Il les vivifie en les chargeant d’états d’âmes, en les faisant servir à l’expression de ses propres sentiments. […] Chaque objet est considéré comme le réceptacle d’une force et d’une activité propre. […] Les choses sont autant d’émotions en puissance et recueillent notre propre exaltation. […] Cet idéalisme a sa nuance propre qui le distingue du romantisme et du parnasse. […] Parles heurts, les différences perçues en pays étranger, on saisit mieux sa propre réalité et à quelle âme commune on appartient vraiment.
Car nul ici-bas n’est à lui-même sa propre fin. […] Rod une excellente préparation à son œuvre propre de romancier. […] Napoléon n’a songé qu’à sa propre grandeur, il a subordonné à sa propre cause la cause de l’humanité : c’est pourquoi il n’a laissé après lui que trouble et que ruines. […] Ils s’efforcent de voir clair dans leurs propres théories. […] Nous y incarnons notre propre rêve.
Dans cette œuvre d’art, la représentation est à elle-même sa propre fin. […] Le théâtre est donc en quelque sorte fondé sur le transport de nos propres états de conscience dans les personnages du drame. […] Ce n’est donc pas sur notre propre théâtre que nous pourrions trouver le modèle que nous cherchons. […] Le moment approche où il n’y aura plus un seul théâtre de province vivant de sa vie propre. […] Il ne le pourrait qu’en annihilant celui-ci, ce qui serait contraire à sa propre destination.
Malgré les difficultés qui se présentoient dans un Discours dont le but est de développer le chaos des temps, de suivre, pour ainsi dire, pas à pas la marche de la Sagesse divine, de rapprocher les événemens pour en faire connoître les ressorts & le terme, de présenter enfin le tableau du genre humain dans sa naissance, dans ses erreurs, dans ses crimes, dans le progrès de ses lumieres, dans sa législation, dans la réformation de ses mœurs, dans les révolutions des Empires ; le génie de Bossuet est toujours égal au sujet qu’il embrasse, & embellit les objets que leur propre grandeur sembloit mettre au dessus de l’esprit de l’homme. […] Ils lui procurerent cette multitude de connoissances si propres à aider la fécondité naturelle de l’esprit.
Pour mieux cacher l’accident, il fait soutenir à son propre fils le personnage du roi Tiberinus, à la faveur d’une ressemblance parfaite qui se trouvoit entre le roi et Agrippa. […] Elle ne touche que par surprise, et l’on desavouë son émotion propre dès qu’on fait reflexion à l’extravagance de la supposition sur laquelle toutes les situations merveilleuses de la tragedie sont fondées.
Le poète s’adresse d’abord aux envahisseurs du sol sacré ; puis à Jéhovah, qu’il fait parler par sa propre bouche pour rendre confiance à Saül ; puis à Saül auquel il se substitue tout à coup pour lui faire tenir un langage royal et rassurant pour lui-même et pour son peuple ; puis aux ennemis, de nouveau, pour qu’ils se repentent, se soumettent et se résignent à la domination du choisi, de l’élu, du sacré, c’est-à-dire de Saül ! […] Le deuxième psaume est une élégie sur son propre sort ; on doit le rapporter au moment où Saül, jaloux, a voulu le percer de sa lance, où il lui a donné, puis repris son amante Michaal, où Jonathas a tiré sa flèche au-delà de la pierre pour lui indiquer qu’il n’a de salut que dans l’exil, où tous les courtisans du roi et tous ses guerriers se liguent contre le héros-poète dont la gloire, la faveur et le génie les consument de jalousie et de haine. […] « Tes ennemis élèvent leur drapeau contre tes propres drapeaux pour qu’on les aperçoive de loin, comme le bûcheron qui élève la cognée au-dessus de sa tête dans une épaisse forêt. […] L’épopée finit par ses propres aventures : « Il fit choix de David, son esclave, et il le tira d’un parc de brebis ! […] Le roi est poussière ; il ne possède pas même son propre tombeau ; mais sa harpe possède l’univers, et qui sait si elle n’a pas son écho jusque dans le ciel ?
