œuvre ; elle n’a ni sculpteurs, ni peintres, ni poëtes. […] Dans Ville-Hardouin, peintre admirable de mœurs et de détails, le caractère de l’idiome français est encore peu développé.
Il donne, par exemple, quatre ou cinq explications mythiques et allégoriques du Roman de là Rose, pour prouver, ce dont je ne crois pas qu’il soit très convaincu, que ce poème ne contient rien qui ne soit de tous points édifiant. « Je ne veux pas, ajoute-t-il spirituellement, ce que je dis affirmer ; mais il me semble qu’il peut ainsi avoir fait. » Et du reste à qui ne voudrait s’appliquer qu’au sens littéraire encore l’ouvrage pourrait profiter singulièrement, « pour les doctrines et diverses sciences dedans contenues. » Ainsi « les philosophes naturels et moraux: y peuvent apprendre ; les théologiens, les astrologues, les géométriens, les alchimistes, faiseurs de mirouers, peintres et autres gens. » — On ne peut mieux dire, et ces lignes pourraient servir d’épigraphe au poème de Jean de Meung. […] Le poète épique, même sans un grand génie de peintre de caractères, peut nous séduire et nous retenir par l’importance, la gravité et les vastes proportions du sujet. […] Rabelais est un peintre humoristique de son temps singulièrement clairvoyant et avisé. […] Son bon sens combat ou réprime salutairement ses penchants secrets qui étaient épicuriens, jusqu’à en faire sinon l’apôtre, sinon même le professeur, du moins le peintre sympathique et presque ému de la générosité, de la charité et du dévouement. […] Ronsard et ses disciples adorent Pétrarque d’abord comme un grand humaniste érudit, ensuite comme un homme qui a eu la passion de la forme châtiée et raffinée, ensuite comme le théoricien et comme le peintre de l’amour chaste, élevé et délicat.
Mais les grands peintres, je dirai presque les grands révélateurs de la nature humaine, ce sont les moralistes poètes ; car les poètes sont naïfs. […] Exemplaire de l’espèce humaine, il pose devant lui-même comme le modèle devant son peintre, et il veut qu’en tout ce qui est essentiel les spectateurs puissent, d’après lui, juger de l’humanité. […] Ajoutons que, soit comme modèle, soit comme observateur et peintre, il fut singulièrement bien doué pour l’œuvre qu’il entreprit. […] Mais demandera-t-on, ce qui fait le bon modèle fait-il aussi le bon peintre ? […] Comme peintre de la société humaine en général et de l’homme, en un mot comme moraliste, il mérite toute notre attention.
Les peintres voyagèrent pour imiter la couleur locale, et étudièrent pour reproduire la couleur morale. […] Voilà le monde tout moderne et réel, illuminé par le lointain soleil couchant de la chevalerie, que Walter Scott a découvert, comme un peintre qui, au sortir des grands tableaux d’apparat, aperçoit un intérêt et une beauté dans les maisons bourgeoises de quelque bicoque provinciale, ou dans une ferme encadrée par ses carrés de betteraves et de navets.
Rappelons les plus caractéristiques morceaux d’un poème où nous ne comptons ni les descriptions marquées du signe d’un des plus grands peintres de la nature, ni les pages nombreuses où le récit se développe avec une aisance élégante et ferme. […] Gênes est bien caractérisée par ce maître peintre : « patrie des âpres génies, des hommes aventureux et de sage audace ». […] Zola, comparez-les à ces morceaux si justement colorés de Gautier, poète ou prosateur, et vous comprendrez la différence d’un classique moderne et des naturalistes du jour, d’un grand peintre et de malencontreux barbouilleurs. […] Et ce peintre, ce graveur, ce ciseleur, comme l’a fait encore remarquer M.
Descriptif et de la bonne manière, comment eût-il pu en être autrement, avec ce culte de Théophile Gautier que fait si bien d’avoir l’auteur de la dédicace de la première partie de son livre à la fille du prestigieux reproducteur, par la plume de l’Orient et de l’Occident de Tra los montes au voyage en Russie, vus en poète et en peintre ? […] Et, sans plus analyser ce livre nouveau d’un auteur déjà connu pour ses exquises maladresses que je soupçonne d’être un peu bien voulues, et surtout pour ses véritables qualités de poète au-dessus même de son rythme sur et de sa rime ingénieuse, laissons-nous aller à sa suite parmi les moulins, les architectures et les maîtres peintres d’une Hollande qu’il fait bien sienne et telle qu’il lui prédit en cet Adieu, sol aux mille ailes Des moulins frêles Que l’air fait s’affoler Au point que, pour des guerres Comme naguères Au lieu de l’inonder tu pourrais t’envoler. […] Blanc sur blanc, comme chez Whistler et quelques autres peintres, si modernes, qu’ils semblent n’exister que dans l’avenir !
Dès l’abord la mer inquiète et étonne ; ce n’est pas en vain qu’un peuple est insulaire et marin, surtout avec cette mer et sur ces côtes ; leurs peintres, si mal doués, en sentent, malgré tout, l’aspect alarmant ou lugubre ; jusqu’au dix-huitième siècle, parmi les élégances de la culture française et sous la bonhomie de la tradition flamande, vous trouverez chez Gainsborough l’empreinte ineffaçable de ce grand sentiment.
