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487. (1928) Les droits de l’écrivain dans la société contemporaine

Cet état de choses ne choque personne. […] Qu’ont répondu certaines personnes, interrogées, celles-là, verbalement ? […] Bien plus : autour de lui, on était ébloui par l’importante de cette espèce de « gros lot » que le sort lui attribuait et personne ne désapprouva sa conduite. […] Ainsi personne, somme toute, ne se trouve lésé. […] Au bout d’un certain temps, les documents, que personne n’aurait consultés ni édités, disparaîtraient d’eux-mêmes dans l’oubli.

488. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

L’opulence de sa maison est pour la grande place qu’il remplit et pour des bienséances d’état ; ce sont des dehors qui l’environnent ; mais, dans sa personne, tout est simple et modeste comme auparavant ; ses manières même et ses discours sont, comme autrefois, pleins d’affabilité ; c’est, en effet, la même personne que j’ai eu l’honneur de pratiquer à Germigny, il y a dix-sept ou dix-huit ans et plus… Jugez si je suis content de mon voyage ! […] Bon nombre d’archevêques et de prélats de cour eussent été d’avis, et pour aller plus vite et pour ne se brouiller avec personne, de ne s’occuper dans cette réunion que des affaires temporelles du Clergé, de ses comptes et de son budget, comme nous dirions. […] Ce que Bossuet désire et réclame, c’est qu’on renouvelle les condamnations contre la morale relâchée et les casuistes, déjà si flétris mais non découragés, contre le quiétisme et aussi contre le jansénisme, frappant ainsi les extrêmes à droite et à gauche, et les raffinés en fausse sublimité, épargnant d’ailleurs les personnes, et sans désigner aucun nom ; car il n’en veut qu’aux choses, à ce qui lui semble l’erreur. […] Il y a bien des années, et avant qu’une critique investigatrice eût rassemblé autour de cette figure de Bossuet tous les éclaircissements et toutes les lumières, un écrivain de beaucoup d’esprit, s’essayant à définir le grand évêque gallican, disait : « Bossuet, après tout, était un conseiller d’État. » Si par là on ne voulait dire autre chose, sinon qu’il y avait en Bossuet un homme politique, un homme capable d’entrer dans le ménagement des personnes et la considération des circonstances, on avait raison ; mais si l’on prétendait aller plus loin, toucher au fond de sa nature et infirmer l’idée fondamentale du prêtre, on se tromperait : car au fond de cette nature, telle qu’elle ressort aujourd’hui de tous les témoignages et qu’elle nous apparaît dans une continuité manifeste, il y a avant tout et après tout un croyant.

489. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — I — Vauvenargues et Fauris de Saint-Vincens » pp. 1-16

