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481. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Feuilles d’automne » (1831) »

À l’adolescent, elle parle de l’amour ; au père, de la famille ; au vieillard, du passé ; et, quoi qu’on fasse, quelles que soient les révolutions futures, soit qu’elles prennent les sociétés caduques aux entrailles, soit qu’elles leur écorchent seulement l’épiderme, à travers tous les changements politiques possibles, il y aura toujours des enfants, des mères, des jeunes filles, des vieillards, des hommes enfin, qui aimeront, qui se réjouiront, qui souffriront. […] Ce n’est point-là de la poésie de tumulte et de bruit ; ce sont des vers sereins et paisibles, des vers comme tout le monde en fait ou en rêve, des vers de la famille, du foyer domestique, de la vie privée ; des vers de l’intérieur de l’âme.

482. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1895 » pp. 297-383

Bousquet, raconte qu’il a été un moment tellement séduit par le Japon, qu’il avait écrit à sa famille de quitter la France, de lui amener une demoiselle dont il était épris, et qu’ils vivraient tous là, comme dans le Paradis. […] Des héros au crânes étroits de crétins ; des meubles aux formes droites sur des pieds maigres, des intérieurs de famille avec des petits enfants, travestis en vétérans de famille impériale ; mais au milieu de cela, des nippes remuantes et des défroques plus mémoratives, que tous les imprimés. […] Triste famille, où la belle-sœur d’Oscar, une pauvre créature, chez laquelle l’indignation est morte, disait à Shérard, que tous les Wilde étaient des fous. […] vous êtes d’une famille qui ne craint pas d’entrer dans la chambre d’un pestiféré !  […] Et voici dans « la Famille Pajou » les types, et la mode presque rustique, de la bourgeoisie jeune et vieille de la fin de l’Empire.

483. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Ainsi, dans la famille des Écureuils, nous trouvons la série la plus parfaite, depuis les espèces à queue légèrement aplatie, ou qui ont seulement, d’après les observations de sir J. […] Cependant ce membre anormal de la famille toute terrestre des Merles ne se nourrit qu’en plongeant, s’accrochant aux pierres avec ses pieds, et se servant de ses ailes sous l’eau. […] Quelques plantes, telles que certaines Légumineuses et certaines Violacées, etc., portent deux espèces de fleurs ; les unes présentent la structure normale de la famille, et l’on observe chez les autres une déviation ou une dégénérescence du type, bien qu’elles soient quelquefois plus fertiles que les autres. […] Personne, je pense, ne contestera d’après cela que les freins ovigères dans l’une des familles ne soient srictement homologues aux branchies de l’autre famille ; d’autant plus que, en réalité, elles se graduent insensiblement l’une dans l’autre. […] La présence d’organes lumineux chez quelques insectes, appartenant à différentes familles ou ordres, offre des difficultés semblables103.

484. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre IV. Services généraux que doivent les privilégiés. »

La famille a représenté au roi le mauvais état des affaires de M. le prince de Pons, et Sa Majesté a bien voulu accorder à M. le prince Camille, son fils, 15 000 livres de la pension vacante par la mort de son père, et 5 000 livres d’augmentation à Mme de Marsan. » — M. de Conflans épouse Mlle Portail : « En faveur de ce mariage, le roi a bien voulu que, sur la pension de 10 000 livres accordée à Mme la présidente Portail, il en passât 6 000 à M. de Conflans après la mort de Mme Portail. » — M. de Séchelles, ministre qui se retire, « avait 12 000 livres d’ancienne pension que le roi lui conserve ; il a, outre cela, 20 000 livres de pension comme ministre ; et le roi lui donne encore outre cela 40 000 livres de pension »  Parfois les motifs de la grâce sont admirables. […] Si l’institution d’une chambre haute est repoussée, c’est que la plèbe des gentilshommes ne veut pas souffrir aux grandes familles une prérogative dont elles ont abusé. […] De plus, autour de lui, nombre de gens experts, vieux conseillers de famille, rompus aux affaires et dévoués au domaine, bonnes têtes et barbes grises, lui font respectueusement des remontrances quand il dépense trop ; souvent ils l’engagent dans des œuvres utiles, routes, canaux, hôtels d’invalides, écoles militaires, instituts de science, ateliers de charité, limitation de la mainmorte, tolérance des hérétiques, recul des vœux monastiques jusqu’à vingt et un ans, assemblées provinciales, et autres établissements ou réformes par lesquels un domaine féodal se transforme en un domaine moderne. […] À tout le moins, il a comme eux son amour-propre, ses goûts, ses parents, sa maîtresse, sa femme, ses familiers, tous solliciteurs intimes et prépondérants qu’il faut d’abord satisfaire ; la nation ne vient qu’ensuite  En effet, pendant cent ans, de 1672 à 1774, toutes les fois qu’il fait une guerre, c’est par pique de vanité, par intérêt de famille, par calcul d’intérêt privé, par condescendance pour une femme. […] Sommes ordonnancées dans le Livre Rouge de 1774 à 1789 : 227 985 716 livres, dont 80 millions en acquisitions et dons à la famille du roi

