Il y a de ces raisons secrètes et délicates, le plus souvent insaisissables, dans ce qu’on est accoutumé d’appeler des hasards heureux. […] Il trouvait mauvais qu’on simplifiât l’orthographe de ces mots dérivés du grec, par égard pour les ignorants et les idiots, car c’est ainsi qu’il appelait poliment, et d’après le grec, ceux qui ne savaient que leur langue. Vaugelas faisait le plus grand cas, au contraire, de ces idiots, c’est-à-dire de ceux qui étaient nourris de nos idiotismes, des courtisans polis et des femmelettes de son siècle, comme les appelait Courier ; il imitait en cela Cicéron qui, dans ses doutes sur la langue, consultait sa femme et sa fille, de préférence à Hortensius et aux autres savants. […] Le plus digne, le seul digne, La Mothe-Le-Vayer, de l’Académie française, mais de ceux qu’on appelait relâchés sur l’article de la langue, publia en 1647 quatre Lettres adressées à son ami Gabriel Naudé, touchant les nouvelles Remarques sur la Langue française. […] Poitevin qui s’est amusé, dans ce qu’il appelle une Cacographie, à recueillir les prétendues mauvaises phrases des meilleures écrivains du temps.
Ce terme de classe même sent la gêne et l’école, et semble ne pas appeler la poésie. […] Lebrun, esprit judicieux et caractère équitable, qui possède à un haut degré ce qu’on peut appeler le patriotisme de l’Académie, je veux dire qu’il est tout dévoué au bien et à l’honneur du Corps. […] Littré : on est si faible, si complaisant et si déférent pour un confrère (fût-il le moins assidu) quand on se voit obligé de l’appeler Monseigneur ! […] Le mobile, si visible qu’il soit, a de trop bons effets pour appeler le sourire. […] L’ancienne Académie appelait volontiers à elle les orateurs sacrés du Clergé séculier, et même elle se décorait de toutes sortes de prélats.
J’y fus appelé comme témoin. […] Ce jacobinisme par versets bibliques, c’était Babeuf en Ephod hébraïque, Proudhon socialiste faisant un tremblement de terre pour égaliser tout le monde par la ruine de tout ce qu’on appelait société, un chaos de débris pour un monde réformé par le radicalisme. […] Au lieu de l’appeler le Livre du peuple et de le lancer à cette partie déshéritée, souffrante et irritée de la société, adressez-le, sous un autre titre, à la partie aisée, privilégiée, heureuse et jouissante de l’humanité, et montrez-lui les moyens pratiques d’améliorer sans le renverser l’état social. […] Je ne m’occupai, après le coup d’État, que de payer mes dettes, que je puis appeler honorables. […] Cintrat, le chef des archives, en le priant de chercher avec bienveillance un emploi de chancelier consulaire, fût-ce même dans la cinquième partie du monde, dans cette Océanie où l’Angleterre avait appelé à Sidney des consuls européens.
Petrucci, alarmé par le trouble évident de l’archevêque, venait d’entr’ouvrir la porte des bureaux et d’appeler du monde à son aide. […] Le frère de l’archevêque de Pise, Salviati, fut appelé par lui, et il lui donna sa fille en mariage. […] Tu connais par expérience le prix de ce que le vulgaire appelle des biens ; biens aussi éloignés du véritable bonheur, que l’orient l’est de l’occident. […] Les affaires intérieures appelaient aussi sa prudence. […] Laurent, trompé sur son mérite, l’avait appelé de Ferrare, sa patrie, à Florence.
Les sorcières de Macbeth attirent l’attention des uns par leur affreux costume, par leurs sacrifices, par leurs contorsions qu’on appelle danse, et n’intéressent les autres que par leur prédiction terrible. […] La seconde, intitulée les Piccolomini, offre le développement du sujet, les nœuds de l’action ; et la dernière appelée mort de Walstein, est le dénouement des précédentes. […] Plus tard on en exigea quatre, y compris une farce ou satire, et cela s’appela Tétralogie. […] Aristote), à tout ce que nous savons de réel touchant la nature physique et morale , c’est à elle aussi que nous devons, dans tous les genres d’écrire et dans tous les arts, les chefs-d’œuvre anciens et modernes que nous appelons classiques. […] Tout en reconnaissant l’énorme distance qui sépare ces deux littératures, nous ne trouvons encore là rien qui nous fasse comprendre pourquoi la première s’appelle romantique.