Si la Révolution qui se poursuit toujours avait eu son gouvernement propre et naturel, la république, cette république eût été moins tumultueuse et moins inquiète que nos cinq tentatives de monarchie. […] La nation avait certes la faculté de modifier la forme extérieure de sa souveraineté, de niveler son aristocratie, de salarier son Église, d’abaisser ou même de supprimer son trône pour régner elle-même par ses propres magistratures. […] Si donc Louis XVI, roi trop récemment dépossédé de la toute-puissance, roi à qui toute restitution du pouvoir au peuple devait paraître déchéance, roi mal satisfait de la part de règne qui lui restait, aspirant à reconquérir l’autre part, tiraillé d’un côté par une assemblée usurpatrice, tiraillé de l’autre par une reine inquiète, par une noblesse humiliée, par un clergé qui faisait intervenir le ciel dans sa cause, par une émigration implacable, par ses frères courant en son nom par toute l’Europe pour chercher des ennemis à la Révolution ; si Louis XVI, roi, paraissait à la nation une conspiration vivante contre sa liberté, si la nation le soupçonnait de trop regretter dans son âme le pouvoir suprême, de faire trébucher volontairement la nouvelle constitution pour profiter de ses chutes, de conduire la liberté dans des pièges, de se réjouir de l’anarchie, de désarmer la patrie, de lui souhaiter secrètement des revers, de correspondre avec ses ennemis, la nation avait le droit de le citer jusque sur son trône, de l’en faire descendre, de l’appeler à sa barre et de le déposer au nom de sa propre dictature et de son propre salut. […] Les uns votèrent par une puissante conviction de la nécessité de supprimer le signe vivant de la royauté en abolissant la royauté elle-même ; les autres par un défi aux rois de l’Europe, qui ne les croiraient pas, selon eux, assez républicains tant qu’ils n’auraient pas supplicié un roi ; ceux-ci, pour donner aux peuples asservis un signal et un exemple qui leur communiquassent l’audace de secouer la superstition des rois ; ceux-là par une ferme persuasion des trahisons de Louis XVI, que la presse et la tribune des clubs leur dépeignaient, depuis le commencement de la Révolution, comme un conspirateur ; quelques-uns par impatience des dangers de la patrie, quelques autres, comme les Girondins, à regret et par rivalité d’ambition, à qui donnerait le gage le plus irrécusable à la république ; d’autres par cet entraînement qui emporte les faibles âmes dans le courant des assemblées publiques ; d’autres par cette lâcheté qui surprend tout à coup le cœur et qui fait abandonner la vie d’autrui comme on abandonne sa propre vie ; un grand nombre enfin votèrent la mort avec réflexion, par un fanatisme qui ne se faisait illusion ni sur l’insuffisance des crimes, ni sur l’irrégularité des formes, ni sur la cruauté de la peine, ni même sur le compte qu’en demanderait la postérité à leur mémoire, mais qui crurent la liberté assez sainte pour justifier par sa fondation ce qui manquait à la justice de leur vote, et assez implacable pour lui immoler leur propre pitié ! […] La Révolution fit horreur à elle-même, la liberté mourut sur son propre échafaud.
Dans l’isolement, il avait appris à se connaître lui-même, il s’était fait un ami de son propre coeur. » Indiana, c’est déjà Norah. […] Bref, les écrivains du Nord, et c’est là leur charme, nous renvoient, si vous voulez, la substance de notre propre littérature d’il y a quarante ou cinquante ans, modifiée, renouvelée, enrichie de son passage dans des esprits notablement différents du nôtre. […] Cela finit par former, autour de chacun de ses drames, une atmosphère qui lui est propre, et dont l’air de vérité des personnages est augmenté. […] Toutefois, comme c’est, en réalité, sa propre pensée qu’il nous traduit, on y peut prendre un vif intérêt. […] Les personnages supérieurs, chez Sand et Hugo, songent plus au bonheur de l’humanité qu’à leur propre perfectionnement moral.