XXIII « Sortis de Rome, la grande Aricia nous offre une halte mesquine » (aujourd’hui c’est encore l’Aricia, fameuse par ses chênes gigantesques, au pied desquels on trouve toujours assis un peintre, un amant ou un poète) ; « de là nous arrivons au marché d’Appius » (sorte de marché de Poissy de Rome).
non pas avec des lignes et des couleurs, comme le peintre, chose facile et simple ; non pas avec des sons, comme le musicien ; mais avec des mots, avec des idées qui ne renferment ni sons, ni lignes, ni couleurs.
Depuis Jules Romain dans les batailles de Constantin, jusqu’à Le Brun dans les batailles d’Alexandre, aucun peintre de batailles n’égale ici le poète des batailles de Napoléon.
Quand j’ai vu ce que tant de grands hommes en France et en Allemagne ont écrit avant moi, j’ai été dans l’admiration, mais je n’ai point perdu le courage : Et moi aussi, je suis peintre !
Goethe cependant l’avait précédé de bien des années ; mais Goethe, dans une vie plus calme, se fit une religion de l’art, et l’auteur de Werther et de Faust, devenu un demi-dieu pour l’Allemagne, honoré des faveurs des princes, visité par les philosophes, encensé par les poètes, par les musiciens, par les peintres, par tout le monde, disparut pour laisser voir un grand artiste qui paraissait heureux, et qui, dans toute la plénitude de sa vie, au lieu de reproduire la pensée de son siècle, s’amusait à chercher curieusement l’inspiration des âges écoulés ; tandis que Byron, aux prises avec les ardentes passions de son cœur et les doutes effrayants de son esprit, en butte à la morale pédante de l’aristocratie et du protestantisme de son pays, blessé dans ses affections les plus intimes, exilé de son île, parce que son île antilibérale, antiphilosophique, antipoétique, ne pouvait ni l’estimer comme homme, ni le comprendre comme poète, menant sa vie errante de pays en pays, cherchant le souvenir des ruines, voulant vivre de lumière, de lumière éclatante, et se rejetant dans la nature comme autrefois Rousseau, fut franchement philosophe toute sa vie, ennemi des prêtres, censeur des aristocrates, admirateur de Voltaire et de Napoléon ; toujours actif, toujours en tête de son siècle, mais toujours malheureux, agité comme d’une tempête perpétuelle, en sorte qu’en lui l’homme et le poète se confondent, que sa vie intime répond à ses ouvrages ; ce qui fait de lui le type de la poésie de notre âge.
Si l’on découvrait chez un médiocre chapelier des facultés de remarquable ébéniste ou un vrai génie de peintre, il faudrait évidemment encourager en lui la qualité psychique, la tendance qui lui permettrait de rendre aux autres les services les plus rares, les plus précieux, ceux qu’il est le plus capable de rendre.
L’Inde aurait presque autant de droits que la Grèce à fournir des thèmes à nos arts, je ne désespère pas qu’un jour nos peintres n’empruntent des sujets à la mythologie indienne, comme à la mythologie grecque.
Il est curieux de comparer les descriptions vagues et oratoires du peintre aimé de Louis XIV, Lebrun, dans ses Expressions des passions de l’âme, avec les descriptions précises et scientifiques de Camper, de Bell, de Darwin, de Warner.
Il se croit peintre et il s’admire lui-même, au lieu d’admirer le hasard qui a tout fait.
Chant est d’un peintre exercé ; le neuviéme Chant respire les graces tendres & touchantes.
Par-tout on sent un peintre habile qui assortit son pinceau aux différens caractères qu’il veut représenter.
Ce que le peintre fixe sur la toile, c’est ce qu’il a vu en un certain lieu, certain jour, à certaine heure, avec des couleurs qu’on ne reverra pas.
s’écrie Fontanes, quelle femme, digne d’inspirer ses chansons, s’est jamais exprimée de cette manière sur le peintre de l’amour et du plaisir ? […] Les éloges sentis de M. de Chateaubriand sur Mme de Staël, son pèlerinage à Coppet en 1831 avec l’amie attentive qui forme le lien sacré entre tous deux, avec celle qu’il n’accompagna pourtant pas jusqu’au fond de l’asile funèbre, et qui, par pudeur de deuil, voulut seule pénétrer dans le bois des tombeaux ; tout cela, au bord de ce lac de Genève, si proche des lieux célébrés par le peintre de Julie, ce seront, aux yeux de la postérité, de mémorables et touchantes funérailles.
Le plus grand peintre de la vie est aussi le plus grand peintre de la mort.
Nos peintres veulent laisser sur leurs toiles la lumière qui les a éblouis, les poètes désirent fixer les sensations qui les ont troublés divinement. […] Le jeu des mots comme le jeu des couleurs est infini, et de même que le peintre peut mettre du sentiment dans ses couleurs, le poète peut, par la combinaison des mots, peindre toutes ses sensations de son être, et les rendre palpables, visibles, sensibles.