Le comte de Camors écrit dans sa lettre le mot d’honneur, qu’il appelle un grand mot, et qu’il croit la seule réalité morale qui reste aux hommes dans l’athéisme universel. […] Il y a de l’agrément parfois, des situations et des personnages découpés pour entrer dans une pièce de théâtre, qu’on appellera une jolie pièce. […] Pour faire ressemblante cette platitude d’un mariage dans ce qu’on appelle le monde, il fallait peindre plat ; c’était le peindre mieux. […] Aussi ce n’est pas Un mariage dans le monde, que ce livre devrait s’appeler, mais Le Mariage dans le monde, car s’il y en a d’autres, c’est une exception. […] Je suis de ceux qui croient que, dans ces êtres physiques et nerveux qu’on appelle les femmes, la pitié l’emporte sur l’amour.
Alors nous l’appellerons le réalisme didactique. […] Alors il pourrait s’appeler le réalisme indifférent. […] Énée est blessé à l’endroit appelé « cotyle12 ». […] Ainsi naissait la comédie sérieuse, un peu calomniée par ceux qui l’appelèrent la comédie larmoyante. […] Parfois cependant il l’appelle : c’est pour le faire valet.
Pourtant mon voisin ne l’aimait guère, car il l’appela devant moi « grande perche ». […] Taine, appelait l’Inamusable s’amusait parfois comme un écolier. […] C’est ce que j’appelle l’art de se procurer des moellons à sa convenance. […] Mais cette Banque universelle, c’est, pour l’appeler de son vrai nom, l’Union générale. […] J’en appelle aux gens entendus, qui vivent dans les bibliothèques.
le capitaine de ma compagnie me fit appeler. […] Mais moi, on m’appelait Leporello. […] Leur mouvement pourrait s’appeler la sécession des intellectuels. […] En grec, l’antique Byzance s’appelle Constantinople, c’est-à-dire la ville de Constantin ; en turc, elle s’appelle Stamboul, ce qui est un barbarisme inintelligible ; en russe, elle s’appelle Tsarigrad, la ville des tsars. […] ce que nous appelons, faute d’un mot plus précis, la question sociale.
Deux enfants s’aiment, ils s’appellent mon petit mari et ma petite femme. […] Qu’on appelle cet instant perfection, décadence, qu’importe ? […] Vous appelez cela avoir l’esprit large, je l’appelle avoir l’esprit trouble. […] Il a appelé à son aide toutes les ressources du style noble. […] Tout homme a un côté de vanité naïve, les chroniqueurs comme les autres : ce que nous appelons brio, ils l’appellent esprit ; seulement ils se moquent de l’esprit d’hier, sans songer qu’ils seront renversés par celui de demain.
La maladie et la mort de son oncle, le père Hercule, l’appelèrent à Paris en cette même année ; il se proposa d’y rester, et n’ayant pu le faire avec la permission de ses supérieurs, il sortit de la congrégation, mais en se déliant avec douceur comme ce sera toujours sa façon et méthodeae, en emportant et en laissant les meilleurs souvenirs. […] Ces vers français de Fléchier qui rappellent ceux de d’Urfé, de l’ancien évêque Bertaut, ou encore ceux de Godeau, évêque de Vence, sont ce que j’appelle des vers élégants et polis d’avant Despréaux. […] C’est du fils de M. de Caumartin, qu’on appelait M. de Boissy, alors âgé de douze ou treize ans, que Fléchier était précepteur. […] Nous montâmes donc en carrosse avec quelques dames…. » Dans son mélange d’historiettes (et il appelle quelquefois ainsi d’affreuses histoires) il a soin d’en introduire de temps en temps d’agréables, et qui diversifient les impressions. […] Dongois, que j’ai déjà nommé, et qui remplissait les fonctions de greffier de la commission des Grands Jours, le même qui fut depuis greffier en chef du Parlement, et que Boileau, son oncle, a appelé quelque part l’illustre M.
