A la facilité de saisir, dans les objets, les rapports les plus éloignés, il réunit le mérite de penser avec noblesse & de peindre avec force.
Le moi psychologique n’est pas autre chose que le lieu où la substance de l’être se divise, selon une infinité de proportions, en objet et en sujet et compose, pour se saisir, une infinité de compromis entre un principe d’acte et un principe contemplatif.
Quiconque veut décocher une flèche, prend son arc de la main gauche, étend ce bras, place sa flèche, saisit la corde et la flèche, de la main droite, les tire à lui de toute sa force, avance une jambe en avant, et recule en arrière, s’efface le corps un peu sur un côté, se penche vers l’endroit qu’il menace, et se déploie dans toute sa longueur.
On reproche à ses dieux de n’être qu’esquissés ; c’est qu’on n’a pas encore saisi l’esprit de sa composition.
Le roi dépêcha deux hommes avec ordre de se saisir de l’orpheline.
Il nous saisit aux cheveux de sa main inspirée et nous balance dans le vide agité de ses doutes.
De ce que vous ne saisissez pas l’utilité immédiate d’un acte, il n’empêche que, du moment qu’il a nécessité pour sa production les qualités les plus viriles, par exemple le mépris de la mort, il est beau, utile.
Il est moins facile, j’en conviens, de saisir le lien qui unit à notre poète Rabelais et Régnier. […] Dans cette dernière composition, la progression dramatique est plus facile à saisir. […] Pour s’en saisir, il fit nommer Laveaux représentant, et se trouva enfin maître de Saint-Domingue. […] Ils saisissent une vague ressemblance, et leur mémoire hésite devant les haillons du mendiant. […] Rien de factice, rien d’apprêté ; les pensées naissent sans efforts et s’ordonnent d’elles-mêmes ; la parole obéissante saisit l’idée à peine éclose et la revêt des plus brillantes couleurs.
Et encore peut-on dire aujourd’hui qu’Insidieux est entré dans la langue littéraire plutôt qu’il n’est passé dans l’usage courant : c’est qu’il est de sa nature un mot savant, dont le sens, dans toute sa force et sa beauté, n’est bien saisi que des latinistes, et qu’il n’a trouvé dans notre langue aucun mot déjà établi, approchant et de sa famille, pour « lui frayer le chemin. » Toutes ces circonstances propres et comme personnelles à chaque mot sont démêlées à merveille par Vaugelas. […] La façon de questionner, quand il voulait s’éclaircir d’un doute, n’était pas indifférente : pour saisir l’usage au passage et le prendre sur le fait, il ne s’agissait pas d’aller demander de but en blanc à un courtisan ou à une femme du monde : « Comment vous exprimez-vous dans ce cas particulier ? […] Tout cela est bien et irréprochable pour le fond : mais lui-même, on ne saurait en disconvenir, il a une manière de dire bien peu propre à persuader ; il abonde en termes et locutions déjà hors d’usage et dont le français ne veut plus ; il dit translations pour métaphores, allégations grecques et latines pour citations ; il dira encore en style tout latin : « La lecture est l’aliment de l’Oraison », Quoiqu’il contînt, on le voit, de bonnes idées, bien du sens et de la doctrine, ce traité de l’Éloquence de La Mothe-Le-Vayer péchait donc de bien des manières, et surtout en ce qu’il naissait arriéré, sans à-propos, sans rien de vif ni qui pût saisir les esprits.
Bien des détails précieux qui échapperaient, si on ne les saisissait au passage, et qui ne se retrouveraient plus, sont ainsi fixés, et pourront fournir d’imprévues conclusions à nos neveux, ou du moins, en vieillissant, en se colorant par le seul effet de la distance, ils leur deviendront poétiques et chers. […] Mais, chemin faisant, au milieu des peintures et des caractères, des récits enjoués ou des idéales rêveries, les indications abondent : on y sent passer les secrets voilés ; on saisit surtout cette continuité essentielle du héros, qui s’étend du berceau jusqu’à la gloire, qui persiste de dessous la gloire jusqu’à la tombe. […] Il la suivait, cette Sylphide, par les prairies, sous les chênes du grand mail, sur l’étang monotone où il restait bercé durant des heures ; il lui associait l’idée de la gloire. « Elle était pour lui la vertu lorsqu’elle accomplit les plus nobles sacrifices ; le génie, lorsqu’il enfante la pensée la plus rare. » Il y a à travers cela d’impétueux accents sur le désir de mourir, de passer inconnu sous la fraîcheur du matin. « L’idée de n’être plus, s’écrie-t-il, me saisissait le cœur à la façon d’une joie subite ; dans les erreurs qui ont égaré ma jeunesse, j’ai souvent souhaité de ne pas survivre à l’instant du bonheur.