Le plan de ce cours familier, et pour ainsi dire dialogué de littérature, ne nous astreint pas tellement à l’ordre chronologique du génie, qu’il nous soit interdit de faire de temps en temps des retours sur notre propre siècle, de parler des œuvres remarquables qui s’y produisent, des écrivains d’élite dont les talents le décorent, ni surtout d’y déplorer la perte de ceux que nous y avons le plus aimés. […] Madame Gay s’était faite elle-même le piédestal de sa fille ; on la raillait de son empressement à la produire et à faire admirer ses perfections : mais qu’y a-t-il de plus innocent et de plus désintéressé que de vouloir faire éclater aux yeux du monde le prodige qu’une mère a trouvé dans le berceau de son propre enfant ? […] On ne pouvait s’empêcher de penser, en contemplant et en écoutant Delphine, à cette Vittoria Colonna, qui fut la noble et chaste Aspasie de Rome moderne, la passion platonique de Michel-Ange, le modèle des Vierges de Raphaël, pendant qu’elle était, par ses propres poésies, la rivale heureuse de Pétrarque ! […] Triomphe dans ma honte, implacable orateur : C’est moi qui me suis fait mon propre accusateur ! […] Le respect de ma propre cause me défendait une trop grande assiduité dans son salon.
Ce qui le prouve, c’est que chaque partie apparaît au joueur avec une physionomie qui lui est propre. […] Pourtant je n’en suis pas sûr, et tout ce que je puis affirmer est que l’impression laissée dans mon esprit était absolument sui generis, et qu’elle tendait, à travers mille difficultés, à se transformer en nom propre. […] Pouvons-nous suivre un calcul si nous ne le refaisons pas pour notre propre compte ? […] Ce travail d’interprétation est trop facile, quand nous entendons parler notre propre langue, pour que nous ayons le temps de le décomposer en ses diverses phases. […] Ainsi, quand je veux me remémorer un nom propre, je m’adresse d’abord à l’impression générale que j’en ai gardée ; c’est elle qui jouera le rôle de « schéma dynamique ».
L’esthétique et la critique, appliquées à la recherche de l’objet propre de la littérature ou de l’art, ont fait jusqu’ici fausse route. […] Le Petit se souvînt toutefois des propres paroles de M. […] quelles « figures grossissantes, propres aux poètes suprêmes, et à eux seuls » ? […] Par quelle fatalité, ennemie de son propre dessein, M. […] Ce qui retient dire qu’il périt de sa propre victoire… et le mouvement recommence.
Les maintenir dans un juste équilibre est le propre de certains auteurs et de certains siècles qu’on appelle classiques. […] L’art demande ses modèles au peuple et l’amuse de sa propre image. […] À la vérité la Vierge lui est apparue moins souvent ; mais il n’en accuse que sa propre indignité. […] Sans doute, par là même qu’elle est sa propre maîtresse, elle obéit à mille caprices, que la raison, plus forte, pourrait contrarier. […] C’était dire au romancier et au poète que chaque homme a en propre une manière de parler qui le distingue.
Plus une œuvre d’art me saisit et plus facilement mon attention extérieure s’en détache pour se mettre aussitôt à filer en moi à sa propre quenouille, avec une hâte fiévreuse. […] j’ai voulu tout simplement puiser dans l’entière connaissance de la tradition le sentiment raisonné et indépendant de ma propre individualité. […] Mais que de temps il faut pour se débarrasser des souvenirs, des imitations, du milieu où l’on vit et retrouve sa propre nature ! […] Ajoutons que souvent ils trouvent leur réfutateur sous leur propre bonnet ; témoins MM. […] Les noms propres n’ont plus rien à faire ici.
« Pour ce qui est d’Hannon (le lait de chienne, soit dit en passant, n’est point une plaisanterie, mais il était et est encore un remède contre la lèpre : voyez le Dictionnaire des sciences médicales, article Lèpre ; mauvais article d’ailleurs et dont j’ai rectifié les données d’après mes propres observations faites à Damas et en Nubie), — Hannon, dis-je, s’échappe, parce que les Mercenaires le laissent volontairement s’échapper. […] Il lisait Byron, soyez en sur, bien moins dans le texte anglais que dans ses propres sentiments à lui et dans son âme. […] « Tout ceci, cher Monsieur, est pour maintenir, au milieu des imitations apparentes et des influences plus ou moins directes que vous démêlez très-bien, l’originalité bien native pourtant de nos anciens amis, la veine naturelle et propre à cette famille romantique française qui a et gardera sa physionomie entre toutes les autres écoles. […] Lacaussade connaît si bien, on conçoit de quel avantage m’étaient ses indications, ses remarques d’homme du métier, et quelle précision je pouvais donner à mes propres jugements en les sentant appuyés du sien. […] Jules Levallois resta près de moi pendant trois années aussi environ ; c’est à peu près le laps de temps qu’ont pu, généralement, me consacrer de jeunes et brillants esprits, bientôt émancipés par degrés, et qui avaient ensuite leur propre carrière à faire.