485. (1860) Cours familier de littérature. X « LXe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 401-463

J’eus quelque peine à leur faire comprendre qu’un pacte de famille était un contresens diplomatique à une monarchie élective et révolutionnaire en France, que la nation se soulèverait inévitablement à cette nouvelle, comme à une déclaration de guerre au principe révolutionnaire de Juillet, et que des défis d’opinions répondraient promptement au dedans à ce défi diplomatique de la couronne. Quant au dehors, il me fut moins difficile de leur démontrer que l’Angleterre considérerait immédiatement ce pacte de famille en Espagne comme une déclaration de guerre à ses influences à Madrid ; que Louis-Philippe lui paraîtrait un transfuge de son alliance dans une alliance dynastique indépendante de l’Angleterre, et qu’à partir de cet acte (prise de possession de l’avenir en Espagne, pierre d’attente de l’union des deux monarchies, la France et l’Espagne), le cabinet de Londres abandonnerait le cabinet d’Orléans à l’animadversion des puissances du Nord, animadversion que l’Angleterre seule avait contenue jusqu’à ce jour. […] « Il arrivera que les peuples, les vrais peuples, ceux qui ont l’orgueil de leur indépendance, la vertu de leur patriotisme, le zèle sacré de leur famille, de leur propriété, de leur gouvernement, monarchie ou république, commenceront à s’étonner, puis à s’alarmer, puis à s’irriter de cette invasion de la France, et à se demander si la liberté apportée à la pointe des baïonnettes ou des piques étrangères est bien la liberté ou la servitude. […] Demandez à tous les États constitués de l’Europe s’ils reconnaissent ce principe des nationalités dans ces innombrables annexions de nations ou de fragments de nations qui, de gré ou de force, ont composé, avec le laps du temps, la puissance dont ces nationalités forment aujourd’hui le bloc national ; demandez-le à l’Écosse, demandez-le à l’Irlande, demandez-le à la Pologne, à la Galicie, à la Silésie, à la Hongrie, à l’Ukraine, à la Crimée, à tous ces démembrements de races, de tribus, de provinces, de peuplades, de familles humaines agglomérées aux noyaux des grands empires, des grandes républiques, des grandes monarchies. […] La seule alliance possible de l’usurpation de famille en France était l’alliance anglaise.

486. (1839) Considérations sur Werther et en général sur la poésie de notre époque pp. 430-451