Au type vague, abstrait, général, qu’une première vue avait embrassé, se mêle et s’incorpore par degrés une réalité individuelle, précise, de plus en plus accentuée et vivement scintillante ; on sent naître, on voit venir la ressemblance ; et le jour, le moment où l’on a saisi le tic familier, le sourire révélateur, la gerçure indéfinissable, la ride intime et douloureuse qui se cache en vain sous les cheveux déjà clair-semés, — à ce moment l’analyse disparaît dans la création, le portrait parle et vit, on a trouvé l’homme. […] On comprendra, d’après de telles circonstances, comment celui des philosophes du siècle qui sentit et pratiqua le mieux la moralité de la famille, qui cultiva le plus pieusement les relations de père, de fils, de frère, eut en même temps une si fragile idée de la sainteté du mariage, qui est pourtant le nœud de tout le reste ; on saisira aisément sous quelle inspiration personnelle il fit dire à l’O-taïtien dans le Supplément au Voyage de Bougainville : « Rien te paraît-il plus insensé qu’un précepte qui proscrit le changement qui est en nous, qui commande une constance qui n’y peut être, et qui viole la liberté du mâle et de la femelle en les enchaînant pour jamais l’un à l’autre ; qu’une fidélité qui borne la plus capricieuse des jouissances à un même individu ; qu’un serment d’immutabilité de deux êtres de chair à la face d’un ciel qui n’est pas un instant le même, sous des antres qui menacent ruine, au bas d’une roche qui tombe en poudre, au pied d’un arbre qui se gerce, sur une pierre qui s’ébranle ? […] « Ou plutôt ce monument existe, mais par fragments ; et, comme un esprit unique et substantiel est empreint en tous ces fragments épars, le lecteur attentif, qui lit Diderot comme il convient, avec sympathie, amour et admiration, recompose aisément ce qui est jeté dans un désordre apparent, reconstruit ce qui est inachevé, et finit par embrasser d’un coup d’œil l’œuvre du grand homme, par saisir tous les traits de cette figure forte, bienveillante et hardie, colorée par le sourire, abstraite par le front, aux vastes tempes, au cœur chaud, la plus allemande de toutes nos têtes, et dans laquelle il entre du Gœthe, du Kant et du Schiller tout ensemble. » 89.
Cercle maudit, effroyable Anneau, je saisis ton Or, et je l’abandonne. […] Deux jeunes hommes amènent Grane, le cheval de Brünnhilde ; elle le saisit et le débride. […] Mallarmé est critique envers la recherche wagnérienne de l’oeuvre totale, il dénonce le caractère redondant de la musique qui commente le drame plutôt qu’elle en saisit l’essence.
Il semble que notre organisme perd pied, pour ainsi dire, dans ce vide, dans cette détente qui lui est imposée ; il en résulte une sorte de gêne, à la fois une tendance à nous reculer vers le plus profond de nous-même, et une impulsion à saisir avec avidité les premières impressions qui se présenteront. […] La nécessité de cette double condition sera facile à saisir si l’on remarque que l’objet de nos perceptions visuelles appartient invariablement à l’action, c’est le personnage, c’est le décor ; tandis que pour l’audition, l’objet, c’est l’orchestre qui tient tant de place chez nous, et qui est absolument écarté à Bayreuth. […] Ils arrivaient, saisis d’un ravissement sans bornes, franchissaient les portiques vermeils, revêtaient les blanches tuniques et les hauberts d’argent ; prosternés sur le parvis, dans la fulguration des voûtes éblouissantes, sous un cantique d’enfants pareils aux anges, ils éprouvaient dès ce monde les joies de la céleste Patrie.
