/ 2968
59. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Il faut la chercher dans des milliers de volumes, où de longs et pénibles travaux suffisent à peine pour la découvrir. […] Nous chercherons, son flambeau à la main, à distinguer ce qui est digne de blâme ou d’admiration parmi les travaux de l’esprit humain. […] Dans l’histoire, il ne nous suffit pas de savoir qu’une bataille est gagnée, nous voulons encore connaître le vainqueur ; dans les arts, après avoir admiré l’œuvre, nous cherchons le nom de l’artiste. […] Il en est ainsi de l’âme du poète, soit qu’il cherche ses inspirations dans la nature extérieure, soit qu’il les trouve dans sa propre nature. […] Ne convient-il pas, lorsque je me hasarde à vous entretenir de l’art de la parole, de chercher avant tout s’il est possible de l’enseigner, et s’il est utile de l’apprendre.

60. (1901) L’imagination de l’artiste pp. 1-286

On cherche le secret des maîtres. […] On cherche toujours. […] Si personne ne cherchait, qui donc trouverait ? […] Peut-on dire qu’il cherche des idées ? […] Cherchons donc !

61. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

Si je voulais chercher quelques traces ou indices du talent de Veyrat à cet âge de vingt-deux ans, je les trouverais plutôt dans ses Italiennes, poésies politiques dont il ne se donnait que comme l’éditeur52. […] Il chercha, à un moment, des ressources dans le théâtre ; il fit des pièces en collaboration : Quérard en indique quelques-unes. […] Dans ces accès de noire mélancolie, je m’exilais solitaire dans les montagnes, au penchant des précipices, dans les cavernes où les torrents prennent leurs sources ; comme Manfred, je secouais mes cheveux aux vents des glaciers, et je cherchais à me fuir moi-même dans la contemplation de l’œuvre éternelle : je cherchais l’impossible ! […] Mon cœur se serrait, et, me voyant isolé, sans une âme où répandre le débordement de la mienne, sans qu’une espérance m’eût suivi jusque-là, je levais les yeux vers les hauteurs pour y chercher quelques traces chéries, des aspects connus, quelques images enfin à l’aide desquelles je pusse remonter mes souvenirs jusqu’aux heureuses journées de ma vie si tôt écoulées et rappelées en vain dans ma détresse. […] On n’eut pas l’idée de l’y chercher.

62. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre I : L’histoire de la philosophie »

Entendue dans le sens de métaphysique, la philosophie est complètement vaine ; parce qu’elle cherche les noumènes qui seront toujours hors de sa portée. […] La science cherche la vérité ; mais qu’est-ce que la vérité ? […] La méthode subjective cherche la vérité dans les rapports des idées, la méthode objective la cherche dans les rapports des objets. […] Or, ces formules doivent être cherchées, soit physiologiquement, c’est-à-dire dans les conditions organiques ; soit psychologiquement, c’est-à-dire dans l’évolution de la pensée. […] Cependant le grand principe de Kant, qu’il faut chercher dans les lois de la pensée une solution des problèmes philosophiques, Gall a eu le mérite d’en approcher par le côté biologique : « Nous devons chercher nos idées et nos connaissances, en partie dans les phénomènes du monde extérieur et dans leur emploi raisonné, et en partie dans les lois innées des facultés morales et intellectuelles232. » Physiologiquement, il prend sa revanche.

63. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVI. Miracles. »

L’école chrétienne, peut-être du vivant même de son fondateur, chercha a prouver que Jésus répondait parfaitement à tout ce que les prophètes avaient prédit du Messie 732. […] On dirait, par moments, que le rôle de thaumaturge lui est désagréable, et qu’il cherche à donner aussi peu de publicité que possible aux merveilles qui naissent en quelque sorte sous ses pas. […] Il serait commode de dire que ce sont là des additions de disciples bien inférieurs à leur maître, qui, ne pouvant concevoir sa vraie grandeur, ont cherché à le relever par des prestiges indignes de lui. […] Même ceux qui ne croyaient pas en lui étaient frappés de ces actes et cherchaient à en être témoins 765. Les païens et les gens peu initiés éprouvaient un sentiment de crainte, et cherchaient à l’éconduire de leur canton 766.

64. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre II. Mme Le Normand »

au lieu de la tante que nous cherchions, nous ne trouvâmes que la nièce. […] Elle n’est donc pas là, celle que j’y cherchais. […] Elle est allée chercher Mme de Staël sous toutes les plumes qui ont parlé d’elle. Après l’avoir cherchée où nous y irions bien la chercher tout seuls, dans les Considérations sur la Révolution française et dans les Dix ans d’exil, Mme Le Normand, cette femme de salon, qui veut du salon, est entrée chez toutes ses connaissances pour leur prendre un petit mot aimable et pour leur en dire un.

65. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Henri Cantel »

Cantel n’en est pas à son premier mot poétique, il a déjà publié un volume ; mais il n’en débute pas moins encore, dans un sens plus profond que celui qu’entend le public, car il cherche, avec les souples articulations d’un talent qui doit grandir, une forme arrêtée, une manière définitive. […] Qui cherche dans l’indépendance est destiné à tâtonner longtemps… De plus, si libre qu’il soit et qu’il veuille l’être, le groupe d’esprits dont Cantel est l’espérance représente, à très peu d’exceptions près, ce paganisme que nous avons appelé souvent une Renaissance de Renaissance, et qui n’en est que le regain ! […] Il n’a point l’excuse du désespoir de Gœthe, qui se sentait tari dans son génie et qui chercha la cuve du vieil Eson pour s’y ressusciter. […] Il a bientôt oublié le reproche qu’il faisait, avec tant de raison, à Théodore de Banville, de ne jamais chercher Dieu et de ne pas entendre le cri du cœur dans sa poésie de castagnettes, et, comme lui, tout à coup, il revient au bourdonnement de cette abeille d’Attique que nous avons tant entendue, et que Platon lui-même trouverait maintenant une bien monotone et bien ennuyeuse petite bête. […] Mais s’il l’avait pincée plus dru, s’il avait auguré (les poètes sont des augures) que là nichait, comme un rossignol divin, l’accord divin qu’on cherche si longtemps de la pensée et de la vie, — et que nous nommons la poésie, faute d’un autre nom, — il l’aurait peut-être fait jaillir !

66. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

Comment s’étonner dès lors qu’elle suffise à ses nombreux travailleurs et qu’ils ne cherchent rien au-delà de son horizon ? […] Elle n’arrive à la connaissance précise, exacte, vérifiée, qu’en descendant toujours vers l’infiniment petit ; elle distingue, sépare, divise, cherche les exceptions et les différences. […] Chercher sans espoir n’est ni insensé, ni vulgaire ; on peut entrevoir, sinon trouver. […] Mais ce caractère d’indépendance, on le cherche vainement dans les phénomènes psychologiques ; on les voit se confondre, se mêler et se supposer réciproquement. […] La psychologie doit se garder aussi de la morale, car il est tout différent de constater ce qui est et de prescrire ce qui doit être, de s’en tenir aux faits ou de chercher un idéal.

67. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

Le second chant s’ouvre par le discours sublime, touchant et sentencieux de la femme, qui, à l’inverse des amis de Job, cherche à consoler son époux, et à le convaincre qu’elle seule doit mourir à sa place. […] Cette plante est pour moi comme une sœur : pourquoi chercherais-tu d’autres motifs à mes soins ? […] L’impudent ne cesse de m’assaillir ; il faut que je cherche une autre place. […] Toi, chère Sacountala, va, sans perdre de temps, à l’ermitage, chercher des fruits dignes d’être offerts à notre hôte : cette eau, en attendant, peut servir à rafraîchir ses pieds fatigués. […] Viens-tu à surprendre sur ta paupière humide une larme qui chercherait à détruire l’effet de tes résolutions ?

68. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Quand la tranquillité s’est trouvée rétablie, chacun, dans son chagrin, a cherché la cause des maux passés. […] Il avait dit que c’était la volupté qu’on devait chercher dans la vertu. […] La haute philosophie chercha à suppléer au vide d’une religion imparfaite. […] Nous avons dit que Daniel avait aussi cherché dans l’histoire les preuves de ses opinions. […] Je cherche parmi vous des juges, et je ne vois que des accusateurs.

69. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

Si Jean-Jacques Rousseau subjugue la raison et la trompe, Bernardin de Saint-Pierre touche le cœur et cherche à l’éclairer. […] Il prie, il console, il cherche à ramener à lui ; voilà toute sa réponse aux insultes dont on l’accable. […] Il ne cherche ni à étonner, ni à briller. […] Tout homme qui a eu beaucoup à se plaindre des hommes cherche la solitude. […] Son art est de sentir ; il peint, parce qu’il ne cherche pas à peindre.

70. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

On s’accorde à y reconnaître des périodes brillantes et des moments crépusculaires, où les artistes tâtonnent et cherchent une voie nouvelle sans la trouver. […] Puisqu’il est ainsi forcé de choisir et partant de juger, nous sommes ramenés à chercher d’après quels principes il doit se prononcer. […] Mais on la cherche encore et il y a apparence qu’on la cherchera longtemps, peut-être toujours. […] Il doit donc chercher et indiquer bravement ce qui constitue à son avis la valeur d’une œuvre littéraire. […] Dans le cercle où il est enfermé, il n’a pas non plus à chercher un type absolu, un idéal unique avec lequel il puisse confronter les œuvres soumises à son appréciation.

71. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLe entretien. L’homme de lettres »

Paul fit asseoir Virginie, et se mit à courir çà et là, tout hors de lui, pour chercher un chemin hors de ce fourré épais ; mais il se fatigua en vain. […] J’allais, je venais autour de l’habitation, ne sachant moi-même de quel côté vous chercher. […] Pourquoi vas-tu si loin et si haut me chercher des fruits et des fleurs ? […] Paul va chercher son ami le vieux colon pour aller au-devant de Virginie au point le plus rapproché de la route du navire. […] La réponse est simple: c’est que les classes lettrées cherchent l’art et que les classes ignorantes ne cherchent et n’applaudissent que la nature.

72. (1884) Cours de philosophie fait au Lycée de Sens en 1883-1884

On cherche une citation qu’on retrouve pas. […] Donc, sans chercher comment il se fait que l’activité physique se relâche, nous chercherons seulement comment se relâche l’activité psychique. […] Cherchons donc maintenant quelle est sa nature propre. […] Dans le premier moment, on cherche un rapport de causalité. […] Il est vrai quand les hommes cherchent à définir la loi morale, ils ne s’entendent plus ; mais tous n’en cherchent pas moins une loi universelle.

73. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre I. Du comique en général »

Elles portent moins sur le comique lui-même que sur la place où il faut le chercher. […] Mais un défaut ridicule, dès qu’il se sent ridicule, cherche à se modifier, au moins extérieurement. […] On a cherché des explications bien compliquées à ce fait très simple. […] Il ne sera pas inutile de chercher comment elle en use. […] Cherchez la raison ; vous verrez qu’on pense à une mascarade.

74. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIIe entretien. Poésie sacrée. David, berger et roi » pp. 225-279

Fils du prophète, il déteste en secret les prophètes de lumière, et il cherche à leur opposer les devins, prophètes de ténèbres. […] On cherche un musicien, on n’en trouve pas dans le camp. […] De légers monticules, entre lesquels les Philistins, venant du côté de la Syrie, cherchaient à se glisser, font onduler la vallée au-delà du lit du torrent. […] Une seconde fois Saül, saisi d’une fureur réelle ou simulée, pendant que son poète l’endort aux sons de ses vers et de sa harpe, cherche à le percer de sa lance. […] Les pasteurs de cette nation pastorale, frappés sans doute de la symétrie avec laquelle ces ravins, ces rochers, ces cavernes répétaient leurs flûtes ou leur voix, cherchèrent naturellement à imiter cette répétition musicale dans leur prosodie.

75. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Il avait cherché un refuge en Suisse, d’où la guerre vint le chasser. […] Sans compter sur le bonheur, elle cherche du moins à éviter son contraire. […] je cherche seulement un bien inconnu dont l’instinct me poursuit. […] Mais ce dénouement, il ne cherche pas à le précipiter. […] Avant d’être le grand Dominicain que l’on admire, il cherchait péniblement sa voie (1822).

76. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre VII. Induction et déduction. — Diverses causes des faux raisonnements »

Le physicien, qui veut expliquer la nature et qui opère sur les données de l’expérience, cherche les lois des phénomènes qu’il voit, et procède par induction. […] Là, par l’exemple d’Henriette d’Angleterre, ici par un développement tout général et spéculatif, il donne la même leçon, grande et utile : « Ô mort… toi seule nous convaincs de notre bassesse, toi seule nous fais connaître notre dignité ; … tu lui apprends (à l’homme) ces deux vérités, qui lui ouvrent les yeux pour se bien connaître : qu’il est infiniment méprisable, en tant qu’il passe ; et infiniment estimable, en tant qu’il aboutit à l’éternité. » Vous pouvez donc, quoi que vous ayez à démontrer, ou bien chercher dans l’étude des faits historiques ou naturels la preuve expérimentale de ce que vous voulez établir, ou bien chercher dans l’analyse de la question quelque principe évident par lui-même ou antérieurement prouvé, dont la vérité débattue dépende par une conséquence nécessaire. […] Dans les recherches scientifiques, les erreurs sont dues souvent à cet esprit de système, qui fait que l’on cherche, non pas à découvrir la vérité, mais à prouver une hypothèse ; on néglige tout ce qui la condamne, on ne voit que ce qui la sert. […] L’esprit se tient satisfait, en général, si l’on appuie les vérités dont on fait usage sur les vérités dont elles dépendent immédiatement, sans exiger qu’on cherche le fondement de celles-ci, qui serait en d’autres vérités, qu’on aurait ensuite à fonder ; et l’on irait ainsi à l’infini, sans fin et sans repos. […] Dans un propos de morale pratique, on ne cherchera pas les fondements de l’idée du bien ; on n’en discutera point l’essence et l’origine, et, quoiqu’on pense là-dessus, on admettra les définitions vulgaires du bien et du mal.

77. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

On me chercha d’abord tranquillement, puis on commença à m’appeler. […] La sœur tourière me cherchait partout : on me demandait au parloir. […] non, elle ne venait pas me chercher, mais seulement me consoler un peu. […] Mais il n’y eut pas d’enquête, on ne chercha pas à punir. […] Nous cherchions à imaginer son histoire.

78. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Ce génie heureux ne fait qu’achever le premier et devancer avec éclat ce que plusieurs autres cherchaient tout bas et soupçonnaient à leur manière. De quelque nouveau monde qu’il s’agisse, petit ou grand, quand le Christophe Colomb le découvre, bien d’autres étaient déjà en voie de le chercher. […] Auguste de Staël cherchait, pour le remercier, l’admirateur de sa mère ; Mme de Broglie lui écrivait pour l’appeler ; M.  […] » C’est ainsi qu’il cherchait à convaincre la Restauration du bienfait qu’elle recelait et à le lui faire rendre sans contrainte. […] Les grands talents surtout sont comme aux abois et ne savent que devenir ; à bout de leurs premiers motifs, et depuis que les grandes causes ont fait défaut, ils cherchent des thèmes.

79. (1879) À propos de « l’Assommoir »

Or, certains critiques se donnent une peine immense pour chercher des prototypes aux personnages de M.  […] Pour le résoudre, cherchons comment M.  […] Charpentier a pris la peine d’aller le chercher lui-même, comme il avait été chercher M.  […] Les auteurs ont cherché le drame dans la rivalité de Gervaise et de Virginie. […] Pour cette fois, je ne chercherai pas quelle doctrine peut exister sous ce mot de naturalisme : je ne m’occuperai que de la rhétorique.

80. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iv »

On cherche à l’arrêter. […] Babut, ayant perdu un fils, cherche à faire de sa douleur la consolation des autres. […] Ils sont nombreux, ces protestants qui, voyant une opposition entre la guerre en soi et la pensée de Dieu, cherchent à la résoudre dans leur conscience7. […] Je me suis consacré à toi dès ma jeunesse et j’espère que l’exemple que j’ai cherché à donner aura servi à te faire glorifier.‌ […] Et là encore, une minute, nous cherchions à distinguer ce jeune chrétien dans son ombre… Aujourd’hui, nous comprenons leur vie intérieure et nos parentés se révèlent.

81. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXX. De Fléchier. »

Le premier qui, ayant à peindre des choses grandes ou fortes, s’avisa de chercher des oppositions, enseigna aux autres à s’écarter de la nature. […] Supposez l’homme dont parle Lucrèce, et qui, des bords de la mer, contemple un vaisseau qui fait naufrage, et suit de l’œil les mouvements de tant de malheureux qui périssent : si ce tableau a porté le trouble et l’agitation dans son âme ; si ses entrailles se sont émues ; si au moment où le vaisseau s’est enfoncé, il a senti ses cheveux se dresser d’horreur sur sa tête ; en peignant à d’autres le spectacle terrible dont il a été le témoin, cherchera-t-il à le relever par des oppositions et des contrastes étudiés ? […] Plus il est dans l’impuissance de créer, plus il arrange70 : il cherche à se rendre compte de ses richesses, et croit les multiplier en les embrassant d’un coup d’œil. […] Il cherche à édifier plutôt qu’à plaire ; il vient annoncer que tout est fini, afin de ramener à Dieu qui ne finit point ; il nous fait souvenir de la fatale nécessité de mourir, pour nous inspirer la sainte résolution de bien vivre71. […] « Turenne meurt, tout se confond, la fortune chancelle, la victoire se lasse, la paix s’éloigne, le courage des troupes est abattu par la douleur et ranimé par la vengeance ; tout le camp demeure immobile ; les blessés pensent à la perte qu’ils ont faite et non aux blessures qu’ils ont reçues ; les pères mourants envoient leurs fils pleurer sur leur général mort, etc. » Cependant, malgré l’éloquence générale et les beautés de cette oraison funèbre, peut-être n’y trouve-t-on point encore assez le grand homme que l’on cherche ; peut-être que les figures et l’appareil même de l’éloquence le cachent un peu, au lieu de le montrer ; car il en est quelquefois de ces sortes de discours comme des cérémonies d’éclat, ou un grand homme est éclipsé par la pompe même dont on l’environne.

82. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIV. Des panégyriques depuis la fin du règne de Louis XIV jusqu’en 1748 ; d’un éloge funèbre des officiers morts dans la guerre de 1741. »

Il ne cherchait point à éblouir les hommes pour les subjuguer ; il n’abusait point pour se faire craindre : d’ailleurs, il n’était plus dans l’âge où les passions inquiètes et ardentes veulent occuper fortement les âmes. Il gouverna sans bruit, ne remua rien ; et content d’être absolu, ne chercha ni le faste du pouvoir, ni le faste des éloges : tout fut calme comme lui. […] Le panégyriste de Louis XV ne l’est jamais ; il semble éviter l’éloquence comme l’autre paraît la chercher. […] Le panégyrique de Louis XV, comme nous l’avons dit, offre donc peu de ces beautés qu’on a coutume de chercher dans les orateurs ; mais elles sont remplacées par d’autres ; on y trouve une sorte d’éloquence aussi persuasive et plus douce, l’éloquence des faits présentés avec autant de simplicité que de noblesse, et les réflexions d’un philosophe toujours jointes à la sensibilité d’un citoyen. […] « Mon cœur rempli de toi, dit-il, a cherché cette consolation, sans prévoir comment ce discours sera reçu par la malignité humaine, qui, à la vérité, épargne d’ordinaire les morts, mais qui quelquefois aussi insulte à leurs cendres, quand c’est un prétexte de plus de déchirer les vivants. » Cet éloge funèbre doit être mis au rang des ouvrages éloquents de notre langue.

83. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

J’y vois une intrigue plaisante ; j’y cherche un caractère. […] Molière n’eût pas désavoué cette apostrophe à Damis qui parle de chercher fortune « au Temple de mémoire » : Où vas-tu la chercher ? […] Ses valets sont sensés ; ils voient les travers de leurs maîtres, et ils y cherchent leur profit. […] Est-ce le nouveau par l’invention que cherchent, après Molière, les auteurs de comédies, ou bien le plus facile où ils se rabattent ? […] Il n’est pas besoin d’aller chercher la prose de Collin pour trouver sa langue en défaut.

84. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

Cette comparaison n’est pas possible dans une société qui se forme chez un peuple qui cherche sa nationalité et ses frontières. […] C’est donc dans les écrits philosophiques et dans les écrits de religion qu’il faut chercher jusqu’à quel point les écrivains en langue latine ont eu des idées générales. […] Les penseurs les plus hardis, après avoir cherché la certitude hors de son sein, venaient se réconcilier avec elle. […] De tant d’écrits en langue latine qui donnent l’illusion d’une fausse maturité, il n’est rien arrivé dans la langue vulgaire, et l’esprit français n’a fait de progrès que le jour où il a cherché la morale sous la théologie, et secoué la servitude de la scolastique. […] Dans le plus expressif des poètes, Villon il ne fait qu’indiquer à quelle source il faut aller chercher la poésie, et il en tire les premiers accents du cœur, éclairé par la raison.

85. (1890) L’avenir de la science « XVI »

C’est folie que d’y chercher spécialement de la science ; notre science vaut incontestablement bien mieux que celle qu’on peut y trouver. C’est folie d’y chercher de la philosophie ; nous sommes incontestablement meilleurs analystes. C’est folie que d’y chercher de la législation et du droit public ; nos publicistes s’y entendent mieux et c’est peu dire. Ce qu’il y faut chercher, c’est l’humanité simultanée, c’est la grande harmonie de la nature humaine, c’est le portrait de notre belle enfance. […] Mais, la science analytique s’imposant comme un besoin, les timides cherchent à concilier ce besoin avec des restes d’institutions contradictoires à l’analyse et croient y réussir en maintenant les deux choses en face l’une de l’autre.

86. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

Le faux Démétrius, en effet, ne fut que la personnification de l’esprit populaire qui cherchait son objet, son libérateur, et qui se demandait de toutes parts : « D’où naîtra-t-il ? » Plus d’un vieux Moscovite, en songeant à la vieille race de ses tsars, à ce lugubre massacre d’Ouglitch, à ce dernier prince enfant enlevé par une mort soudaine et restée mystérieuse, devait se redire en idée, comme Abner dans Athalie, mais un peu moins harmonieusement, on peut le croire : Ce roi fils de David, où le chercherons-nous ? […] Que Boris se hâte de descendre d’un trône usurpé ; qu’il cherche dans la solitude d’un cloître à se réconcilier avec le ciel, j’oublierai ses crimes et je l’assure même de ma toute-puissante protection. » Boris lisait cette lettre avec un transport de rage. […] Il n’est pas de ces esprits qui cherchent en toute étude autre chose qu’elle-même ; il est droit, il aime le vrai, il l’aime avant tout. […] Pour peindre la douceur de l’habitude, par exemple, M. de Musset dira : Les amants qui ne se voient qu’à de longs intervalles ne sont jamais sûrs de s’entendre ; ils se préparent à être heureux, ils veulent se convaincre mutuellement qu’ils le sont, et ils cherchent ce qui est introuvable, c’est-à-dire des mots pour exprimer ce qu’ils sentent.

87. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre V : Règles relatives à l’explication des faits sociaux »

L’un cherchera à le changer pour le mettre en harmonie avec ses besoins ; l’autre aimera mieux se changer soi-même et modérer ses désirs, et, pour arriver à un même but, que de voies différentes peuvent être et sont effectivement suivies ! […] Il est naturel de chercher la cause d’un phénomène avant d’essayer d’en déterminer les effets. […] Or, l’individu écarté, il ne reste que la société ; c’est donc dans la nature de la société elle-même qu’il faut aller chercher l’explication de la vie sociale. […] C’est donc dans la nature de cette individualité, non dans celle des unités composantes qu’il faut aller chercher les causes prochaines et déterminantes des faits qui s’y produisent. […] Fût-il vrai que nous tendons actuellement à chercher notre bonheur dans une civilisation industrielle, rien n’assure que, dans la suite, nous ne le chercherons pas ailleurs.

88. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre quatrième »

A quoi bon chercher, dans une discussion des témoignages historiques, s’il a mérité sa mauvaise renommée ? […] Une rancune de Voltaire a mis dans la Henriade Mornay, au lieu de Sully, à côté de Henri IV : ses vers ont-ils fait qu’on y voie Mornay et qu’on n’y cherche pas Sully ? […] La morale du Discours sur la nature de l’homme, est qu’on n’y connaît rien, et qu’il ne faut pas perdre son temps à la chercher. […] Il n’y cherchait que son aise : la poésie vient l’y trouver. […] J’y cherche la part du dix-huitième siècle.

89. (1694) Des ouvrages de l’esprit

Il faut chercher seulement à penser et à parler juste, sans vouloir amener les autres à notre goût et à nos sentiments ; c’est une trop grande entreprise. […] Quand une lecture vous élève l’esprit, et qu’elle vous inspire des sentiments nobles et courageux, ne cherchez pas une autre règle pour juger l’ouvrage ; il est bon, et fait de main d’ouvrier. […] Quelques lecteurs croient néanmoins le payer avec usure, s’ils disent magistralement qu’ils ont lu son livre, et qu’il y a de l’esprit ; mais il leur renvoie tous leurs éloges, qu’il n’a pas cherchés par son travail et par ses veilles. […] Un auteur cherche vainement à se faire admirer par son ouvrage. […] L’éloquence peut se trouver dans les entretiens et dans tout genre d’écrire ; elle est rarement où on la cherche, et elle est quelquefois où on ne la cherche point.

90. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre II. Réalité des idées égalitaires »

Avant donc de chercher les conditions sociologiques du succès des idées égalitaires, il importe de prouver ce succès même, et qu’elles existent bien, dans la réalité historique, comme idées sociales. […] Alors ne risquons-nous pas de nous perdre dans la diversité même de leurs théories, et, en suivant le fil des idées qui leur sont propres, de rencontrer, en lieu et place de l’unanimité cherchée, la variété dies opinions individuelles ? […] De quoi sont frappés et chagrinés les esprits qui cherchent aujourd’hui leur voie ? […] — Soit, mais n’oublions pas notre but : nous ne cherchons nullement ici à connaître, dans ce qui caractérise et distingue, chacun d’eux, les différents systèmes élaborés par les théoriciens mais bien à discerner le sens général des idées qui ont « réussi », c’est-à-dire s’imposent aux sociétés modernes, et pénètrent leur organisation. […] Par exemple, si au lieu de remonter jusqu’à des origines inaccessibles, nous cherchons plus près de nous, l’espoir de rencontrer l’idée de l’égalité ne nous est pas interdit a priori.

91. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIIIe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (1re partie) » pp. 5-96

Le parti des hiérophantes, qui accusait Aristote de chercher la foi dans la raison pieuse, se souvint que cette même accusation avait fait mourir Socrate. […] Il ne faut pas chercher en lui, excepté la sagacité et la justesse d’idées, les perfections de forme de Platon, de Cicéron, d’Homère, de Virgile, de Théocrite, génies employés à fasciner les hommes par l’agrément. […] Il cherche à relever le sophisme par la raison, mais il ne peut, malgré son génie, prévaloir sur l’égalité divine. […] « Or ici il faut de toute nécessité que les deux individualités, ou du moins que l’une des deux disparaisse ; dans l’État au contraire, où cette communauté prévaudra, elle éteindra toute bienveillance réciproque ; le fils n’y pensera pas le moins du monde à chercher son père, ni le père à chercher son fils. […] Alors toute cette législation n’aboutirait qu’à interdire l’agriculture aux guerriers ; et c’est précisément ce que de nos jours cherchent à faire les Lacédémoniens.

92. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

Il faisait un peu frais dans cette chambre, nous allâmes chercher la chaleur en plein air. […] — Nous cherchons quelque part un vallon solitaire, et nous tirons à l’arc. […] Diderot et des esprits analogues au sien ont déjà, avant la révolution, cherché à ouvrir cette voie. […] Goethe fit arrêter, me pria de descendre et de chercher un peu si je ne trouverais pas quelques pétrifications. […] Je vous demandais, je vous cherchais, quelque chose me disait que certainement je vous trouverais ; quel bonheur !

93. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Néanmoins c’est dans celles de 1730 et de 1744 que l’on a toujours cherché de préférence le génie de Vico. […] Aussi ne vous y trompez pas ; vous voyez une foule de corps, mais si vous cherchez des âmes humaines, la solitude est profonde ; ce ne sont plus que des bêtes sauvages. […] Les premiers n’arrivent guère à sentir les beautés d’une langue étrangère, par l’habitude qu’ils ont de chercher toujours les défauts. […] La lecture du traité plus ingénieux que solide de Bacon, De sapientiâ veterum, lui fit naître l’idée de chercher les principes de la sagesse antique, non dans les fables des poètes, mais dans les étymologies de la langue latine, comme Platon les avait cherchés dans celles de la langue grecque (Voy. […] J’ai cherché inutilement ce fragment.

94. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 5-64

Mais c’était une pensée folle, et je la chassai comme une tentation du démon ; cependant, malgré moi, je cherchai à plaire à la fiancée, à sa mère et à son père, qui avaient été charitables pour moi, en leur témoignant plus de respect qu’aux autres et en tirant de ma zampogne et de mes doigts, quand on me prierait de jouer, des airs qu’ils aimeraient le mieux à entendre. […] À quoi bon aller chercher un gîte sous le porche des églises avec les vagabonds et les mendiants couverts de vermine, peut-être, pendant que nous avons là-haut, en montrant du geste à son mari l’escalier tortueux d’une petite tour, le lit vide du porte-clefs qui s’en va à Saltochio avec notre fille ? […] Je cherchais dans ma tête une réponse apparente à lui faire, et je baissais les yeux sur la pointe de mes souliers de peur qu’elle ne lût je ne sais quoi dans mes yeux. […] — Non, lui dis-je, mon père est aveugle et ma mère est morte (et je ne mentais pas en le disant, comme vous voyez), je n’appartiens à aucune bande de musiciens des Abruzzes ou des Maremmes, et je cherche seulement à gagner tout seul, par les chemins, d’une façon ou d’autre, le pain de mon père et de ma tante, qui ne peut pas quitter la maison où elle soigne son frère. […] lui répondis-je, toute rouge de l’idée qu’elle allait peut-être me proposer la place du gendre qui venait de la quitter, et pensant à toutes les occasions que j’aurais ainsi de voir, d’entendre et de servir celui que je cherchais.

95. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVIII. Institutions de Jésus. »

Quelques-uns hésitaient, le selâm étant alors comme aujourd’hui, en Orient, un signe de communion religieuse, qu’on ne hasarde pas avec les personnes d’une foi douteuse. « Ne craignez rien, disait Jésus ; si personne dans la maison n’est digne de votre selâm, il reviendra à vous 831. » Quelquefois, en effet, les apôtres du royaume de Dieu étaient mal reçus, et venaient se plaindre à Jésus, qui cherchait d’ordinaire à les calmer. […] Jésus accueillait leurs emportements avec sa fine ironie, et les arrêtait par ce mot : « Je ne suis pas venu perdre les âmes, mais les sauver. » Il cherchait de toute manière à établir en principe que ses apôtres c’était lui-même 833. […] Les vrais disciples en étaient fort blessés et cherchaient à les empêcher. […] Quelques-uns cherchaient même à acheter des disciples de Jésus le secret des pouvoirs miraculeux qui leur avaient été conférés 842. […] Il est possible que beaucoup de ces paroles aient été prêtées au maître, afin de donner une base à l’autorité collective par laquelle on chercha plus tard à remplacer la sienne.

96. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XI. MM. Mignet et Pichot. Charles Quint, son abdication, son séjour et sa mort au monastère de Yuste. — Charles V, chronique de sa vie intérieure dans le cloître de Yuste » pp. 267-281

Amédée Pichot et Mignet ont recueillies sur Charles-Quint étaient faites sur l’ensemble de la monarchie espagnole et sur chacun de ses grands hommes, il est probable qu’on arriverait bientôt à la conception vraie d’une histoire d’Espagne, — conception que l’on cherche encore vainement, malgré les prétentions à l’impartialité du xixe  siècle, dans la littérature européenne. En effet, de toutes les histoires qui, sans exception, ont plus ou moins besoin d’être refaites en quelques-unes de leurs parties, et dont la science, qui cherche toujours, doit tenir les fouilles éternellement ouvertes dans l’intérêt de la vérité, l’histoire de l’Espagne est peut-être la moins connue, parce qu’elle est la moins pénétrée. […] s’organiser dans des institutions qui furent aux mœurs de ce pays ce que le fourreau est à l’épée, cet esprit si antipathique à nos idées actuelles et qui épouvante à la fois et nos théories et nos cœurs, nous ne l’estimons pas assez pour chercher à le bien comprendre ; et voilà, en un mot, pourquoi le sens de tant de faits de l’histoire d’Espagne nous échappe ! […] Mignet il n’est question que de celui-là) ne s’explique par aucun des motifs simples et personnels à l’aide desquels des écrivains étroits et déroutés ont jusqu’à présent cherché vainement à l’expliquer. […] Si Charles-Quint put se tromper à la clarté de sa raison, l’Espagne ne pouvait, elle, se tromper à la clarté de sa foi, et s’il ne se repentit pas sous les désillusions de l’expérience, il dut sentir, en sa qualité de grand politique, qu’il avait profondément blessé son peuple, et cela reconnu comme un mal pour son pouvoir et pour sa race, il dut chercher à l’amoindrir et à l’effacer.

97. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

L’Allemagne, curieuse comme si elle n’avait pas d’idées à elle, et personnelle au point de chercher ses idées partout l’Allemagne, depuis longtemps, cherchait l’or que Leibnitz avait dit briller dans le fumier du moyen âge. […] » M. de Rémusat, plus ou moins hégélien, avait pu lire dans Hegel : « Anselme, dans son célèbre argument de l’existence de Dieu, montra, le premier, la pensée dans son opposition à l’être, et chercha à en prouver l’identité. » Après un pareil hommage rendu par le grand théoricien de l’identité de la pensée et de l’être, qui semblait reconnaître dans le Saint métaphysicien une paternité éloignée, comment ne pas se préoccuper de cet homme qui, quoique saint, avait été philosophe, et qui, par Descartes, touchait à Hegel ? […] Ce n’est pas assurément en passant qu’on peut traiter, comme il le faudrait, de la vérité absolue ou relative de toute philosophie, de cette science qui n’en est pas une, car elle se cherche éternellement sans se trouver. […] S’il n’ébranla pas en lui les robustes certitudes de sa foi, c’est que le Saint préservait l’homme des doutes du métaphysicien ; mais si le danger ne fut pas pour lui, il est pour d’autre, à cette heure, et dans un siècle ou l’obéissance en toutes choses cherche vainement des saint Anselme qui foulent aux pieds leur propre pensée, lorsqu’il s’agit d’obéir.

98. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

Je suis bien décidé à ne pas chercher un système chez M.  […] On chercherait vainement une proposition théologique dans l’Évangile. […] Les plus rigoureux, les plus avisés explorent leur raison pour y chercher, à défaut de révélation, un principe. […] Ils ont alors cherché à les conjurer et à réagir. […] Celle sanction, ils la cherchent dans la tradition qui est, comme le dit si justement M. 

99. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

Polybe montre un tout autre sens historique, quand il cherche l’explication de la supériorité politique et militaire de Rome dans la comparaison de ses institutions avec celles des autres grands peuples de l’antiquité. […] Il est trop clair que, dans un tel livre, il ne faut chercher aucun enseignement sérieux. […] S’il existe une conception spéculative à laquelle on puisse rattacher la philosophie de l’histoire telle que l’ont entendue les modernes, ce n’est pas dans la théologie de Bossuet, c’est dans la métaphysique de Leibniz qu’il faut la chercher. […] Voilà ce qui fait qu’ils ont cherché à peu près tous à étudier, à analyser, à classer les éléments dont se compose cette résultante, et à en déterminer les lois. […] Cherchons donc les données simples pour les qualités morales, comme on les cherche pour les qualités physiques35. » Et M. 

100. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre II. L’analyse interne d’une œuvre littéraire » pp. 32-46

Une œuvre qui cherche à plaire. […] Il faut donc chercher si une œuvre nous fait percevoir le petit ou le grand, le microscopique ou le démesuré, ou encore tous les deux ou seulement les aspects moyens. […] On cherchera la conception que l’auteur se faisait du monde extérieur, de la société humaine, de la vie, de l’art, de l’ensemble des choses. […] S’agit-il d’un roman ou d’une pièce : cherchez le personnage sympathique. […] Cherche-t-il à produire l’extase ou le frisson ?

101. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Anselme avait, je l’ai dit, l’âme tendre, la conscience délicate ; ces reproches de son père et ceux qu’il se faisait à lui-même le portèrent à un grand parti : il résolut de quitter le pays ; accompagné d’un seul clerc pour serviteur, il traversa le Mont-Cenis ; épuisé de fatigue et défaillant, on raconte que, pour réparer un peu ses forces, il ne trouvait à manger que la neige du chemin : Un âne portait leur mince bagage ; le serviteur inquiet chercha s’il n’y trouverait pas quelque nourriture, et, contre son attente, il trouva du pain blanc qui leur rendit la vie. […] En ce genre, Anselme croyait voir assurément beaucoup plus qu’il n’est donné à la faiblesse humaine d’apercevoir ici-bas ; mais sa bonne foi, sa candeur, sa ferveur ardente et son talent se combinaient pour lui peindre distinctement ce que d’autres ne font que chercher et désirer. […] Il raconte naïvement, dans la préface du petit ouvrage qu’il a consacré à ce sujet, comment il s’était longtemps consumé à chercher cet argument unique qui n’eût besoin d’aucun autre et qui n’exigeât point une suite de raisonnements, à l’effet de démontrer que Dieu est véritablement, et qu’il est le souverain bien. […] Enfin, un jour, il fut plus heureux, et il écrivit aussitôt l’espèce d’allocution et de prière où il s’empressa de l’encadrer ; car, chez Anselme, c’est toujours la prière qui précède et qui suit les opérations de la science ; chez lui, ce n’est pas la raison qui cherche la foi, c’est la foi fervente et sincère qui cherche simplement les moyens de se comprendre et, pour ainsi dire, de se posséder par le plus de côtés possible ; c’est la foi, comme il le définit excellemment, qui cherche l’intelligence d’elle-même.

102. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre III. Les explications anthropologique, idéologique, sociologique »

Force nous est donc de commencer par chercher si la seule vertu des races ou celle des idées explique pleinement l’expansion de l’égalitarisme, si l’Anthropologie ou l’Idéologie est capable de nous en donner la raison suffisante. […] Une transmission problématique de facultés d’ailleurs indéterminées et dont la genèse reste inconnue, voilà tout ce que l’anthropologie peut nous offrir pour l’explication du succès de l’égalitarisme ; n’est-il pas naturel que nous en cherchions autre part des raisons moins obscures et moins incertaines ? […] Est-ce dans la Rome impériale, au moment où toutes les races de l’antiquité se mêlaient, que vous irez chercher la preuve que l’idée de l’égalité résulte d’une disposition anatomique particulière ? […] Il n’en est pas moins vrai qu’on peut chercher, dans les rapports mêmes de ces consciences, la raison, ou du moins l’une des raisons des idées qu’elles forment. […] Pourquoi, demande un historien des théories morales48, chercher à toute force dans les idées des stoïciens un écho des idées chrétiennes, alors qu’on y peut voir un reflet de l’état social de l’Empire ?

103. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Baudelaire.] » pp. 528-529

Vous êtes, vous aussi, de ceux qui cherchent de la poésie partout ; et comme, avant vous, d’autres l’avaient cherchée dans des régions tout ouvertes et toutes différentes ; comme on vous avait laissé peu d’espace ; comme les champs terrestres et célestes étaient à peu près tous moissonnés, et que, depuis trente ans et plus, les lyriques, sous toutes les formes, sont à l’œuvre, — venu si tard et le dernier, vous vous êtes dit, j’imagine : « Eh bien ! […] Il faut, le moins qu’on peut, se citer en exemple : mais nous aussi, il y a trente ans, nous avons cherché de la poésie là où nous avons pu.

104. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre II. Amour passionné. — Didon. »

. : on ne peut plus s’occuper que d’elle ; on en est possédé, enivré : on la retrouve partout ; tout en retrace les funestes images ; tout en réveille les injustes désirs : le monde, la solitude, la présence, l’éloignement, les objets les plus indifférents, les occupations les plus sérieuses, le temple saint lui-même, les autels sacrés, les mystères terribles en rappellent le souvenir32. » « C’est un désordre, s’écrie le même orateur dans la Pécheresse 33, d’aimer pour lui-même ce qui ne peut être ni notre bonheur, ni notre perfection, ni par conséquent notre repos : car aimer, c’est chercher la félicité dans ce qu’on aime ; c’est vouloir trouver dans l’objet aimé tout ce qui manque à notre cœur ; c’est l’appeler au secours de ce vide affreux que nous sentons en nous-mêmes, et nous flatter qu’il sera capable de le remplir ; c’est le regarder comme la ressource de tous nos besoins, le remède de tous nos maux, l’auteur de nos biens34… Mais cet amour des créatures est suivi des plus cruelles incertitudes : on doute toujours si l’on est aimé comme l’on aime ; on est ingénieux à se rendre malheureux, et à former à soi-même des craintes, des soupçons, des jalousies ; plus on est de bonne foi, plus on souffre ; on est le martyr de ses propres défiances : vous le savez, et ce n’est pas à moi à venir vous parler ici le langage de vos passions insensées35. » Cette maladie de l’âme se déclare avec fureur, aussitôt que paraît l’objet qui doit en développer le germe. […] Didon vole, cherche, appelle Énée : Dissimulare etiam sperasti ? […] Elle atteste aussi les lieux témoins de son bonheur, car c’est une coutume des malheureux, d’associer à leurs sentiments les objets qui les environnent ; abandonnés des hommes, ils cherchent à se créer des appuis, en animant de leurs douleurs les êtres insensibles autour d’eux.

105. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

On voudrait savoir, deviner ; c’est un curieux qui en éveille d’autres ; moraliste fin, piquant, satirique, on le cherche lui-même derrière ses descriptions ; exquis et délicat dans ses maximes, on voudrait saisir l’occasion où elles sont nées, et connaître la part de son cœur qui est entrée dans son expérience. C’est un peintre hardi à la fois et discret, qui a voilé une partie de ses personnages et qui s’est dérobé lui-même ; il laisse entrevoir autant de choses qu’il en montre ; on le suivrait volontiers dans sa demi-ombre et dans ses mystères ; on cherche toujours une clef avec lui. […] Tel est l’usage que nous devons faire de la pensée de la mort, et c’est aussi tout le sujet de votre attention… Dire le parti que Bourdaloue a tiré de ces trois points de vue et surtout des deux premiers, c’est ce que toute analyse est insuffisante à rendre et ce qu’il faut chercher dans le sermon même. […] Il s’occupait des choses et non des mots ; il n’avait pas la splendeur naturelle de l’élocution, et il ne la cherchait pas : il s’en tenait à ce style d’honnête homme qui ne veut que donner à la vérité un corps sans lui imposer de couronne. […] Même lorsqu’on en est sobre pour soi, on la cherche et on la désire chez les autres.

106. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

tu as le don de la parole, tu as de la jeunesse, tu sais conter un récit héroïque : raconte de nouveau ce livre royal, et cherche par là la gloire auprès des grands. » Cet ami lui abrégea les recherches, lui procura un certain recueil déjà fait, et le poète, voyant la matière en sa puissance, sentit sa tristesse se convertir en joie. […] Tout poète, en tout pays, cherche son Auguste et son Mécène ; appelez ce Mécène du nom que vous voudrez : Ferdousi cherchait le sien. […] Son renom était tel, que le roi de la ville, bien que sujet des Turcs, sachant qu’il approchait, vint au-devant de lui, lui promit de faire chercher Raksch, et lui offrit une splendide hospitalité. […] Que cherches-tu dans la nuit sombre ? […] En entendant ces paroles qui semblent sortir d’une âme amie, le cœur de Sohrab s’élance, il a un pressentiment soudain ; il demande ingénument au guerrier s’il n’est pas celui qu’il cherche, s’il n’est pas l’illustre Roustem.

107. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

Il y a quinze ans environ, parmi les poètes déjà notoires, d’aucuns cherchaient déjà à réformer, à modifier leur procédé poétique ; deux méthodes se présentaient, grâce à plusieurs poètes. […] Stéphane Mallarmé, qui pensait que le vers manquait d’euphémisme et de fluidité, ne cherchait point à le libérer, bien au contraire ; pour ainsi dire, il l’essentialisait ; c’était affaire de fonds et de choix de syllabes. […] Depuis longtemps je cherchais autre chose que ce que m’apportaient ces nouveaux livres et celui de Corbière glorieusement ressuscité. […] Dans un affranchissement du vers, je cherchais une musique plus complexe, et Laforgue s’inquiétait d’un mode de donner la sensation même, la vérité plus stricte, plus lacée, sans chevilles aucunes, avec le plus d’acuité possible et le plus d’accent personnel, comme parlé. […] Mais j’admettrai plutôt que ces grandes œuvres, loin de se limiter à une technique restreinte, en un but d’unité, chercheront à réunir toutes les ressources les plus variées de l’art poétique.

108. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre X : M. Jouffroy psychologue »

Avant eux, on l’avait étudiée en accessoire, la consultant par occasion, par intérêt, en vue d’un objet étranger, pour y chercher les preuves d’une opinion logique ou métaphysique, légèrement, irrégulièrement, sans préparation, sans découvertes, sans attention et sans fruit. […] Exposons et discutons le raisonnement qui l’a perdu : « Je cherche, dit-il, l’essentiel, la cause. […] Tous deux vous avez cherché un fait caché sous un fait apparent, un fait indécomposable sous un fait décomposable. […] Au lieu de recourir à un penchant, cherchons un fait. […] Cela est si vrai, que le célèbre physiologiste Mueller a transcrit le troisième livre de l’Éthique, disant que l’explication y est entière, et qu’il n’y a plus rien à chercher sur ces questions-là.

109. (1903) La pensée et le mouvant

Si nous cherchions ce qu’elle est ? […] Il cherche moins à définir la vie que la science de la vie. […] Nul ne la chercha avec plus de passion. […] Ceux qui y chercheraient la marque propre de M.  […] Ravaisson cherche à dégager.

110. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre II. De la reconnaissance des images. La mémoire et le cerveau »

Je cherche maintenant comment la leçon a été apprise, et je me représente les phases par lesquelles j’ai passé tour à tour. […] Quand nous nous exerçons à apprendre une leçon, par exemple, l’image visuelle ou auditive que nous cherchons à recomposer par des mouvements ne serait-elle pas déjà dans notre esprit, invisible et présente ? […] Mais, avant d’en chercher la vérification, disons brièvement comment nous nous représentons les rapports généraux de la perception, de l’attention et de la mémoire. […] Nous devons chercher si notre hypothèse est vérifiée ou infirmée par les faits connus de localisation cérébrale. […] Attendons-nous, passifs, que les impressions aillent chercher leurs images ?

111. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

Nous ne voulons pas qu’on nous promène par le monde, comme des enfants, pour le simple plaisir des yeux ; en peu d’années l’Europe a grandement vieilli ; sa tardive expérience cherche aujourd’hui partout une instruction sérieuse. […] Mais comme il ne précise pas nettement le lieu de ses observations ; et que, par conséquent, il ne fait qu’énoncer les effets dans leur généralité, sans les suivre et les analyser dans leurs détails, il ne satisfait que peu l’esprit qui cherche des applications positives. […] Dans les premiers instants, c’est un tourment de l’enthousiasme qui travaille en vain à se produire au dehors, et qui se replie en cent façons sur lui-même avant d’atteindre l’effet cherché. […] Denis et de la littérature portugaise, et des ouvrages du poète, il devait oser se passer des combinaisons du roman, et ne chercher l’intérêt que dans la simple réalité.

112. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vigny, Alfred de (1797-1863) »

Ayant cherché Dieu dans la nature et ne l’ayant pas trouvé, il voulait que l’être humain se tint seul et debout, ayant son Dieu présent en lui : l’Honneur. […] Le vol de l’aigle est resté dans mon oreille, mais mes yeux en cherchent vainement le sillage aérien. […] Ni les images, ni les mots ne s’empressent d’eux-mêmes à son service, ou n’obéissent à l’appel de sa pensée, mais il lui faut les attendre ou les chercher ; et il ne les trouve pas toujours. […] Il est temps de ne chercher les paroles que dans sa conscience… » La phrase que j’ai soulignée pourrait servir d’épigraphe à toutes les parties de son œuvre.

113. (1865) Du sentiment de l’admiration

Ce n’est pas que vous refusiez une adhésion respectueuse à ces chefs-d’œuvre des âges favorisés où nous cherchons avec vous les modèles de la raison élégante et les secrets de l’éternelle beauté. […] C’est qu’un tel élève a compris le secret des hautes études, ce secret que nous cherchons à vous faire entendre et qu’il vous est trop facile d’oublier. […] On cherchera à vous prouver que l’idéal n’est qu’un mot, la littérature qu’un luxe, l’art classique qu’une convention maintenue par la docilité du public. […] L’admiration est saine et féconde ; on a recours à elle pour aller chercher le beau ; elle vous rend le bien en échange.

114. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Mes pensées bizarres sur le dessin » pp. 11-18

La tête s’est renversée ; les mains se sont redressées à l’articulation du poignet ; les coudes se sont portés en arrière : tous les membres ont cherché le centre de gravité commun qui convenait le mieux à ce système hétéroclite. […] L’enfant est une masse informe et fluide qui cherche à se développer ; le vieillard est une autre masse informe et sèche qui rentre en elle-même, et tend à se réduire à rien. […] Cherchez les scènes publiques ; soyez observateurs dans les rues, dans les jardins, dans les marchés, dans les maisons, et vous y prendrez des idées justes du vrai mouvement dans les actions de la vie. […] A la messe ou à vêpres aux Chartreux on voit sur deux longues files parallèles quarante à cinquante moines, mêmes stalles, même fonction, même vêtement, et cependant pas deux de ces moines qui se ressemblent ; ne cherchez pas d’autre contraste que celui qui les distingue.

115. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

Un hasard lui offrit ce qu’il cherchait vaguement encore. […] Chacun se hâte, prend la fuite, cherche un moyen de salut. […] Ce fut elle qui vint me chercher à Offenbach ; elle me prit par la main et me pria de venir la trouver à la ville. […] Elle était timidement gracieuse et trop dépourvue de volonté pour avoir jamais cherché à se faire remarquer en société. […] ” Afin de ne pas lui faire de mal, je cherchai à surmonter ma douleur.

116. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Taine cherche dans l’histoire les types les plus parfaits des diverses variétés de l’animal humain. […] Il est un musicien qui cherche à exprimer les sentiments et même à décrire les objets par le son et par le rythme. […] Il travaille longtemps au plan d’un grand ouvrage sur le Caractère des peuples cherché dans leur vocabulaire. […] Je ne sais s’il a trouvé dans ces exercices le profit qu’il y cherchait. […] Il cherche dans l’exercice de la charité l’éducation de son âme et la distraction à sa tristesse.

117. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Il était donc vrai qu’elles ont un désir de se chercher, de se comprendre, de se pénétrer et de s’aimer ! […] On y cherche un point central ; or il est difficile qu’il y en ait un, et même cela ne serait pas bon. […] Les nobles associés de Wilhelm au contraire n’estiment que la poésie du fait, ne cherchent la poésie que dans l’action. […] Vous cherchez l’idéal à la lumière de la tradition et à la lumière de l’art : que ne le cherchez-vous aussi à la lumière de la nature ? […] On cherche en vain dans l’ancienne littérature un type de bourgeois supportable.

118. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Aussi ne faut-il pas chercher chez lui la constance des convictions que nous avons trouvée chez Mme de Staël. […] Ceux-ci au lieu de chercher leur voie dans la route moyenne avaient une plus haute ambition. […] Victor Hugo : « c’est de la poésie qui cherche à recouvrer la raison ». […] On ne la chercherait pas en vain dans Lucrèce, le poète de la nature. […] — auprès de vous je l’ai cherché souvent, Carlos n’a point de père, et Philippe est vivant !

119. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Il restait et il reste encore bien des inspirations à chercher, pour le poète, dans toute cette partie de la société, la plus nombreuse, qui vit ignorée, et qui est cependant le fond même de l’humanité. […] A la vérité, ce ne sont pas tant les humbles qu’il a remarqués dans notre société que les ordinaires ; et dans leur vie, c’est le côté ordinaire, habituel, commun à tous qu’il a cherché à faire saillir. […] Cherche, ose Formuler ta pensée et prendre le hasard Pour unique raison de ce monde sans art 248. […] La poésie, à notre époque, cherche sa voie, et, d’instinct, elle la cherche dans la direction des idées philosophiques, scientifiques, sociales. […] Ne cherchez point ailleurs le secret de nos maux. » 236.

120. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 65-128

Je ramassai les clefs, je balayai les tessons de la cruche dans la cour, et je revins sur mes pas, comme si j’allais chercher un autre vase pour porter son eau au meurtrier. […] je n’eus pas grand-peine à provoquer ces renseignements ; dès que je la rencontrai, en sortant du cloître, dans la cuisine où j’allais chercher les paniers de provende pour le souper des prisonniers : — Tu auras trop tôt une écuelle de moins à leur servir, me dit-elle avec une vraie compassion. […] — Moi, dit-elle, en paraissant chercher dans sa mémoire sans y rien trouver : non, je n’ai plus rien au monde, dans les poches de ma veste, que sa boucle d’oreille de laiton cassée, qu’il m’avait donnée le jour de nos noces, et la lime que je lui avais achetée pour limer sa ceinture de fer et qu’il m’a rendue en s’évadant, comme deux reliques de notre amour et de notre délivrance. […] Je compris par là qu’on m’avait cherchée et que, sans doute, on me cherchait encore, et que je devais plus que jamais éviter de me laisser reconnaître pour ce que j’étais. […] Qu’est-ce qu’il me disait, qu’est-ce que je lui disais, je n’en sais plus rien ; pas beaucoup de mots peut-être, rien que des soupirs, mais dans ces silences, dans ce peu de mots, il y avait d’abord la joie de savoir que nous nous étions trompés et bien trompés, monsieur, en croyant depuis six mois que nous avions de l’aversion l’un pour l’autre, tandis que c’était par je ne sais quoi que nous nous fuyions comme deux chevreaux qui se cherchent, qui se regardent, qui se font peur et qui reviennent pour se fuir et se chercher de nouveau, sans savoir pourquoi.

121. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Il cherche alors le repos de son âme dans la pauvreté et dans la solitude. […] je cherche seulement un bien inconnu dont l’instinct me poursuit. […] « En vain je cherchais à découvrir son secret. […] On vient alors me chercher, pour remplir les fonctions paternelles.  […] Elle me faisait prier de ne plus chercher à la voir.

122. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Mais, quand le monde sera rationaliste, le plus grand homme sera celui qui aura le plus fait pour les idées, qui aura le plus cherché, le plus découvert. […] La bourgeoisie d’ailleurs a eu parfois le tort de chercher à revenir aux vieux airs de la noblesse ; à quoi elle n’a nullement réussi, et par là elle s’est rendue ridicule. […] Moi, critique inflexible, je ne serai pas suspect de flatterie pour un homme qui cherche la trinité en toute chose et qui croit, Dieu me pardonne ! […] Chercher un consentement universel de l’humanité sur autre chose que sur ce fait psychologique, c’est abuser des termes. […] Mais non, il n’y a que l’inflexible nature ; quand je cherche ton œil de père, je ne trouve que l’orbite vide et sans fond de l’infini, quand je cherche ton front céleste, je vais me heurter contre la voûte d’airain, qui me renvoie froidement mon amour.

123. (1828) Préface des Études françaises et étrangères pp. -

Ne cherchons pas, et contentons-nous, en dépouillant ces deux définitions hostiles de ce qu’elles ont de niais, d’en faire jaillir deux grandes vérités, savoir : qu’il n’y a réellement pas de romantisme, mais bien une littérature du dix-neuvième siècle ; et en second lieu, qu’il n’existe dans ce siècle, comme dans tous, que de bons et de mauvais ouvrages, et même, si vous le voulez, infiniment plus de mauvais que de bons. […] Casimir de la Vigne, œuvre essentiellement philosophique, qui peut-être n’a pas cet intérêt vulgaire que cherche d’abord la foule, mais qui frappe tous les esprits distingués par des situations fraîches, des caractères créés et par un style de poète. […] quelle distinction puérile la sottise et la mauvaise foi, chercheront-elles à établir entre des analogies si évidentes ? […] On y trouve des scènes admirables, mais on cherche vainement une pièce. […] Certains beaux vers sont plus difficiles à réciter que certains autres, mais qu’une voix habile vous les lise, et vous serez surpris d’y trouver des grâces et des effets que vous chercheriez en vain dans des vers en apparence plus mélodieux.

124. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

Il eût peut-être appris à traiter l’ode de cette manière, s’il eût mieux lu, étudié, compris la langue et le ton de Pindare qu’il méprisait beaucoup au lieu de chercher à le connaître un peu. […] Dans ses œuvres rares, difficiles, toujours remaniées, qu’il prise haut, mais qu’il n’estima jamais assez terminées pour en publier lui-même le recueil, il semble avoir cherché surtout à donner des exemples d’une nouvelle et meilleure manière de faire : on dirait qu’il n’a voulu que changer le procédé et remonter l’instrument plutôt que d’en user largement lui-même. […] Ce n’est point là cependant qu’il faut l’aller chercher. […] Ne cherchons rien de pareil chez Racan ; avec lui nous sommes en Gaule, en Touraine, tout près du Maine, en bon et doux pays, mais où tout ne brille pas, où chaque colline n’a pas son marbre étincelant ni son bois sacré. Ne cherchons que le sentiment sincère dans sa plénitude, le calme, la tranquillité stable d’une vie heureuse, l’idéal d’une médiocrité domestique frugale et abondante : or, tout cela s’y exhale, et on en reçoit l’impression en le lisant.

125. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

L’auteur suppose qu’un des êtres de cette race intermédiaire à l’homme et aux puissantes espèces animalesx, un centaure vieilli raconte à un mortel curieux, à Mélampe, qui cherche la sagesse et qui est venu l’interroger sur la vie des centaures, les secrets de sa jeunesse et ses impressions de vague bonheur et d’enivrement dans ses courses effrénées et vagabondes. […] L’oiseau qui cherche sa branche, l’abeille qui cherche sa fleur, le fleuve qui cherche sa mer, volent, courent jusqu’au repos : ainsi mon âme, ainsi mon intelligence, ô mon Dieu ! […] Je l’avais mise en toi, pauvre frère. » Elle se reproche de chercher des consolations dans les lettres d’amis : Écrit à Louise comme à Marie ; il fait bon écrire à celle-là. […] Que vais-je chercher dans les créatures ?

126. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Paragraphe sur la composition ou j’espère que j’en parlerai » pp. 54-69

Ma main droite ira chercher mon menton et soutenir ma tête qui tombe ; et ma main gauche ira chercher le coude de mon bras droit, et soutenir le poids de ma tête et de ce bras. […] Sans doute il y aura un moment de bruit, de mouvement, de tumulte, de flux, de reflux, d’ondulations ; c’est le moment où chacun ne pense qu’à soi, et cherche à se sacrifier la république entière. […] Si tu ne t’adresses jamais qu’à un polisson de dix-huit ans, tu as raison, mon ami, continue à faire des culs et des tétons ; mais pour les honnêtes gens et moi, on aura beau t’exposer à la grande lumière du Salon, nous t’y laisserons pour aller chercher dans un coin obscur ce Russe charmant de le Prince, et cette jeune, honnête, décente, innocente marraine qui est debout à ses côtés. […] Et pourquoi leurs têtes penchées sur l’orifice ne sembleraient-elles pas y chercher l’eau pour se désaltérer ? […] Chercher entre ses membres des oppositions purement techniques, y sacrifier la vérité rigoureuse de son action, voilà l’origine du style antithétique et petit.

127. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre IV. Cause immédiate d’une œuvre littéraire. L’auteur. Moyens de le connaître » pp. 57-67

Tel caractère d’un écrit ou d’un discours présuppose et permet d’affirmer l’existence de telle faculté correspondante chez l’écrivain ou l’orateur, et chacune des facultés ainsi constatées peut être considérée comme une des forces productrices cherchées. […] Inutile de chercher plus loin. — Est-ce que le bon sens ne réclamerait pas avec énergie ? […] que, sachant qu’on cherchera peut-être le peintre dans sa peinture, il se représente volontairement, non pas tel qu’il est, mais tel qu’il voudrait être ou, ce qui revient quelquefois au même, tel qu’il croit être ? […] Sans insister sur les précautions qu’il convient de prendre, disons que la formule cherchée, pour être complète et féconde, doit répondre à cette définition 16 : « L’analyse d’un caractère, si elle est bien faite, donne un air de nécessité à tous les actes d’un homme. » § 3. — On inaugure en ce moment en France un troisième procédé d’étude qui consiste à déterminer directement les facultés, les habitudes, les particularités d’un individu. […] On cherche à savoir, au moyen de procédés ingénieux, de tests, comme on dit en langage technique, quelle est chez lui l’association habituelle des idées, quelle mémoire il a des couleurs, des sons, des mots, des phrases, des pensées ; comment il apprécie la distance, la durée, les dimensions des objets, à quel degré il possède l’adresse des mouvements, la facilité de la parole, etc.

128. (1889) Les artistes littéraires : études sur le XIXe siècle

Il cherche selon les climats, le soleil ou la neige, l’architecture mauresque, l’art byzantin ou les courses de taureaux. […] Mais où la chercher si l’on prend au pied de la lettre chacune de ses déclarations ? […] Tout en exposant le fait, Baudelaire en cherche l’explication. […] Par là il se rapproche et il se distingue en même temps de Théophile Gautier pour qui les mœurs et la société moderne ne furent pas moins insupportables, et qui s’épuisa sans cesse à chercher autre chose, mais en connaissance pourtant de ce qu’il cherchait et, dès lors, avec la faculté de se satisfaire. […] Théodore de Banville avait jamais été rigoureusement observée par les maîtres de notre siècle, elle irait précisément à l’encontre du résultat qu’il cherche.

129. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Introduction » pp. 3-17

Quant à leur propre doctrine à eux, la voici : Laissons-nous aller, disent-ils avec Molière, laissons-nous aller de bonne foi aux choses qui nous prennent par les entrailles, et ne cherchons point de raisonnements pour nous empêcher d’avoir du plaisir. […] Tout fait a sa cause, et toute littérature, toute œuvre d’art est un fait dont il suffît de chercher, dont il faut sans passion chercher la cause dans les mœurs, les idées et les goûts de la société qui l’a produite, dans l’esprit du siècle qui l’a inspirée, dans le génie de la nation qui lui a donné son caractère général, dans le tempérament, les habitudes et la vie de l’auteur original qui lui a imprimé son cachet particulier. […] ; 3º le moment historique (nous retrouvons une croyance, des principes, une méthode : mais cette nouvelle doctrine n’est pas encore une synthèse ; elle n’est évidemment qu’un dernier fragment de la vérité totale, de cette inconnue que nous cherchons).

130. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre V. Harmonies de la religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain. — Chapitre II. Harmonies physiques. — Suite des Monuments religieux ; Couvents maronites, coptes, etc. »

Le tyran n’osoit plus y chercher ses victimes. […] La voix des passions se tait sous leurs cilices ; Mais leurs austérités ne sont point sans délices : Celui qu’ils ont cherché ne les oublîra pas ; Dieu commande au désert de fleurir sous leurs pas. […] Que de fois j’ai cherché, loin d’un monde volage, L’asile où dans Paris s’écoula ton jeune âge ! […] L’imagination, vers tes murs élancée, Chercha le saint repos, leur long recueillement ; Mais mon âme a besoin d’un plus doux sentiment.

131. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « J.-J. Ampère ; A. Regnault ; Édouard Salvador »

Autrefois, il suffisait de se déplacer pour avoir un avantage très net sur son voisin qui ne bougeait pas ; mais aujourd’hui les déplacements étant devenus fort aisés pour tout le monde (preuve de grande civilisation, comme l’on sait), les descriptions et les faits nouveaux, qu’allaient chercher au loin des voyageurs incapables de penser et d’inventer au coin de leur feu et les portes fermées, deviennent, par la facilité avec laquelle on se les procure, du domaine commun, tout autant que si ce domaine était immobile. […] C’est un style de petite vitesse ; mais, tel qu’il est, il est suffisant pour ce qu’il va chercher et rapporter. […] À ses yeux, c’est un de ces points où toute la vie d’une nation reflue, quand l’activité nationale, fatiguée de chercher en vain la sève qui lui manque, s’efforce de se répandre au dehors et d’atteindre des puissances nouvelles. […] Pour notre compte, nous ne savions pas que la France eût besoin de chercher, en ce moment, une sève qui lui manque, et que toute notre vie d’État dût refluer dans le port de Marseille, parce qu’il est un des plus brillants entrepôts de commerce que nous ayons sur la Méditerranée.

132. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre IV. De la méthode » pp. 81-92

Mais, lorsque nous cherchons comment cette première pensée humaine fut conçue dans le monde païen, nous rencontrons de graves difficultés. […] Partant de ce principe, nous établissons que l’homme dans l’état bestial, n’aime que sa propre conservation ; il prend femme, il a des enfants, et il aime sa conservation en y joignant celle de sa famille ; arrivé à la vie civile, il cherche à la fois sa propre conservation et celle de la cité dont il fait partie ; lorsque les empires s’étendent sur plusieurs peuples, il cherche avec sa conservation celle des nations dont il est membre ; enfin quand les nations sont liées par les rapports des traités, du commerce, et de la guerre, il embrasse dans un même désir sa conservation et celle du genre humain. […] Ils donnent le nom de théologie naturelle à la métaphysique, dans laquelle ils étudient cet attribut de Dieu, et ils appuient leurs raisonnements d’observations tirées du monde matériel ; mais c’était surtout dans l’économie du monde civil qu’ils auraient dû chercher les preuves de la Providence… La Science nouvelle sera, pour ainsi parler, une démonstration de fait, une démonstration historique de la Providence, puisqu’elle doit être une histoire des décrets par lesquels cette Providence a gouverné, à l’insu des hommes, et souvent malgré eux, la grande cité du genre humain.

133. (1910) Muses d’aujourd’hui. Essai de physiologie poétique

Le désharmonisé, au contraire, cherchera, par l’art, à rétablir en lui l’harmonie : d’où son œuvre artistique, poétique ou musicale. […] Jadis, on ne cherchait en elle qu’un apaisement, elle était le symbole de la sérénité. […] Elle a cherché à retrouver cet état de divine inconscience qui fait que l’être humain participe à la vie générale. […] que cherche donc cette femme, au-delà de l’accord parfait des étreintes et des spasmes ? […] Il y a dans ses vers un amour de la vie pour elle-même, qui ne cherche pas à comprendre au-delà de la sensation d’être.

134. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

On a beaucoup cherché quel était le premier principe de toutes choses. […] Cherchez. […] Voyant des hommes agir, vous chercherez instinctivement le genre de beauté des hommes qui agissent : vous chercherez la beauté morale. […] Le souci de moraliser est aussi funeste à l’artiste, qui n’a qu’à chercher le beau, que le souci de chercher le beau est funeste au moraliste et au prédicateur. […] Le but de l’art n’est pas de plaire ; le but de l’art est de chercher le beau ; par conséquent, la morale de l’artiste lui commande, non pas de chercher à plaire, mais de chercher uniquement à se plaire.

135. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre III. De l’organisation des états de conscience. La liberté »

Car au sein du tout ils n’occupaient point d’espace et ne cherchaient point à s’exprimer par des symboles ; ils se pénétraient, et se fondaient les uns dans les autres. […] Et c’est pourquoi nous cherchons en vain à expliquer notre brusque changement de résolution par les circonstances apparentes qui le précédèrent. […] Aussi a-t-on eu tort, pour prouver que l’homme est capable de choisir sans motif, d’aller chercher des exemples dans les circonstances ordinaires et même indifférentes de la vie. […] La thèse de la liberté se trouverait ainsi vérifiée si l’on consentait à ne chercher cette liberté, que dans un certain caractère de la décision prise, dans l’acte libre en un mot. […] Si je parcours des yeux une route tracée sur la carte, rien ne m’empêche de rebrousser chemin et de chercher si elle bifurque par endroits.

136. (1831) Discours aux artistes. De la poésie de notre époque pp. 60-88

Ou si, oubliant que l’art c’est la vie, vous faites de l’art uniquement pour en faire, souffrez que je ne voie pas en vous le prophète, le vates que l’Humanité a toujours cherché dans ses poètes. […] Et cette pensée de l’infini fait fléchir ses genoux ; et il cherche à prier, et sa prière l’inonde de pleurs : Hélas ! […] On s’humilie par grandeur même d’esprit, autant que par lassitude de chercher et d’attendre. […] Pour tous, c’est bien plutôt la matière de l’art que l’art lui-même ; ce n’est pas leur vie franchement dévote qui s’exprime, c’est leur vie douteuse, incrédule, affligée, qui cherche confort, et qui trouve cet aliment. […] L’amour de Roméo qui cherche ses rapports et ses harmonies avec le ciel et la terre, avec le scintillement des étoiles et le chant du rossignol, voilà la poésie.

137. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Conclusion »

Ceux qui cherchent dans les ouvrages d’esprit des lumières sur les choses plus près d’eux, ou simplement les plaisirs si variés de l’art, ceux-là ne trouvent dans ces livres, un moment célèbres, qu’un désappointement égal à l’admiration qu’ils ont inspirée. […] Il faut chercher les termes de comparaison jusque dans le dix-septième siècle. […] On cherche quel nom donner à cette histoire, et si c’est de l’histoire ; on le cherchera encore après nous, et ce sera une sorte de gloire à laquelle contribueront les gens de goût, même en y résistant142. […] Je cherche, dans la bibliothèque immense sortie de son puissant cerveau, le livre qui durera autant que son nom. […] S’il n’a pas les qualités du grand écrivain, je cherche ce qui lui manque de l’excellent.

138. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre II : La Psychologie »

La psychologie humaine, c’est-à-dire la science du phénomène psychique, doit donc chercher des données dans la biologie et dans la sociologie. […] Le biologiste qui suit la vraie méthode scientifique accepte la vie, comme un fait dernier, dont il ne cherche que les fadeurs : ses conditions et les lois de sa manifestation. […] Cherchons donc si les animaux décapités manifestent ces signes palpables. […] Ainsi, nous voyons dans nos serres, les insectes chercher leur nourriture et leur nid dans des plantes tropicales qui ne peuvent vivre en plein air dans les pays où ces insectes sont nés. […] Il est aussi absurde de chercher comment une excitation nerveuse se transforme en mouvement musculaire, — comment la contractilité, quand elle est excitée, est liée à une contraction.

139. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

Nous pouvons même le chercher encore plus près de nous. […] S’ils disent que leur âme est altérée de mystère, c’est parce qu’ils te cherchent et qu’ils ne t’ont point trouvé. […] Vainement, chercherait-on, dans l’ordre intellectuel, des similitudes aussi marquées : les catégories y sont mieux délimitées. […] Trouvaille… c’est-à-dire chose unique, qui vous appartient en propre, dont on cherche en vain l’équivalent dans le passé. […] C’est comme une loi d’harmonie qui veut que deux êtres, en se rapprochant, cherchent à se compléter l’un l’autre.

140. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution d’Angleterre »

Prenez, en effet, les événements, les péripéties, les grands chocs, les causes mystérieuses ou visibles, absolues ou secondaires, les empêchements, les choses, comme disent les esprits vagues, la fatalité des circonstances, comme disent les esprits hébétés, les idées, enfin, comme répètent à leur tour les mystiques brouillons d’un panthéisme confus, c’est-à-dire prenez tout ce qui constitue l’Histoire, et cherchez résolument si tout cela cache rien de plus, sous un mouvement gigantesque ou une ruine immense, que la toute petite créature qui s’appelle l’homme, que cette vieillerie du cœur humain dont le programme est toujours à reprendre et qu’on ne connaît jamais assez ! […] Du reste, ce n’est point dans les surprises d’un talent que l’Europe connaît et qui ne peut plus étonner personne, qu’il faut chercher la raison de l’intérêt de cet écrit de Guizot. […] Les uns chercheront donc dans le nouvel écrit de Guizot, comme ils cherchèrent dans tous ceux du même auteur qui le précédèrent, des raisons suffisantes pour accepter et légitimer, pour innocenter et comprendre le principe des révolutions ; les autres pour le repousser, le maudire et le combattre davantage.

141. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre IV. Le rêve »

Max Simon rêva un jour qu’il était devant deux piles de pièces d’or, que ces piles étaient inégales et qu’il cherchait à les égaliser. […] Il faudrait savoir si Tartini n’achevait pas la sonate pendant qu’il cherchait à se la remémorer. […] J’ai cherché des observations plus approfondies, et surtout d’une authenticité plus certaine ; je n’en ai pas trouvé d’autre que celle du romancier anglais Stevenson. […] Parfois ils la rejoignent ensemble : alors la pelouse est billard — absurdité que le rêveur cherchera peut-être à lever par un raisonnement qui l’aggravera encore. […] Resterait à chercher pourquoi le rêve préféré tel ou tel souvenir à d’autres, également capables de se poser sur les sensations actuelles.

142. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

Rousseau sont un modèle qu’il cherche à imiter. […] Le fait m’était complètement inconnu, et il me conseilla de le chercher dans Machiavel de préférence à tout autre historien. […] Il le sentit trop ; il chercha sa consolation dans le sommeil de ses facultés, et il se fit une habitude de l’ivresse, oubli volontaire du sort. […] “Monsieur, dit-elle sans s’émouvoir, la comtesse d’Albany a cherché un asile dans ce couvent ; elle y est sous la protection de Son Altesse impériale et royale la grande-duchesse.” […] Je pris enfin le parti de m’en aller à Naples chercher quelque remède ; et l’on se doute bien que si je choisis Naples, c’est que pour s’y rendre il faut passer par Rome.

143. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

Les grands souvenirs de la poésie nationale l’attirent ensuite vers les lieux consacrés : il cherche l’âme de Dante à Ravenne, il visite à Arqua le tombeau de Pétrarque et celui d’Arioste à Ferrare. […] De tels documents veulent être cités avec une fidélité scrupuleuse ; ce ne sont pas des modèles de style ou de correction qu’on y cherche. […] Près de cette ville, je retrouvai enfin celle que je demandais à tous les échos, que je cherchais partout, et dont la douce présence me manquait depuis plus de seize mois. […] « Après avoir employé ou perdu environ deux mois, dit-il, à chercher et à meubler une nouvelle maison, nous y entrâmes au commencement de 1792. […] Chaque nuit on pouvait venir me chercher ; mais j’avais pris toutes mes mesures pour ne me laisser ni surprendre ni maltraiter.

144. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

Les grandes apparitions religieuses présentent une foule de faits inexplicables pour celui qui n’en cherche pas la cause au-dessus de l’expérience vulgaire. […] Et c’est là que nous avons été nous égarer pour chercher notre théologie ! […] On cherche le christianisme dans les œuvres des Pères platoniciens, qui ne représentent qu’un second moment de son existence. […] Ce serait pourtant peine perdue que de chercher à le démontrer à ceux qui refusent de se placer à ce point de vue. […] Les savants israélites cherchent souvent à prouver par des rapprochements de textes que Jésus a volé toute sa doctrine à Moïse et aux prophètes, et que ce qu’on a appelé la morale chrétienne n’est au fond que la morale juive.

145. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

Les savants cherchent, observent, conçoivent, conjecturent, induisent ; le chrétien tranche, et, en vertu du livre révélé, il répond que Dieu un jour a créé la terre, et puis l’homme. […] Le savant étudie tout ; il cherche ; il recueille les moindres vestiges, ceux que procurent de temps en temps des fouilles heureuses, des trouvailles fortuites, et qui pouvaient aussi bien ne pas se rencontrer. […] Ses recherches les plus profondes, les plus heureuses, ses découvertes même, s’il en fait, il sait que c’est si peu de chose ; que d’autres avant lui ont cherché et découvert, et que de loin tout cela fait à peine un anneau distinct dans la chaîne, si courte pourtant, et d’hier seulement renouée, des connaissances humaines. […] Tant qu’il y aura des hommes sur la terre, on cherchera ainsi toujours, et le dernier mot, reculant sans cesse, ne se trouvera jamais. […] Cherche-t-il la reconnaissance ?

146. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

J’entends par là qu’ils sont parvenus à un public qui en juge sans compétence particulière, qui n’y cherche aucune instruction technique, qui s’en fait, plus ou moins frivolement ou grossièrement, des moyens de culture générale, de plaisir intellectuel. […] Il est clair que ces indications seront très superficielles, très incomplètes ; et il ne faut pas y chercher même une esquisse de développement des ordres de connaissances auxquelles se rapportent les ouvrages que je citerai. […] Nos savants se sont, en général, rigoureusement renfermés dans les études spéciales, et n’ont pas cherché à élargir leur popularité par la séduction des hypothèses générales et des vastes perspectives systématiques. […] Fuslel de Coulanges ne cherche rien au-delà de la représentation explicative du passé : Taine emploie l’histoire à faire la psychologie et la sociologie. […] Un doute me reste : dans quelle mesure ne lui font-ils pas expier ces dons littéraires par où il était si loin lui-même de chercher le succès ?

147. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

Il aimait passionnément les idées générales, mais il les dissimulait si bien, qu’un Anglais, auteur d’un livre intéressant sur les États-Unis, lui disait : « Ce que j’admire particulièrement, c’est qu’en traitant un si grand sujet, vous ayez si complètement évité les idées générales. » Il ne les évitait pas, loin de là ; mais il cherchait autant que possible à les incorporer dans les faits. […] Comme le débat entre les deux écoles portait sur la révolution et ses conquêtes, ceux qui avaient été dépouillés cherchaient à restreindre l’idée de l’État, instrument de leur ruine ; ceux qui avaient vaincu voyaient dans l’État l’instrument de leur délivrance et de leur victoire. […] Il a donc conseillé à la démocratie de chercher son point d’appui dans la liberté, et de ne s’avancer dans l’égalité qu’en raison des progrès accomplis dans la conquête des libertés publiques. […] Si mes impressions étaient aussi tristes que vous le pensez, vous auriez raison de croire qu’il y a une sorte de contradiction dans mes conclusions, qui tendent, en définitive, à l’organisation progressive de la démocratie, J’ai cherché, il est vrai, à établir quelles étaient les tendances naturelles que donnait à l’esprit et aux institutions de l’homme un état démocratique. […] Il m’a semblé que les démocrates (et je prends ce motdans son bon sens) ne voyaient clairement ni les avantages, ni les périls de l’état vers lequel ils cherchaient à diriger la société, et qu’ils étaient ainsi exposés à se méprendre sur les moyens à employer pour rendre les premiers les plus grands possible et les seconds les plus petits qu’on puisse les faire.

148. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Bien que mon intelligence ne considérât pas sans quelque orgueil son ouvrage, mon âme ne pouvait s’accommoder à un état si peu fait pour la faiblesse humaine ; par des retours violents elle cherchait à regagner les rivages qu’elle avait perdus ; elle retrouvait dans la cendre de ses croyances passées des étincelles qui semblaient par intervalles rallumer sa foi. […] « C’étaient des journées, des nuits entières de méditations dans ma chambre ; c’était une concentration d’attention si exclusive et si prolongée sur les faits intérieurs, où je cherchais, la solution des questions, que je perdais tout sentiment des choses du dehors, et que, quand j’y rentrais pour boire et manger, il me semblait que je sortais du monde des réalités et passais dans celui des illusions et des fantômes. » Personne n’est plus capable de passion que les hommes intérieurs ; on l’a bien vu chez les puritains d’Angleterre. […] « Je perdis le goût d’aller chercher et emprunter ailleurs ce que je pouvais trouver et acquérir par moi-même. […] Ce que je lisais, ce que j’entendais de philosophie, n’avait d’autre effet que de me donner matière à penser, à chercher. […] En vérité, nous sommes encore au moyen âge ; nous imitons saint Anselme, avec un peu moins de timidité et un peu plus d’indépendance ; nous ne cherchons comme lui qu’à prouver un dogme préconçu.

149. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

allons chercher une chaumière, avec une pelouse. […] « Une belle forme est une belle idée, dit-il ; nous ne comprenons pas l’artiste qui ne cherche pas le beau. […] Cette fortune qu’il voulait, qu’il cherchait, l’a fui sans cesse, et quand il a été à même d’en jouir, il est mort. […] Ce qu’il aime, il voudra le rendre heureux, et l’idéaliste cherchera à l’ennoblir. […] Aujourd’hui on se fait chroniqueur par vocation, on cherche une gloire facile et productive.

150. (1864) Le roman contemporain

On avait du temps devant soi ; on allait chercher à l’employer. […] On a donc cherché par quelles routes on arriverait au but. […] Elle s’ignore et elle se cherche. […] Je n’y vois que des ombres ; j’y cherche en vain la lumière. […] Je cherche en ce moment la chrétienne et je cesse de l’apercevoir.

151. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — I. Takisé, Le taureau de la vieille »

Une vieille, qui cherchait des feuilles d’oseille pour la sauce de son touho (couscouss), dans ce lougan abandonné, aperçut le veau couché sous un arbuste. […] Un jour un boucher vint demander à la vieille de lui vendre son taureau mais elle s’y refusa formellement « Takisé, dit-elle (elle avait donné ce nom à son nourrisson), « Takisé n’est pas à vendre. » Le boucher, mécontent du refus, alla trouver le sartyi134 et lui dit : « Il y a chez la vieille Zeynêbou un « gros taureau qui ne doit être mangé que « par toi tant il est beau. » Le sartyi envoya le boucher et 6 autres avec lui sous le commandement d’un de ses dansama135, chercher le taureau de la vieille. […] Quand il rendit visite au roi, le gambari lui raconta qu’il avait vu chez une vieille femme du village une jeune fille d’une beauté sans pareille : « Cette fille, conclut-il ne peut avoir qu’un sartyi pour époux. » Le sartyi ordonna incontinent à son griot d’aller, en compagnie du dioula, chercher la jeune fille.

152. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre II. Le comique de situation et le comique de mots »

On cherchera vainement une théorie du comique qui réponde d’une manière satisfaisante à cette question très simple. […] Mais ceci même nous invite à chercher plus loin et plus haut. […] Il ne nous reste plus alors, pour compléter notre analyse, qu’à chercher ce qu’il y a de comique dans l’idée de porter un diagnostic sur l’enfant après auscultation du père ou de la mère. […] Mais suivre la méthode inverse, chercher directement la formule de l’esprit, c’est aller à un échec certain. […] Il y en a beaucoup d’autres, et la source du rire doit être cherchée plus haut.

153. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

La Revue des Deux Mondes et les écrivains qui tiennent à honneur de lui appartenir ont été récemment l’objet de telles attaques violentes et outrageuses, outrageuses et pour ceux qu’on y désignait malignement, et pour ceux qu’on y passait sous silence, en ayant l’air de les ménager, et pour ceux surtout qu’on cherchait à y flatter en se les donnant pour auxiliaires, que c’est un devoir à eux, non pas de se défendre (ils n’en ont pas besoin), mais de témoigner de leurs sentiments, de leurs principes, et de marquer de nouveau leur attitude. […] On s’essayait, on cherchait à marcher ensemble. […] Cette lacune se faisait quelquefois sentir, et l’on cherchait à y pourvoir ; mais de telles doctrines, pour être tant soit peu solides et réelles, de telles affinités ne se créent pas de toutes pièces, et l’on attendait. […] Voilà le vrai ; et de plus, il est résulté de ces années d’expérience et de pratique commune que cette doctrine critique, qu’on cherchait à introduire dès l’abord, s’est formée de la manière dont ces sortes de choses se forment le mieux, c’est-à-dire lentement, insensiblement, comme il sied à des hommes d’âge déjà mûr, qui ont passé par les diverses épreuves de leur temps, et qui sont guéris des excès. […] Pour animer, pour ennoblir aux yeux du public cet ensemble de critique, en apparence si peu fastueuse, et que nous ne cherchons nullement à rehausser ni non plus à rapetisser ici, une seule considération peut-être suffira.

154. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Joséphin Soulary »

Cela veut dire que, pour rimer, il faut chercher la rime, que, pour faire des vers, il faut observer la mesure, et que, ni la rime ni le rythme ne se présentant d’eux-mêmes, il faut quelquefois, pour exprimer une idée en vers, y employer d’autres mots que pour l’exprimer en prose. L’essentiel est que ces mots cherchés, et qui ne s’imposaient pas plutôt que d’autres, paraissent venus spontanément, ou que, s’ils semblent tirés d’un peu loin, ce défaut de naturel soit compensé par le plaisir que donne le sentiment de la difficulté vaincue, ou par quelque effet de rythme, d’harmonie, de sonorité. […] II Je ne cacherai pas que je cherche en ce moment les côtés faibles de M.  […] Il n’est pas de style plus laborieux et plus cherché, de gentillesse plus emberlificotée. […] que ton cœur éperdu Se cherche une autre associée !

155. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre I. L’intuition et la logique en Mathématiques. »

Je voudrais citer des exemples et certes ils ne manquent pas ; mais pour accentuer le contraste, je voudrais commencer par un exemple extrême ; pardon, si je suis obligé de le chercher auprès de deux mathématiciens vivants. […] Évidemment, il voit et il cherche à peindre, c’est pour cela qu’il appelle le geste à son secours. […] Hermite, c’est tout le contraire ; ses yeux semblent fuir le contact du monde ; ce n’est pas au dehors, c’est au dedans qu’il cherche la vision de la vérité. […] C’est que quand nous cherchons à imaginer une courbe, nous ne pouvons pas nous la représenter sans épaisseur ; de même, quand nous nous représentons une droite, nous la voyons sous la forme d’une bande rectiligne d’une certaine largeur. […] V Nous cherchons la réalité, mais qu’est-ce que la réalité ?

156. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XV. Commencement de la légende de Jésus  Idée qu’il a lui-même de son rôle surnaturel. »

Le titre de « fils de David » fut le premier qu’il accepta, probablement sans tremper dans les fraudes innocentes par lesquelles on chercha à le lui assurer. La famille de David était, a ce qu’il semble, éteinte depuis longtemps 677 ; les Asmonéens, d’origine sacerdotale, ne pouvaient chercher à s’attribuer une telle descendance ; ni Hérode, ni les Romains ne songent un moment qu’il existe autour d’eux un représentant quelconque des droits de l’antique dynastie. […] C’est Jean l’évangéliste ou son école qui plus tard cherchèrent à prouver que Jésus est le Verbe, et qui créèrent dans ce sens toute une nouvelle théologie, fort différente de celle du royaume de Dieu 720. […] Mais celui qui prend l’humanité avec ses illusions et cherche à agir sur elle et avec elle, ne saurait être blâmé. […] Nous verrons qu’il y fut traité comme « séducteur. » Le Talmud donne la procédure suivie contre lui comme un exemple de celle qu’on doit suivre contre les « séducteurs », qui cherchent à renverser la Loi de Moïse.

157. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

Si maintenant, après avoir établi que l’acte ministériel est odieux, inqualifiable, impossible en droit, nous voulons bien descendre pour un moment à le discuter comme fait matériel et à chercher de quels éléments ce fait semble devoir être composé, la première question qui se présente est celle — ci, et il n’est personne qui ne se la soit faite : ― Quel peut être le motif d’une pareille mesure ? […] La voilà pourtant cette pièce contre laquelle le ministère cherche à soulever tant de préventions ! […] C’est un artiste dévoué à l’art, qui n’a jamais cherché le succès par de pauvres moyens, qui s’est habitué toute sa vie a regarder le public fixement et en face. C’est un homme sincère et modéré, qui a déjà livré plus d’un combat pour toute liberté et contre tout arbitraire, qui, en 1829, dans la dernière année de la restauration, a repoussé tout ce que le gouvernement d’alors lui offrait pour le dédommager de l’interdit lancé sur Marion de Lorme, et qui, un an plus tard, en 1830, la révolution de juillet étant faite, a refusé, malgré tous les conseils de son intérêt matériel, de laisser représenter cette même Marion de Lorme, tant qu’elle pourrait être une occasion d’attaque et d’insulte contre le roi tombé qui l’avait proscrite ; conduite bien simple sans doute, que tout homme d’honneur eut tenue à sa place, mais qui aurait peut-être dû le rendre inviolable désormais à toute censure, et à propos de laquelle il écrivait ceci en août 1831 : « Les succès de scandale cherché et d’allusions politiques ne lui sourient guère, il l’avoue. […] Pour le moment un rôle politique lui vient ; il ne l’a pas cherché, il l’accepte.

158. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « De Stendhal »

Ce qu’on a trouvé dans la Correspondance de Stendhal n’a pas été ce qu’on y cherchait. […] Nous y avons vainement cherché une vue, une opinion, une perspective, en dehors de la donnée correcte et maintenant acceptée de cet esprit, monté en bronze de sa propre main. […] II Pour notre compte, nous avons quelquefois cherché à nous rendre raison de l’intérêt poignant qu’on éprouve en lisant Stendhal, même quand on fait le meilleur procès à son talent perverti et pervers. […] Il la cherche, il la poursuit comme la fortune, mais si on ne craignait pas l’emploi des mots bas pour caractériser des procédés littéraires, on dirait qu’il a des ficelles, des trucs, pour y parvenir. […] Ainsi que l’atteste la Correspondance, l’imagination de cet amoureux de la Passion et de la Force remontait vers la Féodalité expirante pour y chercher des types, des émotions et des effets, et se détournait avec mépris de cette société à âme de soixante-dix ans dont il avait écrit encore cette autre phrase : « À Paris, quand l’amour se jette par la fenêtre, c’est toujours d’un cinquième étage », pour en marquer la décrépitude ; car la vieillesse, comme l’immoralité, comme l’athéisme, comme les révolutions, descend dans les peuples au lieu d’y monter, et c’est ordinairement par la cime que les sociétés commencent à mourir.

159. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Stendhal » pp. 43-59

Ce qu’on a trouvé dans la Correspondance de Stendhal n’a pas été ce qu’on y cherchait. […] Nous y avons vainement cherché une vue, une opinion, une perspective, en dehors de la donnée correcte, et maintenant acceptée, de cet esprit, moulé en bronze de sa propre main. […] II Pour notre compte, nous avons quelquefois cherché à nous rendre raison de l’intérêt poignant qu’on éprouve en lisant Stendhal, même quand on fait le meilleur procès à son talent perverti et pervers. […] Il la cherche, il la poursuit comme la fortune ; mais, si on ne craignait pas l’emploi des mots bas pour caractériser des procédés littéraires, on dirait qu’il a des ficelles, des trucs pour y parvenir. […] Ainsi que l’atteste la Correspondance, l’imagination de cette amoureux de la Passion et de la Force remontait vers la Féodalité expirante, pour y chercher des types, des émotions et des effets, et se détournait avec mépris de cette société, à âme de soixante-dix ans, dont il avait écrit encore cette autre phrase : « A Paris, quand l’amour se jette par la fenêtre, c’est toujours d’un cinquième étage », pour en marquer la décrépitude ; car la vieillesse, comme l’Immoralité, comme l’Athéisme, comme les Révolutions, descend dans les peuples au lieu d’y monter, et c’est ordinairement par la cime que les sociétés commencent de mourir.

160. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

Si la raison des philosophes ne cherche son Dieu que dans l’infini, il faut pardonner à la famille pieuse et indigente de chercher le sien dans son cœur et dans son foyer domestique. […] C’est ce personnage qui est chargé de venir chaque fois nous chercher pour nous conduire à la cour. […] Tous ces personnages nous font chercher et ramener dans leurs voitures et avec leurs gens. […] Ce n’est pas la philosophie qu’il faut chercher dans cette sainte famille d’artistes chantants, c’est la nature. […] Et comme ce miracle est par trop évident et ne peut être nié, on cherche à l’anéantir.

161. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

Les raisons, si on les cherchait en dehors du talent même, seraient longues à donner, et elles sont de telle nature qu’il faudrait toute une confession nouvelle pour les faire comprendre. […] Il ne chercha pas à adoucir sa doctrine. […] Je ne cherche point à vous tromper, c’est vrai ! J’ai bien examiné la vie, et la nature, cette source intermittente de la vie, et la mort muette qui ne dit rien, et l’innombrable série des fables par lesquelles des hommes aussi ignorants que vous et moi ont cherché à interpréter ce silence ! […] Il lui reste longtemps des besoins d’expression plus parfaite qu’il cherche involontairement à jeter dans sa nouvelle forme.

162. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

— On chercherait loin les preuves de mauvaises intentions ; au contraire, les preuves sont formelles à des intentions innocentes. […] » Le rétablissement de l’Opéra est décidé, mais, tous les artistes manquent : il faut les aller chercher, comment ? […] Wellgunde plonge vers le rocher et cherche à attraper Woglinde, qui lui échappe. […] Alberich cherche à entourer Woglinde qui se dégage, puis monte sur un autre rocher. […] cherche-toi une amante, à qui tu plaises.

163. (1864) Études sur Shakespeare

Les âmes plus ardentes allaient au loin chercher les aventures qui, avec l’espoir de la fortune, leur offraient le plaisir plus vif des hasards. […] Au théâtre seul appartient la véritable histoire de Shakespeare ; après l’avoir vu là, on ne peut plus le chercher ailleurs ; lui-même ne sien est plus écarté. […] Ce n’est là que la matière du drame ; ce n’est pas là que Shakespeare en cherchera la vie. […] Que cherchais-tu ? […] L’illusion dramatique a été cherchée à sa véritable source ; mais on ne lui a pas demandé tous les effets qu’on en pouvait obtenir.

164. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre premier »

Tout le monde y trouvait ce que tout le monde cherchait ; avec trop de faveur, avec exagération, qui peut le nier ? […] Aussi le blâmaient-ils d’employer hors de temps la magnificence du langage, et de chercher de grands mots pour amplifier de petites choses. […] Où Balzac déploie tout l’appareil oratoire, Pascal ne mettra que le style vif de la conversation, sans chercher l’éloquence, et sans l’éviter. […] Balzac est un honnête homme qui cherche la vérité, et qui tâche de la persuader aux autres. Il la cherche un peu au hasard et sur trop de points, et il emploie trop d’appareil à la persuader.

165. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre III : Règles relatives à la distinction du normal et du pathologique »

Au lieu de prétendre déterminer d’emblée les rapports de l’état normal et de son contraire avec les forces vitales, cherchons simplement quelque signe extérieur, immédiatement perceptible, mais objectif, qui nous permette de reconnaître l’un de l’autre ces deux ordres de faits. […] Puisque la généralité, qui caractérise extérieurement les phénomènes normaux, est elle-même un phénomène explicable, il y a lieu, après qu’elle a été directement établie par l’observation, de chercher à l’expliquer. […] Après avoir établi par l’observation que le fait est général, il remontera aux conditions qui ont déterminé cette généralité dans le passé et cherchera ensuite si ces conditions sont encore données dans le présent ou si, au contraire, elles ont changé. […] Mais si le crime n’a rien de morbide, la peine ne saurait avoir pour objet de le guérir et sa vraie fonction doit être cherchée ailleurs. […] C’est ainsi que l’esprit est amené à se détourner d’une réalité désormais sans intérêt pour se replier sur soi-même et chercher au-dedans de soi les matériaux nécessaires pour la reconstruire.

166. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre III. Éducation de Jésus. »

Une vaste exégèse allégorique s’appliquait à tous ces livres et cherchait à en tirer ce qui n’y est pas, mais ce qui répondait aux aspirations du temps. […] Quant aux prophètes et aux psaumes, on était persuadé que presque tous les traits un peu mystérieux de ces livres se rapportaient au Messie, et l’on y cherchait d’avance le type de celui qui devait réaliser les espérances de la nation. […] L’avénement du Messie avec ses gloires et ses terreurs, les nations s’écroulant les unes sur les autres, le cataclysme du ciel et de la terre furent l’aliment familier de son imagination, et comme ces révolutions étaient censées prochaines, qu’une foule de personnes cherchaient à en supputer les temps, l’ordre surnaturel où nous transportent de telles visions lui parut tout d’abord parfaitement naturel et simple. […] Il vit bâtir, en Galilée ou aux environs, Tibériade, Juliade, Diocésarée, Gésarée, ouvrages pompeux des Hérodes, qui cherchaient, par ces constructions magnifiques, à prouver leur admiration pour la civilisation romaine et leur dévouement envers les membres de la famille d’Auguste, dont les noms, par un caprice du sort, servent aujourd’hui, bizarrement altérés, à désigner de misérables hameaux de Bédouins.

167. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXII » pp. 222-236

Elle cherchait à se décharger sur quelque bonne amie, du déplaisir qu’elle avait de la tiédeur des feux du grand Alcandre. […] Elle me dit qu’elle louait Dieu de ce qu’il ne s’était trouvé chez elle que ses femmes, parce que s’il y avait eu des hommes, elle l’aurait fait jeter par les fenêtres ; qu’elle avait été obligée d’en avertir le roi, qui le faisait chercher pour l’envoyer en prison. […] Les admirateurs du génie de Molière ont besoin de chercher des excuses à son Amphitryon, dans son désir immodéré de plaire au prince qui Pavait subjugué par sa gloire et ses bienfaits, dans la corruption générale qui demandait au poète comique de faire rire le public aux dépens des époux malheureux, peut-être même dans l’espèce d’héroïsme auquel le poète avait voulu s’élever en se rangeant du côté des rieurs, lui à qui les désordres de sa femme avaient couté tant de larmes amères. C’est dans les mêmes principes qu’il faut chercher l’esprit qui, deux ans après, lui a dicté Les Femmes savantes, ouvrage dont il sera question dans la période suivante.

168. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gérard Du Boulan »

Et nous aurions quelque chose à chercher dans cette radieuse personnalité dramatique ? […] chercha toujours dans le xviie  siècle, en digne philosophe, ce qui n’y était pas, a écrit, en style oraculaire, cette phrase, qui, comme tous les oracles, ne signifie pas grand’chose : « Alceste est resté le secret du génie de Molière », et cette phrase, lancée par ce vaste et gesticulant étourdi de Cousin, et dont Gérard du Boulan a fait l’épigraphe de son livre, a probablement donné à cet écrivain, que je ne crois pas très connu encore, l’envie de deviner le secret — qui n’existe pas ! […] Du Boulan, qui, dans sa glose sur Molière, cherche à grand renfort de besicles ce qui n’y est pas, appartient à la grande École du midi à quatorze heures, et à cette autre École, fondée par Sainte-Beuve, et qu’on pourrait appeler l’École du microscope. […] … Je cherche un endroit écarté Où d’être homme d’honneur on ait la liberté !

169. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Milton »

Edmond de Guerle, l’auteur du livre sur Milton dont je cherche la raison d’être, est, si je ne me trompe, d’excellente race de traducteur. […] vous chercheriez en vain, dans toutes les histoires littéraires, un exemple plus frappant et plus beau de l’impérissable vocation du génie. […] Nous lui cherchions une portée pratique au commencement de ce chapitre, mais enfoncer, par l’exemple de Milton, deux cents ans à l’avance, toutes les philosophies actuelles de l’Histoire, n’est-ce pas là déjà une assez jolie besogne ? […] Nous ne lui en cherchions qu’une, et il en a deux !

170. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

Sainte croyance qui nous fait chercher de grands cœurs où nous voyons de grands esprits ! […] Cherchons à toucher le point vital du génie poétique. […] Quand on oppose à nos mœurs la férocité païenne, c’est dans Rome qu’il faut en chercher le type. […] L’art moderne cherche le plus souvent ses effets dans le contraste, dans l’antithèse, dans la dissonance. […] C’est là un fait que tout le monde reconnaît, mais dont on n’a guère entrepris de chercher la cause et la portée.

171. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « La Solidarité »

Cherchons les occasions où beaucoup d’hommes assemblés sont animés à la fois d’une seule idée, et d’une idée salutaire pour tous. […] Cherchons ce qui nous réunit, et cherchons à nous réunir.

172. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « V »

Quoi d’étonnant que nous ayons cherché à le résoudre par l’enseignement technique, par l’analyse du métier, par l’étude des maîtres et des procédés ? […] Et si je dis : « le vent gémit », j’aurai encore modifié mon idée » et je le puis parfaitement ; et encore si je dis : « le vent sanglote », « le vent frissonne » ou, comme Flaubert : « un vent tiède se roule dans les plates-bandes labourées », ou encore, comme Chateaubriand : « le vent semble courir à pas légers », ou encore avec Hugo : « le vent de la mer souffle dans sa trompe », il est possible, en effet, que j’aie exprimé plus que je ne voulais dire ; mais, en définitive, ce que j’ai voulu dire sera simplement ce que j’ai dit après avoir cherché. […] Sinon il faudra dire que les styles de Rousseau, Labruyère (sic), Montesquieu, Flaubert et tant d’autres, qui sentent la rhétorique et le travail, ne sont pas de l’art ; et il n’y aurait de vrais artistes que ceux qui n’ont pas médité leurs phrases, qui n’ont pas cherché leurs épithètes, qui n’ont pas combiné leurs mots, qui n’ont pas travaillé leurs expressions.

173. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIIe entretien. Fior d’Aliza » pp. 177-256

Les négociations ne furent terminées qu’après sa mort, mais en 1819 sa veuve revint à Chambéry avec sa belle famille, chercher quelques débris de son antique opulence. […] Je sortis contristé de sa table, et je ne cherchai plus à le voir. […] On ne pouvait s’empêcher de chercher encore sur sa figure douce, fine, intelligente et passionnée, les traces de la beauté qui l’avait fait adorer dans un autre âge. […] S’il vivait aujourd’hui, la Grèce, selon toute probabilité, ne chercherait pas d’autre roi. […] Sur des bords où la gloire a ranimé leurs os, Je vais chercher ailleurs (pardonne, ombre romaine !)

174. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Robert » pp. 222-249

Que cherches-tu avec tes cheveux courts… " je viens de la nation des loutres. Je cherche de la raison, et je te visite afin que tu m’en donnes. […] Il faut chercher l’explication de ce phénomène, ou dans les figures mêmes, ou dans le rapport de ces figures avec les êtres environnans. […] Je cherchais à me distraire de ton reproche, et c’est ici que je t’entends plus fortement. […] Le méchant fuit la solitude ; l’homme juste la cherche.

175. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

Au bout je cherche à réserver cinq ou six leçons pour conclure, c’est-à-dire pour faire la part exacte du génie de Shakespeare et celle du bien et du mal dans ses exemples. […] Cherchons donc, cherchons toujours : c’est l’art et c’est la vie ; et grâce à Dieu, les joies de l’effort, si sévères qu’elles soient bien souvent, valent mieux que les joies passagères et stériles du succès. » Quelle digne et loyale nature ! […] Après l’Académie et les Précieuses, j’ai cherché dans l’atelier des peintres, surtout dans la vie et les œuvres de Le Sueur, une transition pour revenir de Scarron à Pascal. […] Les expressions, que je ne cherchais point, obsédaient ma pensée ; mes notes grossissaient d’une heure à l’autre ; j’apprenais par cœur sans le vouloir. […] J’ai cette année un auditoire très nombreux, très partagé d’opinions, très recueilli, et je puis vraiment croire que nous cherchons tous ensemble la vérité… » Le professeur qui cherche la vérité !

176. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Le sens critique n’existe que chez les gens de bonne foi qui cherchent le vrai et n’ont pas honte de s’avouer leurs fautes et de les corriger. […] On a voulu voir ce que renfermaient ces livres et on a trouvé des contes bleus incompréhensibles, des excentricités cherchées, des exagérations ridicules. […] Diderot a fait naître le premier, et s’il n’avait abusé des tableaux et lui aussi cherché l’exception, il aurait été le modèle à suivre. […] « Je cherche avant tout à rendre sincèrement mes impressions dans la langue la plus simple. » Ceci est net. […] La passion du vrai, s’ils la connaissaient, est plus poignante, plus absorbante que ces cliquetis d’idées cherchées en dehors du sentiment.

177. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Je cherche à combiner intimement ces deux idées, l’idée de l’amour et l’idée d’un lapin dépouillé et arrangé en ragoût. […] Je parlais tout à l’heure des artistes qui cherchent à étonner le public. […] Les yeux s’y amusaient si sincèrement qu’ils oubliaient volontiers d’y chercher le contour et le modelé. […] D’autres ont cherché à faire davantage ou à faire autrement. […] Millet cherche particulièrement le style ; il ne s’en cache pas, il en fait montre et gloire.

178. (1911) Études pp. 9-261

Toutes les simplifications, loin de chercher la barbarie, ne sont que pour l’aisance. […] Ne cherche point le chemin, cherche le centre ! […] La cherche-t-on ? […] Telle est l’obscure volupté que cherche, sans le savoir, son esprit timide. […] Il cherche lentement ; il aime tous les retards de sa curiosité.

179. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » p. 91

Ce n’est pas du génie & du goût qu’il faut chercher dans ses Ouvrages : de la littérature & de l’érudition, voilà ce qui l’associe aux Savans qui ont rendu service aux Lettres. […] Sa Traduction d’Horace n’est guere estimable que par les Remarques qui l’accompagnent ; parmi un grand nombre de curieuses & d’instructives, on en trouve plusieurs d’inutiles & de diffuses, fruit ordinaire d’un savoir qui ne cherche qu’à s’étaler.

180. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

Chez M. de Vigny, à part les imitations évidentes d’André Chénier, qui sont une étude en dehors, on cherche vainement union et parenté avec ce qui précède en poésie française. […] Un écrivain qui accroît chaque jour sa place dans notre littérature par des études consciencieuses, savantes, et qui cherche à réhabiliter l’homme de lettres dans l’antique acception du mot, M. […] « Il ne faut disséquer que les morts : cette manière de chercher à ouvrir le cerveau d’un vivant est fausse et mauvaise. […] Les hommes ne peuvent ouvrir ce fruit divin et y chercher l’amande. […] Je vous ai cherché d’Hernani en Christine avec tout cela et n’ai pu vous découvrir.

181. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Je cherche à rendre l’impression du livre, je tâche d’être compris plutôt que je n’explique ma pensée. […] Je cherchais à louer Ch.  […] Sa Muse est allée les chercher dans son propre cœur entrouvert, et elle les a tirés à la lumière d’une main aussi impitoyablement acharnée que celle du Romain qui tirait hors de lui ses entrailles. […] Voici un Rancé, sans la foi, qui a coupé la tête à l’idole matérielle de sa vie ; qui, comme Caligula, a cherché dedans ce qu’il aimait et qui crie du néant de tout, en la regardant ! […] Je vais faire une citation terrible, et l’on ne dira pas qu’à propos de littérature romantique je vais chercher mes autorités dans le camp des intéressés.

182. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « JASMIN. » pp. 64-86

L’Angleterre a eu et a ses bergers, ses forgerons poëtes, et nous les connaissons, nous nous plaignons de n’avoir rien de tel ; nous cherchons autour de nous. […] Plus de miche (de pain blanc), cette ration quotidienne que la mère allait chercher au séminaire. […] Jasmin seul reste pensif et cherche à s’assurer de ce qu’il soupçonne à travers le triste sourire de sa mère. […] Le poëte passe tour à tour d’Angèle, la jolie et la légère, qui ne voit que sa croix d’or et sa couronne, à la pauvre Marguerite, qui, à tâtons, va chercher au fond d’un tiroir quelque chose qu’elle cache en frémissant dans son sein. […] Coutume du pays : on va chercher au bois des branches d’arbres, et surtout de laurier, qu’on jette ensuite sur le chemin de l’église et à la porte des conviés.

183. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

Puis la lutte des partis, après la Restauration, profita aux études historiques : les libéraux s’efforcèrent de fonder leurs revendications et les droits nouveaux sur le développement antérieur de la nation ; ils allèrent chercher jusqu’aux temps féodaux et aux invasions barbares les germes de l’état contemporain, ou les titres de la souveraineté populaire et surtout de la suprématie bourgeoise. […] Ainsi, occupé à chercher des armes « contre les tendances réactionnaires du gouvernement », Thierry ne voulait encore que faire l’histoire « à la manière des écrivains de l’école philosophique, pour extraire du récit un corps de preuves et d’arguments systématiques ». […] Thierry chercha une forme pour l’histoire ainsi comprise. […] Malgré cette insuffisance, il lui reste d’avoir été le premier qui ait su chercher et lire dans les faits le caractère particulier d’une époque, mettant ainsi l’histoire d’un seul coup dans sa véritable voie. […] Il s’agit, en montrant la vie, d’expliquer la vie : loin de chercher l’effet dramatique, loin d’emplir le public de stupeur par l’étrangeté ou l’énormité des choses, l’historien doit réduire tout à la nature, faire la guerre au miracle, découvrir la simplicité du prodige sans en diminuer la grandeur.

184. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

« À vingt-cinq ans, il l’a remarqué, une âme généreuse ne cherche qu’à donner sa vie. […] Il y joignait un cœur tout jeune, conservé dans sa fraîcheur et sa plénitude, un cœur qui n’avait pas dépensé son trésor, une faculté puissante et un souffle de parole ardente qui cherchait son jour et qui ne le trouvait pas. […] Mais l’élan de son cœur qui cherchait pâture, et, à son insu, l’essor de son talent qui cherchait carrière, firent le reste et abrégèrent le chemin. […] Sous la figure de l’abbé de Janson, il a peint lui-même, à son insu, quelques traits de sa propre nature, de sa propre ambition spirituelle d’apôtre : « L’apostolat, dit-il, qui était sa vraie, son unique vocation, le tourmentait et l’emportait dès les premiers jours de son sacerdoce. » On était à la fin de l’Empire : M. de Janson cherchait une carrière à son zèle, un champ pour y semer la parole, et n’osant songer à la France, alors muette, il errait en esprit de l’Amérique à la Chine, de la Chine aux bords du Gange : Tout à coup, au sein même de la patrie, poursuit l’orateur, un cri prodigieux s’élève : le descendant de Cyrus et de César, le maître du monde, avait fui devant ses ennemis ; les aigles de l’Empire, ramenées à plein vol des bords sanglants du Dniepr et de la Vistule, se repliaient sur leur terre natale pour la défendre, et s’étonnaient de ne plus ramasser dans leurs serres puissantes que des victoires blessées à mort. […] Peu avant de mourir, comparant ensemble toutes les phases de sa carrière, il écrivait : « J’ai connu le véritable bonheur dans l’obscurité, l’innocence et la pauvreté de mes premières années. » Puisque tel était le charme qui rappelait le héros vers les commencements de lui-même, approchons-en de plus près, et cherchons dans quelques vestiges subsistants ce qu’il y avait donc de si aimable en cette enfance demeurée si chère.

185. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Prosper Mérimée »

Ce qu’on y cherchait n’y est pas. On y cherchait, sinon une histoire, au moins des documents pour l’Histoire. […] Il avait bien le sentiment de la première, et il courait après, mais celle-là ne s’attrape pas à la course, et Mérimée ne l’avait pas, puisqu’il la cherchait… Il la chercha même, les dernières années de sa vie, dans une affreuse Nouvelle, où le matérialiste qu’il était aborda la bestialité et le mélange des espèces, avec l’indifférence du cynisme le plus osé. […] On y cherche en vain Mérimée, — comme on y a cherché vainement l’Empire.

186. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Perroneau » p. 172

Marcel cherche à pallier les défauts, Van Loo cherche à rendre leur influence sur toute la personne ; il faut que la figure soit une.

187. (1875) Premiers lundis. Tome III «  La Diana  »

Je ne sépare pas le discours de tous les actes qui l’ont précédé, du rôle actif, bienveillant, vigilant, que M. de Persigny n’a cessé de remplir depuis des années dans le département de la Loire, dans ce vieux pays du Forez qui est le sien et où il s’est acquis une popularité, une amitié de toutes les classes, qui ne cherche que les occasions de se manifester. […] Le vieux cœur se remet à battre à travers les mailles du réseau moderne et ne cherche pas à le briser. […] Il faut rendre à M. de Persigny cette justice qu’il a dans le cœur ce je ne sais quoi d’élevé qui répond bien à un tel sentiment, qui y sollicite et peut y rallier même des adversaires, qui va chercher en chacun ce qui est vibrant, et que le sentiment napoléonien historique et dynastique tel qu’il le conçoit dans son esprit et dans son culte, tel qu’on l’a entendu maintes fois l’exprimer avec une originalité saisissante (toute part faite à un auguste initiateur), est à la fois ami de la démocratie, sauveur et rajeunisseur des hautes classes, animateur de la classe moyenne industrielle en qui il tend à infuser une chaleur de foi politique inaccoutumée.

188. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre III. De la sécheresse des impressions. — Du vague dans les idées et le langage. — Hyperboles et lieux communs. — Diffusion et bavardage »

Si grande est notre paresse, inaccoutumés que nous sommes à chercher des idées ou des mots, que souvent nous aurions quelque inclination à penser d’une manière : nous parlons d’une autre, non par modestie, non par timidité, mais parce qu’il est plus commode de répéter une phrase apprise que de créer pour une pensée personnelle une forme originale. […] Eût-on quelque velléité de sentir autrement, fût-on convaincu même que la vérité des faits y oblige, la phrase est là, si tentante, si facile à prendre ; il est si commode de la ramasser ; on a si peu le loisir, si peu l’habitude de sentir sa propre pensée et d’en chercher l’exacte formule, qu’on se laisse aller ; et l’on dit blanc quand on eût pensé noir si l’on n’avait pas lu son journal. […] Mais que de fois, par indigence d’esprit, ne s’applique-t-on pas à chercher les défauts du prochain, à lui en donner libéralement qu’il n’a pas, à travestir méchamment ses actes et ses paroles !

189. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre II. « Faire de la littérature » » pp. 19-26

L’homme qui rédige sa pensée, qui use du moyen de publicité dit écriture, ne peut avoir pour but que : 1º le beau : il cherche à faire œuvre d’artiste ; 2º le vrai : il cherche à faire œuvre de savant ; 3º l’agréable (et l’utile, qui est l’agréable en expectative), et il fait œuvre d’industriel. […] Artistes ou savants, ils ne se savent jamais sûrs de parfaire l’harmonie ou de réussir l’expérience après laquelle seulement l’œuvre sera ; ils ne considèrent pas comme un gagne-pain l’aléatoire profit de leur vie intérieure ; ils en cherchent un autre.

190. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

Ces vérités sont très propres à éblouir les gens du monde, en ce qu’elles jettent un jour dangereux sur les impressions qu’ils vont chercher tous les jours au théâtre. […] D’ailleurs je n’ai jamais cherché à les offenser le moins du monde, et si j’ai dit célèbre à M.  […] Laissons les mots ; cherchons des exemples. […] Il n’y a au fond ni genre classique, ni genre romantique… Disons-le, cette division que l’on cherche à introduire dans la littérature est l’ouvrage de la médiocrité. […] Cherchez dans le second volume des Chroniques de Froissart, publiées par M. 

191. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

— Va la chercher sur la table, me dit-elle, et tu nous la liras. […] Cherchez votre Béatrix dans les cercles divins. […] Je cherche l’homme. […] L’élève était déjà fort sur ce chapitre et cherchait ardemment la voie. […] Il ne trouvait l’éloquence et la poésie que quand il ne les cherchait plus.

192. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 48-49

Thomas travailloit bien plus facilement que Pierre ; & quand celui-ci cherchoit une rime, il levoit une trappe & la demandoit à Thomas, qui la lui donnoit aussi-tôt. […] Claustre, les Continuateurs de Moreri, M. l’Abbé d’Expilly, y ont puisé une infinité d’articles qu’ils auroient cherchés vainement ailleurs.

193. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre X. Mme A. Craven »

Mme Craven — et ceci ne l’humiliera pas, avec sa noble admiration pour les siens — est d’accent religieux bien moins profonde, bien moins éloquente, bien moins pathétique que les êtres divins (on cherche un mot pour les nommer) dont elle écrit l’histoire. […] Le Mot de l’énigme qu’on cherchera, sans le trouver, car il n’y a dans le livre de Mme Craven ni énigme, ni mot (il n’y a que des mots, à moins que ce mot de l’énigme ne soit pourtant de se faire dévote, lorsque votre mari vous trompe), le Mot de l’énigme est un roman de la même pauvre inspiration ou du même parti pris que Fleurange. […] Les romans de Mme Craven ne sont point destinés à vivre, tandis que le Récit d’une sœur est destiné à ne pas périr… La vérité, qu’elle n’a pas faite, est plus puissante et plus durable que les pauvres fictions qu’elle a inventées… Mme Craven a trouvé presque la gloire sans la chercher, le jour où elle a rassemblé des souvenirs qui méritaient d’être immortels ; mais à présent qu’elle la cherche opiniâtrement et dans des voies où la vanité littéraire la promène, elle ne la trouvera plus.

194. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

III Ce n’est donc pas du sérieux qu’il faut chercher dans Horace, c’est de l’agrément ; il n’est sérieux que quand il s’agit de son bonheur, il n’est sage que quand il conseille de le chercher dans la retraite, dans la médiocrité et dans l’amitié. […] Elle n’a pas de date ; c’est sans doute le moment où les légions d’Auguste allaient chercher les légions du fils de Pompée pour jouer au jeu des batailles le dernier sort de Rome. […] « Mais elle ne s’effraye pas, comme une faible femme, d’une épée nue, elle ne cherche pas sur ses vaisseaux des rivages inconnus pour y abriter sa peur ; elle a le courage de rentrer d’un front serein dans son palais en deuil, de manier sans pâlir de venimeux reptiles et d’en faire couler le poison mortel dans ses veines. […] Il ne faut pas chercher de la poésie ; c’est écrit au crayon sur le genou, en notes où le vers s’amuse à ressembler à la prose. […] Ne cherchez pas là une larme sur ses cordes : c’est le poète du sourire, c’est l’ami des heureux.

195. (1860) Cours familier de littérature. IX « Le entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier (2e partie) » pp. 81-159

J’en cherche en vain quelques indices dans tout ce que vous faites ; rien qui me rassure, rien qui me satisfasse. […] L’homme qu’il adorait alors était M. de Chateaubriand ; la femme qu’il cherchait pour l’aimer, il la trouva du premier coup d’œil dans madame Récamier. […] Canova chercha en vain, quoique si gracieux, à reproduire la grâce infinie de ce visage ; il échoua, comme échouent tous les ciseaux devant l’expression qui vient de l’âme et non de la matière. […] On peut juger du charme d’une telle société ; madame Récamier n’y cherchait que le mouvement doux de sa vie, elle y trouva bientôt l’importance de situation et la célébrité littéraire qu’elle n’y cherchait pas. […] C’est l’heure où le carbonarisme essaye de convertir en secte armée cette franc-maçonnerie italienne qui cherche une patrie dans des ruines.

196. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

C’est donc seulement dans le récit qu’il faut chercher et pour ainsi dire épier les premiers mouvements de l’esprit français, et reconnaître sa langue naissante. […] Villehardouin s’opiniâtra à chercher un chef. […] Au reste, il ne faut pas plus chercher dans Villehardouin la profondeur des pensées que l’art du récit. […] Ce qu’il faut chercher dans les récits de Villehardouin, c’est donc la franchise du chevalier et la simplicité du chrétien. […] Christine de Pisan et George Chastelain ne firent en effet qu’ajuster la rhétorique née des derniers raffinements de la littérature latine à des idées à peine dégrossies et à une langue qui se cherchait encore.

197. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

L’usage changeait, disait-il, dans le moment même que Vaugelas cherchait à le constater. […] On les y chercherait vainement. […] Il y aurait peu de profit à le savoir, et peut-être y a-t-il une sorte d’indiscrétion à le chercher. […] Il faut chercher là les grandes définitions de la grammaire et de la logique. […] De même, c’est dans la raison que la Logique va chercher les lois de l’art de penser, ou plutôt c’est la raison elle-même qu’elle cherche à ses sources les plus profondes.

198. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre V. Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance »

Le sujet trouve au contraire que ce qu’il éprouve est normal ; il a parfois besoin de cette impression, il la cherche quand elle lui manque et la croit d’ailleurs plus continue qu’elle ne l’est en réalité. […] Où faut-il en chercher le centre ? […] Resterait enfin à chercher l’origine du phénomène dans la sphère de l’action, plutôt que dans celles du sentiment ou de la représentation. […] C’est donc dans un abaissement du ton mental qu’on cherchera l’origine de la fausse reconnaissance. […] Quant à la cause prochaine, elle doit être cherchée ailleurs, dans le jeu combiné de la perception et de la mémoire.

199. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

« Me voici parvenu à trente-neuf ans et demi ; il y a plus de vingt ans que je suis sorti du collége : dans cette moitié de la vie (car la durée de l’homme n’est que de quarante ou quarante-huit ans entre l’une et l’autre débilité), dans cette moitié de la vie, je cherche vainement une saison heureuse, et je ne trouve que deux semaines passables, une de distraction en 1790 et une de résignation en 1797.  […] En vain on cherche le vrai, on veut faire le bien, on renonce à d’autres désirs, et on se dévouerait pour lutter contre l’erreur, contre le désordre ; en vain on demande à la nature ce qu’on doit être, ce qu’on doit faire ; en vain on dit : Sagesse, ne te connaîtrai-je point ?  […] « Mais maintenant, s’il me venait enfin quelque moyen d’acquérir un coin de terre, où le chercherais-je ? […] « Et dois-je chercher avec tant de soin pour quelques années rapides qui me restent d’ici à la vieillesse ? […] Je suis à la merci du sort, et peut-être ne trouverai-je d’autre repos que celui que je voulais alors chercher sur les neiges où l’on s’endort paisiblement.

200. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

Cette diversité me rappelle le charmant conte des Trois Manières, dont chacune, auprès des Athéniens de Voltaire, réussit à son tour ; et s’il y avait une quatrième manière de plaire, il ne faudrait pas lui chercher querelle. […] Toutes les dernières, les femmes d’après Jean-Jacques, c’est-à-dire qui ont essuyé son influence et se sont enflammées un jour pour lui, ont eu une veine de sentiment que les précédentes n’avaient point cherchée ni connue. […] Lemontey a cherché grande malice dans quelques mots d’elle sur l’abbé de Chaulieu, lorsqu’elle le va voir en sortant de la Bastille, et qu’elle le trouve si différent de ce qu’il était par le passé : « Il étoit déjà fort mal, dit-elle, de la maladie dont il mourut trois semaines après. […] au moment où elle apprécie le mieux le dévouement et les mérites du pauvre Maisonrouge, c’est l’autre encore qu’elle regrette ; avec une âme si ferme, avec un esprit si supérieur, misérable jouet d’une indigne passion, elle fuit qui la cherche, et cherche qui la fuit, selon l’éternel imbroglio du cœur.

201. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre V. La Fontaine »

Ce n’est pas là qu’il faut chercher La Fontaine : s’il s’y trouve parfois, il y est moins complet, moins pur que dans ses Fables. […] La Fontaine ne mêle point de religion, ni de panthéisme, ni même de dynamisme dans son amour de la nature : il jouit des formes qu’elle offre, des sensations qu’elle procure, sans rien chercher au-delà. […] Il en prend au peuple, aux provinces, mots de cru et de terroir, savoureux et mordants : il en va chercher chez ses conteurs du xvie  siècle, chez son favori Rabelais. […] Cette forme expressive et souple, qui se défait et se refait sans cesse, qui se coule librement, sans aucune contrainte technique, sur la pensée ou le sentiment, n’est-ce pas la perfection de ce que quelques-uns de nos contemporains s’évertuent à chercher ? […] En réalité, ce n’est pas dans la moralité qu’il faut chercher la morale de La Fontaine : c’est dans le conte, dont le meilleur et le plus substantiel ne passe pas dans la formule abstraite qui prétend le résumer.

202. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre II. Le mouvement romantique »

si je suis capable de création lyrique, je la cherche dans tous les battements de mon cœur, dans tous les aspects de la nature. […] Il brisera les formes trop arrêtées, trop fixes, qui ne se laissent plus manier par la pensée de l’artiste, ces habitudes tyranniques de composition et de style qui filtrent pour ainsi dire l’inspiration et éliminent l’originalité : en brisant les genres, les règles, le goût, la langue, le vers, il remettait la littérature dans une heureuse indétermination, dans laquelle le génie des artistes et l’esprit du siècle chercheraient librement les lois d’une reconstitution des genres, des règles, du goût, de la langue, du vers. […] N’oublions pas la Bible, que Vigny et Lamartine feuillettent, et dans laquelle Hugo cherchera non pas seulement une matière de poésie, mais d’abord et surtout des procédés de style, des coupes, des figures, des épithètes. […] Les enfants élevés entre 1804 et 1814, n’ayant pas senti les misères et n’ayant éprouvé que la fascination des victoires impériales, gardèrent sous la paix des Bourbons des exaltations, qui cherchèrent à se satisfaire par les passions lyriques et les aventures romanesques des livres718. […] Il dépouillait les formes classiques de l’ode ; il essayait des rythmes plus simples, plus souples, plus personnels ; il cherchait des combinaisons fantaisistes, où éclatait sa prodigieuse invention rythmique ou verbale.

203. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Ils réduisent à chercher la gloire, ceux qui se seraient contentés des affections : eh bien ! […] À tous les malheurs humains, cherchez le remède plus haut. […] Si les Français cherchaient à obtenir de nouveau des succès dans la carrière littéraire et philosophique, ce serait un premier pas vers la morale ; le plaisir même, causé par les succès de l’amour-propre, formerait quelques liens entre les hommes. […] Celui qui cherche à se distinguer inspire d’abord une prévention défavorable ; le public malade est fatigué d’avance par qui veut obtenir encore un signe de lui. […] Celui qui voudrait énoncer une vérité nouvelle et hardie, écrirait de préférence dans la langue qui rend exactement et précisément la pensée ; il chercherait plutôt à convaincre par le raisonnement qu’à entraîner par l’imagination.

204. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Introduction »

Dans les deux parties de cet ouvrage, j’ai également cherché à ne me servir que de ma pensée, à la dégager de toutes les impressions du moment, on verra si j’ai réussi. […] Il faudrait d’abord, en analysant les gouvernements anciens et modernes, chercher dans l’histoire des nations ce qui appartient seulement à la nature de la constitution qui les dirigeait. […] L’homme qui se vouerait à la poursuite de la félicité parfaite, serait le plus infortuné des êtres ; la nation qui n’aurait en vue que d’obtenir le dernier terme abstrait de la liberté métaphysique, serait la nation la plus misérable ; les législateurs doivent donc compter et diriger les circonstances, et les individus chercher à s’en rendre indépendants ; les gouvernements doivent tendre au bonheur réel de tous, et les moralistes doivent apprendre aux individus à se passer de bonheur. […] On m’objectera, peut-être aussi, qu’en voulant dompter les passions, je cherche à étouffer le principe des plus belles actions des hommes, des découvertes sublimes, des sentiments généreux ; quoique je ne sois pas entièrement de cet avis, je conviens qu’il y a quelque chose de grand dans la passion ; qu’elle ajoute, pendant qu’elle dure, à l’ascendant de l’homme ; qu’il accomplit alors presque tout ce qu’il projette, tant la volonté ferme et suivie, est une force active dans l’ordre moral. […] Enfin, de quelque manière que l’on juge mon plan, ce qui est certain, c’est que mon unique but a été de combattre le malheur sous toutes ses formes, d’étudier les pensées, les sentiments, les institutions qui causent de la douleur aux hommes, pour chercher quelle est la réflexion, le mouvement, la combinaison, qui pourrait diminuer quelque chose de l’intensité des peines de l’âme ; l’image de l’infortune, sous quelque aspect qu’elle se présente, et me poursuit, et m’accable.

205. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Appendice »

Que de fois j’ai cherché à me mentir à moi-même ! […] Elle vous fait toucher ces mystères qu’on sent en son propre cœur, et qu’on cherche péniblement à se formuler. […] Je passais une partie de mes soirées dans l’église Saint-Sulpice, et là je cherchais à croire ; mais je ne pouvais. […] Mais il faut être quelque chose, et j’ai dû chercher à être ce qui s’écarte le moins de mon type idéal. […] Vous vous défiez de la raison individuelle, quand elle cherche à se dresser un système de vie.

206. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Études sur Saint-Just, par M. Édouard Fleury. (2 vol. — Didier, 1851.) » pp. 334-358

Je ne sache point que quelqu’un, jusqu’ici, se soit mis en peine de chercher dans le fond de son cœur ce qu’il avait de vertu, pour connaître ce qu’il méritait de liberté. […] À la réclamation que lui adressait un jour le maire de Strasbourg en faveur de quelques détenus, il répondait : « Un aveugle qui cherche une épingle dans un tas de poussière, saisit le tas de poussière. » Voilà bien l’homme60, et aussi sa manière de dire. […] Je félicite ceux qui admettent cette arrière-pensée de clémence qu’il faut aller chercher par-delà des mares de sang. […] Comme je ne cherche que l’impartialité, voici pourtant sur Saint Just un témoignage à charge, que je tiens d’original et qui est trop singulier pour être omis : M.  […] On envoyait des agents à tous les corps pour engager les soldats à dénoncer leurs chefs ; ces invitations ne produisant aucun effet, on promit des récompenses pécuniaires aux délateurs que l’on cherchait, avec l’assurance de tenir toujours leurs noms cachés.

207. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre IV. De la délimitation, et de la fixation des images. Perception et matière. Âme et corps. »

. — Le dogmatisme découvre et dégage les difficultés sur lesquelles l’empirisme ferme les yeux ; mais, à vrai dire, il en cherche la solution dans la voie que l’empirisme a tracée. […] Ce serait d’aller chercher l’expérience à sa source, ou plutôt au-dessus de ce tournant décisif où, s’infléchissant dans le sens de notre utilité, elle devient proprement l’expérience humaine. […] Mais pourquoi chercher ailleurs ? […] Pourquoi cherchons-nous enfin, dans la mobilité de l’ensemble, des pistes suivies par des corps en mouvement ? […] Pourrions-nous, en opérant sur eux, rejoindre l’expérience, si les notions auxquelles ils correspondent ne nous signalaient pas tout au moins une direction où chercher la représentation du réel ?

208. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

Aussi cherche-t-on aujourd’hui à tout expliquer par le mouvement, et les progrès de la physique sont, il faut le dire, entièrement dans cette voie. […] L’homme, quoi qu’il fasse, se cherche toujours lui-même et ne s’intéresse qu’à lui-même ; mais tantôt il se cherche en lui-même, et tantôt dans ce qui n’est pas lui. […] Elle chercherait à tirer des sciences extérieures une idée philosophique et raisonnée des corps et une idée de la nature. […] Sans aller chercher bien loin, j’en trouverai la preuve dans la nouvelle préface de M.  […] Je cherche ensuite si, étant parfait, il est en dehors du temps et de l’espace.

209. (1864) Cours familier de littérature. XVII « Ce entretien. Benvenuto Cellini (2e partie) » pp. 233-311

La première chose que fit celui-ci fut de chercher dans cette maison l’appartement le plus commode, et de s’en saisir. […] À ces mots je partis, et j’allai le chercher ; j’y joignis son modèle en cire. […] Cela ne suffit pas, repris-je ; qu’on aille chercher un notaire et des témoins ; je veux que le mariage soit en règle. […] Mme d’Étampes chercha en vain à le rabaisser. […] Quelques jours après, la duchesse m’envoya chercher, et me dit qu’elle voulait m’accorder avec le duc, et que je m’en reposasse sur elle.

210. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Pendant dix ans il ne quitta plus le maître qu’il était venu chercher de Berlin à Weimar ; et, s’il y avait quelque exagération dans son apostolat, le motif en était sublime. […] Le médecin lui-même, s’il veut donner au malade une guérison vraie, cherche à être fécond à sa manière, sinon ses guérisons ne sont que des accidents heureux, et, dans leur ensemble, ses traitements ne valent rien. […] J’étais désireux de l’entendre encore parler sur ce sujet important, je cherchais à ranimer sa parole, et je dis : — Cette fécondité du génie est-elle tout entière dans l’esprit d’un grand homme ou bien dans son corps ? […] — La simplicité et le laisser-aller de son extérieur, dis-je, semblaient indiquer qu’il ne cherchait pas la gloire et qu’il n’en faisait pas grand cas. On aurait dit qu’il était devenu célèbre sans l’avoir cherché, simplement par suite de sa tranquille activité.

211. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre I. De l’intensité des états psychologiques »

Voilà la définition cherchée de l’égalité. […] Et il ne sert à rien de répondre, comme font souvent les adversaires de la psychophysique, que toute mesure implique superposition, et qu’il n’y a pas lieu de chercher un rapport numérique entre des intensités, qui ne sont pas choses superposables. […] Car, dès qu’une chose est reconnue susceptible de grandir et de diminuer, il semble naturel de chercher de combien elle diminue, de combien elle grandit. […] Ou bien donc la sensation est qualité pure, ou, si c’est une grandeur, on doit chercher à la mesurer. […] Nous insisterons plutôt sur le second point ; mais au lieu de chercher à résoudre la question, nous montrerons l’illusion de ceux qui la posent.

212. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

Ne cherchez à son front nul éclair d’Hamlet, de René ou de Prométhée, de la race vouée au vautour ; il est de celle de Sem. […] Rien de bien cherché, rien de compliqué au premier abord. […] Sa mère, sa sœur, toute sa famille, sont en fuite déjà, et vont chercher quelque abri au delà des mers ; lui-même, avec douze louis d’or qu’on lui fait secrètement remettre, il n’a que le temps de s’échapper. […] La sœur de l’évêque va elle-même chercher à la Grotte des Aigles la pauvre agenouillée, qui attend depuis la fatale nuit, et qui ne veut pas croire à une séparation éternelle. […] S’il est curieux de détail en un endroit, c’est comme par accident ; il s’élance de là ensuite d’un plein vol, et ne cherche pas à lier le petit au grand par une subtilité symbolisante, heureuse peut-être, mais détournée.

213. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

Et suis-je bien sage en effet d’aller chercher si loin ce que j’ai sous mes pas, et ce que j’ai avec ce bien inestimable que je n’aurai pas ailleurs : la douce habitude, l’ombre du toit paternel sur ma tête, les tendres souvenirs de l’enfance et de la famille autour de moi ? […] IX À un millier de pas du château, on va ordinairement, après le repas du matin, chercher l’ombre d’un grand bois. […] C’était un assez beau partage dans un siècle où tant de poètes avaient voulu chercher la perfection dans l’art, au lieu de la chercher dans son élément éternel, le beau ! […] Je cherchais à lui faire comprendre cette vérité, difficile à admettre pour un poète penseur comme lui : c’est que le rôle de poète penseur était un rôle ingrat, que la poésie était faite pour exprimer des sentiments et non des idées, et que, le cœur étant le foyer de toute chaleur dans l’homme, de même que l’esprit était le foyer de toute lumière, le poète de sentiment incendiait le monde, tandis que le poète penseur ne pouvait que l’illuminer et l’éblouir. […] Je ne cherche ni à incendier ni à éblouir : je cherche à adorer, à travers la nature et la foi (car je suis chrétien par le lait de ma mère), je cherche à adorer l’Auteur infini de cette nature ; ma poésie n’est que ma prière, mon enthousiasme n’est que mon encens.

214. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (3e partie) » pp. 365-427

Je cherche des noms pour te nommer, des formes pour t’incarner, des limites pour te contenir, des couleurs pour te peindre, et, n’en trouvant point que tu ne dépasses, je me tais, je me confonds, je reste ébloui et muet de ton incorporéité ! […] Je sais que je ne dis que des à peu près, des probabilités, des contresens, des ombres ; mais tu me pardonneras comme le père pardonne au murmure confus du nouveau-né qui cherche à prononcer son nom ! […] Ici, c’est dans une contrée fertile, parée d’une éternelle verdure, que nous cherchons en vain une trace du pouvoir de l’homme ; il semble que nous soyons transportés dans un monde différent de celui où nous avons vu le jour. […] La partie inférieure de la tige n’est pas de taille à porter le poids de la partie supérieure ; le sipo va donc chercher un appui sur un arbre d’une autre espèce. […] Le chasseur y chercherait en vain des groupes analogues aux troupeaux de bisons de l’Amérique du Nord, aux bandes d’antilopes, aux compagnies de pesants pachydermes de l’Afrique du Sud.

215. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

Des élèves du maître, de jeunes et habiles ouvriers se sont donné ce plaisir, et l’on aura beau chercher, on ne trouvera guère sous leurs vers éclatants d’autre passion que celle des contours rares et des belles rimes. […] Il connut la rêverie sans tendresse, le sentiment de notre impuissance à l’égard des choses, la soif de rentrer au grand Tout, dont la vie un moment nous distingue, et, en attendant, la joie immobile de contempler de splendides tableaux sans y chercher autre chose que leur beauté. […] Maitreya se souvient d’une jeune fille, Narada pleure sa mère morte, Angira cherche et doute. […] Et ces poèmes, j’ai moins cherché à les analyser et à les juger qu’à rendre l’impression qu’ils donnent. […] Le poète m’a si bien prévenu contre les mensonges de l’éternelle Mâya que je ne puis croire qu’il s’y laisse prendre  La Nature, dont il cherche les aspects violents, occupe ses sens et son imagination, mais rien de plus.

216. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Il cherchait à élever vers lui les lecteurs et non à s’abaisser jusqu’à eux. […] Au lendemain de 70, dans l’humiliation de la défaite, les jeunes Français, épouvantés, se demandaient quelles pouvaient être les causes d’un si grand désastre ; les uns cherchaient un remède, les autres une consolation. […] Mais s’il accumule les traits sans ordre, sans gradation, si tout est confus chez lui, il n’en reste pas moins un orateur qui plaide une cause, il cherche un effet, d’une autre façon sans doute que ses écrivains abhorrés, mais il le cherche, et, que voulez-vous, je préfère l’éloquence de Bossuet, celle de Joseph de Maistre, son grand ennemi, même celle de Massillon, à cette avalanche de citations et d’exemples mal soudés les uns aux autres et enjolivés d’un commentaire criard. […] Musset abhorré, les parnassiens, dont Alphonse Daudet et Paul Arène se sont si joliment moqués, cherchèrent à la suite de Leconte de Lisle des sujets qui ne les inspiraient pas, des sujets où ils pouvaient être des artistes impeccables, c’est-à-dire de soporifiques versificateurs. […] Les femmes amoureuses qui cherchent toujours un livre pour y retrouver leur passion se jetèrent sur Madame Bovary, comme elles s’étaient jetées sur Paul et Virginie.

217. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Dans la rue, les yeux aussitôt aux affiches — et égoïstement, nous l’avouons, — au milieu de tout ce papier fraîchement placardé, proclamant un changement de régime pour notre pays, nous cherchions « la nôtre d’affiche », l’affiche qui devait annoncer à Paris la publication d’En 18.. […] Ses auteurs, en effet, ont, préférablement à tout, cherché à peindre, avec le moins d’imagination possible, la jeune fille moderne, telle que l’éducation artistique et garçonnière des trente dernières années l’ont faite. […] La maladie, avant de tuer quelqu’un, apporte à son corps de l’inconnu, de l’étranger, du non-lui, en fait une espèce de nouvel être, dans lequel il faut chercher l’ancien… celui dont la silhouette animée et affectueuse n’est déjà plus. […] Mon imagination va à ses dernières heures, les cherche à tâtons, les reconstruit dans la nuit, et elles me tourmentent de leur horreur voilée, ces heures ! […] un néologisme, — et cela, dans la grande indignation de critiques ignorant absolument que : suer à grosses gouttes, prendre à tâche, tourner la cervelle, chercher chicane, avoir l’air consterné, etc., etc., et presque toutes les locutions qu’ils emploient journellement, étaient d’abominables néologismes en l’année 1750.

218. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

Carnot sur son père58 et qui attendent une suite ; et j’en viens au livre dans lequel j’ai à signaler un curieux chapitre que peut-être on n’irait pas y chercher, si l’on n’était averti. […] Et c’est ce même homme qui, envoyé par l’Assemblée aux Tuileries, le 20 juin, après avoir fait passer le roi et la reine dans un cabinet pour les soustraire aux outrages, ne peut retenir ses larmes, et, au même moment, cherche à s’excuser d’en verser. […] Ce fut lui qui chercha l’occasion de m’en parler en me faisant remarquer, combien pouvait être douce et heureuse l’existence d’un curé qui sait ménager les convenances. […] Un autre chartreux, de Thionville, dom Ignace Jaunez (oncle de Mme Hoche), lequel, en sa qualité de sacristain, avait le droit d’entrer dans les pavillons, venait me chercher dans ma chambre vers onze heures ou minuit ; je vois encore ce spectre blanc, aux yeux caves, avec la tète encapuchonnée, avançant sous mes yeux sa lanterne sourde, et prononçant Ave Maria, à quoi, me levant pour le suivre, je répondais Amen. […] Il faudrait lire tout son discours : c’est bien l’image d’un cloître, quand la foi, l’amour et l’espérance se sont retirés : « Vous avez fait de bonnes études, ajoutait-il ; et après une année de noviciat vous pourriez entrer dans les ordres ; raison de plus pour vous désespérer quand vous vous verrez renfermé pour jamais dans ces murailles, sans livres, sans conversation, sans ami, au milieu d’envieux imbéciles et méchants, qui ne chercheront qu’à vous empêcher de sortir du cloître.

219. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

Il a eu la bonté de me la montrer ; maais je n’y ai rien trouvé de ce que j’y cherchais principalement, et j’ignore absolument tout ce que je souhaiterais de savoir. […] M. le prince de Conti l’a envoyé chercher. […] Mais, au milieu de tout cela, son amitié pour le pauvre grand écrivain infirme et troublé veille de loin sans cesse et cherche à se produire par des effets. […] Il ne saurait entrer dans mon plan de recommencer, après tant d’autres, l’exposé de la querelle que Rousseau fit à Hume pour le remercier de l’avoir conduit en Angleterre, de l’y avoir présenté à ses amis, de lui avoir ménagé un asile commode et riant à la campagne, et d’avoir cherché à lui obtenir une pension du jeune roi George III. […] Rousseau cherche la célébrité, il la préfère à tout ; il ne restera pas tranquille dans l’asile qu’il a désiré.

220. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Collé. »

Et, sans aller si loin chercher des exemples, vous tous qui avez connu des gens gais qui ne sont plus, vous le savez bien, que le plus vif et le plus fin de la gaîté ne se transmet pas et s’évapore : comment donner idée de Désaugiers à ceux qui ne l’ont qu’entrevu ? […] La nature l’avait doué d’une inépuisable gaîté ; voilà ce qu’il faut bien se dire avec lui, sans tant chercher de raisons ni de commentaires. […] Il avait de la causticité tant qu’il vécut avec ses égaux : plus tard, en élargissant son cercle de société, en s’élevant au-dessus de sa sphère et en vivant avec les grands, il s’appliqua à se guérir de cette disposition au sarcasme, et il chercha dans sa plaisanterie à ne mordre sur personne en particulier, il avait de la finesse, et sentait le besoin de plaire. […] Une ou deux fois, Collé chercha à s’élever jusqu’à la scène de la Comédie-Française, et sa pièce de Dupuis et Desronais y eut un certain succès ; mais, dans cet ouvrage qui vise à être une pièce de caractère et dans le grand genre, on ne reconnaît plus que faiblement le joyeux Collé : il mit des années à faire cette comédie, à la limer et re-limer, à écouter et à peser les conseils ; elle était d’abord en prose, il la rima. […] Je conseille à tous ceux qui veulent connaître Collé de chercher les feuilletons où Mlle de Meulan a parlé de lui, et de lire les anecdotes qu’elle cite.

221. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — I. » pp. 41-62

Une autre raison enfin, et qui est particulière à cet ordre d’esquisses, c’est qu’en écrivant dans les journaux, on est toujours quelque peu journaliste par un endroit ; on cherche l’à-propos, on attend l’occasion, et, sans s’attacher précisément à ne parler que des ouvrages encore tout chauds de la forge (autre expression de Montesquieu), on désire du moins que quelque circonstance naturelle nous ramène aux ouvrages anciens et y dirige l’attention. […] Il lisait plume en main et en réfléchissant : « Au sortir du collège, on me mit dans les mains des livres de droit ; j’en cherchai l’esprit. » Cet esprit des choses du droit et de l’histoire fut la recherche de toute sa vie : il ne se reposa que quand il crut l’avoir trouvé. […] Ce qui nous plaît et ce que nous cherchons dans ces lettres, c’est Montesquieu lui-même se partageant légèrement entre ses divers personnages, et jugeant sous un masque transparent les mœurs, les idées et toute la société de sa jeunesse. […] Montesquieu, dans ce petit discours, parle magnifiquement de l’étude et des motifs qui doivent nous y porter : « Le premier, c’est la satisfaction intérieure que l’on ressent lorsque l’on voit augmenter l’excellence de son être, et que l’on rend plus intelligent un être intelligent. » Un autre motif encore, et qu’il n’allait pas chercher loin de lui, « c’est, disait-il, notre propre bonheur. […] Cet auteur artiste est là en présence de son sujet, de sa vaste lecture ; il veut une loi et il la cherche, il la crée quelquefois.

222. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre quatrième. L’expression de la vie individuelle et sociale dans l’art. »

. — Il cherche l’expression de la vie […] L’art poursuit deux buts distincts : il cherche à produire, d’une part, des sensations agréables (sensations de couleur, de son, etc.), d’autre part, des phénomènes d’induction psychologique aboutissant à des idées et à des sentiments de nature plus complexe (sympathie pour les personnages représentés, intérêt, pitié, indignation, etc.), en un mot, tous les sentiments sociaux. […] Selon nous, un être ainsi organisé échouerait au contraire dans l’art, car il faut croire en la vie pour la rendre dans toute sa force ; il faut sentir ce qu’on sent, avant de se demander le pourquoi et de chercher à utiliser sa propre existence. […] Il cherche à nous représenter plus de vie encore qu’il n’y en a dans la vie vécue par nous. […] Pour trouver le durable dans l’art, Nisard et Saint-Marc Girardin ont proposé cet expédient : chercher le général ; en littérature, disent-ils, il n’y a de vrais que les sentiments les plus généraux.

223. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre II : La littérature du xviie  siècle »

C’est une raison qui ne rompt jamais en visière avec le sens commun, sans être esclave cependant d’aucun préjugé ; qui cherche dans le beau l’idéal et le général, sans se payer cependant du servile et du banal, qui met au-dessus de tout intérêt l’homme et le genre humain, et qui obéit à la règle, sans jamais décourager la liberté. […] On ne cherchera pas dans son livre les analyses biographiques et psychologiques d’un Sainte-Beuve, ni la critique précise et pratique d’un La Harpe ou d’un Voltaire, ni les grandes vues de littérature comparée d’un Villemain, ni les applications morales d’un Saint-Marc-Girardin, ni les méditations individuelles d’un Sacy. […] Nisard n’a pas cherché à refaire ce qui avait été si bien fait à côté de lui ; mais aussi personne n’avait fait ce qu’il a essayé de faire et ce qu’il a fait en partie : une philosophie de la littérature française. […] Il cherche quelle est la qualité distinctive de ce grand écrivain, et il trouve que c’est le bon sens, c’est-à-dire « la faculté de voir juste et de se conduire en conséquence ». […] La philosophie faisait table rase avec Descartes de tout le passé, la tragédie cherchait des héros dans la fable antique, dans l’histoire turque ou romaine, jamais en France.

224. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre v »

Ce sont autant de petites méditations où l’on voit que le jeune soldat ne cherche et ne rencontre que lui-même dans tout le chaos de cette guerre. […] Je n’y cherche et n’y trouve pas autre chose que des émotions poétiques. »‌ Ce sont des émotions poétiques encore qu’il cherche dans la guerre, et il en trouve de fort belles. […] A voir les avions se chercher, foncer l’un sur l’autre, se mitrailler, reprendre le large, revenir à la charge jusqu’à ce que l’un des deux s’enfuie ou tombe, je retrouve tout pur le plaisir passionnant des courses de taureaux : émotion pareille, l’arène est en haut. »‌ Tout cela se résume dans cette profession de foi :‌ Au risque de vous paraître fou, je déclare en mon âme et conscience que j’aime être ici ; j’aime la tranchée de première ligne, comme un « pensoir » incomparable ; on y est ramassé sur soi-même, toutes ses forces rassemblées ; on y jouit d’une entière plénitude de vie. […] La vie me paraît simple, simple, et toujours si admirable que je ne comprends pas qu’on ne s’y prête pas avec reconnaissance…‌ Un des jeunes amis à qui il adresse ces belles lettres cherche à le classer et lui dit ; « Tu es fataliste. » Roger Cahen proteste avec vivacité : « Ni fataliste, ni déterministe ; j’accepte seulement avec amour tous les événements qui sont créateurs de sentiments nouveaux, de forces nouvelles ; je suis celui qui espère toujours, je suis persuadé que le Messie est à venir. »‌ Un autre jour, il écrira : « Je suis d’une âme très pieuse, mais ma piété est celle de Jean Christophe : “Sois pieux envers le jour qui se relève.” […] Bloch s’empresse : il cherche, il trouve, il apporte au mourant le symbole de la foi des chrétiens.

225. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, romans (1832) »

Victor Hugo nous est une occasion naturelle d’examiner le jeune et célèbre auteur sous un point de vue assez neuf, de suivre son développement et son progrès dans un genre de composition où il débuta tout d’abord, qu’il a toujours cherché à mener de front avec les autres parties de son talent, et qu’il nous promet (le catalogue du libraire en répond) de ne pas déserter pour l’avenir. […] comment s’amuser aux causeries, quand on se précipite aux conclusions ; comment vouloir des intervalles, quand on ne cherche que les saillies ? […] Cet autre roman étrange, moins brillant, moins haut en couleur que le Bug-Jargal définitif, et plus analogue à la manière sobre et précise des premières odes dont il forme le lien avec les secondes, fut compris de travers à sa naissance, et on y chercha je ne sais quelle inspiration désordonnée, au lieu de le classer parmi les romans chevaleresques dont il remplissait à la rigueur toutes les conditions. […] Le seul Quasimodo en semble l’âme, et j’en cherche vainement le Chérubin et l’Ange.

226. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. Vitet à l’Académie française. »

C’était là une difficulté de plus dans la disposition d’un public en éveil, qui n’aime rien tant qu’à voir la politesse relevée de malice, et qui s’accoutumerait volontiers à en aller chercher des exemples à l’Académie, sauf à doubler la dose et à faire l’étonné en sortant245. […] Soumet du nôtre, je voudrais du moins qu’on pût les peindre au naturel tels qu’ils furent, et que cette réalité qu’on chercherait vainement dans leurs œuvres majestueuses se retrouvât dans l’expression entière de leur physionomie, car la physionomie humaine a toujours de la réalité. […] Lorsqu’il a ensuite abordé son sujet, on a senti, à la façon dont il l’a traité, qu’il aurait pu même ne point chercher d’abord à l’élargir. […] Molé ne trouverait à y opposer, a-t-il dit, que le « for intérieur du promeneur pensif et solitaire, auquel notre vie, notre civilisation active et compliquée fait chercher, avant tout, le calme, le silence et la fraîcheur. » Analysant avec détail le beau travail sur Lesueur et sur les révolutions de l’art, insistant sur l’accord mémorable avec lequel ces trois jeunes gens, Poussin, Champagne et Lesueur, se dégagèrent du factice des écoles et vinrent retremper l’art dans le sentiment intérieur et dans la nature, le directeur de l’Académie a fait entendre de nobles et bien justes paroles : « Constatons-le, a-t-il dit, ces trois hommes étaient de mœurs pures, d’une âme élevée ; tout en eux était d’accord.

227. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre II. Le dix-neuvième siècle »

Après quoi la révolution politique faite cherche son expression, et la révolution littéraire et sociale s’accomplit. […] Ne leur cherchez pas d’autre filiation, d’autre inspiration, d’autre insufflation, d’autre origine. […] Cherchons le mieux. […] Je le répète, ne cherchez pas ailleurs le point d’origine et le lieu de naissance de la littérature du dix-neuvième siècle.

228. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre IV. La folie et les lésions du cerveau »

Chapitre IV La folie et les lésions du cerveau Dans les sciences physiques et chimiques, lorsque l’on veut connaître les conditions qui déterminent la production des phénomènes, on fait ce que l’on appelle des expériences : on supprime telle ou telle circonstance, on en introduit de nouvelles, on les varie, on les renverse, et, par toute sorte de comparaisons, on cherche à découvrir des effets constants liés à des causes constantes. […] Cependant, lorsqu’il cherche le fait caractéristique de la folie, il le trouve dans l’identité du rêve et du délire. […] Non-seulement c’est dans la psychologie que les médecins cherchent la définition de la folie ; c’est encore à elle qu’ils empruntent le principe de leurs classifications. […] C’est là un très-bon principe, mais qui confirme entièrement ce que nous cherchons à établir.

229. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre III : Le présent et l’avenir du spiritualisme »

On pourrait nous dire que cette dissidence, en supposant qu’elle existât (et l’on cherche autant qu’il est possible à nous la dissimuler), ne porte après tout que sur des questions libres, des questions sociales et politiques, mais que l’Église catholique nous offre au moins un point fixe et un asile sûr dans un dogme incontesté, formulé par une autorité infaillible. […] Ils voudraient ne rien sacrifier de ce qu’ils ont pensé jusqu’ici et y ajouter quelque chose ; ils cherchent à résoudre le problème que la société elle-même poursuit depuis quatre-vingts ans, perfectionner sans détruire, conserver en transformant. […] Comme eux, nous croyons à Dieu et à l’âme ; mais pour eux la liberté de penser est un crime, pour nous c’est le droit et la vie, et nous aimons mieux l’erreur librement cherchée que la vérité servilement adoptée. […] Elle s’informe de toutes les idées nouvelles, et elle cherche librement à s’en rendre compte.

230. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Chine »

Elle est donc toujours un mystère… non pas un simple mystère à ténèbres dans lesquelles l’œil cherche sans voir, mais un mystère à éblouissements qui brise la lumière sous les feux luttants des contradictions… Avec un pareil peuple, qui semble échapper au jugement même, avec ce sphinx retors qui a remplacé l’énigme par le mensonge et auprès de qui tous les sphinx de l’Egypte sont des niais à la lèvre pendante, n’y a-t-il pas toujours moyen, si on ne met pas la main sur le flambeau de la vérité, de faire partir, en frottant son esprit contre tant de récits, les allumettes du paradoxe, et d’agir ainsi, fût-ce en la déconcertant, sur l’Imagination prévenue, qui s’attend à tout, excepté à l’ennui, quand on lui parle de la Chine et des Chinois ? […] Mais des documents inconnus sur le Céleste-Empire, et des considérations supérieures à celles que deux siècles d’incertitudes et de travaux poursuivis plus ou moins à tâtons par les Quinze-Vingts de nos Académies des sciences ont mis en circulation dans le monde savant européen, nous en avons vainement cherché la trace. […] … Ainsi, désappointement, déception, chute sans matelas du haut… de la tour de Porcelaine, telle a été notre désagréable impression en lisant ces deux énormes volumes, ramassés partout, excepté en Chine, excepté là où il eût fallu chercher. […] ce que nous avons cherché, avant tout, dans ces deux volumes, aussi typographiquement qu’intellectuellement illisibles, c’est de nouvelles et meilleures raisons d’admirer la Chine, puisque Pauthier et Bazin l’admirent, que les vieilles raisons, devenues sournoises, du xviiie  siècle !

231. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. le vicomte de Meaux » pp. 117-133

Il l’acclame et il la proclame ; mais, dans l’intérêt de son idée, il finit par ne plus voir qu’elle dans l’Histoire… Il s’est livré à une distraction que je crois plus réfléchie qu’involontaire, et c’est à l’aide de cette distraction qu’il a cherché à l’avance une généalogie pour une idée qui n’en a pas. Dans l’avant-propos qui précède son ouvrage, et qui, par parenthèse, est très supérieur à son ouvrage, l’auteur des Luttes religieuses jette un coup d’œil synthétique qui a de la clarté, et même de la puissance, sur l’histoire générale de l’Église avant le xvie  siècle, et il y cherche une tolérance qui soit bien l’aïeule de la sienne. […] Assurément, cette conclusion ne peut pas étonner de la part d’un homme que j’ai appelé, au commencement de ce chapitre, plus politique que catholique, et qui, à travers tous les faits de son livre, n’est occupé qu’à chercher la tolérance, imperceptible encore, comme on cherche une aiguille dans une botte de foin… Avec Henri IV, il l’a trouvée, et il s’en régale.

232. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXI. Sainte Térèse »

Nous chercherions, sans les trouver, son esprit, son âme, et ce parfum d’un corps, transfiguré comme son esprit et son âme, — ce parfum immortel qu’exhale encore ce qui nous reste d’elle, — nous affirment ceux qui l’ont respiré. […] Nous ne les chercherions même pas. […] Aussi tous les deux, après cette lecture, s’en étaient-ils allés chercher le martyre, au pays des Maures. […] On cherche en vain dans cette aristocratique religieuse agenouillée, sous ce visage, à l’ovale si pur, que l’austère et strict bandeau fait paraître plus pur encore, la Mystique dont l’âme, à force d’énergie, détruisit le corps, la paralytique aux os écrasés et aux nerfs tordus, cet amas sublime d’organes dissous sur lesquels flamboyait l’Extase, l’ombre de fille consumée qui vécut, deux trous ouverts au cœur, les deux trous par lesquels le glaive du Séraphin avait passé, et si physiquement et si réellement, qu’après sa mort, sur le cœur même, on put constater la blessure.

233. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre III. Buffon »

Sa théorie des périodes géologiques, il la cherche dans l’observation de l’état actuel de la terre, où sont épars quelques vestiges des états antérieurs. […] Il ne cherche pas à s’expliquer l’origine des choses ; il écarte cet insoluble problème. […] Ce n’est pas là qu’il faut chercher Buffon : c’est dans la Théorie de la terre et dans les Époques de la nature.

234. (1890) L’avenir de la science « VII »

Prenez les plus beaux travaux de la science, parcourez l’œuvre des Letronne, des Burnouf, des Lassen, des Grimm, et en général de tous les princes de la critique moderne ; peut-être y chercherez-vous en vain une page directement et abstraitement philosophique. […] Car ils s’amusent, ils cherchent leur plaisir, comme l’industriel cherche son profit.

235. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre V. Que l’incrédulité est la principale cause de la décadence du goût et du génie. »

Or, si notre siècle littéraire est inférieur à celui de Louis XIV, n’en cherchons d’autre cause que notre irréligion. […] On les cherche, et on ne les trouve plus. […] On aura beau chercher à ravaler le génie de Bossuet et de Racine, il aura le sort de cette grande figure d’Homère qu’on aperçoit derrière les âges : quelquefois elle est obscurcie par la poussière qu’un siècle fait en s’écroulant ; mais aussitôt que le nuage s’est dissipé, on voit reparaître la majestueuse figure, qui s’est encore agrandie pour dominer les ruines nouvelles205.

236. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 2, de l’attrait des spectacles propres à exciter en nous une grande émotion. Des gladiateurs » pp. 12-24

Ce n’étoit point au hazard qu’on avoit armé le gladiateur retiaire d’une façon et le mirmillon d’une autre ; on avoit cherché entre les armes offensives et les armes défensives de ces quadrilles une proportion qui rendît leurs combats plus longs et plus remplis d’évenemens. […] Ils tiennent donc l’ame dans une espece d’extase, et ils l’y tiennent encore sans qu’il soit besoin qu’elle contribuë à son plaisir par une attention serieuse dont notre paresse naturelle cherche toujours à se dispenser. […] trabit sua quemque voluptas. en cela les hommes ont le même but ; mais comme ils ne sont pas organisez de même, ils ne cherchent pas tous les mêmes plaisirs.

237. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLIXe Entretien. L’histoire, ou Hérodote »

En fuyant la critique acharnée de ses compatriotes, il était venu chercher ici une nouvelle patrie. » Voilà tout ce qu’on sait de la vie, des œuvres, de la mort de ce grand homme. […] Les Mysiens, satisfaits, allaient se retirer ; mais Atys, qui avait entendu leur demande, apprenant que son père s’y était refusé, entra et parla en ces termes : « Ô mon père, c’était autrefois mon plus beau droit et mon plus noble privilége d’aller chercher la gloire à la guerre ou dans les chasses périlleuses. […] N’hésite pas à la remplir, et ne cherche pas à éluder mes ordres. […] » Harpagus, tandis que le roi parlait, ayant aperçu le pâtre, ne chercha point à recourir à un mensonge qui l’aurait perdu dès qu’il en aurait été convaincu, et répondit en ces termes : « Ô roi, lorsque cet enfant m’a été remis, je me suis consulté sur la manière dont j’exécuterais vos ordres, et j’ai cherché comment, en ne me rendant pas coupable de désobéissance envers vous, j’éviterais cependant de verser de ma main le sang de votre fille et le vôtre même. […] L’histoire est la foi des peuples : il n’y en avait plus que dans les sanctuaires ou dans les colléges des prêtres : aussi c’était là qu’il cherchait ses traditions pour les discuter.

238. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

Une partie de l’Europe cherche à s’en passer violemment et superbement. […] Évidemment il ne faut pas chercher à plaire par tous les moyens, mais une littérature où l’on ne chercherait pas d’abord à plaire, même, comme dit Boileau, si on est serpent ou monstre odieux, serait-elle bien française ? […] Si peu dogmatique qu’il soit, il faut bien qu’il cherche à prouver, à ordonner, à construire. […] Il cherche ailleurs, mais il cherche bien la même chose, à savoir des clartés et des théories sur les genres. […] Dans les grands hommes du Siècle de Louis XIV, Voltaire cherche des modèles.

239. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

Les commérages de l’histoire intime ne sont pas de notre goût ; nous ne cherchons pas le scandale, nous ne scrutons pas les mystères de la vie privée. […] Une âme honnête et droite pouvait animer les traits vulgaires de son visage ; il n’y fallait chercher aucune grâce, aucune finesse, nulle expression délicate et poétique. […] Son âme généreuse et fière appartenait à ces siècles de grandeur et de gloire que j’ai cherché à faire connaître. […] Je serais entré à Ferney, que je n’aurais pas cherché avec plus de respect les traces encore chaudes du génie très réel de Voltaire. […] Mais, en totalité, il pouvait avoir paru beau dans sa jeunesse à une femme transplantée en Italie, qui cherchait la forme de la force dans un protecteur de sa faiblesse.

240. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

La vérité cherchée, trouvée et bien exprimée, tel est l’éloge qu’on fait de tous les bons écrits au dix-septième siècle. […] Que chercheront Pascal, La Rochefoucauld, Bossuet, Bourdaloue, La Bruyère, Fénelon ; et, dans la poésie, Racine, Molière, La Fontaine, Boileau, sinon, dans les genres les plus divers, des parties de la vérité universelle ? […] Aussi lui doit-on donner la gloire d’avoir été le premier écrivain français qui ait sérieusement cherché la vérité. […] Il n’est pas étonnant que Descartes et Montaigne ne communiquent pas de la même manière ce qu’ils ont cherché par des voies si opposées. […] Le jour où elle se fatigue de son génie et où, croyant l’étendre, elle le dénature, il lui arrive la même chose qu’aux individus qui se cherchent hors d’eux-mêmes et qui abdiquent dans l’imitation.

241. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre III. Les immoralités de la morale » pp. 81-134

La famille, les amis, la patrie, l’école, l’église, le groupe professionnel, l’état, l’humanité cherchent à nous façonner à leur guise et à nous imposer comme devoir ce qu’ils espèrent de nous. […] Le moi réagit de son côté plus ou moins et cherche à faire passer sous le couvert d’une autorité respectée, les règles de conduite qui lui conviennent. […] Jusque-là, elle devra tâtonner, chercher, suppléer par l’intelligence, l’effort, le sentiment, les conceptions à demi mystiques aux défectuosités de l’organisation. […] L’égoïste timide, faible, ou consciencieux cherche à se convaincre et à convaincre les autres qu’il agit pour le mieux. […] Le bien est le bien parce qu’il est le bien, il n’y a pas à chercher plus loin.

242. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

D’eux-mêmes ils vont chercher un nœud qui les rassemble, Tout s’allie et se forme, et tout va naître ensemble1. […] Et en cela le savant ressemble à l’artiste ; il n’y a de grand artiste que celui qui cherche toujours au-delà. […] Un succès, même incomplet, cherché et obtenu à cette hauteur, honore un talent, mesure un courage et provoque, avec la plus sérieuse sympathie, un examen approfondi. […] Sully-Prudhomme cherchait ailleurs sa voie. […] Vous n’irez pas sans doute chercher la justice en dehors de la vie ?

243. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

La mécanique est le dernier mot de toutes choses ; c’est là qu’il faut chercher l’explication définitive des mystères de la psychologie, de la biologie, de la chimie et de la physique. […] La substance des choses, tant de fois et si vainement cherchée par la métaphysique matérialiste dans ce substratum de l’imagination qui s’appelle l’étendue, est ailleurs. […] Mécanique, physique, chimie, biologie, toutes les sciences de la nature viennent chercher leur explication dans une intuition supérieure qui n’est autre que l’expérience intime. […] C’est dans la conscience que l’âme a cherché et trouvé ce Dieu ; c’est dans la conscience qu’elle le contemple et l’adore. […] Aussi peut-on dire que le sentiment religieux a constamment été en raison du sentiment moral, et quand la foi du croyant a eu besoin d’un commentaire de la parole sainte, où l’a-t-elle cherché ?

244. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

Il cherche la nouveauté dans l’originalité, dans la personnalité. […] « Cherche la connaissance ! […] Maintenant je comprends ce que jadis on cherchait avant tout, lorsque l’on cherchait des maîtres de la vertu. C’est un bon sommeil que l’on cherchait et des vertus couronnées de pavots. […] » — Et il ne cherchera plus la vérité.

245. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Il cherche à voir ce qui ne cherche pas à paraître. […] Il faut partout les chercher, et partout les saluer. […] Je ne cherche pas ce qu’a de favorable ou de contraire à la poésie, à l’art en général, cette aptitude admirable en tout cas. […] Le poète cherche parmi elles celle qu’il aima dans la vie, et dont le souvenir réchauffe encore la poudre de son tombeau ; mais comment la reconnaîtra-t-il ? […] Il faudra donc lui chercher un point de départ ou d’appui dans quelque tradition première, dans quelque révélation datée, dans quelque parole non humaine.

246. (1888) Études sur le XIXe siècle

Bassi me dit : “Je vais chercher quelque chaumière où je puisse trouver un pantalon ; celui-ci est trop suspect.” […] Courageux et intelligent, Bonnet, avec grand péril pour lui-même, nous chercha et nous trouva. […] Ils le voyaient bien, et cherchaient à se détourner d’un autre côté. […] Pour venir en France chercher une réputation dans les lettres ? […] Là où le progrès était impossible, je croyais alors qu’on pouvait chercher à l’obtenir par des moyens violents.

247. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1892 » pp. 3-94

» C’était la nuit du dimanche, et le mardi soir, on venait me chercher, pour aller à l’enterrement de mon père. […] Alors il s’est mis à chercher une seconde traduction de sa pensée, qui avait raté. […] On était venu le chercher, dare dare, pour une femme qui avait une pneumonie. […] Deux heures après, le domestique venait chercher Lavoix, pour porter le mort sur son lit. […] » Et il passe aux curieux dîners, au restaurant du Havre, entre Corot, Rousseau, Millet, Diaz, Couture, et raconte ceci : « Couture vint, un jour, me chercher pour dîner, me chercher dans ma petite chambre d’alors, et comme je lui disais : « Vous êtes triste, aujourd’hui, Couture ?

248. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Il eut cependant quelques rechutes d’amour plus profane que l’amour éthéré qu’il nourrissait pour Laure ; il ne cherche pas à s’en excuser lui-même. […] Trop connu, trop recherché dans ma patrie, loué, flatté même jusqu’au dégoût, je cherche un endroit où je puisse vivre seul, inconnu et sans gloire. […] Si vous acceptez ce parti, nous chercherons où elle est, cette source du Timave, si célèbre parmi les poètes et si ignorée de la plupart des docteurs, et non pas dans le Padouan où on la place communément. […] « Mon cher Maître, je suis parti de Certaldo le 24 mars pour aller vous chercher à Venise, où vous étiez alors. […] Comme on reconnaît au naturel et à la simplicité cet homme qui n’a jamais tendu son style une seule fois dans sa vie, et qui n’a cherché, en écrivant, que le charme d’écrire !

249. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (2e partie) » pp. 177-248

Le reste est un mystère, que la curiosité, toujours naturelle quand il s’agit d’un grand homme, peut chercher à pénétrer, mais qui importe peu. […] Pendant qu’il institue une république à Milan, il cherchait une monarchie absolue en France. […] Ces conjurés débarquent en France, entrent furtivement à Paris, y ourdissent leur trame, cherchent à s’associer un homme dont le nom militaire soit un entraînement certain pour l’armée. […] À la fin, Georges, Pichegru, Moreau, les Polignac sont arrêtés ; on cherche les preuves et les témoins de leur complot. […] On n’y comprend en réalité qu’une chose : c’est que l’historien, qui veut rester à la fois révolutionnaire et monarchique, en dépit de la contradiction des deux rôles, cherche à excuser maintenant la fondation de l’empire comme il a cherché à excuser le renversement de la république et l’institution dictatoriale du consulat à vie.

250. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

Il paraît que le Seigneur voulut éprouver ainsi la sensibilité peut-être trop ardente de mon cœur, ou plutôt je crois que, dans sa clémence, il chercha à punir mes nombreux péchés par ces deuils que mon caractère me rendait plus pénibles. […] D’abord à l’aide de paroles, ensuite par des actes indécents, ils tourmentèrent la pauvre femme et cherchèrent à la faire accéder à leurs désirs. […] Elle cherchait à se guérir de deux maladies, restes d’une petite vérole mal soignée, ou qui n’avait pas rendu suffisamment. […] Il entrait dans sa nature de chercher à montrer que rien ne lui était impossible, et qu’il réussissait là où le plus habile aurait inévitablement échoué. […] Si le succès était seulement douteux, il chercherait d’abord à assurer le concours des siens, et alors, conjointement avec Son Éminence, ils assureraient l’adhésion du parti opposé.

251. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

Je cherchais à me rappeler mes promenades favorites en peuplant ma chambre d’oiseaux ; puis, dès qu’un moment de liberté me rendait à moi-même, je me hâtais d’aller chercher les roches creuses, les grottes couvertes de mousse, bizarres retraites des mouettes et des cormorans aux ailes noires. […] Tous les détails de l’organisation des oiseaux, je les connaissais d’autant mieux que je cherchais avec une plus laborieuse patience à les reproduire exactement. […] Je ne cherchais que mon amusement et mon plaisir. […] Je suivais un vieux sentier indien ; le soleil s’abaissa sous l’horizon, sans que j’aperçusse un toit, un abri, un asile que ma lassitude cherchait. […] Mais déjà les hameçons, amorcés de nouveau, sont retournés en chercher d’autres.

252. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

Jeu bien inutile, passe-temps bien oisif : car, si je sais d’avance que ce qui m’est enseigné est la vérité absolue, pourquoi me fatiguer à en chercher la démonstration ? […] Ils ne cherchent pas, ils tâchent de prouver, et cela doit être. […] Il semble donc plus commode de chercher et à la connaissance et à la morale et à la politique une base extérieure à l’homme, une révélation, un droit divin. […] Mieux vaut donc rester dans le champ de la nature humaine, ne chercher l’absolu que dans la science et renoncer à ces timides palliatifs qui ne font que faire illusion et reculer la difficulté. […] Dans l’impossibilité d’exposer avec précision de telles idées, je renvoie à l’hymne où, dès ma première jeunesse, je cherchai à exprimer ma pensée religieuse, à la fin du volume.

253. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Quoi qu’il en soit, en nous décrivant le tour d’esprit des convives, Marivaux va nous définir en perfection le genre qu’il préfère : Ce ne fut point, dit Marianne, à force de leur trouver de l’esprit que j’appris à les distinguer : pourtant il est certain qu’ils en avaient plus que d’autres et que je leur entendais dire d’excellentes choses ; mais ils les disaient avec si peu d’effort, ils y cherchaient si peu de façon, c’était d’un ton de conversation si aisé et si uni, qu’il ne tenait qu’à moi de croire qu’ils disaient les choses les plus communes. […] Le vieil officier cherche à le détromper : il lui montre la différence qu’il y a entre un homme peu scrupuleux qui, dans la réalité, dans la conversation, se laisse animer et accepte les choses les plus fortes, et ce même homme, devenu tranquille, qui les apprécie en les lisant : « Il est vrai, dit-il, que ce lecteur est homme aussi : mais c’est alors un homme en repos qui a du goût, qui est délicat, qui s’attend qu’on fera rire son esprit, qui veut pourtant bien qu’on le débauche, mais honnêtement, avec des façons et avec de la décence. » C’est un éloge à donner à Marivaux que, venu à une époque si licencieuse, et lui qui a si bien connu le côté malin et coquin du cœur, il n’a, dans l’expression de ses tableaux, jamais dépassé les bornes. […] Marivaux fut du nombre des jeunes auteurs qui cherchèrent sur ce théâtre nouveau une variété et une légèreté de formes que ne leur permettait pas la scène française. […] Les pièces de Marivaux semblent faites pour tenter ainsi et susciter, de temps à autre, des acteurs et des actrices qui cherchent la distinction, et qui sont destinés aux caractères fins et de bonne compagnie. […] Sans beaucoup chercher, on lui trouverait aussi des analogues et des parents assez reconnaissables dans l’ordre de nos moralistes en renom.

254. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

Pour moi, ce dernier mot d’un esprit, même quand je serais parvenu à réunir et à épuiser sur son compte toutes les informations biographiques de race et de famille, d’éducation et de développement, à saisir l’individu dans ses moments décisifs et ses crises de formation intellectuelle, à le suivre dans toutes ses variations jusqu’au bout de sa carrière, à posséder et à lire tous ses ouvrages, — ce dernier mot, je le chercherais encore, je le laisserais à deviner plutôt que de me décider à l’écrire ; je ne le risquerais qu’à la dernière extrémité. […] Est-ce à dire, parce que Tite-Live est éloquent par nature et cherche des sujets riches et féconds, des sujets propices au développement des talents qu’il a en lui, qu’il soit orateur en tout et partout dans son histoire, orateur au pied de la lettre, et orateur en quelque sorte dépaysé quand il fait autre chose que des discours, tellement que lorsqu’il peint, par exemple, des caractères, Annibal, Fabius, Scipion, Caton, Paul-Émile, s’il les conçoit d’une façon un peu plus noble et un peu plus adoucie qu’un autre ne les eût présentés, tout ce qu’on peut louer ou blâmer dans cette manière de traiter les portraits soit l’effet de l’esprit oratoire, un effet rigoureux, nécessaire, découlant de là directement comme un corollaire d’un principe ? […] La plupart des hommes ne cherchent à concevoir, connaître, ou travailler d’une manière quelconque leur intelligence que pour la produire au dehors. […] Il vaudrait mieux peut-être ne pas s’en rendre compte et se faire illusion sur son prix ; mais si je suis amené, par ce sentiment même de ma décadence intellectuelle et morale, à chercher plus haut que moi une consolation et un appui, la réflexion et la raison m’auront rendu sans doute, après avoir été cause de souffrances, le plus grand service qu’il soit possible d’en retirer. […] Sa tête est comme un creuset ; il sait tirer des choses ce qu’il cherche, pour peu qu’il y en ait des éléments : il les concentre.

255. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet »

Ne cherchez point de chaussée historique, bien cimentée, solide et continue : le parti pris des points de vue absolus domine ; on court avec lui sur des cimes, sur des pics, sur des aiguilles de granit, qu’il se choisit comme à plaisir pour en faire ses belvédères. […] Michelet qui veut chercher dans les parents du jeune prince, et jusque dans les mystères de la génération, les éléments et le secret de cette organisation singulière, ce qui pouvait lui venir de sa mère dans ses goûts bizarres, ce qu’il ne tenait certainement pas de son père. […] Ses affaires vont à souhait : tout le monde cherche à lui plaire. […] Il cherche à contredire, à se plaindre, à piquer les autres ; il s’irrite de voir qu’ils ne veulent point se fâcher. […] Napoléon, jeune, cherchait avidement autour de lui, et il ne trouva à embrasser dans Ossian que le fantôme du sublime.

256. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’Impératrice Catherine II. Écrits par elle-même. »

Je n’ai pas à caractériser ici le dessein général et la pensée politique qui peut inspirer cet écrivain patriote, je ne cherche que le côté historique ; et quand il n’y aurait que les Mémoires authentiques où l’Impératrice Catherine a raconté les premières années de sa jeunesse et de sa vie si contrainte et si intriguée avant d’atteindre à l’empire, qui donc parmi les lecteurs sérieux et les observateurs de la nature humaine pourrait y rester indifférent ? […] Je montrais un grand respect à ma mère, une obéissance sans bornes à l’Impératrice, la considération la plus profonde au grand-duc, et je cherchais avec la plus profonde étude l’affection du public. » Et encore « Je m’attachais plus que jamais à gagner l’affection de tout le monde en général : grands et petits, personne n’était négligé de ma part, et je me fis une règle de croire que j’avais besoin de tout le monde, et d’agir en conséquence pour m’acquérir la bienveillance ; en quoi je réussis. » Elle rencontra, à ce moment difficile et décisif, un conseiller excellent : c’était un Suédois de beaucoup d’esprit, qui n’était plus jeune, le comte Gyllenbourg. […] Tout de suite je me fis chercher ces livres, qu’on eut de la peine à trouver à Pétersbourg alors ; et je lui dis que j’allais lui tracer mon portrait, afin qu’il put voir si je me connaissais ou non. » Elle écrivit, en effet, ce portrait sous ce titre : Portrait du philosophe de quinze ans ; l’ayant retrouvé bien des années après, elle ne put s’empêcher de s’étonner de la profondeur de connaissance d’elle-même qu’elle possédait alors. […] Elle ne ressemblait pas à Frédéric qui se passait de lecture allemande et ne lisait que des ouvrages français ; elle en lisait aussi en russe et trouvait à cette langue adoptive, qu’elle s’appliquait à parler et à prononcer en perfection, « bien de la richesse et des expressions fortes. » Les Annales de Tacite qu’elle lut en 1754 seulement, c’est-à-dire à l’âge de vingt-cinq ans, opérèrent, dans sa tête une singulière révolution, « à laquelle peut-être la disposition chagrine de mon esprit à cette époque, nous dit-elle, ne contribua pas peu : je commençais à voir plus de choses en noir, et à chercher des causes plus profondes et plus calquées sur les intérêts divers, dans les choses qui se présentaient à ma vue. » Elle était alors dans des épreuves et des crises de cœur et de politique d’où elle sortit haute et fière, avec l’âme d’un homme et le caractère d’un empereur déjà. […] Elle m’embrassa, et toute la compagnie chercha à pénétrer ce qu’il y avait eu entre nous.

257. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre onzième. »

Il ne faut chercher La Rochefoucauld ni dans son rôle de frondeur, nouant des intrigues politiques, sans avoir rien de l’intrigant ; politique par amour ; brave sans véritable ardeur militaire ; exposant sa vie par point d’honneur ; agité plutôt qu’actif ; ni dans son début malheureux, lorsque s’essayant à la guerre civile par le complot, il se jette à vingt ans dans la ridicule échauffourée qui s’appela la Journée des Dupes. […] Il admirera la vérité cherchée avec l’âpre sagacité d’un homme d’esprit qui a été dupe, avec l’ardeur d’un honnête homme qui se venge de ses passions par sa raison. […] Aucun autre, par conséquent, n’offre plus d’occasions et d’attraits pour cette étude si intéressante, qui cherche sous la vérité du langage la vérité de la pensée. […] Pour avoir le vrai des Maximes, il faut les prendre au sens relatif, et substituer par la pensée au mot toujours, qui embrasse tous les temps, le correctif presque toujours, qui en maintient la vérité absolue quant à la Fronde, et qui n’ôte pas tout espoir à la nature humaine, ni tout courage de chercher à valoir mieux97. […] Dans ces Pensées, publiées quatre ans après, mais conçues vers le même temps, ce grand génie, franchissant les siècles, cherchait les principes et la sagesse bien au-delà des expériences du temps présent, auquel La Rochefoucauld était resté trop attaché.

258. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Et cela n’était pas chez lui un principe théorique, une doctrine plus ou moins prouvée et qu’il cherchait à inculquer aux autres. […] La morale admirable qu’il tire de la notion du Dieu père n’est pas celle d’enthousiastes qui croient le monde près de finir et qui se préparent par l’ascétisme à une catastrophe chimérique ; c’est celle d’un monde qui veut vivre et qui a vécu. « Le royaume de Dieu est au dedans de vous », disait-il à ceux qui cherchaient avec subtilité des signes extérieurs 223. […] Dieu ton Père sait de quoi tu as besoin, avant que tu le lui demandes 253. » Il n’affectait nul signe extérieur d’ascétisme, se contentant de prier ou plutôt de méditer sur les montagnes et dans les lieux solitaires, où toujours l’homme a cherché Dieu 254. […] Purifiez vos pensées ; cessez de mal faire, apprenez le bien, cherchez la justice, et venez alors 259. » Dans les derniers temps, quelques docteurs, Siméon le Juste 260, Jésus, fils de Sirach 261, Hillel 262, touchèrent presque le but, et déclarèrent que l’abrégé de la Loi était la justice. […] On écrivait très peu ; les docteurs juifs de ce temps ne faisaient pas de livres : tout se passait en conversations et en leçons publiques, auxquelles on cherchait à donner un tour facile à retenir 268.

259. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « La Religieuse de Toulouse, par M. Jules Janin. (2 vol. in-8º.) » pp. 103-120

Janin, en composant le roman qu’il vient de publier, a eu l’excellente idée, et bien digne d’un véritable homme de lettres, de se distraire depuis deux ans du spectacle des choses publiques, du spectacle de la rue, et de chercher dans un sujet emprunté au Grand Siècle un oubli des misères et des ennuis du présent. […] Il n’avait jamais cherché ni faveur ni place, ce qu’on appelle position, sous le régime où ses amis étaient tout ; il ne s’est pas jeté dans l’agitation ni dans les vagues poursuites, depuis qu’il y a eu naufrage. […] Mais, chez les anciens aussi, il a ses antécédents et presque ses modèles ; il va les chercher, à ses instants de loisir, chez Apulée, chez Pétrone, chez Martial, et il a parlé d’eux tous avec le sentiment de quelqu’un qui les entend mieux que par la lettre et par le texte, qui en ressaisit l’essence et l’esprit, et qui est, à quelque degré, de leur descendance. Parmi les modernes en français, je lui cherche des antécédents, des prédécesseurs, et j’ai peine à en trouver. […] Il changea alors courageusement de plan et de batterie, et se mit, pour plus de contraste, à chercher un sujet dans le siècle, non plus de Louis XV, mais de Louis XIV.

260. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

Nous aurions ainsi un art sectaire, qui chercherait à exprimer non pas la Vérité, mais des vérités et des dogmes formulés en préceptes catégoriques et impératifs. […] Wagner. — Ce qu’a cherché et voulu R.  […] Cependant, il n’a jamais cherché à grouper ses idées sur la musique en un corps de doctrine. […] La chanson populaire nous apparaît comme un miroir musical, comme la mélodie primordiale qui cherche une vision de rêve analogue dans la poésie. […] Quand nous les employons, ce n’est jamais que temporairement, par fragments, en vue d’un effet cherché et voulu.

261. (1863) Causeries parisiennes. Première série pp. -419

A-t-il cherché à faire rire, rêver ou pleurer ? […] On voit que Flaxman a cherché à se faire le contemporain de Dante. […] Combien en est-il, à cette heure, qui cherchent leur M.  […] cherche quelle privation tu t’imposeras pour tes étrennes ! […] Toi qui te plains d’avoir été frustré, cherche dans ta vie, malheureux !

262. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

Il la cherché toute sa vie. […] On cherche à arranger cela dans la pratique, à-marquer les limites d’une autorité et d’une autre. […] L’esthétique est une religion qui se cherche, le beau est une religion qui s’est trouvée. […] Quinet continue de chercher Dieu. Il le cherche dans la création comme il le cherchait dans l’histoire.

263. (1886) Le roman russe pp. -351

Ces écrivains-types nous offriront une réduction éminente et complète du génie national que nous cherchons à dégager. […] Voilà ce qui m’a décidé à chercher d’abord dans le roman les traits épars du génie russe. […] Nous n’aurons pas besoin de chercher plus avant. […] Dans notre enquête sommaire sur le passé, nous chercherons surtout la préparation du présent. […] Que cherche-t-il ?

264. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

Nous l’émulons et nous y parviendrons ; nos esprits cherchent à se montrer libres, et l’on sait qu’après avoir imité, nous perfectionnons, puis nous surpassons. […] En cela ils cherchent leur plaisir et fuient la peine. […] Il définit la bienfaisance de façon presque à dégoûter d’y chercher l’idée plus élevée et la flamme de charité. […] Ce n’est point l’art ni la difficulté surmontée que je cherche et j’admire. […] À la ville, je chercherais à plaire.

265. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

Elle est devenue un des principaux attraits et parfois l’âme même de ces petits cercles où hommes et femmes cherchent avant tout leur plaisir. […] Il relègue les termes techniques et rébarbatifs dans les gros livres et dans les dictionnaires plus gros encore où peuvent aller les chercher ceux qui en ont besoin : il condamne également les mots qui ont cours aux halles et qui gardent l’odeur du peuple. […] Il ne se permet ni railleries ni familiarités et dans tout ce poème, où devait revivre l’époque frénétique de la Ligue, vous chercheriez en vain un mot cru ou brutal. […] Il faut toujours chercher, pour chacun de ces petits milieux fermés, quel en a été le grand homme, le favori, le Dieu mortel ; si la préoccupation dominante y fut politique, littéraire, philosophique  ; si la société qu’il admit fut triée sévèrement ou mêlée, nationale ou cosmopolite, parisienne ou provinciale, etc. […] En notre siècle aussi, comment faire l’histoire de la chanson sans aller la chercher dans les nids où elle gazouillait avant de s’élancer à travers l’espace, dans le Caveau, séjour de la gaudriole au temps de Désaugiers et de Béranger, et, naguère, dans les cabarets de Montmartre où elle a donné tant de bons coups de bec et de gosier ?

266. (1889) L’art au point de vue sociologique « Introduction »

— A y regarder de plus près, la métaphysique n’est point aussi subjective, aussi formelle, aussi individualiste qu’elle le semblait d’abord, car ce qu’elle cherche dans le sujet pensant lui-même, c’est l’explication de l’univers, c’est le lien qui relie l’existence de l’individu au tout. […] C’est dans la négation de l’égoïsme négation compatible avec la vie même, que l’esthétique, comme la morale, doit chercher ce qui ne périra pas3. » En second lieu, l’identité des sensations et des sentiments supérieurs, c’est-à-dire la sympathie sociale que l’art produit, doit s’étendre au groupe d’hommes le plus vaste possible. […] Guyau répond à Flaubert qu’un être ainsi organisé échouerait au contraire dans l’art : « il faut croire en la vie pour la rendre dans toute sa force ; il faut sentir ce qu’on sent, avant de se demander le pourquoi et de chercher à utiliser sa propre existence. […] Selon lui, le réalisme bien entendu ne cherche pas à agir sur nous par une « sensation directe », mais par l’éveil de « sentiments sympathiques ». […] L’auteur, sous l’influence de cette doctrine, montre un souci constant de chercher leur sens aux choses, — ce qui revient à leur donner à toutes un intérêt.

267. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre premier. La solidarité sociale, principe de l’émotion esthétique la plus complexe »

Dans l’embrassement, c’est la vie de l’espèce entière dont nous cherchons à sentir la vibration puissante et que nous tentons de faire passer en nous. […] Mais ce qui importe, c’est que le sentiment d’un encouru danger par un individu ou d’une douleur subie par lui en vienne à provoquer, chez un autre individu, des mouvements réflexes aboutissant vers le point douloureux à soulager ou vers le danger à écarter ; nous en venons alors à localiser chez autrui l’origine de notre malaise sympathique, et nous cherchons à y porter remède chez autrui. […] On peut, comme dans l’architecture, arriver au beau par l’utile ; mais quand l’esthéticien tient déjà le beau, il n’a pas à chercher l’utile, sinon par surcroît et par une sorte de luxe à rebours. […] C’est dans la négation de l’égoïsme, négation compatible avec la vie même, que l’esthétique, comme la morale, doit chercher ce qui ne périra pas. […] Ces arts ne cherchent pas à créer la vie ou à paraître la créer, ils se bornent à prendre des produits tout faits de la nature, qu’ils ne modifient que très superficiellement et sans les soumettre à une réorganisation profonde.

268. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIV. »

et ne devons-nous pas honorer d’un regret et chercher encore sur quelques lyres étrangères cette inspiration poétique dont notre patrie fut animée vingt ans, à l’écho du malheur et de la gloire, au bruit de la liberté légale, et parmi tous les progrès du droit public, du travail et de la richesse ? […] Mon âme se confond à méditer sur ce torrent, que ma vue le troublée cherche en vain à suivre, aux bords étroits du précipice : mille vagues, dont la vitesse dépasse a toute pensée, se choquent et se combattent ; mille autres vagues les atteignent, et, entre l’écume et le bruit, disparaissent à mesure qu’elles arrivent. […] Pour cela même mon âme t’a cherché toujours dans le silence des solitudes. […] Cherchons ailleurs toutefois des perspectives plus hautes encore. […] Ne vois-tu pas comme elle cherche, et, tout ensemble inquiète et orgueilleuse, s’agite incertaine ?

269. (1890) Les princes de la jeune critique pp. -299

N’aura-t-il pas de conseil à donner aux jeunes qui cherchent et tâtonnent ? […] Cherchez le chasseur, ou le garde champêtre, ou le lièvre, dit la légende. […] Il est temps de chercher les goûts et les préférences de son esprit. […] Cherchez, parmi les contemporains, son auteur favori. […] Il est trouvé presque toujours ; mais on sent çà et là qu’il a été cherché.

270. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Post-scriptum sur Alfred de Vigny. (Se rapporte à l’article précédent, pages 398-451.) »

Les hommes ne peuvent ouvrir ce fruit divin et y chercher l’amande… » M.  […] Je suis presque avec vous tous, bientôt j’y serai mieux encore. » Et il m’écrivait le 7 mai 1829 : « Adieu, mon ami, si vous n’avez pas embrassé mon Victor sur les deux joues, j’irai vous chercher querelle. » Je n’ai nullement dessein de publier les lettres de M. de Vigny toutes remplies de compliments et d’éloges pour moi : mais, puisqu’il niait en 4 835 le droit et la légitimité de ma méthode critique, je me contenterai de lui opposer ce passage d’une de ses lettres, du 29 décembre  1829 (je venais d’écrire dans la Revue de Paris un premier article sur Racine) : « Je suis distrait, et outre cela il m’arrive presque toujours d’être en présence de mes amis ce qu’est un amant devant sa maîtresse, si aise de la voir qu’il oublie tout ce qu’il avait à lui dire. […] J’ai besoin de le répéter, parce que je viens de le relire : vous avez vraiment créé une critique haute qui vous appartient en propre, et votre manière de passer de l’homme à l’œuvre et de chercher dans ses entrailles le germe de ses productions est une source intarissable d’aperçus nouveaux et de vues profondes. » On peut rabattre tout ce qu’on voudra de l’éloge, mais M. de Vigny admettait évidemment cette méthode critique en 1829.

271. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Harmonies poétiques et religieuses — I »

Mais si l’on veut trouver le sentiment chrétien avec ses espérances, ses besoins, ses angoisses intimes, tel qu’il agite et ronge en ce moment bien des âmes, c’est à d’autres pièces qu’il faut s’adresser, véritables méditations de métaphysique religieuse, où le poète, seul avec lui-même, cherche, interroge, doute, passe de la défaillance à l’espoir, et le plus souvent, dès qu’il a entrevu la lueur, se prosterne au lieu de conclure. […] Il cherche un point dans les ténèbres, il tente toutes les voies pour trouver une issue. […] Et qui m’eût dit alors qu’un jour la grande image De ce Dieu pâlirait sous l’ombre d’un nuage, Qu’il faudrait le chercher en moi comme aujourd’hui, Et que le désespoir pouvait douter de lui ?

272. (1874) Premiers lundis. Tome II « La Revue encyclopédique. Publiée par MM. H. Carnot et P. Leroux »

Cette politique touche à la nôtre et à celle de la presse quotidienne par assez de points, et aussi elle en diffère assez sur quelques autres, pour que nous devions chercher à la faire connaître et à l’apprécier. […] La philosophie du XIXe siècle se cherche elle-même ; voilà déjà trois ou quatre fois en quinze ans qu’elle croit s’être trouvée et qu’elle va criant par les rues à la découverte avec la joie d’Archimède. Ces fréquentes mystifications ont dû rendre circonspects et le public qui s’est fatigué, et la philosophie qui se cherche encore.

273. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la bienfaisance. »

Il m’en a coûté de prononcer, qu’aimer avec passion, n’était pas le vrai bonheur ; je cherche donc dans les plaisirs indépendants, dans les ressources qu’on trouve en soi, la situation la plus analogue aux jouissances du sentiment ; et la vertu, telle que je la conçois, appartient beaucoup au cœur ; je l’ai nommé bienfaisance, non dans l’acception très bornée qu’on donne à ce mot, mais en désignant ainsi toutes les actions de la bonté. […] Celui qui par sa faute, ou par le hasard, a beaucoup souffert, cherche à diminuer la chance de ces cruels fléaux, qui ne cessent d’errer sur nos têtes, et son âme, encore ouverte à la douleur, a besoin de s’appuyer par le genre de prière qui lui semble le plus efficace. […] Almont ne pense point à faire valoir sa prudence en vous conseillant ; sans vous égarer, il cherche à vous distraire ; il vous observe pour vous soulager ; il ne veut connaître les hommes, que pour étudier comment on les console.

274. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVII. Conclusion » pp. 339-351

Ainsi, lorsque les personnages se cherchent à tâtons dans la nuit noire, se prennent les uns pour les autres, et que Lubin, croyant avoir affaire à Claudine, révèle à George Dandin la trahison d’Angélique, nous sommes en plein sur le terrain de la comédie italienne ; ces jeux nocturnes, ces échanges, ces méprises abondent dans les canevas des Gelosi. […] Derrière lui, on cherche maintenant à distinguer les représentants de cette tradition. […] La comédie erre longtemps, cherche et s’égare et se compromet à travers mille tentatives et mille aventures, se mêlant sur les tréteaux aux bouffonneries les plus grossières, avant de rencontrer le souverain artiste qui sache la fixer et la maîtriser, qui la retire de la cohue où elle se cache, qui la place sur un trône et lui élève un palais digne d’elle.

275. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre IX. L’avenir de la Physique mathématique. »

C’est ce que je vais chercher à expliquer. […] Faudra-t-il chercher à raccommoder les principes ébréchés, en donnant ce que nous autres Français nous appelons un coup de pouce ? […] N’avez-vous pas écrit, pourriez-vous me dire si vous vouliez me chercher querelle, n’avez-vous pas écrit que les principes, quoique d’origine expérimentale, sont maintenant hors des atteintes de l’expérience parce qu’ils sont devenus des conventions ?

276. (1887) Discours et conférences « Discours lors de la distribution des prix du lycée Louis-le-Grand »

Ne dites jamais, comme les mécontents dont parle le prophète d’Israël : « Nos pères ont mangé le raisin vert, et les dents de leurs fils sont agacées. » Votre part est la bonne, et je vois mille raisons de vous porter envie, non seulement parce que vous êtes jeunes et que la jeunesse est la découverte d’une chose excellente, qui est la vie, mais parce que vous verrez ce que nous ne pourrons voir, vous saurez ce que nous cherchons avec inquiétude, vous posséderez la solution de plusieurs des problèmes politiques sur lesquels nous hésitons parce que les faits n’ont point encore parlé assez clairement. […] Une sentence excellente est celle-ci : « Cherchez d’abord le royaume du ciel ; tout le reste vous sera donné par surcroît. » Dans une circonstance analogue à celle d’aujourd’hui, il y a quarante-trois ans, l’illustre M.  […] Mais il y a une chose sûre, c’est que, dans tous les états sociaux que vous pourrez traverser, il y aura du bien à faire, du vrai à chercher, une patrie à servir et à aimer.

277. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — Premier tableau » pp. 180-195

Monsieur Nichot, prêtez-moi votre paletot ; — monsieur Cascaret, prêtez-moi votre gilet ; — monsieur Poupardot, prêtez-moi votre cravate ; — monsieur Bidault, allez me chercher votre pantalon noir des dimanches ! […] Puis, en somme, on n’est pas une canaille parce qu’on cherche à se faire payer. […] Je m’en vais chercher le pantalon noir.

278. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Jules Levallois » pp. 191-201

Très apprécié de Guéroult, qui aima le talent comme les gens qui en ont, Jules Levallois fit régulièrement des articles ; mais le critique militant devint un jour un irrégulier et ce n’était pas étonnant : il se produisit en lui un grand changement, ou du moins une modification profonde… Il devenait ermite, et, au lieu de chercher les petites bêtes dans les œuvres littéraires où il y en a souvent beaucoup, il chercha dans les bois et il étudia les fourmis. […] III Ni l’un ni l’autre ne sont des misanthropes, des atrabilaires comme Rousseau, cet ermite contre le monde, « ce chien — disait Voltaire, pas toujours poli, — qui s’était mis dans le fond du tonneau de Diogène pour aboyer », mais qui, par habitude, aboyait encore à la lune dans le fond des bois ; Rousseau, qui s’est plus blessé au monde que le monde ne l’a blessé réellement ; Rousseau, bien moins un solitaire qui herborisait qu’un malade qui cherche des simples pour les mettre sur ses blessures.

279. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Erckmann-Chatrian » pp. 95-105

Quand l’invention est une outrance qui fait craquer le monde créé sous son absurdité puissante, et qui cherche l’émotion à tout prix, par toute voie, il faut la trouver, ou, soi-même, ou est perdu si on ne la trouve pas, cette émotion qui est le but, mais qu’il faut profonde et non pas vulgaire ! […] Il y a enfin dans Erckmann-Chatrian tout le contraire de ce qu’il cherche : — un homme de la réalité, de la lumière, du plein jour, un coloriste naïf et parfois vaillant, qui trémousse la couleur sur la palette et la jette sur sa toile avec une brutalité joyeuse et souvent heureuse. […] Mais dans le volume intitulé : Contes fantastiques, il y a cette lunatique griserie d’Entre deux vins ; il y a Crispinus ou l’Histoire interrompue, L’Oreille de la chouette, Le Combat de coqs, qui n’ont nullement le caractère fantastique, et où nous trouvons, ainsi que dans Les Fiancés de Grinderwald, la perle de ce volume, les qualités que nous avons cherché à caractériser dans Erckmann-Chatrian.

280. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre premier. De la louange et de l’amour de la gloire. »

Elle occupe de plus notre activité inquiète qui a besoin de mouvement, et qui cherche à se répandre au-dehors. […] Il est trop facile d’avoir des succès d’un moment, pour chercher à obtenir des succès plus pénibles. […] Ignorés pendant la vie, oubliés après la mort, moins ils ont cherché l’éclat et plus ils ont été grands.

281. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

Aussi le génie cherche-t-il sans cesse à dépasser la réalité, et nous ne nous en plaignons pas : l’idéalisme alors, loin d’être un mal, est plutôt la condition même du génie ; seulement, il faut que l’idéal conçu, même s’il n’appartient pas au réel coudoyé chaque jour par nous, ne sorte pas de la série des possibles que nous entrevoyons : tout est là. […] Du reste, l’art n’est pas le seul jeu qui, en se compliquant, devienne ainsi un travail ; tout jeu, dès qu’il est raisonné et cherche à produire un résultat donné, constitue lui-même un travail véritable, et c’est assurément un travail très absorbant pour un enfant que le jeu de la toupie, du bilboquet ou de la corde à sauter. […] Le plus souvent l’historien est comme le prophète après coup ; il cherche dans les mœurs, dans les lectures favorites, dans les circonstances de la vie les causes qui ont déterminé telle ou telle œuvre, et il ne s’aperçoit pas que toutes ces circonstances s’expliquent par les raisons mêmes qui ont produit l’œuvre : le génie intimement lié avec le caractère moral. […] D’où cette conclusion : « J’entreprends d’écrire l’histoire d’une littérature et d’y chercher la psychologie d’un peuple. » — Ces principes, dans leur généralité, sont justes, et ce but est légitime. […] Evidemment tous ces gens ne cherchent dans l’art qu’un délassement, ce que Pascal appelait un divertissement.

282. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

On y cherche en vain les graces & l’élégance, l’élévation & la chaleur du style. […] L’auteur ne cherchoit qu’entasser volume sur volume pour allonger l’ouvrage. […] Mais il n’y faut pas chercher l’histoire de tous les Ecrivains ecclésiastiques ; on n’y en trouve qu’une trentaine, & l’auteur finit à St. […] Son ouvrage est fort superficiel ; il y mêle trop d’histoire profane, & cherche trop souvent ces traits vifs & agréables qui sont déplacés dans un ouvrage sérieux. […] Il ne faut pas l’aller chercher non plus dans l’Abrégé de l’Histoire de l’Eglise, par du Pin, en quatre volumes in-12.

283. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre II. L’âme et le corps »

L’harmonie qu’il cherche est une certaine correspondance entre les allées et venues de son esprit et celles de son discours, correspondance si parfaite que, portées par la phrase, les ondulations de sa pensée se communiquent à la nôtre et qu’alors chacun des mots, pris individuellement, ne compte plus : il n’y a plus rien que le sens mouvant qui traverse les mots, plus rien que deux esprits qui semblent vibrer directement, sans intermédiaire, à l’unisson l’un de l’autre. […] Il ne faut pas croire que le poison soit allé chercher le raisonnement dans telles ou telles cellules du cerveau, ni par conséquent qu’il y ait, en tels ou tels points du cerveau, des mouvements d’atomes qui correspondent au raisonnement. […] Nous n’aurions pas la démonstration complète, tant s’en faut ; nous saurions du moins où il faut la chercher. […] Nous essayons de toutes les lettres de l’alphabet l’une après l’autre ; nous les prononçons intérieurement d’abord ; puis, si cela ne suffit pas, nous les articulons tout haut ; nous nous plaçons donc, tour à tour, dans toutes les diverses dispositions motrices entre lesquelles il faudra choisir ; une fois que l’attitude voulue est trouvée, le son du mot cherché s’y glisse comme dans un cadre préparé à le recevoir. […] Poussons ce raisonnement jusqu’au bout : supposons que mon discours dure depuis des années, depuis le premier éveil de ma conscience, qu’il se poursuive en une phrase unique, et que ma conscience soit assez détachée de l’avenir, assez désintéressée de l’action, pour s’employer exclusivement à embrasser le sens de la phrase : je ne chercherais pas plus d’explication, alors, à la conservation intégrale de cette phrase que je n’en cherche à la survivance des deux premières syllabes du mot « causerie » quand je prononce la dernière.

284. (1888) Poètes et romanciers

Pourquoi d’ailleurs y chercher une doctrine ? […] Faut-il lui en vouloir de n’en pas chercher l’occasion ? […] Dans quel genre disparu faut-il le chercher ? […] Son originalité est de n’en pas chercher. […] Sully-Prudhomme cherchait ailleurs sa voie.

285. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre premier. De la stérilité d’esprit et de ses causes »

On ne trouve pas, parce qu’on ne cherche pas : on ne sait pas chercher.

286. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Young a surtout cherché à donner à ses méditations le caractère de la tristesse. […] Mackenzie descend de son arbre, et cherche à rejoindre ses compagnons. […] Dira-t-on que les nouveaux pasteurs cherchent la gloire et la fortune ? […] Heureusement l’opinion du siècle qui commence cherche à prendre un autre cours. […] Le Pelletier qui connaissait tous les avantages de l’émulation cherchait tous les moyens de l’entretenir.

287. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Introduction. » pp. -

Quand vous observez avec vos yeux l’homme visible, qu’y cherchez-vous ? […] Vous regardez sa maison, ses meubles et son costume ; c’est pour y chercher les traces de ses habitudes et de ses goûts, le degré de son élégance ou de sa rusticité, de sa prodigalité ou de son économie, de sa sottise ou de sa finesse. […] Cherchons donc les données simples pour les qualités morales, comme on les cherche pour les qualités physiques, et considérons le premier fait venu ; par exemple une musique religieuse, celle d’un temple protestant. […] Il reste à chercher de quelle façon ces causes appliquées sur une nation ou sur un siècle y distribuent leurs effets. […] J’entreprends ici d’écrire l’histoire d’une littérature et d’y chercher la psychologie d’un peuple ; si j’ai choisi celle-ci, ce n’est pas sans motif.

288. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 321-384

J’allais y chercher le bon Dieu et j’y ai trouvé le diable sous la figure d’un ange. […] Le capitaine des sbires cherchait, de temps en temps, à l’aborder sur le seuil de la maison, et il lui adressait des compliments qui la faisaient rougir et fuir. […] Il fallut même aller leur chercher à boire comme à des personnes. […] Eh bien, après, nos murs seront nus contre le soleil et la pluie, il n’y aura pas d’ombre sur la porte, les oiseaux et les lézards s’en iront chercher leur plaisir ailleurs. […] Je suis bien vieux, j’ai plus de quatre-vingt-dix ans d’âge ; qui sait peut-être si le bon Dieu ne m’a laissé vieillir ainsi inutile à moi et au monde, que pour rendre témoignage pour les pauvres Zampognari contre quelques traits de plume de scribe, qui cherche des procès pour gagner son pain dans des paperasses, comme l’écureuil cherche la noisette dans la mousse en retournant les feuilles mortes ?

289. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

Quel homme aurait été chercher son épouse, quel fils sa mère, au pied de ces tribunes tumultueuses, entre les applaudissements et les huées de la place publique ? […] Les poésies conjugales de Vittoria Colonna ne cherchaient leur écho et leur gloire que dans le cœur d’un époux toujours adoré, le marquis de Pescaire ; les lettres de madame de Sévigné ne briguaient d’autre prix que la tendresse d’une fille. […] Elle se flatta même que ce jeune génie s’inclinerait devant le sien, qu’elle acquerrait plus facilement sur ce dictateur l’ascendant qu’elle cherchait à se créer sur des chefs de factions multiples, qu’elle serait l’Aspasie française de ce futur Périclès. Dans cette pensée, elle chercha avec anxiété les occasions de rencontrer le général Bonaparte et de l’éblouir par sa conversation. […] Il ne se contentait pas de la tenir à distance, il cherchait à l’humilier quand elle se présentait devant lui.

290. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

Et c’est pourquoi elle abandonne son mari et ses enfants pour s’en aller, toute seule, chercher la vérité, refaire son éducation intellectuelle et morale. […] L’aventurière elle-même est prise de doute et de découragement… Et, enfin, tous deux se noient au même endroit de la rivière où leur victime a cherché la mort. […] Déjà on nous a parlé des conflits de la morale religieuse ou civile avec l’autre, la grande, celle qui n’est pas inscrite sur des Tables ; et déjà, chez nous, on a opposé les droits de l’individu à ceux de la société ; et l’on a cherché le néo-christianisme, le vrai, le seul, la religion en esprit. […] Ce que Norah va chercher, Indiana le rencontre ; Indiana, épousant Ralph en présence de la nature et de Dieu, c’est Norah, après sa fuite, trouvant l’époux de son âme, le choisissant dans sa liberté  Et Lélia, c’est déjà Hedda Gabler. […] Et au surplus, pour en revenir au règlement présent de cette espèce de compte de « doit et avoir » ouvert entre les races, ne resterait-il pas à chercher si le piétisme d’Eliot, l’idéalisme contradictoire et révolté d’Ibsen, le fatalisme mystique de Tolstoï sont nécessairement quelque chose de supérieur soit à l’humanitarisme, soit au réalisme français ?

291. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre cinquième »

Ce besoin d’acteurs pleins d’âme et de feu pour des peintures vivantes, trahit le penchant croissant du poète à chercher l’effet du poème dans le secours de ceux qui l’interprètent. […] Ces attaques détournées contre les sévères conditions de l’ancien théâtre ne prouvaient qu’une chose : c’est que Voltaire cherchait des excuses pour y avoir manqué. […] C’est peut-être de la rhétorique maternelle ; j’y cherche vainement l’éloquence d’une mère. […] Au lieu de chercher ses sujets dans une profonde étude de l’histoire ou dans son propre fonds, il les recevait des passions ou des préjugés de ses contemporains. […] On trouve dans les tragédies de Voltaire des exemples de toutes les qualités du style : force, douceur, délicatesse, coloris poétique ; on y cherche un style.

292. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

Sans prétendre en faire l’histoire, je chercherai à signaler quelques-uns de ses caractères. […] Mais qu’on n’y cherche rien de plus. […]cherchera-t-elle ses données sinon dans la nature ? […] Les questions politiques n’intéressent plus ; nul maintenant ne cherche à les résoudre. […] Que de fois nous ne cherchons Dieu que pour nous-mêmes !

293. (1858) Cours familier de littérature. V « Préambule de l’année 1858. À mes lecteurs » pp. 5-29

De ce qu’il y a de plus ignominieux dans le métier des lettres : de chercher, selon leurs viles expressions, « du bruit pour de l’argent ». […] Si ces ennemis parviennent (comme je ne le crains que trop) à briser dans ma main cette plume de l’homme de lettres, mille fois plus respectable quand elle cherche le salaire par honneur que quand elle cherche la gloire par vanité, ces ennemis apprendront trop tard (et avec regret, je n’en doute pas) que ce qu’ils appellent la mendicité du travail n’était que le devoir de la stricte probité. […] Ce miel, assaisonné du bon sens de la Grèce, Ne cherchait le piquant qu’à travers la justesse.

294. (1861) Cours familier de littérature. XI « Atlas Dufour, publié par Armand Le Chevalier. » pp. 489-512

Le Chevalier, qui n’a cherché pendant toute sa vie d’autre illustration que l’estime, et d’autre récompense que l’utilité, l’utilité souvent ingrate, mais qui finit toujours par être appréciée à la mesure de ses services. […] Pourquoi prêtons-nous une main complaisante, et peut-être meurtrière, à l’Angleterre, qui va chercher des consommateurs d’opium de plus dans ces régions, vendre la mort, en vendant des vices, et se préparer des sujets de plus dans l’extrême Orient ? […] Mais si l’on considère de l’humanité son âme, son intelligence, sa moralité, sa destinée évidemment supérieure à cette vie et à cette mort entre lesquelles elle s’agite, sa connaissance de Dieu, l’hommage qu’elle rend à ce maître suprême de ses destinées individuelles ou collectives, la transition entre le fini et l’infini dont elle paraît être le nœud par sa double nature de corps et de pensée, sa conscience, faculté involontaire, révélation, non de la vérité, mais de la justice, son instinct évidemment religieux, son inquiétude sacrée qui lui fait chercher son Dieu, avant tout créature sacerdotale, chargée spécialement par l’Auteur des êtres de lui rapporter en holocauste les prémices de ce globe, la dîme de l’intelligence, la gerbe de l’autel, l’encens des choses créées, la foi, l’amour, l’hymne des créations muettes, la parole qui révèle, le cri qui implore, l’obéissance qui anéantit le néant devant l’Être unique, le chant intérieur qui célèbre l’enthousiasme, qui soulève comme une aile divine l’humanité alourdie par le poids de la matière, et qui la précipite dans le foyer de sa spiritualité pour y déposer son principe de mort et pour y revêtir d’échelons en échelons sa vraie vie, son immortalité dans son union à son principe immortel ! […] En un mot, la main d’un enfant, grâce à cet atlas mnémonique du monde, nous décrirait le cours du temps, et sa voix nous raconterait jusqu’à nos jours les destinées universelles de la terre ; vous auriez cherché à faire un simple géographe, et vous auriez fait un historien, un moraliste, un philosophe, un politique, un théologien universel, un homme enfin embrassant d’un coup d’œil toutes les faces de l’humanité.

295. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Baudelaire, Charles (1821-1867) »

Théophile Gautier Ce poète, que l’on cherche à faire passer pour une nature satanique, éprise du mal et de la dépravation (littérairement, bien entendu), avait l’amour et l’admiration au plus haut degré. […] Il leur faudrait chercher longtemps et beaucoup pour être simples… Baudelaire avait un esprit ainsi fait, et, là où la critique a voulu voir le travail, l’effort, l’outrance et le parti pris, il n’y avait que le libre et facile épanouissement d’une individualité. […] Cependant il a gardé jusqu’ici le silence, et j’en cherche vainement les raisons. […] Pour consoler d’Adam la race séculaire ; Vigneron du coteau que mûrit la colère Des soleils ténébreux sur la terre penchés, Chars des Icares morts sur les chemins cherchés, Martyrs dont le mépris des sots fut le salaire ; Chercheur du feu sacré des éternels enfers, Qui plongeas dans l’horreur des abîmes ouverts Sous les pas chancelants des mornes destinées ; Je t’aime, ô contempteur des communs paradis.

296. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre I : La science politique au xixe  siècle »

Cet éminent penseur n’était pas sans doute un philosophe, et il avoue lui-même qu’il avait peu de goût pour la métaphysique ; mais il possédait au plus haut degré et pratiquait merveilleusement la méthode philosophique : il avait cet esprit de réflexion et de généralisation qui, partout dans les faits particuliers, cherche et découvre les lois générales. […] Il va chercher jusqu’en Égypte le type de la vraie société ; et il pardonne à ce pays sa fausse religion en faveur de sa bonne constitution politique. […] Mais en même temps, il est passionné pour les institutions anglaises, défenseur énergique du Parlement contre la prérogative royale, partisan de la liberté de la presse, de la responsabilité des ministres ; il conseille enfin à l’aristocratie de son pays de se servir des institutions nouvelles, de s’y faire sa place et son rang, au lieu de s’armer contre elles et de chercher à ressaisir ses privilèges à l’ombre du despotisme restauré. […] Mais tandis que les sectes et les écoles se partageaient comme je viens de le dire, quelques esprits élevés et indépendants cherchaient la vérité à leurs risques et périls, dans des voies libres et particulières, auxiliaires plutôt que soldats des différentes opinions que nous venons de résumer.

297. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le comte Gaston de Raousset-Boulbon »

L’histoire n’eût pas écrit le mot sublime : « Ce qui fait de Colomb un grand homme, ce n’est pas d’avoir découvert l’Amérique, c’est d’être parti la chercher !  […] Vus de cette hauteur, de ces cinq années passées à chercher une fortune pour la France et pour lui, les autres détails de cette biographie paraissent insignifiants, si attachants, si curieux qu’ils puissent être, et tant on est enlevé dans une sphère supérieure à ces détails ! […] C’est toujours dans leurs correspondances qu’on doit chercher les hommes, même ceux qui, par état et nécessité, font des livres. […] Était-ce bien la peine de le chercher ailleurs ?

298. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Sainte Térèse » pp. 53-71

Nous chercherions sans les trouver son esprit, son âme, et ce parfum d’un corps transfiguré, — comme son esprit et son âme, — ce parfum immortel qu’exhale encore ce qui nous reste d’elle, nous affirment ceux qui l’ont respiré. […] Nous ne les chercherions même pas. […] Aussi tous les deux, après cette lecture, s’en étaient-ils allés chercher le martyre au pays des Maures. […] On cherche en vain dans cette aristocratique religieuse agenouillée, sous ce visage, à l’ovale si pur, que l’austère et strict bandeau fait paraître plus pur encore, la mystique dont l’âme, à force d’énergie, détruisit le corps, la paralytique aux os écrasés et aux nerfs tordus, cet amas sublime d’organes dissous sur lesquels flamboyait l’Extase, l’ombre de fille consumée qui vécut deux trous ouverts au cœur, les deux trous par lesquels le glaive du Séraphin avait passé, et si physiquement et si réellement qu’après sa mort, sur le cœur même, on put constater la blessure.

299. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VI. M. Roselly de Lorgues. Histoire de Christophe Colomb » pp. 140-156

Roselly de Lorgues est un chrétien qui a fait déjà des livres chrétiens ; ou a-t-il trouvé dans l’homme prodigieux qu’il raconte aujourd’hui une démonstration que d’abord il ne cherchait pas ? […] L’éternelle consigne du Protestantisme et de la Philosophie est d’ôter tout doucement de l’histoire le merveilleux, le mystérieux, le religieux (ces choses synonymes), comme il faut les ôter de l’art, comme il faut les ôter de la vie, et déjà on avait cherché à expliquer, à humaniser, à naturaliser Colomb, au point qu’il n’était presque plus un grand homme. […] « Déjà depuis plus d’un demi-siècle, dit M. de Lorgues, le Portugal cherchait un accroissement par mer et il avait augmenté son domaine de plusieurs îles situées, loin des rivages connus, au sein de l’Océan. » Comme tant d’autres que l’histoire a désignés, mais dont elle a oublié les noms, Colomb aurait eu des velléités, des aperceptions, des pressentiments, des mouvements d’aiguille aimantée au cerveau, des plans même, si l’on veut, mais il n’aurait eu ni le courage, ni la foi, ni l’espérance, ni la patience, ni l’importunité sublime qui firent de sa vie un apostolat. […] Avec une sagacité singulière et une puissance de rapprochement qui n’oublie rien et centralise tout, il est allé chercher jusque dans le nom de Christophe Colomb (Christum ferens) et la légende du géant saint Christophe, qui passe le Christ sur ses épaules, à travers les eaux, des analogies prophétiques, comme la tradition catholique a toujours permis à l’écrivain d’en dégager… Par-là, il a complété le profond mysticisme de son œuvre.

300. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IX. L’abbé Mitraud »

Voilà ce que nous nous disions et ce que nous avons vainement cherché pourtant dans le livre qui nous occupe. […] D’un autre côté, vainement l’Église lui a-t-elle appris cette charité chrétienne qui a suffi au monde depuis l’Évangile, il ne s’en est pas moins laissé mordre par la brebis enragée de la Philanthropie moderne, et comme l’école tout entière du dix-huitième siècle qu’il essaie de combattre, mais qui le tient sous elle comme un vaincu, il se préoccupe, à toute page de son livre philanthropique, du droit de chaque homme vis-à-vis de la société, et il va chercher ce droit individuel dans des notions incomplètes ou fausses, pour l’exprimer dans de nuageuses définitions que le dix-huitième siècle n’aurait certes pas repoussées ! […] Enfin, comme tous les utopistes de ce temps et de tous les temps, qui ont renversé le grand aperçu chrétien, M. l’abbé Mitraud semble prendre la société pour un état définitif, au lieu de la concevoir comme un état de passage, et alors la question devient pour lui ce qu’elle fut, par exemple, pour Fourier, Saint-Simon et tant d’autres réformateurs, c’est-à-dire — qu’elle consiste à trouver des institutions qui établissent le ciel sur la terre, — ce qu’on cherchera probablement longtemps encore, — au lieu de faire monter la terre dans le ciel, comme la Religion nous l’enseigne, et, dans son affranchissement des âmes, sait l’exécuter tous les jours ! […] … Oui, pourquoi ce livre où on cherche en vain ces idées fortes, sensées, pratiques, allant au cœur de la réalité, les idées enfin d’un prêtre catholique qui vient, après les philosophes, parler société à son tour ?

301. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Monselet »

Ces inventeurs, sans réflexion, n’ont pas vu ou n’ont pas voulu voir que, dans toute critique digne de ce nom, se trouvait précisément l’emploi des deux facultés à l’aide desquelles l’esprit invente : l’observation qui cherche et l’intuition qui devine. […] Ils n’en ont pas cherché si long ! […] malgré des travaux si variés et auxquels personne plus que nous n’est disposé à rendre justice, peut-être Monselet n’en est-il encore qu’à la période des esprits qui ont assez de sève pour fermenter longtemps et qui cherchent la voie définitive, que la Critique, si elle est sagace, doit les aider à découvrir. […] A part encore la moralité, qui tient pourtant plus à l’intelligence que ne le croient des penseurs vulgaires, il faudrait que, dans un intérêt d’un autre ordre, Charles Monselet s’essuyât des marques laissées sur lui et sur la naïveté de son talent par ce siècle dans lequel il a cherché ses modèles, et avec lequel il a trop intimement vécu.

302. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Le Comte de Gobineau »

L’auteur, qui n’en a pas cherché le titre dans la lune, mais à côté, est un diplomate pourtant, et des plus positifs, de notre globule terraqué. […] … Pour peu qu’on plonge et qu’on pénètre dans tous les endroits de son roman et qu’on cherche à l’éclairer par les idées morales de l’auteur, on ne trouve guères, sous des formes élégantes, qu’un stoïque en lui (voir son personnage de Gandeuil). […] Les créatures inférieures, ténébreuses, misérables, imbécilles, brutales et perverses, qui sont le fond commun de l’humanité et se mêlent au jeu de son action, et le troublent et le souillent ou l’empêchent, je les cherche en vain dans ce livre, où je ne vois que des étoiles… Livre plus orageux et plus passionné, il est vrai, mais aussi chimérique, aussi fabuleux que le livre de l’Astrée, et, comme on ne s’intéresse pas à l’impossible, tout aussi vide d’intérêt que lui ! […] Je crois que là est la vraie pente, la vraie vocation de cet esprit qui s’est plus cherché que trouvé en ces tâtonnements de talent qui, pour les autres, auraient été des réussites.

303. (1716) Réflexions sur la critique pp. 1-296

L’autre espece de public, qui par son petit nombre à peine en mérite le nom, ne cherche dans les contestations littéraires que l’éclaircissement de la vérité. […] Je n’y cherche point à devenir physicien, ni astronome, ni poëte, ni orateur. […] Pourquoi chercher la question au-delà des faits ? […] Ils cherchent donc un sens mystérieux à quelque prix que ce puisse être ; et à la faveur d’une allégorie forcée, ils tournent en beautez profondes les défauts mêmes qui sautent aux yeux. […] Il faut que chaque lecteur en juge par lui-même, et qu’il cherche avec moi les raisons de la censure des uns, et de l’approbation des autres.

304. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Arrivons à la dernière question, à la question personnelle, et cherchons en nous tout ce qui peut expliquer cet inexplicable déchaînement d’hostilités. […] Nous allions chercher, au Palais-Royal, l’adresse de Sainville, nous lui écrivions ; il nous accordait un rendez-vous. […] J’allai chercher le manuscrit et je lus une partie du premier acte. […] Lemoine-Montigny, à la date d’avril 1852, me parlant de la fraîcheur d’un acte au Bas-Meudon, et qui me rappelle vaguement que nous avons cherché une pièce dans notre premier roman. […] Nous entrevoyions si peu le théâtre de la réalité, que dans la série des pièces que nous voulions faire, nous cherchions notre théâtre à nous, exclusivement dans des bouffonneries satiriques et dans des féeries.

305. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Si curieux que le poète comique puisse être des ridicules de la nature humaine, il n’ira pas, je pense, jusqu’à chercher les siens propres. […] L’esprit, amoureux de lui-même, ne cherche plus alors dans le monde extérieur qu’un prétexte à matérialiser ses imaginations. […] Il y a surtout dans le rire un mouvement de détente, souvent remarqué, dont nous devons chercher la raison. […] On ne cherche plus à s’adapter et à se réadapter sans cesse à la société dont on est membre. […] Les vagues s’entrechoquent, se contrarient, cherchent leur équilibre.

306. (1874) Premiers lundis. Tome II « Achille du Clésieux. L’âme et la solitude. »

M. du Clésieux, pour ceux même qui ne connaîtraient de lui que son volume, est évidemment une de ces âmes rares, mais non pas introuvables en nos temps, un de ces jeunes hommes qui, de bonne heure, ont cherché le port dans l’antique croyance. […] Au milieu de ces œuvres pratiques et dans les intervalles solitaires, sa pensée a quelquefois cherché, par instinct, la mélodie.

307. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre V. Suite du Père. — Lusignan. »

Voltaire lui-même ne se défend pas d’avoir cherché son succès dans la puissance de ce charme, puisqu’il écrit, en parlant de Zaïre : « Je tâcherai de jeter dans cet ouvrage tout ce que la religion chrétienne semble avoir de plus pathétique et de plus intéressant 17. » Un antique Croisé, chargé de malheur et de gloire, le vieux Lusignan, resté fidèle à sa religion au fond des cachots, supplie une jeune fille amoureuse d’écouter la voix du Dieu de ses pères : scène merveilleuse, dont le ressort gît tout entier dans la morale évangélique et dans les sentiments chrétiens : Mon Dieu ! […] Si Lusignan ne rappelait à sa fille que des dieux heureux, les banquets et les joies de l’Olympe, cela serait d’un faible intérêt pour elle, et ne formerait qu’un dur contresens, avec les tendres émotions que le poète cherche à exciter.

308. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Préface de l’auteur »

Pour le savoir, nous prîmes les formules de Lorentz terme par terme, et nous cherchâmes à quelle réalité concrète, à quelle chose perçue ou perceptible, chaque terme correspondait. […] Si donc nous nous guidons sur elle, si nous allons chercher au temps des caractères comme ceux de l’espace, c’est à l’espace que nous nous arrêterons, à l’espace qui recouvre le temps et qui le représente à nos yeux commodément : nous n’aurons pas poussé jusqu’au temps lui-même.

309. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Cette idée, il la cherche tout entière dans Aristophane, dont il creuse la comédie à une profondeur métaphysique qui effraye. […] Quant à nous, qui aimons Molière, laissons-nous aller de bonne foi aux choses qui nous prennent par les entrailles, et ne cherchons point de raisonnements pour nous empêcher d’avoir du plaisir . […] Elle enverrait Galopin chercher un atlas, et tout le monde serait bientôt convaincu et en paix. […] Si Uranie prétend que l’auteur du Tartuffe, de L’Avare et du Misanthrope est un grand comique, un grand poète, et si William Schlegel ou Jean-Paul le conteste, est-ce l’Esthétique de Hegel que Galopin ira chercher pour décider la question ? […] Ne cherchez pas de raisonnements pour vous empêcher d’avoir du plaisir, et quand vous lisez une comédie, regardez seulement si les choses vous touchent.

310. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

Un grand goût de solitude le saisit ; il alla plus fréquemment chercher le silence sans trouver l’oubli dans la vallée alors presque sauvage de Vaucluse. […] » XII Pétrarque partit enfin pour Rome au moment où Laure, touchée de sa constance, cherchait à le retenir à son tour par quelques innocentes prévenances, comme si elle eût été attristée de perdre son esclave ; mais déjà Pétrarque lui-même avait cherché, dans une liaison moins platonique, une diversion à la passion qui le dévorait. […] Étienne Colonna, sénateur de Rome, c’est-à-dire dictateur en l’absence des papes, vint le chercher avec une forte escorte de cavalerie, l’emmena à Rome, et le logea près de lui au Capitole. […] « Allons chercher au ciel ce que nous ne pouvons plus trouver sur la terre !  […] La pensée me souleva dans cette partie du ciel où vit celle que je cherche et que je ne retrouve plus sur la terre.

311. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Ce sont peut-être les seules lettres vraiment pathétiques tombées de son cœur pendant toute sa vie ; dans toutes les autres, comme dans ses Mémoires, il cherche l’apparat et la phrase, tout en feignant de les négliger. Ici il cherche le cœur et il y arrive bien plus sûrement. […] Au fond, je ne cherche qu’à me tromper ; je ne vis point où je suis ; j’habite au-delà des Alpes auprès de vous. […] « Chère amie, je vais vous chercher, je vais vous ramener avec moi à Rome ; ambassadeur ou non, c’est là que je veux mourir auprès de vous. […] Ce n’est pas là qu’il faut chercher son génie, c’est là qu’il faut chercher ses petitesses.

312. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre onzième »

Je chercherai sincèrement les motifs de cette admiration ; mais, je le déclare d’avance : entre ceux qui aiment J. […] Se chercher n’est guère plus aisé. Les plus sincères s’y trompent et ne se cherchent pas toujours où ils se trouveraient. […] Il ne se cherche pas, il se fuit. […] Lire Jean-Jacques Rousseau sera toujours chercher une tentation.

313. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Il chercha à rentrer dans le monde, et bientôt il se trouva tout au milieu. […] Il ne faut peut-être point chercher ailleurs la cause de la demi-fortune de Lassay et de ce qu’il resta toujours à moitié chemin de son ambition. […] La différence toutefois, c’est qu’il était arrivé à cette période finale où l’on cherche à se distraire de sa douleur ; il n’était plus dans celle où on la veut nourrir en silence et honorer. […] La maîtresse en était absente, et, en la remerciant de l’hospitalité donnée en son nom, il lui écrivait avec un vif sentiment de la nature italienne : Vous ne m’aviez point dit assez de bien de Bagnaia, madame ; c’est le plus aimable lieu du monde que j’aie jamais vu ; on y trouve en même temps une belle vue, de grands arbres aussi verts qu’en France et qu’il ne faut point aller chercher, et des quantités de fontaines qui vont quand les maîtres n’y sont point : jamais ordre n’a été plus inutile que celui que vous aviez donné au jardinier de les faire toutes aller ; elles n’attendent pas vos ordres pour jeter des torrents de la plus belle eau du monde. […] Paris y cherchait un contraste ou un à-propos : Armand Marrast et Lassay.

314. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

Telle est la vie secrète d’un esprit curieux, tourné au raisonnement, qui se possède par méthode philosophique, et qui veut posséder de même tout ce qui l’environne… Qui voudrait à tout moment s’assurer qu’il agit par raison, et non par passion et par humeur, perdrait le temps d’agir, passerait sa vie à anatomiser son cœur, et ne viendrait jamais à bout de ce qu’il chercherait. […] Celui-ci aurait voulu que le jeune prince fît face à l’orage, qu’il demeurât à la tête de l’armée jusqu’à la fin de la campagne, qu’il cherchât à prendre quelque revanche sur la fortune ; il le lui disait non plus sur un ton de directeur spirituel et de précepteur, mais sur le ton d’homme d’honneur et de galant homme qui sent la générosité de conduite dans tous les sens : Quand un grand prince comme vous, Monseigneur, ne peut pas acquérir de la gloire par des succès éclatants, il faut au moins qu’il tâche d’en acquérir par sa fermeté, par son génie et par ses ressources dans les tristes événements. […] Il lui recommande surtout en toute occasion « de chercher au-dehors le bien public autant qu’il le pourra, et de retrancher les scrupules sur des choses qui paraissent des minuties ». […] Le duc de Bourgogne, en disparaissant dans sa fleur, est resté une de ces espérances confuses et flatteuses que chacun a pu ensuite traduire et chercher à interpréter en son sens. […] Mais alors, et sans qu’il fût besoin de plus d’information, tous les gens sensés et honnêtes, les Fénelon, les Vauban, les Catinat, voient les défauts et cherchent, chacun de son côté, les remèdes dans des contrepoids, et dans le contrepied de ce qui est.

315. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Il est amoureux, il est fidèle, dit-il, mais ce n’est point en vertu d’un téméraire espoir : Que la terre à mes pieds s’ouvre pour m’abîmer, Si je cherche en l’aimant que le bien de l’aimer ! […] Il ne faudrait pourtant pas voir là-dedans une retraite par désespoir, un acte de sacrifice comme on le raconte d’un Rancé ou d’un Comminges : Maucroix n’avait point une si grande fermeté ni élévation de sentiments ; en pensant au canonicat, il cherchait une vie agréable, un arrangement honnête et facile, et la suite de ses relations avec la marquise de Brosses le prouva trop bien. Cependant, disons à son honneur que lorsque la marquise, ayant épuisé ses coquetteries à la Cour et en tous lieux, délaissée de son mari, frappée dans sa beauté, se voyant malade et dépérissante, cherchait un lieu où s’abriter, ce fut à Reims, chez MM. de Maucroix, le nôtre et son frère, qu’elle fut recueillie, qu’elle reçut les derniers soins et qu’elle mourut, aussi bien que sa mère, qui y était morte également. […] Je continue : Il rit de ces prudents qui, par trop de sagesse, S’en vont dans l’avenir chercher de la tristesse             Et des soucis cuisants : Le futur incertain jamais ne l’inquiète, Et son esprit content, toujours en même assiette, Ne peut être ébranlé, même des maux présents. […] S’il avait vécu à Paris, sa plume élégante et qui cherchait des sujets où s’employer, eût peut-être aspiré à l’histoire, l’histoire écrite en beau style et traitée comme on l’entendait alors : « Je me serais hasardé à composer une histoire de quelqu’un de nos rois. » Mais vivant en province, loin des secours et des riches dépôts, il finit par s’accommoder très bien de cet obstacle à un plus grand travail, et sauf quelques heures d’étude facile dans le cabinet, il passa une bonne partie de sa vie à l’ombre dans son jardin, au jeu, aux agréables propos et en légères collations.

316. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

Elle était sur le seuil ; elle alla chercher son ombrelle ; elle l’ouvrit. […] Elle cherche des auxiliaires à son effort de sagesse ; elle en cherche et en soi et auprès de soi. […] Pourquoi mériter qu’on vous dise : « Moraliste, vous savez tout, mais vous êtes cruel. » Le livre, certes, a une moralité : l’auteur ne l’a pas cherchée, mais il ne tient qu’au lecteur de la tirer, et même terrible. […] La vérité d’ailleurs, à ne chercher qu’elle, elle n’est pas tout entière et nécessairement du côté du mal, du côté de la sottise et de la perversité humaine.

317. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite) »

La haine monacale qu’il avait encourue dès son arrivée et qui avait aussitôt senti en lui une proie et une victime, les dénonciations dont il s’était vu l’objet, et qui pouvaient recommencer toujours, ne lui permettaient pas de penser à se fixer dans ce pays d’inquisition : il cherchait en idée un asile ailleurs pour un avenir plus ou moins prochain, et il n’en trouvait nulle part un à son gré. Dans son mélange de rêverie et d’épreuve, de réalité et de chimère, il songeait par moments à la Corse dont Rousseau était censé faire la Constitution et qui semblait sur le point de se régénérer : « En un mot, cher ami, je cherche un pays où je n’entende point le peuple se plaindre du gouvernement, où l’on puisse parler avec plaisir et des lois et de leur exécution, où l’étranger n’ait rien à craindre des citoyens, ni ceux-ci de leurs régisseurs. […] Je ne cherche à connaître ni la nature trop vaste pour ma courte durée et ma faible vue, ni les hommes trop remuants et trop impénétrables pour un être qui ne tend qu’au repos. […] J’ai pourtant chéri la vertu : je ne crois pas avoir fait de mal à personne, pas même à mes ennemis ; j’ai toujours cherché les gens de bien et fui les méchants. […] Ducis, lui, ne cherchait pas.

318. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XIII »

Elle-même, répondant au notaire, qui cherche à la deviner, lui explique clairement son énigme. […] Mais, par l’entremise vigilante et avisée du notaire et par la rouerie d’un valet qui cherche fortune en fouillant dans les secrets de ses maîtres, le billet révélateur tombe entre les mains de la princesse Georges. […] Voici venir M. de Terremonde qui cherche sa femme. […] » — Parce qu’il ne lui convient pas que sa femme vienne, dans sa maison, chercher son amant. […]Cherchez », lui crie-t-elle.

319. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — II. » pp. 494-514

Lui, l’observateur intègre et rigoureux, qui excellait à approfondir, à analyser et à décrire une situation politique, et à chercher les racines des choses bien au-dessous des surfaces, il n’est pas douteux que, s’il avait vécu jusque-là et s’il eût conservé jusqu’à la fin sa fermeté de pensée, il eût plus d’une fois froncé le sourcil et remué la tête aux discours de ceux qui se seraient félicités devant lui d’avoir à jamais conquis et de posséder pleinement et sûrement le régime tant souhaité. […] Ce qui frappe Mallet aux diverses époques de notre Révolution, surtout pendant la période qui suit la Terreur, et au lendemain des nouvelles rechutes (telles que le 13 Vendémiaire, le 18 Fructidor), c’est l’absence complète d’opinion et d’esprit public, dans le sens où on l’entend dans les États libres : L’esprit public proprement dit, écrit-il le 28 janvier 1796, est un esprit de résignation et d’obéissance ; chacun cherche à se tirer, coûte que coûte, c’est-à-dire par mille bassesses infâmes, de la détresse générale. […] C’est qu’à cette date il n’avait plus rien à apprendre sur les princes émigrés et sur leurs irrémédiables chimères, et qu’il pressentait que la solution prochaine, même quand elle produirait un roi et un maître, ne l’irait pas chercher de leur côté. […] Nul, on l’avouera, n’a mieux connu et plus expressément décrit la maladie sociale de son temps que Mallet, et on croirait, par endroits, qu’il n’a fait que décrire celle du nôtre, celle de ce matin : c’est que, sauf de très légères variantes de surface, c’est bien la même maladie qui, après cinquante ans, nous travaille encore et cherche son issue ; elle la cherchera longtemps.

320. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Un symbole »

Loin de puiser au fond d’eux-mêmes les forces nécessaires pour résister à l’anéantissement, et de ne chercher que dans la virilité purement humaine le remède nécessaire aux désastres, ils s’en remirent à la pitié infinie de leur Dieu et firent un vœu. […] Ce que vous cherchez à éteindre dans la population en masse de Paris, c’est ce que vous appelez, ce que le parti militant du catholicisme appelle : « la pestilence révolutionnaire ». Ce que vous cherchez à revivifier dans sa conscience, c’est la foi catholique. […] ) Vous ne bâtissez pas des églises pour le plaisir de faire des églises, vous ne faites pas de pèlerinage pour le plaisir de faire des pèlerinages ; vous cherchez à faire la guerre à l’esprit moderne. […] Au fond de lui-même, il cherche de sa main décharnée à ressaisir avidement cette foule indifférente pour en refaire sa chose.

321. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

On doit reconnaître que le duc de Ferrare, à cette époque, cherchait sincèrement à le guérir de ses imaginations, derniers assauts de son mal, en lui procurant les distractions propres à évaporer ses songes. […] Il faut peut-être chercher la raison de cette omission dans la nature de son talent, qui avait plus d’enchantement que de vérité, et plus d’éclat que de tendresse. […] Cependant Tancrède, que le hasard conduit, va la chercher loin des lieux qui la cachent. […] « Si le vent murmure à travers les feuilles, si quelque oiseau, quelque bête sauvage agitent les rameaux, il croit entendre son amante : il la cherche, et soupire après l’avoir cherchée en vain. […] Je cherchai ensuite ce passage et le trouvai presqu’au commencement du dialogue.

322. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVe entretien. Ossian fils de Fingal »

Voilà la vérité sur la nature de ces monuments ; cherchons-la maintenant dans ces monuments eux-mêmes. […] C’est ici que reposent leurs cendres, Cuchullin, et ces deux ifs solitaires, nés sur leurs tombes, cherchent, en s’élevant, à unir leurs rameaux. […] Il combattit ; les étrangers prirent la fuite : il cherchait partout la mort dans la mêlée ; mais quel bras pouvait la donner au puissant Connal ? […] Ses yeux bleus le cherchaient et se fixaient tendrement sur lui ; elle fit des vœux dans son âme pour le bonheur du chef de Morven. […] « Tel je fus dans mon jeune âge ; mais toi, Oscar, imite la vieillesse de Fingal ; ne cherche jamais le combat : s’il se présente, ne l’évite jamais.

323. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

. — est pour beaucoup dans cette impression inquiétante ; mais il y a autre chose encore, et c’est pour ne pas le savoir et ne pas le chercher que tant de personnes n’arrivent pas à une compréhension approfondie de la Gœtterdaemmerung. […] Le dix-huitième siècle subit une disposition intellectuelle propre : mais je cherche vainement une œuvre littéraire qui l’ait exprimée. […] Il chercha la forme idéale d’une poésie purement émotionnelle, mais indiquant la raison des émotions en même temps qu’elle les traduisait. […] Laissera-t-on que je cherche, dans quelques œuvres littéraires récentes, les exemples pareils d’une littérature wagnérienne ? […] Malten (Brünnhilde) a une voix superbe et joue avec passion ; Gudehus (Siegfried) nous a surtout plu, il cherche à éviter tout ce qui est tradition d’opéra, et joue simplement et noblement.

324. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « Remarques finales. Mécanique et mystique »

Elle cherche le motif de chacune des prescriptions, c’est-à-dire son contenu intellectuel ; et comme elle est systématique, elle croit que le problème est de ramener tous les motifs moraux à un seul. […] On serait ainsi arrivé à la racine même de la morale, que cherche vainement le pur intellectualisme : celui-ci ne peut que donner des conseils, alléguer des raisons, que rien ne nous empêchera de combattre par d’autres raisons. […] Mais ce n’étaient là que des sociétés embryonnaires, et le philosophe ne doit pas plus y chercher les tendances essentielles de la vie sociale que le naturaliste ne se renseignerait sur les habitudes d’une espèce en ne s’adressant qu’à l’embryon. […] On cherche de moins en moins à conquérir pour conquérir. […] Est-ce en vain, cependant, qu’on cherche à la surmonter ?

325. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre premier. — Une leçon sur la comédie. Essai d’un élève de William Schlegel » pp. 25-96

Legrand lui-même, sous le nom de Geniot, s’efforçant d’escalader le Parnasse, rencontre Thalie qui cherche précisément un poète. […] Zacorin, devenu échanson, cherche un moyen de la substituer à l’anneau royal. […] Nous n’en sommes encore qu’à chercher un genre comique national, sans l’avoir véritablement trouvé. […] Le poète n’est plus dominé par une verve joyeuse, mais il cherche la gaieté dans les objets mêmes qu’il présente . — Septième leçon. […] Les personnages sensés de la pièce, le maître de la maison et son frère, la fille et son amant, et jusqu’à une servante qui ne sait pas le français, tous cherchent à se faire honneur de ce qu’ils ne sont pas, de ce qu’ils n’ont pas et de ce qu’ils ne savent pas, comme de tout ce qu’ils cherchent à ne pas être, à ne pas avoir et à ne pas savoir.

326. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Maintenant Saint-Point est une barque flottante à tous les vents, engagée à mes créanciers, qui peuvent m’y chercher tous les mois, et je la radoube grâce à mes amis, tous les jours, pour gagner un port aventuré. […] La richesse est souvent un embarras pour l’écrivain, une énigme pour le lecteur ; on s’y retrouvait, mais il fallait chercher son chemin. […] Qu’en silence adorant ta mémoire si chère, Je l’invoque en mes jours de faiblesse et d’ennui ; Tel en sa sœur aînée un frère cherche appui, Tel un fils orphelin appelle encor sa mère. […] Je vous quittai avec douleur quand il me fallut aller rejoindre mon poste diplomatique hors de France ; mais l’idée ne me vint jamais de chercher à vous engager dans cette même carrière positive ou dans une autre. […] Mais ce calme, qui est dû surtout à l’absence des maux et à la comparaison du présent avec le passé, s’affaiblit en se prolongeant, et devient insuffisant à l’âme ; il faut, pour achever sa guérison, qu’elle cherche en elle-même et autour d’elle d’autres ressources plus durables.

327. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

Moïse, pour l’autel, cherchait un statuaire ; Dieu dit : « Il en faut deux ;  » et dans le sanctuaire Conduisit Oliab avec Béliséel : L’un sculptait l’idéal et l’autre le réel46. […] On a souvent répété que l’art, en devenant plus réaliste, devait se matérialiser ; ce n’est pas exact, le réalisme bien entendu ne cherche pas à agir sur nous par une sensation directement agréable, mais bien par l’éveil de sentiments sympathiques. […] Aussi l’art réaliste est-il plus difficile que celui qui cherche à éveiller l’intérêt par le fantastique. […] Il cherche des effets, et tout effet qui apparaît comme cherché se trouve par là même manqué. […] ) Hugo décrit le bois où Cosette va chercher de l’eau : « Un vent froid de la plaine.

328. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 451-455

Cependant prenez la peine de chercher le Livre de cet Auteur si indignement & si injustement avili. […] « Ensuite, si vous lisez ce petit Ouvrage, vous serez étonné de n’y trouver qu’un homme raisonnable, humain, philosophe même, qui combat un préjugé, qui pourroit avoir tort dans le fond, sans qu’il fût possible de lui faire le moindre reproche dans la forme ; enfin, qui n’a point cherché à justifier cette abominable catastrophe dont on le suppose le panégyriste, qui a tenu, à ce sujet, le langage d’un cœur compatissant & d’un esprit éclairé.

329. (1763) Salon de 1763 « Sculptures et gravures — Falconet » pp. 250-251

Il cherche dans les yeux de sa statue la confirmation du prodige que les dieux lui ont promis. […] Il y pose légèrement le dos de sa main gauche ; il cherche si le cœur bat ; cependant ses yeux attachés sur ceux de sa statue attendent qu’ils s’entrouvrent.

330. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre premier. Les fonctions des centres nerveux » pp. 239-315

Cherchons quelle est cette première place dans l’esprit, et, par contrecoup, nous pourrons conjecturer peut-être quelle est cette première place dans le cerveau. […] « Posées toutes les deux sur le plancher, la première s’enfuit aussitôt et cherche à se cacher. […] Au bout d’un temps, elle gagne la surface de l’eau et cherche à s’y maintenir pour respirer; mais, tout point d’appui lui manquant, elle s’épuise en efforts pour se soutenir. […] Au moment où je la place dans le bocal, elle coule complètement à fond comme une masse inerte, sans chercher à nager. […] L’animal reste tranquillement au fond du bocal, sans chercher à gagner la surface pour respirer, sans témoigner le moindre malaise.

331. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre III. Le lien des caractères généraux ou la raison explicative des choses » pp. 387-464

Il faut tâcher de savoir en quoi elle consiste, comment nous la découvrons, où nous devons la chercher. […] Cherchons maintenant en quoi consiste cet intermédiaire, lorsqu’il s’agit, non plus de relier une propriété à un objet individuel, mais de relier une propriété à une chose générale. […] Il nous suffit que le composé soit donné ; nous ne cherchons pas pourquoi il est donné. — Les choses ne se passent pas ainsi quand il s’agit d’un composé réel. […] Dès lors, il y aura lieu de chercher à connaître les conditions de ces variations ; car il ne saurait y avoir d’effet sans cause. […] Cela posé, ne pourrait-on pas chercher ces éléments et ces conditions ?

332. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « M. Denne-Baron. » pp. 380-388

En voici le commencement : En vain mes yeux, levés vers la double colline,         Cherchent le pin harmonieux Qui, beau de vingt printemps, croît, fleurit et domine         Sur le vallon silencieux. Je prête en vain l’oreille à son léger murmure,         Son léger murmure a cessé ; De son front, dans les cieux, je cherche la verdure,         Son front des cieux est effacé. […] Ainsi, fils d’Apollon, de ta lyre divine         Je cherche les accords touchants Mais, humides encor du lait de Mnémosyne,         Tes lèvres ont cessé leurs chants… Denne-Baron lui-même qu’était-il, et quel rôle pourrait-on lui assigner en le nommant dans une histoire de la poésie française au xixe  siècle ?

333. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre II. De l’amitié. »

non ; depuis que j’existe je n’ai cherché, je n’ai voulu de bonheur que dans le sentiment, et c’est par mes blessures que j’ai trop appris à compter ses douleurs. […] Jamais le commun des femmes ne pourra supporter de chercher à plaire à un homme, devant une autre femme ; il y a aussi une espèce de fortune commune à tout ce sexe en agréments, en esprit, en beauté, et chaque femme se persuade qu’elle hérite de la ruine de l’autre. […] Dès qu’un homme et une femme ne sont point attachés ailleurs par l’amour, ils cherchent dans leur amitié tout le dévouement de ce sentiment, et il y a une sorte d’exigence naturelle, entre deux personnes d’un sexe différent, qui fait demander par degrés, et sans s’en apercevoir, ce que la passion seule peut donner, quelque éloigné que l’un et l’autre soit de la ressentir ; on se soumet d’avance et sans peine à la préférence que son ami accorde à sa maîtresse ; mais on ne s’accoutume pas à voir les bornes, que la nature même de son sentiment met aux preuves de son amitié ; on croit donner plus qu’on ne reçoit, par cela même qu’on est plus frappé de l’un que de l’autre, et l’égalité est aussi difficile à établir sous ce rapport que sous tous les autres ; cependant elle est le but où tendent ceux qui se livrent à ce lien.

334. (1890) L’avenir de la science « XI »

Si on ne cultive les littératures anciennes que pour y chercher des modèles, à quoi bon cultiver celles qui, tout en ayant leurs beautés originales, ne sont point imitables pour nous ? […] Formée, d’ailleurs, par dissolution, la langue moderne ne saurait donner quelque vie aux lambeaux qu’elle essaie d’assimiler, sans revenir à l’ancienne synthèse pour y chercher le cachet qui doit imprimer à ces éléments épars une nouvelle unité. […] Que d’autres peuples, même européens, les nations slaves par exemple, les peuples germaniques eux-mêmes, bien que constitués plus tard dans les rapports si étroits avec le latinisme, cherchent ailleurs leur éducation, ils pourront s’interdire une admirable source de beauté et de vérité ; au moins ne se priveront-ils pas du commerce direct avec leurs ancêtres ; mais, pour nous, ce serait renier nos origines, ce serait rompre avec nos pères.

335. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre II. Recherche des vérités générales » pp. 113-119

Un jour, on cherchera des rapports d’idées ou de sentiments ; le lendemain, des analogies de structure ou de style. […] L’historien cherche encore. […] La supposition initiale se consolide à mesure qu’on avance ; on en cherche la confirmation dans les témoignages des contemporains ; dans les lois déjà connues qui président à la marche de l’esprit humain, et l’on finit par avoir, au lieu d’une opinion dont on doutait soi-même, une conviction raisonnée qui s’impose.

336. (1898) Le vers libre (préface de L’Archipel en fleurs) pp. 7-20

Mais une fois rentré chez vous, prenez « l’auteur » à piocher, lisez le tranquillement, sans vous inquiéter de chercher à la page tant « cette strophe où il y a un quatrain si remarquable, mais une rime si faible ; ce sonnet si stupéfiant de difficulté vaincue, beau comme un prince Hindou caparaçonné des gemmes les plus coruscantes de Lahore et de Bedjapour, et qui entre dans un Olympe de marbre tandis que hurlent des trompettes de Walküre ». […] Ce sont de braves gens qui cherchent la Toison d’Or sur le dos des moutons de Panurge. […] « Alors apprends ton métier, travaille, cherche ton rythme aux empires profonds de ton âme, avec patience, avec acharnement.

337. (1899) Le monde attend son évangile. À propos de « Fécondité » (La Plume) pp. 700-702

Je cherche à savoir si Zola a montré un sens du réel plus évident, s’il s’est fait du monde une conception vive, si son œuvre a plus de vertu et d’innocence. […] Le grand homme qui nous l’enseigne ne cherche point à nous embellir de vertus rares, il ne nous apprend pas le jeûne et l’abstinence ; il ne nous demande point des pensées supérieures, et il n’agit pas avec nous comme Jésus avec ses disciples dans le désert. […] Il n’a point seulement cherché à écrire de splendides pages, il s’est préoccupé de leurs vertus.

338. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Lettres portugaises » pp. 41-51

Et cependant ce petit livre vanté par tout le monde, ce chef-d’œuvre d’éloquence et de passion sincère, nous venons de le relire dans la nouvelle édition qu’on nous en donne, et il nous a été impossible d’y trouver tout ce qu’on s’obstine à y chercher et à y voir. […] Tout le monde y cherchait son nom, et de plus elles étaient écrites avec toutes les grâces d’un talent qui a la légèreté des dentelles que portaient nos grand’mères, et qui, comme les dentelles, semblent avoir gagné en vieillissant. […] Dans ces pages qu’on dirait écrites par quelque plaintive Aïssé du xviiie  siècle, et non par une fille des sanctuaires fermés du Seigneur, on cherche en vain la Portugaise, la femme de ce pays où le soleil et la Dévotion font bouillir ces têtes virginales sous leurs frais et chastes bandeaux de lin, et les préparent aux incendies intérieurs et aux ravissements de l’extase.

339. (1898) Essai sur Goethe

Il y était poussé par sa véritable nature, qu’il cherchait à connaître et évitait de contrarier. […] Ces rapports, à vrai dire, ce n’est point dans les caractères des auteurs qu’il faut les chercher. […] Du reste, Goethe n’alla pas chercher si loin. […] L’on y chercherait en vain quelque trait de sentiment fort, de passion profonde. […] Et cette violence, il ne faut pas la chercher davantage dans l’épisode de Maximilienne.

340. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Aussitôt que Modeste est amoureuse, Modeste cherche un moyen de connaître l’objet de son affection. […] Ce que nous allons chercher, nous le trouvons. […] pauvres fous qui cherchez dans la malle du poète, vous n’y trouverez rien ! […] Ce que nous avons lu ne saurait être reproduit par nous, et il faut l’aller chercher dans le livre même de M.  […] Mais au fond, elle était si réfléchie et si bonne calculatrice que son premier souci fut de se chercher des aïeux.

341. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Petrus aussi cherchait Savoie. […] Nous pouvions donc chercher de ce côté-là quelque chose de nouveau, de singulier et même d’un peu choquant. […] Autant nous étions amis de l’éclat, autant il cherchait les teintes adoucies du demi-jour. […] Nous ne l’avons pas vu dans cette dernière période, car il fuyait, ou du moins ne cherchait pas ses anciens amis. […] Il cherchait l’originalité et la trouvait souvent.

342. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Nous n’y chercherons pas non plus une querelle de doctrine. […] Que d’autres cherchent, s’ils veulent, à embellir leurs maisons, et à se faire une vie douce. […] Maintenant nous chercherons le talent ; nous serons moins heureux peut-être à le trouver. […] Chercherons-nous dans la langue les traces de cette révolution ? […] Voilà ce que nous cherchons.

343. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

C’est qu’il y a certaines âmes qui cherchent en vain dans la nature des âmes auxquelles elles sont faites pour s’unir… Mais comment la philosophie remplira-t-elle le vide de vos jours ? […] Ils réduisent à chercher la gloire ceux qui se seraient contentés des affections ; eh bien ! […] A propos de ces caractères, il était difficile dans le monde d’alors qu’on n’y cherchât pas des portraits. […] Mais alors on dut chercher et nommer pour chaque figure quelque modèle existant. […] Le succès fut instantané, universel ; mais ce n’est pas dans la presse que nous devons en chercher les témoignages.

344. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Bossuet n’avait pas de peine à pénétrer un homme qui ne cherchait pas à se dérober. […] C’est le chimérique qu’il avait tout d’abord cherché dans la religion, en s’y attachant aux auteurs mystiques. […] Il semble qu’il ne cherche qu’un succès personnel dans un débat de doctrine, et son ardeur à se montrer sous un beau jour lui fait quelquefois oublier ce qu’il se doit à lui-même. […] Bossuet ne va pas plus loin ; il ne cherche pas à faire voir clair aux autres là où il confesse et s’attribue à mérite ses propres ténèbres. […] Bossuet tombe toujours sur le vrai, dans quelque voie qu’il le cherche.

345. (1803) Littérature et critique pp. 133-288

Ne cherchez point, dans son administration, ces pensées que le siècle appelle grandes, et qu’il n’aurait cru que téméraires. […] Montesquieu avait cherché les causes de la dépopulation qu’il croyait apercevoir dans l’univers. […] Elle se tient à l’écart, et ne cherche point la foule. […] Ici la sœur grise cherche l’infortune dans les réduits les plus secrets. […] Le lecteur, rebuté par la monotonie de l’ensemble, pourrait ne pas les y chercher : il est juste de les offrir à son attention.

346. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XX. Des Livres de facéties, des recueils d’anecdotes & de bons mots. » pp. 381-385

Les ouvrages de Rabelais sont depuis plus de deux cens ans entre les mains de la nation, qui y cherche le sel de la plaisanterie, & qui n’y trouve souvent que le dégoût & l’ennui. […] Les compilateurs de bons mots ont cherché dans les Ana des matériaux pour leurs recueils.

347. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XVII. La flûte d’ybilis »

Le lendemain seulement, au moment de repartir à la recherche des cadavres, il chercha sa flûte pour l’emporter avec lui mais il lui fut impossible de mettre la main dessus. Vingt années entières, il la chercha partout sans succès.

348. (1875) Revue des deux mondes : articles pp. 326-349

Deux Indiens couraient la forêt pour chercher du gibier. […] Sans doute le principe des choses nous échappera toujours, et nous ne cherchons pas à connaître l’origine première de tous ces éléments organiques, pas plus que le physicien et le chimiste ne cherchent à trouver la cause créatrice de la matière minérale dont ils étudient les propriétés. […] Mais, par un caprice de notre nature, cette joie de la découverte tant cherchée et tant espérée s’évanouit dès qu’elle est trouvée. […] Le savant ne cherche donc pas pour le plaisir de chercher, mais pour le plaisir de trouver. […] On ne cherche plus maintenant le siège de la vie ; on sait qu’elle réside partout dans toutes les molécules de la matière organisée.

349. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Il fallait chercher dans la collection de dom Bouquet les récits que le talent sévère d’Augustin Thierry a rendus aujourd’hui si populaires. […] C’est dans la sincérité du poète que nous devons chercher l’origine et la vie des images que nous admirons. […] Comme il serait absurde de chercher dans la poésie dramatique autre chose que la vérité historique ou la vérité humaine, et comme M.  […] Ne faut-il pas chercher dans l’isolement la solution de ce problème ? […] Or, François Ier, comme Charles VIII et Louis XII, courait en Italie chercher des aventures.

350. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (1re partie) » pp. 337-416

C’est dans la vie du grand démocrate qu’il faut chercher, à travers quelques mensonges, la vérité sur l’écrivain et sur ses œuvres, avant de passer à l’appréciation de ses principes. […] Plus de mère, et un père errant qui aimait, mais qui abandonnait les enfants d’un premier foyer pour en chercher un autre à travers le monde ; de là l’isolement et bientôt l’égoïsme de l’orphelin, qui, se sentant délaissé, se replia tout entier sur lui-même. […] Il vagabonde au hasard ; il bat la campagne de Genève et de Savoie sans savoir ce qu’il cherche et sans autre direction que le hasard. […] Abandonné à lui-même, il est réduit à chercher du pain dans la domesticité d’une riche famille piémontaise ; des folies et des larcins l’en chassent. […] Le suicide de toute civilisation commence par l’engouement pour cet aventurier de génie qui ne cherche pas la vérité, mais la nouveauté dans le sophisme.

351. (1856) Cours familier de littérature. I « IIIe entretien. Philosophie et littérature de l’Inde primitive » pp. 161-239

Il cherche Dieu dans la nature comme le grand et éternel secret des mondes ; il croit, il adore, il prie. […] L’acharnement même des peuples européens à chercher des formes meilleures de gouvernement ou de société atteste le travail et l’inquiétude d’esprit, qui s’agite dans un perpétuel effort. […] Tant que l’homme n’aura ni perfectionné ses organes, ni vaincu la souffrance physique et morale, ni prolongé sa vie d’une heure, ni prolongé l’existence de ceux qu’il aime ; tant qu’il sera ce qu’il est, un insecte rampant sur des tombeaux pour chercher le sien et pour s’y coucher dans les ténèbres, quel est le railleur qui osera lui parler des progrès de son bonheur ? […] Il cherche à s’expliquer à soi-même cette contradiction, qui ne peut être qu’apparente. […] Et comment cherche-t-il à soulever le poids de ce mystère qui l’écrase ?

352. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

Il ne cherchait à produire aucun effet : il était las d’en produire sur la scène ; il se reposait et il reposait les yeux dans sa maison. […] Aux dernières scènes, ma voix fléchissante et entrecoupée trahissait mon inquiétude : je me repentais d’être venu chercher si loin une rude vérité. […] Lasse enfin des horreurs dont j’étais poursuivie, J’allais prier Baal de veiller sur ma vie, Et chercher du repos au pied de ses autels… Que ne peut la frayeur sur l’esprit des mortels ! […] Les plaisirs près de moi vous chercheront en foule. […] Les mots fulgurent, les accents terrifient, les strophes transportent, les vers respirent ; les rimes elles-mêmes, ces consonnances pénibles, laborieuses, ordinairement puériles et cherchées, chantent et prient.

353. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Cet homme est Edgar-Allan Poe, le poète et le romancier américain dont nous avons déjà écrit le nom à propos du surnaturalisme envahisseur qui déborde la philosophie du xixe  siècle, et qui cherche sa voie dans la littérature comme plus tard il la cherchera dans la science. […] Mais restez ce soir avec nous, et j’enverrai Jupiter le chercher au lever du soleil. […] Si on cherchait cet effet dans les mots, la couleur, le style, enfin tout ce qui constitue, sous la plume d’un grand artiste, la réalité visible du talent, on ne le trouverait pas davantage. […] Edgar Poe serait-il un Claudien, un énorme Claudien du xixe  siècle, un de ces produits exubérants et corrompus d’une civilisation développée à outrance et qui en est arrivée à chercher la complexité comme la cherche la Barbarie, ou serait-il véritablement un grand poète, à originalité vraie, à personnalité indépendante, qui a révélé la beauté, une et multiple, sous des faces nouvelles que le monde ne connaissait pas ? […] Mais il n’y a pas que la volonté seule et l’originalité cherchée qui expliquent ces créations, violentes et abstraites.

354. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Il adorait Arioste, il fut tenté d’imiter ce qu’il admirait : le Roland furieux, moitié burlesque, moitié héroïque, lui inspira la malheureuse idée de chercher dans l’histoire de France une page qui se prêtât par sa nature aux deux genres. […] On se brouilla, on se réconcilia, on se brouilla de nouveau ; enfin Voltaire quitta presque furtivement cette Prusse où il tremblait à chaque tour de roue d’être retenu par force ; sa nièce, madame Denys, était venue chercher son oncle comme pour imprimer par sa présence plus de respect au tyran du génie. […] La liberté absolue devint plus chère au poëte ; il résolut de ne plus la chercher à la cour des rois. […] Il parut chercher une habitation dans le voisinage ; mais la froideur de l’archevêque de Lyon, autrefois son ami, maintenant son observateur hostile, et le saint murmure d’un clergé menaçant dans une ville fanatique, le forcèrent à renoncer à ce périlleux séjour. […] Non, ses calomniateurs seuls ont cherché à déshonorer de ce nom ses doctrines ou plutôt ses négations de doctrines religieuses.

355. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

L’individu suit sa passion, cherche son plaisir, rejetant toute règle : et quelle règle plus gênante que la règle chrétienne ? […] Une grande question semble avoir dès lors fortement préoccupé son intelligence : il cherchait une certitude, et si vraiment, comme le disaient les théologiens, il n’y en avait pas hors de la vérité revélée. […] On a embrouillé à plaisir le dessein de Pascal, et l’on y a cherché des difficultés, des contradictions qui n’y sont pas. […] Pascal a cherché la solution du problème de la révélation dans une critique historique et philologique des Écritures. […] Il a sur l’invention la superbe indifférence de nos classiques, ou plutôt il dirige comme eux son invention moins vers la nouveauté que vers la vérité ; et l’originalité qu’il cherche est celle de l’expression et du maniement des matériaux.

356. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre troisième »

L’idéal que nous cherchons dans la représentation d’événements tragiques, nos pères le cherchaient dans la mise en scène de l’histoire de leur foi. […] Par un de ces instincts que développe et fortifie en nous l’éducation, nous cherchons l’idéal de la tragédie au-dessus de nos têtes, dans les événements considérables qui affectent directement des personnes illustres. […] Le génie de Corneille, qui s’était cherché pendant dix années, s’est enfin trouvé. […] Pour des caractères, n’en cherchez pas, à moins qu’un jeune homme épris, un jaloux, un seigneur entêté du point d’honneur aragonais ou castillan, ne soient des caractères. […] Ne cherchez pas une autre cause de l’incertitude et des obscurités soudaines de la langue de Corneille, après cette lumière, cette force, cette netteté, ce feu divin des belles scènes.

357. (1860) Cours familier de littérature. X « LXe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 401-463

Louis-Philippe, convaincu par son bon sens à courte vue du danger de ces politiques guerroyantes, chercha à s’affermir par des alliances. […] XIX On a inventé et on cherche encore à réchauffer aujourd’hui le principe de la diplomatie par conformité de religions entre les peuples. […] Un tel principe de diplomatie, que des fanatiques hors de sens cherchent à exhumer des croisades de Mahomet, ne laisserait ni une conscience libre ni une race indépendante sur le globe. […] Il faut donc chercher un principe absolu de diplomatie ailleurs que dans ce principe de l’insurrection universelle. […] On prévoyait que l’Allemagne, monarchique, ecclésiastique, absolue dans ses éléments, serait promptement en antipathie et bientôt en hostilité avec une nation libre, démocratique, peut-être républicaine ; on devait donc chercher ses alliés dans la libre et représentative Angleterre.

358. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Je cherche en vain à quelle rancune il a pu obéir, à qui il a voulu plaire en faisant son portrait de Napoléon. […] Alors il redouble ses investigations ; il cherche un endroit où puisse s’appliquer son microscope ; il trouve une explication qui rabaisse, à la portée de sa vue, la grandeur dont l’aspect l’avait d’abord offusqué, etc. » Rien de plus faux, à mon sens, que ce jugement. […] C’est évidemment dans les Lettres, dit-il, qu’il faut chercher la vérité : « Si les Mémoires, refaits en 1818 dans les circonstances que j’ai indiquées, doivent être justement suspects, les lettres de Mme de Rémusat à son mari, au contraire, lettres écrites au jour le jour sous l’Empire et récemment publiées, sont une source précieuse pour l’histoire. […] Et l’effet est d’autant plus saisissant que le poète, sans doute, ne l’avait ni cherché ni prévu. […] Et ici j’ai envie de chercher querelle à M. 

359. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1855 » pp. 77-117

Il entre, en tenant deux ou trois feuilles de papier à la main, et nous dit : « Vous venez chercher un article ; eh bien ! […] Mme Dutillard, elle, était une grande liseuse de romans, et envoyait souvent le petit chercher des livres, dans un cabinet de lecture voisin. […] Pendant que, de son cabinet de toilette, la vue de cette femme me cherche, le mari, de sa chambre à lui, où il passe une partie de ses journées, penché sur la barre de sa fenêtre, fixe, des heures entières, un pavé de la cour, toujours le même. […] » Où diable nos intelligences d’enfants avaient-elles été chercher Marat, et ce calembour ingénieux ? […] Jadis la religion, c’était là un magnifique dada… mais c’est empaillé maintenant… ou encore le dada du père Corot qui cherche des tons fins et qui les trouve et à qui ça suffit… Tenez, ces gros bourgeois qui viennent le dimanche ici, et qui rient si fort… je les envie. » « Et pour l’amour, mon Dieu, ce que nous exigeons de la créature humaine !

360. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1883 » pp. 236-282

» jette Hébrard, — et comme on cherche à voir dans le blanc de ses yeux, s’il est sérieux ou s’il blague, — le directeur du Temps improvise une théorie, éloquemment paradoxale, dans laquelle il proclame que le café, est une sorte d’école normale d’humanité très parfaite, où l’on arrive de suite au ferraillement et au corps à corps, sans les salamalecs et les exordes de la porte. […] Ce roman, il le cherche, dans ce moment, mais en se promenant dans les rues de Paris, sans en avoir encore trouvé l’action, car à lui, il faut une action, n’étant pas du tout, dit-il, un homme d’analyse. […] Dimanche 4 mars Je cherche dans la « Petite fille du maréchal » (Chérie) quelque chose ne ressemblant plus à un roman. […] Je voudrais un titre nouveau, que je cherche sans le trouver, où il y aurait peut-être à introduire le mot : Histoires au pluriel, avec une épithète ad hoc, mais voilà le chiendent : c’est l’épithète… Non il faudrait pour dénommer le nouveau roman, un vocable unique. […] Il dit, tout en laissant traîner, comme voluptueusement, la main dans ces étoffes, il dit que c’est l’été, devant les fleurs, qu’il cherche la gamme des tons de ses toilettes, et il se plaint qu’il trouve chez ses clientes une certaine résistance à accepter le jaune : que c’est la plus belle couleur.

361. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville (suite et fin.) »

Membre de la première Assemblée, ministre du prince-président pendant cinq mois (2 juin — 31 octobre 1849), Tocqueville ne prit que peu de part aux discussions de la seconde Assemblée à laquelle il appartenait aussi : sa santé altérée par l’intensité des émotions et par la fatigue des affaires l’obligea à chercher un climat plus doux, le ciel de Sorrente. […] J’ai, donc souvent cherché depuis quelques années (toutes les fois du moins qu’un peu de tranquillité me permettait de regarder autour de moi et de voir autre chose et plus loin que la petite mêlée dans laquelle j’étais engagé), j’ai cherché, dis-je, quel sujet je pourrais prendre ; et jamais je n’ai rien aperçu qui me plût complètement ou plutôt qui me saisît. […] Mais quand je viens à chercher le nœud d’un pareil sujet, le point où toutes les idées qu’il fait naître se rencontrent et se lient, je ne le trouve pas. […] S’occupant d’une époque très-vaste et très-éloignée, il pouvait ne choisir que de loin en loin les plus grands faits et ne dire, à propos de ces faits, que des choses très-générales : s’il avait dû se renfermer dans un espace de dix ans, et chercher son chemin à travers une multitude de faits détaillés et précis, la difficulté de l’œuvre eût été beaucoup plus grande assurément. J’ai cherché dans tout ce qui précède à te faire bien comprendre l’état de mon esprit.

362. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

Je me cherche et ne me trouve plus117. […] Plus libre, il aurait passé sa vie à chercher sa vocation sans la trouver davantage. […] J’aime mieux M. de Bonald, chêne vigoureux qui va chercher sa sève à travers les rocs primitifs, jusque dans les entrailles de la terre. » Il changea probablement d’avis sur M. de Bonald avec les années 124 ; mais peu importe, l’image reste belle. […] Je me cherche et ne me trouve plus. […] Au second acte de Phèdre, dans la scène II entre Aricie et Hippolyte, il y a : Maintenant je me cherche et ne me trouve plus Mon arc, mes javelots, mon char, tout m’importune.

363. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires sur la mort de Louis XV »

Il fut donc décidé, malgré le désir obstiné de Mme Dubarry, que le roi partirait pour Versailles dès que les carrosses qu’on avait envoyé chercher seraient arrivés. […] J’appris aussi que la famille royale, qui était venue le voir à son arrivée, n’y était restée qu’un instant, et que le roi lui avait dit qu’il l’enverrait chercher quand il voudrait la voir. […] Nous apprîmes aussi qu’on avait été chercher à Paris Lorry et Borden. […] Il avait, vers les cinq heures, envoyé chercher ses enfants, qui étaient venus passer auprès de son lit une demi-heure, sans en entendre et sans lui dire une parole. Il n’aurait pas pensé à se procurer cette visite, si L……., qui voulait lui en procurer une autre, ne lui eût pas proposé d’aller chercher ses enfants.

364. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Francisque Sarcey »

Mais, au reste, quand il voudrait s’appliquer, ciseler, fignoler, chercher l’expression rare, il n’y arriverait pas. […] L’axiome très défendable « que l’art doit rester étranger à la morale » (car c’est assez qu’il cherche le beau), n’est pas tout à fait vrai au théâtre, parce que rien n’est moins artiste qu’une grande foule. […] Ce que cherche le public, c’est quelque chose de plus gai ou de plus émouvant ou de plus grand que la réalité. […] Certaines œuvres d’exception vous plaisent infiniment, parce que vous cherchez dans un ouvrage dramatique autre chose que le drame même ; mais c’est demander des dattes à un pommier. […] Mais elle en a de fâcheux : la blague donne à l’esprit l’habitude de ne plus compter avec le vrai ni avec le faux, de chercher partout matière à raillerie.

365. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

Comme l’archer Pandarus d’Homère, il cherche longtemps dans son carquois une flèche droite et acérée, mais cette flèche ne manquera pas le but. […] Pouchkine cherchait à sortir des routes battues. […] Il abandonne les héros de l’antiquité et cherche ses sujets dans le monde où nous vivons. […] Nous avons vu Pouchkine chercher des inspirations étrangères et prendre un guide, moins peut-être pour se conduire que pour s’encourager, de même que ceux qui ne nagent jamais si bien que lorsqu’un bateau les accompagne. […] Après avoir longtemps cherché dans le cœur humain tous les vices, toutes les bassesses, pour les flageller et les bafouer, il s’aperçoit tout à coup qu’à côté de ces honteuses misères, il y a des traits sublimes.

366. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chateaubriand homme d’État et politique. » pp. 539-564

Il ne cherchait qu’une porte pour sortir : la mort du duc d’Enghien lui en offrait une, belle et magnifique, une sortie éclatante, comme il les aimait ; il n’y résista pas, et, le lendemain de cette démission, il se trouva, on peut l’affirmer, bien autrement royaliste qu’il ne l’avait jamais été jusque-là. […] Il est fort à craindre en effet que quand on aborde la politique à ce point de vue, dans ces dispositions d’un génie désœuvré qui veut faire absolument quelque chose et se désennuyer en s’illustrant, on n’y cherche avant tout des émotions et des rôles. […] » S’il fallait chercher une ligne un peu suivie dans la conduite politique de M. de Chateaubriand, ce serait celle-là : mais combien de fois on la verrait brisée par la colère, le ressentiment et les plus chétives des passions ! […] Un homme politique véritable aurait pu entrer dans la carrière par une brochure violente et incendiaire ; mais il l’eût laissée de côté en avançant, et se serait bien gardé de chercher à réveiller et à raccommoder ce qui n’est pas conciliable ni compatible. […] Rien de plus opposé au génie politique, lequel, au contraire, cherche à tirer le meilleur parti des situations les plus compromises, et ne jette jamais, comme on dit, le manche après la cognée.

367. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre III. »

Un savant du dix-septième siècle a cherché principalement cette similitude dans les maximes de Platon comparées aux prescriptions de la loi mosaïque ; il indique en exemple : 1° la crainte affectueuse de Dieu ; 2° l’interdiction de se venger et de faire aucun mal à autrui ; 3° l’obligation de la prière, d’accord avec le précepte pythagoricien : « Commence tous tes actes par la prière, afin de pouvoir les achever » ; 4° le devoir pour les puissants et les princes de se conformer au Roi des rois, au Dieu unique, parfait modèle de toute sagesse et de toute justice. […] L’ardeur de la passion ne s’explique pas plus que le principe de la vie ; elle meurt de même, avant d’être saisie par le scalpel qui la cherche. […] Ce n’est plus ici quelque ressemblance inévitable, quelque rencontre accidentelle de génie, que nous chercherons entre le Psalmiste et le poëte de Dircé : c’est une élévation de nature à part, c’est quelque chose d’inimitable, que nous opposons d’un côté pour attester ce qui manque de l’autre : « Ma voix monte vers Dieu, et je m’écrie sans cesse. […] Telle puisse être la nation qui le cherche, et qui voit la face du Dieu de Jacob !  […] Si l’esprit ne devait pas se défier des parallèles cherchés trop loin, le chant du législateur hébreu en réponse à l’ingrate anxiété de son peuple, ce gouvernement des hommes par l’enthousiasme poétique, nous rappellerait l’élégie de Solon récitée au peuple athénien, et comment, avec des accents poétiques, il changeait les résolutions et apaisait ou enflammait les âmes.

368. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet »

Vincent ; mais, de fait, il n’eut d’autre maître que lui-même ; et lorsqu’il fut décidément émancipé, lancé en pleine pratique, il n’alla pas non plus chercher dans le passé aucun grand modèle pour se mettre à genoux devant lui. Les uns, on le sait, parmi les modernes novateurs ou restaurateurs de l’art, avaient pour Dieu Raphaël, les autres Rubens ou les Vénitiens : lui, il ne chercha rien de tel ; il eut le droit de se vanter, comme il faisait, de n’avoir mis son nez sur la piste de personne, et il se tira d’affaire pour son compte en présence des objets mêmes qu’il avait à rendre. […] Le Soldat laboureur. — Un soldat assis, pleurant et cachant sa face devant une mappemonde, où il vient de chercher sans doute l’île de Sainte-Hélène ; son chien est couché à ses pieds, sous sa chaise. — Une Scène d’Auvergne en 1815 ; un vieux soldat entre une bergère et un joueur de cornemuse. […] Les anciennes écoles, selon lui, ont très-peu cherché cet idéal qu’on adore et qu’on exalte après coup en elles ; le plus souvent, elles n’ont fait que reproduire exactement la nature qu’elles avaient sous les yeux : il suffisait, pour nous donner l’impression élevée qui en sort, que cette nature fût généralement belle, et que les organisations d’élite qui s’y appliquaient sussent y choisir leurs sujets. […] Schnetz, du moins, sans jamais s’élever plus haut ni chercher à se surpasser, est resté égal ou semblable à lui-même.

369. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Comme si, en consignant ce vilain détail dans ses Mémoires, — un de ces détails pour lesquels le président d’un tribunal ordonne le huis-clos, — elle n’avait pas commis par là même un acte immortel d’impudeur et n’avait pas donné jour à un récit que désormais les mères ne seraient pas seules à y chercher et que les jeunes filles, en ouvrant le volume, pourraient également y lire. […] C’est ce qu’on s’était dit, et, n’admettant pas qu’elle pût avoir placé tous ses trésors de cœur sur l’ami respectable qu’elle avait agréé, on a cherché quel pouvait être pour elle l’objet d’une affection plus vive et plus tendre. […] Il était évident, toutefois, pour quiconque étudiait de près Mme Roland avec l’intérêt et l’attention qu’elle mérite, que pendant des années, — durant les dix premières années de son mariage, — elle avait été tout entière occupée et absorbée par les soins maternels, les devoirs domestiques, le désir de cultiver son esprit et d’accroître ses connaissances ; l’amour près d’elle avait eu tort ; elle n’avait ni cherché ni rencontré. […] Il doit reconnaître aussi qu’il n’était point déraisonnable ni absurde de chercher dans quelques phrases, et d’après les seules traces qu’on eût laissées subsister dans les Mémoires, les indices d’un autre amour plus brûlant, plus tumultueux. […] Mais si l’infortune opiniâtre attache à tes pas quelque ennemi, ne souffre point qu’une main mercenaire se lève sur toi ; meurs libre comme tu sus vivre, et que ce généreux courage qui fait ma justification l’achève par ton dernier acte. » Mme Roland dans sa prison lisait beaucoup Tacite et cherchait à se pénétrer de sa forme : on s’en aperçoit à la condensation et à l’obscurité de la dernière phrase. — Cette apostrophe à la Caton, cette tirade à la Sénèque ou à la Lucain, très raturée dans le manuscrit, a été reconquise par le présent éditeur.

370. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Idées et sensations : par MM. Edmond et Jules de Goncourt. »

Michelet, qu’admirent MM. de Goncourt, et qui le leur rend, a très-bien dit dans son œuvre récente114 : « Cherchons le cœur du xviiie  siècle, il est double : Voltaire, Diderot. » Pour moi, je ne considérerai la moyenne des esprits comme tout à fait émancipée en France et la raison comme bien assise, même à Paris, que lorsque Voltaire aura sa statue, non pas dans le vestibule ou dans le foyer d’un théâtre, mais en pleine place publique, au soleil. […] Comme la peinture est proprement leur sphère et leur centre, ils s’attaquent au plus grand des classiques en peinture ; ils louent Raphaël (si c’est là le louer) dans des termes qui le rabaissent singulièrement : « Raphaël a créé, disent-ils, le type classique de la Vierge par la perfection de la beauté vulgaire, par le contraire absolu de la beauté que le Vinci chercha dans l’exquisité du type et la rareté de l’expression. […] La page de MM. de Goncourt vient précisément de me faire relire le tableau de Lucrèce, nous montrant la génisse à qui l’on a enlevé son jeune veau pour l’immoler aux autels : elle cherche partout et regarde également le ciel, l’horizon, l’immensité, d’un œil vague, mais dans un sentiment désolé indéfinissable, Omnia convisens oculis loca… Oh ! […] Voici un petit rêve d’élégie bien française, bien moderne, qui vaut certes toutes les réminiscences des Ovide et des Tibulle : c’est léger, délicat, d’une tendresse de dilettante, d’un regret de xviiie  siècle dans le xixe  ; un idéal rapide de bonheur d’après Fragonard et Denon : « J’ai toujours rêvé ceci, — et ceci ne m’arrivera jamais : Je voudrais, la nuit, entrer par une petite porte que je vois, à serrure rouillée, collée, cachée dans un mur ; je voudrais entrer dans un parc que je ne connaîtrais pas, petit, étroit, mystérieux ; peu ou point de lune ; un petit pavillon ; dedans, une femme que je n’aurais jamais vue et qui ressemblerait à un portrait que j’aurais vu ; un souper froid, point d’embarras, une causerie où l’on ne parlerait d’aucune des choses du moment, ni de l’année présente, un sourire de Belle au bois dormant, point de domestique… Et s’en aller, sans rien savoir, comme d’un bonheur où l’on a été mené les yeux bandés, et ne pas même chercher la femme, la maison, la porte, parce qu’il faut être discret avec un rêve… Mais jamais, jamais cela ne m’arrivera ! […] Ce sont des modernes et de purs modernes ; ils marchent hors rang, courageux et unis, à leurs risques et périls, se tenant par goût aux avant-postes de l’art ; ils tentent constamment, ils cherchent sans cesse.

/ 2968