Il jouit pleinement ce jour-là de son ivresse de carnage, et il appelait Titus les délices du genre humain. […] Voilà, hommes, voilà de l’oxygène accumulé, que vous appelez la vie ! Et vous appelez cela de la science ? […] C’est ce qu’on appelle ciel ou enfer. […] Dites-moi le jour où il a créé cette substance visible qu’on appelle matière ?
« Je l’ai mis, dit Crébillon, dans le cas du mari de la Coupe enchantée 43. » C’est ce qu’il appelle accommoder la terreur à la délicatesse des spectateurs et aux bienséances. […] Trompé par son succès, il finit par mettre l’action et le spectacle au-dessus du reste, et il appela les tragédies de ses devanciers de longues conversations en cinq actes. […] On l’a appelé le grand Corneille, comme on a appelé Louis XIV Louis le Grand, autant pour la grandeur de leurs œuvres que parce qu’ils ont aimé avant tout le grand. […] Les sentiments superficiels, les pensées spécieuses appellent le style brillant, avec le cortège des mille fautes secrètes dont il fourmille. […] Je n’ai rien retrouvé en moi de ce qui m’avait fait goûter ce vernis de politique révolutionnaire, d’antiquité romaine fraîchement apprise, répandu sur une pièce que Chénier, appelé à un poste dans l’instruction publique, écrivit, dit-on, pour faire preuve de latinité.
Il a aussi raconté, dans ses Annales ecclésiastiques, des pontificats de honte et d’ignominie, qu’il appelait d’une expression empruntée aux prophètes : « l’abomination de la désolation dans le temple ». […] ce qu’on appelle l’esprit d’une époque n’est guère redoutable que parce que ceux qui devraient le diriger se laissent emporter à son flot, par manque de hardiesse ou par manque de génie, et c’est là précisément ce qui arrivait en Europe vers l’année 1766. […] C’est ce que don Manuel de Roda appelait, dans ses railleries de bourreau : « l’opération césaréenne ». […] Nous n’avons point autorité pour descendre dans cette profondeur qu’on appelle la conscience, ombre mystérieuse claire à l’œil de Dieu seul, et nous sommes d’ailleurs trop soumis au signe vivant d’un pouvoir divin pour agiter des questions qui le mettent en cause devant les hommes. […] L’Europe, qui avait tressailli d’allégresse à la nouvelle de l’abolition, l’Europe, grossière comme tous les vainqueurs, trouva le moyen d’insulter à cette sainte chose qui s’appelle l’infortune.
C’est tout cela, c’est bien d’autres choses encore (car je ne puis tout énumérer) que l’on a appelé de ce nom général de Romantisme en notre poésie. […] Et comment oublier, à ce propos, celui qui, dans le groupe dont il s’agit, s’est détaché à son tour en maître et qui est aujourd’hui ce que j’appelle un chef de branche, Théophile Gautier, arrivé à la perfection de son faire, excellant à montrer tout ce dont il parle, tant sa plume est fidèle et ressemble à un pinceau ? « On m’appelle souvent un fantaisiste, me disait-il un jour, et pourtant, toute ma vie, je n’ai fait que m’appliquer à bien voir, à bien regarder la nature, à la dessiner, à la rendre, à la peindre, si je pouvais, telle que je l’ai vue. » Qu’il y ait eu des excès dans le rendu des choses réelles, je le sais et je l’ai dit quelquefois. […] Mais pourquoi appelé-je cela une folie ?