Sismondi, tout d’abord, et comme par précaution, le lui avait rendu quand il disait, — avant de le connaître personnellement, il est vrai, et sur la simple annonce de l’Histoire de France que Chateaubriand se proposait d’écrire : « J’ai une grande admiration pour son talent, mais il me semble qu’il n’en est aucun moins propre à écrire l’histoire : il a de l’érudition, il est vrai, mais sans critique, et je dirais presque sans bonne foi ; il n’a ni méthode dans l’esprit, ni justesse dans la pensée, ni simplicité dans le style : son Histoire de France sera le plus bizarre roman du monde ; ce sera une multiplicité d’images qui éblouiront les yeux ; la richesse du coloris fait souvent papilloter les objets, et je me représente son style appliqué aux choses sincères comme le clavecin du Père Castel, qui faisait paraître des couleurs au lieu de sons. » Sismondi ne voyait et ne prédisait là que les défauts. […] Il avait sa manière, à lui, d’entendre la raillerie en ne paraissant pas y prendre garde ; et comme il le remarque à ce propos dans son Journal : « C’est une politesse dont on a souvent besoin dans le monde, que de ne pas entendre ce qu’on entend fort bien, et de noyer dans sa propre bonhomie ce qui n’est pas très-bon dans ceux qui le disent. » Noyer dans sa propre bonhomie ; savez-vous que, chez un autre, ce serait un joli mot ? […] Je souffre donc au dedans de moi, sans même songer à mes amis (à ses amis de France), de la seule pensée que les Français n’auront leurs propres lois, une liberté, un gouvernement à eux, que sous le bon plaisir des étrangers ; ou que leur défaite est un anéantissement total, qui les laisse, à la merci de leurs ennemis, quelque généreux qu’ils soient. […] Votre esprit est trop philosophique pour que vous ne compreniez pas les deux manières de juger et de sentir, dont l’une tient à la vivacité des impressions présentes, et l’autre à la vivacité des impressions passées ; et dussions-nous pousser, chacun, notre manière propre à l’extrême, vous avez trop de bonté aussi bien que d’étendue dans l’esprit pour ne pas tolérer des opinions qui ne sont pas les vôtres. » La correspondance moins vive, mais toujours affectueuse, se continua jusqu’à la mort de Mme d’Albany. […] Dans une lettre à Channing, il analyse admirablement la disposition religieuse propre au XIXe siècle, en explique très-bien les origines, le point de départ, les fluctuations aussi ; « Les sentiments religieux, écrit-il (8 septembre 1831), ont été en progrès en France pendant le XIXe siècle, mais je ne sais si les efforts imprudents de ceux qui voudraient les ranimer ne les font pas, au contraire, reculer de nouveau aujourd’hui.
Dans ses imitations d’Horace, on peut trouver qu’il est bien prompt à chanter victoire et à entonner son exegi monumentum dès le premier pas et au point de départ : c’est une façon un peu artificielle, et propre de tout temps aux jeunes écoles, de s’échauffer entre soi et de se donner du cœur. […] Par malheur, il ne s’arrête pas à temps, et, au lieu de clore le sonnet sur cet excellent tercet, il continue, il compare encore ses vers à la lance d’Achille, qui blesse et guérit tour à tour, au scorpion, qui sert de remède à son propre venin : en cela il est de son siècle ; le goût n’était pas venu. […] Il voulait, aux approches du jour de l’an de 1560, envoyer à ses amis d’ingénieuses étrennes, et, selon le goût du temps, selon le goût aussi des Anciens qui ont souvent joué sur les noms (nomen omen), il composa en distiques latins une suite d’Allusions 115, dans lesquelles, prenant successivement chaque nom propre des contemporains célèbres, il en tirait, bon gré mal gré, un sens plus ou moins analogue au talent et au caractère du personnage : par exemple, Michel de l’Hôpital semblait avoir reçu son nom tout exprès, puisqu’il était l’hospice des Muses, auxquelles sa maison était toujours ouverte. […] En disparaissant à cette heure critique du siècle, il ne vit pas, du moins, les guerres civiles si fatales à la Muse, la discorde au sein de sa propre école poétique ; il n’eut point à prendre parti entre protestants et catholiques, et à chanter peut-être, comme plus d’un de la Pléiade, à célébrer en rimes malheureuses des journées et des nuits de néfaste mémoire. […] Indépendamment des notes du temps, il y a joint ses propres explications et commentaires.
