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1417. (1753) Essai sur la société des gens de lettres et des grands

Aussi la réputation de certains hommes de lettres, mise en parallèle avec leurs ouvrages et leurs personnes, est quelquefois pour bien des gens un phénomène extraordinaire, qu’ils ne tentent pas d’expliquer, mais qu’ils se croient obligés d’admettre par respect pour ce qu’ils appellent le public. Je leur conseille de suivre en pareille occasion l’exemple de ce physicien, qui voulant expliquer pourquoi les caves sont plus chaudes en hiver qu’en été, dit que cela vient peut-être de telle cause, peut-être de telle autre, et peut-être aussi de ce que cela n’est pas vrai. […] J’ai tâché de m’expliquer librement, quoique sans humeur, sur les différents objets qui font la matière de cet essai ; je suis et je dois être d’autant moins suspect à cet égard, qu’engagé par goût et par principes dans une carrière peu brillante, mais tranquille, où le nombre des juges, des ennemis et des prôneurs est fort petit, je me rends assez de justice pour n’aspirer ni aux places, ni aux récompenses littéraires ; que je n’ai l’honneur d’être ni le protégé ni le concurrent de personne, que j’ai assez vu la plupart des Mécènes et des grands pour n’avoir point à m’en louer, et assez peu pour n’avoir point à m’en plaindre.

1418. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

… Partout sur des autels j’entends mugir Apis, Bêler le dieu d’Ammon, aboyer Anubis. » Mais voici le génie d’expression qui se retrouve : « Des opinions puissantes, un vaste échafaudage politique ou religieux, ont souvent été produits par une idée sans fondement, une rêverie, un vain fantôme, Comme on feint qu’au printemps, d’amoureux aiguillons La cavale agitée erre dans les vallons, Et, n’ayant d’autre époux que l’air qu’elle respire, Devient épouse et mère au souffle du Zéphire. » J’abrège les indications sur cette portion de son sujet qu’il aurait aimé à étendre plus qu’il ne convient à nos directions d’idées et à nos désirs d’aujourd’hui ; on a peine pourtant, du moment qu’on le peut, à ne pas vouloir pénétrer familièrement dans sa secrète pensée : « La plupart des fables furent sans doute des emblèmes et des apologues des sages (expliquer cela comme Lucrèce au livre III). […] Il eût expliqué, par quelque chose d’analogue peut-être, la base impie de la religion des Éthiopiens et le vœu présumé de son fondateur : Il croit (aveugle erreur !)

1419. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

En d’autres termes, on lui avait montré la pratique, et on lui avait enseigné le droit comme un métier : il eût fallu, pour l’y intéresser, le lui présenter comme une science, lui en expliquer la philosophie, seule capable de satisfaire cette intelligence, qui ne voulait concevoir que l’universel. […] Ils se faisaient expliquer les traités et les campagnes, interrogeaient Vauban, Luxembourg, Chamlay, Louvois, ramassaient de tous côtés des mémoires, et sans s’embarrasser d’une haute philosophie, tâchaient de mettre les faits dans un bon jour et en bel ordre.

1420. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

Jules Bertaut L’absence de grands poètes nés dans le midi de la France se peut expliquer par la psychologie du méridional incapable de réduire dans le moule strict et un peu guindé du vers français les fantaisies de sa chaude imagination. […] Enfin si la langue provençale est morte, je ne m’explique pas davantage, non seulement que Mistral ait écrit Mireille, mais encore qu’au xviie , après quatre siècles de silence, la Muse occitanienne ait ressuscité sur la lyre du toulousain Gondelin.

1421. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre sixième. »

C’est par cette rareté des idées générales que s’expliquent et la stérilité de la poésie au xvie  siècle, et l’imperfection de l’art d’écrire en vers. […] Son commerce de tous les jours avec Plutarque s’explique par cette curiosité qui laissait à d’autres à choisir, et pour qui la quantité était la seule affaire pressante.

1422. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Conclusion »

L’esprit chrétien peut seul expliquer comment tant de sévérité, — pour ne rien dire de plus, — dans les opinions, se concilie avec tant de tendresse dans les sentiments. […] Un récit qui nous l’eût expliqué n’eût pas rendu Néron plus aimable ; mais il nous eût appris par quelle dépravation une société, devenue incapable d’une liberté réglée, se rend tout à la fois la complice et la proie d’un de ces despotismes monstrueux auxquels on ose à peine croire, même sur la foi d’un Tacite.