L’auteur comique est un peintre de mœurs qui, au lieu d’étaler des couleurs sur la toile, montre la vie en action, et cherche à la montrer telle qu’elle est, avec les procédés spéciaux dont son art dispose. […] L’écrivain dramatique qui est un peintre de mœurs, qui s’ingénie à reproduire la réalité, ne se fait pas faute, lui non plus, de ces répétitions qui sont dans la nature. […] Anatole de Montaiglon remarque, avec beaucoup de sens, que Le Sicilien ou l’Amour peintre serait un livret d’opéra-comique tout fait.
Mme Alving a un fils, Oswald, qu’elle a envoyé tout jeune à Paris et qui est devenu un peintre de talent. […] Tout ce qu’on peut dire, c’est que, mariée, telle fille sera reprise, en effet, de la « nostalgie de la boue », telle autre poussera jusqu’à la manie le besoin de considération ; mais, à mon avis, c’est la première qui est la vraie fille : l’autre était sans doute une bourgeoise née ; d’autant plus horrible, d’ailleurs, qu’elle cumule les vices de deux conditions. ) Ce grand connaisseur et ce grand peintre du faible et du fort de la bourgeoisie est, du reste, un vrai bourgeois de France. […] Ce ne sont point les figures qui sont fausses ou conventionnelles, c’est l’impression que le peintre en a reçue, le regard dont il les considère, l’opinion qu’il a d’elles et qu’il exprime ou laisse deviner dans le courant de son ouvrage. […] Car c’est comme si, atteint de daltonisme, je prétendais juger le tableau d’un peintre à rétine normale, étant donné que tout le sens et l’effet de ce tableau est dans l’opposition des couleurs. […] … Marcel Desroches est un beau garçon de trente-cinq ans, un homme à femmes, peintre de talent, qui s’est marié par amour ; qui ne s’en repent pas précisément, mais qui n’en prend pas non plus son parti, — et qui paraît double, encore qu’il soit assez simple.
Madame de Burne reçoit dans son pavillon de la rue du Général-Foy des musiciens, des romanciers, des peintres, des diplomates, des gens riches, enfin le personnel ordinaire d’un salon à la mode. […] Un jour, il rencontra, dans quelque village de Sologne, un jeune peintre amateur qui lui dit d’un ton à la fois timide et pressant : — Vous savez, maître ; je me suis réservé cette contrée. […] Maurice Montégut n’est point comparable assurément à ce jeune peintre. […] Ce sont de ces figures dont les peintres disent qu’elles plafonnent.
Je trouvai là, de mardi en mardi, arrivés avant moi à la parole du Maître : Félix Fénéon et son allure de Méphisto Yankee, secret et réserve, qui devait le premier, en une étude qui eut grand retentissement, exposer les théories des peintres Impressionnistes Théodor de Wizewa, Maurice Barrès qui allait lui tout seul rédiger sa petite revue « Les taches d’encre »20, distant, contracté, semblant attendre au passage l’heure qui serait la meilleure, d’ailleurs épris d’un devenir en même temps littéraire et politique, hanté par la mémoire de l’homme d’Etat anglais Disraeli, et comme lui se promettant peut-être « qu’on l’entendrait ! […] Flexueuse, d’ondes mineures, sorte de mélopées suggestives de nostalgie imprécisée d’où émane une émotion comme un arôme s’épand, si certainement un peu d’Henri Heine, certainement aussi quelque chose de la déserte langueur d’Orient La « Vogue » a été parmi les plus intéressantes Revues d’alors, qui publia les « Moralités Légendaires » de Jules Laforgue, et de Félix Fénéon de premières et pénétrantes études sur les peintres Impressionnistes.
Quelle excuse peut alléguer un peintre de mœurs qui croit tout faire adorer de lui, jusqu’à ses immondices ?
Rousseau, un Montesquieu, un Chateaubriand ; là il n’a pu être qu’un naturaliste, un peintre et un descripteur d’oiseaux d’Amérique, un Buffon des États du Nord, mais un Buffon de génie passant sa vie dans les forêts vierges, au lieu de la passer au jardin du roi et autour d’une table à écrire dans sa seigneuriale tour du château de Montbard, un Buffon voyant par ses propres yeux ce qu’il décrit et décrivant d’après nature, un Buffon enfin comprenant l’intelligence et la langue des animaux au lieu de les nier stupidement comme Malebranche, entrant dans leurs amours, dans leurs passions, dans leurs mœurs, et écrivant avec l’enthousiasme de la solitude quelques pages de la grande épopée animale de la création.
Le grand peintre français Fabre, de Montpellier, ami de la comtesse d’Albany, fut son consolateur, et, l’on croit, son troisième mari.
Zola a pu écrire, sans qu’on se moquât trop de lui : « La république sera naturaliste ou elle ne sera pas. » Et peut-être plus près de nous rencontrerait-on des orgueils aussi grandioses, si j’en crois certaines ironies de la critique172 » Ils font de beaux rêves et nourrissent de vastes projets, dit un peintre peu flatteur des jeunes.