Tout ce qu’imprime un écrivain grave a de la valeur, mais ce qu’il écrit pour lui à l’état de simple note en a plus encore, en ce que j’y saisis sa pensée sans aucune forme de précaution ou de politesse. […] Cependant on n’est pas du Midi impunément, et un coup d’œil positif et pratique, prompt à saisir les occasions, ne laisse pas de se mêler chez Sieyès à ce qui, chez un philosophe du Nord, deviendrait aisément du rêve. […] Nommé membre de la Convention, témoin des luttes intérieures de cette formidable assemblée, sa disposition au mépris et au dédain ne fit que s’accroître, et j’en ai saisi plus d’un témoignage tracé de sa main dans des notes intimes.
Pour le génie proprement créateur, la vie réelle au milieu de laquelle il se trouve n’est qu’un accident parmi les formes de vie possible, qu’il saisit dans une sorte de vision intérieure. De même que, pour le mathématicien, notre monde est pauvre en combinaisons de lignes et de nombres, et que les dimensions de notre espace ne sont qu’une réalisation partielle de possibilités infinies ; de même que, pour le chimiste, les équivalents qui se combinent dans la nature ne sont que des cas des mariages innombrables entre les éléments des choses, ainsi, pour le vrai poète, tel caractère qu’il saisit sur le vif, tel individu qu’il observe n’est pas un but, mais un moyen, — un moyen de deviner les combinaisons indéfinies que peut tenter la nature. […] Une personne animée de dispositions bienveillantes pour l’humanité ne goûtera pas pleinement des livres exprimant une misanthropie méprisante, comme l’Education sentimentale ; de même, un homme à l’esprit prosaïque et précis sera difficilement saisi d’admiration à la lecture de poésies qui font appel au sens du mystère, ou qui essaient, de susciter une mélancolie sans cause.
Cette noble école poursuit et saisit l’existence du monde invisible ; ce qu’elle ne peut atteindre, bien que ce soit son honneur de le poursuivre, c’est la science de l’ordre invisible. […] Guizot, citant cette belle page, d’un accent presque religieux, saisisse précisément cette occasion de refouler le positivisme dans le matérialisme et dans l’athéisme. […] Guizot ; mais il ne nous est pas donné de le saisir et de contrôler. » « Elle nous apparaît, dit M.
Cette cause prochaine, comme il la nomme, n’est rien autre chose que la condition physique et matérielle de l’existence ou de la manifestation des phénomènes… Les corps vivants… sont tour à tour ramenés et réduits au mécanisme général de la matière. » Nous pouvons saisir par ces quelques phrases du savant, éclairées par le commentaire de l’homme de lettres, la pensée même de Claude Bernard. […] Il faut remonter jusqu’aux genèses pour saisir le sens total des épanouissements. […] Les Trois Villes toutefois, sa récente trilogie, marque un élargissement de la pensée qui conçut les Rougon-Macquart, élargissement qu’entrevoyait peut-être Zola, lorsqu’il prononçait ces paroles : « L’avenir appartiendra à celui où à ceux qui auront saisi l’âme de la société moderne, qui, se dégageant des théories trop rigoureuses, consentiront à une acceptation plus logique, plus attendrie de la vie.
Les causeurs préfèrent saisir des figures momentanées qu’à leur plaisir ils se jettent et se renvoient : le présent seul les intéresse. […] Soudain, il s’arrêta ; d’une main il fit son geste coutumier de saisir ses vêtements, de l’autre il dessina vaguement avec sa canne un demi-cercle sur le trottoir. […] Il faut savoir saisir le moment du paysage à l’instant juste, car ce moment-là ne reviendra jamais et on se demande toujours si l’impression qu’on a reçue a été la vraie. […] L’homme, qui a du nerf, au contraire, saisit l’occasion et achève l’impossible. […] Partout où je cherche à la saisir, elle fait explosion sous mes mains.
Boris, se sentant saisi par le froid, plongea son visage dans son manteau de fourrure. […] L’expression de son regard et de sa physionomie présentait un tel mélange de hardiesse et de timidité qu’on ne pouvait y saisir un caractère déterminé. […] Mais il ne riait jamais, ou il lui arrivait d’être saisi d’une sorte de rire convulsif qui le rendait malade. […] Seulement tu es vexé de ne plus pouvoir… et en disant ces mots, Michel faisait le geste d’un homme qui saisit un rouleau d’argent et le met dans sa poche. […] Guérassime étend la main, le saisit, le place sur sa poitrine et retourne précipitamment à son logis.