» …… Byron dans tous ses ouvrages et dans toute sa vie, Goethe dans Werther et Faust, Schiller dans les drames de sa jeunesse et dans ses poésies, Chateaubriand dans René, Benjamin Constant dans Adolphe, Senancourc dans Oberman d, Sainte-Beuve dans Joseph Delorme, une innombrable foule d’écrivains anglais et allemands, et toute cette littérature de verve délirante, d’audacieuse impiété et d’affreux désespoir, qui remplit aujourd’hui nos romans, nos drames et tous nos livres, voilà l’école ou plutôt la famille de poètes que nous appelons Byronienne : poésie inspirée par le sentiment vif et profond de la réalité actuelle, c’est-à-dire de l’état d’anarchie, de doute et de désordre où l’esprit humain est aujourd’hui plongé par suite de la destruction de l’ancien ordre social et religieux (l’ordre théologique-féodal), et de la proclamation de principes nouveaux qui doivent engendrer une société nouvelle. En face de cette école, fille directe de la philosophie du Dix-Huitième Siècle, est venue se placer une autre famille poétique. dont Lamartine et Hugo sont les représentants et les chefs en France ; école qui, au fond, est aussi sceptique, aussi incrédule, aussi dépourvue de religion que l’école Byronienne, mais qui, adoptant le monde du passé, ciel, terre et enfer, comme un datum, une convention, un axiome poétique, a pu paraître aussi religieuse que la poésie de Byron paraissait impie, s’est faite ange par opposition à l’autre qu’elle a traitée de démon, et cependant a fait route de conserve avec elle pendant plus de quinze ans, à tel point que l’on a vu les mêmes poètes passer alternativement de l’une à l’autre, sans même se rendre compte de leurs variations, tantôt incrédules et sataniques comme Byron, tantôt chrétiens résignés comme l’auteur de l’Imitation. » Quand nous écrivions cela, une femme de génie n’avait pas encore ajouté toute une galerie nouvelle à la galerie de Byron. […] Mais si on lui refuse d’être le père de tant d’ouvrages du même genre qui l’ont suivi, au moins faut-il reconnaître qu’il fut le premier-né de cette famille si nombreuse, et qu’il a précédé de bien des années tous ses frères et sœurs. […] Les trois grands milieux du cœur de l’homme, la Nature, l’Humanité, la Famille, sont donc sentis dans ce livre, et sentis d’une ardeur pure et sincère, mais isolément sentis. […] L’harmonie donc entre ces trois choses, la Nature, l’Humanité, la Famille, n’existe pas pour Werther ; et la plus grande de ces trois révélations divines, l’Humanité, est aussi celle qui brille le plus faiblement et le plus rarement à ses yeux.

487. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre III. De la logique poétique » pp. 125-167

. — Chez les Romains, nomina désigna d’abord et dans son sens propre les maisons partagées en plusieurs familles. […] Il existe ici un homme qui, à la suite d’une violente attaque d’apoplexie, se souvenait bien des noms, mais avait entièrement oublié les verbes. — Les verbes qui sont des genres à l’égard de tous les autres, tels que : sum, qui indique l’existence, verbe auquel se rapportent toutes les essences, c’est-à-dire tous les objets de la métaphysique ; sto, eo, qui expriment le repos et le mouvement, auxquels se rapportent toutes les choses physiques ; do, dico, facio, auxquels se rapportent toutes les choses d’action, relatives soit à la morale, soit aux intérêts de la famille ou de la société, ces verbes, dis-je, sont tous des monosyllabes à l’impératif, es, sta, i, da, dic, fac ; et c’est par l’impératif qu’ils ont dû commencer. […] Le besoin d’assurer les terres à leurs possesseurs fut un des motifs qui déterminèrent le plus puissamment l’invention des caractères ou noms (dans le sens originaire de nomina, maisons divisées en plusieurs familles ou gentes). […] Les familles, puis les nations, les employèrent d’abord par nécessité. […] Ils portaient avec eux leur signification ; ainsi trois épis, ou le geste de couper trois fois des épis, signifiait naturellement trois années ; d’où il vint que caractère et nom s’employèrent indifféremment l’un pour l’autre, et que les mots nom et nature eurent la même signification, comme nous l’avons dit plus haut.Ces armoiries, ces armes et emblèmes des familles, furent employés au moyen âge, lorsque les nations, redevenues muettes, perdirent l’usage du langage vulgaire.

488. (1883) La Réforme intellectuelle et morale de la France

Une dynastie est la meilleure institution pour cela ; car, en associant les chances de la nation à celles d’une famille, une telle institution crée les conditions les plus favorables à une bonne continuité. […] La monarchie, en liant les intérêts d’une nation à ceux d’une famille riche et puissante, constitue le système de plus grande fixité pour la conscience nationale. […] La famille qui a fait la France en neuf cents ans existe ; plus heureux que la Pologne, nous possédons notre vieux drapeau d’unité ; seulement, une déchirure funeste le dépare. […] On ne forme pas une armée, comme on forme une administration des domaines ou des tabacs, par le choix libre des familles et des jeunes gens. […] D’abord, il y faudrait une trentaine de sièges héréditaires, réservés aux survivants d’anciennes familles, dont les titres résisteraient à un travail historique et critique.

489. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

Dieu mieux, il connaît le plus souvent les familles, la parenté, les tenants et les aboutissants, et c’est là-dessus qu’il juge. […] Louis de Loménie était issu d’une famille noble et peu riche, établie depuis plusieurs siècles à Faye, près de Limoges. […] Entre la qualité et la condition de la famille, le contraste était grand. […] Une famille entière vivait avec cent louis par an, quelquefois avec cinquante. […] — En second lieu, quelle idée a-t-il de la famille et de la patrie ?

490. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

Ce fut probablement, nous dit-on, la petite ville de Saint-Paul qui lui donna naissance ; depuis nombre d’années, la famille des Parny a été connue à Bourbon pour habiter ce quartier, et il est à présumer que c’est de ce centre que, par la suite, elle a rayonné sur les divers autres quartiers de l’île, tels que Saint-Denis, Sainte-Marie, où se trouvent maintenant des personnes du même nom et de la même origine. « Dans un voyage que je fis à Saint-Paul, nous écrit un élégant et fidèle narrateur, j’allai visiter l’ancienne habitation du marquis de Parny, père du poëte ; elle appartient aujourd’hui à M. […] Parny avait vingt ans ; rappelé par sa famille à l’île Bourbon, il quitte à regret ses compagnons de plaisir et ne semble pas se douter que ce qu’il va trouver là-bas, c’est une inspiration plus naïve et plus franche d’où jaillira sa vraie poésie. […] On a beaucoup discuté sur le vrai nom d’Éléonore, son nom de baptême était, dit-on, Esther ; quant à son nom de famille, on l’a fait commencer par B, et l’auteur de la notice de l’édition Lefèvre (1827) se borne à dire que la première syllabe de ce nom n’est point BAR, comme on l’avait avancé. […] Son père, bien que descendant d’une ancienne famille de l’île, n’avait point à faire valoir de titres de noblesse. […] La personne qui se consacra à charmer ainsi ses ennuis et à consoler ses regrets était une créole aimable, déjà mère de plusieurs enfants d’un premier mariage : la douceur de la famille commença au complet pour Parny.

491. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

C’est là une famille d’esprits, à la fois petits et grands. […] Misères d’un métier horrible, et cependant nécessaire, pour ces milliers d’hommes mourant de faim, de froid, de nudité, de défaillance, si le mineur, pour gagner sa vie et celle de ses petits, ne s’enfermait pas, son pic à la main, dans ces labyrinthes souterrains de la mine pour en rapporter le soir le morceau de pain pour sa famille, le calorique pétrifié pour les autres ! […] Misères du pasteur qui engraisse l’agneau et qui le dépouille de sa laine, qui y attache son cœur et qui vend au boucher la génisse qui a donné son lait à sa famille ! […] Je suis jeune et je suis amoureux, je suis vieux et je veux me reposer, je suis père de famille, je travaille, je prospère, je fais de bonnes affaires, j’ai des maisons à louer, j’ai de l’argent sur l’État, je suis heureux, j’ai femme et enfants, j’aime tout cela, je désire vivre, laissez-moi tranquille. — De là, à de certaines heures, un froid profond sur les magnanimes avant-gardes du genre humain. […] Mais qu’on fasse espérer aux peuples, fanatisés d’espérances, le renversement à leur profit des inégalités organiques créées par la force des choses, et maintenues par la nature elle-même sous peine de mort ; qu’on leur persuade que les deux bases fondamentales de toute société non barbare, la propriété et la famille, ces deux constitutions de Dieu et non de l’homme, peuvent être déplacées par le radicalisme sans que tout s’écroule à la fois sur la tête des radicaux comme des conservateurs, c’est là le rêve, c’est là la démence, c’est là le sacrilège, c’est le drapeau rouge ou le drapeau noir de la philosophie sociale !

492. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

III Le troisième chant est rempli tout entier par cette lutte de dévouement entre le père, la mère et la fille, qui revendiquent tous le droit et le devoir de mourir pour sauver la famille. […] tu sauves à la fois toi, ma mère et mon frère, et les sacrifices se renouvelleront à jamais dans la famille.… Ton fils, c’est toi-même ! […] Mais le cri de l’enfant du brahmane, voulant combattre avec le brin d’herbe le géant meurtrier de sa famille, vibre plus avant et plus puissamment dans le cœur. […] Ce poème, qui n’a été traduit que partiellement de la langue sacrée des Indes, se termine par le dévouement des hôtes du brahmane, par la délivrance de la famille et par la punition du tyran. […] Vénérable brahmane, le chef de la famille est sans doute dans cet ermitage ?

493. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — II. (Suite.) » pp. 463-478

Je n’ai qu’à découper une de ces pages, qui s’intitulerait bien la Famille pastorale en marche, et il en est comme cela une centaine dans les deux ouvrages de description et de science qui recommandent avec originalité son nom (Observations sur les Pyrénées, 1789 ; et Voyages au Mont-Perdu, 1801). […] Après les vaches venaient les juments, leurs poulains étourdis, les jeunes mulets, plus malins mais plus prudents ; et enfin le patriarche et sa femme, à cheval ; les jeunes enfants en croupe, le nourrisson dans les bras de sa mère, couvert d’un pli de son grand voile d’écarlate ; la fille occupée à filer sur sa monture ; le petit garçon, à pied, coiffé du chaudron ; l’adolescent armé en chasseur ; et celui des fils que la confiance de la famille avait plus particulièrement préposé au soin du bétail, distingué par le sac à sel, orné d’une grande croix rouge. […] Daru très jeune, lui ayant écrit en 1788 pour le consulter sur l’opportunité de publier à celle date un poème épique dont la guerre d’Amérique serait le sujet, et ayant paru attribuer la préséance dans la famille des Muses à celle qui présidait aux sciences, Ramond, en répondant, lui rappelait que c’est la poésie au contraire à laquelle il appartient de donner à tout la vie et l’immortalité ; et convenant d’ailleurs que les circonstances étaient peu propices à l’épopée, il ajoutait : Mais c’est la destinée ordinaire des grands ouvrages de ce genre de n’être jamais des ouvrages de circonstance ; et si, par cette raison, leur succès est plus lent et plus difficile, leur gloire est plus pure et moins mortelle.

494. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

Il proposa à Mme de Senfft d’aller vivre aux bords du lac de Genève « dans une retraite que leur imagination avait souvent rêvée. » Des circonstances de famille les détournèrent alors de cette détermination qu’ils ont bien des fois regretté, dit-il, de ne pas avoir suivie. […] Avec du goût, de l’esprit et les formes de la meilleure compagnie, il aimait à faire remarquer l’ancienneté de la famille irlandaise dont il descend. […] M. de Senfft, dont la femme, je l’ai dit, était nièce du baron de Stein, crut devoir intercéder en faveur de la famille au sujet du séquestre des biens ; il ne réussit point dans sa demande, mais l’Empereur à qui il avait directement écrit ne lui en sut aucun mauvais gré.

495. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Lettres d’Eugénie de Guérin, publiées par M. Trébutien. »

Nés tous deux d’une ancienne famille noble du Midi fort déchue en fortune, mais restée fidèle jusqu’au bout aux sentiments et à l’honneur de la race, ils auront plus contribué à l’illustrer que tous les preux chevaliers d’autrefois à jamais oubliés et perdus dans la nuit des âges. […] Or, Mme la comtesse Agénor de Gasparin, — c’est elle en toutes lettres, — femme d’un homme de cœur et d’un homme de bien, Genevoise de famille et de naissance, de la haute bourgeoisie ou de l’aristocratie de cette république (c’est tout un), passant certaines saisons à Paris, mais établie et vivant plus ordinairement en son château ou manoir au pied du Jura suisse, dans le canton de Vaud, dans le pays de Glaire d’Orbe, a publié, en ces dernières années surtout, une série d’esquisses, d’impressions morales ou pittoresques, de tableaux paysanesques ou alpestres avec intention et inspiration chrétienne très-marquée46, toute une œuvre qu’il est naturel de rapprocher des Lettres et Journaux d’Eugénie de Guérin. […] Je vous place avec ma famille… « Savez-vous que vous me faites tristement commencer l’année par votre silence ; pas un mot, pas un signe de vie.

496. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

« Voyez ces innombrables travailleurs se délassant au foyer de la famille, ou prenant part à une fête, à un banquet de corps à la face du soleil… « Tout à coup la cloche sonne, une dépêche arrive, le clairon retentit. […] aux armes pour la famille, pour la société qu’on nourrit, qu’on vêtit, qu’on réchauffe, qu’on abrite, pour la ville qu’on assainit ou qu’on embellit, pour la patrie, pour l’humanité ! […] Le point faible, toutefois, est que ce mobile de l’amour de l’humanité et de la civilisation n’est, en général, que fort secondaire et ne vient qu’en second ou en troisième lieu chez les meilleurs d’entre les plus éclairés esprits de nos jours ; il ne vient qu’après les soins de la famille, de la fortune personnelle, de la réputation, de la carrière à courir : c’est déjà quelque chose.

497. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort »

Avouez en outre qu’en dehors de la famille Bonaparte il n’y a plus pour la France que honte et misère ; Le Moniteur publierait, pour le jour de l’enterrement, en tête de sa partie non officielle, cette note triomphante : « Le fameux X…, qui après avoir donné, au coup d’État, sa démission de professeur de rhétorique au collège de Senlis, a été transporté à Lambessa aux frais de notre généreux gouvernement ; le fameux X…, pressé par l’évidence, a avoué, à son lit de mort, qu’il n’avait jamais été plus libre que sous ce règne, et qu’il expirait dans les bras de la Constitution, à laquelle il jurait obéissance dans ce monde et dans l’autre. » Appliqué aux derniers moments de l’honorable M.  […] Le personnage que nous jouons, par nécessité ou par goût, ce que nous livrons de nous-mêmes au public, c’est rarement nous tout entiers, et, comme dit Balzac, « nous mourons tous inconnus. » Tel qui, dans son journal, sème l’outrage et la révolte ; tel qui, moitié par tempérament, moitié sous la pression des circonstances, a fait de la démagogie sa carrière, est l’homme le plus doux, le meilleur ami, le père de famille le plus tendre et plus dévoué. […] Rochefort est au fond très fier de sa noblesse, et de remonter à Louis le Gros, et qu’un jour, comme on lui rappelait que sa famille avait été alliée aux Talleyrand, il laissa entendre que tout l’honneur était pour eux.

498. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Pantalon, suivi de toute sa famille, va, dans le moment, arriver pour lui demander sa soupe. […] Il découvre enfin que Trivelin a ordonné le repas ; il se doute que la clef inconnue est celle de la chambre du fourbe ; il va l’essayer, ouvre la porte, entre, trouve une montre d’or, la vend et invite ensuite Pantalon avec toute sa famille à souper. […] Scaramouche est chargé de l’éducation d’un fils de famille qui suit une intrigue amoureuse avec une jeune personne du voisinage.

499. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 janvier 1887. »

Au courant de décembre dernier, un arrêt de la cour de Leipzig donna gain de cause à la famille Wagner. […] Lamoureux aurait signé un traité avec la famille Wagner qui lui accordait le droit de représenter la Walküre au cas où elle gagnerait son procès. Il paraîtrait d’un autre côté que, tout récemment, la famille Wagner aurait déclaré aux directeurs de la Monnaie qu’elle n’autoriserait la représentation des différents drames de la Tétralogie que dans leur succession régulière : il faudrait avoir joué le Rheingold pour monter la Walkure.

500. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Le voyage de madame de Maintenon se faisait à petites journées, et se prolongeait encore par des séjours dans tous les lieux où le jeune prince se plaisait ; et aussi dans le Poitou, pays natal des d’Aubigné, ou elle prenait plaisir à visiter sa famille. […] La femme de son ami solide (la reine) lui fait des visites, et la famille tour à tour ; elle passe nettement devant toutes les duchesses ; et celle qu’elle a placée (madame de Richelieu) témoigne tous les jours sa reconnaissance par les pas qu’elle fait faire112. […] Une de nos folies a été de souhaiter de découvrir tous les dessous de cartes des choses que nous croyions voir et que nous ne voyions point, tout ce qui se passe dans les familles où nous trouverions de la haine, de la jalousie, de la rage, du mépris, au lieu de toutes les belles choses qu’on met au-dessus du panier ; et qui passent pour des vérités115.

501. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVI. »

Et bientôt les plus méchants empereurs allaient satisfaire d’autant mieux à ce besoin que leurs crimes et leurs vices seraient des fêtes populaires, et que dans le meurtre et la spoliation des anciennes familles ils trouveraient aisément de quoi gratifier le peuple et l’armée. […] « Le siècle coupable a profané d’abord le mariage, la famille, le foyer. […] Horace, par l’ordre d’Auguste, va grandir cet exploit pour en faire un titre à la famille impériale : « Les barbares ont compris ce que pouvait une âme, fi une nature nourrie dans un fortuné sanctuaire, et le pouvoir du cœur paternel d’Auguste sur les jeunes Nérons.

502. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

Il y a aussi Hortense Le Quesnoy, belle-sœur de Numa, qui, grisée par les mensonges de son beau-frère, s’est éprise de ce beau paysan Valmajoux qu’on lui a dit être le descendant d’une grande famille princière. […] Et nous nous assîmes tous, et ainsi commença le premier repas de notre famille orpheline. […] La vie de campagne, enfin, la vie de famille ! […] Un ami lui avait confié la totalité des manuscrits si riches et si intéressants, recueillis sur cette famille par M.  […] Tous les membres de cette famille de Mirabeau ont été des personnages d’une rare originalité, très propres à faire ressortir les contrastes du siècle qui a précédé la Révolution.

503. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre huitième »

Ce n’est pas la femme qui se révolte à l’idée d’entrer dans le lit du meurtrier de sa famille ; c’est la veuve d’Hector qui résiste à immoler au salut du fils la fidélité qu’elle doit à la mémoire du père. […] Iphigénie et Junie sont dans la dépendance de la famille ; elles aiment d’un amour permis. […] En 183…, j’étais, pour un soir, l’hôte d’une famille allemande nombreuse et respectable, où l’on s’occupait beaucoup de lettres françaises, et où l’on en parlait avec goût, et dans le plus pur français. […] Et l’exemple d’Agrippine s’étant présenté : « Combien, dis-je, n’y a-t-il pas d’Agrippines domestiques, femmes de tête, comme on les appelle, qui veulent rester maîtresses dans la maison d’un fils devenu chef de famille, et qui continuent à gouverner sous son nom ?  […] L’heure de se retirer étant venue, je sortis avec un Français, ami fort ancien de cette famille, qui, à peine dans la rue, me dit : « Savez-vous ce que vous venez de faire ?

504. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Elle a été tout entière occupée par l’étude, l’enseignement, les joies de la famille. […] Sa famille vint à Paris après la Terreur, pour fonder une imprimerie. […] L’éducation se résume dans ces mots : famille, patrie, nature. […] La famille était à ses yeux la base de la cité ; l’amour de la famille était lié en lui à l’amour de la patrie et celui-ci à l’amour de l’humanité. […] Seule, la grande noblesse de Rome, à l’exception de quatre familles, est papaline.

505. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Appendice » pp. 511-516

Elle réussit quelquefois dans la famille, et toujours au théâtre. […] Mais ce dernier ouvrage, fondé, comme presque tous ceux du même genre, sur ce qu’on peut appeler l’adultère fondamental et antérieur à l’action, n’a point paru d’ailleurs différer notablement en mérite d’autres drames de la même famille, déjà couronnés les années précédentes ; et quant à l’agréable petite comédie donnée à la veille du nouvel an, c’eût été l’exagérer que de l’élever isolément jusqu’à l’importance d’un enseignement utile.

506. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Un cas de pédanterie. (Se rapporte à l’article Vaugelas, page 394). »

Il y gagna le cœur d’une jeune personne, fille d’un des principaux fonctionnaires de la ville, d’une condition et d’une naissance supérieure à la sienne, et qui, malgré sa famille, lui donna sa main. […] — Le docteur Armand Paulin, médecin de l’École normale supérieure, chevalier de la Légion d’honneur, brusquement enlevé le 7 septembre par une attaque d’apoplexie pulmonaire, a été aujourd’hui enterré au cimetière d’Auteuil, où est le caveau de sa famille.

507. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’insurrection normande en 1793 »

L’Égalité politique et physiologique de Rousseau, lequel ne comprit jamais rien à l’unité complexe de la famille, pesait les hommes comme mâles et ne les pesait pas comme pères, par conséquent noyait les forces morales de l’ordre et de la société dans la force brute d’un nombre qui n’était pas du tout, malgré son titre, suffrage universel. L’application de cette théorie, — qui supprimait la famille chrétienne en faisant égaux en droit le père et le fils, renversait le foyer domestique et son crédit, donnait une prime aux turbulents, toujours prêts, contre les pacifiques, toujours promptement dégoûtés de ces orgies, et tout cela pour se terminer irrévocablement par des réactions que la force des choses veut et que le législateur devrait prévoir, ne fût-ce que pour organiser, — telle est, sans phrases, girondines ou autres, sans déclamation et sans haine, la Révolution française.

508. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre II. Des éloges religieux, ou des hymnes. »

On vit le vieillard entouré de moissons, tenant d’une main une gerbe de blé et de l’autre montrant les cieux, apprendre à sa famille à louer le Dieu qui la nourrissait. […] Le ton de leurs hymnes est imposant ; mais l’initié, en parlant à Dieu, semblait ne s’occuper que de ses propres besoins ; il oubliait que des êtres faibles, en louant leur père commun, ne doivent pas se séparer du reste de la famille, et implorer des bienfaits qui ne soient que pour eux.

509. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Sa famille était établie à Genève depuis 1529. […] On l’interroge devant la famille assemblée. […] La famille de Thérèse a causé à Rousseau de grands ennuis, sans doute. […] Je frémis de les livrer à une famille si mal élevée pour en être élevés encore plus mal. […] La famille de Thérèse n’a pas voulu que Thérèse eût d’enfants.

510. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre III. La Révolution. »

Les écrivains religieux et monarchiques sont de la même famille que les écrivains impies et révolutionnaires ; Boileau conduit à Rousseau, et Racine à Robespierre. […] Ce Prayer book, qui se transmet par héritage avec la vieille Bible de famille, fait entendre à tous, au plus lourd paysan, à l’ouvrier des mines, l’accent solennel de la prière vraie. […] En effet, l’honnête Reid s’alarme ; il voit la société qui se dissout, Dieu qui disparaît en fumée, la famille qui s’évapore en hypothèses : il réclame en père de famille, en bon citoyen, en homme religieux, et institue le sens commun comme souverain juge de la vérité. […] Chacun a par nature et primitivement le droit d’acquérir, de juger, de punir, de faire la guerre, de gouverner sa famille et ses gens. […] Le peuple d’Angleterre est fidèle à la maison de Hanovre, non parce qu’il préfère vainement une famille à une autre, mais parce qu’il est convaincu que l’établissement de cette famille était nécessaire au maintien de ses libertés civiles et religieuses.

511. (1883) Le roman naturaliste

Que fait à travers tout cela la famille Delobelle ? […] C’est du notaire de la famille que viendra le salut.   […] Malot, « d’assurer la perpétuité de la famille et de rendre à jamais votre mari heureux ». […] Jules Claretie ce que pourront bien entendre aux Amours d’un interne les honnêtes bourgeoises, les bonnes mères de famille de Brignoles et de Draguignan ? […] Mais sentez-vous tout ce qu’il y a d’indulgence dans cet admirable portrait d’une famille et d’une race ?

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