Il faut que, non seulement la nature morale, mais encore la nature physique leur obéisse comme la note obéit au musicien sur l’instrument, comme la teinte obéit au peintre sur la palette.
Tous les grands artistes de la France, musiciens, décorateurs, peintres, chorégraphes, exécutants, danseurs, danseuses, acteurs et actrices furent invités par le gouvernement à concourir, sous la direction poétique de Talma, à la dignité, à la splendeur, aux délices de cette représentation.
Michelet venant après eux, ce grand peintre !
Visionnaires, si on en croit les gens positifs, ces sortes d’esprits dont Shakespeare, qui n’a rien oublié sur sa route, nous a donné l’idéal dans Hamlet, et qui voient et regardent bien moins dans les choses que « dans l’œil de leur propre pensée ( in the eye of my mind ) », dit Hamlet, ressemblent à des peintres pour lesquels l’ordre du prisme serait renversé.
Né en 1848, à la Roche-sur-Yon, alors Napoléon-Vendée (mais son père, officier dans cette garnison, était Dauphinois), Raoul Ponchon arriva de bonne heure à Paris, y fut mobile pendant le siège de 1870, employé de banque, peintre, et ne se voua aux lettres qu’à trente-huit ans. […] Cette pièce est dédiée à Mme Lucie Delarue-Mardrus, elle aussi native d’Honfleur, qui a produit encore Albert Sorel, Alphonse Allais, le peintre Boudin. […] En essayant de s’instituer panégyriste et peintre flatteur, M. […] Taine l’est sûrement ici, et grand peintre, et maître ou virtuose de l’histoire-résurrection, autant que Michelet, voire plus impartial. […] Mais la délicieuse et un peu molle Venise n’a pas produit un seul génie vraiment intellectuel, et n’a enfanté que de purs peintres.
Eugène Sue est un peintre de mœurs aussi vrai que Richardson, que M. de Balzac est, comme je l’entends dire, un aussi grand génie que Molière. […] Si, au contraire, notre société a été calomniée par la littérature, si elle n’est en réalité ni aussi laide, ni aussi pervertie que l’ont faite nos romanciers et nos dramaturges, — alors j’ai raison, et mon acte d’accusation (comme on l’a appelé) subsiste : nos prétendus peintres de mœurs ne sont que des peintres de fantaisie ; à la place de la réalité, ils ont mis des rêves de cerveaux malades ; leurs tableaux ne sont que d’abominables fictions et leurs héros des monstres qui n’ont rien d’humain. […] On apprend à douter de tout, de son jugement et de celui des générations, en voyant des œuvres vulgaires et brutales égalées aux chefs-d’œuvre des grands siècles littéraires ; en voyant de faux génies, des écrivains de décadence, des peintres forcenés de réalisme et d’anatomie, exaltés au niveau des plus sublimes esprits qui aient honoré l’humanité. — Heureusement (c’est là notre consolation et notre espoir), il nous reste encore d’un temps meilleur et déjà loin de nous, quelques-uns de ces généreux esprits, vétérans des grandes luttes de la Restauration, maîtres respectés de la génération arrivée à l’âge mûr, aujourd’hui dédaignés, insultés quelquefois par les jeunes novateurs en philosophie et en critique : ce sont eux qui, à présent encore, pleins d’ardeur malgré l’âge, entretiennent le plus efficacement parmi nous le culte de l’art, l’amour désintéressé des lettres, la religion du beau ; ce sont eux qui tiennent le plus haut et d’une main plus ferme, le drapeau des saines traditions, et savent le mieux nous faire admirer cette alliance d’une noble pensée et d’une forme pure qui est la condition de toute œuvre durable. […] À en croire ces prétendus peintres de nos mœurs, pour trouver encore un peu de vertu sur cette terre, c’est chez le peuple qu’il faut l’aller chercher ; elle est exilée dès longtemps de la demeure du riche.
Un peintre nommé Autreau donna en 1718 au théâtre italien Port à l’Anglais, une petite comédie où l’on voit une comédienne de Paris, Tontine, informer deux jeunes Italiennes des changements qu’elle a observés autour d’elle : « On a banni ces longs préludes de petits soins, ce sentiment de fidèle pasteur, cette timidité rustique que l’on faisait passer pour respect, enfin toutes les formalités romanesques… » L’une des jeunes Italiennes, Flaminia, demande ce qu’on a mis à la place de ce qu’on a si durement banni : « Des plaisirs solides et de bon sens ! […] Il y a présentement d’autres chapelles littéraires ; et, quelques-unes, à vrai dire, ne méritent pas l’honorable nom de chapelles, Ce seraient plus exactement des boutiques, les intérêts qu’on y défend n’étant qu’un négoce de profitable renommée : l’on y lance un écrivain, comme il paraît que certains marchands de tableaux lancent un peintre qu’ils ont choisi pour des motifs que l’art néglige. […] « Je suis certes le poète qui ressemble le plus à un peintre… » C’est un de ses personnages qui le dit ; ce personnage est lui, à s’y méprendre… « Je ne peux écrire qu’au milieu des champs ; trouver des rimes qu’en voyant des objets semblables ; atteindre le mot qui fuit que si un homme fait un geste, que si un arbre s’incline. […] Et, parmi les peintres, il est à sa manière fine et subtile un Préraphaélite. […] Après cela, l’on cherche de plus grandes compositions de ce bon peintre : elles sont médiocres ; il n’a guère d’imagination.