Quoi qu’il en soit, pour lire un poème comme il faut, je veux dire poétiquement, il ne suffit pas, et, d’ailleurs, il n’est pas toujours nécessaire d’en saisir le sens. […] », ma raison procède de la même manière : elle saisit — apprehendit — le sens de ces mots : Nicole, pantoufles, neiges, les notions qui leur répondent ; après quoi, elle saisit, elle noue le lien logique par où ces mots se trouveront former un jugement, une phrase ; s’il le faut, elle raisonnera plus avant là-dessus. […] — elle arrivera ensuite avec plus ou moins de peine à saisir que Villon s’apitoie, dans sa ballade, non pas sur les neiges disparues, mais sur la ruine inévitable de toute chair. […] Les dieux ne nous donnent rien. on leur arrache…. etc : pourquoi fallait-il qu’elle se laissât saisir ? […] jamais, dans ce temps-là, je n’ai cherché le sens des chants que tu chantais pour moi ; ma voix se contentait d’en saisir l’air, et mon cœur de danser sur la même cadence.
Aristophane saisissait quelques plaisanteries populaires ; il présentait quelques contrastes d’une invention commune et d’une expression grossière ; mais ce n’est jamais par la peinture des caractères, ni par la vérité des situations, que les ridicules des hommes et les travers de la société ressortent dans ses pièces.
On se sent saisi par une seule idée, comme sous la griffe d’un monstre tout puissant, on contraint sa pensée, sans pouvoir la distraire ; il y a un travail dans l’action de vivre qui ne laisse pas un moment de repos ; le soir est la seule attente de tout le jour, le réveil est un coup douloureux qui vous représente chaque matin votre malheur avec l’effet de la surprise.
Les Pieces de ces derniers ne vaudront jamais les Aïeux chimériques, ni n'offriront jamais aucun caractere mieux saisi, plus finement développé que celui du Flatteur dans la Piece de ce nom.
Le grand prend les masses, le vrai saisit l’individu.
Legallois expérimente pour saisir le siège de la vie, et il le place dans les centres nerveux, dans la moelle allongée. […] Ce n’est pas la vie ou l’influence de quelque agent capricieux qui intervient : c’est la complexité seule des phénomènes qui les rend plus difficiles à saisir et à préciser. […] On ne peut saisir ce principe intérieur, l’isoler, agir sur lui. […] L’abeille immobile, que l’on peut saisir impunément le matin, est en état de piquer vivement vers le midi. […] C’est par cette étude seule qu’il pourra saisir le mystère de la nutrition intime et arriver à se rendre maître de ces phénomènes de la vie, ce qui est son but suprême.
Dès que la mouche est dans le vase, la grenouille modifie son attitude, semble épier l’insecte, et, au moment où il s’approche, elle fait un saut peu étendu et cherche à le happer avec sa langue ; mais elle ne le saisit pas du premier coup, elle est obligée de recommencer le mouvement de projection de sa langue, et cette fois elle réussit. Les jours suivants, on lui donne des mouches, qu’elle saisit désormais du premier coup… La seule modification qu’on ait observée dans ses allures, c’est un peu moins de vivacité : de plus, elle ne cherche pas, autant que les autres grenouilles, à fuir la main qui s’approche pour la saisir… Au contraire, quand le retranchement du cerveau est complet, il n’y a pas le moindre effort chez les grenouilles pour saisir les mouches qu’on leur livre ; et même elles ne les avalent que lorsqu’on les introduit jusque dans le fond de la cavité buccale. » — On voit que chez la première grenouille un huitième du cerveau suppléait au reste ; il en faut davantage chez les animaux supérieurs, et, lorsqu’on arrive au sommet de la série animale, la dépendance mutuelle des parties cérébrales devient beaucoup plus grande. […] Dans ces deux cas, le jeu de la machine animale est aussi savant, mais aussi aveugle que celui d’une serinette ; quand le manche tourne, l’air s’exécute bon gré mal gré, avec un effet utile ou nuisible, peu importe ; quand les parois du pharynx sont en contact avec un objet, la déglutition s’accomplit, bon gré mal gré, quel que soit l’objet, fût-ce une fourchette ; la fourchette descend, saisie comme par une pince, et va plus bas perforer l’estomac. — En d’autres cas, par exemple dans celui des membres, le jeu de la serinette est aussi aveugle ; mais, étant plus savant, il semble l’effet d’un choix intelligent et presque libre. […] Au point de vue physiologique, il est le jeu d’un organe qui, comme tous les organes, s’altère par son propre jeu et, pour fonctionner de nouveau, a besoin d’une réparation sanguine. — Mais, par tous ces points de vue, nous n’atteignons dans l’événement que des caractères abstraits et des effets d’ensemble ; nous ne le saisissons point en lui-même et dans ses détails, tel que nous le verrions si, avec des yeux ou des microscopes plus perçants, nous pouvions le suivre, du commencement à la fin, à travers tous ses éléments et d’un bout à l’autre de son histoire.