1423. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

À notre époque, être philosophe c’est avoir un ou plusieurs systèmes pour expliquer le monde. […] Ses citations en sont une preuve : comparez les citations si fines, si éclairantes de Sainte-Beuve, les plus longues ont une demi-page à peine ; elles vous expliquent tout un auteur et une époque.

1424. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Aux murs de la pièce exposée au nord, de la pièce froide et nue, il y a, je ne m’explique pas pourquoi, deux vues du Vésuve encadrées, de malheureuses gouaches, qui semblent, là toutes frissonnantes et toutes dépaysées. […] Je m’explique : je veux faire un roman qui sera simplement une étude psychologique et physiologique de jeune fille, grandie et élevée dans la serre chaude d’une capitale, un roman bâti sur des documents humains 13.

1425. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

Eh bien, la Critique est tenue d’expliquer ce succès, sur la nature duquel la vanité de l’auteur et la complaisance de ses amis pourraient se méprendre, et elle va l’expliquer avec les deux mots que voici : la haine du catholicisme, qui est le fond du livre, et la bassesse de son inspiration.

1426. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre VI. L’espace-temps à quatre dimensions »

Un surhomme, que je prendrais à mon tour pour arbitre entre eux et moi, nous expliquerait peut-être que l’idée d’une quatrième dimension s’obtient par le prolongement de certaines habitudes mathématiques contractées dans notre Espace (absolument comme vous avez obtenu l’idée d’une troisième dimension), mais que l’idée ne correspond cette fois et ne peut correspondre à aucune réalité. […] Elle vous donnera moins, car le tas d’images empilées qui constitue la totalité des états de l’univers n’a rien qui implique ou explique le mouvement par lequel votre Espace P les occupe tour à tour, ou par lequel (cela revient au même, selon vous) elles viennent tour à tour remplir l’Espace P où vous êtes.

1427. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La princesse Mathilde » pp. 389-400

Sa pensée nette n’a jamais un instant de trouble, d’hésitation ; elle ne conçoit que ce qui est clair et ce qui s’explique clairement.

1428. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie militaire du général comte Friant, par le comte Friant, son fils » pp. 56-68

[NdA] Je ne m’explique pas bien cette phrase.

1429. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803 » pp. 2-15

Tous les autres, et ceux qui sont nés et venus trop tard pour connaître M. de Chateaubriand, et ceux qui, ne l’ayant connu que tard, ne l’ont vu que sous sa dernière enveloppe moins transparente qu’autrefois, ne sauraient demander mieux ni davantage, ce me semble : le Chateaubriand primitif, et aussi le Chateaubriand social est expliqué, après qu’on a lu cette lettre ; et d’après ce qu’on y lit même, on voit qu’il gardait jusque dans son égoïsme naïf bien du bon encore, surtout de l’aimable, du séduisant ; je ne l’ai jamais nié.

1430. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Dübner »

Il voulait l’accompagner d’un commentaire critique pour expliquer et justifier ses leçons et corrections.

1431. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Appendice sur La Fontaine »

Ces circonstances réunies nous semblent propres à expliquer la défaveur de La Fontaine à la cour, et l’injustice dont on accuse l’auteur de l’Art poétique de s’être rendu coupable envers lui.

1432. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — I »

Il semble que, dans cette portion du livre, l’auteur se soit proposé le problème d’expliquer les grands effets par les petites causes, les insurrections populaires par la toute-puissance d’une caisse occulte, les révolutions législatives par les couteaux des dames de la Halle, les entraînements de parti par des calculs de peur ou de vanité, les épouvantables convulsions de 93 par l’ascendant malin des trois ogres, Danton, Marat et Robespierre, qui jouent à peu près ici le rôle des nains mystérieux de ses romans.

1433. (1874) Premiers lundis. Tome I « Alexandre Duval de l’Académie Française : Charles II, ou le Labyrinthe de Woodstock »

. — Et puisque nous en sommes à relever une lacune, essayons d’en expliquer une autre non moins apparente, à cet endroit même.