Dans quels mémoires contemporains, sur quelle toile de peintre, par exemple, Dufaure est-il plus en pied, plus parlant, plus Dufaure, qu’au moment où interpellé « sur sa résolution de fonder la République » il fait, dit M. […] » Et ce qui complète le portrait, sans que le peintre l’ait voulu, c’est que Dufaure élude l’interpellation et se tait. […] Tandis qu’ils parlent, le peintre qui « met pour la première fois le pied dans une cuisine politique et la main aux casseroles électorales » en crayonne de piquantes exquisses !
On dit volontiers que le génie, étant essentiellement personnel, ne saurait donner, à l’analyse, de formes générales, ou que tout au moins, le génie d’un peintre, par exemple, ne saurait avoir rien de commun, ou presque rien, avec le génie d’un poète ou d’un philosophe. […] La nature du phénomène reste moins évidente chez le peintre qui conçoit l’idée d’un tableau ou chez le romancier en qui s’ébauche l’embryon d’un roman. […] Je n’insisterai donc pas ici sur les erreurs de perspective des peintres, ni sur leurs fantaisies astronomiques ou physiques, la tendance de certains à tourner vers le soleil couchant les cornes du croissant de la lune, ou à indiquer des ombres que contredit la position du soleil dans le tableau.
Un professeur n’a pas à tenir compte du génie, un critique, lui, doit vivre dans un monde où le génie existe, au même degré que le corps nu existe pour le sculpteur ou la lumière pour un peintre. […] Il appuie ses pensées de celles de tous les grands hommes de l’antiquité ; il les juge, il les combat, il converse avec eux, avec son lecteur, avec lui-même ; toujours original dans la manière dont il présente les objets, toujours plein d’imagination, toujours peintre, et, ce que j’aime, toujours sachant douter. » Félicitant M. de Tressan d’avoir soutenu la cause de Montaigne il ajoute : « C’est votre père que vous défendez, c’est vous-même. » Disons aujourd’hui de Voltaire, nous, critiques : « C’est notre père qu’il défend, c’est nous-mêmes. » En ces quelques lignes il a défini excellemment non seulement Montaigne, mais une partie nécessaire de la bonne critique. […] La critique qui s’attache à un écrivain, qui le construit à la manière dont le peintre construit un portrait, ne pouvait travailler utilement qu’en s’installant dans sa durée, en le suivant dans la création progressive de lui-même par lui-même, en reliant par un fil les figures dissemblables qu’il a réalisées aux divers moments de la vie, de son œuvre, de son influence, de son action.
Le développement du caractère de Néron est un chef d’œuvre ; les portraits d’Agrippine, de Burrhus, de Narcisse, sont dignes de Tacite, le plus grand peintre de l’antiquité. […] Des critiques superficiels ont blâmé l’artifice dont Mithridate se sert pour arracher les secrets du cœur de Monime : c’est blâmer Racine d’avoir été peintre trop fidèle.
« L’imitation de la nature, voilà le grand point, dira plus tard un peintre illustre, et toutes les règles ne sont faites que pour nous mettre à même de l’imiter plus aisément. » [Cf. […] Vienne maintenant un peintre plus habile, plus consciencieux surtout, plus amoureux de son art, et qui fasse mieux, s’il le peut ! […] La vieillesse de Corneille. — Œdipe, 1659 ; Sertorius, 1662 ; — Sophonisbe, 1663 ; Othon, 1664 ; Agésilas, 1666 ; Attila, 1667 ; — Tite et Bérénice, 1670 ; Pulchérie, 1672. — De Corneille, peintre d’histoire ; — et de la fausseté du paradoxe de Desjardins dans son Grand Corneille historien. — La couleur locale dans l’œuvre de Corneille. — Que les défauts de ses dernières pièces se développent du même fond que les qualités de ses chefs-d’œuvre. — Qu’elles ne sont plus que plaidoiries et thèses. — Le machiavélisme des motifs [Cf. […] Bouilhet] ; — et qu’en même temps que le décousu de l’existence de La Fontaine elle explique le caractère unique de ses Fables en leur temps. — Corneille a eu des intentions ; — Molière a soutenu des thèses et des combats ; — La Fontaine ne s’est proposé que de peindre ce qui lui plaisait ; — ou même ne s’est rien proposé du tout, que de se faire plaisir. — Explication par là du caractère de sa prétendue satire ; — et exagération de Taine à ce sujet. — Que les hommes soient pervers et les femmes bavardes ; — que les riches soient insolents et que les pauvres soient habituellement plats ; — que les grands soient tyranniques et que les petits soient complaisants ; — ou que le lion soit enfin le roi des animaux et que l’âne en soit l’éternelle dupe, rien de tout cela n’indigne ou n’irrite La Fontaine ; — ce qui est pourtant la première condition de la satire. — Il n’y a point de satire sans intention morale. — Mais La Fontaine « constate » et ne juge jamais. — Sa malice ne va pas au-delà de l’amusement qu’un pauvre diable de philosophe trouve à prendre un des grands de ce monde en flagrant délit de sottise ; — il estime d’ailleurs que tout ce qui est humain, étant « naturel », a les mêmes droits à l’attention du peintre ; — et c’est ainsi que son épicurisme d’artiste le conduit insensiblement au naturalisme.