C’est le propre de ces coups : ils déroutent, et c’est leur force. […] pense au faux éclat dont nous éblouissent les honneurs, les richesses et les plaisirs qu’on croit les plus propres à nous rendre heureux. […] J’ai appris avec bien de la satisfaction que, dans le cours de l’année passée, vous aviez souvent approché des sacrements de la confession et de la communion, de votre propre mouvement ; et je ne connais rien qui soit plus capable d’attirer sur vous les faveurs du ciel, que de vous habituer à la pratique de ces devoirs et autres semblables. […] Il serait trop difficile de vous donner des instructions précises sur ce qui regarde votre conduite et vos conversations ; je me bornerai donc à vous recommander d’avoir avec les cardinaux et les autres personnes élevées en dignité le langage du respect et de la déférence, sans néanmoins renoncer à vous servir de votre propre raison, et vous laisser entraîner par les passions des autres, qui peuvent être égarés par des motifs peu estimables. […] Un jour, qu’elle écoutait furtivement un entretien secret de son mari avec son astrologue confident, elle découvrit que le prince, déjà soupçonné d’infidélité conjugale, conspirait, en outre, contre la vie de son propre père Bentivoglio.
Même sans le savoir il agira pour lui-même, car il ne peut agir que selon sa propre nature. […] Tout objet dont je me sers représente les peines, les privations d’autrui ; l’argent dont je l’ai acquis représente les miennes propres ou celles de quelque autre encore, et tant que je le possède, je prive les autres d’une utilité que tous ne possèdent sans doute pas. […] Ils sont comme les préfets d’un gouvernement lointain, qui cherchent à se rendre indépendants, à substituer à la sienne leur propre volonté. […] Il prendra son parti dans les cas qui se présenteront, en tâchant de comprendre ses propres désirs et ses aptitudes, ceux aussi de son temps et de son milieu. […] Et il trouvera encore d’inépuisables sources d’ironie attristée et bienveillante, dans ce chaos d’accords et d’oppositions, d’aspirations et de croyances, dans le contraste des intentions, des conventions, des prétentions et des effets obtenus, de ses propres désirs même et des conclusions logiques et pratiques auxquelles il se trouve amené.
Voilà ce qui dut faire naître d’assez bonne heure l’idée de rapprocher, dans une narration suivie, un certain nombre d’événements & de situations propres à intéresser le Lecteur. […] A cela près, cet ouvrage a le mérite qui lui est propre. […] Quoi qu’il en soit, les Anglois se croient inventeurs du Roman pour leur propre compte. […] L’amour fait la base de ces sortes d’ouvrages, & celles qui le font naître semblent devoir être propres à le décrire. […] J’ajouterai que l’amour, tel qu’ils le peignent, est plus propre à rebuter qu’à séduire, & qu’en tout cas, il y auroit peu de danger pour quelques jeunes personnes d’imiter les Héroïnes de ces fictions dans leur amour, si elles les imitoient dans leur résistance.
Quelque saillant en effet que fût ce mérite sous le rapport de l’exécution et du drame, il semblait facile à la critique (la critique aujourd’hui s’étant raffinée à proportion du reste) de discerner dans Indiana la portion des souvenirs et celle de l’invention, de conjecturer jusqu’à quelle page l’auteur était allé avec sa part d’émotions propres et de confidences plus ou moins déguisées. […] Sa propre histoire contée (si tant est que ce fût sa propre histoire), l’auteur d’Indiana en savait d’autres, il en pouvait recommencer et dire à l’infini ; avec la clef des cœurs humains, il avait la création et le jeu des figures.