Si vous rencontrez un intestin propre à digérer de la chair seulement et de la chair récente, l’animal a des mâchoires construites pour dévorer une proie, des griffes propres à la saisir et à la déchirer, des dents propres à la couper et à la diviser, un système d’organes moteurs propres à l’atteindre, des sens capables de l’apercevoir de loin, l’instinct de se cacher pour la surprendre, et le goût de la chair. […] Si deux rayons lumineux s’éteignent par places, ou si deux sons continus deviennent muets par moments, c’est grâce aux vitesses des deux séries d’ondes propagées qui, par places ou par moments, interfèrent et s’annulent. — Il suit de là que, dans la loi expérimentale comme dans la loi géométrique, les propriétés d’un composé plus complexe lui sont reliées par l’entremise des propriétés de ses facteurs ou composés plus simples, qu’il en est de même pour chacun de ceux-ci, et que partant, si on cherche les derniers intermédiaires, les dernières raisons, les derniers caractères explicatifs et démonstratifs qui établissent la loi, on les verra reculer, de composé plus complexe en composé plus simple, pour se laisser saisir à la fin dans quelques facteurs très simples ou éléments primitifs dont ils sont les propriétés. […] Un corps vivant, plante ou animal, est une société d’organes ; or, chacun de ces organes est assez gros pour être saisi par nos sens, mesuré par nos instruments, détaillé par nos descriptions, figuré par nos dessins. […] Pareillement, dans ces sociétés humaines dont les caractères fixes ou changeants sont l’objet de l’histoire, les éléments, aisément saisis, nous font comprendre l’ensemble. […] Une limite semblable est posée par une difficulté semblable dans les autres sciences expérimentales. — Au moyen de leur microscope, le physiologiste et l’embryogéniste résolvent les tissus vivants en éléments anatomiques, petits corps qui sont le plus souvent des cellules de diverses formes et diversement groupées ; mais ils ne saisissent pas les éléments de la cellule, ils ignorent leurs propriétés, du moins ils les ignorent aujourd’hui ; dans la pulpe liquide et sans forme qui s’organise en une logette garnie d’un noyau, ils ne peuvent distinguer les particules ni à plus forte raison leurs propriétés.
Elle seroit encore privée de tous ces avantages, sans l’étude que des hommes, nés pour saisir le beau & le vrai, ont faite de l’Antiquité ; &, si les Grecs & les Romains existoient aujourd’hui dans toute leur splendeur, ne seroit-ce pas à bien plus juste titre, qu’ils se diroient encore les Maîtres du Monde ? […] Telle est la force de l’exemple, le génie le saisit en maître. […] Celui qui d’un œil attentif observe la nature, la suit pas à pas, perce les replis du cœur humain, en démêle avec adresse les passions diverses, distingue habilement leurs nuances & leur caractère, découvre le jeu de leurs ressorts les plus secrets, arrache le masque au vice, saisit les ridicules, quelque imperceptibles qu’ils soient, & sait tirer d’un fonds aussi riche de quoi nous faire rire à nos dépens sans nous en appercevoir, est véritablement l’homme de génie, le créateur de l’Art, & Molière le fut. […] Tandis au contraire que, sans les Anciens, ces Modernes si célèbres aujourd’hui, si dignes de l’être, seroient peut-être demeurés dans l’oubli ; car le génie est languissant, s’il n’est pas fortement ébranlé par la beauté, la grandeur, l’excellence & la vérité des objets qui le frappent & le saisissent ; ce n’est qu’alors qu’il s’anime, qu’il s’enflamme & qu’il crée. […] C’est par le genre dont Crébillon s’est saisi, que la Postérité le distinguera de tous ceux qui l’ont précédé.