Dénué de psychologie autant que de sens historique, mais doué de la faculté de grossissement, peintre et conteur, il était servi cette fois par ses défauts aussi bien que par ses qualités. […] L’invention des caractères, des sentiments, des mœurs, des couleurs, fait le moraliste, le romancier, l’historien, le poète ou le peintre. […] Il avait quelque chose de la vision du peintre. […] Il est le peintre du Cotentin.
Sensible, mélancolique, souffrant, le peintre immortel de Didon aurait dû, ce semble, avoir pour lui toutes les âmes tendres ; il aurait eu bien besoin, on croit l’entrevoir, de ces entretiens consolants et reposants qui charment dans l’habitude intérieure de la vie, qui soutiennent dans les jours d’affaiblissement et de langueur.
L’Entretien du 1er janvier prochain, sur la peinture, considérée comme littérature des yeux, et sur le peintre Léopold Robert, ce Werther du pinceau, commencera la quatrième année.
Ce sont les trois coups de pinceau qui paraissent flotter au hasard sur la toile et qui sont trois merveilleuses combinaisons calculées du grand peintre de caractère et de situation !
Je déchirais la page après l’avoir écrite ; je jetais la prose ou les vers au vent, comme un peintre jette son pinceau impuissant sur sa toile.
« Je puis bien l’avouer au peintre si chaste et si passionné de Raphaël, ce premier exemple de l’amour fidèle donné dans l’enfance du monde au milieu de la corruption générale des hommes, et des scandales de leurs fictives divinités, parlait à ma raison comme à mon cœur.
Un peintre aurait pu étudier sur ce visage si mobile les expressions de tous les sentiments : joie, peine, énergie, découragement, ironie, espérances ou déceptions, il reflétait toutes les situations de l’âme.
Mais à son retour en Allemagne, et lorsqu’il se croyait en voie de devenir un artiste et un peintre, une indisposition physique, résultat de ses fatigues et de ses marches forcées, l’arrêta brusquement : ses mains tremblaient tellement qu’il ne pouvait plus tenir un pinceau.
Les peintres les copient, mais ils ne peuvent les créer.
Les peintres en tiraient leurs sujets.
Qu’un complaisant me dise : « Le peintre ne vous a pas flatté », ou « la lumière enlaidit tout le monde », me voilà de son avis.
Non, il n’y a jamais eu de société qui pût ainsi pervertir et dénaturer un homme ; non, pas même la société romaine, au temps où un Tacite, pour échapper aux délateurs de Domitien, pouvait bien tenir ses lèvres fermées et enfouir sa pensée, comme on enfouit son or en temps d’invasion, mais gardait intact ce sens moral par lequel « le plus grand peintre de l’antiquité117 » en est un des plus grands moralistes.
Les écrivains détraqués se plaisent aussi à décrire des scènes de crime et de sang, tout comme Ribeira, le Caravage et les autres peintres homicides se plaisent dans les représentations horribles.
C’est cette élévation de l’âme qui donne à sa littérature le caractère mystique, ascétique, érémitique qu’on trouve dans sa sainte Thérèse et dans son peintre Murillo.
La mémoire a donc bien ses degrés successifs et distincts de tension ou de vitalité, malaisés à définir, sans doute, mais que le peintre de l’âme ne peut pas brouiller entre eux impunément.
Et suggérant de mystérieuses analogies, mille détails inaperçus d’abord se répondent et se font écho à travers la masse de l’action, de la même façon que les couleurs se rappellent dans le tableau d’un peintre.
Dans notre aride et maussade métier, quelle bonne aubaine de mettre la main sur un livre où tout élève la pensée, où circule cet air vivifiant et salubre que l’on respire sur les hauteurs, où l’amour du beau se révèle sous ses formes les plus nobles et les plus exquises, où revivent, comme dans leur cadre naturel, les plus grandes figures de notre plus grande époque, sans que le peintre qui les retrace soit un moment au-dessous de cet idéal de beauté, de génie et d’héroïsme qu’éveillent dans nos âmes les noms de madame de Longueville, de Condé et de Corneille ! […] Son beau chapitre sur l’Art français au dix-septième siècle est le complément anticipé de cette magnifique étude historique ; l’auteur y passe en revue, avec une complaisance mêlée de regret, ce groupe immortel de prosateurs, de poëtes et d’artistes, qui s’épanouirent comme une gerbe d’or pendant ces radieuses années ; il écrit, en se jouant, au sujet de leurs chefs-d’œuvre, un chef-d’œuvre de critique, et cela à propos des peintres et des architectes comme des gens de lettres ; à propos de Lesueur, de Poussin, de Claude Lorrain, de Philippe de Champagne, de Puget et de Le Nôtre, comme de Corneille, de Molière, de La Fontaine et de Racine ; tant il est vrai que l’intelligence, une fois à de certaines hauteurs, domine tout, et embrasse de ses serres puissantes tout ce qui plane à sa portée ! […] Le texte est fécond, le sujet inépuisable, le modèle change sans cesse de physionomie et d’attitude, tout en gardant, sous ces surfaces mobiles, un fond qui ne varie pas ou qui varie moins ; ce qui offre au peintre le double avantage d’être toujours ressemblant sans être jamais monotone.