Cette dernière, provenant de la Bibliothèque du Louvre, où très peu de personnes avaient eu l’idée de la consulter jusqu’ici, est la moins importante, ou pour parler plus exactement, la moins agréable, et si on l’avait donnée seule et sans l’autre, on courait risque de prendre Vauvenargues par un aspect qui aurait pu le diminuer, ou du moins qui ne le grandissait pas. […] Autant pour tous ceux qui sont de l’espèce de Figaro, de Gil Blas et de Panurge, de ce Panurge « sujet de nature à une maladie qu’on appeloit en ce temps là faute d’argent, c’est douleur sans pareille (et toutefois, dit Rabelais, il avoit soixante et trois manières d’en trouver toujours à son besoin, dont la plus honorable et la plus commune étoit par façon de larcin furtivement fait) » ; — autant pour cette bande intrigante et peu scrupuleuse, la question d’argent est à la fois importante et légère, objet avoué de poursuite et de raillerie, un jeu et une occupation continuelle, et à toute heure sur le tapis, autant c’est un point sensible et douloureux pour ces natures pudiques et fières, timides et hautes, qui n’aiment ni à s’engager envers autrui ni à manquer à personne, qui ont souci de la dignité et de l’indépendance autant que les autres de l’intérêt. […] Gilbert a rassemblé à ce propos différents passages de ses maximes et de ses caractères, qui se rapportent évidemment à cette situation personnelle ; on le soupçonnait auparavant, on en est sûr désormais : et par exemple dans ce portrait de Clazomène qui est tout lui : « Quand la fortune a paru se lasser de le poursuivre, quand l’espérance trop lente commençait à flatter sa peine, la mort s’est offerte à sa vue ; elle l’a surpris dans le plus grand désordre de sa fortune ; il a eu la douleur amère de ne pas laisser assez de bien pour payer ses dettes, et n’a pu sauver sa vertu de cette tache. » L’amitié si tendre, si familière, que nous voyons établie entre Vauvenargues et Saint-Vincens nous permet de nous figurer en la personne de ce dernier un de ces amis dont La Fontaine avait vu des exemples autre part encore qu’au Monomotapa : Qu’un ami véritable est une douce chose ! […] Ainsi il est d’avis de tenter M. d’Oraison de deux manières : ou du côté de son fils, s’il persiste à le vouloir faire entrer dans le Régiment du roi : Vauvenargues, toute difficile qu’est la chose, s’en chargerait et en ferait son affaire ; — ou du côté d’une de ses filles : il s’engagerait bien à en épouser une dans deux ans, s’il n’était en mesure alors de le rembourser ; il payerait de sa personne, moyennant toutefois certaine condition de dot. […] Émile Chasles est-il allé trop loin, comme on l’a dit, en rapprochant ici Vauvenargues et Figaro dans ce fameux engagement où le barbier emprunteur avait donné à Marceline promesse de mariage et hypothèque sur sa personne ?

490. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Préface » pp. 1-22

On possède beaucoup d’observations faites sur des personnes attaquées de maladies mentales ; mais les autobiographies, les lettres écrites par ces personnes, les sténographies de leurs conversations ou de leurs discours, comme en a publié Leuret4, sont en trop petit nombre. […] J’ai vu une personne qui, en causant, en chantant, écrit, sans regarder son papier, des phrases suivies et même des pages entières, sans avoir conscience de ce qu’elle écrit. […] L’écrit finit toujours par une signature, celle d’une personne morte, et porte l’empreinte de pensées intimes, d’un arrière-fond mental que l’auteur ne voudrait pas divulguer. — Certainement on constate ici un dédoublement du moi, la présence simultanée de deux séries d’idées parallèles et indépendantes, de deux centres d’action, ou, si l’on veut, de deux personnes morales juxtaposées dans le même cerveau, chacune à son œuvre et chacune à une œuvre différente, l’une sur la scène et l’autre dans la coulisse, la seconde aussi complète que la première, puisque, seule et hors des regards de l’autre, elle construit des idées suivies et aligne des phrases liées auxquelles l’autre n’a point de part. — En général, tout état singulier de l’intelligence doit être le sujet d’une monographie ; car il faut voir l’horloge dérangée pour distinguer les contrepoids et les rouages que nous ne remarquons pas dans l’horloge qui va bien.

491. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — II. (Fin.) » pp. 98-121

L’ordre général de bataille était celui-ci : trois batailles, autrement dit trois corps de troupes, l’un commandé par le duc d’Orléans, frère du roi ; l’autre commandé par le duc de Normandie, fils aîné du roi (le futur Charles V), pour lors âgé de dix-neuf ans ; le troisième, par le roi en personne. […] Quant au prince en personne, avec le gros de ses forces, il se tenait au fond des vignes dans une position inexpugnable ; « tous armés, leurs chevaux assez près d’eux pour monter aussitôt, s’il étoit besoin : et ils étoient fortifiés et enclos, à l’endroit le plus foible, de leurs charrois et de tous leurs bagages : aussi ne les pouvoit-on approcher de ce côté ». […] Cependant la bataille commence mal pour les Français : le corps de chevaliers d’élite commandé par les maréchaux en personne, qui essaye de forcer l’entrée du chemin entre deux haies sous les traits des archers, n’y parvient pas et est refoulé en désordre sur le gros de l’armée. […] Toute cette scène de l’amenée du noble vaincu, de la cohue et du touillement qui se passe autour de sa personne est bien naturellement racontée ; on y assiste, on se sent dans la foule et en danger d’étouffer avec lui. […] Et toujours servoit le prince au-devant de la table du roi, et par toutes les autres tables, le plus humblement qu’il pouvoit ; et il ne se voulut asseoir à la table du roi pour prière que le roi lui en pût faire, mais disoit toujours qu’il n’étoit pas encore de telle valeur qu’il lui appartînt de s’asseoir à la table d’un si haut prince et d’un si vaillant homme comme étoit la personne du roi et comme il l’avoit montré en cette journée.

492. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « M. Boissonade. »

Boissonade sous d’aussi larges aspects, le montrer aussi ouvert et aussi hardi de vues qu’on le fait ici ; il avait réellement un peu peur, quoi qu’on puisse dire, des idées générales et de tout ce qui y ressemble, il s’en garait et s’en abstenait le plus possible ; on l’aurait bien étonné si on lui avait dit « qu’il préparait l’avènement de la presse philosophique » ; il avait, moins que personne, « de ces lueurs qui semblent des anticipations de l’avenir. » Tout cela est à côté et au-delà. […] Personne n’est plus sévère que moi à mes babioles. […] Avant d’être à Passy, où il se montra sur la fin peut-être un peu plus accessible, il habita plus d’un lieu, et notamment à Nogent-sur-Marne ; là, personne ne peut se vanter d’avoir pénétré dans son intérieur. […] Boissonade n’y mettait pas tant de malice : il ne narguait personne ; il prisait du bout des doigts, à sa façon, et ne faisait qu’obéir à son goût. […] Personne ne possédait mieux et ne citait plus volontiers, ne mettait plus souvent à contribution dans ses notes la littérature française du second ordre, le menu des auteurs et poètes du XVme siècle.

493. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

D’ordinaire des personnes notables et autorisées, sachant que de tels prix existent et que des sujets, à leur connaissance, sont aptes à les mériter, se mettent en avant et entament la candidature. […] Cette respectable personne, née en 1791, est par conséquent âgée aujourd’hui de soixante-quatorze ans. […] D’autres personnes de bien imitèrent la baronne Pasquier, et virent dans la jeune fille un auxiliaire tout trouvé de leur bienfaisance. […] Rencontrant autour d’elle des âmes généreuses qui lui fournissaient les occasions et les moyens, elle se prodiguait elle-même de sa personne avec dévouement. […] Il avait eu d’abord à faire partager son idée à ses supérieurs et à quelques personnes pieuses qui lui promirent leur secours.

494. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres mêlées de Saint-Évremond »

« Je reste en Angleterre, disait-il, ils sont accoutumés à ma loupe. » — Cette loupe à double étage, et de plus une calotte de maroquin qu’il n’ôtait jamais, étaient l’ornement inséparable de sa personne. […] Il savait autant que personne que la beauté est faite pour aimer la jeunesse, et qu’elle peut tout au plus consoler un vieillard. […] Elle n’a jamais refusé ni trahi personne. […] Jamais personne n’a eu si bon esprit, ni plus d’esprit qu’elle. […] Cousin avait été Alexandre ou le grand Condé en personne, de l’humeur dont on les connaît, et si l’on s’était avisé de se risquer à les contredire, on ne s’y serait pas pris autrement.

495. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Il en est de la vie comme de la personne la plus aimée : il n’y a pas tellement loin de la haine passionnée à l’amour ; c’est précisément parce qu’on l’a trop aimée, trop rêvée idéale, cette vie passagère, trop embrassée dans de rares et uniques instants, qu’on se met ensuite, quand on a l’âme grande, à s’en dégoûter opiniâtrement et à s’en déprendre. […] On raconta donc qu’étant à la campagne lorsque arriva cette mort imprévue de la plus belle personne de la Cour, et qui le préférait à tous les autres, il revint sans en être informé, et que, montant tout droit dans l’appartement dont il savait les secrets accès, il trouva l’idole non-seulement morte, mais encore décapitée ; car les chirurgiens avaient, dit-on, détaché cette belle tête pour la faire entrer dans le cercueil trop court. […] « Lorsqu’il venait à considérer que cette créature qui brilla a la Cour avec plus d’éclat qu’aucune femme de son siècle n’était plus, que ses enchantements avaient disparu, que c’en était fait pour jamais de cette personne qui l’avait choisi entre tant d’autres, il s’étonnait que son âme ne se séparât pas de son corps.  […] Au vrai, la conversion qui nous occupe ne saurait être attribuée à aucune  personne humaine, pas plus à M. d’Aleth qu’à M. de Comminges, pas même à l’esprit de ces exemples réitérés qu’offrait Port-Royal depuis plus de vingt ans. […] « Mais peut-être qu’une correspondance particulière entre deux personnes qui se sont aimées offre encore quelque chose de plus triste ; car ce ne sont plus les hommes, c’est l’homme que l’on voit.

496. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre premier. De l’illusion » pp. 3-31

Dans cet état, qu’on provoque à volonté chez beaucoup de personnes, le patient croit sans résistance ni réserve aux idées qu’on lui suggère 5, et l’on peut les lui suggérer de deux façons. […] Le patient aspira un moment et présenta ensuite tous les phénomènes qu’éprouverait une personne qui viendrait de prendre une poudre sternutatoire. » — Pareillement, « dites à une personne convenablement disposée par l’hypnotisme qu’elle mange de la rhubarbe, qu’elle mâche du tabac ou quelque autre substance désagréable au goût… et l’effet suivra vos paroles. […] Tout aussitôt il ajouta foi à cette suggestion et agit exactement comme ferait une personne piquée. […] Il souffrait évidemment d’une hallucination de la sensibilité générale. — On peut encore dire la même chose d’une personne, E.  […] Une dame vient de perdre son mari, s’afflige beaucoup, et, comme elle croit à l’immortalité de l’âme, elle s’occupe sans cesse de son mari comme d’une personne encore existante11.

497. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

Guizot : « Le socialisme puise son ambition et sa force à des sources que personne ne peut tarir. […] Le sage n’a de colère contre personne, car il sait que la nature humaine ne se passionne que pour la vérité incomplète. […] Car on exige de lui sur l’heure ce qu’il ne peut donner, et ce que personne ne possède, la solution du problème du moment. […] Ce qu’il y a de sûr, c’est que personne n’aura absolument raison ni absolument tort. […] L’esclave ancien n’était pas poétique, parce qu’il n’était pas considéré comme une personne morale.

498. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Discours préliminaire, au lecteur citoyen. » pp. 55-106

  Ce seroit sans doute ici le lieu de répondre à une foule de Libelles qui ont attaqué ma personne par des calomnies également absurdes & atroces. […] Que ces Apôtres de la tolérance & de la sublime politesse me déchirent* tant qu’ils voudront dans leurs Libelles & dans les Cercles où ils président, leurs calomnies ne m’enleveront jamais l’estime des personnes qui me connoissent ; & l’opinion de quiconque ne me jugeroit que d’après leurs imputations, doit m’être trop indifférente. […] J’honore, en général, tous les Gens de Lettres ; j’ai respecté & je respecterai toujours leurs personnes : mais leurs Ouvrages sont au public ; & en critiquant ceux qui m’ont paru de mauvais goût, en blâmant ceux que j’ai trouvés répréhensibles, j’ai usé de la liberté que les Auteurs ont eux-mêmes donnée à tous leurs Lecteurs. […] Il ignore donc, ce charitable Ministre du Dieu de paix, que trois ans avant la mort de ce Vicaire, j’ai déclaré que personne n’avoit eu part à mon travail, & défié tout Littérateur d’oser avancer qu’il m’eût fourni par écrit la moindre observation dont j’aie fait usage. On ne dira pas que ce défi, contre lequel l’Abbé Martin ni aucune autre personne n’a réclamé, ait été fait secrétement : il a été publié en 1773, dans le Mercure de France, dans le Journal des Beaux-Arts, dans les Annonces & Affiches pour la Provimce, & dans plusieurs autres Feuilles périodiques.

499. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chateaubriand homme d’État et politique. » pp. 539-564

Dans ce discours de réception à l’Académie qui ne put être prononcé, il disait dès l’abord énergiquement : Il y a des personnes qui voudraient faire de la littérature une chose abstraite, et l’isoler au milieu des affaires humaines… Quoi ! […] bon Dieu, princes de la terre, je ne détrône personne ; gardez vos couronnes, si vous pouvez, et surtout ne me les donnez pas, car je n’en veux mie. […] Chateaubriand fit preuve d’un grand talent d’écrivain, d’une passion incandescente, d’une assez grande habileté de tactique, et il travailla plus que personne à pousser la Restauration hors de la ligne modérée et à l’attirer dans des voies qui n’étaient nullement celles du juste milieu. […] Ce fut cette pensée de vengeance qui tout d’un coup le ramena à l’indifférence radicale sur les choses et sur les personnes, et qui dissipa, comme par enchantement, l’ivresse de son royalisme factice. […] Elle se fût brisée sans lui très probablement, mais plus que personne il peut se vanter d’y avoir mis la main.

500. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Études sur Saint-Just, par M. Édouard Fleury. (2 vol. — Didier, 1851.) » pp. 334-358

Il était joli homme, même beau de visage, et bien fait de sa personne. […] Certes, il n’a donné à personne d’humain le désir de savoir quelle eût été la suite, et ce qu’il aurait pu faire hors de sevrage et dans sa juste maturité ; mais, physiologiquement, je maintiens qu’à aucune époque Saint-Just ne fut mûr. […] Vers ce temps, Saint-Just, amoureux d’une jeune personne de Blérancourt, manqua sa poursuite, et on la maria à un notaire du pays. […] Ils se présenteront, à cet effet, dans le temple, le jour de la Fête de la vieillesse, au jugement de leurs concitoyens ; et, si personne ne les accuse, ils prendront l’écharpe. […] La femme et le fils de Lebas, personnes très honorables et que nous avons tous connus, ont, pendant soixante ans, plaidé ou directement ou insensiblement pour la mémoire de ces représentants terribles et qui, pour leur famille, n’étaient que d’intègres et purs citoyens, immolés et calomniés par une faction.

501. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

La réunion de différentes fins dans ma personne ne peut se concilier que d’une façon avec la division des moyens par lesquels, dans la société, ces fins se réalisent : il faut que je m’inscrive sur plusieurs listes à la fois et adhère à plusieurs « sociétés ». […] Si, chez les Anglo-Saxons et les Flamands, la liberté d’association est une des libertés « cardinales », en Allemagne toute réunion reste soumise, à la haute surveillance de la police ; en France, lorsque plus de vingt personnes se réunissent sans autorisation préalable, c’est un délit159. […] En ce sens, l’humanisme de la Renaissance, créant, par l’amour des lettres et des arts, de précieux traits d’union entre gens de races et de conditions différentes, préparait l’avènement de la personne humaine171. […] D’ailleurs, ce n’est pas seulement la puissance effective de l’individu que la complication sociale augmente, mais encore et surtout ses prétentions ; elle est faite pour mettre en relief la valeur propre à la personne. […] Au contraire, si les différents côtés de sa personne ressortissent à des sociétés différentes, il n’est plus si facile à l’esprit de le classer du premier coup et une fois pour toutes ; nous établissons plus malaisément entre sa valeur et la valeur reconnue de telle collectivité cette solidarité qui nous empêche, comme le veut l’égalitarisme, de rendre à chacun ce qui lui est personnellement dû.

502. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 433-434

Son esprit étoit orné ; elle avoit l’imagination vive & agréable, une érudition peu commune parmi les personnes de son sexe. […] « Si ce Livre me survit, dit-elle, je défends à toute personne, telle qu’elle soit, d’y ajouter, ni diminuer, ni changer jamais aucune chose, soit aux mots ou en la substance, sous peine à ceux qui l’entreprendront, d’être tenu pour détestables aux yeux des Gens d’honneur, comme violateurs d’un sépulcre innocent….

503. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

Personne, pas même celui qui y était le plus intéressé, ne m’éclaira sur cette faute. […] Les poètes romantiques de 1824 ne plaisantent pas, ils n’ont pas le plus petit mot pour rire ; et M. de Vigny moins encore que personne. […] Il n’aurait supporté de la part de personne qu’on lui fît sa leçon sur ce chapitre, et M. de Vigny, par trop d’insistance, put bien commencer dès lors à l’agacer un peu. […] L’auditoire se mit à respirer, à sourire, à applaudir, à donner à chaque parole, depuis le commencement jusqu’à la fin, une intention et une portée qu’elle n’avait pas eues, et que personne n’aurait soupçonnées à la lecture devant la Commission. […] J’avais bien prévu qu’il vous sentirait comme moi, c’est la personne du monde la plus sensible à la grâce et à l’esprit.

504. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

Je l’ai vu au fort d’Issy, un jour, où ça pleuvait rudement, et où sa nature sanguine se grisait du spectacle, sans pouvoir s’en arracher.” » Le général se sent écouté, et il parle, il parle beaucoup, et de beaucoup de choses et de personnes. […] Elle est vêtue d’une espèce de deuil violet, dans lequel l’élégance de sa personne a une grâce sévère, une grâce triste. […] Et il ajoute que Judith s’est créé, qu’elle s’est faite toute seule, qu’elle a été élevée comme un petit chien qu’on laisse courir sur la table, que personne, pour ainsi dire, ne lui a appris à écrire. […] Pauvre prince, mélancolique personne royale, dont la douce folie fuit son temps et son pays, pour se réfugier dans du passé, dans du moyen âge, dans de l’exotique. […] Il y a dans ses attouchements et ses frottements à votre personne, quelque chose de l’enlacement d’une plante grimpante.

505. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — III. Le Poëme épique, ou l’Épopée. » pp. 275-353

Pour se donner la réputation d’un homme capable, il osa contredire les personnes les plus célèbres par leur érudition, & assigner aux poëtes épiques une route nouvelle. […] L’abbé De Pons ne se crut pas vaincu pour se voir condamné par des personnes d’un mérite supérieur. […] Fontenelle osa encore moins que personne embrasser ouvertement un parti. […] Les personnes qui se décidèrent pour La Mothe, furent la marquise de Lambert, l’abbé Terrasson & l’abbé de Pons. […] On opposoit aux Despréaux, aux Huet, aux Porée, d’autres personnes dont l’opinion avoit été très-différente de la leur.

506. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Le visage humain ne nous paraît guère valoir la peine que personne tremble devant lui, et surtout un chrétien qui sait bien que tout ce limon s’en va retourner en poussière. […] Ce détail, d’une simplicité naïve, qui serait charmant partout, comme le sont l’obscurité et les trois gouttes d’eau d’une source, sied mieux, selon nous, à Audin qu’à personne. […] Or, comme Audin est un catholique dont la foi, le talent, l’érudition, les services et l’autorité ne sont mis en doute par personne, il est bon de dire comme il s’est trompé. […] Il est vrai qu’il importe moins d’être injuste pour les personnes que pour les choses. […] « Ce n’est pas le non-savoir qui perd les peuples, c’est le mal-savoir », a dit un écrivain qui savait mieux que personne.

507. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Changer de goût littéraire, c’est tout au moins confesser qu’à une certaine époque on ne l’a pas eu bon, et personne n’aime à faire cet aveu-là. […] Ces obstacles venaient à la fois des choses et des personnes. […] Outre ces obstacles de choses, Boileau en trouvait de plus grands dans les personnes. […] S’il n’existait pas des érudits dont cette recherche est la profession, personne ne s’en aviserait. […] Eût-il été plus beau, pour ne rien devoir à personne, d’omettre des vérités propres au sujet, du même ordre, et, pour ainsi dire, de la même famille ?

508. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Conduite de l’action dramatique. » pp. 110-232

Tout ce qui se présente, arrive entre des amis, entre des ennemis, ou entre des personnes indifférentes. […] Enfin, on peut faire qu’une personne qui, par ignorance, va commettre un très grand crime, le reconnaisse avant de l’exécuter. […] L’amour, dans la comédie, paraît être beaucoup plus à sa place ; et personne ne la lui a jamais contestée. […] Oui vraiment ; toutes les personnes de qualité les portent de la sorte. […] Les personnes de qualité portent les fleurs en en-bas ?

509. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 456-458

Avant Malherbe on ne connoissoit pas les bonnes Odes, & depuis lui personne ne s’est avisé de chanter sur la lyre cet horrible événement. […] Non véritablement : & faut, veuillez ou non, que vous desrorrillonniez, deschauvesourissiez, déretiez, c’est-à-dire, que ne portiez plus en aisles de chauvesouris ou en façon de retz, vos cheveux par lesquels soulez prendre diaboliquement & enfiler les hommes pour rassasier votre désordonné appétit, ou bien que vous soyez perdues & damnées……. par cette mondanité qui vous abuse, voire qui vous rend si laides & abominables à regarder ; que si vous saviez comme cela vous messied, vous y mettriez plutôt le feu que de les montrer par la mauvaise grace qu’ils vous donnent ; & pleust à la bonté de Dieu qu’il fust permis à toutes personnes d’appeler celles qui les portent, Paillardes & Putains, afin de les en corriger !

510. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 8, des differens genres de la poësie et de leur caractere » pp. 62-63

Personne ne quitta jamais par ce degoût qui vient de satieté la lecture des églogues de Virgile. […] On les relit plusieurs fois, et bien des personnes les retiennent sans avoir jamais pensé à les apprendre.

511. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Votre personne l’augmentera ; sous combien de rapports vous me serez chère ! […] Personne, je crois, ne l’a jamais sérieusement mise en doute, et M.  […] Tout le monde le sait, personne n’en doute. […] Renan que d’avoir voulu substituer à l’ancienne une nouvelle image de personne de Jésus. […] Personne au monde n’en a jamais rien su.

512. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

Personne. […] Cependant toutes ces graces ni tous ces honneurs ne donnerent point assez d’haleine à personne pour s’élever au haut du parnasse. […] Les beautez qu’on tire du nud dans les corps representez en action, n’avoient point été imaginées de personne. […] Il frappoit assez les personnes capables de faire des refléxions pour les obliger d’en rechercher les causes. […] Un esclave bon ouvrier étoit alors un tresor pour son maître, soit qu’il voulut vendre la personne ou les ouvrages de cet esclave.

513. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

Il n’en sait rien, ni moi non plus, ni personne. […] Il n’y a personne au monde à qui j’en doive davantage. […] Mais j’ai fait essai de ce morceau sur d’autres personnes. […] Fréron n’a parlé de personne, jamais, comme Voltaire a parlé de Rousseau dans ses Lettres sur la Nouvelle Héloïse ; il n’a parlé de personne, jamais, non pas même de d’Alembert ou de Marmontel, comme Grimm, dans sa Correspondance littéraire, a parlé de Fréron. […] Ce fut parmi nos Français du xviiie  siècle l’originalité de Galiani : sa personne, sa personne elle-même, sa personne tout entière était plus spirituelle que ses contes, que ses Dialogues, et que ses Lettres.

514. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (1re partie) » pp. 305-364