Si je l’osais dire, je trouverais dans ces comparaisons de l’artiste quelque secret rapport de conformité avec sa propre et intime organisation, avec ses sauvageries bretonnes, sa pureté un peu farouche, et cette ombrageuse vigilance qu’il nous a lui-même si délicatement accusée : J’aime dans tout esprit l’orgueil de la pensée Qui n’accepte aucun frein, aucune loi tracée, Par delà le réel s’élance et cherche à voir, Et de rien ne s’effraye, et sait tout concevoir : Mais avec cet esprit j’aime une âme ingénue, Pleine de bons instincts, de sage retenue, Qui s’ombrage de peu, surveille son honneur, De scrupules sans fin tourmente son bonheur, Suit, même en ses écarts, sa droiture pour guide, Et, pour autrui facile, est pour elle timide. […] C’est le propre des poésies extrêmement civilisées de revenir avec une curiosité expresse à la nature la plus détaillée, à la simplicité la plus attentive. […] L’auteur ici a rétabli les noms celtiques dans leur pure orthographe, il les a multipliés : an lieu de chanter désormais sa Bretagne du point de vue adouci du Cénacle et du Musée, il semble vouloir la venger au point de vue de sa nationalité propre.
De toutes ses vicissitudes, de tous ses travaux, de tous ses essais, de toutes ses erreurs même, il était résulté à la longue, chez cette nature la mieux douée, un fonds unique, riche, fin, mobile, propre aux plus délicates fleurs, aux fruits les plus savoureux. […] Être un esprit littéraire, ce n’est pas, comme on peut le croire, venir jeune à Paris avec toute sorte de facilité et d’aptitude, y observer, y deviner promptement le goût du jour, la vogue dominante, juger avec une sorte d’indifférence et s’appliquer vite à ce qui promet le succès, mettre sa plume et son talent au service de quelque beau sujet propre à intéresser les contemporains et à pousser haut l’auteur. […] Le propre de Nodier, son vrai don, était d’être inévitablement aimé.
Mais jamais ces émotions dissonantes ne seront dominantes et poussées jusqu’à faire obstacle à l’émotion supérieure, qui est propre au genre. […] Et comme, dans le mouvement général de l’univers, les êtres particuliers ont leur mouvement propre, ainsi, pour l’écrivain, tandis que l’ouvrage entier s’avancera vers sa fin, chaque partie accomplira son évolution particulière et aura son progrès propre.
Méprisant les saines limites de la nature de l’homme, il voulait qu’on n’existât que pour lui, qu’on n’aimât que lui seul. « Si quelqu’un vient à moi, disait-il, et ne hait pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs, et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple 884. » — « Si quelqu’un ne renonce pas à tout ce qu’il possède, il ne peut être mon disciple 885. » Quelque chose de plus qu’humain et d’étrange se mêlait alors a ses paroles ; c’était comme un feu dévorant la vie à, sa racine, et réduisant tout à un affreux désert. […] Transportée dans un état calme et au sein d’une société rassurée sur sa propre durée, cette morale, faite pour un moment de crise, devait sembler impossible. […] Parfois, on est tenté de croire que, voyant dans sa propre mort un moyen de fonder son royaume, il conçut de propos délibéré le dessein de se faire tuer 889.
Elle est en quelque sorte le décalque du mode de vision propre à Flaubert. […] Le milieu social, représenté par l’éducation, fait-il apparaître dans le miroir de la conscience, parmi toutes les images-notions dont il est détenteur, celles aussi qui sont propres à susciter l’activité dans le sens où l’hérédité l’incline, l’individu va se réaliser dans les conditions qui lui sont le plus favorables. […] Le plus souvent, au contraire, un grand nombre de prédispositions existent en lui, le rendant propre à se développer dans toutes les directions de la sensibilité et de l’esprit, et c’est en raison sans doute de cette multiplicité qu’il peut subir toutes les influences.
Mais, dans chaque genre de science, les phénomènes varient et présentent une complexité et des difficultés d’investigation qui leur sont propres. […] Chaque science a en quelque sorte un genre d’investigation qui lui est propre et un attirail d’instruments et de procédés spéciaux. […] Pour cela l’expérimentateur réfléchit, essaye, tâtonne, compare et combine pour trouver les conditions expérimentales les plus propres à atteindre le but qu’il se propose. […] Dans tout cela l’expérimentateur raisonne nécessairement d’après lui-même et prête à la nature ses propres idées. […] La biologie doit prendre aux sciences physico-chimiques la méthode expérimentale, mais garder ses phénomènes spéciaux et ses lois propres.
