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703. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Bazarof, du roman les Pères et les Enfants, voilà son prototype, au physique et au moral. […] Mon père était pasteur ; c’était l’image parfaite d’un prêtre de campagne. […] Son père avait à Manchester une maison de commerce, pour laquelle il voyageait sur le continent. […] William Griswold, pouvaient servir à justifier son père. […] Huxley, le père de l’agnosticisme.

704. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Ne suis-je pas Abraham qui vous ai tenu lieu de père ? […] Peut-être ce Breton croyait-il à ce que croyaient ses pères ? […] Son père se nommait Abgous et sa mère Darouba. […] C’en est fait du rêve de nos pères ! […] Je n’hésite pas à dire que ce sont les petits pères qui ont raison.

705. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Poésie — I. Hymnes sacrées par Édouard Turquety. »

Turquety, il est vrai, suit cette idée avec un sentiment de composition et d’ensemble systématique : ainsi, son présent volume, qui commence par un hosannah au Père céleste, s’achève par un hymne à son terrestre représentant, le pape. […] Je citerai celle-ci, par exemple, qu’il intitule : Domine, non sum dignus : C’était dans l’épaisseur du bois le plus profond, Une source coulait et murmurait au fond    Sur un lit de sable ou de pierre ; Et quand je fus auprès, sans que je visse rien, Une voix m’appela, disant : « Regarde bien,    C’est la fontaine de ton Père. » Oh !

706. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XII. Lo Ipocrito et Le Tartuffe » pp. 209-224

Ô père ! […] Les divagations du vieux Liseo font songer à un autre père malheureux, au roi Lear.

707. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre IV » pp. 38-47

ne démêle-t-on pas un besoin secret d’encouragement, dans cette tendresse suppliante, dont Henri IV, son père, et Louis XIV, son fils, furent si éloignés, dans le sentiment de leur force et de leur gloire ? […] La fortune voulut que celui qui faisait l’essai le fit en l’autre verre ; de sorte que le roi, quelque montrance que fît M. de Souvray, que le feu roi son père buvait même avec les moindres soldats, il ne voulut jamais boire.

708. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XI » pp. 89-99

Dix-huit auteurs ont concouru à l’œuvre poétique, savoir : le duc de Montausier, les sieurs Arnault Dandilly père et fils, Conrart, madame de Scudéry, Malleville, Colletet, Hubert, Arnaut de Corneille, des Réaux Tallemant, Martin, Gombeau, Godeau, le marquis de Briote, Montmor, Desmarets et deux anonymes. […] Madame de Montausier y fut rappelée quelques mois avant lui par la mort de son père.

709. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVI. Mme de Saman »

Mais bas-bleu de bonne heure, élevée sans mère dont elle ne parle pas et par un père qui pour tuer en elle le sentiment religieux et la prédisposer à la philosophie, lui faisait lire la correspondance de Voltaire et du Roi de Prusse, cette Prudence, sans prudence, ne fit, en vivant, que foncer son indigo davantage ; et ses amours, même les plus jeunes, et qui auraient dû être si roses, ne furent que de vaniteux amours de bas-bleu. […] Le crime de ces Enchantements de Prudence, qui sont plutôt des envoûtements, c’est d’avoir fait avec l’homme qu’elle dit avoir aimé ce que les fils de Noé firent avec leur père !

710. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’insurrection normande en 1793 »

L’Égalité politique et physiologique de Rousseau, lequel ne comprit jamais rien à l’unité complexe de la famille, pesait les hommes comme mâles et ne les pesait pas comme pères, par conséquent noyait les forces morales de l’ordre et de la société dans la force brute d’un nombre qui n’était pas du tout, malgré son titre, suffrage universel. L’application de cette théorie, — qui supprimait la famille chrétienne en faisant égaux en droit le père et le fils, renversait le foyer domestique et son crédit, donnait une prime aux turbulents, toujours prêts, contre les pacifiques, toujours promptement dégoûtés de ces orgies, et tout cela pour se terminer irrévocablement par des réactions que la force des choses veut et que le législateur devrait prévoir, ne fût-ce que pour organiser, — telle est, sans phrases, girondines ou autres, sans déclamation et sans haine, la Révolution française.

711. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Taine »

Je savais bien que dans quelque élucubration du philosophe qui un jour s’est réclamé, comme beaucoup de bâtards, de deux pères aussi différents qu’Hegel et Condillac, je ne rencontrerais jamais le métaphysicien transcendant, original et limpide ; mais l’ennuyeux, je n’y avais jamais pensé. […] Condillac, qui est un des deux pères dont se réclamait Taine, Condillac a tué son père Hegel dans l’esprit de Taine.

712. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Meurice » pp. 231-241

Quand, sorti de chez sa maîtresse pour rentrer chez sa femme, il y trouve des enfants qui, tout à l’heure, par le fait du roman, vont le mettre au supplice (sa fille en voulant épouser le fils d’un ennemi politique, son fils en jugeant et en réprouvant sa conduite quand il accepte le ministère), ce père, qui aurait pu être sublime dans ce déchirement de Laocoon, dévoré non plus par des serpents, mais par ses propres enfants, a perdu le bénéfice et l’auguste caractère de la paternité, et tous les sophismes de l’auteur n’ont pas le pouvoir de les restituer à cette paternité souillée. Dégradé par un indigne et sot amour comme homme, comme époux, comme tête qui pense, comme citoyen, comme chef d’État, Césara est encore dégradé comme père.

713. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre II. Des éloges religieux, ou des hymnes. »

Bientôt on vit les pères assembler leurs enfants au milieu des campagnes pour rendre les mêmes hommages. […] Le ton de leurs hymnes est imposant ; mais l’initié, en parlant à Dieu, semblait ne s’occuper que de ses propres besoins ; il oubliait que des êtres faibles, en louant leur père commun, ne doivent pas se séparer du reste de la famille, et implorer des bienfaits qui ne soient que pour eux.

714. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

Son père « n’a jamais voulu être contrôlé ni même persuadé. » Jamais « il n’a cédé sur un point auquel il croyait avoir droit. » Il a brisé la volonté de sa femme et l’a réduite au rôle de servante silencieuse ; il veut briser la volonté de sa fille1048, et lui imposer pour mari un sot brutal et sans cœur. […] Solmes, et pour la défense de l’autorité du père. » À présent la chose est une affaire de politique et de guerre. « Puisque vous avez déployé vos talents et tâché d’ébranler tout le monde, sans être ébranlée vous-même, c’est à nous maintenant de nous tenir plus fermes et plus serrés ensemble. » Ils forment « une phalange rangée en bataille », où chaque conviction alourdit les autres de tout son poids. […] Elle ne résiste pas en face à son père ; cela serait contre l’humilité filiale. […] À ce moment-là toutes les affections du père sont blessées, toutes ses consolations perdues, toutes ses espérances ruinées. […] Religieux, affectueux, raisonneur, il concilie des dispositions qui semblaient s’exclure ; ecclésiastique, cultivateur, père de famille, il relève des caractères qui ne semblaient propres qu’à fournir des comiques et des bourgeois.

715. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Le morceau le plus intéressant de ce volume n’est pas de Diderot ; il est de sa fille, madame de Vandeul, qui a écrit une biographie de son père. […] Il a bien prouvé qu’il l’avait dans le Paradoxe du comédien, dans l’Entretien d’un père avec ses enfants et dans son Neveu de Rameau. […] ne furent pas repris, si ce n’est le Père de famille, dont La Harpe a dit qu’il « n’y a pas de pièces aussi peu suivies », et qui fut, nonobstant, joué jusqu’en 1833, pour définitivement disparaître. […] Plus tard, on eût pu lui donner pour théâtre et pour Parnasse les petites maisons… Le Père de famille fut regardé comme son chef-d’œuvre, dans un instant où les caricatures philosophiques étaient à la mode. […] Les pièces qu’il a fait jouer ou qu’il pouvait faire jouer sont peu nombreuses : c’est le Fils naturel, le Père de famille, les Pères malheureux, le Joueur, imité de l’anglais, et la comédie de : Est-il bon ?

716. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

Il introduit sur la scène un vigneron du bourg d’Athmone, bon père de famille, que désole la fureur belligérante de la Grèce : le manant s’élance porté sur un monstrueux escarbot : que signifie cette monture ? […] Le sujet des Adelphes en est un exemple : l’auteur veut corriger le vice de deux systèmes d’éducation également dangereux : deux enfants d’un même père sont élevés chacun séparément par deux frères : Micion, plus riche que Démée, adopta son fils aîné, qu’il nourrit et fit instruire à la ville avec une extrême douceur, tandis que son second neveu demeura dans les champs, près de son père, qui le gouverna très rigoureusement. […] Ce père farouche et rigide se transforme tout à coup en un vieillard désordonné, prodigue, et résolu d’achever joyeusement sa vie dans les débauches et dans les festins. […] Le comique d’ailleurs rejaillit plus vivement de la situation d’un amoureux tuteur dupé par une fille rusée, que de celle d’un père abusé sur les mœurs de son fils. […] L’avarice rend méchant père ; Harpagon ne donne à son fils que sa malédiction, et s’inquiète peu des mœurs et du sort de sa fille, pourvu qu’on la lui prenne sans dot.

717. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Leurs pères étaient anarchiques, ils sont libres et indépendants ; leurs pères étaient marins et pirates, ils sont marins et commerçants ; leurs pères étaient fermiers, pêcheurs, chasseurs, ils sont encore fermiers, pêcheurs et chasseurs ; leurs pères voyaient le monde animé par des légions de travailleurs invisibles nommés trolls ou nains, ils ont réalisé ce rêve et ont fait de l’Angleterre un royaume de trolls étonnamment actifs. […] Qui a jamais trouvé étonnant qu’un fils ressemblât à son père non seulement au physique, mais au moral ? […] Shandy père sur l’influence des noms de baptême, ne paraîtra pas déplacée en pareil sujet. […] Ce lieutenant Lefebvre à l’agonie si touchante, Sterne en avait entendu raconter l’histoire à son père. […] Comprend-on un père assez dépourvu de sens moral pour insulter à ce point à la pudeur de sa fille !

718. (1905) Études et portraits. Portraits d’écrivains‌ et notes d’esthétique‌. Tome I.

Ils préférèrent reprocher au railleur impitoyable le métier de son père et les incertitudes de ses débuts. […] Où le retrouver, ce Dieu personnel, ce Père qui était aux cieux, le seul être avec qui l’âme pût engager le dialogue immortel du repentir et du pardon ? […] Son père est un pauvre diable de professeur pauvre qui gagné à grand’peine la vie des siens à travers beaucoup d’humiliations. […] Quand les premiers accès se furent produits, il eut le courage de prendre dans la bibliothèque de son père les livres qui traitaient du terrible mal. […] De la conversation, de cet aimable goût qu’avaient nos pères de jouer à la raquette avec les idées, que reste-t-il ?

719. (1910) Victor-Marie, comte Hugo pp. 4-265

Non plus seulement un Adam charnel, créé, tenté, perdu, chassé, père de tout homme, mais un deuxième Adam charnel, enfanté, élu, choisi père d’un peuple élu. […] Ce qui fait l’unique beauté de cette liste, c’est précisément cette modeste, cette obscure homogénéité ; tous au même rang, qui est le rang de père et le rang de fils ; paternité, filiation ; père, fils, père, fils, tous la même chose ; tous la même obscure grandeur ; tous les uns comme les autres ; ce long défilé de noms et d’hommes où nous ne pouvons en saluer que quelques-uns, les célèbres, qui intellectuellement, spirituellement emplissent, ont l’air d’emplir la mémoire et l’histoire. […] Puis il descend de cascade en cascade, de grade en grade, il déduit de père en fils, de génération charnelle en génération charnelle. […] Comme fils, comme père. […] Partant de Jésus, qu’il a, il remonte le fil jusqu’au dernier terme, au premier, jusqu’au premier auteur, jusqu’au premier père.

720. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

François Hugo trahit en ce moment son père en publiant une traduction de Shakespeare. […] — Surtout, travaille, dit le père. […] » reprit le père du ton de Barbe-Bleue questionnant sa femme. […] pour tous ceux qu’aimèrent nos pères ! […] Vous n’avez pas de père, donc vous n’existez pas ; voilà votre phrase.

721. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1871 » pp. 180-366

N’ont-ils pas, chez un de mes amis, décroché le portrait de son père, ne lui ont-ils pas fait un trou à la place de la bouche… ! […] Est-ce un père ? […] Le père, qui était au chevet de son fils, a disparu. […] reprend le père. Vous entendez la scène. — Allons, vingt-cinq. » Le père se calme, tend la main, et file.

722. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1885 » pp. 3-97

Il ne portait pas dans la vie courante, le nom nobiliaire de son père, mon grand-père, le député du Bassigny en Barrois à la Constituante, ne voulant être appelé que M.  […] Son père, un légitimiste forcené, se refuse à ce qu’il serve Louis-Philippe. […] Il fait donc son droit à Caen, où étant devenu l’amant d’une femme, son père exige qu’il fasse un choix entre lui et la femme. […] Alors commence à dix-sept ans, une vie pendant laquelle son père ne lui envoie pas une pièce de cent sous. […] Daudet me parlait aujourd’hui de sa mère, dont il tient plus que de son père ; de celui-ci il n’aurait que les violences.

723. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

Enfin vous remplacerez son père, sa mère et moi autant que possible, n’est-il pas vrai ? […] « — Je le crois bien, dis-je ; elle n’avait plus son père nourricier ! […] père ! […] La monarchie de ses pères écartée, il ne lui restait que l’empire. […] Il ne voulait pas lui-même placer un obstacle de plus sur la route d’une restauration que son père avait ramenée de l’exil.

724. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Je n’ai qu’à transcrire les documents suivants :‌ Dépêche de Pontchartrain à M. de Mesnars, en date du 2 avril 1686 : « Monsieur, les nommés Cochard, père et fils, s’estant convertis, il n’y a qu’à renvoyer les ordres qui avoient esté adressez au lieutenant général de Meaux pour les faire arrester parce qu’ils n’avoient esté expédiez qu’à cause de leur religion, à la prière de M. l’évesque de Meaux. […] Touchés de tant de merveilles, épanchons nos cœurs sur la piété de Louis ; poussons jusqu’au ciel nos acclamations, et disons à ce nouveau Constantin, à ce nouveau Théodose, à ce nouveau Marcien, à ce nouveau Charlemagne, ce que les six cent trente Pères dirent autrefois dans le concile de Chalcédoine ; « Vous avez affermi la foi, vous avez exterminé les hérétiques : c’est le digne ouvrage de votre règne, c’en est le propre caractère. […] Ils ont raison ; mais il faut comprendre que la science pour eux se borne à la connaissance de l’Écriture sainte et des Pères. Bossuet, en effet, connut à fond les Pères, l’Ancien Testament et quelques philosophes ou moralistes de l’antiquité classique. […] Quand le futur évêque de Meaux écrivait dans un placet au roi : « Nous avons à cœur d’établir un ordre et union à Metz entre tous les sujets de Votre Majesté », cela voulait dire qu’il prétendait user de tous les moyens pour refuser le droit de vivre à une fraction de la population de Metz ; plus tard dans un prêche aux Nouvelles Converties, s’adressant aux protestantes arrachées par la force à leurs maris ou à leurs pères, puis incarcérées, il les nommera : « ces pauvres filles, qui sont venues à l’Église, … qui ont couru à nous… » !

725. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

Les bruits de cette illégitimité parvinrent aux oreilles des véritables héritiers du nom et de la fortune de Devonshire ; on menaça le père, la mère et le fils d’un procès ; les témoignages domestiques abondaient ; des scandales si compliqués auraient fait une explosion déplorable dans l’aristocratie anglaise. […] XXVIII Le nom de famille de madame Récamier était Julie-Adélaïde Bernard ; son père était membre de la bonne et riche bourgeoisie de Lyon. […] Par son amitié pour la mère dont la santé altérée menaçait de laisser Juliette orpheline, il pouvait être pour la jeune fille un appui dans la vie ; par son âge il pouvait être son père. […] Presque toute cette société était jeune, car le supplice en ce temps avait raccourci la vie des pères ; il manquait un degré ou deux à l’échelle ordinaire des générations : la guillotine avait rajeuni les salons de Paris. […] Je vis clairement que le roi aspirait à échapper aux ministres de 1830 pour s’entourer de serviteurs nés de la royauté de ses pères.

726. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

L’effroi le lui a permis ; plus rarement c’est la pitié qui l’inspire, comme pour cette bizarre et excessive jeune femme, la Louise des Temps difficiles, qui s’échappe si violemment de la dure éducation de chiffres et de faits, de brutal égoïsme et de froid détachement dans laquelle l’enserraient son père et son mari, pour sentir sourdre en elle la révolte des sentiments cordiaux. […] Dick de David Copperfield ; Smike, l’idiot de Nicolas Nickleby, qui représentent la bonté des créatures inintelligentes selon le monde, ce pauvre enfant malade de gens riches, le petit Paul de Dombey, qui, avec une âme vieille de moribond, porte à sa sœur un exclusif attachement dont son père est si douloureusement jaloux. […] Pickwick se résigne à se laisser enfermer dans la prison pour dettes afin de ne pas payer une indemnité à laquelle il se sent injustement condamné, et quand, avec un attachement bouffon, Samuel Weller se fait incarcérer avec son maître à la requête de son vieux coquin de père. […] Né dans une famille de pauvres employés du commissariat de la marine, son père étant le brave homme dépensier, cérémonieux et faible que nous montre M.  […] Son père, qui avait des dettes, fut emprisonné à la maréchaussée et toute la famille alla y demeurer avec lui.

727. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

Son père, maître des requêtes, avait été intendant à Auch, et occupait à Paris, au moment de la Révolution, une place importante, quelque chose comme une direction générale ; il fit partie en 89 de l’administration de la commune de Paris, mais fut très-vite dépassé : il périt en 94 sur l’échafaud. […] La jeune fille se dit qu’elle montrera les lettres à son père dès qu’il arrivera, et on l’attend de jour en jour. […] les doux sentiments personnels redoublent le pas en s’associant à ceux des pères et des aïeux. A un certain moment, le jeune homme, qui lit Werther, se monte la tête ; le style de ses lettres s’échauffe ; cela va se gâter, quand tout à coup le père, au lieu d’arriver, envoie une de ses sœurs, une tante de la jeune fille, qui la vient chercher et comme enlever du soir au lendemain. […] La première donnée historique ici était vague ; on ne disait pas le règne, on ne désignait qu’en termes généraux le ministre : pourtant Mme de Rémusat, en y insistant, parvint à imprimer à ses tableaux une couleur fidèle, à reproduire de vrais Espagnols, une vraie cour, de vrais moines : il y a un père jésuite qui agit et parle merveilleusement.

728. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « M. Deschanel et le romantisme de Racine »

Une fille qui aime mieux son amant que son père (car c’est cela au fond), une fille dont la volonté est impuissante à étouffer la passion et qui reste sympathique par cela même, quel scandale ! […] Racine n’a qu’un mot très froid sur la mort de la Champmeslé ; mais il était alors marié, père de famille, déjà vieux. […] Racine fait prendre le voile à quatre de ses filles. « Au temps de Louis XIV et de Bossuet, les parents n’égorgeaient plus leurs filles sur un autel ; ils les mettaient au couvent… Racine lui-même ne s’en faisait pas faute… Le père, allant pleurer à chaque prise de voile, se croyait quitte envers sa sensibilité32. » Cela est fort spirituel ; mais d’abord deux des filles de Racine entrèrent au couvent et non pas quatre, et encore l’une des deux en sortit. […] Un homme entre deux femmes (Andromaque, Bajazet), un amant qui se sépare de sa maîtresse pour des raisons de convenance (Bérénice), la lutte entre deux frères de lits différents ou entre une mère ambitieuse et un fils émancipé (Britannicus), un père rival de son fils (Mithridate), même une femme amoureuse de son beau-fils (Phèdre), ce sont là des choses qui se voient, des situations où nous pouvons, un beau jour, nous trouver impliqués. […] Je ne pense pas qu’on ait exagéré la tendresse de Racine. « Mon père était tout cœur71. » « Racine qui aime pleurer…72. » Il faut répéter ici ce qui a été dit mille fois : Racine est bien le poète de l’amour.

729. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Les Vies des Pères du désert n’offrent rien à comparer au tableau suivant extrait du Mahâbhârata : « Le roi s’avança vers le bosquet sacré, image des régions célestes ; la rivière était remplie de troupes de pèlerins, tandis que l’air retentissait des voix des hommes pieux qui répétaient chacun des fragments des livres sacrés. […] Docteurs noirs et scolastiques, soigneux seulement de votre Incarnation et de votre Présence réelle, le temps est venu où l’on n’adorera le Père ni sur cette montagne, ni à Jérusalem, mais en esprit et en vérité 205. […] C’est dans les Pères, c’est dans les conciles qu’il faut chercher le vrai christianisme, et non chez des esprits à la fois faibles et légers qui l’ont faussé en l’adoucissant, sans le rendre plus acceptable. […] Mais non, il n’y a que l’inflexible nature ; quand je cherche ton œil de père, je ne trouve que l’orbite vide et sans fond de l’infini, quand je cherche ton front céleste, je vais me heurter contre la voûte d’airain, qui me renvoie froidement mon amour. […] Chacun de nos pères a pu dire : « je suis un ancêtre, moi. » Vous êtes arrière-petits-fils de croisés ; moi, je suis fils d’un soldat de la République.

730. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VIII, les Perses d’Eschyle. »

Délivrez la patrie, vos enfants, vos femmes, et les temples des dieux de vos pères, et les tombeaux de vos ancêtres ! […] Viens, ô notre père, magnanime Darius ! […] Viens, ô père ! […] » — Atossa accuse les courtisans de son fils ; ce sont eux qui l’ont poussé vers l’Hellade, en lui reprochant de rester oisif, sans agrandir par l’épée le domaine que son père lui avait conquis par l’épée. — Darius réprouve ces conseillers de malheur. […] Il apparaît accoutré des guenilles royales dont Darius parlait tout à l’heure, un carquois sans flèches pendant à l’épaule, plus lugubre encore que son père, étant un spectre vivant.

731. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1878 » pp. 4-51

Dans un bal, ce Martener, qui était médecin, comme son père, en un tour de valse que fit sa fille, à un rien, à une pose de son cou, la vit poitrinaire, morte, perdue. […] Mon père ne prévoyait guère, quand il faisait la campagne de Russie, une épaule cassée à la bataille de la Moskova, et qu’un peloton de cosaques passant comme une trombe, le forçait à finir un morceau de cheval sur le toit d’une habitation, en faisant le coup de pistolet, mon père ne prévoyait guère que son fils serait un jour apprécié par une compatriote de ces cosaques. […] Et comme bouquet de la fin, il narre l’histoire d’un pessaire retiré, au bout de dix-sept ans, par son père, du ventre d’une marchande de poissons, et dont l’infection était telle, que trois internes de l’hôpital de Rouen tombaient évanouis sur le cul. […] Encore enfant, au temps des confitures, son père et sa mère le chargeaient d’aller chercher un pain de sucre, chez un distillateur de leurs amis, qui demeurait rue des Cinq-Diamants.

732. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre IV. Shakespeare l’ancien »

et ne ricanera-t-on point au vers d’Eschyle : Egyptus, le père aux cinquante fils ? […] Traduisez : dieux sauveurs, dieux bienfaisants, dieux illustres, dieux aimant leur mère, dieux aimant leurs frères, dieux aimant leur père. […] Ptolémée VI était appelé Dieur Aime-Mère, Philométor, parce qu’il haïssait sa mère Cléopâtre ; Ptolémée IV était Dieu-Aime-Père, Philopator, parce qu’il avait empoisonné son père ; Ptolémée II était Dieu-Aime-Frères, Philadelphe, parce qu’il avait tué ses deux frères. […] Ptolémée Évergète, voulant compléter l’œuvre du Philadelphe son père, résolut de donner Eschyle à la bibliothèque d’Alexandrie. […] Gutenberg est comme le second père des créations de l’esprit.

733. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SUE (Jean Cavalier). » pp. 87-117

Arthur, doué de toutes les qualités de la naissance, de la fortune, de l’esprit et de la jeunesse, Arthur, doué d’une puissance rare d’attraction et du don inappréciable d’être aimé, a reçu de bonne heure, d’un père misanthrope, un ver rongeur, la défiance ; la défiance de soi et des autres. Les mortelles leçons de ce père trop éclairé et inexorable d’expérience ne sont, selon moi encore, que trop vraies (je parle en général) ; c’est du La Rochefoucauld développé et senti, c’est du Machiavel domestique ; bien des pages du chapitre intitulé le Deuil ont même de certains accents de morose éloquence. Mais cette science amère, ce résidu et comme cette cendre de la vie, que ce père imprudent de sa main mourante sème au cœur de son fils, va petit à petit l’empoisonner. […] A ce moment une fatale pensée traverse l’âme d’Arthur ; les avis funèbres de son père se réveillent, le germe de méfiance remue en lui : n’est-il pas dupe d’une feinte intéressée ?

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