Je commence à douter que cette histoire de vos amours que vous me racontez si au long, sans considérer que je n’ai point d’oreilles pour entendre ce discours, ne soit une énigme tirée des paraboles de l’Évangile où l’on fait si souvent des noces, particulièrement une où il n’y a que les vierges qui soient appelées. […] Singlin et de M. de Saint-Cyran une maxime pratique qu’elle applique sans cesse, c’est qu’il ne faut rien faire dans la précipitation, c’est que le désir, même lorsqu’il est dans le meilleur sens et vers le plus louable but, doit faire, en quelque sorte, sa quarantaine et son carême, et doit user son attrait avant de s’accomplir, si l’on veut qu’il produise tout son fruit : « Il faut faire toutes choses, dit-elle, dans une certaine maturité qui amortit l’activité de l’esprit humain, et qui attire une bénédiction de Dieu sur ces choses dont on s’est mortifié quelque temps. » C’est ce qu’on appelle en ce style mystique pratiquer la dévotion du retardement, et elle la conseille en toute occasion aux personnes qui lui font part de leurs peines et des obstacles qu’elles rencontrent dans la voie du bien. […] Il se promenait volontiers en été à ce qu’on appelait le jardin des Capucins, et qui doit répondre à la promenade qu’on voit encore aujourd’hui entre l’hospice du Midi et le Val-de-Grâce. […] De son vivant, sa tribune à l’église était tout proche de la porte dite des Sacrements ; ce qui faisait que la mère Agnès, pour lui faire honneur, l’appelait le portier de Jésus-Christ.
Ce que l’historien dit là des premiers jours de la lieutenance générale du comte d’Artois en 1814, il pourra le redire, avec de bien légères variantes, des derniers temps de son règne en 1829 : tant ce que j’appelle le principe d’incorrigibilité, du premier au dernier jour, et sauf de bien courtes trêves, a persisté et prévalu ! […] M. de Viel-Castel a ici des pages fort justes, et où il tient compte de toutes les nécessités, de toutes les conditions de ce régime qu’il s’agissait de fonder : Le rétablissement d’un pouvoir renversé, dit-il, d’une dynastie déchue, ce qu’on appelle une restauration, n’est pas un accident rare ; l’histoire en offre de nombreux exemples. […] Il voulait bien, d’ailleurs, ne point parler trop injurieusement de ceux-ci, des 25 millions d’hommes qui formaient la masse de la nation : « Il est bien reconnu, disait-il, que les régnicoles, comme les émigrés, appelaient de tous leurs vœux un heureux changement, lors même qu’ils n’osaient pas encore l’espérer. » Ainsi, Français de 1792 qui couriez à la frontière, vous qui sauviez la patrie menacée, vous qui, à la suite des armées refoulées de la coalition, passiez le Rhin et l’Escaut et les Alpes, qui combattiez à Rivoli, à Zurich, aux pyramides et autres lieux, vous étiez des régnicoles ; il est bon de savoir le nom qu’on a. […] Montaigne aurait appelé cela une sagesse traînarde et goutteuse73.
Saint-Simon, qui s’est donné carrière en toute rencontre sur le frère aîné de l’abbé et sur les Saint-Pierre, comme il les appelle, indiquant que l’abbé et ses frères étaient cousins germains, par leur mère, du maréchal de Bellefont, ajoute : « Voilà une parenté médiocre, on sait en Normandie quels sont les Gigault (Bellefont). » Mais de loin cela nous paraît être de fort bonne maison, et l’on en jugeait ainsi, même sous Louis XIV, à deux pas de Saint-Simon. […] Ne l’appelez pas un vaste cerveau ; le sien en est réduit, si j’ose ainsi parler, à quelques fibres élémentaires, mais très nettes, très déliées et tenaces. […] Il l’appelle une fois « cet homme moitié philosophe et moitié fou ». […] Cette religion évangélique purement morale, dans laquelle le prêtre n’est plus qu’un officier de bonnes mœurs et un agent de bienfaisance ; où l’on espère passionnément en l’autre vie, même quand on n’en est pas très sûr, mais parce que c’est une croyance utile et salutaire ; où le curé en cheveux blancs, qui ne sait que donner et pardonner, ressemble à un bon père de famille souriant selon la maxime que « l’air gracieux et serein doit être la parure de l’homme vertueux » ; cette religion du curé de Mélanie et à la Boissy-d’Anglas, religion de tolérance, de doute autant que de foi, et où l’arbitre du dogme ne trouve à dire à son contradicteur dans la dispute que cette parole calmante : « Je ne suis pas encore de votre avis », comme s’il ne désespérait pas de pouvoir changer d’avis un jour ; ce théisme doucement rationalisé et sensibilisé, à ravir un Bernardin de Saint-Pierre et à attendrir un Marmontel, n’est pas du tout la religion de Fénelon, comme on l’a souvent appelé, mais c’est bien la religion de l’abbé de Saint-Pierre.