Un critique sans hardiesse et sans vues, un sectateur des traditions établies y eût regardé longtemps avant de marier ensemble Gil Blas et le Traité des études, avant d’assigner le même rôle dans notre littérature à l’écrivain qui restera toujours le meilleur guide de la jeunesse lettrée, le meilleur modèle pour les maîtres de cette jeunesse, et au peintre de mœurs, un moment si âpre, qui n’a pas reculé devant la nécessité d’écrire Turcaret ; auteur d’un livre immortel qu’il faut bien que les jeunes gens finissent par lire, mais qu’ils ne peuvent lire que dans le moment où ils vont cesser d’être innocents, et qu’un sage instituteur ne mettra jamais sans un peu de crainte entre leurs mains. […] C’est encore, quand on arrive à une œuvre aussi mêlée que la Nouvelle Héloïse, s’arrêter à ce qui n’est que sentiment faux, style impropre, expression déplacée, absence de tact et de délicatesse, ne lire que les lettres, fort nombreuses il est vrai, « où les mots sont brûlants et les choses sont froides », s’étendre à l’aise sur les déclamations consciencieuses et à la Prudhomme en l’honneur de « la vertu et du sexe », et c’est lorsqu’on a subi tout ce dégoût, ne pas se donner la peine de tourner le feuillet pour arriver enfin à ce qui est de l’écrivain incomparable, du grand peintre et de l’inventeur de génie. […] Je me borne à citer les premiers mots ; ils suffisent : « Le Rouge et le Noir, la Chartreuse de Parme sont de prétendues peintures de la société… » Appeler, sans plus de façons, prétendu peintre le dernier représentant qu’ait eu la psychologie délicate et passionnée de Racine ! […] Ce satirique, ce peintre, cet observateur et ce poète paraît, à la première réflexion, un moraliste d’une sévérité rare. […] Je laisse de côté le peintre et le grand inventeur en fait de langage, autant qu’on peut laisser de côté, dans une étude du genre de celle que j’entreprends, la meilleure part d’un esprit et d’une âme tels qu’étaient l’esprit et l’âme de Saint-Simon.
Je pars demain, et je couche à Keswick, à vingt-quatre milles d’ici, où je verrai une sorte de peintre, de guide, d’auteur, de poëte, d’enthousiaste, de je ne sais quoi, qui me mettra au fait de ce que je n’ai pas vu, pour que, de retour, je puisse mentir comme un autre et donner à mes mensonges un air de famille. […] Je ne comprends ni le but, ni l’architecte, ni le peintre, ni les figures de cette lanterne magique dont j’ai l’honneur de faire partie.
Il le compare au héraut Mercure, « nouvellement descendu sur une colline qui baise le ciel217. » Cette apparition charmante, au milieu d’une sanglante invective, prouve que le peintre subsiste sous le poëte. […] Les voilà toutes réunies et toutes marquées du même signe, dépourvues de volonté et de raison, gouvernées par le tempérament, l’imagination ou la passion pure, privées des facultés qui sont contraires à celles du poëte, maîtrisées par le corps que se figurent ses yeux de peintre, douées des habitudes d’esprit et de la sensibilité violente qu’il trouve en lui-même317.
Le peintre est devant sa toile, les couleurs sont sur la palette, le modèle pose ; nous voyons tout cela, et nous connaissons aussi la manière du peintre : prévoyons-nous ce qui apparaîtra sur la toile ?
Rien de singulier, lien qui étonne ; mais une harmonie calme et sévère, qui rappelle la grande manière des poètes et des peintres de l’Italie. […] Barbier se soit laissé séduire par le souvenir des pâtres de Virgile, et qu’au lieu de parler en son nom il ait placé ses pensées dans la bouche d’un peintre et d’un pêcheur : cette répudiation de sa personnalité donne aux plaintes et aux espérances du poète une naïveté qu’il eût rencontrée difficilement dans une autre voie. […] En effet, si le peintre, en composant un paysage, se propose de lutter avec la réalité qu’il a sous les yeux ; s’il veut, par exemple, copier toutes les nervures d’une feuille, toutes les fibres d’une fleur, il est évident qu’il sera vaincu.
