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437. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Panurge » pp. 222-228

Et alors viennent les vrais artistes français, La Fontaine, Watteau, les auteurs, les vaudevillistes, les chansonniers, tous gens qui cherchent à égayer, demeurent, écrivant à point nommé pour les « langoureux malades ou autrement faschez et désolez. » *** Aujourd’hui beaucoup de choses ont varié, et la question de Panurge se pose plus inquiétante.

438. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Bathild Bouniol »

Notre poète, au contraire, avec cette heureuse idée d’une Croisade contre les mœurs contemporaines, a fait poser devant lui une société tout entière, et l’a saisie par tous ses vices et tous ses ridicules, comme le terrible chêne saisit par les cheveux Absalon !

439. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — III »

Ce problème de l’individualisme radical, qui est une des plus fécondes questions de ce temps, et qui ne va rien moins qu’à poser qu’il n’existe pas d’autres droits que ceux de l’individu, et à nier qu’il faille sacrifier l’individu à la collectivité, n’apparaît à ce haut fonctionnaire qu’un trait de prétention littéraire très propre à servir de thème à sa verve facétieuse !

440. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

Faguet se posa la même question au sujet de Baudelaire. […] Celui qui ne se pose pas le problème des genres n’est pas plus un critique que n’est un philosophe celui qui ne se pose pas le problème des Idées. Et avoir le génie philosophique et le génie critique, ce n’est pas se poser ces problèmes une fois dans sa vie, c’est vivre avec eux (j’allais dire coucher avec eux) sans jamais les résoudre tout à fait, jamais les épuiser. […] Le classique est posé pour nous, comme la surface l’était pour les Pythagoriciens, avec ce nombre trois. […] Et de la première est née cette question qui se pose aujourd’hui à la critique : France ou Europe ?

441. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1875 » pp. 172-248

Le médecin m’a déclaré que j’avais une fluxion de poitrine, et m’a fait poser dans le dos un vésicatoire, grand comme un cerf-volant. […] Et je pose jusqu’à la nuit, charmé par le tableau que j’ai sous les yeux. […] Ici Fromentin fait le geste d’un peintre qui pose, une petite touche carrée à la Teniers, sur une toile. […] En prenant mon chapeau, posé sur un petit bonheur du jour, j’aperçois une tasse vide, qui, renversée sur le côté, dans le marc de café qui sèche, et en sa traînée mystérieuse, prépare la bonne aventure, que se dira demain la maîtresse de l’hôtel. […] « À l’Académie, il faut vous dire, je ne sais pourquoi, dès mon arrivée, Cousin s’était posé, vis-à-vis de moi, en antagoniste.

442. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Il est coiffé d’un madras noir, coquettement tortillé sur sa tête, et habillé d’une élégante blouse-veston gris perle, avec un large pantalon flottant de la même étoffe, recouvrant des souliers de cuir de Russie et avec ses gants chamois et son ombrelle d’été, il est tout charmant dans sa pose molle et affaissée, sur une chaise de fer, pendant que d’une main jaune, dégantée, il marque la mesure d’une valse. […] Le jeune Philippe Sichel racontait, qu’il avait disséqué le matin, une jambe de frotteur, la jambe sur laquelle il posait, dont toutes les veines étaient variqueuses, et avec des varices, comme jamais on n’en avait vu. […] Samedi 29 juillet Soudain, au milieu du silence de nous tous, Léon, jetant en bas d’une chaise ses pieds, sur laquelle ils sont posés, s’écrit, se parlant à lui-même, dans un mouvement de révolte intérieure : « Je n’ai qu’un regret, je me trouve emberlingué de trop de philosophie… À quoi, ça sert ?  […] Dans ces gares, au passage incessant des trains, la pensée de ceux qui les habitent, ne doit avoir le temps de se poser sur rien, elle est sous le coup d’un ahurissement, produit par ce mouvement perpétuel. […] Aux murs, deux ou trois rangées de tableaux posés sur le parquet, sans être accrochés, ayant quelque chose d’une préparation de vente chez un expert : tableaux que domine, sur la cheminée, son grand portrait en pied de Clairin.

443. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre dixième. Le style, comme moyen d’expression et instrument de sympathie. »

Les partisans d’une langue universelle ressemblent à des mathématiciens voulant substituer l’algèbre à l’arithmétique pour les opérations les plus simples, et poser en équation, deux et deux font quatre et six font dix. […] Parfois, hors des fourrés, les oreilles ouvertes, L’œil au guet, le col droit, et la rosée au flanc, Un cabri voyageur, en quelques bonds alertes, Vient boire aux cavités pleines de feuilles vertes, Les quatre pieds posés sur un caillou tremblant257. […] M. de Banville, on s’en souvient, pose cet axiome : « On n’entend dans un vers que le mot qui est à la rime. » Le paradoxe est ingénieux ; mais, pour ne citer qu’un exemple, dans le retour de Jocelyn que son chien accueille, il est difficile de n’entendre que les mots à la rime : « Ô pauvre et seul ami, viens, lui dis-je, aimons-nous ! […] Alors en effet le petit nombre de mots économise l’attention ; de plus, la voix tombe et se pose plus vite qu’on ne s’y attendait : il s’ensuit un silence imprévu, qui, en surprenant l’oreille, ranime l’attention et la fixe sur l’idée qu’on vient d’exprimer. […] C’est donc une même loi d’évolution qui rend aujourd’hui notre prose tantôt scientifique, tantôt poétique ; c’est la recherche de l’expression intellectuelle ou sympathique qui nous fait traduire le plus fidèlement possible tantôt l’idée abstraite et tantôt le sentiment, tantôt les systématisations de pensée et tantôt les systématisations d’émotion. « Quand, disait Flaubert, on sait frapper avec un mot, un seul mot, posé d’une certaine façon, comme on frapperait avec une arme, on est un vrai prosateur », et aussi un vrai poète.

444. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Or, avant d’entrer dans le détail des Œuvres de Gœthe, posons carrément qu’il n’a pas ce signe du génie, qui est mieux qu’un signe, car sans cela le génie n’est pas. […] Et, comme le froid en littérature a bientôt engendré l’ennui, c’est ici que la question soulevée au commencement de cette étude sur Gœthe se pose plus impérieusement que jamais et demande une réponse directe : Le génie peut-il être ennuyeux ? […] Le poseur que Gœthe n’était peut-être pas naturellement, mais que ses admirateurs ont fait de lui en l’admirant trop, cachait soigneusement le creux de son être sous l’air olympien, comme Talleyrand, qui n’était pas moins creux, cachait le sien sous sa : pose indolente et railleuse de grand seigneur blasé et qui en avait vu bien d’autres… Il y a, en effet, beaucoup de ressemblance entre Gœthe et Talleyrand, ces deux âmes de princes ! […] Il y aurait une réponse terrible à cette question, si ses admirateurs la posaient, et c’est la théorie contre Newton. […] Et là, comme partout, dans le conseiller d’État solennel comme dans le poète qui posait dans son auréole, je retrouve, de même qu’un rat dans une grande armoire, mon éternel petit bourgeois.

445. (1914) Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne pp. 59-331

Le problème que nous nous posons est le problème même de l’historien. […] Il a posé ces deux termes aux achèvements de ses perspectives. Il a posé ces deux termes aux frontières de son œuvre. […] Quant à Daniel, il posait négligemment sur la croupe de ces lions un pied familier que je n’oserais pas poser, moi, sur la croupe d’un modeste terre-neuve). […] Et quand on disait : poser des jalons, ça voulait dire poser des jalons.

446. (1921) Esquisses critiques. Première série

Ils se servent, chacun dans son art, d’un dessin sobre et solide, de cette touche infailliblement posée qui n’appartient qu’au talent supérieur. […] L’œuvre pose sur le papier sa légère arabesque, comme un croquis adroit, sans le fatiguer, ni le salir. […] Marcel Boulenger ne saurait se comparer à ce voile transparent et imperceptible que Renan et Anatole France posent sur leurs idées. […] Tous les problèmes qui se sont posés à la conscience littéraire dans le temps qu’il s’élaborait y furent abordés avec franchise et résolus avec décision. […] Et la colombe rauque y roucoule et se pose, quand il faudrait et s’y pose (Id. loc.