Il parlait, du reste, de toutes les choses du cœur avec une facile éloquence, et son esprit n’était pas sans ressource ; mais il n’avait aucune teinture de ce qu’on appelle littérature, et qui est, aux yeux du monde, le plus beau fruit de l’éducation. […] « A Paris, — oui, à Paris, s’écrie-t-il, c’est le vœu de tous les pauvres insensés qui se croient appelés à remuer le monde ! […] A une donnée aussi simple, il fallait l’expression excellente et achevée, ce que La Bruyère appelle l’expression nécessaire. […] Mais ici, quand le roi, en hâte de partir, et dont le danger redouble à chaque minute, demande et commande à Steven des chevaux, et de lui rendre son compagnon de voyage, qu’on lui retient parce que c’est le fiancé de Mina ; quand Steven, non content de résister par piété domestique, étale cette piété, la discute, l’oppose avec faste au rôle du conquérant, quand il s’écrie : « L’homme que vous venez d’appeler un enfant se lève du sein de son obscurité pour se placer devant vous, et pour se mesurer à vous, sans orgueil comme sans crainte… Ce n’est pas parce que je commande que j’ose me comparer à vous, mais parce que j’obéis… J’ai vaincu un ennemi plus redoutable que vous…, je me suis vaincu moi-même » alors le drame cesse en ce qu’il avait de naturel et d’entraînant ; le système reparaît, se traduit de nouveau à la barre sous forme de plaidoyer.
Il n’en raisonne point, il n’arrive point à des jugements nets ; mais toutes ces émotions sourdes, semblables aux bruissements innombrables et imperceptibles de la campagne, s’assemblent pour faire ce ton habituel de l’âme que nous appelons le caractère. […] Un mot glissé montre seul le sourire imperceptible ; c’est l’âne, par exemple, qu’on appelle l’archiprêtre, à cause de son air grave et de sa soutane feutrée, et qui, gravement, se met à « orguenner. » Au bout de l’histoire, le fin sentiment du comique vous a pénétré sans que vous sachiez par où il est entré en vous. Ils n’appellent pas les choses par leur nom, surtout en matière d’amour, ils vous les laissent deviner ; ils vous jugent aussi éveillés et avisés qu’eux-mêmes. […] Quand le renard s’approche du corbeau, pour lui voler son fromage, il débute en papelard, pieusement et avec précaution, en suivant les généalogies ; il lui nomme « son bon père, dom Rohart, qui si bien chantoit » : il loue sa voix qui est si claire et si épurge. » « Au mieux du monde chantissiez, si vous vous gardissiez des noix. » Renard est un Scapin, un artiste en inventions, non pas un simple gourmand ; il aime la fourberie pour elle-même ; il jouit de sa supériorité, il prolonge la moquerie ; quand Tibert le chat par son conseil s’est pendu à la corde de la cloche en voulant sonner, il développe l’ironie, il la goûte et la savoure ; il a l’air de s’impatienter contre le pauvre sot qu’il a pris au lacs, l’appelle orgueilleux, se plaint de ce que l’autre ne lui répond pas, qu’il veut monter aux nues, et aller retrouver les saints.