« Selon moi, le voici. » XI Alors, usant largement de l’attention passionnée qu’ils accordaient à ma personne et à mes paroles, je leur démontrai, avec une énergique sincérité, que personne n’avait le secret de l’organisation du travail, ni d’une organisation de fond en comble, d’une organisation parfaite de la société, dite socialisme, où il n’y aurait plus ni inégalité, ni injustice, ni luxe, ni misère ; qu’une telle société ne serait plus la terre, mais le paradis ; que tout le monde s’y reposerait dans un repos si parfait et si doux que le mouvement même y cesserait à l’instant, car personne n’aurait le désir de respirer seulement un peu plus d’air que son voisin ; que ce ne serait plus la vie, mais la mort ; que l’égalité des biens était un rêve tellement absurde dans notre condition humaine que, lors même qu’on viendrait à partager à parts égales le matin, il faudrait recommencer le partage le soir, car les conditions auraient changé dans la journée par la vertu ou le vice, la maladie ou la santé, le nombre des vieillards ou des enfants survenus dans la famille, le talent ou l’ignorance, la diligence ou la paresse de chaque partageur dans la communauté, à moins qu’on n’adoptât l’égalité des salaires pour tous les salariés, laborieux ou paresseux, méritant ou ne méritant pas leur pain ; que le repos et la débauche vivraient aux dépens du travail et de la vertu, formule révoltante, quoique évangélique, de M.  […] » Il entrouvrit enfin, juste assez pour me laisser entrer avec deux ou trois personnes, puis referma, aidé de nos épaules contre la pression croissante de la foule à laquelle nous venions d’échapper. […] Je dis un vrai misérable, parce que le titre du livre de Victor Hugo est faux, que ses personnages ne sont pas les misérables, mais les coupables et les paresseux, car presque personne n’y est innocent, et personne n’y travaille, dans cette société de voleurs, de débauchés, de fainéants, de filles de joie et de vagabonds ; c’est le poème des vices trop punis peut-être, et des châtiments les mieux mérités. […] Aussi là tout le monde est malheureux, et personne n’est coupable ; la société elle-même n’est qu’aveugle, et le juge, en rendant un arrêt consciencieux, ne fait qu’un acte de justice et de protection envers elle. […] Cela nuit terriblement et radicalement à l’intérêt pour cet honnête raisonneur, mais auquel, si ce n’était pas le prodigieux talent de son biographe, personne de sensé ne serait tenté de s’intéresser, que comme on s’intéresse à un monstre d’inconséquence !

515. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Par une lacune énorme d’éducation, de conscience et de cœur, au lieu de subordonner sa personne à l’Etat, il subordonne l’Etat à sa personne. […] En littérature, il avait le goût, si j’ose dire, un peu « pompier »  Il n’était pas proprement cruel ; j’entends qu’il n’a fait tuer presque personne en dehors des champs de bataille. […] » personne ne bougeait ; mais si l’on criait : « Voilà l’empereur !  […] Cela prouve seulement qu’il y a deux façons de se représenter la personne et l’œuvre de Napoléon. […] Je ne pensais pas qu’il pût échapper à personne que M. 

516. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1883 » pp. 236-282

Toutefois, malgré sa volonté et son courage, le changement qui se faisait en sa personne, apparaissait à tous les yeux, et le bruit se répandait qu’il avait un cancer. […] Je voudrais que la contexture fût différente, que ce livre eût le caractère de Mémoires d’une personne, écrits par une autre… Décidément le nom roman ne nomme plus les livres que nous faisons. […] Acheter un objet dans l’ignorance de tout le monde, à une vente complètement inconnue, et emporter cet objet, chez soi, où personne ne venait le voir : c’est ce que moi et les amateurs de mon temps faisaient. […] * * * — Si l’on était jeune, il y aurait un livre brave à faire, sous ce titre : Les choses que personne n’a encore imprimées. […] C’est curieux cette figure de la tata, de cette vieille dévouée, qui avait douze cents francs de rente, et qui s’était faite domestique de son neveu, et ne voulait personne pour l’aider dans ce service, où elle mettait une adoration jalouse.

517. (1833) De la littérature dramatique. Lettre à M. Victor Hugo pp. 5-47

Mais avant de signaler les causes de la décadence du théâtre, je dois faire connaître en peu de mots les personnes auxquelles nous les devons. […] Personne n’a admiré plus franchement que moi vos hautes poésies ; je ne dois pas les citer. […] le marquis Voltaire15, pour bien dérober il faut tuer les gens ; et jusqu’ici vous n’avez tué personne. […] Personne, j’ose le croire, ne verra dans les avertissements que je prends la liberté de vous donner, les vils motifs de la haine et de l’envie. […] Car enfin, si l’on veut avoir une littérature dramatique, il faut pour la juger un public qui soit tout à la fois le public de tout le monde et qui ne soit le public de personne.

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