Sa brusque invasion, son accroissement irrésistible, le besoin de la saisir, de la presser dans tous ses enchaînements, de l’approfondir en tous ses points, entraînaient ce cerveau puissant auquel la volonté ne mettait plus aucun frein. […] La Chimie de Lavoisier, publiée depuis quelques années, mais de doctrine si récente, saisissait vivement tous les jeunes esprits savants ; et pendant que Davy, comme son frère nous le raconte, la lisait en Angleterre avec grande émulation et ardent désir d’y ajouter, M. […] Je lui ai parlé de vous, je lui ai dit que vous aviez le plan d’une espèce de cours qui serait bien fait pour réussir : ce serait d’embrasser toutes les sciences et d’en enseigner ce qui serait suffisant pour ne pas y être étranger, d’en saisir les faits généraux, d’en faire apercevoir les points de contact, et de donner ce qu’on pourrait appeler la philosophie ou la génération de toutes les connaissances humaines (toujours l’universalité, on le voit). […] Outre cette vue supérieure par laquelle il saisissait le fond et le lien des sciences, M.
Je n’ai pu saisir que les deux premiers : Hôtes légers des bois, compagnons des beaux jours, Je dirai vos travaux, vos plaisirs, vos amours… Mais qu’est-il besoin de poëme ? […] Ainsi, dans Jean Sbogar, sa plume saisira le vol des goëlands qui s’élèvent à perte de vue et redescendent en roulant sur eux-mêmes, comme le fuseau d’une bergère échappé à sa main 174. […] On a vu à ses débuts sa vocation marquée, on a saisi ses inclinations à l’origine. […] Nodier, qui s’était pris tant de fois de raillerie au célèbre corps, fut saisi d’une joie toute naïve et attendrie en y entrant.
Et comme, visiblement, tous mes événements passés, futurs ou possibles sont plus ou moins analogues aux événements quotidiens que je puis saisir au moment ou presque au moment où ils se produisent, ce sont ceux-ci, les plus nets et les plus prochains de tous, que je vais étudier pour savoir ce qui constitue le moi. […] La femme d’un major anglais à Charenton parlait d’un sixième sens par lequel elle entendait les voix ; c’était « le sens de la pensée ». — Quand on interroge les malades, ils répondent que le mot de voix dont ils se servent est très impropre, et qu’ils l’emploient par métaphore, faute d’un meilleur ; la voix n’a pas de timbre, elle ne semble point partir du dehors comme à l’ordinaire ; les mystiques ont déjà fait cette distinction, et opposé les « locutions et voix intellectuelles » que leur âme saisit sans l’intermédiaire des organes, aux voix corporelles qu’ils perçoivent de la même façon que dans la vie courante. […] Les associations ainsi répétées deviennent toujours plus tenaces ; notre passé est une ligne que nous ne nous lassons pas de repasser à l’encre et de rafraîchir. — Parmi ces événements, des classes s’établissent ; ils se groupent spontanément selon leurs ressemblances et leurs différences ; les plus usités, marcher, saisir avec la main, soulever un poids, sentir, toucher, flairer, goûter, voir, entendre, se souvenir, prévoir, vouloir, s’assemblent chacun sous un nom ; nous les concevons comme possibles pour nous, et ces possibilités, incessamment vérifiées et limitées par l’expérience, constituent nos pouvoirs ou facultés. […] L’enfant s’irrite contre un ballon ou un duvet qui vole capricieusement et ne se laisse pas saisir. — Aux époques primitives, l’homme considéra le soleil, les fleuves, comme des êtres animés. — Le sauvage prend une montre qui fait tic-tac et dont l’aiguille marche, pour une petite tortue ronde. — Le mouvement, en apparence spontané, surtout s’il semble avoir un but, suggère toujours l’idée d’une volonté.