c’est différent ; plût à Dieu que nous en eussions recueilli juste assez pour pouvoir retirer, sans remords, cette partie de nous-même qu’on appelle notre nom de cette dure, quoique honorable servitude, qui nous expose tous les jours à ces fastidieux retentissements et à ces odieuses interprétations de la publicité ! Si ces ennemis parviennent (comme je ne le crains que trop) à briser dans ma main cette plume de l’homme de lettres, mille fois plus respectable quand elle cherche le salaire par honneur que quand elle cherche la gloire par vanité, ces ennemis apprendront trop tard (et avec regret, je n’en doute pas) que ce qu’ils appellent la mendicité du travail n’était que le devoir de la stricte probité. Mais la postérité seule appelle les choses par leur vrai nom ; les contemporains les appellent par le nom qui les déshonore.
L’introduction de cet ouvrage qui a pour sujet « la Méthode en psychologie », est très sévère pour la métaphysique et pour l’emploi exclusif de cette méthode que les Anglais appellent introspective : (l’observation intérieure de Jouffroy et de l’école spiritualiste). […] Les objets que nous appelons externes (un homme, une maison), sont des agrégats formés par association simultanée. […] Par l’accumulation des vérités particulières se forment les propositions générales : le raisonnement s’appelle alors induction. […] L’antécédent invariable est appelé cause ; le conséquent invariable, effet.
Cette maison, qui s’appelait l’hôtel de Pisani, prit en 1600 le nom d’hôtel de Rambouillet. […] C’est un des griefs du temps présent contre la marquise de Rambouillet d’avoir été appelée Arthenice. […] Comme j’y suis le parrain de plusieurs belles, je veux et entends qu’à l’avenir mademoiselle d’Hervart s’appelle Sylvie dans tous les domaines que je possède sur le double Mont15 ». […] Vaugelas est appelé par Boileau le plus sage de nos écrivains.
Il vit dans de la prière diffuse, se rattachant, chose étrange, à une certitude indéterminée qu’il appelle Dieu. […] Tel atome, moteur divin appelé âme, n’a-t-il pas pour emploi de faire aller et venir un homme solaire parmi les hommes terrestres ? […] Ce travail a des phases ; et chacune de ces phases, marquant un âge dans le progrès, est ouverte ou fermée par un de ces êtres qu’on appelle génies. […] Les aurores à côté des aurores, le renouvellement indéfini des météores, les mondes par-dessus les mondes, le passage prodigieux de ces étoiles incendiées qu’on appelle comètes, les génies, et puis les génies, Orphée, puis Moïse, puis Isaïe, puis Eschyle, puis Lucrèce, puis Tacite, puis Juvénal, puis Cervantes et Rabelais, puis Shakespeare, puis Molière, puis Voltaire, ceux qui sont venus et ceux qui viendront, cela ne te gêne pas.
De Maistre est aussi partisan de l’ancien régime que M. de Bonald ; mais comme il a plus d’esprit, il voit un peu plus clair : il accorde que c’est la corruption de l’ancien régime, du clergé et de la noblesse qui a amené la Révolution ; il appelle cette Révolution une œuvre satanique ; mais il est confondu de sa grandeur. […] Les plus belles paroles qui aient jamais été prononcées sur ce que l’on peut appeler les grandes conquêtes de 89 sont sorties de sa bouche. […] Surtout ils voulaient assurer une certaine prépondérance aux classes distinguées et à ce qu’ils appelaient les supériorités, afin de donner au gouvernement de la démocratie plus de suite, plus d’unité, plus de prévoyance et plus d’esprit de justice, et afin que l’égalité ne devînt pas l’abaissement de tous. […] La première période du socialisme est celle que j’appellerai période industrielle : c’est le temps des premiers écrits de Saint-Simon5.