447. (1875) Revue des deux mondes : articles pp. 326-349

Bientôt le chien posa sa tête par terre entre ses deux jambes de devant, comme s’il eût été encore plus fatigué et qu’il eût voulu s’endormir. […] Si la blessure a eu lieu dans un membre, la première chose à faire est de poser une ligature sur ce membre au-dessus de la plaie empoisonnée. […] En effet, cette recherche reste stérile, parce qu’elle nous pose des problèmes qui sont inabordables à l’aide de la méthode expérimentale. […] Descartes et Leibniz avaient posé en principe que partout les lois de la mécanique sont identiques ; qu’il n’y a pas deux mécaniques, l’une pour les corps bruts, l’autre pour les corps vivants. […] Bichat, nous le savons déjà, pose en principe que les lois des sciences physiques sont absolument opposées aux lois des sciences vitales.

448. (1874) Premiers lundis. Tome II « L. Bœrne. Lettres écrites de paris pendant les années 1830 et 1831, traduites par M. Guiran. »

Bœrne a tranché d’un mot la question d’une troisième Restauration, que de bonnes gens se posent encore tout bas, et qu’ils travaillent sous main à résoudre de leur mieux.

449. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bergerat, Émile (1845-1923) »

Ça vous connaît, rien que parce que votre berceau a posé sur cette terre qui a avalé depuis cent ans de la mitraille au quintal et bu du sang à la barrique. » C’est Jules Vallès, le grand écrivain croquemitaine, qui saluait ainsi, dans une retentissante préface, l’élégant Homme masqué du Voltaire.

450. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — I »

Le réformateur Saint-Simon, qui était une façon d’aventurier brillant et passionné, Fourier, bonhomme d’une naïveté quasi-ridicule, ont posé une couple de principes autrement féconds que toute cette philosophie où M. 

451. (1855) Louis David, son école et son temps. Souvenirs pp. -447

Croyez-vous que les grands hommes de l’antiquité dont nous avons les images aient posé ? […] — Certainement Alexandre n’a jamais posé devant Apelles. […] vous ne poserez pas. […] Il avait été convenu que Bonaparte ne poserait pas. […] telle était la question qu’il se posait à lui-même et qu’il eut l’art de faire agiter à chacun.

452. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. VILLEMAIN. » pp. 358-396

Nisard, où la question revenait se poser. […] Villemain a mis en tête du Dictionnaire de l’Académie touche à une infinité de questions, les pose et les retourne sans avoir la prétention de les vider : ce n’est pas à dire pour cela qu’il les éclaire moins. […] Ces Portraits, dans lesquels je cherchais surtout la ressemblance et la fidélité par la mesure des dons naturels et du mérite, par le juste rapport des tons et des couleurs, étaient souvent une surprise pour le modèle lui-même qui avait posé sans s’en douter.

453. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXIXe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (2e partie) » pp. 321-384

Je ne vis pas où poser mon châle sans le salir, et, comme il m’embarrassait sur les épaules, je le jetai sur les branches d’un saule qui se trouve devant la porte. » IV Le 14 mars. […] Ils sont doux, les baisers d’enfant : il me semble qu’un lis s’est posé sur ma joue. » V « Aujourd’hui tout mon temps s’est passé en occupations, en affairages ; ni lecture, ni écriture ; journée matérielle. […] J’ai gardé les deux petites pattes de devant si souvent posées sur ma main, sur mes pieds, sur mes genoux.

454. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

La poésie d’oc, coupée et renversée après le tumulte du xiiie  siècle, est demeurée, jusqu’au xxe  siècle, en sommeil… Et durant tout ce temps, le Midi, qui n’a pas chanté dans sa langue, a mal chanté dans celle d’outre-Loire, ou, du moins, n’y est pas parvenu à la pointe extrême de musique. » Voilà formulée déjà, semble-t-il, avec grande précision, la question (et sa réponse) posée aujourd’hui par l’enquête des Marges d’après la récente et judicieuse remarque de M.  […] De la façon dont elle est posée, on ne peut dire qu’elle soit complimenteuse pour un poète du Midi (encore que le Béarn soit du Sud). […] Jules Véran La question que pose M. 