1434. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — III »

Ainsi seulement tout s’explique ; ainsi l’activité matérielle devient sainte au même titre que la pensée, et comme participant au même Dieu sous un aspect différent ; ainsi l’accord règne entre le monde et nous, et dans notre propre individu entre notre intelligence et notre puissance.

1435. (1875) Premiers lundis. Tome III « Nicolas Gogol : Nouvelles russes, traduites par M. Louis Viardot. »

Gogol, en ne faisant que peindre un coin du passé, ouvre là-dessus des jours historiques qui expliquent jusqu’à un certain point le présent.

1436. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Préface de la seconde édition » pp. 3-24

que les Romains ont étudié la philosophie, ont possédé des historiens connus, des orateurs célèbres et de grands jurisconsultes, avant d’avoir eu des poètes ; 2º. que leurs auteurs tragiques n’ont fait qu’imiter les Grecs et les sujets grecs ; 3º. je développe un fait que je croyais trop authentique pour avoir besoin d’être expliqué ; c’est que les chants de l’Ossian étaient connus en Écosse et en Angleterre par ceux des hommes de lettres qui savaient la langue gallique, longtemps avant que Macpherson eût fait de ces chants un poëme, et que les fables islandaises et les poésies scandinaves, qui ont été le type de la littérature du Nord en général, ont le plus grand rapport avec le caractère de la poésie d’Ossian.

1437. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre IV. L’écrivain (suite) »

Un petit mot qu’on a déjà dit, qu’il faut répéter, explique tout : il était poëte, chose unique en France, et poëte de la même façon que les plus grands.

1438. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre II. Définition. — Énumération. — Description »

On rencontre souvent des pièces entières dont la genèse s’explique ainsi.

1439. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre II. Le lyrisme bourgeois »

Je n’ajoute pas les chansons de geste ; il n’y fait que des allusions fort vagues, qui peuvent s’expliquer par la popularité des types tels que Roland, Olivier, Alexandre, Eaumont même et Agolant.

1440. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre I. Vue générale du seizième siècle »

Je ne puis faire ici le tableau de la Renaissance italienne : je dois me borner à rappeler brièvement ce qui explique le soudain agrandissement de notre littérature.

1441. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « José-Maria de Heredia.. »

Ce tour d’imagination héroïque et ce besoin d’exactitude et de clarté s’expliquent l’un et l’autre par les origines et par l’éducation de M. de Heredia.

1442. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVII. Romans d’histoire, d’aventures et de voyages : Gebhart, Lemaître, Radiot, Élémir Bourges, Loti » pp. 201-217

Que vous appreniez comment Hermann, prince régent d’Alfanie de par l’abdication provisoire de son père le vieux roi Christian, et son frère Otto sont tués dans la même nuit, en chapitre final, le premier par sa femme Wilhelmine, le second par un garde-chasse, cela nous intéressera moins que le tragique fait-divers dont l’histoire d’une des grandes monarchies de l’Europe centrale a été éclaboussée l’autre année ; et j’aime mieux les imaginations successives qui m’expliquent, suivant le gré de l’heure, ce drame princier que l’affabulation de livraison populaire qu’y a, dans une préface qui est tout le roman, ajustée M. 

1443. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVIII. Caractère essentiel de l’œuvre de Jésus. »

La foi, l’enthousiasme, la constance de la première génération chrétienne ne s’expliquent qu’en supposant à l’origine de tout le mouvement un homme de proportions colossales.

1444. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIII » pp. 378-393

Je me suis mal expliquée si vous avez compris que je songeais à être religieuse.

1445. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre III »

Les combinaisons sont nombreuses par lesquelles se façonnent les mots composés ; ce n’est pas ici le lieu de les expliquer, mais on peut conseiller, en principe, à tous les innovateurs d’avoir toujours sous la main les deux livres admirables de Darmesteter sur la formation actuelle des mots nouveaux et des mots composés .

1446. (1902) L’humanisme. Figaro

J’ai déjà expliqué pourquoi elle ne réussira pas.

1447. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre troisième. De la sympathie et de la sociabilité dans la critique. »

Hennequin a donc tort, selon nous, de croire que le critique doive se borner à expliquer une œuvre, et ne doive pas la juger.

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