L’auteur traite ensuite de la difference qui se trouve entre les sons de la voix. " un de ces sons est continu, et c’est celui-là que la voix forme dans le discours ordinaire, et qu’on appelle à cause de cela le langage de la conversation. L’autre son qui s’appelle le son mélodique, est assujeti à des intervalles reglez, et c’est le son que forment ceux qui chantent ou qui executent une modulation, et qu’imitent ceux qui jouent des instrumens à vent ou des instrumens à corde. " Porphyre explique ensuite assez au long la difference qui se trouve entre ces deux especes de sons, après quoi il ajoute " voila le principe que Ptolomée établit au commencement de ses reflexions sur l’harmonie, et qui n’est autre que le principe enseigné generalement parlant par les sectateurs d’Aristoxéne. " nous avons déja dit qui étoit Aristoxéne. […] Sergius ancien grammairien latin compte huit accens, qu’il définit les marques d’une inflexion de voix, et qu’il appelle les aides du chant. […] Le sistême general, ou, comme l’appelle Boéce, la constitution de la musique des anciens étoit divisée, suivant Martianus Capella, en dix-huit sons, dont chacun avoit son nom particulier.
La lecture à haute voix ou plutôt à demi-voix, car il ne s’agit pas de déclamer, mais simplement d’appeler l’oreille à son secours pour se rendre compte, devra être dirigée de la façon suivante. […] J’appelle nombre une phrase d’une certaine longueur qui est bien faite, dont les différentes parties sont en juste équilibre et satisfont l’oreille comme un corps aux membres proportionnés et bien attachés satisfait les yeux : une phrase nombreuse, c’est une femme qui marche bien. J’appelle harmonieuse une phrase qui, de plus, par les sonorités ou les assourdissements des mots, par la langueur ou la vigueur des rythmes, par toutes sortes d’artifices, naturels, du reste, dans la disposition des mots et des membres de phrases, représente un sentiment, peint la pensée par les sons, et la mêle ainsi plus profondément à notre sensibilité. […] Les nuages y paraissent sans couleur et la joie même y est un peu triste ; mais des fontaines d’eau froide y sortent des rochers et les yeux des jeunes filles y sont comme ces vertes fontaines où, sur des fonds d’herbes ondulées, se mire le ciel. » Je laisse de côté l’effet de peinture qui est étonnant ; mais j’appelle l’attention sur l’effet rythmique ; il est dans l’opposition, légère du reste, et qu’il serait inepte de marquer comme un contraste, mais dans l’opposition cependant, des sons étouffés, sourds, des tons tristes « mousses marines… au fond des baies solitaires…, nuages sans couleur » et des sons plus clairs, plus chantants, sans avoir rien d’éclatant, de triomphant ni de sonore, « yeux de jeune fille…, vertes fontaines. ., se mire le ciel ».
En posant la thèse de l’Égalité entre les époux, implicitement, du même coup, Mme Sand appelait toutes les autres égalités. […] Ce fut à dater des romans de Sand qu’on vit pulluler toutes sortes de livres en prose et en vers, écrits par des plumes féminines sur l’inégalité des conditions entre l’homme et la femme, et que le bas-bleu apparut, — le véritable bas-bleu, bien autrement foncé qu’en Angleterre, où le mariage, — une sauvegarde contre le bas-bleuisme, — est resté en honneur et où le mari s’appelle Lord encore… Comme il est beaucoup plus aisé de changer d’habit que de sexe, jamais, autant qu’en ce temps-là, on ne vit plus de femmes en habit d’homme, comme l’avait fait Mme George Sand, dont la redingote de velours noir, illustrée par Calamata, fut célèbre et qui s’appela longtemps George Sand tout court (le voyou, comme elle le disait elle-même dans ses Lettres d’un Voyageur) ; George Sand qui devait redevenir Mme Sand et presque Mme Dudevant dans sa vieillesse, — quand le terrible coup de locomotive de la vieillesse passe sur toutes les prétentions et les rafle, et qu’on acquiert la preuve alors qu’on n’était, de toute éternité, qu’une femme et que l’homme qu’on croyait faire n’a jamais dépassé le gamin ! […] Elles restent donc incommutablement femmes, quand elles se montrent le plus artistes ; et les arts mêmes dans lesquels elles réussissent le mieux, sont ces arts d’expression qu’on pourrait appeler des arts femmes.