L’Opéra cependant était encore en construction, les hôtels qui l’entourent n’étaient pas tous achevés, le milieu de la place était un chantier abandonné aux entrepreneurs de maçonnerie, aux tailleurs de pierre, aux menuisiers, peintres de l’architecte C. […] Son courage, l’élévation naturelle de son âme, que les désordres de sa vie n’avaient pu entamer, la violence de son caractère, un fonds d’humeur misanthropique ont fait de lui un moraliste hardi et emporté, mais cette même amertume, qui se complaisait dans le spectacle de ses propres souffrances et des misères et des souffrances de la société de son temps, et qui recevait sa profondeur même d’une vue désespérée du monde, son avilissante servitude d’amuseur officiel, sa vie souillée, ont fait de lui un peintre dont la crudité et l’immoralité attristent par moments, dont l’indélicatesse parfois révolte. […] Ce n’est pas qu’il déteste les femmes ; au contraire, ce peintre, dont je ferai tout à l’heure ressortir la profonde impartialité, s’il a eu des indulgences et des faiblesses, il les a eues de ce côté ; il pardonne, il concède tout aux femmes, il leur permet tout dans son théâtre, pourvu qu’elles soient jeunes et dans l’éclat de la beauté.
Mais il y songeait, lui, le peintre, — ou le badigeonneur prestigieux, — de décors historiques, et il se disait que ce serait une chose charmante à nous montrer que la rencontre des barons chrétiens avec les dieux antiques, et la somptuosité des costumes florentins, — déjà proches de la Renaissance, — mêlée de quelque reste de harnachement moyenâgeux, sur un fond serein d’architecture athénienne. […] Marcel Prévost, entre le peintre très complaisant et le moraliste très sûr : en sorte que l’on ne sait trop, jusqu’au bout, si son œuvre est décidément libertine ou austère. […] Parmi nos jeunes peintres de mauvaises mœurs mondaines, M. […] C’est le vieux marcheur Dupallet, père de Mme Blandain ; le docteur à la mode Guénosa, célèbre par ses piqûres de sérum réconfortant ; les sous-journalistes Duvanneau et Durzac, le morphinomane Bel-Ivry ; un peu en marge : la marquise de Saint-Éloi, chroniqueuse mondaine, et l’androgyne Paf, qui écrit dans des Revues catholiques ; le beau Morvillette, de son état amant de cœur de l’imposante grue Claudine de Jersey ; enfin se prêtant à la fête, mais ayant en eux de quoi s’en tirer : Alice Guénosa, le peintre Corbinel et le provincial Octave Lacroix, c’est-à-dire (pour abréger) la Marcelle, le Jalin et le Nanjac de ce nouveau « demi-monde ».
Allez entendre cette comédie d’un peintre souvent excellent et d’un très honnête homme ; vous serez tour à tour amusés et « édifiés » au plus beau sens du mot ; et, par surcroît, vous aurez, à certains moments, la joie d’applaudir contre quelqu’un ou contre quelque chose. […] Ce qui est intéressant ici, c’est le poète lui-même ; c’est son geste d’hercule tendant le caleçon à Dieu et à tous les dieux, son altitude de dompteur et de sagittaire, son allégresse de bon peintre et de bon versificateur à entrelacer, par groupes et par grappes antithétiques et pittoresques, les dieux et les déesses de toutes les religions, et à poursuivre leur dégringolade éperdue d’un claquement de strophes à triples rimes. […] Dangy est snob, même en tant que peintre des mœurs mondaines : il demeure fasciné par elles dans le moment où il affecte d’en faire la satire. […] Il appelle Molière « le plus grand peintre et le plus grand philosophe qui aient jamais existé dans notre littérature » ; et il avait quelque mérite à juger ainsi, à une époque où Molière était fort délaissé. […] Brieux, lui a probablement semblé fort et hardi, tout à fait digne du peintre implacable, désenchanté, qu’il a voulu être cette fois.
L’artiste aspirant au bourgeois, comme le bouton rêve d’être fleur, c’est le comédien moderne, le peintre moderne, comme du reste c’est l’homme de lettres moderne, le romancier moderne, le peintre moderne et le musicien moderne. […] C’est une solution simple et élégante ; mais ne serait-il pas à propos de profiter de l’occasion d’un anniversaire de la naissance de Molière pour étudier de lui une pièce peu jouée, peu connue, La Critique de l’École des femmes, L’Amour peintre, George Dandin, La Comtesse d’Escarbagnas, et pour nous la faire connaître, puisqu’en fait de pièces de théâtre on ne connaît que ce qu’on a vu jouer ? — Oui, Monsieur le critique, oui, Monsieur l’orfèvre, parce que vous ne pouvez guère faire un article sur Les Fourberies de Scapin, et que vous en feriez un, et qu’on lirait, sur L’Amour peintre, qui est, du reste, une très jolie pièce.
« Molière est le peintre, mieux que le peintre, le dramatiste du caractère. […] 3° Parce que le drame du Boulevard était à décoration, à machines, à éclat extérieur et à prestiges, toutes choses qui sentent l’opéra et que, même dans leurs œuvres non dramatiques, avant de s’être faits dramatistes, les romantiques sont des peintres décorateurs et aiment infiniment tout ce qui frappe les yeux, tout ce qui amuse, séduit et éblouit les yeux et tout ce qui émeut l’imagination par les yeux.