Il la regarde, d’après son propre aveu, « plutôt en sculpteur qu’en amant ». […] s’il ne se rattache à personne, a-t-il du moins un domaine qui lui soit propre ? […] Jusqu’ici le génie hindou et le sien propre, sans se joindre complètement et s’identifier, tout en gardant au contraire chacun leur marque spéciale, ont suivi deux voies parallèles assez voisines l’une de l’autre. […] On ne s’émeut pas plus en leur présence que devant une énigme indéchiffrable, et, par un phénomène de transposition bizarre, on objective sa propre froideur pour la leur attribuer. […] La foule obscure des disciples infimes, assez complètement dépourvus de talent et de force propre pour suivre, avec une soumission aveugle, les réglementations qu’on leur offrait toutes prêtes et qui les dispensaient d’un effort original.
Ce corps de doctrines, d’observations et de résultats, propre à faciliter la critique des diplômes et des chartes, existe : c’est la Diplomatique. […] Chaque époque a sa langue propre qu’on doit traiter comme un système spécial de signes. […] Partant de cette ressemblance, l’historien se forme une image des faits anciens historiques semblable à ses propres souvenirs des faits qu’il a vus. […] On en détermine — suivant la méthode indiquée plus haut — les caractères propres, l’étendue, la durée, la quantité ou l’importance. […] Quelle place doit-on faire aux noms propres et aux dates ?
J’entends par là que les poètes sont plus propres à imaginer qu’à quoique ce soit d’autre. […] C’est sa voix même que nous entendons et c’est sa propre vie qu’il nous expose. […] Il parle volontiers du bien de l’humanité et le confond avec le sien propre. […] L’aspect en est propre, clair et gai. […] Siegfried forge lui-même son glaive ; on est sa propre victoire et son propre héros.
Bien loin qu’il tirât avantage pour sa propre personnalité de tant d’hommages, il les reportait à la science, à ses maîtres, à son pays. […] Personne n’a été plus convaincu que la science doit être indépendante et maîtresse chez elle dans le domaine qui lui est propre. […] » c’est le mot que nous arrache la jalousie ; et c’est donc que nous n’aimions en autrui que nous-mêmes et notre propre plaisir. […] A-t-il été sa propre dupe ? […] Le poète se fait le centre de l’univers, ramenant et subordonnant toutes choses à sa propre fantaisie.
En dédiant les vers latins de La Boétie au chancelier de L’Hôpital, Montaigne développe cette même idée : il se console, dit-il, de voir tant de hasard présider au choix des hommes qui gouvernent les autres, et, là même où la chose publique est le mieux réglée, le discernement faire faute trop souvent sur ce point, en considérant qu’Étienne de La Boétie, « l’un des plus propres et nécessaires hommes aux premières charges de France, avait tout du long de sa vie croupi méprisé ès cendres de son foyer domestique ». […] Tout son soin, dans l’amitié, est de n’en point flétrir en lui l’image par des vices ; mais c’est moins de lui-même à cet égard qu’il s’inquiète que de son ami ; car, lui, il se considère comme moins propre aux grandes perfections, et moins sujet par là même aux grandes maladies morales : « Pour toi, au contraire, dit-il à Montaigne, il y a plus à combattre, toi, notre ami, que nous savons propre également aux vices et aux vertus d’éclat. » Toute la pièce d’où ceci est tiré a pour but de montrer les inconvénients du libertinage et du plaisir. […] Celle qui les unissait à ce caractère propre et singulier, d’être le type de l’amitié-passion ; elle naquit en eux avec la rapidité et l’imprévu de l’amour : Si on me presse de dire pourquoi je l’aimais, dit Montaigne, je sens que cela ne peut s’exprimer qu’en répondant : Parce que c’était lui ; parce que c’était moi. […] Il arrive d’ordinaire, dans les réflexions de moraliste sur les sentiments, qu’on ne fait ainsi que généraliser ses impressions secrètes et l’histoire de son propre cœur.