Celui du capitaine d’Arpentigny, qui s’appelle toujours capitaine et qui a bien raison, a été, par une de ces contradictions qui existent souvent entre nos instincts et notre métaphysique, mis au service d’une philosophie très peu militaire et qu’on regrette de rencontrer sous une plume qui a la beauté mâle d’une arme. […] D’Arpentigny n’a pas le dogmatisme qui appelle l’exécution de l’erreur. […] Cet homme de civilisation raffinée et de littérature volontaire, qui, précisément dans le livre où il a cristallisé laborieusement toutes ses études, toutes ses observations, toutes ses pensées, montre, à dix reprises différentes, le mépris philosophique d’un membre du Congrès de la paix pour cette grande chose qui s’appelle la guerre, a très probablement essayé de donner à sa pensée des formes plus savantes, plus littéraires, plus mandarines ; mais il est resté, quoi qu’il ait pu faire, timbré du casque de soldat. […] Il aspirait au mouvement et s’affaissait dans le repos, il appelait les coursiers et chevauchait les nuages.
Colomb est un instrument choisi, — un Élu, constamment en rapport avec Celui qui l’envoie, par la prière et par des circonstances, ayant tous les caractères extérieurs et intérieurs de ce qu’on appelle des miracles. […] C’est la rédemption par le sang du Sauveur des hommes qui a fait naître dans le cerveau de cet immense chrétien, qui s’appelait Colomb, l’idée d’un monde possible à découvrir ! […] Les trois sommets de l’île de la Trinité, aperçus par lui et répétant à leur manière le nom projeté de cette île, qu’il devait appeler la Trinidad avant de l’avoir découverte, l’histoire de la croix plantée de sa main à la Vera-Cruz et dont le bois produisit pendant tant d’années des guérisons si extraordinaires et si désespérées, le compte inouï de tous les grands événements de la première expédition de Colomb, lesquels, tous heureux, tombèrent à point nommé le vendredi, depuis le vendredi du départ jusqu’au vendredi du retour, tous ces faits que le très commode hasard, inventé pour faire substitution et pièce « à la Providence », n’explique et n’éclaire plus, parce que le hasard est essentiellement solitaire et que des faits nombreux et continus lui ôtent son caractère de hasard, M. […] Il l’a grandie, il l’a élevée dans ses événements et dans son héros, mais il n’a pas empêché l’historien d’entrer dans ce que la critique de la philosophie appelle le positif et la réalité des choses humaines.
Seulement ce travail qui était la partie importante et capitale d’une histoire, telle que M. de Chalambert concevait la sienne, ce travail, rejeté dans une introduction, n’est point la forte et étreignante analyse que nous aurions désirée et qui eût silencé, — comme disent si heureusement et si impérieusement les Anglais, — tous ces écrivains sans vigueur d’initiative qui, avec plus ou moins d’érudition, rabâchent, même en Allemagne, les idées de la Henriade et peuvent très justement s’appeler les ruminants de Voltaire ! […] Toujours il fut dans l’histoire de ce pays un moment suprême où l’indignité des gouvernements proclama la vacance du trône par la bouche même qui avait le droit de la proclamer, par cette voix du peuple et de l’Église qui avait fait le peuple ce qu’il était, et qu’au Moyen Âge on appelait justement, pour cette raison, la voix de Dieu ! […] Le nouvel historien, se contentant, comme la Ligue elle-même, de cette conversion qu’Henri IV, son masque à la main, appelait tout bas, dans l’oreille de sa maîtresse, le saut périlleux, finit brusquement son histoire à l’édit de Nantes, ce coup de Jarnac du protestantisme qui se vengeait de sa conversion ; et, arrivé là, il se contente d’indiquer une telle conclusion, au lieu d’en marquer la portée ! […] M. de Chalambert ne sait pas plus reconstituer en bloc une personnalité détruite qu’il ne sait déshabiller implacablement ces fausses et factices renommées qu’un poète pourrait appeler les Sirènes de l’histoire, car elles en sont le charme le plus dangereux.