455. (1914) Enquête : Les prix littéraires (Les Marges)

[Question] Nous avons posé à un certain nombre d’écrivains les questions suivantes : On reproche aux prix littéraires de ne pas distinguer souvent l’originalité et le talent, et d’avilir la république des lettres, en y introduisant de véritables mœurs électorales. […] Saint-Georges de Bouhélier Il y a quelques années, Le Gil-Blas b, ayant posé à certains écrivains une question à peu près semblable à celle que vous voulez bien m’adresser, ma réponse, alors, avait été : que les prix Goncourt et autres ne pouvaient qu’aider à la démoralisation, déjà si accentuée et si grande, de nos milieux littéraires… À cette époque, j’écrivais encore des romans et je m’étais bien promis de ne jamais me présenter à aucun jury : ce que j’ai fait. […] Ils se laissent poser des candidats et ils écoutent jusqu’aux femmes des candidats.

456. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VI »

Tel est le type que la comédie pose, dès son prologue, sur le piédestal du vice triomphant. […] Cette règle posée, cette réserve faite, nous conviendrons volontiers que le nouvel épilogue de la Contagion a paru, dans son ensemble, très supérieur au premier. […] Posé d’abord en aventurier du grand monde, d’Estrigaud tombe, d’acte en acte, au niveau des fripons infimes qui jouent les travestis du chantage.

457. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

Il se tint fort coi dans cette gloire qui lui avait si peu coûté, écrivant rarement pour qu’elle ne lui coûtât pas davantage, et aussi pour deux raisons, excellentes toutes deux : la première, c’est qu’au fond il était un esprit sec sous une forme péniblement travaillée, et la seconde parce que se faire rare c’est se faire précieux aux yeux des imbéciles, économisant ainsi son talent pour qu’on le crût immense, et prenant la pose, laquelle n’est pas mauvaise, d’un homme qui, malgré sa richesse, ne peut cependant pas détacher tous les matins un diamant de sa cravate pour nous le donner. […] Quant au livre attaché à cette préface, chiche de tout point, nul en religion, pauvre en philosophie, vide enfin, ce choix d’études, dont l’arrière-prétention est de se poser comme l’expression photographique de l’esprit moderne, n’est qu’un babillage littéraire, dénué profondément de charme. […] Il ne sait pas même la poser.

458. (1894) Critique de combat

Où est-il, celui qui partait de cet axiome : « L’art est triste » et se posait en professeur de désillusion ? […] Autant de problèmes délicats qu’il est méritoire d’avoir posés, même quand on ne les a pas entièrement résolus. […] Mais l’espace me manque et je voudrais poser, sinon résoudre, un problème délicat. […] Quoiqu’elle n’apporte pas une solution bien neuve du problème posé, elle ne manque pas de portée philosophique. […] L’esprit frondeur consiste à poser des prémisses révolutionnaires pour en tirer des conclusions conservatrices.

459. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

La lutte de l’honneur et de la raison, du devoir et de l’humanité, se posa clairement à sa vue. […] Dans ce livre, M. de Vigny essaya de tracer comme l’Évangile littéraire moderne : il y posa l’antithèse perpétuelle du poète et du politique, de l’homme de pensée et de l’homme de pouvoir ; celui-ci n’était que le pharisien : il assigna au premier sa mission toute sainte, toute désintéressée, toute pure. […] Le Christ demande à son père le prix de sa venue : il pose les éternels problèmes du bien et du mal, de la vérité et du doute, de la vie et de la mort, de la Providence et du Hasard, tous les pourquoi possibles, en philosophie naturelle, en philosophie morale, en politique : Et si les nations sont des femmes guidées Par les étoiles d’or des divines idées, Ou de folles enfants sans lampe dans la nuit, Se heurtant et pleurant, et que rien ne conduit ? […] Il a compris quelques-uns des grands problèmes de notre âge et se les est posés dans leur étendue.

460. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

Cependant, nous ne pouvons ouvrir tout d’abord ces écrits des XIIe et XIIIe siècles, ces vigoureuses ébauches marquées d’une touche déjà puissante, sans nous être posé auparavant plus d’une question, sans nous demander d’où elles sortent, elles et la langue qui nous y semble parfois si heureusement balbutiée […] Néanmoins ses données sont en général fort exactes, et j’en ai souvent profité. « Les règles grammaticales étaient les mêmes pour tous les dialectes de la langue d’oïl : tous, sans exception, étaient régis par la même grammaire. « Après avoir posé cette règle générale, Fallot divise le vieux langage français en trois dialectes principaux, qu’il nomme non point du nom d’une province dans laquelle ils fussent exclusivement parlés, mais du nom de celle dans le langage de laquelle leurs caractères se trouvent le plus saillants, le mieux réunis et le plus complètement en relief : normand, picard, bourguignon. […] Je ne fais que vous poser toutes ces questions, non pour vous les résoudre, non pour les discuter même en grand détail devant vous, mais pour vous avertir qu’elles sont posées, et pour que quelqu’un de vous, un jour peut-être, s’y applique et se fasse honneur à son tour dans ces études ingénieuses et sévères qui exigent, vous le voyez, la connaissance approfondie de la latinité, — de toutes les latinités.

461. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Lysidas soutenait que la bonté d’une comédie consiste dans sa conformité à certaines règles posées par les anciens. […] Lysidas ne prétend donc plus que la bonté d’une comédie consiste dans sa conformité aux règles posées par les anciens. […] Il est contradictoire de poser comme terme d’une comparaison, une idée aussi indéterminée dans l’esprit du commun des hommes, que celle de la beauté. […] Eh bien, je crois que cette pensée peut nous consoler encore, et que, s’il ne nous est pas possible de poser avec assurance les bases d’une définition a posteriori de la comédie, nous pouvons, avec assurance, nous dire que la critique aurait trouvé fort peu utile l’édifice que nous désespérons d’élever.

462. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (1re partie) » pp. 397-476

La peinture, dans chacune de ces villes ou de ces nations, prit non seulement le caractère du chef d’école, mais elle prit le caractère de l’école et du peuple où elle fut cultivée par ces grands hommes du pinceau : Titanesque avec Michel-Ange, plus païen que chrétien dans ses œuvres, et qui semble avoir fait poser des Titans devant lui ; Tantôt mythologique, tantôt biblique, tantôt évangélique, toujours divine avec Raphaël, selon qu’il fait poser devant sa palette des Psychés, des saintes familles, des philosophes de l’école d’Athènes, le Dieu-homme se transfigurant dans les rayons de sa divinité devant ses disciples, des Vierges-mères adorant d’un double amour le Dieu de l’avenir dans l’enfant allaité par leur chaste sein ; Païenne avec les Carrache, décorateurs indifférents de l’Olympe ou du Paradis ; Pastorale et simple avec le Corrége, qui peint, dans les anges, l’enfance divinisée, et dont le pinceau a la mollesse et la grâce des bucoliques virgiliennes ; Souveraine et orientale avec Titien, qui règne à Venise pendant une vie de quatre-vingt-quinze ans sur la peinture comme sur son empire, roi de la couleur qu’il fond et nuance sur sa toile comme le soleil la fond et la nuance sur toute la nature ; Pensive et philosophique à Milan avec Léonard de Vinci, qui fait de la Cène de Jésus-Christ et de ses disciples un festin de Socrate discourant avec Platon des choses éternelles ; quelquefois voluptueux, mais avec le déboire et l’amertume de la coupe d’ivresse, comme dans Joconde, cette figure tant de fois répétée par lui du plaisir cuisant ; Monacale et mystique avec Vélasquez et Murillo en Espagne, faisant leurs tableaux, à l’image de leur pays, avec des chevaliers et des moines sur la terre et des houris célestes dans leur paradis chrétien ; Éblouissante avec Rubens, moins peintre que décorateur sublime, Michel-Ange flamand, romancier historique qui fait de l’histoire avec de la fable, et qui descend de l’Empyrée des dieux à la cour des princes et de la cour des princes au Calvaire de la descente de croix, avec la souplesse et l’indifférence d’un génie exubérant, mais universel ; Profonde et sobre avec Van-Dyck, qui peint la pensée à travers les traits ; Familière avec les mille peintres d’intérieur, ou de paysage, ou de marine, hollandais ; artistes bourgeois qui, pour une bourgeoisie riche et sédentaire, font de l’art un mobilier de la méditation ; Enfin mobile et capricieuse en France, comme le génie divers et fantastique de cette nation du mouvement : Pieuse avec Lesueur ; Grave et réfléchie avec Philippe de Champagne ; Rêveuse avec Poussin ; Lumineuse avec Claude Lorrain ; Fastueuse et vide avec Lebrun, ce décorateur de l’orgueil de Louis XIV ; Légère et licencieuse avec les Vanloo, les Wateau, les Boucher, sous Louis XV ; Correcte, romaine et guindée comme un squelette en attitude avec David, sous la République ; Militaire, triomphale, éclatante et monotone, alignée comme les uniformes d’une armée en revue, sous l’Empire ; Renaissante, luxuriante, variée comme la liberté, sous la Restauration ; tentant tous les genres, inventant des genres nouveaux, se pliant à tous les caprices de l’individualité, et non plus aux ordres d’un monarque ou d’un pontife ; Corrégienne avec Prud’hon ; Michelangelesque avec Géricault dans sa Méduse ; Raphaëlesque avec Ingres ; Flamande avec éclectisme et avec idéal dans Meyssonnier ; Sévère et poussinesque dans le paysage réfléchi avec Paul Huet ; Hollandaise avec le soleil d’Italie sous le pinceau trempé de rayons de Gudin ; Bolonaise avec Giroux, qui semble un fils des Carrache ; Idéale et expressive avec Ary Scheffer ; Italienne, espagnole, hollandaise, vénitienne, française de toutes les dates avec vingt autres maîtres d’écoles indépendantes, mais transcendantes ; Vaste manufacture de chefs-d’œuvre d’où le génie de la peinture moderne, émancipée de l’imitation, inonde la France et déborde sur l’Europe et sur l’Amérique ; magnifique époque où la liberté, conquise au moins par l’art, fait ce que n’a pu faire l’autorité ; république du génie qui se gouverne par son libre arbitre, qui se donne des lois par son propre goût, et qui se rémunère par son immense et glorieux travail. […] Jamais, depuis Salvator Rosa, le peintre des brigands, brigand lui-même, on ne fit poser la nature vivante dans un si sauvage et si tragique atelier. […] Déportée avec sa famille au dépôt de Rome, elle y était libre, et elle posait comme modèle de beauté tragique devant les peintres étrangers ; le peintre français Schnetz, ami de Léopold Robert, directeur depuis de l’école de France à Rome, la protégeait et lui donnait asile ; elle le protégeait à son tour quand il allait explorer les montagnes des Abruzzes et chercher des sites pour ses compositions toutes romaines.

463. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (2e partie) » pp. 5-80

Je n’ai connu que le duc d’Orléans, en France, qui représentât si bien l’espérance d’une dynastie ; mais le duc d’Orléans avait trop d’intention dans l’attitude : on voyait qu’il posait involontairement pour un trône populaire. Le prince Napoléon ne posait pas, il primait et il charmait. […] XX Un jeune homme, d’une beauté apollonienne sous le costume d’un bouvier des Abruzzes, est debout entre les deux têtes de buffles : c’est le fils de la maison ; il tient renversée la baguette armée de l’aiguillon, comme on tiendrait un sceptre : il pèse en arrière, de tout son poids, sur le timon pour arrêter le char sur sa pente ; un de ses coudes pose avec confiance sur le cou d’un des buffles ; son autre coude s’étend nonchalamment sur le joug. […] Problème touchant qui se pose sur tous les visages !

464. (1860) Cours familier de littérature. X « LVe entretien. L’Arioste (1re partie) » pp. 5-80

Il nous fit apercevoir autant de sinets pendants en bas des pages qu’il y en a ordinairement dans un livre d’église à demi couché sur le pupitre à gauche de l’autel. « Voilà vos limites, dit-il avec un sourire grave au professeur, à la comtesse Léna, à Thérésina et à moi ; vous ne les franchirez pas : mais, entre ces limites, vous pourrez vous promener à votre aise à travers les plus riants paysages, les plus merveilleuses aventures et les plus poétiques badinages qui soient jamais sortis de l’imagination d’une créature de Dieu. » Nous promîmes tous de respecter religieusement les sinets sacrés que le canonico avait certainement empruntés à un de ses vieux bréviaires, et nous prîmes séance dans les attitudes diverses du plaisir anticipé de la curiosité et du repos : le chanoine sur un grand fauteuil de chêne noir sculpté, adossé au fond de la grotte, et qu’on avait tiré autrefois de la chapelle pour préparer au bonhomme une sieste commode dans les jours de canicule ; le professeur sur une espèce de chaise de marbre formée par deux piédestaux de nymphes sculptés, dont les statues étaient depuis longtemps couchées à terre, toutes mutilées par leur chute et toutes vernies par l’écume verdâtre de l’eau courante ; la comtesse Léna à demi assise, à demi couchée sur un vieux divan de paille qu’on transportait en été du salon dans la grotte, les pieds sur le torse d’une des nymphes qui lui servait de tabouret, le coude posé sur le bras du canapé, la tête appuyée sur sa main ; sa fille Thérésina à côté d’elle, laissant incliner sa charmante joue d’enfant sur l’épaule demi-nue de sa mère ; moi couché aux pieds des deux femmes, à l’ouverture de la grotte, sur le gazon jauni par le soleil, le bras passé autour du cou de la seconde nymphe et le front élevé vers le professeur, pour que ni parole, ni physionomie, ni geste, n’échappassent à mon application. Boccace aurait fait une description de cette lecture au bout d’un jardin ; Boucher en aurait fait un tableau : mais ni Boccace ni Boucher n’auraient pu en égaler le charme, à moins que la comtesse Léna et sa jeune image, répercutée en ébauche dans le visage de sa fille Thérésina, n’eussent posé devant eux, comme elles posaient en ce moment devant nous. […] — Eh bien alors, reprit avec un fol enjouement Léna, laisse sécher tes yeux au vent de mer et ne songeons plus qu’à faire des bouquets. » En parlant ainsi, elle prit à deux mains la tête de la belle enfant, la posa de force à la renverse sur ses genoux, et, découvrant le front des tresses blondes qui tombaient sur les yeux de sa fille, elle lui tourna le visage vers le ciel bleu au-dessus de l’arbre, et vers la mer, plus bleue que le ciel ; puis, agitant légèrement l’air avec son éventail de papier vert, elle étancha en riant les larmes de l’enfant avec le double vent de la mer et de l’éventail.

465. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIIe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin » pp. 225-319

Tout légèrement qu’ils se posent, ils laissent leurs petites traces qui font mille figures sur la neige. […] Je viens d’y poser les pieds, et je marque ici cette sorte de consécration du foyer dont la pierre ne gardera point de trace. […] « C’est que l’ennui s’est posé sur moi, qu’il y demeure, et que tout ce qui prend de la durée met de l’éternité dans le temps. » L’ennui du printemps dans une âme de jeune fille éclate aussi dans les lignes suivantes : Le 28 avril. […] alors je saurais sur quoi mettre le baume, tandis que je le pose au hasard.

466. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

Les questions posées y sont plus nombreuses que les questions résolues, et les doutes que les certitudes. […] Nobles démentis donnés à la philosophie de la sensation, dans le temps que Voltaire mettait à la mode Locke, Dont la main courageuse A de l’esprit humain posé la borne heureuse… ce qui veut dire : qui a appris à l’esprit humain à ne pas nier que la matière soit capable de penser. […] Les sondes puissantes dont on fouille le sein des mers, pour y poser les câbles électriques, dessinent successivement les vallées et les plateaux que Buffon y avait vus de l’œil de l’esprit, et permettent aux géologues d’en constater l’heureuse correspondance avec les plaines montagneuses et les plateaux élevés de la terre. […] « Peu à peu, dit-il, les matières molles dont les éminences étaient d’abord composées ont fait ces énormes amas de rochers et de cailloux d’où l’on tire le cristal et les pierres précieuses… Toutes sont posées par lits… Les plus pesantes sont dans les argiles et dans les pierres, et elles sont remplies de la matière même des pierres et des terres où elles sont renfermées ; preuve incontestable qu’elles ont été transportées avec la matière qui les environne et qui les remplit… » Ainsi, Buffon crée ce qu’il suppose ; il assiste à ce qu’il prévoit, et ses raisonnements sont comme une suite de tableaux qui se déroulent sous ses yeux, plutôt attentifs à des faits qui s’accomplissent qu’éblouis par une vision.

467. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1869 » pp. 253-317

Un vrai carnaval d’invités… Paradol, Flaubert, Gautier, Girardin, lugubre et cassé, avec sa tête de mort et sa mèche posée comme un accroche-cœur sur un crâne. […] Et rondissant le dos au soleil, tout en gouaillant et en lâchant des blagues amères, le bohème nous mène au cimetière d’Auteuil, où l’on vient de poser la pierre de granit de Gavarni. […] Il est devant une fenêtre fermée, dans la pose raide et ankylosée des hémiplégiques, une couverture de voyage sur les genoux, et assis devant une table où est posé devant lui un volume des Contes de Voltaire.

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