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38. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Préface »

La méthode expérimentale, en s’avançant de proche en proche depuis le domaine des éléments inorganiques, jusqu’à l’être organisé, et dans celui-ci même, jusqu’aux fonctions nerveuses les plus proches des facultés intellectuelles et morales, cette méthode partout accompagnée de l’infaillible nécessité, ne viendra-t-elle pas un moment mettre en péril la liberté de l’être moral ? […] En un mot, sous des formes très-diverses, nous avons presque partout rencontré le même problème : comment l’esprit de critique et d’examen, l’esprit de nouveauté et de changement peut-il se concilier avec les principes de l’éternelle vérité ?

39. (1762) Réflexions sur l’ode

Les poètes, par exemple, ont ouï dire qu’on désirait aujourd’hui de la philosophie partout ; que le public n’entendait point raison sur ce sujet ; qu’il était las de mots, et voulait des choses. […] À force de crier partout philosophie, je crains que nos sages ne lui fassent tort. […] Quoi qu’il en soit, l’épître paraît plus faite pour réussir aujourd’hui ; elle se présente modestement et sans appareil ; la philosophie d’ailleurs, cette philosophie qui de gré ou de force s’introduit partout, croit y être plus à sa place, parce qu’elle s’y trouve plus libre, et plus maîtresse du ton qu’elle veut prendre.

40. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Taine »

Le reste n’est que la monographie de la sensation, faite, refaite, reprise cent fois, copiée partout, avec des maçonneries de Taine entre ces blocs inouïs et inutiles de citations. […] Ce sont des descriptions matérielles de nerfs, de moelle, d’alvéoles, de jeu d’organes, enfin toute la boutique à vingt-cinq sous du matérialisme contemporain, étalée là pour étayer la conclusion dernière de ce matérialisme qu’on sent partout, qui déborde partout, et dont Taine ne donne pas plus la formule définitive et hardie (ah !

41. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVIII. Siècle de Constantin. Panégyrique de ce prince. »

Il ne faut donc pas s’étonner si en Italie, dans la Grèce, dans les Gaules, en Asie, dans les villes, dans les camps, partout les panégyriques le poursuivaient ; à chaque succès, à chaque pas, il était puni d’une victoire par un éloge. […] On en compte quatre autres écrits dans la même langue, et presque partout c’est le même ton, la même vérité dans les éloges, et surtout la même philosophie dans les idées. […] Ce discours, singulier dans sa forme, est en même temps un panégyrique, un sermon, un catéchisme, une profession de foi, un discours de métaphysique et d’éloquence, un mélange de la philosophie de Pythagore, de celle de Platon et de la doctrine de nos livres sacrés : Constantin y est représenté partout comme vainqueur de l’idolâtrie.

42. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre II. Du Chant grégorien. »

Partout où il y a variété, il y a distraction, et partout où il y a distraction, il n’y a plus de tristesse : tant l’unité est nécessaire au sentiment ; tant l’homme est faible dans cette partie même où gît toute sa force, nous voulons dire dans la douleur.

43. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

Tant de flambeaux chéris, qui pour lui ont disparu de la terre, éclairent par derrière au loin, en mille endroits indéterminés, la scène ; à chaque reflet passager, partout où il entend un bruit, un soupir, où il voit une beauté, une grâce, il dit : C’est là !  […] Toutes ces félicités embellies de presbytère ou de chaumière, il ne les a trouvées nulle part ; mais partout des vices, partout des douleurs : depuis le déluge, dit-il, Auburn ni Éden n’existent plus. […] Mais là encore, comme partout, Lamartine n’a pas de détour, de retour compliqué, de subtilité métaphysique ou de restriction méthodiste. […] Le clair ruisseau des monts coule auprès ; n’ayez peur  D’approcher comme lui : quand l’âme est bien formée, On est humble ; on se sait, pauvre race, semée  Aux rocs, aux durs sentiers, partout où vit un cœur ! […] Le fleuve était partout couvert et traversé : Et, poursuivant en paix son éternel voyage, La Caravane avait conquis l’autre rivage. 

44. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Il ne ressemblait pas à ceux qui portent partout avec eux les lunettes de leur village ; il prenait celles de chaque endroit où il passait, sauf à n’en croire en définitive que ses propres yeux. […] Il avait naturellement la joie de l’esprit et celle de l’humeur ; il fallait qu’il eût bien fort la gravelle pour être triste, tout comme Horace qui est heureux partout, à moins que la pituite ne s’en mêle : Nisi cum pituita molesta est. […] Là Montaigne regretta d’avoir omis trois choses en son voyage : 1° de n’avoir point emmené avec lui un cuisinier pour s’instruire des recettes allemandes et en pouvoir faire un jour l’épreuve chez lui (car il s’inquiète des mets et de la chère partout où il passe, il ne vit pas seulement de l’esprit) ; 2° de n’avoir pas amené avec lui un valet allemand ou de ne s’être pas donné pour compagnon de route quelque gentilhomme du pays, afin de ne pas se trouver tout à fait à la merci d’un bélître de guide ; 3° enfin, de n’avoir pas lu d’avance ou emporté dans ses coffres les livres et guides du voyageur (comme nous dirions) qui le pussent avertir des choses rares et remarquables à visiter en chaque lieu. […] Partout où il allait, le premier soin de Montaigne était d’observer la mode du pays, quelque difficulté et gêne qu’il y trouvât ; c’était sa religion à lui. […] que de bon sens partout !

45. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

. : il montrait combien l’ignorance des sources, le manque de science et de critique, l’inintelligence de la vie du passé, le goût romanesque, la rhétorique, l’esprit philosophique, avaient partout déformé l’histoire : combien froides et fausses étaient toutes ces annales, où avortaient vite quelques bonnes intentions d’exactitude. […] Il a observé partout, dans les idées, dans les mœurs, et dans le gouvernement, la plus étrange confusion : les législateurs occupés à détruire ou neutraliser les effets de la Révolution, à restreindre la liberté, borner l’égalité ; l’autorité méprisée et redoutée, l’administration centralisée et oppressive ; le riche et le pauvre en face l’un de l’autre, se haïssant, ne croyant plus au droit, mais à la force ; les chrétiens épouvantés de la démocratie, qui est selon l’Évangile ; les libéraux hostiles à la religion, qui est essentiellement libérale ; les honnêtes gens en guerre contre la civilisation dont ils devraient diriger la marche : dans tout cela, le progrès évident, irrésistible, de l’égalité, partant de la démocratie. […] Il avait « le don des larmes », une âme frémissante, qui partout aimait, partout sentait, partout mettait la vie.

46. (1829) De la poésie de style pp. 324-338

Il en est partout de même dans ces chœurs. […] Maintenant, nous le répétons, si l’on fait attention que l’élément de toute poésie est la comparaison plus ou moins prolongée, on concevra quel immense changement a dû résulter de l’introduction d’une forme de style qui, par sa rapidité, permet de multiplier les comparaisons et de les répandre partout. […] Mais une tentative directement contraire à celle-là commençait alors, qui, au lieu des abstractions de la physique, allait introduire partout les images physiques, c’est-à-dire le symbolisme. […] La puissante imagination de M. de Chateaubriand, sollicitée par tant d’émotions, ramenée vers la nature par les convulsions du monde politique, cherchant partout des démonstrations au spiritualisme, et faisant parler la terre et les cieux pour ranimer la foi religieuse, a trouvé là bien des couleurs. […] Après cela, mille causes accessoires y ont concouru : on a pris goût au style poétique de la Bible, qui était pour Voltaire un sujet d’ineffables risées ; on a pris goût aux littératures étrangères ; on a étudié l’Orient ; on a eu besoin d’émotions nouvelles ; le sentiment de la liberté et de l’individualisme s’est montré partout, s’est appliqué à tout ; enfin on retrouve ici, comme dans mille autres questions, l’influence de tout ce qui compose ce qu’on appelle l’esprit du siècle.

47. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

Voltaire se montra si aimable pour lui, qu’il fut bientôt, de toutes les personnes de la maison, celle avec qui Florianet se plaisait le plus : Souvent il me faisait placer auprès de lui à table ; et, tandis que beaucoup de personnages qui se croyaient importants, et qui venaient souper chez Lope de Vega pour soutenir cette importance, le regardaient et l’écoutaient, Lope (c’est le nom qu’il donne partout à Voltaire dans le léger déguisement de ses Mémoires) se plaisait à causer avec un enfant. […] Une remarque singulière et qui caractérise bien le propre des vocations et des instincts, c’est que plus tard Florian traduira Don Quichotte et l’abrégera sous prétexte d’en affaiblir les taches ; mais ce sont souvent les beautés et les gaietés qu’il abrège : C’est le génie qu’il supprime, a dit Marie-Joseph Chénier ; il attiédit la verve de Cervantes ; un comique large et franc devient partout mince et discret. […] Lacretelle l’a très bien fait observer en nous peignant ce Florian réel, qui avait le privilège d’inspirer partout la joie par ses bons mots, ses contes et ses chansons : « Il osait peu se livrer à sa gaieté naturelle en écrivant. […] La fable est partout, et on la réinventerait dans chaque siècle, si elle était oubliée. […] Les Fables de Florian sont bien composées, d’une combinaison ingénieuse et facile ; le sujet y est presque partout dans un parfait rapport, dans une proportion exacte avec la moralité.

48. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IX. Mémoires de Saint-Simon » pp. 213-237

L’orgueil souffrant de celui-ci, de cet esprit qui sentait sa puissance, mais qui, comme tant d’esprits, se méprenait sur elle, a cherché à voiler cette blessure, mais il l’avait au fond du cœur, et elle saigne partout dans ses Mémoires. […] Partout ils ont trouvé leur lit nuptial. […] Il ne trichait point au jeu et partout il payait ses dettes. […] Il n’en peut plus ; il est brisé de cette faction éternelle et inutile, montée partout, au lever, au coucher, à la chasse, et où il n’est jamais rien de plus qu’un homme de ce cortège ! […] Partout ailleurs, elle est méritée.

49. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre X : M. Jouffroy psychologue »

Jouffroy dit quelque part et prouve partout « qu’il avait à un assez haut degré le sens psychologique, et une grande inclination pour la science des faits intérieurs67. » Rien de plus naturel que ce goût dans un homme intérieur. […] Jamais de faits, partout des comparaisons. […] Mais nous savons qu’il en est partout de même, et que l’univers est composé de forces ou causes individuelles dont les phénomènes visibles sont les effets. « Les causes ne sont pas matérielles. […] Si vous en voulez une preuve, considérez le sens du verbe, vous verrez que toujours et partout où il se rencontre, l’attribut est une qualité, un abstrait, une portion du sujet. […] En psychologie, comme en physiologie, comme en chimie, comme partout, trouver l’essence, c’est ramener un fait aux faits qui le composent et auxquels il se réduit.

50. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

Et pour se donner patience et courage, il passe en revue tous les martyrs de la muse, la grande procession des glorieux affligés à commencer par Homère, tous ceux que le monde a couverts d’insultes, qu’il a abreuvés de fiel et couronnés d’épines : Et c’est ainsi partout, et c’est ainsi toujours ! […] L’intelligence dit au cœur : « Le monde n’a pas un bon père, « Vois, le mal est partout vainqueur. » Le cœur dit : « Je crois et j’espère ; « Espère, ô ma sœur ! […] Sully Prudhomme, à son tour, s’adresse à Musset ; il le prend sur un tout autre ton avec toutes les cérémonies et tous les respects, mais ce n’est que pour mieux marquer sa dissidence et pour faire acte de séparation : on ne dira pas du moins qu’il ne l’a pas senti et loué comme il faut : Toi qui naissais à point dans la crise où nous sommes, Ni trop tôt pour savoir, ni, pour chanter, trop tard, Pouvant poser partout sur les œuvres des hommes Ton étude et ton goût, deux abeilles de l’art ; Toi dont la muse vive, élégante et sensée, Reine de la jeunesse, en a dû soutenir Comme un sacré dépôt l’amour et la pensée, Tu te plains de la vie et ris de l’avenir ! […] Chenavard ou Puvis de Chavannes n’ont pas de crayons plus nobles dans la série de leurs graves esquisses : Poëte, oubliais-tu les bas-reliefs antiques Racontant la naissance et le progrès des arts, Le soc, le bœuf, la ruche et les essais rustiques Faits par les jeunes gens sous les yeux des vieillards ; Partout, dans la campagne égale et spacieuse, Les efforts du labour, les merveilles du fruit, Et la rébellion farouche et gracieuse Des premiers étalons que le dompteur instruit ; Les sages ; l’alphabet écrit dans la poussière ; La chasse aventureuse et l’aviron hardi ; Les murailles, les lois sur les livres de pierre, Et l’airain belliqueux pour l’épaule arrondi ; Les femmes dessinant les héros dans la trame ; Les artistes au marbre inculquant leurs frissons, Et le berger poëte, inventeur de la gamme, Suspendant le soupir à la chaîne des sons ?

51. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XV. M. Dargaud » pp. 323-339

C’est la poésie même du passé racontée par un homme qui sent la poésie partout où elle est, et elle est partout ! […] L’homme, sa personnalité libre, sa moralité, son intellectualité, partout où ces choses-là sont belles, il les sent avec un tressaillement profond, infaillible, qui ne se dément ni ne se blase jamais, et il les exprime avec une émotion presque géniale de vérité et quelquefois presque sainte. […] Il y a bien partout en elle, il est vrai, et il devait y avoir, la négation de ce pouvoir religieux qui, au xvie  siècle, était la base de la constitution de l’État, mais est-ce que l’honneur et l’obligation n’étaient pas alors de le défendre contre l’irruption des idées nouvelles qui l’attaquaient, le fer aux mains ?

52. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « APPENDICE. — M. SCRIBE, page 118. » pp. 494-496

Le second acte a des parties énergiques dans le rôle du ministre ; il en est partout de délicates et de fines dans le rôle de Cécile, surtout au moment où, forcée par la calomnie, elle ose regarder en elle-même et s’avouer son amour pour son tuteur : ce revirement de cœur est traité à merveille. […] Tant il est vrai qu’elle se glisse partout, là même où elle est si hardiment d’ailleurs et si spirituellement moquée.

53. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Courteline, Georges (1858-1929) »

Pierre et Paul C’est du régiment, c’est de la caserne que devait se dégager le vrai Courteline ; et effectivement c’est le séjour qu’il fit au 13e chasseurs, à Bar-le-Duc, qui nous a valu ses admirables Gaîtés de l’éscadron qui partout respirent la pitié pour le soldat, et une fraternelle espérance de justice, et dont les chapitres notamment intitulés Un mal de gorge et Les Têtes de bois sont des chefs-d’œuvre de la plus rare inspiration et d’une perfection impeccable. […] On a reproduit partout Margot, Une bonne fortune et cette perle du livre : Henriette a été insultée, que nous citerions ici, s’il ne la fallait reproduire de la première à la dernière ligne sans en passer une.

54. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre I. Objet de ce livre. — Retour de l’âge divin » pp. 357-361

Partout les rois catholiques, protecteurs de la religion, revêtaient les habits de diacres et consacraient à Dieu leurs personnes royales114. […] Partout avaient recommencé les violences, les rapines, les meurtres, et comme la religion est le seul moyen de contenir des hommes affranchis du joug des lois humaines (axiome 31), les hommes moins barbares qui craignaient l’oppression se réfugiaient chez les évêques, chez les abbés, et se mettaient sous leur protection, eux, leur famille et leurs biens ; c’est le besoin de cette protection qui motive la plupart des constitutions de fiefs.

55. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

. — Deux perpendiculaires à une droite sont partout équidistantes. — Démonstration du postulat d’Euclide. […] Nous voulons dire simplement que, toujours et partout, l’application de la chaleur sera suivie par la dilatation du corps, que toujours et partout la vibration du corps extérieur transmise par le milieu ambiant au nerf auditif sain sera suivie par la sensation de son. […] S’il l’a toujours et partout, c’est qu’il l’a de lui-même et par lui seul. […] Donc les deux verticales sont partout équidistantes, et leur distance est AB. […] Donc les deux horizontales sont partout équidistantes, et leur distance est AA′.

56. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre V. La philosophie. Stuart Mill. »

C’est d’après ce point de vue qu’il a partout innové. […] Partout l’opération est la même. […] Il n’y a qu’elles, et elles sont partout. […] Partout ailleurs il en est de même. […] Nous ne la possédons pas partout, mais nous la cherchons partout.

57. (1864) Le positivisme anglais. Étude sur Stuart Mill

C’est d’après ce point de vue qu’il a partout innové. […] Partout l’opération est la même. […] Il n’y a qu’elles, et elles sont partout. […] Partout ailleurs il en est de même. […] Nous ne la possédons pas partout, mais nous la cherchons partout.

58. (1892) Sur Goethe : études critiques de littérature allemande

Une ambition méditative, une ambition immense et sourde régnait partout. […] De tels caractères et de telles vies restent toujours et partout des caractères et des vies d’exception. […] La vie d’Hippus n’est qu’une suite de terreurs ; sa tête, affaiblie par l’abus du vin, voit partout des agents de police. […] La poésie anime et colore partout le style de M.  […] En France, comme partout, le succès fut instantané et universel.

59. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre XII. Suite du Guerrier. »

Qual saturo augel, che non si cali, Ove il cibo mostrando, altri l’invita Faut-il combattre, délibérer, apaiser une sédition, Bouillon est partout grand, partout auguste.

60. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Le lettré trop lettré dans Gœthe, et qui n’est jamais qu’un lettré, est marqué partout des réminiscences de Shakespeare. […] Elle le suit, elle le poursuit, elle s’impose à lui, cette même figure, et il la met partout où il met l’amour, ce monogame indigent ! […] Genre de sauce, bien allemande, celle-là, qui n’empêcha pas le public d’avaler le poisson… Le succès fut prodigieux partout, mais particulièrement en Allemagne, où les livres ont une énorme influence et s’impriment aisément sur ces têtes de papier. […] Il avait vu Napoléon, qui cherchait partout des poitrines pour y attacher sa Légion d’Honneur, et qui, aussi faible que madame de Staël ce jour-là, crut que c’était là une poitrine, que celle de Gœthe, qui grandirait son institution. […] Et là, comme partout, dans le conseiller d’État solennel comme dans le poète qui posait dans son auréole, je retrouve, de même qu’un rat dans une grande armoire, mon éternel petit bourgeois.

61. (1874) Premiers lundis. Tome I « J. Fiévée : Causes et conséquences des événements du mois de Juillet 1830 »

Chez eux, il y a du bon partout ; le général s’y mêle toujours au particulier, il faut savoir l’en tirer et le laisser venir ; il y a depuis un certain temps assez d’écrivains politiques qui ne procèdent que par axiomes généraux, par considérations abstraites, pour que le défaut contraire ait son prix et constitue une espèce d’originalité. […] Ils commandaient, non parce qu’ils en avaient la capacité, on ne le savait pas encore, mais parce qu’on pouvait toujours les reconnaître au milieu de la foule et partout où ils se portaient. […] Des trois pouvoirs qui composent le gouvernement, le pouvoir qui dispose de l’armée déclarait la guerre à la société ; les deux autres pouvoirs étaient nuls par des causes que j’expliquerai ; et l’administration publique, depuis longtemps organisée pour nous priver de tout mouvement, restait partout menaçante.

62. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VI. La commedia sostenuta » pp. 103-118

La soubrette est la même partout : voyez la Samia de La Calandra de Bernardo Divizio ; voyez l’Ulivetta de l’Hortensio des Étourdis de Sienne. […] Maintenant partout où je m’adresse pour en découvrir une bonne, j’entends dire : celle-ci a fait ceci, cette autre a fait cela. […] Il n’est pas besoin de dire que les amoureux sont semblables de part et d’autre ; ils sont à peu près les mêmes toujours et partout.

63. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence en général. » pp. 177-192

Ils respirent partout la droiture, les bonne mœurs, le christianisme : mais y remarque-t-on un vrai talent ? […] Tant d’exemples du sublime cité partout, remarquables principalement par ce naturel qui les caractérise, & cette facilité qu’on trouve à les traduire dans toutes les langues, sont une preuve que la sublimité des pensées peut aller sans celle de l’expression. […] Chez les Grecs & chez les Romains, comme aussi chez les Anglois, & généralement dans toutes les républiques où l’on est continuellement occupé de grands intérêts publics, il se peut qu’on réduise toute la force de l’éloquence à sçavoir persuader & faire réussir ses desseins ; qu’on ne lui reconnoisse aucune autre vertu, parce que toutes les autres qualités doivent être subordonnées à celle-là, & qu’il est juste que le principal l’emporte sur l’accessoire : mais, en France, & partout ailleurs où le gouvernement républicain n’a pas lieu, on doit distinguer ces deux choses.

64. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Eugène Hatin » pp. 1-14

La presse est « aujourd’hui dans un de ces moments de torpeur qui, par une loi que l’on retrouve partout dans la nature, succède toujours aux grandes agitations ». — voilà les idées dont se paie le penseur historique qui vient se colleter avec cette terrible histoire du journalisme, et qui croit en légitimer les ambitions dévorantes ! […] Par une de ces préoccupations familières aux gens qui se coiffent d’un sujet jusqu’aux yeux, l’auteur de l’Histoire de la Presse a voulu voir le journalisme partout, même à Rome, mais il n’a pas compris que ce journalisme, dont les grands pontifes avaient exclusivement le monopole, était précisément la condamnation de celui-là dont il cherche beaucoup trop haut la conception dans l’histoire ; car elle n’appartient qu’à ces derniers temps. […] Il paraît que Richelieu, qui voulait avoir sa fine et puissante main partout, avait attaché à la fondation de Renaudot ces hommes remarquables du temps : Mézeray, Bautru, Voiture, La Calprenède, dont il fit toujours, et sous toutes les formes, les commis de sa gloire.

65. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

II Parmi les tard venus à cette place, il en est un pour lequel le succès est partout venu vite, et qui pourrait s’appeler, comme Masséna, l’enfant chéri de la Victoire. […] Nous avons signalé plus d’une fois cette tendance qui est partout maintenant, dans les arts, la philosophie, la littérature, et que nous avons nommée le bourgeoisisme. […] Le destin d’Augier — partout où vous le supposiez dans l’histoire littéraire — serait d’être toujours le caméléon de quelqu’un ; mais le caméléon malade, qui ne prend que la moitié de la couleur qu’il emprunte, et qui la dissout et la ternit en nous la renvoyant.

66. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre V. Des Grecs, et de leurs éloges funèbres en l’honneur des guerriers morts dans les combats. »

Je m’imagine que dans ce moment, le père devait approcher de son fils, et lui dire : « Tu vois dans quel pays tu es né, et comme on y honore tout ce qui est grand ; et toi aussi, mérite un jour que ton pays t’honore. » Ainsi, chez les Grecs, de quelque côté qu’on jetât les yeux, on trouvait partout des monuments de la gloire ; les rues, les temples, les galeries, les portiques, tout donnait des leçons aux citoyens. Partout le peuple reconnaissait les images de ses grands hommes ; et sous le plus beau ciel, dans les plus belles campagnes, parmi des bocages ou des forêts sacrées, parmi les cérémonies et les fêtes religieuses les plus brillantes, environnés d’une foule d’artistes, d’orateurs et de poètes, qui tous peignaient, modelaient, célébraient ou chantaient des héros, marchant au bruit enchanteur de la poésie et de la musique, qui étaient animées du même esprit, les Grecs victorieux et libres ne voyaient, ne sentaient, ne respiraient partout que l’ivresse de la gloire et de l’immortalité.

67. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre XI. De la géographie poétique » pp. 239-241

Puisque des Latins nous sommes revenus aux Grecs, remarquons que cette nation vaine en se répandant dans le monde, y célébra partout la guerre de Troie et les voyages des héros errants après sa destruction, des héros grecs, tels que Ménélas, Diomède, Ulysse, et des héros troyens, tels que Anténor, Capys, Énée. Les Grecs ayant retrouvé dans toutes les contrées du monde un caractère de fondateurs des sociétés analogue à celui de leur Hercule de Thèbes, ils placèrent partout son nom et le firent voyager par toute la terre qu’il purgeait de monstres sans en rapporter dans sa patrie autre chose que de la gloire. […] Les Grecs observèrent encore qu’il y avait eu partout un caractère poétique de bergers parlant en vers ; chez eux c’était Évandre l’Arcadien ; Évandre ne manqua pas de passer de l’Arcadie dans le Latium, où il donna l’hospitalité à l’Hercule grec, son compatriote, et prit pour femme Carmenta, ainsi nommée de carmina, vers ; elle trouva chez les Latins les lettres, c’est-à-dire, les formes des sons articulés qui sont la matière des vers.

68. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre II. De l’expression »

Dans cette société de petites gens et dans cette habitude des détails vulgaires, le poëte a pris un ton familier qu’il garde partout. […] Ainsi certaines gens qui font les empressés          S’introduisent dans les affaires,          Ils font partout les nécessaires, Et partout importuns devraient être chassés. […] Or, La Fontaine est assez poëte pour commander à la mesure, et il aime trop le vrai pour être solennel à contre-temps. — De métaphores, peu ou point, si ce n’est les figures du langage rustique ; partout l’expression naturelle et primitive. […] Ils sont partout d’accord avec eux-mêmes, parce qu’ils sont raisonnables.

69. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

Au reste, le même abbé Le Dieu les rétractera pour sa part ces messéantes paroles, autant qu’il sera en lui ; car Bossuet mort, et peu de mois après, ayant eu l’occasion de faire un voyage à Cambrai, il fut séduit, il fut charmé comme tous ceux qui approchaient de l’aimable et de l’édifiant archevêque ; et ce même homme qui avait couché dans son journal ce que, par égard pour Bossuet même, on en voudrait effacer, écrivait à Mme de La Maisonfort, en racontant tout ce qu’il avait ouï et vu de la vénération unanime partout acquise à Fénelon : Mais je m’en tiens à ce que j’ai vu dans Cambrai, où tout est à ses pieds : on est frappé de la magnificence de sa table, de ses appartements et de ses meubles ; mais, au milieu de tout cela, ce qui touche bien davantage, c’est la modestie et, à la lettre, la mortification de ce saint prélat. […] Dans cette assemblée, et à ne voir que les dehors, Bossuet est primé par d’autres : l’archevêque de Reims, Le Tellier, veut être président en titre, sauf (quand il est nommé) à dire partout de M. de Meaux : « C’est mon président. » Bientôt l’archevêque de Paris, Noailles, est promu au cardinalat et devient le président titulaire à son tour. […] Chacun le dit, mais lui ne vise qu’au principal, au triomphe de la doctrine ; il conseille et inspire M. de Noailles comme il avait fait pour Le Tellier : « Il va droit au bien en tout et partout, sans écouter les dégoûts qu’il peut avoir, ni se laisser arrêter par les difficultés qui se présentent. » Il a besoin d’agir directement auprès de Mme de Maintenon pour obtenir d’elle et de son influence sur le roi que le père de La Chaise ne soit point écouté ; car il s’agit de condamner des doctrines chères aux amis et confrères du père de La Chaise. […] Il est certain que par ces condamnations en partie rétrospectives, l’assemblée de 1700 ne faisait que confirmer et terminer en quelque sorte le programme ecclésiastique de la dernière moitié du siècle, qu’elle ne s’attaquait qu’à des doctrines déjà frappées et bientôt stériles, bien qu’elles eussent encore des racines vivaces, et qu’elle n’obviait en rien (et ce ne pouvait être son rôle) à ces autres doctrines bien autrement dangereuses qui s’insinuaient partout et qui étaient à la veille de se démasquer.

70. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

Il l’eut scandaleuse et flatteuse, et du coup elle le fit quitter ses deux paroisses et s’en venir à Londres, où il alla partout sur le poing de Garrick, le comédien (cornac bien choisi pour un prêtre !) […] Mais je l’ai dit, partout ailleurs qu’en Angleterre, il est toute une race d’esprits parmi ceux qui se croient littéraires, et qui le sont même en quelque degré, qui ne se doutent pas de la qualité du génie de Sterne, quand il a du génie et que les yeux du bouffon s’emplissent de ses pleurs… C’est contre cette race d’esprits ou plutôt pour cette race d’esprits, que M.  […] Partout ses opinions ne sont pas les miennes. […] Mais nous disons, nous, que si le livre en question est de la main, il n’est point de la tête de Sterne ; que s’il est sorti, ébauche maigre, informe, mal venue, du portefeuille qui l’avait chastement gardé, il ne l’est pas de la plume divine qui a versé la vie, le sourire et les larmes, partout où elle s’est appuyée !

71. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Il méprisait l’orléanisme, ses princes, sa politique, ses appuis : égoïsme partout et matérialisme. […] Il a écrit tel mémoire sur la question d’Orient qu’on citerait partout, s’il était d’un diplomate de carrière. […] Partout le peuple s’était porté avec empressement à ses églises. […] Car c’est sa maladie qu’il décrit, c’est de sa maladie que vivent Chactas, Eudore et René ; et partout où l’expression ne dépasse pas la réalité des malaises moraux de l’auteur, un charme douloureux s’en dégage. […] Le ton local, le caractère singulier est partout attrapé avec une délicatesse puissante.

72. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « BRIZEUX et AUGUSTE BARBIER, Marie. — Iambes. » pp. 222-234

Ingres sectateur de l’antique beauté, des vers à la mémoire de ce Georges Farcy que sa mort a révélé à la France, et qui eût aimé ce livre s’il avait vécu, et qui, en le lisant, eût envié de le faire ; partout une nature élégante et gracieuse à laquelle le cœur se confie ; partout de bienveillantes images et un pur désir du beau : le doux Virgile en robe traînante et les cheveux négligés, s’appuyant sur le bras de Mécène au seuil du palais d’Octave ; un doute tolérant et chaste, la liberté clémente ; Jésus homme ou Dieu, dit le poëte, mais qui possède à jamais l’univers moral, et qui, s’il doit mourir, ne mourra que comme le père de famille, après que toute sa race, la race des fils d’Adam, sera pourvue ; — ce sont des vers comme ceux-ci, inspirés par le joli pays de Livry, que Mme de Sévigné chérissait déjà : ………. […] Mais chez l’auteur de Marie, tout cela est si habilement fondu, si intimement élaboré au sein d’une mélancolie personnelle et d’une originalité indigène, que la critique la plus pénétrante ne saurait démêler qu’une confuse réminiscence dans ce produit vivant d’un art achevé, et que si elle voulait marquer d’un nom ce fruit nouveau, elle serait contrainte d’y rattacher simplement le nom du poëte ; mais nous qui jugeons combien est sincère la modestie qui nous l’a caché81, nous ne prendrons pas sur nous de lui faire violence ; et pour conclure, nous nous bornerons à citer la plus touchante, à notre gré, des élégies que le nom de Marie décore : Partout des cris de mort et d’alarme !

73. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre I. Vue générale »

On élimina partout le réel et le concret, et l’on n’opéra que sur des idées. […] On met l’intelligence partout, et l’on s’imagine qu’elle suffit à tout. […] Il ne regarde que l’homme idéal, la définition de l’homme : mais cet homme en soi n’est pas Français plutôt qu’Allemand : il est Européen, il est partout où il y a des hommes ; et toutes les vérités que conçoit la raison d’un homme sont faites pour cet homme universel.

74. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIII. Henry Gréville »

Elle n’a pas le regard qu’on rabat du ciel sur les choses de la vie et qui, tombant de si haut, va au fond… C’est une femme du monde, qui peint une société dont les surfaces l’attirent, bien plus qu’un romancier moraliste qui prend les passions et les jauge partout où elles sont… Mais, si elle n’est pas, si elle ne peut pas être le moraliste à la façon des grands romanciers qui savent l’ordre le cœur humain pour tirer la morale du sang, des larmes et de la fange qu’ils en font sortir, elle est toujours et partout la plume pure que j’ai dit qu’elle était. […] Mais je n’avais pas trouvé l’esprit, la repartie, le brio, le trait, qu’ont les femmes spirituelles, sans écrire, et qu’elles ont partout, au pied levé, dans un tour de main, dans un tour de valse, sous l’éventail, sous la cheminée, et même sous les rideaux !

75. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Prévost-Paradol » pp. 155-167

Mais ce que je ne puis trouver bon, — parce que cela ne les rend pas meilleurs, — c’est que les articles de Prévost-Paradol portent partout l’empreinte et la mauvaise humeur d’une ambition que je conçois très bien et d’un génie, hélas ! […] La seule foi bien établie en quelque chose, la seule conviction que j’aie trouvée sous les phrases légères comme le vide de Prévost-Paradol, c’est l’idée, qui brille partout dans ses livres, que par les temps actuels, — ces temps durs, ingrats, injustes, malhonnêtes, comme la fièvre de la princesse Uranie dans le sonnet de Trissotin, — Prévost-Paradol avait manqué fatalement sa gloire ! […] Seulement, si bien qu’il se tienne sous la garde de cette prudence en ces deux volumes qu’il offre au public, il a glissé, et en glissant, dans une toute petite phrase sur Fontenelle il a montré les parties honteuses de sa pensée : — « Fontenelle — nous dit-il — respecte tout COMME IL CONVIENT, mais, partout où il est passé, rien n’est resté debout. » Sentez-vous la joie ?

76. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre IX. Suite des éloges chez les Grecs. De Xénophon, de Plutarque et de Lucien. »

C’est celle d’un vieillard plein de sens, accoutumé au spectacle des choses humaines, qui ne s’échauffe pas, ne s’éblouit pas, admire avec tranquillité et blâme sans indignation ; sa marche est mesurée, et il ne la précipite jamais : semblable à une rivière calme, il s’arrête, il revient, il suspend son cours, il embrasse lentement un terrain vaste ; il sème tranquillement, et comme au hasard sur sa route, tout ce que sa mémoire vient lui offrir ; enfin partout il converse avec son lecteur : c’est le Montaigne des Grecs ; mais il n’a point comme lui cette manière pittoresque et hardie de peindre ses idées, et cette imagination de style que peu de poètes même ont eue comme Montaigne. […] Il attaqua comme La Bruyère les vices et les ridicules de son temps ; mais moins fort et moins ardent que lui, ayant plutôt cette fleur d’esprit qu’eut dans la suite Fontenelle, avec plus de hardiesse et de saillie dans le caractère, il mêla partout la philosophie à la légèreté, et la satire à la grâce. Parmi la foule de ses ouvrages, on a de lui un éloge de Démosthène, qui mérite d’être distingué ; Lucien y est original et piquant comme partout ailleurs ; il ne s’astreint pas à la forme des éloges ; sa devise, comme il le dit lui-même, est de n’imiter personne.

77. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

Revenant habiter à Paris l’année suivante, vers octobre 1793 : J’ai la douce consolation, dit-il, d’y éprouver que l’on peut trouver Dieu partout, que partout où on trouve son Dieu on ne manque de rien, on ne craint rien, on est au-dessus de tout, enfin que l’on peut obtenir toutes les connaissances qui nous sont nécessaires sur notre propre conduite si on les demande avec confiance. […] La veille du jour où l’on apprit à Amboise la chute de Robespierre, Saint-Martin se sentit sollicité d’un ardent besoin de prier : Je repassais dans mon esprit les horreurs du règne où nous étions, et dont je pouvais à tout moment éprouver personnellement les cruels effets : je me résignais en conséquence à l’arrestation, à la fusillade, à la noyade, et je disais à Dieu que partout là je me trouverais bien, parce que je sentais et je croyais que j’y serais avec lui. […] J’ai traversé en outre trois fois presque tout le royaume pendant ces temps de trouble, et la paix s’est trouvée partout où j’étais (excepté l’aventure du Champ-de-Mars de l’été de 1791, pendant laquelle j’étais à Paris) ; tout cela me fait croire que, sans oser me regarder comme un préservatif pour mon pays, il sera cependant garanti de grands maux et de désastres absolus tant que je l’habiterai ; non pas, comme je viens de le dire, que je me croie un préservatif, mais c’est parce que je crois que l’on me préserve moi-même, attendu que l’on sait combien la paix m’est chère, et combien je désire l’avancement du règne de mon Dieu… Vous croyez peut-être que la suite des événements va le détromper : pas le moins du monde. Il ajoute un post-scriptum daté de 1801 ou de 1802, dans lequel il paraît vouloir démontrer que partout où il s’est trouvé dans l’intervalle depuis juillet 1792 jusqu’à la paix d’Amiens, toutes choses se sont passées pour le mieux là où il était de sa personne, même à Paris le 10 Août.

78. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

Un refus du ministre de la guerre jeta Franceschi dans la cavalerie, et quoique une organisation douée comme la sienne eût été partout à sa place, il dut à ce contre-temps de se trouver lancé dans la voie d’une vocation qui lui était plus spéciale. […] Au nom de Franceschi : « Toujours mon hussard, dit-il, toujours partout, toujours intrépide ! […] Toujours alerte, infatigable, se montrer partout, paraître et disparaître, se diviser, se rejoindre, se multiplier comme par enchantement ; à la tête d’une vaillante élite, simuler le nombre, décupler le chiffre par la qualité et la vélocité ; en couvrant les siens, en les éclairant, tromper l’ennemi, lui donner le change, lui faire craindre un piège, lui faire croire qu’on est appuyé ; dans les retraites profiter des moindres replis, d’un ruisseau, d’un mur, du moindre obstacle, pour le chicaner, pour le retarder, « pour l’obliger à mettre trois ou quatre heures à faire une lieue de chemin » ; victorieux, le soir ou le lendemain des grandes journées, fondre et donner sans répit, à bride abattue, s’imposer à force d’assurance, et avec une poignée de braves ramasser des colonnes entières d’infanterie, les ramener prisonnières ; à chaque instant, à nouveaux frais, sur un échiquier nouveau, proportionner son jeu à l’action voulue, y faire des prodiges de coup d’œil, d’adresse, de tactique non moins que d’élan et d’intrépidité : — si tel est le rôle d’un parfait officier de cavalerie légère, nul n’y surpassa Franceschi. […] Je ne crois rien m’exagérer, mais ce récit naturel, qui d’une part nous montre des populations exaspérées, fanatisées, sauvages, des chefs et des gouverneurs timides et obligés de hurler avec la populace, de peur de la voir se déchaîner ; qui, d’autre part, nous fait entrevoir des âmes humaines comme il s’en rencontre partout, des cœurs pétris d’un meilleur limon et qui s’attendrissent au spectacle des peines et des souffrances de leurs semblables ; ce récit, sans y viser, a quelque chose de pathétique et de tout à fait virgilien : « Au coucher de la lune, l’obscurité devint profonde ; les guérillas perdirent toute trace de chemin et nous surveillèrent de plus près. […] Avant tout, le hasard et la bizarrerie des destinées ; cette fatalité « qui préside aux événements de notre vie, qui paraît dormir dans les temps calmes, mais qui, dès que le vent s’élève, emporte l’homme à travers l’air comme une paille légère » ; les premiers succès, l’entrain du début, les heures brillantes de la vie, les espérances déjà couronnées ; puis les revers, les lenteurs, les mécomptes, les difficultés tournant à la ruine ; la prison, la souffrance, une épreuve sans terme ; une longue agonie dans l’âge de la force ; une nature d’élite écrasée, victime et martyre des persécutions ; les haines aveugles des foules, les sauvages préjugés des races ; l’horreur des guerres injustes ; toujours et partout, çà et là, quelques âmes bienfaisantes et compatissantes ; notre pauvre humanité au naturel et à nu, en bien et en mal ; une belle mort enfin, délicate et magnanime.

79. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

L’imitation, l’émulation et l’industrie étant partout au comble, les genres et les manières qui pouvaient sembler les plus réservés jusqu’à présent, et qui eussent peut-être suffi autrefois pour marquer la qualité du talent, ne sont plus une garantie, s’ils l’ont jamais été ; tout le monde s’en mêle, et assez bien. […] Trop peu compétent pour mon compte en matière si éparse et si mobile, je ne ferai que courir, relevant quelques points à peine et en hâte d’arriver à son dernier succès, mais heureux au moins si j’ai montré que le propre de la critique est de n’être point prude, qu’elle aime et va querir partout les choses de l’esprit, qu’elle tient à honneur de s’en informer et d’en jouir. […] Il régnait alors dans les colléges, et à Sainte-Barbe en particulier, un esprit de famille et de camaraderie cordiale qui ne s’est pas perpétué partout. […] Prendre partout ses sujets, ses idées, ses mots, dès qu’on voit qu’ils vont à la forme, au cadre voulu ; prendre partout son bien à tout prix, pour le rendre ensuite sur le théâtre à tout le monde, c’est ce qu’ont fait, grands et petits, tous les vrais dramatiques, et très-légitimement.

80. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Vernet » pp. 227-230

C’est la nuit partout, et c’est le jour partout.

81. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Daphnis et Chloé. Traduction d’Amyot et de courier »

La délicatesse, même comme nous l’entendons et l’accordons volontiers en ces choses de l’art, est partout, — presque partout, — observée. […] Il y règne le jour le plus limpide ; on croit ne voir partout que des tableaux d’Herculanum, et ces tableaux ; réagissant à leur tour sur les pages du livre viennent on aide à notre imagination pour la lecture. » Que de chemin nous avons fait, que d’étapes et quel retour vers la vraie Grèce depuis Bayle et le docte évêque d’Avranches ! […] Pas de trace de jours sombres, de nuages, de brouillard et d’humidité ; toujours le ciel du bleu le plus pur, l’air le plus doux, et partout un sol sec, sur lequel on pourrait s’étendre nu.

82. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

De l’Époque, après le naufrage, il fut recueilli au journal la Presse, et, dès lors, on le vit un peu partout ; romans, nouvelles, feuilletons de théâtre, articles de critique, il ne se refusa rien : Le principal étant de vivre, Fidèle au : « Tel père, tel fils », Ma ressource devint le livre ; Mon père en vendait, — moi, j’en fis. […] Je ne saurais me flatter de le suivre partout, de l’étudier avec méthode et de l’embrasser, comme on dit, tout entier. […] Le style est partout approprié au sujet, il est succulent. […] Partout dans ces pages circule une verve de Gargantua.

83. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre II. Filles à soldats »

Il mendie partout des toniques. […] On cherche la « petite secousse », n’est-ce pas, partout où on espère la trouver. […] Il affirme : « Partout ailleurs, les gens sont honnêtes ou canailles à peu près de la même façon.

84. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Ch.-L. Livet »

… Ou il doit recommencer sérieusement, ce qui ne manquerait pas de hardiesse, la comédie de Molière, cette comédie des Précieuses, qui n’a point passé comme le temps qu’elle a peint, et dans laquelle tout est resté aussi vrai et aussi réel que cet éternel bonhomme que Molière met partout, ce Gorgibus qui est Chrysale ailleurs, et Orgon, et même Sganarelle ; car Sganarelle, c’est Gorgibus avec quelques années de moins et une… circonstance de plus ; ou bien — ce qui serait beaucoup plus crâne encore — il doit être, ce livre, la défense enfin arborée des Madelon et des Cathos contre les moqueries de Molière, la négation des ridicules mortels qu’il leur a prêtés, et la cause épousée par un spiritualiste du xixe  siècle de ces idéales méconnues qui tendaient à s’élever au dernier bien des choses, et voulaient des sentiments, des mœurs et une langue où tout fût azur, où tout fût éther ! […] Homme de son temps (c’est l’éloge du temps), et voyant partout, comme les historiens de ce temps, des influences, il a pénétré celle qu’exerça la marquise de Rambouillet : « Sous cette influence — dit-il — les hommes commencèrent à rechercher la société des femmes, qu’ils n’avaient jamais recherchée jusque-là. » On le sait, ils vivaient dans les bois ! […] Il oublie que la conversation est un genre de génie tout individuel, intransmissible, incommunicable, qui peut jeter sa flamme dans le monde comme elle peut la jeter partout ailleurs ; mais qu’elle ne tient à aucune atmosphère, qu’elle n’est ni une routine, ni une éducation, ni un procédé, et que quand elle devient une manière d’être générale elle n’est plus qu’une médaille effacée, tombée à l’état de monnaie qu’on se passe de main en main et que chaque main efface un peu plus !

85. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Si j’avais une fille à marier ! » pp. 215-228

…) je te parle au nom de la nature, qui est la même partout, chez les civilisés comme chez les sauvages, à Constantinople comme à Paris, et que les hommes ont violée partout par des lois particulières, malheur des femmes… » Or, c’est cette nature interrogée, cette physiologie bien apprise, qui donneraient à la jeune fille de Weill, s’il avait vraiment une fille à marier, les notions nécessaires pour résister à tout, même à l’infidélité de son mari, s’il était jamais infidèle. […] ne pouvait ni se couler ni se figer dans ce dur moule a philosophe qu’on appelle l’hégélianisme ; mais s’il ne le pouvait pas, et précisément parce qu’il n’est point du métal qui doit y entrer et en ressortir pour faire trou partout comme les balles, il n’en a pas moins en lui de l’hégélianisme en gouttelettes, et son idéal, par exemple, ce mot inventé pour esquiver le mot de Dieu dans une foule de cas, est extrait de l’idée d’Hegel !

86. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Xavier Eyma » pp. 351-366

J’avais le droit d’exiger du vrai et du clair, et je ne rencontrais, dès les premières lignes, dans le livre de Xavier Eyma, que ces contradictions charmantes que j’ai rencontrées partout dans son histoire, et qui ont fait dire de l’ouvrage de Tocqueville, cette gamelle tendue à toutes les opinions qui veulent y prendre : « Il y en a pour tous les goûts !  […] Et il a eu raison, ce démocrate, dans l’emploi de ce procédé aristocratique ; car, dans le pays qu’on appelle le plus le pays des institutions, il faut voir, comme partout, avant tout, les hommes. […] quoique ce détail soit partout.

87. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Malot et M. Erckmann-Chatrian » pp. 253-266

Hector Malot, qui est la Leone Leoni en femme, a-t-elle sur sa figure, morale ou physique, un signe quelconque, grand comme une mouche, qui la distingue de toutes ces plates drôlesses qui sont partout et pour lesquelles on s’est épuisé d’invention quand on a dit qu’elles étaient belles comme Antiope, dans leur crinoline ? […] La préoccupation de ce malheureux livre, où il y a de l’étude et parfois du style, mais rien de sincère, de franc et de naïvement emporté, la préoccupation se trouve partout, c’est la manie de faire de l’école hollandaise, de cette école hollandaise transportée dans la littérature, et qui les perdra tous, ces romanciers sans idée, qui veulent tout écrire et ne rien oublier, parce qu’il est plus aisé de peindre les bretelles tombant sur les hanches des hommes qui jouaient au bouchon (v. p. 68), que d’avoir un aperçu quelconque ou de trouver une nuance nouvelle dans un sentiment. […] Le Docteur Mathéus, vrai comme une grimace, mais n’ayant pas plus de profondeur qu’une grimace, est un Don Quichotte philosophique suivi de son Sancho qui s’en va prêchant la métempsychose, comme Don Quichotte s’en allait en guerre, et qui revient à la maison couvert de horions partout attrapés.

88. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIV. Des panégyriques depuis la fin du règne de Louis XIV jusqu’en 1748 ; d’un éloge funèbre des officiers morts dans la guerre de 1741. »

Ainsi, presque partout ils substituèrent la finesse à la grandeur, et des beautés sages et tranquilles aux beautés d’imagination et de mouvement. […] À ce tableau il oppose celui de l’officier français : « Idolâtre de son honneur et de celui de son souverain ; bravant de sang-froid la mort, avec toutes les raisons d’aimer la vie ; quittant gaiement les délices de la société pour des fatigues qui font frémir la nature ; humain, généreux, compatissant, tandis que la barbarie étincelle de rage autour de lui ; né pour les douceurs de la société comme pour les dangers de la guerre ; aussi poli que fier ; orné souvent par la culture des lettres, et plus encore par les grâces de l’esprit. » Il parcourt ensuite rapidement nos victoires, nos exploits et nos pertes ; il célèbre cette brave noblesse qui partout a versé son sang pour l’État76. […] Ce livre, où les idées morales sont souvent profondes, où l’expression est quelquefois négligée, mais vigoureuse, où l’on voit partout une âme pleine d’humanité jointe à un caractère plein de force, peut à plusieurs égards être comparé à nos meilleurs livres de morale.

89. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Victor Hugo. Les Contemplations. — La Légende des siècles. »

Presque partout, le Jocrisse du fond, le Jocrisse fondamental, l’y emporte sur le Dorat libertin qui en brode la forme au tambour. […] Les strophes qui ont été citées partout et avec une juste admiration sur la mort de cette enfant si cruellement perdue, et dans lesquelles, pour la première fois, le panthéiste et le druide (M.  […] Nous avions pris la fleur du panier ; maintenant nous allons prendre partout. […] Presque partout une flatterie de parti et de parti pris, aussi hyperbolique que la poésie de M.  […] Il est certain que le poète s’est retrempé dans les sains courants de la tradition, et que dans son esprit et dans son livre, l’Histoire a, — comme partout, du reste, où elle intervient et elle passe, — heureusement foulé la Philosophie sous ses pieds !

90. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre IV. Services généraux que doivent les privilégiés. »

Guizot y a reçu des coups de feu dans ses jupes ; c’est qu’en Languedoc, par les États provinciaux, « les évêques sont maîtres du temporel plus que partout ailleurs, et que leur sentiment est toujours de dragonner, de convertir à coups de fusil ». […] Je vois partout des oisifs secondaires pulluler à l’ombre des oisifs en chef et puiser leur sève dans la bourse publique qui est la commune nourrice. […] Sous la direction du Conseil du roi, trois fonctionnaires superposés, au centre le contrôleur général, dans chaque généralité l’intendant, dans chaque élection le subdélégué, mènent toutes les affaires, fixent, répartissent et lèvent l’impôt et la milice, tracent et font exécuter les routes, emploient la maréchaussée, distribuent les secours, réglementent la culture, imposent aux paroisses leur tutelle, et traitent comme des valets les magistrats municipaux. « Un village, dit Turgot127, n’est qu’un assemblage de maisons, de cabanes et d’habitants aussi passifs qu’elles… Votre Majesté est obligée de décider tout par elle-même ou par ses mandataires… Chacun attend vos ordres spéciaux, pour contribuer au bien public, pour respecter les droits d’autrui, quelquefois même pour user des siens propres. » Par suite, ajoute Necker, « c’est du fond des bureaux que la France est gouvernée… Les commis, ravis de leur influence, ne manquent jamais de persuader au ministre qu’il ne peut se détacher de commander un seul détail ». — Bureaucratie au centre, arbitraire, exceptions et faveurs partout, tel est le résumé du système […] Un tel régime ne va point sans une attention toujours tendue, sans une énergie infatigable, sans un discernement infaillible, sans une sévérité militaire, sans un génie supérieur ; à ces conditions seulement on peut changer vingt-cinq millions d’hommes en automates, et substituer sa volonté partout lucide, partout cohérente, partout présente, à leurs volontés que l’on abolit.

91. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

Quitte à ne pas être entendus partout, je m’imagine qu’on y préférerait ceux de Byron, de Byron l’ami de Jackson pourtant, de Byron qui cultivait l’art de la boxe, mais qui était un trop grand poète pour la chanter ! […] Ces six cents pages ne sont pas même le tour de force sur le vent que nous attendions d’un si grand artiste en vide que Villemain ; car, au bout de quelques haleines, il clôt, épuisé, la dissertation sur Pindare, et se met à pourchasser la poésie lyrique partout où elle s’est montrée dans la littérature des peuples, afin de nous prouver (dit-il) qu’elle fut toujours en harmonie avec l’élévation morale et religieuse des nations ! […] Mais partout, partout derrière eux, il y a Villemain, Villemain le professeur et le rhéteur, Villemain le ministre du Juste Milieu, l’académicien perpétuel aux éloges académiques éternels, Villemain célèbre un jour, mais qui commence à ne plus l’être, qui commence enfin d’entrer dans la pénombre vengeresse qui suit trop de célébrité ! […] On l’a partout, quand on l’a, et même à la tribune ; mais l’accident de la tribune n’y est pour rien. […] C’étaient, comme on le disait dans ce temps-là, de profonds constitutionnels, des précurseurs de cette politique qui nous a conduits où nous en sommes et qui nous a fait tomber dans cette révolution, dont le centre est partout et la circonférence nulle part, en croyant reculer habilement devant elle !

92. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Appendices de, la deuxième édition »

Mais l’horloge qui, partant du point O, commence aussitôt à prendre du retard est une horloge devenue, dès ce moment, fantasmatique, n’étant plus l’horloge réelle du physicien réel : celui-ci est resté avec son horloge au point O, ne détachant sur le disque envisagé comme mobile qu’une ombre de lui-même et de son horloge (ou bien alors, chaque point du disque où il se placera effectivement devenant, par là même, immobile, son horloge restée réelle se trouvera partout immobile et fonctionnera partout de la même manière). […] Mais alors on y trouve partout le même Temps. […] Mais, justement parce que sa pensée peut se poser n’importe où et se déplacer à chaque instant, il aime à se figurer qu’elle est partout, ou qu’elle n’est nulle part. […] C’est du haut de ce système S″ qu’il opère en réalité — même si sa pensée se croit partout ou ne se croit nulle part — quand il distribue l’univers en systèmes animés de tels ou tels mouvements. […] Si véritablement le physicien était partout, ou s’il n’était nulle part, tous ces mouvements seraient des mouvements absolus, toutes ces immobilités seraient des immobilités absolues : il faudrait dire adieu à la théorie de la Relativité.

93. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La princesse Mathilde » pp. 389-400

La bonne foi s’y marque comme partout. […] Tous ceux qui eurent l’honneur de la rencontrer dès lors se rappellent l’admiration et l’attrait qui rayonnait partout autour d’elle. […] Elle a fondé un établissement qui porte son nom, destiné aux jeunes filles incurables. — Il faut l’avoir vue, me dit-on, au milieu de cette enfance, partout ailleurs aimable, ici disgraciée, qui n’a que des laideurs et des misères à offrir : elle apparaît et console. — Sa maison est une sorte de ministère des grâces.

94. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Sabbatier voit partout les doctrinaires comme d’autres les jésuites), marchant constamment à son but de brouiller toutes les idées pour dénaturer tous les sentiments nationaux, tous les principes patriotiques, avait travaillé dix ans à faire une renommée colossale à un romancier anglais mille fois inférieur à Richardson, à Fielding, à Goldsmith, mais bien digne de sa tendresse puisque à sa qualité d’étranger il joignait le titre encore plus sacré de pamphlétaire aux ordres de l’aristocratie bretonne pour déchirer la France et tout ce qui faisait sa gloire et sa prospérité. » Ce sont là de ces douceurs judicieuses que le biographe de Victorin Fabre répand comme le lait et le miel sur la tombe de son héros. […] Lycée, Jeux Floraux, Académie, il brillait partout ; il cumulait, comme cet héroïque lutteur, le laurier de Delphes, le chêne de Pergame et le pin de Corinthe ; il aurait volontiers laissé écrire au-dessous de sa statue : « Ceci est la belle image du beau Milon, qui sept fois vainquit à Pise, sans avoir, une seule fois, touché la terre du genou. » Or, le jour où son genou fléchit en effet, le jour où la palme (style du genre) lui échappa et où il fut évincé par un plus heureux, il ne sut plus se consoler, il resta dépaysé longtemps, l’esprit tendu, avec tout un attirail oratoire qui ne sert que dans ces sortes de joûtes, et qui, en se prolongeant, doit nuire au libre développement des forces naturelles. […] Sabbatier, qui ne veut voir partout qu’esprit de coterie et d’envie contre son héros, ne peut concevoir non plus que des critiques, gens d’esprit, tels que MM.

95. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil. — I »

Jugez, par l’application de cette règle, de toutes les parties de notre constitution, et voyez si elles sont dans une dépendance directe de la volonté du peuple… Que tout homme qui combat et qui paie exerce son droit de concourir à l’élection des membres de la législature par un égal et juste suffrage ; soumettez-les, à de courts intervalles, à la réélection ou à la réprobation de leurs commettants : que le magistrat exécutif soit choisi pour le même terme et de la même manière par ceux dont il doit être l’agent. » Or, c’est là que nous tendons évidemment : partout l’élection, partout le contrôle ! […] Une comptabilité compliquée, force emprunts, de gros traitements, de lourds impôts, de perfides poursuites contre la presse sous prétexte de sédition, d’inhospitalières mesures contre les proscrits et les réfugiés de l’Europe, toutes les questions douteuses et indéterminées constamment résolues dans le sens d’un pouvoir central envahisseur ; tels étaient les points essentiels de ce programme monarchique, que l’intérêt populaire trouve partout à combattre, et que la République semblait avoir dérobé par avance à la quasi-légitimité, Voici une lettre de Jefferson, datée de 1796, et qui exprime trop exactement notre propre situation de 1833, pour que nous ne la transcrivions pas en entier : « L’aspect de notre pays est étonnamment changé depuis que vous nous avez quittés.

96. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes et la société au temps d’Auguste » pp. 293-307

À part son diable de goût pour Cléopâtre, qui me paraît un peu païen, pour ne pas dire pis, Blaze de Bury n’est cependant pas — du moins dans ce livre-ci — un de ces paganisants comme il en pousse partout, et même à la Revue des Deux-Mondes ; de ces petits Julien l’Apostat, moins l’Empire, et avec dix-huit cents ans de plus de Christianisme sur la tête, ce qui les forcera, avant de la lever tout à fait, de ramper encore quelque temps ! […] Blaze de Bury est un esprit profondément moderne, et qui reste partout moderne. […] c’est un moderne, qui se jette et tombe dans son sujet avec son armature moderne, — et c’est d’une originalité et d’une sensation surprenantes que cette langue moderne, hardie, familière, pittoresque, cette langue que nous parlons tous dans le plain-pied de notre vie : à souper, entre les portants de deux coulisses, partout ; la langue du monde et non de la littérature, qui touche presque à l’argot et au néologisme, qui ne craint ni le mot plaisant, ni le mot débraillé, ni le mot cru, ni le mot nu, et que voici parlée comme les chroniqueurs de notre temps la parleraient dans un journal de notre temps, et appliquée hardiment aux plus hauts sujets et aux plus majestueuses figures, avec une aisance, un sans-façon et un brio dignes de Fervacques et de Bachaumont dans des chroniques d’hier !

97. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Papesse Jeanne » pp. 325-340

Emmanuel Rhoïdis est de l’armée de ces ennemis de l’Église qui sont partout, sous toutes les formes, et qui se transforment de tout, excepté de leur immuable haine… Il est vrai que, pour son compte, Rhoïdis s’est peu transformé. […] C’est enfin, partout, la volière ouverte, hélas ! […] Il n’y a là partout que la légende seule, la légende, absurde et abjecte, mise à confire, pour la servir aux friands, dans d’exquises malpropretés de détails, par ce pudibond et roséabond Rhoïdis, dont la vertu fait des gorges si chaudes des vices de l’Église romaine et nous en fait aussi de telles peintures… par pudeur !

98. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IV. M. Henri Martin. Histoire de France » pp. 97-110

« et, c’est ainsi, dit l’historien dont la tête fait l’effet d’une table tournante, que la grande âme de la Gaule éclate partout, partout — dans le sanctuaire du chêne, — dans le libre arbitre de Lérins et du Paraclet, dans la souveraine indépendance de l’inspiration de Jeanne d’Arc et… dans le moi de Descartes ». […] Les esprits sains comme les esprits d’élite l’ont bien senti et des Critiques se sont levés de partout autour de ce terrible M. 

99. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « III. Donoso Cortès »

Soit donc qu’il fasse acte d’écrivain à tête reposée ou d’orateur s’exprimant dans un parlement, Donoso Cortès est partout et surtout un formidable logicien, et tellement logicien, qu’il ne craint pas d’être scolastique par la forme, car il a assez d’expression à son service pour ne jamais paraître sec. […] Il est conséquent à ce qu’on trouve partout, à mainte page de ses œuvres : « L’idéal de la vie, dit-il, c’est la vie monastique. […] On s’en souvient : ils avaient, au dix-huitième siècle, mis partout leurs trois dieux, Voltaire, Rousseau et Franklin, qu’ils appelaient le Flambeau de l’humanité dans le style du temps, sérieux et comique, déclamatoire et plat.

100. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Seulement, si elle a touché à cet ouvrage avec une gravité et une considération qui l’honore, elle a été bien payée de sa politesse, car elle a trouvé dans le nouveau livre de M. de Rémusat les idées qui lui sont le plus chères, ce rationalisme contemporain qu’on voit partout maintenant, de quelque côté qu’on se tourne, et qu’il nous faut bien appeler par son nom, puisque, aujourd’hui, nous avons à parler de philosophie. […] l’un comme l’autre, l’esprit qui vivait le plus comme celui qui vivait le moins, ils devaient si bien retenir, en eux, la marque de cette philosophie, que, malgré le temps, la réflexion et la peur inspirée par des doctrines qui ont fini par donner Arnold Ruge à l’Allemagne et Proudhon à la France, on la retrouve partout en eux à cette heure, aussi bien dans le plus puissant devenu le plus prudent, et qui affecte, pour désorienter l’opinion et n’y pas répondre, de sculpter avec un amour comiquement idolâtre le buste d’une femme sur un tombeau, que dans le plus faible resté le plus hardi, — puisqu’il est resté philosophe, — s’efforçant vainement, dans son interprétation de la métaphysique de saint Anselme, d’échapper aux conséquences, maintenant dévoilées, de la philosophie qui les a également asservis ! […] L’Allemagne, curieuse comme si elle n’avait pas d’idées à elle, et personnelle au point de chercher ses idées partout l’Allemagne, depuis longtemps, cherchait l’or que Leibnitz avait dit briller dans le fumier du moyen âge.

101. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Christophe »

Et l’intérêt qu’elle inspire, pour toutes ces raisons, est si grand, que partout où l’on prend cette histoire, partout où l’on coupe une tranche dans ce splendide morceau intellectuel qu’on appelle l’histoire de l’Église, il y a des régals inouïs, je ne dis pas seulement pour la foi, mais pour la pensée. […] Misérable siècle, où l’esprit de contention et d’anarchie était partout, et où les Grecs chicaneurs vinrent donner comme une leçon, dont ils ne profitèrent pas, à ces autres chicaneurs du concile de Bâle, grecs aussi à leur manière contre la Papauté.

102. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Dargaud »

Pascal, l’homme au gouffre en toutes choses, cet épouvanté qui voyait partout l’abîme qu’il croyait à ses pieds ; Pascal, ce lycanthrope du jansénisme, devait haïr une forme de langage qui est dans le sentiment humain à une si grande profondeur. […] On y sent l’erreur de l’esprit sous le talent qu’y déploie une imagination charmante et puissante à la fois, et cette erreur qu’on y sent, qu’on y entrevoit, qui s’y glisse partout et y respire, c’est la grande erreur de notre temps, cette erreur tranquille et souriante, aux yeux purs, au front pur, au cœur presque pur ; par-là d’autant plus dangereuse ! […] Les influences d’une enfance catholique, et qui eût développé l’âme comme le catholicisme sait la développer, auraient donné à ce livre de la Famille une profondeur qu’il n’a pas partout.

103. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Le Sage » pp. 305-321

C’est cette connaissance de l’Espagne par les livres, laquelle ne peut donner que des reflets, qui, dans les siens, nous donna une Espagne énervée et à réverbérations indécises, et non pas cette énergique Espagne, fragment resté d’un Moyen Âge sublime, partout — excepté là — effacé ! […] et il avait promené partout une ironie légère, native de France, et cette observation superficielle qu’il est facile à tout le monde de reconnaître, et qui n’est pas une découverte parce qu’elle s’arrête toujours misérablement à la peau ! […] Seulement, ce ne fut pas uniquement cette nouveauté d’impression offerte à l’esprit français avec toutes les précautions exigées pour ne pas effaroucher cet esprit qui veut se retrouver partout, ce n’est point uniquement cette sensation qui fit le succès instantané du Diable boiteux, et, plus tard, le succès du Gil Blas, plus grand encore… Ce fut aussi, — et ne vous y trompez pas ! 

104. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

Froissart aimait fort le printemps : son cœur volait partout où il y avait roses et violettes : mais l’hiver, il savait aussi s’accommoder de la saison, et, se tenant coi au logis, il lisait espécialement traités et romans d’amour. […] Ainsi, au nom de la bonne dame et à ses frais, et aux frais des hauts seigneurs de mon temps, je visitai la plus grande partie de la chrétienté… ; et partout où je venois, je faisois enquête aux anciens chevaliers et écuyers qui avoient été en faits d’armes et qui proprement en savoient parler, et aussi à quelques hérauts d’armes de confiance pour vérifier et justifier toutes choses. […] Aussi est-il partout presque à la fois, et jamais ne vit-on voyageur plus multiplié, plus infatigable : tantôt à la suite du prince de Galles à Bordeaux, tantôt à Melun, tantôt à Milan, à Bologne, à Rome, tantôt à Auch ou à Orthez, puis en Hollande, et à travers tout cela de temps en temps en Hainaut où il obtient une cure ; mais il n’y eut oncques curé moins sédentaire ni qui fît plus gagner les aubergistes et taverniers en tous lieux où il passait. […] Il est bien vrai qu’il réserve toutes ses sympathies et ses couleurs pour les hautes prouesses et les nobles entreprises d’armes, et ceux qui les font ; il est bien vrai que dans la répression de la Jacquerie, par exemple, et après le tableau des horreurs auxquelles elle s’est livrée, il se réjouit des représailles et de la vengeance qu’en tirent partout les seigneurs, et qu’il nous montre à plaisir les chevaliers qui, en fin de compte, ont raison par le glaive de tous « ces vilains, noirs et petits, et très mal armés ».

105. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

Voilà donc Emma devenue Mme Bovary, installée dans la petite maison de Tostes, dans un intérieur étroit, avec un petit jardin plus long que large, qui donne sur les champs ; elle introduit partout, aussitôt l’ordre, la propreté, un air d’élégance ; son mari, qui ne songe qu’à lui complaire, achète une voiture, un boc d’occasion pour qu’elle puisse se promener, quand elle le voudra, sur la grande route ou aux environs. […] Cette soirée où Emma est reçue avec la politesse qui attend partout une jeune et jolie femme, et où elle respire en entrant ce parfum de vie élégante, aristocratique, qui est sa chimère et pour laquelle elle se croit née, cette soirée où elle danse, où elle valse sans l’avoir appris, où elle devine tout ce qu’il faut, et où elle réussit très convenablement, l’enivre et contribuera à la perdre : elle s’est comme empoisonnée dans le parfum. […] Mais il a affaire à un lecteur français né malin, et qui met de cette malice partout où il le peut. […] Anatomistes et physiologistes, je vous retrouve partout !

106. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

Elles exerçaient partout un tel ascendant, l’une par les inépuisables ressources de son crédit, l’étendue de ses relations commerciales et ses flottes formidables, l’autre par l’autorité de son oligarchie et ses nombreuses armées, qu’on pouvait craindre que, tôt ou tard, elles ne finissent par rallier à leur cause et confédérer contre nous toutes les autres couronnes. […] L’Angleterre n’était point possible à désarmer ; le commerce, qui partout ailleurs aime la paix, avait intérêt chez elle à la guerre. […] Partout, il est vrai, — partout, excepté sur mer, — nous étions vainqueurs ; mais nous étions faibles au sein de notre gloire, parce que nous étions isolés.

107. (1892) Boileau « Chapitre VII. L’influence de Boileau » pp. 182-206

Si l’on trouve partout des marques de l’admiration qu’on accordait à Boileau, il y en a moins de son influence, qui ne fut ni rapide ni surtout illimitée. […] Partout où Boileau paraissait encourager la littérature mondaine, ingénieuse, artificielle et noble, partout où il avait l’air d’avoir peur ou mépris de la nature, et d’encourager l’esprit à la farder, en un mot, dans ses erreurs, ses timidités et ses incorrections, on le suivit, et l’on érigea sa théorie mutilée en loi souveraine de la poésie. […] Subjectif et lyrique par essence, le romantisme est assurément irréductible à l’art classique, objectif, et oratoire, ou dramatique : d’autant que se proposant de le ruiner, il fait son affaire de le contredire, et prend partout le contre-pied des règles, sans autre raison parfois que le besoin de leur donner un démenti.

108. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre premier. La contradiction de l’homme » pp. 1-27

Partout elle agit, non seulement sur notre vie personnelle, mais sur la naissance, le développement, l’expression de nos idées sur le monde et de nos conceptions politiques et sociales. […] Cette irréductible originalité, issue, pour une part au moins, de la diversité des influences qui s’exercèrent sur chacun de nous, des conditions qui ont préparé dans l’infini du temps le germe d’où nous devions sortir et qui ont agi sur son développement, cette originalité se traduit partout et constamment en nous. […] L’originalité varie beaucoup d’un esprit à l’autre, mais elle existe chez tous et partout. […] Et trop souvent aussi, comme partout et comme toujours, ce qui n’est qu’un moyen veut se faire prendre pour une fin.

109. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Les mêmes forces mènent partout l’inventeur et la foule ; et la seule différence entre l’un et l’autre, c’est que l’un proclame tout haut ce que l’autre murmure tout bas. […] Composé d’expressions philosophiques, il semble introduire partout la philosophie. […] Partout on vit se mêler la métaphore et l’abstraction, la poésie et la philosophie, le rêve et la formule. […] Maine de Biran mettait partout des forces spirituelles, et le public souhaitait devoir la matière détruite au profit de l’âme.

110. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la distribution des prix du lycée d’orléans. » pp. 223-229

On sait partout ce qu’il faut entendre par l’esprit des guêpins. […] Si votre esprit semble, à bien des égards, comme une moyenne délicate de l’esprit français, c’est peut-être que votre province est, historiquement, la province centrale par excellence. — Ici, plus aisément que partout ailleurs, on conçoit ce que signifiait déjà la Chanson de Roland quand elle parlait de « France la doulce ».

111. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure »

Les traits y sont semés partout. […] Il sembla véritablement alors qu’une ère nouvelle allait s’ouvrir ; il y avait partout, en ces premiers moments, plus de vivacité dans l’air, et dans les âmes un sentiment de soulagement et d’espérance ; la suite y répondit trop peu. […] Ce qui surprend, c’est que tout y est sage, réglé, plein de mœurs ; on n’y voit ni vivacité ni brillants, et ce n’est partout qu’élégance, correction, tours ingénieux et déclamations simples et grandes, qui sentent le génie d’un homme consommé et nullement le jeune homme. […] Enfin, hors quelques réflexions un peu trop dévotes et quelquefois déplacées, on peut dire ces Mémoires excellents et faisant grand honneur à celle qui les a composés avec une vérité qui brille partout et qui n’est point ordinaire. […] Je ne suis pas exigeant et je ne demanderais que ce qui est partout, ce me semble : au défaut de l’auteur, un correcteur en première.

112. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Est-ce pas ainsi que je parle partout ? […] Partout s’échappe sa franche et personnelle sensibilité, atténuant les saillies de haut style par le laisser-aller du langage domestique et quotidien, relevant la négligence du parler populaire par la chaude sincérité de l’accent, d’une façon tout originale et inimitable. […] Je ne vais pas désirant qu’elle eût à dire la nécessité de boire et de manger… J’accepte de bon cœur et reconnaissant ce que la nature a fait pour moi, et m’en agrée et m’en loue… Nature est un doux guide ; mais non pas plus doux que prudent et juste : je quête partout sa piste… C’est une absolue perfection et comme divine, de savoir jouir loyalement de son être. » Cet optimisme épicurien, très décidé et très affirmatif, n’est pas moins le fond et l’âme des Essais que le scepticisme. […] Par elles, il est arrivé à cette grande vérité, qui, si l’on y regarde bien, est la conclusion de toute son argumentation prétendue sceptique : c’est que l’homme, en haut-de-chausses, en toge, ou dans sa nudité naturelle, assis dans un trône ou courbé sur la terre ingrate, est toujours l’homme, « ondoyant et divers » sans doute, mais identique à lui-même dans cette ondoyante diversité, portant partout dans le cœur les mêmes instincts plantés par la commune mère nature, et les mêmes notions essentielles dans la conscience et la raison. […] En philosophie, en littérature, partout, il pose la souveraineté de la raison, égale en tous les hommes, et qui a charge et pouvoir de reconnaître la vérité.

113. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XI. »

Mais l’ode était partout ; elle éclatait, à chaque nom célèbre couronné dans les jeux guerriers de la Grèce ; elle allait du continent aux îles, de Corinthe à Rhodes, de Syracuse à Lesbos : et, quand elle était tenue haute par le génie du poëte, en tout lieu retentissante, elle excitait sans cesse cette ardeur des âmes, cet amour de la vertu et de la gloire, cet enthousiasme de l’imagination, que deux fois dans l’année seulement, aux fêtes de Bacchus et de Minerve, le théâtre d’Athènes secouait sur la Grèce. […] Il n’y eut que la Grèce pour offrir au génie cette éducation de la gloire assaillant les âmes, et ce spectacle du beau qui partout les environne. […] Aristophane continuait Archiloque sur la scène ; et, bien que la satire animât partout le dialogue, elle jaillissait plus vive dans les Chœurs. […] Ils fuyaient piqués de nos dards aux joues, au front, de sorte que, chez les barbares, partout, et encore aujourd’hui, rien ne passe pour plus guerrier qu’une guêpe de l’Attique. » La verve du poëte l’emporte sur sa fiction même. […] Il oublie un mo ment l’aiguillon de la guêpe, pour montrer partout les barbares blessés, vaincus, fuyant sur terre et sur mer, devant les lances et les trirèmes.

114. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

Au reste, ce regret du passé n’est point rare non plus chez les autres nations — il est partout, chez tous les peuples. […] Et pourtant ils sont partout ; ils se tiennent ensemble, ils sont comme une petite armée ; mais leur drapeau a si souvent changé de couleur qu’on ne distingue plus rien sur ce haillon vendu ; ils se reconnaissent à leur cri de ralliement : Gardons-nous bien ! […] Au contraire, elle s’est faite son commis voyageur, elle a été lui chercher en Italie, en France, en Espagne, en Nubie, en Syrie, au Mexique, aux Indes, en Sicile, partout enfin, des paysages, des monuments, des types, des costumes dont elle a pu tirer parti pour sa propre gloire. […] Elle n’y est plus, car elle est partout. […] En Égypte, en Nubie, en Syrie, en Grèce, en Italie, partout enfin, j’ai vu des ruines, j’ai vu des palais et des temples, mais les rois sont morts et les dieux sont oubliés.

115. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

Partout et toujours la force des choses est la vraie cause des grands événements. […] Il se montre en effet partout philosophe dans ses divers traités plus ou moins historiques, en ce sens qu’il fait constamment tourner son récit à l’enseignement moral. […] Partout on les retrouve en pleine possession d’eux-mêmes, en pleine conscience de leur liberté, en parfaite confiance dans la puissance de leurs facultés et dans l’efficacité de leurs œuvres. […] Dans ces grands États qui se nomment l’Espagne, la France, l’Angleterre, l’Allemagne, la force des choses, résultante de causes très-diverses, mais toutes également fatales, fait sentir toujours et partout son immense et irrésistible impulsion avec une évidence qui a frappé les historiens de notre temps. […] « Fais ce que dois, advienne que pourra. » Sans doute, cela suffit pour décider l’homme qui a une conscience à faire son devoir partout et toujours dans les affaires de la vie publique, comme dans celles de la vie privée ; mais quelle ardeur, quelle passion conservera-t-il dans ce rôle de pure protestation ?

116. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

Elle prit alors le titre de troupe du roi, qu’elle a toujours conservé depuis ; et elle était de toutes les fêtes qui se faisaient partout où était Sa Majesté. […] Au travers de son masque on voit à plein le traître ; Partout il est connu pour tout ce qu’il peut être ; Et ses roulements d’yeux et son ton radouci N’imposent qu’à des gens qui ne sont point d’ici. […] Cependant sa grimace est partout bienvenue ; On l’accueille, on lui rit, partout il s’insinue ; Et s’il est, par la brigue, un rang à disputer, Sur le plus honnête homme on le voit l’emporter. […] Juvénal n’a rien de mieux ; partout où Molière imite, il dépasse. […] Un dévot comme vous, et que partout on nomme…39 TARTUFFE.

117. (1875) Premiers lundis. Tome III «  Chateaubriand »

Il l’aura mis partout, parce qu’il a tout manié, et partout où sera ce charme, cette empreinte, ce caractère, là sera aussi un plaisir dont l’esprit sera satisfait.

118. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Un grand voyageur de commerce »

Outre que la multiplicité mal ordonnée des détails précis produit, au bout du compte, l’ensemble le plus indigeste, la forme est presque partout insupportable d’emphase et de prolixité. […] (Joignez que, si la forêt était partout telle que M. 

119. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1826 »

L’auteur de ce livre a le malheur de ne rien comprendre à tout cela ; il y cherche des choses et n’y voit que des mots ; il lui semble que ce qui est réellement beau et vrai est beau et vrai partout ; que ce qui est dramatique dans un roman sera dramatique sur la scène ; que ce qui est lyrique dans un couplet sera lyrique dans une strophe ; qu’enfin et toujours la seule distinction véritable dans les œuvres de l’esprit est celle du bon et du mauvais. […] Là, des eaux captives ou détournées de leur cours, ne jaillissant que pour croupir ; des dieux pétrifiés ; des arbres transplantés de leur sol natal, arrachés de leur climat, privés même de leur forme, de leurs fruits, et forcés de subir les grotesques caprices de la serpe et du cordeau ; partout enfin l’ordre naturel contrarié, interverti, bouleversé, détruit.

120. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXIII. Des panégyriques en vers, composés par Claudien et par Sidoine Apollinaire. Panégyrique de Théodoric, roi des Goths. »

Il devint conquérant et homme d’état, protégea Byzance, subjugua Rome, la répara et l’embellit après l’avoir conquise, joignit partout les lumières au courage, établit différents tribunaux pour juger les Italiens et les Barbares, et fit en même temps une multitude de lois sages pour réunir les deux nations divisées, à peu près comme le vainqueur de Darius eut le projet de réunir les Grecs et les Perses. […] Déjà on sent partout l’influence des dialectes sauvages du Nord.

121. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Traité partout d’esprit romanesque, honteux du rôle que je jouais, dégoûté de plus en plus des choses et des hommes, je pris le parti de me retirer dans un faubourg pour y vivre totalement ignoré. […] Est-ce ma faute, si je trouve partout des bornes, si ce qui est fini n’a pour moi aucune valeur ? […] Enfin, ne pouvant trouver de remède à cette étrange blessure de mon cœur qui n’était nulle part et qui était partout, je résolus de quitter la vie. […] Partout les salles étaient détendues, et l’araignée filait sa toile dans les couches abandonnées. […] « Je ne sais ce que le ciel me réserve, et s’il a voulu m’avertir que les orages accompagneraient partout mes pas.

122. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Alphonse Daudet »

Journaliste, fou des journaux qui l’ont perdu, en ne le rendant propre à rien qu’à faire des journaux, il les ramasse partout sans y voir, les sent, trouve qu’ils sentent bon, lèche leur encre et maudit sa femme qui ne veut pas les lui lire, — une catin bégueule, — parce qu’elle y trouve des inconvenances. […] Le sujet de son roman, il l’a pris à ses pieds, à son coude, sous sa main, partout, puisque, de partout, nous sommes entourés et pressés de cette vie affreuse de bohèmes, d’impuissants, de déclassés, de filles entretenues, qu’il nous a décrite jusqu’au mal de cœur. […] Les enquêtes se font partout. […] À l’exception de deux têtes très finement dessinées (le duc de Mora meurt à moitié du roman) : l’artiste Félicia, élevée, comme elle le dit, par « ce papillon de danseuse », ce qui explique bien tous les envolements de sa vie, et le docteur Jenkins, un Tartuffe affreusement suave, de cette Philanthropie qui a remplacé les Tartuffes de Religion par les siens, nous connaissons, pour les avoir vus au théâtre, dans les romans, partout, ces Robert Macaire inférieurs qui se meuvent, s’agitent, intriguent et trahissent autour du Nabab, chenilles de sa fortune. […] L’auteur des Rois en exil n’aura pas assurément un succès à la Zola, — le succès du premier venu qui nous parlerait abjectement de quelque fille, l’idolâtrie du temps où le Veau d’Or a été remplacé par des vaches dorées… Mais il aura son succès, néanmoins, pour une triple raison : c’est qu’il est moderne, parisien, et qu’il montre audacieusement et presque cyniquement la Royauté sous la fille encore, la fille partout et toujours !

123. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

Que vit-on alors partout, et quelle fut la physionomie morale de la, France dans les régions officielles ? […] 89 » Partout on exigeait enseigne et montre de ce dont on faisait en effet métier et marchandise. […] L’esprit d’hypocrisie, — qu’on l’imputât à la Congrégation occulte, à la fameuse Société, alors interdite légalement, au parti-prêtre en général, — s’était infiltré partout, dominait tout. […] Quelque chose du même esprit de rénovation soufflait un peu partout dans le jeune Clergé averti : il fit en ces années de grands efforts et des progrès dans des directions différentes et sur des lignes parallèles.

124. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les fondateurs de l’astronomie moderne, par M. Joseph Bertrand de l’académie des sciences. »

Le grand livre du ciel est plus ouvert aujourd’hui que jamais : il l’est jusque dans ses profondeurs ; les télescopes sont partout et vous sollicitent au passage ; on les voit sur les places publiques, sur les ponts, sans même aller les chercher sur les terrasses accessibles et hospitalières de l’Observatoire : le goût du public tourne évidemment à l’astronomie, et je n’en voudrais pour preuve que l’ouvrage de M.  […] Il se montre en tout et partout ennemi de l’ignorance et de l’illusion ; non pas un ennemi à main armée, mais froid, patient, méprisant dans sa douceur et irréconciliable. […] « En effet, dit-il, Dieu intervient partout par ses Messies, ses précurseurs, ses prophètes, ses missionnaires, incarnés ou spirituels, dans les mondes supérieurs aussi bien que dans les intermédiaires et les inférieurs. » M.  […] N’y a-t-il donc pas un milieu, ô homme, entre l’effroi et le vertige de Pascal, et cette expansion, cette chaleur tout humaine, tout intéressée, qui fait qu’on se cherche et qu’on se retrouve partout ?

125. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre I. Le théâtre avant le quinzième siècle »

Le drame était partout dans ces récits : il suffisait de distinguer les personnages et de distribuer les rôles. […] Même de toute façon, pour la conduite de l’action, pour le sens dramatique ou poétique, ce vieux drame est supérieur à la Passion du xve  siècle, comme au mystère du Vieux Testament, partout où on les peut comparer. […] Il lui confie son trésor, et fait publier partout que nid clef ni serrure désormais n’empêchent d’y parvenir : naturellement trois voleurs en profitent pour le dérober. […] et ne fournirent-ils pas, dans une certaine mesure, le modèle, la forme selon laquelle s’organisèrent les éléments partout épars du théâtre profane et comique, au moins la mise en scène, la distribution matérielle du sujet, la méthode de figuration et de représentation ?

126. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

L’unité, il la voyait partout. […] De Maistre est lui-même l’unité qu’il voyait partout, dans tout ce qui doit être grand et fort. […] Partout où règne une autre religion (ajoute-t-il encore), l’esclavage est de droit, et partout où cette religion s’affaiblit, le peuple devient en proportion précise moins susceptible de liberté générale ».

127. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre III. Retour à l’art antique »

Les romantiques qui se cherchaient partout des précurseurs, l’adoptèrent, et l’originalité de Chénier se fondit dans le grand courant romantique. […] Cela a l’air des choses antiques, sans rien d’artificiel : c’est une poésie légère, limpide, plastique, baignée de lumière, aux formes harmonieuses et faciles, qui semblent spontanément écloses, un art sûr et sobre, qui se dérobe partout, et jamais ne défaut. […] Tantôt le sens emporte une longue suite d’alexandrins, tantôt très peu, jamais des nombres égaux, ou liés par des rapports simples et sensibles ; toujours il désarticule le vers, s’arrêtant partout ailleurs qu’à l’hémistiche, sur la troisième, sur la quatrième, sur la neuvième, sur la dixième syllabe, se terminant parfois à l’intérieur du vers.

128. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre I : La science politique au xixe  siècle »

Cet éminent penseur n’était pas sans doute un philosophe, et il avoue lui-même qu’il avait peu de goût pour la métaphysique ; mais il possédait au plus haut degré et pratiquait merveilleusement la méthode philosophique : il avait cet esprit de réflexion et de généralisation qui, partout dans les faits particuliers, cherche et découvre les lois générales. D’ailleurs, s’il goûtait peu la philosophie savante, il portait en lui-même une philosophie naturelle, non systématique, mais toute vivante, et partout présente dans ses écrits, la philosophie de l’âme, de la dignité humaine, de la liberté. […] Enfin, le trait principal de l’école économiste est de proposer partout la substitution du régime, répressif au régime préventif, et de combattre sous toutes ses formes le principe de l’autorisation préalable.

129. (1860) Ceci n’est pas un livre « Décentralisation et décentralisateurs » pp. 77-106

C’est partout un remue-ménage assourdissant ; — on dirait un camp de Philistins, la veille d’une prise d’armes : maint Goliath brandit belliqueusement sa plume et s’essaye à des attitudes menaçantes ; — celui-ci ramasse un argument oublié dans un coin, cet autre fourbit à neuf une vieille phrase qui se rouillait. […] L’esprit de localité est partout. […] Ils vont, — ces risibles martyrs de l’art, — proclamant partout que les dispensateurs suprêmes de la publicité se tiennent sûr des Olympes inaccessibles.

130. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « IX »

On prétend que nous confondons les corrections de mots avec les corrections d’idées, et pour montrer que je n’ai vu partout que des corrections de mots, on se met à voir partout des corrections d’idées. […] Mais, comme presque toutes les pages des trois énormes manuscrits de Bossuet sont noires de ratures, et, remarquons-le bien, quel que soit le sujet, dogmes, descriptions, paraphrases, récits ou prières, il serait cependant un peu fort de prétendre que, constamment et partout, Bossuet a obéi, non à des scrupules d’écrivain, mais à des scrupules de théologien, là même où il n’est pas le moins du monde question de théologie.

131. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

Partout pays, mais principalement en Russie, ce ne sont pas les notoriétés bien établies qui font l’histoire, ce sont les indiscrétions : or, les indiscrétions y sont impossibles. […] L’historiographie n’est qu’une chancellerie de plus à établir sous la main d’un gouvernement qui peut tout et pénètre partout, et surveillerait jusqu’à la chronique de Grégoire de Tours s’il pouvait y avoir un Grégoire de Tours dans les monastères de Moscou. […] C’est le vieux type qui a couru le monde du xixe  siècle, un peu partout, que nous retrouvons dans le roman de Lermontoff, mais ni son bonnet caucasien ni sa redingote à brandebourgs d’or et à fourrures ne nous ont empêché de le reconnaître.

132. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le capitaine d’Arpentigny »

… Mais, s’il perd encore la partie, il faut au moins que la Critique, qui aime le talent partout où il est et qui doit le montrer aux autres, sous peine de n’être qu’une grande sotte à vue basse, il faut que la Critique dise bien haut que la carte était belle et qu’il n’y avait ni obstination, ni infatuation, ni même présomption à la jouer. […] « C’est à ce mouvement qu’on dut en partie la victoire… » Maintenant, qu’il déclame tant qu’il voudra contre la guerre et s’enniaise de philosophie moderne, l’homme qui a écrit cette espèce de strophe, cette phrase presque plastique, ce tableau d’un si rapide mouvement et d’une si héroïque couleur, est, avant de se donner pour un Lavater de la main, un peintre militaire indestructible qui va se trouver partout : — il n’y a qu’un moment dans l’idéal, tout à l’heure dans la réalité. […] Le comte d’Espagne était lui-même un petit homme trapu, crépu, râblé, taillé en garçon boucher, très actif, très cruel, très courtois, qui saluait d’un geste fanfaron chaque éclair des canons de la place, qu’on rencontrait partout tranchant du matamore et du capitan, toujours discourant, pérorant et secouant vivement son petit panache. » Et n’allez pas croire que l’historien qui écrit ainsi n’ait que ces deux manières de peindre !

133. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Monselet »

Il y a partout, et même dans tout ce qu’on ne lit plus, des vers charmants. […] Mais, tel qu’il est, il a son accent, et, comme les deux modèles que nous venons de citer, c’est une critique sociale qui s’enveloppe, pour passer partout, dans le manteau flottant et bariolé de la Fantaisie. […] On dirait qu’il faut qu’il vide partout sa chiffonnière d’anecdotes, lui, le fourrageur de tous les bonheurs du jour du xviiie  siècle !

134. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Léon Gozlan » pp. 213-230

Partout, en effet, quand au lieu d’être journaliste il eût été corsaire, — ce qui, du reste, ne fait pas une si grande différence déjà, — partout, même quand il serait resté marchand d’anchois dans son excellente ville de Marseille, il aurait eu ce génie du mot, qui nous est donné, à pur don, comme tous les autres génies ; cette faculté qui, tout à coup, met une idée sous sa forme la plus concentrée, espèce de cristallisation de l’esprit d’une rapidité foudroyante. […] Ce n’est pas le lion ailé de Saint-Marc, ni le griffon héraldique, mi-parti d’épervier, de certains blasons anglais ; c’est un serpent qui aurait des ailes aussi nuancées que des queues de paon, un serpent semblable à la couleuvre de la Légende, qui a un diamant dans la tête, dans les dents, dans les yeux, partout !

135. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

Elle se soutient partout avec la même vivacité. […] « Présentez-en partout les images naïves. […] « Nous chercherons partout à trouver à redire, « Et ne verrons que nous qui sachent bien écrire. […] Partout de sages Aristes en parallèle avec les fous et les bizarres marquèrent la juste borne de la satire permise à la raison. […] « Cependant sa grimace est partout bien venue, « On l’accueille, on lui rit, partout il s’insinue ; « Et s’il est par la brigue un rang à disputer, « Sur le plus honnête homme on le voit l’emporter.

136. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XI » pp. 39-46

L'un des traits les plus singuliers et les plus réguliers de la société de Paris, c’est que tous les quinze jours environ on a un sujet, un lieu commun de conversation nouveau, grand ou petit, comète ou révolution, tremblement de terre ou vente de charité, ou question d’Orient, ou Colomba, ou Lucrèce : on cause partout de la même chose, l’invention est rare, même pour les sujets de conversation ; chaque personne qui entre remet sur le tapis l’éternel dada. […] La mode se fourre partout et gâte tout.

137. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Une âme en péril »

Ni la prière, ni la lecture des Livres saints, ni la joie austère d’instruire les enfants et d’évangéliser les humbles, ni les rencontres et les agapes cordiales avec les confrères, ni la nature qui est belle partout, même en pays plat, ni les plaisirs du jardinage, ni les promenades dans les champs, le bréviaire à la main, ni la fraîcheur des matins, ni la douceur des soleils couchants sur la lande, ne suffisaient à remplir cette âme inquiète. […] Mais lui, le malheureux, tient absolument à être « auteur » et à l’avoir toujours été : « J’aurais écrit partout, reprend-il fièrement, et mieux à la ville que dans un fond de campagne.

138. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — Deuxième tableau » pp. 196-209

je vous reconnais, vous êtes tous des arrière-petits-fils… Ils viennent, ils m’enveloppent… je les vois… partout, partout.

139. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

un méchant cadavre dont l’âme est partout où sont mes filles. […] Leur voix me répond partout. […] Je ne peux pas vous expliquer ça : c’est des mouvements intérieurs qui répandent l’aise partout. […] Il est tout entier partout, puisque la création est sortie de lui. […] Madame de Mortsauf est une femme qui pourrait occuper partout la première place.

140. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

Au dernier degré comme à la cime de l’être, partout Dieu se rencontre, car partout il y a de la vérité. […] Sa justice et sa bonté sont partout, et dans nous et hors de nous. […] La morale s’étend partout où se trouve en un degré quelconque l’idée du bien. […] Qu’appelle-t-on partout un honnête homme ? […] La preuve en est que partout la société subsiste, et même qu’elle se développe.

141. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

On y voit déjà tous ces Amours et ces Zéphyrs qui seront partout chez Bernis, et qui ont fait dire à d’Alembert que « si on leur coupait les ailes, on lui couperait les vivres ». […] … C’est toujours et partout le même refrain. […] En ce qui était des vers en particulier, comme on venait de représenter pour la première fois La Métromanie (1738), Bernis donnait cours à ses réflexions : « Il est difficile d’être jeune et de vivre à Paris sans avoir envie de faire des vers. » Et de ce qu’on en fait avec plus ou moins de talent, il ne s’ensuit pas que ce talent entraîne avec lui toutes les extravagances qui rendent certains versificateurs si ridicules : Heureux, s’écriait-il avec sentiment et justesse, heureux ceux qui reçurent un talent qui les suit partout, qui, dans la solitude et le silence, fait reparaître à leurs yeux tout ce que l’absence leur avait fait perdre ; qui prête un corps et des couleurs à tout ce qui respire, qui donne au monde des habitants que le vulgaire ignore ! […] Cette fine remarque de Bernis sur le vernis d’esprit philosophique qui était alors partout, s’appliquerait aujourd’hui à bien d’autres vernis également répandus, vernis de talent, vernis d’esprit, vernis de jugement.

142. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Les hommes, selon lui, ne font le bien que quand ils ne peuvent faire autrement : « Mais, dès qu’ils ont le choix et la liberté de commettre le mal avec impunité, ils ne manquent jamais de porter partout la confusion et le désordre. » Machiavel est très persuadé que les hommes ont beau avoir l’air de changer pendant des jurées de régime, qu’au fond ils ne changent pas, et que, certaines occasions se reproduisant, on les retrouve absolument les mêmes. […] Dans les années qui précédèrent, et quand il n’était pas à son château de La Brède, il vivait à Paris, fort répandu dans le grand monde, particulièrement dans le cercle de la duchesse d’Aiguillon, de Mme Du Deffand, et fort désiré partout, fort souhaité ; simple, bonhomme même, payant de sa personne sans chercher à briller. […]  » Partout, à ces beaux endroits si souvent cités, on sent l’homme qui désire la liberté véritable, la véritable vertu du citoyen, toutes choses dont il n’avait vu nulle part l’image parfaite chez les modernes, et dont il achevait de se former l’idée dans l’étude du cabinet et devant les bustes des anciens. […] Vous pensez que vous n’humiliez personne, et vous humiliez tout le monde ; et, quand je vous compare dans mon idée avec ces hommes absolus que je vois partout, je les précipite de leur tribunal, et je les mets à vos pieds.

143. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XIX » pp. 76-83

Cousin, qui organise son école et qui va pêchant partout des cartésiens, s’est mis à faire valoir le Père André. […] Sue partout où il vous conduit : c’est pour le bon motif ; la fin justifie le lieu.

144. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — II »

Épouse du libertin Scarron, gouvernante des bâtards de Louis XIV, femme non avouée d’un roi qui n’avait pas toujours été scrupuleux, elle est partout la même, fidèle à la bienséance dans les moindres choses, et sauvant par une habileté de menus détails l’équivoque de sa position. […] J’ai vu mourir le roi comme un saint et comme un héros ; j’ai quitté le monde que je n’aimais pas ; je suis dans la plus aimable retraite que je puisse désirer ; et partout, madame, je serai toute la vie, avec le respect et l’attachement que je vous dois, votre très humble et très obéissante servante. » Nous ne pousserons pas plus loin ces citations, qui suffisent, ce nous semble, pour définir le caractère de madame de Maintenon.

145. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Montmaur, avec tout le Parnasse Latin & François. » pp. 172-183

Un mauvais cœur, un esprit caustique, une mémoire chargée d’anecdotes scandaleuses contre les auteurs morts & vivans ; ses épigrammes & sa réputation d’homme à bons mots ; son avarice sordide, quoiqu’il eut amassé, par toutes sortes de voies, des biens considérables ; sa fureur de primer partout ; sa profession de parasite : voilà ce qui le rendit l’objet de la haine, ou le sujet des plaisanteries des auteurs. […] Tous ses compagnons de cuisine, Et ceux qui craignent la famine, S’opposent à sa liberté ; Criant partout que sa présence Sans doute affamera la France, Et qu’elle a causé la cherté.

146. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XV. De Tacite. D’un éloge qu’il prononça étant consul ; de son éloge historique d’Agricola. »

J’ai parlé de son éloquence, elle est connue ; en général ce n’est pas une éloquence de mots et d’harmonie, c’est une éloquence d’idées qui se succèdent et se heurtent ; il semble partout que la pensée se resserre pour occuper moins d’espace ; on ne la prévient jamais, on ne fait que la suivre ; souvent elle ne se déploie pas tout entière, et elle ne se montre, pour ainsi dire, qu’en se cachant. […] « En attendant, dit-il, je consacre ce livre en l’honneur d’Agricola mon beau-père ; et dans ce projet ma tendresse pour lui me servira ou d’excuse, ou d’éloge45. » Alors il parcourt les différentes époques de la vie de son héros, peignant partout comme il sait peindre, et montrant un grand homme à la cour d’un tyran, coupable par ses services même, forcé de remercier son maître de ses injustices, et obligé d’employer plus d’art pour faire oublier sa gloire, qu’il n’en avait fallu pour conquérir des provinces et vaincre des armées.

147. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Bernardin de Saint-Pierre »

Et surtout l’idée religieuse et austère, que fomentait le jansénisme, allait à ne voir partout au dehors qu’occasion d’exercice et de mortification pour l’âme, et à obscurcir, à fausser, pour ainsi dire, le spectacle naturel dans les plus engageantes solitudes. […] Partout, dans ses voyages, son but secret et cher était de trouver, d’obtenir un coin de terre et quelques paysans pour fonder son règne heureux ; comme Colomb, qui mendiait de cour en cour de quoi découvrir son monde, Saint-Pierre allait mendiant de quoi réaliser son Arcadie et son Atlantide. […] Toujours et partout suavité et charme ; toujours le contraire de la crudité et de la discordance59. […] Tant de notions amassées de partout sur les plantes, sur les climats, tant de maximes morales sur la société et sur l’homme, ce mélange de vérités, d’hypothèses et de chimères, venant à se rencontrer sous des inclinaisons favorables vers l’horizon attiédi, peignirent divinement le nuage et firent tout d’abord arc-en-ciel. […] » — Toujours et partout la vieille histoire de Saturne et de Jupiter ; toujours les générations d’autant plus inexorables qu’elles se touchent davantage, et empressées de se nier l’une l’autre quand elles ne peuvent se dévorer !

148. (1914) Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne pp. 13-101

Et. partout, c’est le même. […] Au fond c’est partout le même débat. […] Il y a des intellectuels partout et il y a des intellectuels de tout. […] Je vois partout dans Bergson le souci de la considération du réel pur. […] Partout elle est le plus profond de sa race et de son génie.

149. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

Que devient notre volonté sous l’action d’un Dieu qui fait sentir partout sa puissance ? […] La spéculation panthéiste atteint les phénomènes de conscience non-seulement dans leurs caractères essentiels, mais encore dans leur racine elle-même, en absorbant partout l’être individuel dans l’Être universel. […] Partout la loi de finalité domine et dirige les forces de toute espèce soumises à la loi de causalité. […] Partout et toujours la vraie divinité, nous disons celle qui répond au sentiment religieux, est sortie du sanctuaire de la conscience humaine, plus ou moins pure, noble, adorable, selon les progrès de cette conscience. […] On a vu ce que serait l’histoire privée des révélations de conscience, le règne de la fatalité, l’école du succès partout et toujours glorifié.

150. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre II. La critique »

Mais on ne voit pas que Sainte-Beuve ait constitué ces familles d’esprits : il a poursuivi partout l’individualité, en ce qu’elle a de plus distinct. […] « Il n’y a ici comme partout qu’un problème de mécanique : l’effet total est un composé déterminé tout entier par la grandeur et la direction des forces qui le produisent866. » Ainsi, la littérature anglaise est le produit de la race anglaise, sous tel climat, dans telles circonstances historiques, telles croyances religieuses : Shakespeare, Milton, Tennyson, sont des « résultantes », qui représentent diverses forces appliquées en divers points. […] Il a pour objet les caractères essentiels, dominateurs ; il les dégage, suppléant à la nature partout où elle les fait insuffisamment saillir.

151. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Journal de la campagne de Russie en 1812, par M. de Fezensac, lieutenant général. (1849.) » pp. 260-274

Davout, qui commandait d’abord à l’arrière-garde, était chargé de mettre le feu partout, « et jamais ordre ne fut exécuté avec plus d’exactitude et même de scrupule ». […] De Viazma à Smolensk on disputa le terrain pied à pied, et partout où l’on put, à Dorogobouj, à Sloboda Pnevo, à tous les ponts du Dniepr. […] À Smolensk, on croyait du moins trouver un peu de repos et du pain ; mais la désorganisation et le pillage étaient partout.

152. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre IV. Critique »

La double action est là partout. […] Le songe est là partout. […] Il y a là au premier plan, partout, en plein soleil, dans la fanfare, les hommes puissants suivis des hommes dorés.

153. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre III. Le lien des caractères généraux ou la raison explicative des choses » pp. 387-464

Selon que l’on considère telle ou telle branche, on trouve que l’opération, partout semblable, a été poussée plus ou moins loin ; la science expérimentale tout entière ressemble ainsi à une cathédrale commencée à la fois sur plusieurs points. […] Partout où l’on peut ainsi isoler et observer les éléments d’un composé, on peut, par les propriétés des éléments, expliquer les propriétés du composé, et, de quelques lois générales, déduire une foule de lois particulières. […] Car un pareil contraste donnerait à croire que les lacunes de la science expérimentale ont non seulement pour cause suffisante, mais encore pour cause unique les conditions auxquelles elle est assujettie ; d’où il suivrait que, délivrée de ces conditions, elle comblerait par cela même toutes ces lacunes, et que la raison explicative, étant partout découverte, existerait partout […] De là suit cette conséquence capitale, que partout et toujours, hors de notre histoire et de notre monde, comme dans notre histoire et dans notre monde, les théorèmes peuvent s’appliquer. […] Par cela seul que le groupe est donné, toujours, partout, infailliblement le caractère est donné aussi ; en d’autres termes, la présence du groupe entraîne la présence du caractère.

154. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIIe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin » pp. 225-319

Les fumiers des chevaux, des vaches et des moutons, entassés immémorialement aux portes, tapissaient les murailles de ces bâtiments, et servaient partout de clôture. […] On en trouve partout quand on y sait voir. Dieu répandit partout la grâce et la beauté. […] « C’est qu’il faut quelque chose d’agréable aujourd’hui que partout on s’amuse, et nous voulions faire notre mardi gras au soleil en plein air, en promenades. […] « Il me faut partout des tables et du papier, parce que partout mes pensées me suivent et se veulent répandre en un endroit, pour toi, mon ami.

155. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre V. Jean-Jacques Rousseau »

L’Émile était partout poursuivi, partout condamné, à Berne, en Hollande, à Genève même, dans cette patrie qui avait tant fêté son glorieux enfant quelques années plus tôt (1754), où il avait repris sa qualité de citoyen avec la religion de ses pères. […] Les fruitières lui vendent leurs légumes au rabais pour l’humilier d’une aumône ; les carrosses se détournent pour l’écraser, ou l’éclabousser ; on lui vend de l’encre toute blanche, pour qu’il n’écrive pas à sa justification : partout il est espionné, surveillé, même au théâtre. […] Suivant de mon mieux le fil de ses méditations, j’y vis partout le développement de son grand principe, que la nature a fait l’homme heureux et bon, mais que la société le déprave et le rend misérable. […] Ne voit-on pas partout les arts et les lettres en relation étroite avec le luxe, avoir besoin du luxe ? […] Il nous prend par toutes nos facultés : en politique, en morale, dans la poésie, dans le roman, on le trouve partout, à l’entrée de toutes les avenues du temps présent.

156. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

le siècle marche, les voies publiques s’étendent, les rues s’élargissent, le grand chemin est partout. […] , non, jamais je ne pourrai arracher de mon cœur le désastre de la patrie ; partout elle me suivra, je reverrai son image abattue et désolée. […] Et il définit cette vertu idéale à laquelle il faut tendre ; il n’ose se croire digne encore de l’atteindre, mais du moins il la recherche, il la poursuit, et partout où il lui est donné de la contempler, il l’aime et l’admire. […] Heureux qui, dès sa jeunesse, trouve dans un compagnon et dans un ami une seconde et quelquefois une première conscience, un témoin perpétuel qui l’encourage, qui l’enhardit, qui le maintient, et que partout ensuite, absent ou présent, il s’habitue à respecter !

157. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

Il s’y montre lui-même par contrecoup mieux que partout ailleurs, et il plaide indirectement pour ses propres qualités et un peu aussi pour ses défauts ; continuant donc son monologue et ce parallèle secret entre son frère et lui : Qui prendra, dit-il, pour des affaires sérieuses son choix à la figure, aux airs importants, au discours spirituel, et au bon air dans la dépense et dans le maintien, fera toujours une mauvaise affaire ; ce n’est là que la superficie, et même la perfection de cette superficie a dû nécessairement prendre sur le fond, et être faite à ses dépens. […] Ce ne sont partout à ses yeux qu’iniquités heureuses et triomphes apparents de l’injuste sur l’innocent. […] Certes les sens appâtent la beauté ; la débauche, ce faux amour, règne plus que jamais ; ce ne sont que liaisons apparentes ; mais je ne vois plus, surtout dans notre jeunesse, qu’on fasse usage de son cœur ; nuls amis, peu d’amants ; dureté de cœur, ou simulation partout… Où cela va-t-il ? […] Il n’y aura bientôt plus en France ni de beaux parleurs ni d’auteurs comiques ou tragiques, ni musique, ni livres, ni palais bâtis, mais des critiques de tout et partout.

158. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Ce qui est à remarquer, c’est qu’aucun succès ne l’endormit et qu’il resta en tout et partout travailleur et producteur aussi actif, aussi infatigable que le premier jour, possédé de l’amour et, comme il disait, de la rage de peindre. […] En vérité, quand on y pense, la critique est bien difficile : chercher partout ce qui n’y est pas, au lieu de voir ce qui doit vôtre ! […] Elles doivent figurer parmi les héros, car il y en a dans toutes les classes de l’armée plus que partout ailleurs, et j’ai le bonheur de n’avoir que des faces bien caractérisées. » Il fait d’avance sa provision de têtes et de figures martiales : tout chez lui sera d’après nature, les sites, on va le voir, et les figures aussi. […] Il y règne le plus beau désordre : on y voit pêle-mêle des fusils, un cor de chasse, un singe, des palettes, deux ou trois lièvres tués à la chasse et quelques lapins morts ; partout sont accrochés aux murs des tableaux achevés ou à moitié faits.

159. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. »

Aussi n’est-ce pas l’affaire de tous les hommes ; mais c’est un malheur pour les gens à talent et à génie de ne pouvoir persuader la vérité aux ministres, aux généraux, aux princes même ; car partout on suit la routine, et c’est un défaut pour un homme de passer pour un inventeur, qu’il faut qu’un particulier cache avec soin s’il est sage, parce que l’on s’aliène les esprits ; et il n’est permis qu’à un souverain d’être créateur d’un nouveau système. » Et c’est bien là une des raisons pour lesquelles il aurait tant aimé à être un souverain. […] Les jeunes et les vieilles y accourent de partout, dans des vues différentes pourtant ; et comme les hommes suivent ce bétail-là, il s’y fait un mouvement qui réjouit le spectateur bénévole. » Il aurait bien dû écrire ce bout de lettre en allemand. « Ce bétail-là !  […] Fritsch à son départ… Le Cardinal a envie de parler, et il s’accroche partout. […] Tepin a vu sa découverte partout accueillie, tant il y a complaisance, mollesse, absence de critique chez des esprits même qui passent pour sérieux.

160. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Rivarol. » pp. 62-84

Il s’étalait d’abord et partout dans toute la splendeur et l’insolence de son esprit. […] Et ceci encore : Que l’histoire vous rappelle que partout où il y a mélange de religion et de barbarie, c’est toujours la religion qui triomphe ; mais que partout où il y a mélange de barbarie et de philosophie, c’est la barbarie qui l’emporte… En un mot, la philosophie divise les hommes par les opinions, la religion les unit dans les mêmes principes ; il y a donc un contrat éternel entre la politique et la religion. […] Ses bons mots, ses saillies sont partout.

161. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre premier. Existence de la volonté »

Le point de vue de la passivité est donc partout incomplet. […] Ou la volonté n’est nulle part, ou elle est partout en nous ; nous sommes partout en action et en mouvement : c’est là la vie, et la volonté ne cesse qu’avec la vie. […] « Il doit, répond-il, être partout l’apanage des centres sensoriels et de leurs annexes, concourant à l’exercice de nos processus intellectuels. » Fort bien ; mais, selon nous, cet « apanage » tient à ce que les centres sensoriels sont eux-mêmes indivisiblement appétitifs et moteurs.

162. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

Du reste, des statues partout : des statues en veux-tu en voilà ; statue pour Charles, statue pour Édouard, statue pour Guillaume, statues pour trois ou quatre Georges, dont un idiot. […] Partout, dans toutes les rues, sur toutes les places, à chaque pas, de gigantesques points d’admiration sous forme de colonnes : colonne au duc d’York, qui devrait, celle-là, être faite en points d’interrogation ; colonne à Nelson, montrée du doigt par le spectre de Caracciolo ; colonne à Wellington déjà nommé ; colonnes pour tout le monde ; il suffit d’avoir un peu traîné un sabre. […] À l’heure qu’il est, on ne jouerait Shakespeare sur aucun théâtre anglais sans effacer dans le texte le mot Dieu partout où il se trouve. […]                                   « Le Directeur de la scène,                                            « Albertin. » Et plus bas, à l’encre rouge : « Vu à la charge de retrancher le nom de Jésus partout où il se trouve, et de se conformer « aux changements indiqués aux pages 27, 28, 29, 62, 74 et 76.

163. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre II. Réalité des idées égalitaires »

Et sans doute ces tendances humanitaires, comme les tendances individualistes, sont encore loin de passer toujours et partout à l’acte. […] En nous présentant l’égalitarisme comme préhistorique, elle nous permet de penser qu’il est essentiellement naturel à l’homme, — d’attribuer à notre idéal une sorte de réalité vague à souhait, — de donner un air scientifique à nos préférences, — et enfin de satisfaire à ce vœu de symétrie qui nous pousse à voir partout, tant dans le champ du droit que dans celui de l’économie politique, des reviviscences, des ricorsi, des rééditions de l’histoire. […] Il ne s’est pas trouvé partout d’individu tout-puissant ou de race conquérante, pour réduire la masse du peuple à un état légalement inférieur. […] * ** En résumé, l’idée de l’égalité des hommes, telle que nous l’avions définie, ne nous a pas semblé se manifester partout : suivant sa trace à travers les doctrines et les institutions, nous l’avons rencontrée, non pas à l’origine des sociétés, là où n’existe à vrai dire aucune civilisation, mais seulement à l’intérieur de cette civilisation qu’on appelle occidentale.

164. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVIII. Des obstacles qui avaient retardé l’éloquence parmi nous ; de sa renaissance, de sa marche et de ses progrès. »

Celle de Montaigne, par les tours, par les formes, par l’assemblage des mots et le caractère des images, a presque partout la physionomie des langues anciennes. […] Les uns, entraînés par le cours des affaires, prennent part au destin des nations ; ils négocient, ils combattent, ils ont de ces grandes pensées qui changent, bouleversent ou affermissent le sort des peuples ; les autres observent et suivent ces mouvements ; ils contemplent les succès et les malheurs, le génie qui se mêle avec les fautes, le hasard qui domine impérieusement le génie, et les passions humaines qui, partout terribles et actives, entraînent la marche des États. […] Il n’est donc pas étonnant que partout la poésie soit née avant l’éloquence : mais on peut dire qu’en la précédant, elle l’a fait naître. […] On vit la France quarante ans aux prises avec l’Europe ; on vit des provinces conquises, tous les rois humiliés, ou protégés, ou vaincus, une foule de grands hommes, les arts et les plaisirs au milieu des batailles, partout un caractère imposant, et cet éclat de renommée, qui subjugue autant que la force, qui annonce la puissance, la fait et la multiplie : alors les esprits et les âmes se montèrent au niveau du gouvernement ; chacun fut jaloux de soutenir la dignité de sa nation.

165. (1914) Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne pp. 59-331

La saluant partout où elle est. […] Elle est chargée d’introduire partout des organismes comme l’habitude introduit partout des mécanismes. […] Partout elle a retrouvé le présent. […] Il y est partout. […] Mais il n’y en a pas partout.

166. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Harmonies poétiques et religieuses — I »

L’amour n’y est plus que comme un souvenir délicieux, comme une apparition matinale et céleste, qui s’est retirée dans le lointain, après avoir initié l’âme du poète à de plus sublimes mystères ; l’hymne a presque partout remplacé l’élégie. […] Flottez sur l’aile des nuages, Mêlez-vous aux vents, aux orages, Au tonnerre, au fracas des flots ; L’homme en vain ferme sa paupière, L’hymne éternel de la prière Trouvera partout des échos !

167. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Feuilles d’automne » (1831) »

Au dehors, çà et là, sur la face de l’Europe, des peuples tout entiers qu’on assassine, qu’on déporte en masse ou qu’on met aux fers, l’Irlande dont on fait un cimetière, l’Italie dont on fait un bagne, la Sibérie qu’on peuple avec la Pologne ; partout d’ailleurs, dans les états même les plus paisibles, quelque chose de vermoulu qui se disloque, et, pour les oreilles attentives, le bruit sourd que font les révolutions, encore enfouies dans la sape, en poussant sous tous les royaumes de l’Europe leurs galeries souterraines, ramifications de la grande révolution centrale dont le cratère est Paris. […] Ce n’est partout, sur le sol de la vieille Europe, que guerres religieuses, guerres civiles, guerres pour un dogme, guerres pour un sacrement, guerres pour une idée, de peuple à peuple, de roi à roi, d’homme à homme, que cliquetis d’épées toujours tirées et de docteurs toujours irrités, que commotions politiques, que chutes et écroulements des choses anciennes, que bruyant et sonore avènement des nouveautés ; en même temps, ce n’est dans l’art que chefs-d’œuvre.

168. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Greuze » pp. 234-241

Sa peine n’est pas seulement sur son visage ; elle est dans ses jambes, elle est partout. […] Médite-t-il un sujet, il en est obsédé, suivi partout.

169. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Docteur Véron »

Est-ce qu’à la brochure qu’il publie on ne reconnaît pas cette main familière qu’il met partout, — et ne voilà-t-il pas qu’il la met sur nos institutions ? […] Je n’hésiterai donc pas à mettre en relief, etc., etc. » C’est lui, en effet, qui s’y met partout, avec une inaltérable sérénité.

170. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Charles Monselet »

Ce recueil de vers, fait par un artiste toujours inspiré, n’a pas cependant partout la même valeur poétique, et, je vous en préviens, ce n’est pas de celui qui joue avec son talent et son style et qui, par exemple, a écrit ces fameux : Sonnets gastronomiques, — lesquels ne sont, par parenthèse, que de brillantes et charmantes difficultés vaincues — ce n’est pas de cet artiste que je veux vous parler. […] Elle est ici, et, je l’ai dit, non pas partout, mais à beaucoup de places, cette note triste qui s’en vient du fond de la gaieté comme un soupir impossible à étouffer.

171. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

. — La charge retombe partout sur les plus pauvres. […] Leurs octrois accrus en 1748 devaient fournir en onze ans les 606 000 livres convenues ; mais, les onze ans écoulés, le fisc soldé a maintenu ses exigences, si bien qu’en 1774 elles ont déjà versé 2 071 052 livres et que l’octroi provisoire dure toujours  Or cet octroi exorbitant pèse partout sur les choses les plus indispensables à la vie, et de cette façon l’artisan est plus chargé que le bourgeois. […] Partout, contre les octrois, les barrières et les commis, la haine populaire est profonde. Partout l’oligarchie bourgeoise songe à elle-même avant de songer à ses administrés. […] À moi seul, pauvre homme, je paye deux gouvernements : l’un ancien, local, qui aujourd’hui est absent, inutile, incommode, humiliant, et n’agit plus que par ses gênes, ses passe-droits et ses taxes ; l’autre, récent, central, partout présent, qui, se chargeant seul de tous les services, a des besoins immenses et retombe sur mes maigres épaules de tout son énorme poids. » — Telles sont, en paroles précises, les idées vagues qui commencent à fermenter dans les têtes populaires, et on les retrouve à chaque page dans les cahiers des États généraux.

172. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

Vous êtes Italiens, sans doute, mais vous êtes Italiens comme les Hellènes étaient Grecs, Grecs dans la communauté de famille générique et dans la vaste autonomie du Péloponnèse, des îles et de l’Ionie, mais, en réalité, Lacédémoniens, Athéniens, Thébains, Corinthiens, Samiens, branches distinctes, toujours séparées, quelquefois hostiles de cette grande et héroïque famille grecque contenue à peine entre les montagnes du Péloponnèse, les archipels et les rivages de l’Asie Mineure ; branches ayant chacune son territoire, ses flottes, ses formes de gouvernement diverses, aristocratique ici, populaire là, militaire dans les montagnes, navale dans les ports, monarchique en Asie, théocratique à Éphèse, républicaine en Europe, rivale en temps de paix, confédérée en temps de guerre, indépendante pour le gouvernement intérieur, amphictyonique pour la défense commune, forme élastique qui s’étend ou se resserre selon les besoins de la race hellénique, et qui, en faisant l’émulation au dedans, la sûreté au dehors, le mouvement et le bruit partout, fit de la Grèce en son temps l’âme, la force, la lumière et la gloire de l’humanité ! […] Ressuscitez donc alors ce peuple féroce, nourri par la louve dans les cavernes du Latium, suçant plus tard, au lieu de lait, le sang du genre humain, ne pouvant grandir qu’en dévorant tour à tour tous les peuples libres pour aliments de sa faim insatiable de domination ; souveraineté du brigandage, de l’iniquité, de la force, de la guerre, sur l’espèce humaine, et qui avait posé ainsi la question de sa grandeur exclusive en face des dieux et des hommes : « Que Rome périsse, ou que l’homme soit esclave partout ! […] L’habitude du régime républicain y avait tellement passé dans les mœurs, qu’après les empereurs auteurs de la servitude et de la décadence, l’Italie renaquit partout de ses cendres sous la forme républicaine : république en Sicile, en Calabre, en Campanie, à Naples, république à Rome sous la domination des papes, république à Sienne, république à Lucques, république à Pise, république à Florence, république à Gênes, république à Venise, républiques presque partout. […] Si l’on en doute, qu’on relise Machiavel, comme je viens de le relire : on retrouvera partout en lui cette pensée de l’inviolabilité des groupes nationaux qui composent l’Italie, et de l’équilibre entre ces nationalités reliées par le lien fédératif ; c’est l’homme de la ligue italique.

173. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (3e partie) » pp. 365-427

N’est-ce pas le mot de Laplace ou d’Arago : « Je n’ai rencontré Dieu nulle part, et cette hypothèse ne m’a été nulle part nécessaire. » Illustres éblouis qui ne le rencontrez nulle part que parce qu’il est partout ! […] Le premier objet de cette pensée, partout, chez tous les peuples plus ou moins policés, c’est l’auteur du monde. […] Ils sont partout enchaînés et reliés dans tous les sens par les tiges ligneuses et tortueuses des parasites. […] Pour être nombreux à certains endroits, il s’en faut bien qu’ils soient nombreux partout, et encore appartiennent-ils la plupart du temps à des espèces sans venin. […] L’abeille forestière (genre mélipone et genre euglosse) est presque partout réduite à tirer sa nourriture de la sève sucrée que distillent les arbres ou des excréments que les oiseaux déposent sur les feuilles. » Lamartine.

174. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

C’est du Pixerécourt, mais toujours écrit par le génie du grand écrivain qui, comme sa lanterne sourde, le suit partout. […] Puis elle ouvrit la fenêtre et promena ses yeux partout autour d’elle, espérant découvrir quelque peu de la rue, un angle de maison, un coin de pavé, et pouvoir guetter là Marius. […] « Il y avait en ce moment-là même dans le jardin du Luxembourg, — car le regard du drame doit être présent partout, — deux enfants qui se tenaient par la main. […] Ce n’est ni vous, ni moi, ni Victor Hugo lui-même ; car, il faut être juste, il est presque partout, dans ce livre, spiritualiste comme le génie, cette transcendance de l’esprit. […] Il ne sait pas dire à la société humaine d’assez rudes vérités ; il lui masque la face impassible de la force des choses ; il la soulève contre le fait accompli ; il la flatte plus qu’il ne l’éclaire ; il donne tort partout à la société contre la misère, contre la nécessité, contre le crime ; il lui reproche ses impuissances.

175. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

Duclos avait un caractère, ou du moins une nature primitive très caractérisée, une manière d’être à lui, qu’il imposa partout où il fut. […] À l’Académie, dans les séances ordinaires, Duclos faisait un peu comme partout, il tempêtait au besoin et ne se refusait pas ses jurons d’habitude. […] Partout où il va, il est accueilli à merveille ; il retrouve de ses connaissances du grand monde de Paris et, jusque dans les Italiens de distinction, des compatriotes.

176. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

Gœthe répondait : « Les extrêmes et les déviations dont je parlais disparaissent peu à peu, et il ne reste que l’avantage d’avoir conquis et une forme plus libre et un fonds plus riche et plus varié ; on n’excluera plus les sujets comme anti-poétiques, on pourra les prendre partout dans le monde et dans la vie. […] L’entretien s’animant à ce sujet, et continuant de parler de cette sorte de chanson et de son influence électrique sur les nations à certaines heures, Gœthe disait qu’il fallait pour cela qu’une nation n’eût qu’une tête et qu’un cœur et, à un moment donné, qu’une seule voix : « Mais, ajoutait-il, une poésie politique n’est aussi que l’œuvre d’une certaine situation momentanée qui passe et qui ôte à la poésie la valeur même qu’elle lui a donnée. » Il reconnaissait qu’il y avait seize ans, même dans cette Allemagne si divisée, mais unie alors dans un sentiment commun contre l’étranger, un poëte politique aurait pu exercer aussi son influence sur le pays tout entier, et il ajoutait : « Mais ce poëte était inutile : le mal universel et le sentiment général de honte avaient, comme un démon, saisi la nation ; le feu de l’inspiration qui aurait pu enflammer le poëte brûlait déjà partout de lui-même. […] Il était partout à l’étroit ; il jouissait de la liberté personnelle la plus illimitée, et il se sentait oppressé ; le monde lui était une prison.

177. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

Bossuet, dans la suite du peuple juif, voit partout le Messie prédit, annoncé, et ne cesse d’y tendre. […] Partout, dès qu’il s’agissait des dieux, l’erreur prévalait, et, dans les divers cultes, des horreurs d’infamie et d’impureté se joignaient aux crimes. […] Ainsi ce Mithridate qui fournit matière à un si beau chapitre chez Montesquieu, n’est pas même nommé chez Bossuet. — A propos du Droit romain, des lois romaines qui ont paru si sages et si saintes que leur majesté a survécu à la ruine même de l’Empire, Bossuet a ce beau mot, souvent cité : « C’est que le bon sens qui est le maître de la vie humaine « y règne partout. » La fin de cette troisième partie peut paraître brusquée.

178. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Préface » pp. 1-22

Car sa portée n’est pas grande ; ses illusions sont nombreuses et invincibles ; il faut toujours se défier d’elle, contrôler et corriger ses témoignages, presque partout l’aider, lui présenter les objets sous un éclairage plus vif, les grossir, fabriquer à son usage une sorte de microscope où de télescope, à tout le moins disposer les alentours de l’objet, lui donner par des oppositions le relief indispensable, ou trouver à côté de lui des indices de sa présence, indices plus visibles que lui et qui témoignent indirectement de ce qu’il est. […] Il y a donc dans les derniers éléments mobiles une ou plusieurs forces capables de devenir disponibles, attraction, répulsion, qui croissent à mesure que leur opposition fait décroître la force en exercice et qui la représentent tout entière sous forme de recette, après qu’elle a disparu sous forme de dépense. — En second lieu, si toute la force en exercice pouvait à la longue se convertir en force disponible, si la nature ou l’arrangement des derniers éléments mobiles étaient tels que la transformation des effets en effet équivalents, mais différents, dût un jour s’arrêter partout, cela serait déjà fait ; or cela n’est pas fait. […] On les exploite toujours en Angleterre ; mais presque partout, notamment en France, les charlatans les ont mises en discrédit ; elles attendent encore que des expérimentateurs attitrés et doués de l’esprit critique veuillent bien les fouiller.

179. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence de la chaire. » pp. 205-232

On a peine à concevoir que, la nature étant partout la même, on plaise cependant par des voies si opposées. Ils parlent l’un & l’autre purement & correctement ; mais autant l’Italien est plein d’onction, d’ame & de vie, autant l’Anglois est simple & naturel partout, dans ses divisions, dans ses preuves, dans ses réflexions, dans ses passages trop fréquens. […] Il fut recherché, fêté partout par les agrémens de son esprit, l’enjouement de son caractère, & par un fond de galanterie qu’il conserva toujours.

180. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIII. Des éloges ou panégyriques adressés à Louis XIV. Jugement sur ce prince. »

Le style avait pris partout je ne sais quel ton de panégyrique ; ce fut celui même des Mascaron, des Fléchier et des Bossuet, toutes les fois qu’ils parlaient de Louis XIV : et où n’en parlent-ils pas ? […] Il lui donna ce goût éternel de représentation, qu’il porta partout, même à la guerre, où cependant ses armées et ses victoires représentaient assez bien pour lui. […] Partout il fallut opposer de grandes forces à de grandes forces.

181. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

La France partout veille. […] Non certes, et la pensée, précieuse partout, vivace chez M.  […] On se disait partout : « Enfin, nous aurons notre chemin de fer !  […] Il était perdu de dettes et traqué partout. […] Il a en lui tout ce qu’il faut pour se rendre utile partout et dans toutes les positions.

182. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Ces exercices furent partout, au siècle dernier, un brevet d’entrée dans le beau style et dans le beau monde. […] Il appuyait sa foi sur une suite régulière de discussions historiques905 ; il établissait l’existence de Dieu par une suite régulière d’inductions morales ; la démonstration minutieuse et solide était partout le guide et l’auteur de ses croyances et de ses émotions. […] À ce titre Addison prend des motifs partout. […] C’est partout l’accent d’Addison. […] Calculer les longues et les brèves, poursuivre partout l’euphonie, songer aux cadences finales, toutes ces recherches classiques gâtent un écrivain.

183. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Poésies d’André Chénier »

C’est pourquoi il ne faut point voir dans la tentative d’André Chénier une renaissance gréco-latine ; c’est véritablement une renaissance française, conséquence des xvie et xviie  siècles, avec cette différence que le xvie  siècle avait vu la Grèce à travers l’afféterie italienne ; le xviie , à travers le faste de Louis xiv ; tandis qu’André Chénier a, dans l’âme de sa mère, respiré la Grèce tout entière ; il parle la même langue que Racine, mais trempée d’une grâce byzantine, attique même, naturelle et innée, et dans laquelle se fondent heureusement l’ingéniosité grecque et la franchise gauloise. » Certes, André Chénier n’a pas réussi partout ; plus d’une pièce de lui trahit des inexpériences sensibles ; il y a des différences d’âge entre ses poésies ; mais celles de sa dernière manière, les élégies lyriques à Fanny, à la Jeune Captive, l’ode à Charlotte Corday, les Iambes, ne laissent rien à désirer. […] Laissons cette littérature d’aigreur et de parti, ces fausses allusions qui se glissent partout, aux critiques que mord une idée fixe.

184. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

Nous ne voulons pas qu’on nous promène par le monde, comme des enfants, pour le simple plaisir des yeux ; en peu d’années l’Europe a grandement vieilli ; sa tardive expérience cherche aujourd’hui partout une instruction sérieuse. […] Le soin est partout, tellement que les riches descriptions se perdent au milieu de tant d’éclat.

185. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vigny, Alfred de (1797-1863) »

Grand artiste, il fut aussi un gentilhomme et un homme, partout fidèle ! […] Partout où la souffrance est vraie, il y a de la grandeur.

186. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

« De taille moyenne et assez spontanément épanoui, il porte, pas trop haut, une longue tête enfantine ; cheveux châtains s’avançant en pointe sur un front presque sacré et retombant, plats et faibles, partagés par une pure raie droite, celer deux mignonnes oreilles de jeune fille ; masque imberbe sans air glabre, d’une pâleur un peu artificielle mais jeune ; deux yeux bleu-gris partout étonnés et timides, tantôt frigides, tantôt réchauffés par les insomnies ; un nez sensuel ; une bouche ingénue, ordinairement aspirante, mais passant vite du mi-clos amoureux à l’équivoque rictus des gallinacés… Il ne s’habille que de noir et s’en va, s’en va, d’une allure traînarde et correcte, correcte et traînarde5. » Il dit encore : Mon père (un dur par timidité) Est mort avec un profil sévère ; J’avais presque pas connu ma mère, Et donc vers vingt ans je suis resté. […] Curieux de se renseigner et de saisir un point d’appui, il court partout où l’on récite des vers.

187. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Racine, et Pradon. » pp. 334-348

Voyons, dans cet écrivain, rival des tragiques Grecs & de Corneille pour l’intelligence des passions, une élégance toujours soutenue, une correction admirable, la vérité la plus frappante, point ou presque point de déclamation ; partout le langage du cœur & du sentiment, l’art de la versification avec l’harmonie & les graces de la poësie porté au plus haut dégré. […] On cherchoit partout à deviner l’auteur.

188. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Philippe II »

Il ne le fut pas qu’en Espagne, il le fut en France, en Angleterre, en Italie, en Allemagne, dans les Flandres, partout ! […] Dans un temps où l’on n’avait pas vu que Mayenne, — le dernier des Guise, de toutes les manières, — mais le grand Guise lui-même, le magnifique Balafré, le charmeur de la France, recevoir vingt-cinq mille écus par mois du roi d’Espagne, non pour les besoins de son parti, — ce qui eût été légitime, — mais pour les besoins de sa maison, de son luxe et de sa personne ; quand les plus grands seigneurs de France tendaient leurs mains gantées d’acier, et les évêques leurs mitres de soie, à l’argent du roi d’Espagne qui y tombait ; quand partout, dans l’abominable politique du temps, il n’y a que gens qui se marchandent, espions tout prêts qui se proposent, assassins qui s’achètent, la Ligue ne fut pas plus innocente que les autres des vices qui dévoraient son siècle, et elle y ajouta le sien, qui était d’être une Démocratie… Philippe II fut ruiné, du reste, avant d’avoir acheté la France, et les victoires d’Henri IV firent le reste.

189. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Louis Wihl »

Les vers se font partout, car le sang et les larmes coulent partout, et les vers, quand ils sont beaux, ne sont que cela, — sang et larmes !

190. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre II. Des éloges religieux, ou des hymnes. »

Dans la suite, et chez les peuples même les plus policés, toutes les fois qu’il arriva un bonheur inattendu ou un fléau terrible, on s’empressa partout à louer les dieux qu’on adorait. […] À imagination égale, cette impression même est plus forte chez les peuples qui habitent les campagnes, que chez les peuples renfermés dans l’enceinte des villes, et l’on sent bien que cela doit être : dans les villes on n’aperçoit pour ainsi dire que l’homme ; partout l’homme y rencontre sa grandeur.

191. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIV. Panégyrique de Trajan, par Pline le jeune. »

Ils ne seront pas entraînés, mais ils s’arrêteront partout avec plaisir. […] « Telle est la faiblesse humaine, disait-il ; partout les remèdes sont plus lents que les maux, et il est bien plus facile d’étouffer le génie que de le ranimer. » Malgré ces remarques générales, il y a dans le panégyrique de Pline plusieurs endroits d’une véritable éloquence, et où l’on remarque de l’élévation et de la force.

192. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre V. Du gouvernement de la famille, ou économie, dans les âges poétiques » pp. 174-185

Cependant, lorsque la barbarie antique reparaissant au moyen âge détruisait partout les cités, le même ordre assura le salut des familles, d’où sortirent les nouvelles nations de l’Europe. […] Les premiers furent d’abord des fiefs roturiers personnels, pour lesquels les vassaux étaient vades, c’est-à-dire obligés personnellement à suivre les héros partout où ils les menaient pour cultiver leurs terres, et plus tard, de les suivre dans les jugements (rei ; et actores).

193. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Et ce n’est partout que ce cynisme, cyniquement avoué, de la science. […] Il se dépensait au café, au foyer des théâtres, partout où les hommes étaient rassemblés et où il pouvait ruisseler de paroles. […] Cet amoureux d’initiative, mais ce tempérament de plus de désir que de puissance, qui cherchait partout où se dégonfler et qui concubinait avec toutes les idées, s’était cru de force prolifique à féconder le théâtre épuisé. […] Diderot, partout et toujours, n’est que Diderot. […] Là, comme ailleurs, là, comme partout, il se rompit et avorta encore.

194. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

Enfin l’idée de Dieu est partout, même quand elle est absente, car la taire est aussi une manière respectueuse mais redoutable de la nier. […] Partout il substitue purement et simplement la doctrine condillacienne et sensualiste à la doctrine qu’il repousse. […] Peu importe : que ce soient des nuances, des quarts de nuances, des millièmes de nuances, ce sont là des diminutifs impuissants ; partout où il y a diversité, il y a solution de continuité. […] Partout où les causes nous échappent, elle arrive pour introduire autant d’entités diverses qu’il y a d’inconnues. […] Qui ne reconnaîtrait là une de ces qualités occultes dont vivait la scolastique, et que la science moderne tend partout à éliminer ?

195. (1911) Études pp. 9-261

Il faut que le trait précède partout le mouvement afin de l’enfermer ; il faut qu’il aille tout de suite jusqu’au bout du geste pour l’arrêter. […] Partout, tant le progrès est continu et insensible, le drame semble éclore. […] Partout traînent les désirs, coulent les plaintes, glissent au long du cœur les plus voluptueux désespoirs. […] Ils plongent dans le sujet ainsi que des branches pénètrent de partout à la fois dans une nuée, et la recueillent en la distillant. […] Il répond de partout comme le cristal, et sans en avoir l’uniformité.

196. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Le Chevalier de Méré ou De l’honnête homme au dix-septième siècle. »

Elle a été l’objet de ses méditations dans sa retraite ; on la retrouve partout dans ses idées. […] L’honnête homme est plus généreux ; il cherche à plaire partout et à tous, même aux moindres que lui, et sans intérêt. […] Comme il cherche partout des honnêtes gens, il s’est avisé de découvrir que le premier en date était Ulysse : « Il connoissoit le monde, comme Homère en parle, dit-il ; mais je crois qu’il n’avoit que bien peu de lecture. » Puis vient Alcibiade, autre honnête homme selon Platon. […] Madame aussi, qui plaisoit partout, étoit de bonne compagnie à la table, et nous y fûmes plus d’une heure sans qu’elle fît le moindre semblant d’en vouloir sortir. […] Je vous assure aussi que Mme de Longueville, que Voiture a tant louée, trouve que j’ai raison partout.

197. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

Ils se trouvaient bien partout ; ils trouvaient bon tout ce qu’on leur donnait. […] cela est bon partout et pour tout, n’est-ce pas ? […] Je ne l’ai jamais quittée, et j’ai dit partout que c’était ma fille qui était folle. […] Toujours et partout il maintient dans toute sa beauté la dignité personnelle de l’homme. […] Cette parole est belle partout, et partout consacrée.

198. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIe entretien. L’Arioste (2e partie) » pp. 81-160

Pendant cet oubli fatal de Roger dans les jardins d’Alcine, sa vertueuse amante Bradamante s’informe partout de lui ; elle s’évanouit de douleur et de jalousie en apprenant qu’il est dans les bras d’Alcine. […] « Dans ces doux entretiens, partout où un jeune arbre à la tige droite et élancée croissait au bord d’une source ou sur la rive d’un courant d’eau limpide, son écorce était à l’instant gravée avec l’aiguille d’Angélique ou avec le couteau de Médor. […] Celle-ci, avertie par des bruits calomnieux de l’amour de Marphise pour Roger, arrive au camp, combat celle qu’elle croit sa rivale, combat Roger lui-même, triomphe partout ; le fantôme d’Atlant, envoyé du ciel, dévoile enfin aux trois combattants leur malentendu. […] Le généreux Léon le cherche partout, parvient à le découvrir, l’arrache à son désespoir, le ramène au camp, avoue à Charlemagne la ruse du travestissement, obtient Bradamante pour son ami. […] Mais partout ailleurs c’est une fine et délicate plaisanterie, qui s’allie partout à la grâce et souvent à la plus exquise sensibilité !

199. (1856) Cours familier de littérature. I « IIIe entretien. Philosophie et littérature de l’Inde primitive » pp. 161-239

Ce globe n’est partout qu’un ossuaire de civilisations ensevelies. L’histoire, qui est le registre de naissance et de mort de ces civilisations, nous les montre partout naissant, croissant, dépérissant, mourant avec les dieux, les cultes, les lois, les mœurs, les langues, les empires qu’elles ont fondés pour un moment ici ou là dans leur passage sur ce globe. […] Le progrès indéfini et continu est une chimère démentie partout par l’histoire comme par la nature ; mais le perfectionnement relatif, local, temporaire, est attesté comme une vérité. […] » Elle monte par la pensée au fond des firmaments qui n’ont point de fond ; et elle dit : « Il est là » ; elle descend aux bornes de l’éther inférieur qui n’a point de borne, et elle dit : « Il est là » ; elle s’étend aux extrémités de l’espace qui n’a point d’extrémité, et elle dit : « Il est encore là, il ne finit jamais, il commence toujours, et il est tout entier partout où il est. » Elle dit : « Il n’y a ni grandeur ni petitesse devant lui ; les choses ne se mesurent qu’à la gloire qu’elles ont d’émaner de lui. […] Il créa un être revêtu d’un corps ; il le vit ; et la bouche de cet être s’ouvrit comme un œuf brisé ; de sa bouche sortit la parole, de la parole sortit le feu ; les narines s’ouvrirent, et des narines sortit le souffle, et du souffle sortit l’air qui se dilate et se répand partout ; les yeux s’ouvrirent, et des yeux jaillit la lumière, et de cette lumière fut produit le soleil ; les oreilles se sculptèrent, et des oreilles naquit le son qui donne le sentiment du loin et du près (des distances) ; la peau s’étendit, et de cet épiderme étendu naquit la chevelure, de cette chevelure de l’homme naquit la chevelure de la terre, les arbres et les plantes !

200. (1840) Kant et sa philosophie. Revue des Deux Mondes

Je suis très convaincu que le genre humain est partout le même, quelles que soient les diverses latitudes sous lesquelles sont distribuées les races humaines. […] Dans la mythologie de l’Edda et des Niebelungen, la supériorité de l’homme sur la nature est partout exprimée, et là est déjà une sorte de théorie philosophique. […] Il y obéit donc toujours et partout ; elles sont pour lui un fondement inébranlable de certitude ; l’erreur ne saurait venir de là, il faut qu’elle vienne d’ailleurs. […] Quand on étudie les procédés des mathématiques, on est frappé de retrouver partout le même procédé constamment employé. […] Kant, comme Descartes, auquel il faut sans cesse le comparer, préoccupé de sa méthode, ne voit qu’elle partout.

201. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Malheureusement ces deux mots expriment deux choses bonnes partout ailleurs, mais mauvaises, détestables en histoire. […] Il l’est partout, et surtout dans ce livre sur le xviie  siècle, où il s’est fait de gaieté de cœur l’avilisseur des gloires de France. […] … Et voilà pourquoi ici, — comme toujours et partout, — la question morale domine la question littéraire. […] partout où les idées philosophiques s’obstinent aujourd’hui à la voir, et où elle est si profondément déplacée. […] Quant à l’historien de saint Dominique, le faux romancier de Marie-Madeleine et l’écrivain, partout ailleurs que dans ces conférences, d’une si étonnante médiocrité, ils ont trouvé tous les trois la gloire qui leur convenait, en entrant à l’Académie.

202. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

La plaisanterie comporte toutes les nuances, depuis la bouffonnerie jusqu’à l’indignation ; il n’y a point d’assaisonnement littéraire qui fournisse tant de variétés et de mixtures, ni qui se combine si bien avec le précédent  Les deux ensemble ont été, dès le moyen âge, les principaux ingrédients dont la cuisine française a composé ses plus agréables friandises, fabliaux, contes, bons mots, gaudrioles et malices, héritage éternel d’une race grivoise et narquoise, que La Fontaine a conservé à travers la pompe et le sérieux du dix-septième siècle, et qui, au dix-huitième siècle, reparaît partout dans le festin philosophique. […] Amuser, s’amuser, « faire passer son âme par tous les modes imaginables », comme un foyer ardent où l’on jette tour à tour les substances les plus diverses pour lui faire rendre toutes les flammes, tous les pétillements et tous les parfums, voilà son premier instinct. « La vie, dit-il encore, est un enfant qu’il faut bercer jusqu’à ce qu’il s’endorme. » Il n’y eut jamais de créature mortelle plus excitée et plus excitante, plus impropre au silence et plus hostile à l’ennui471, mieux douée pour la conversation, plus visiblement destinée à devenir la reine d’un siècle sociable où, avec six jolis contes, trente bons mots et un peu d’usage, un homme avait son passeport mondain et la certitude d’être bien accueilli partout. […] Partout des lieux communs, des thèmes généraux, des enfilades de sentences et de raisonnements abstraits, c’est-à-dire des vérités plus ou moins vides et des paradoxes plus ou moins creux. […] Il semble qu’il n’y ait plus qu’elle au monde ; du moins elle est partout et elle inonde tous les genres littéraires ; on ne s’inquiète pas si elle les déforme, il suffit qu’ils lui servent de conduits. […] Il n’en serait pas de même à Paris pour un membre de l’Académie des sciences : il est assuré partout d’un excellent accueil. » 457.

203. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (5e partie) » pp. 65-128

J’ai recherché la vérité partout. […] De deux choses l’une : ou bien il faudrait que la société, partout présente et partout infaillible, pût contraindre chaque individu au même travail et à la même vertu. […] Dans les temps réguliers, le gouvernement est partout en proportion égale. Dans les temps extrêmes, le gouvernement est, non de droit, mais de fait, partout où on le saisit.

204. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

À vrai dire, dans la tragédie, la scène est partout et en tout siècle, et l’on pourrait affirmer aussi justement qu’elle n’est dans aucun siècle ni nulle part. […] Partout ailleurs la sève est tarie, et, au lieu de plantes florissantes, on ne trouve que des fleurs de papier peint. […] Et le public ne s’en étonne point ; il n’a pas le sentiment historique ; il admet que l’homme est partout le même ; il fait un succès aux Incas de Marmontel, au Gonzalve et aux Nouvelles de Florian, à tous les paysans, manœuvres, nègres, Brésiliens, Parsis, Malabares, qui viennent lui débiter leurs amplifications. […] Considérez tour à tour, pendant la même période, en France et en Angleterre, le genre où elle a son plus large emploi, le roman, sorte de miroir mobile qu’on peut transporter partout et qui est le plus propre à refléter toutes les faces de la nature et de la vie.

205. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIIe entretien. Poésie sacrée. David, berger et roi » pp. 225-279

Le peuple, qui aime surtout le merveilleux, et qui préfère partout les Jeanne d’Arc et les Dunois aux vieux rois, s’enthousiasme pour ce berger ; il l’élève au-dessus de Saül lui-même dans ses bénédictions sur la route. […] La forme creuse des vallées et des ravins, la sonorité des rochers qui percent partout la terre, le retentissement des nombreuses cavernes qui déchirent partout aussi le creux de ces roches, y multiplient les échos. […] On sent l’art partout sous l’inspiration, dès le début de ses plus belles odes.

206. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Ferdinand Fabre  »

Partout ailleurs, les prêtres qu’on a mis au théâtre ou dans le roman, se ramènent à deux types, l’un et l’autre de vérité très superficielle, sinon de pure convention : le mauvais prêtre aux allures de Tartufe, souvent incroyant, toujours hypocrite, tantôt cupide et tantôt débauché, le prêtre comme se le représentent deux cent mille électeurs à Paris, l’homme noir, et, pour tout dire en un mot, le jésuite ; et, d’autre part, le bon prêtre, charitable, tolérant, indulgent, bon vivant à l’occasion, volontiers libéral et républicain, bref, le curé de Béranger et du Dieu des bonnes gens. […] Et pensez un peu à ce que c’est que la continence absolue, la nécessité de promener partout sa robe noire, le renoncement à toutes les curiosités de l’esprit, l’idée que l’on porte un signe indélébile et qu’on ne s’appartiendra jamais plus. […] Partout où il a été curé, il s’est lancé dans de telles entreprises, écoles, hospices, orphelinats, que tout le bien de sa mère y a passé, et il s’est mis dans de tels embarras d’argent que son évêque, après l’avoir quelque temps suspendu de ses fonctions, l’a relégué à Saint-Xist, un village perdu dans la montagne. […] Pendant un pèlerinage qu’elle fait avec monsieur le curé, Marie est assaillie et mise à mal par des ermites et par un santi-belli (marchand de statuettes et d’objets de piété), et elle est si parfaitement ignorante qu’elle ne se doute point de ce qui lui est arrivé. « Ils l’ont renversée, dit-elle, et l’ont mordue partout. » Quand elle sait son malheur, elle s’enfuit et parcourt longtemps la montagne.

207. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

Pourtant il y a partout des personnes aussi ingénieuses que la prude de Molière pour apercevoir dans un livre bien des intentions scandaleuses que l’auteur lui-même n’a pas eues. […] Parmi des refrains de Bohême, les hurlements de l’ours et le cliquetis incessant de sa chaîne ; partout des haillons aux couleurs criardes : ici des enfants et des vieillards à demi nus, là des chiens qui hurlent et aboient ; le violon ronfle, les roues grincent sur le sable, tout est sauvage, misérable, désordonné… » Sous le titre de Boris Godounov, Pouchkine a composé un drame historique dans la forme de ceux de Shakespeare, avec l’aventure du premier des faux Démétrius. […] Partout repose le peuple ; tout s’est tu, jusqu’aux rumeurs et aux bruits des artisans. […] Partout les traces d’une récente boucherie.

208. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

Ceux qui l’ont connue alors disent ce que l’on croira sans peine, c’est qu’elle eut dès le premier jour la place que sa distinction et ses manières lui assuraient partout. […] Ici nous sommes déjà dans sa confidence ; elle écrit sur un cahier ses pensées, toujours à l’intention de son frère quelle a laissé à Paris souffrant : 10 avril (à Nevers)… Il fait beau ; on sent partout le soleil et un air de fleurs qui te feront du bien. […] je l’ai là sous les yeux, sous la main, au cœur, partout.

209. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Ce fils d’un rhéteur grec et d’une fille campanienne sent tout le parti qu’il peut tirer de cet Africain robuste, brutal, superstitieux et brave ; lui, il est lâche à l’action, mais hardi partout ailleurs, fertile en idées, l’homme aux expédients : tous deux ils se doublent et se complètent. […] Mâtho cherche partout une brèche, un passage, pour pénétrer dans cette ville ennemie qui renferme son trésor : « Son impuissance l’exaspérait. […] Il y a ce qu’on appelle l’âme d’une œuvre ; cette âme ne saurait être indifféremment et partout la même, n’importe l’œuvre ; mais surtout elle ne doit pas être toujours et uniquement, par préférence et par choix, le vice malicieux ou la bagatelle.

210. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

L’âge de l’innocence est partout l’âge du bonheur, même en amour. » Cependant Bonstetten dut quitter Rome ; il en emporta un sentiment aimable et léger comme lui ; il écrivait quelquefois à la belle reine, qui lui répondait sur le ton de l’amitié ; il ne la revit que plus de trente ans après : ah ! […] A la promenade, à la messe, partout où elle avait envie d’aller, il était constamment avec elle. » Dans l’embarras où l’on se trouvait, on dut recourir à des auxiliaires. […] On dirait qu’il ne peut se faire à l’idée de la vie, humainement heureuse, que va désormais mener sa charmante et si éprouvée comtesse : il cherche partout des punitions et des châtiments à ce qui réellement n’en a pas eu et ne méritait point d’en avoir.

211. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « La comtesse Diane »

Il est donc furieusement honorable pour notre temps qu’un genre si difficile y fleurisse : apparemment, si nous écrivons tant de Pensées, c’est que, tard venus dans le monde et à une époque où l’observation est plus et mieux pratiquée qu’elle ne l’a jamais été, nous sommes un tas de moralistes très forts qui avons fait le tour des choses, qui sommes allés partout, et qui en revenons surchargés d’expérience… Mais je me méfie, comme dit M.  […] Il s’agit ordinairement, pour lui, de démêler la part d’égoïsme cachée partout, même dans les vertus. […] Qui donc disait que la voix d’or s’était brisée à force de chanter tous les jours, partout et à travers les deux mondes ?

212. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IV : M. Cousin écrivain »

C’étaient de grandes revues passées à tire-d’aile ; le philosophe, appuyé sur le fini, l’infini et leur rapport, se tenait partout en équilibre. […] Qui leur a montré, par-delà les limites et sous le voile de l’univers, un Dieu caché, mais partout présent, un Dieu qui a fait le monde avec poids et mesure, et qui ne cesse de veiller sur son ouvrage, un Dieu qui a fait l’homme parce qu’il n’a pas voulu retenir dans la solitude inaccessible de son être ses perfections les plus augustes, parce qu’il a voulu communiquer et répandre son intelligence, et, ce qui vaut mieux, sa justice, et, ce qui vaut mieux encore, sa bonté ? […] La première fois que j’ai vu deux objets avec deux autres objets, et que j’ai compris qu’ils faisaient quatre, je n’ai pas remarqué que toujours, partout et nécessairement, deux et deux font quatre.

213. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXII. »

Nous sentons partout ce que le souvenir de l’Italie jeta de douceur dans les vieux poëtes de la rude Albion, dans les sonnets de Daniel, dans Surrey, dans Spencer, dans Waller, dans le grand Milton lui-même. […] La réponse est partout, depuis la chanson d’amour vraiment lyrique de Marlowe, cet Eschyle anglais, jusqu’aux chœurs des derniers élèves de Shakspeare. […] De retour dans sa patrie, dans la philosophique et opulente Angleterre, à l’époque même où les lettres accréditées y conduisaient au pouvoir, où les hommes d’État étaient de grands orateurs, William Pitt, Fox, Burke, où les lettrés se mêlaient partout aux affaires, Gibbon, Shéridan, Glover, Macpherson, il vécut loin du parlement, loin du monde, dans la modeste chambre d’un collège, où il semblait perpétuer la vie laborieuse d’étudiant, et d’où il s’échappait quelques mois, chaque année, pour voyager dans son pays, en étudier les beautés naturelles, les vieux monuments, et renouveler en soi la religion de la patrie comme celle de la science.

214. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Conclusions » pp. 169-178

Et partout s’ouvrant des tournois de boxe et de lutte où la foule s’empresse. […] Ce n’est partout qu’illuminations féeriques, jeux de lumières transparentes et cascades lumineuses.

215. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Rome et la Judée »

, de jouer une musique à laquelle il n’ajoute, pour celui qui sait discerner partout la ligne droite sous ses courbes, que quelques arpèges ou quelques fioritures, rien de plus. […] Il a encore, de temps en temps, de la finesse et de la rencontre : — « Saint Paul — dit-il quelque part — fait la police de l’inspiration », — mais cette finesse tourne à la mièvrerie, comme la nuance, partout diminuée, tourne à l’effacement.

216. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIII. P. Enfantin »

Enfantin (page 44 de sa brochure), je peux les comparer aux tentes que saint Paul tissait et vendait pour vivre, pour avoir la force de semer partout sa parole de vie… Alors pour lui, comme aujourd’hui pour nous, la foi ne donnait pas de quoi vivre. […] Enfantin, qui joue à la grande tendresse du Père, fourre des entrailles partout, jusque dans ses dégoûts.

217. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Gères. Le Roitelet, verselets. »

Ces verselets, puisque verselets il y avait, n’étaient pas la haute vulgarité, rimée et sonore, qu’on rencontre partout et qui s’appelle de la poésie. […] la Muse de M. de Gères, qui les a traversées, qui s’est baignée avec amour dans l’arc-en-ciel de ces trois teintes, répandues partout, pour l’instant, les porte toutes les trois confondues sur ses ailes, ce qui les fait ressembler, ces ailes originales de roitelet, à toutes celles des pigeons pattus imitateurs !

218. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « J.-J. Ampère ; A. Regnault ; Édouard Salvador »

Ampère, l’Amérique que nous connaissons, l’Amérique, qui est partout daguerréotypée par tant de mains et tant de livres, éternellement prise par le même côté et dans la même attitude, se précise-t-elle ou change-t-elle d’aspect sous notre regard ? […] Des effets partout, nulle part les causes.

219. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VIII. De Platon considéré comme panégyriste de Socrate. »

On sait que dans tous les ouvrages de Platon, c’est Socrate qui mène l’homme à la vérité ; Socrate en même temps conserve son caractère et son génie ; partout il garde sa manière de raisonner, ses inductions, ses interrogations, ces espèces de pièges et de longs détours dans lesquels il enveloppait ses adversaires, pour les amener malgré eux à une vérité qu’ils combattaient. […] Qu’elle arme contre toi des bourreaux, qu’elle te jette dans les fers, qu’elle t’envoie aux combats pour recevoir des blessures et mourir, ton devoir est d’obéir ; fuir ou quitter ton rang est un crime ; dans les tribunaux, dans les prisons, sur les champs de bataille, partout les ordres de la patrie sont sacrés ; un citoyen qui se révolte contre elle est plus coupable qu’un fils armé contre son père… » Les lois continuent : « Il ferait beau entendre Socrate racontant sous quel déguisement ridicule il s’est enfui de sa prison !

220. (1860) Ceci n’est pas un livre « [Épigraphe] » p. 

[Épigraphe] La vérité est un cercle dont la circonférence peut être partout, mais dont le centre n’est certainement nulle part.

221. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Sansrefus, Gaston »

Armand Silvestre Sur tous les rivages, le poète nous entraîne, et partout ce lui est l’occasion d’un paysage merveilleusement juste, d’une impression pleine de couleur.

222. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Depont, Léonce (1862-1913) »

Partout, ici, vous rencontrerez une haute et sérieuse pensée, un style ample et sûr.

223. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Armelin, Gaston (1860-19..) »

L’auteur y relate des exploits trop peu connus… Ce sont partout des chaos d’armées, des mêlées de cavalerie, qu’accompagnent des paysages au charme pénétrant.

224. (1901) Figures et caractères

Comparez avec Hugo, dont le masque est partout familier. […] La mort frappe partout. […] Il a constaté partout de grandes choses accomplies. […] Hugo la mena partout avec lui. […] Elle est partout la même.

225. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mesureur, Amélie (1854-1926) »

Nulle part de l’effort ; partout de la grâce.

226. (1864) Études sur Shakespeare

Aussi la religion a-t-elle été partout la source et la matière primitive de l’art dramatique ; il a célébré en naissant, chez les Grecs, les aventures de Bacchus, dans l’Europe moderne, les mystères du Christ. […] Mais partout où se sont rencontrés leurs principaux caractères, le théâtre s’est élevé ; et ni les hommes de génie n’ont manqué au public, ni le public aux hommes de génie. […] Les cours de comté, le jury, les corporations, les élections de tout genre, multipliaient les occasions de réunion et répandaient partout les habitudes de la vie publique. […] Partout on verrait les caractères aussi peu tenaces que les passions, les résolutions aussi mobiles que les caractères. […] Partout ailleurs, la situation morale est claire, sans ambiguïté comme sans complaisance.

227. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Abailard, et saint Bernard. » pp. 79-94

On les publie partout, & partout on en prend hautement la défense.

228. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Pélisson et d’Olivet »

Mais elle n’est ni un entrepôt ni une fabrique de grands hommes, et les esprits supérieurs, les transcendances, y sont autant que partout ailleurs une exception. […] En rééditant leurs histoires avec un impayable sérieux, en les accompagnant d’une introduction animée, d’un enthousiasme presque tendre, en devenant mélancolique lorsque son livre finit et qu’il est obligé de renoncer à cette douce familiarité avec des hommes l’orgueil, à juste titre, de la littérature, Livet, qui a quêté partout des annotations pour la plus grande gloire de l’Académie, a cru évidemment que cette assemblée discoureuse, fondée pour discourir et ouvrir ou fermer la porte aux mots nouveaux qui se risqueraient dans la langue, enfin que cet hôtel de Rambouillet sans femmes avait le privilège de créer véritablement des grands hommes, parce qu’il pouvait, pour le récompenser de son zèle, le faire un jour académicien, lui, Livet !

229. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Paul de Saint-Victor » pp. 217-229

Des Deux Masques, il n’en avait pris qu’un, mais son érudition l’avait dilaté outre mesure, en recherchant ce masque-là et en le signalant partout, chez tous les peuples, — qui ne l’ont pas aussi glorieusement porté que les nations chez lesquelles Paul de Saint-Victor a concentré l’art théâtral. […] Le peintre est partout chez Saint-Victor, le peintre multiple du portrait, du tableau, de tous les genres de peinture.

230. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le docteur Revelière » pp. 381-394

Rien, dans l’histoire racontée ici, de plus formidable, de plus grossissant, de plus irrésistible que cette invasion du fléau révolutionnaire, lequel a, comme la mer, son flux et son reflux, — qui amène Robespierre et qui l’emporte, pour amener et pour remporter Napoléon Bonaparte, et amener et remporter encore les Bourbons et la Restauration, jusqu’à ce qu’enfin, Océan vainqueur et étendu partout après 1830, — car la monarchie de Louis-Philippe n’est que de la révolution couronnée, — il n’ait plus eu rien à remporter ! […] La Révolution triomphe et triomphera partout si Dieu ne s’en mêle, et méritons-nous qu’il s’en mêle ?

231. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIV. M. Auguste Martin »

Puis, c’était aussi le droit de primogéniture, odieux partout, en Orient et en Occident (encore une vieille guitare connue !) […] Et le plus écrasant démenti ne lui est-il pas donné par l’Histoire toute entière, qui atteste que le Christianisme a centuplé cette puissance, là où il a saisi la nature humaine, — en Chine même, comme ailleurs et partout !

232. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Maurice Bouchor »

Maurice Bouchor combat, partout, l’ange qu’il a dans la pensée, mais l’ange est partout son vainqueur.

233. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Mistral. Mirèio »

Partout, à toutes les places de son poème, le poète de Mirèio ressemble à quelque beau lutteur qui garderait, comme un jeune Dieu, sur ses muscles, lustrés par la lutte, des reflets d’aurore. […] … Est-ce que partout où brille le Génie il ne se fait pas un langage avec les éléments les plus indociles et les plus ingrats ?

234. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pécontal. Volberg, poème. — Légendes et Ballades. »

Et remué partout pour voir ce mot caché Que tant d’autres souffrants ont, avant moi, cherché ! […] Son livre, distingué partout, renferme plusieurs véritables chefs-d’œuvre.

235. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Corneille »

pensé et écrit pour en rafler un, et comme il faut que le Normand se retrouve partout, M.  […] Les six pieds de terre qui suffisent à la mort suffirent à sa vie, et il fut aussi grand dans ces six pieds de terre que s’il avait traîné son génie, pour le développer, partout l’univers !

236. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre V. »

La poussière des débris qui nous restent encore des inspirations d’Alcman semble partout indiquer cet emploi. […] Lus et relus, les vers épars conservés sous son nom jusqu’à nous semblent comme un indice de cette poétique ardeur qui couvait partout dans la Grèce.

237. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Segard, Achille (1872-1936) »

Achille Segard n’est guère homogène, sauf en ceci qu’il révèle partout le noble soin d’un homme très lettré et la détresse d’une âme inquiète.

238. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

« Depuis cet instant l’image de Gretchen me poursuivit partout ; n’osant aller chez elle, je me rendis à l’église de sa paroisse ; j’eus le bonheur de la voir. […] L’homme sensuel y éclate partout, l’homme sensible nulle part. […] un amas de livres rongés des vers, couverts de poussière ; partout autour de moi des télescopes, des boîtes, des instruments de physique ou de chimie vermoulus, héritages de mes ancêtres ! […] dit-il ; irai-je feuilleter ces milliers de volumes pour lire que partout les hommes se sont agités de même pour améliorer leur sort et qu’un homme heureux n’a jamais vécu ? […] Un soldat, à demi ivre de douleur plus que de vin, revient de l’armée ; il a appris en approchant de la ville la honte de sa sœur chérie, qu’il célébrait partout comme la gloire et la beauté de la famille.

239. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

Cette Théorie, qui fait de la terre un fond de mer, serait irréprochable, s’il était vrai, comme le prétend Buffon, que les coquilles, et les autres débris d’animaux marins soient répandus partout, que les couches terrestres soient partout horizontales et parallèles ; que les angles saillants des montagnes correspondent partout à des angles rentrants ; que toute vallée ait été d’abord le lit d’un des courants de la mer. […] Mais ôtez partout, et la théorie de Buffon reste vraie. […] Lesage est lu partout. […] On sent partout la raison douce, la bonté, le père qui cache le maître, l’homme qui cache l’auteur.

240. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre II. Les génies »

Juvénal, tout-puissant poëte, se disperse, s’éparpille, s’étale, tombe et rebondit, frappe à droite, à gauche, cent coups à la fois, sur les lois, sur les mœurs, sur les mauvais magistrats, sur les méchants vers, sur les libertins et les oisifs, sur César, sur le peuple, partout ; il est prodigue comme la grêle ; il est épars comme le fouet. […] Son premier fruit est la turpitude visible partout sur tous les sommets, le juge vénal, le prêtre simoniaque, le soldat condottiere. […] Cervantes, comme poëte, a les trois dons souverains : la création, qui produit les types, et qui recouvre de chair et d’os les idées ; l’invention, qui heurte les passions contre les événements, fait étinceler l’homme sur le destin, et produit le drame ; l’imagination, qui, soleil, met le clair-obscur partout, et, donnant le relief, fait vivre. […] Quant au réel, nous y insistons, Sheakespeare en déborde ; partout la chair vive ; Shakespeare a l’émotion, l’instinct, le cri vrai, l’accent juste, toute la multitude humaine avec sa rumeur. […] Partout des Cercles de chant et des Tables de chant.

241. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — II. (Fin.) » pp. 198-216

Prenons maintenant tout autre sermon prêché depuis à la Cour, celui Sur l’ambition (1666), Sur l’honneur (1666), Sur l’amour des plaisirs (1662), des beautés du même ordre éclatent partout. […] Dans l’époque auguste et si définie au sein de laquelle il parlait, Bossuet, sans rien perdre de son étendue ni de ses hardiesses de coup d’œil à distance, trouvait partout autour de lui ce point d’appui, cette sécurité, et cet encouragement ou avertissement insensible dont le talent et le génie lui-même ont besoin. […] C’est alors que gouvernant presque seul et supérieur à ce qui l’entourait, il a mis partout l’empreinte de son goût, etc., etc. » — L’idée de faire régner et gouverner M. de Lionne en lieu et place de Louis XIV est surtout des plus singulières.

242. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — II » pp. 254-269

Prud’homie parfaite, selon lui, a pour fondement « un esprit universel, galant, libre, ouvert et généreux, un esprit voyant partout, s’égayant par toute l’étendue belle et universelle du monde et de la nature ». […] C’est de cette sorte que partout il ne se donne que pour l’économe, le distributeur public des bonnes et saines lectures qu’il a digérées et recueillies. […] [NdA] N’est-ce pas ici, au sérieux, la leçon pratique que Molière a mise partout en action dans ses comédies ?

243. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

Il tient bon, il se pique de le retrouver partout, même dans les cas les plus déguisés. […] Pourquoi traduire partout en un calcul sec et ne présenter qu’après dépouillement et analyse ce qui est souvent le fruit vivant, et non cueilli encore, de l’organisation humaine, variée à l’infini et portant ses rameaux jusque vers les cieux ? […] » M. de La Rochefoucauld n’a point de ces gestes de démonstration dans le style ; il sait qu’on doit en être sobre partout, et qu’ils sont particulièrement déplacés en un tel sujet.

244. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

On crie au secours de chaque côté ; beaucoup faiblissent et capitulent ; Rohan se porte partout où il peut. […] Ce dernier combat de Morbegno, le plus glorieux des quatre que Rohan avait eu à livrer, et qui a déjà je ne sais quel brillant et comme un éclair des combats d’Italie, couronnait à son honneur cette belle campagne de 1635, où, grâce à lui, les armes du roi, moins heureuses partout ailleurs, avaient eu dans la Valteline un succès constant. […] Moment glorieux et trop fugitif, où le secrétaire d’État de la guerre, des Noyers, mandait à d’Émery, ambassadeur de France en Savoie, « que c’était une chose étrange que M. le duc de Rohan avec une poignée de soldats, sans canon ni munitions, fît tous les jours quelque action signalée, et qu’il portât partout la terreur, pendant que l’armée des confédérés, si florissante, si bien nourrie, si bien payée, demeurait dans l’inaction. » Peu s’en fallait qu’on ne le citât en cet instant comme un modèle de bonheur.

245. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier »

Elle est pleine de bonté et de grâces pour Mme de Staël ; elle n’est pas moins jolie qu’il y a deux ans, et cependant j’aime qu’elle reparte ; partout où elle se trouve, elle est la destruction de la vraie conversation. […] Chez elle, elle était charmante ; chez les autres, vous l’auriez souhaitée partout ailleurs, et surtout dans sa propre maison. » Elle aurait désiré être… elle ne savait quoi ; et c’est Byron qui le demande ! […] En Italie, dans le voyage qu’elle y fit en 1805, elle plaisait partout, mais elle ne s’y plaisait pas ; voilà le vrai.

246. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. (Suite et fin.) »

Zeller hésite un peu sur ce point ; mais il n’hésite pas quand il attribue à César l’idée de fonder, sous un nom ou sous un autre, une monarchie populaire, universelle et, en quelque sorte, humaine : « Étendre le droit de cité à tous les hommes libres de l’Empire, régner sur le monde pour le monde entier, non pour l’oligarchie ou la démocratie quiritaires ; abaisser les barrières entre les classes comme entre les nations, entre la liberté même et la servitude, en favorisant les affranchissements et en mettant le travail en honneur ; avoir à Rome une représentation non du patriciat romain, mais du patriciat du monde civilisé ; fondre les lois de la cité exclusive dans celles du droit des gens ; créer, répandre un peuple de citoyens qui vivent de leur industrie et qu’on ne soit pas obligé de nourrir et d’amuser : voilà ce qu’on peut encore entrevoir des vastes projets de celui qu’on n’a pas appelé trop ambitieusement l’homme du monde, de l’humanité ; voilà ce dont témoignent déjà les Gaulois, les Espagnols introduits dans Rome, Corinthe et Carthage relevées, et ce qu’indiquent les témoignages de Dion Cassius, de Plutarque, de Suétone, bien qu’ils aient pu prêter peut-être à César quelques-unes des idées de leur temps. » César (s’il est permis d’en parler de la sorte à la veille d’une publication par avance illustre), César, au milieu de tous ses vices impudents ou aimables, de son épicurisme fondamental, de ce mélange de mépris, d’indulgence et d’audace, de son besoin dévorant d’action, et de cet autre besoin inhérent à sa nature d’être partout le premier, César, à travers ses coups de dés réitérés d’ambitieux sans scrupule et de joueur téméraire, avait donc une grande vue, une vue civilisatrice : il n’échoue pas, puisque son idée lui survit et triomphera, mais il périt à la peine, parce qu’il avait devancé l’esprit du temps, tout en le devinant et le servant, parce qu’il vivait au milieu de passions flagrantes et non encore domptées et refoulées. […] Martha, fruit d’une étude lente, approfondie et délicate, est animé partout d’un souffle pur et respire comme une paisible sérénité : Marc-Aurèle y est traité comme il aurait aimé à l’être, dans un esprit de conciliation et de mansuétude. […] Le Christianisme, qui pointait et perçait partout sourdement, devait bientôt l’emporter sur elle.

247. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

En français il offense partout, il révolte presque devant la chaste image de la Charité. […] L’humanitarisme est devenu une préoccupation si chère au poëte, qu’il l’introduit partout, jusque dans le Toast porté au banquet des Gallois et des Bas-Bretons. […] De nos jours, le Louis XIV est descendu partout ; chaque Racine s’habille et se déshabille devant le public : et la perruque elle-même, dont ne se séparait jamais le roi, n’est plus restée au poëte, puisqu’on lui demande de ses cheveux. 

248. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre II. Distinction des principaux courants (1535-1550) — Chapitre I. François Rabelais »

Il prend partout et de toutes mains. […] Non, mais Rabelais a conscience de la force infinie de la nature : telle qu’il la saisit en lui, puissante, active, voulante, telle il la sent partout ; à quoi bon chiffres et mesures ? […] Ici il élimine à peu près tout de la nature, là il ne supprime rien de la vie : et partout il donne la sensation de toute la nature et de toute la vie.

249. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre IV. Le roman »

Mais partout où l’on aime à s’arrêter, partout où l’on trouve une fine satire des sottises humaines, de chaudes peintures des mœurs du temps, soyez sûr que les sources de Gil Blas doivent se chercher dans la littérature française, et dans la société française. […] Il voit nombre de coquins, de fripons, de demi-coquins surtout et de fripons mitigés, parmi lesquels surnagent quelques honnêtes gens : il voit partout des instincts brutaux ou des vices raffinés, l’intérêt et le plaisir se disputant le monde, et ne laissant guère de place au désintéressement et à la vertu.

250. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre V. La littérature et le milieu terrestre et cosmique » pp. 139-154

Partout où l’homme domine la nature, la raison prend le pas sur l’imagination, la science sur la fantaisie exaltée. Partout, au contraire, où la nature écrase l’homme, dans le voisinage de l’océan ou dans la haute montagne, quand il se sent petit et faible en présence de la tempête ou de l’avalanche, il y a persistance en lui des paniques de l’humanité primitive ; il trahit un penchant à la tristesse rêveuse, il croit au merveilleux, il se voit entouré d’êtres surnaturels  ; dans sa foi, dans ses coutumes, dans ses fêtes, dans ses légendes, il garde au passé un pieux attachement, qui est une entrave au progrès des mœurs et des idées, mais qui a aussi quelque chose de touchant et de pittoresque. […] Le goût des voyages est alors né presque partout à la fois, et une foule d’œuvres ont surgi pour satisfaire ce goût, qui était chez nos grands-pères une rareté.

251. (1886) De la littérature comparée

Marc Monnier a signalé — après les avoir résolues — les difficultés d’un enseignement aussi vaste que celui de la littérature comparée : « Mener toutes les littératures de front, a-t-il dit ; montrer à chaque pas l’action des unes sur les autres ; suivre ainsi, non plus seulement en deçà ou au-delà de telle frontière, mais partout à la fois, les mouvements de la pensée et de l’art, cela paraît ambitieux et difficile... » Il a pu ajouter : « On y arrive cependant, à force de vivre dans son sujet qui petit à petit se débrouille, s’allège, s’égaie... » Mais ce qu’il n’a pas dit, ce sont les rares qualités d’esprit qui lui ont permis d’accomplir un tel travail et de le perfectionner d’année en année : une érudition qui s’élargissait sans cesse ; un sens critique habile à choisir entre la masse des documents les plus propres à marquer la physionomie d’un homme ou d’une époque, ou à dégager les caractères essentiels d’une œuvre ; une intelligence si enjouée qu’elle a pu, pour conserver son expression, « égayer » cette grave étude de l’histoire littéraire, si alerte, que d’heureuses échappées dans tous les domaines, elle a su rapporter des œuvres également distinguées. […] État de guerre, je le répète, dans tous les pays le même, et partout également fâcheux. […] C’est Rousseau qui célèbre à nouveau l’amour passionné et détrône la galanterie ; ce sont les ardentes leçons de Herder qui arrachent la jeunesse allemande à l’imitation inféconde de notre littérature ; c’est Goethe auquel cet admirable chef-d’œuvre, la cathédrale de Strasbourg, révèle l’art gothique ; c’est Chateaubriand qui découvre dans le christianisme autre chose qu’un ensemble de dogmes : une source vive de poésie ; c’est la mélancolie de Lamartine qui chasse le libertinage de Parny ; ce sont les romans de Walter Scott qu’on imite partout et qui ressuscitent tout un monde oublié.

252. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

Celle de Sainte-Beuve n’était que finesse, œil oblique embusqué dans sa patte d’oie, sourire de vieille femme d’esprit, et l’anecdote y dominait, l’anecdote ramassée partout, car Sainte-Beuve était un mendiant d’anecdotes et il ne dînait en ville que pour demander à ces dîners la charité de quelques-unes. […] Le critique en voyage à travers les littératures emporte autre chose que Sterne lui-même, qui n’emportait, quand il partit pour la France, que trois chemises, une culotte de soie noire et la résolution de partout sentimentaliser… Le critique, lui, doit avoir un paquet d’idées faites en vertu desquelles il va juger les choses et les hommes, et il ne va pas se les faire, ces idées, en voyage. […] L’Anglais du fond de Chasles est remonté à la surface, et il y a tout absorbé… Et encore, si, en étant exclusivement Anglais, il eût été un historien profond comme on peut l’être partout, on accepterait son œuvre anglaise malgré le déchet de la personnalité du talent auquel on était accoutumé.

253. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Il n’y a que des chroniqueurs de talent, des hommes du fait, des Américains en littérature, des arrangeurs de panoramas immenses ouverts partout : en France, en Espagne et en Angleterre ; car cette Rolande, qui ne tient à rien qu’à elle-même et à se montrer, ils la font voyager et ils accrochent à la traîne de sa robe, sans beaucoup de peine d’invention, des descriptions comme celles de quelques quartiers de Londres et d’une course de taureaux en Espagne. […] Le moi de Fervaques est partout dans son livre, et on ne le hait nulle part, ce moi passionné qui vibre de jeunesse. […] Le faubourg Saint-Germain est partout et nulle part, comme l’Ulnare de feu d’Arlincourt.

254. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Galloix, Jacques Imbert (1...-18..) »

Sa pensée, toujours déchirée par de laborieux enfantements, n’emplissait qu’à grand-peine les sinuosités du rythme et y laissait souvent des lacunes partout.

255. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Le dessin n’est pas le contour extérieur d’une forme, il est partout, au centre, en haut, en bas, partout où il y a de la lumière et de l’ombre. […] Et c’est partout dans ce haut goût ; et M.  […] Quand on dit : il y a du bon partout, c’est comme si on disait : il n’y a du bon nulle part. […] Et c’est partout dans ce haut goût ; et M.  […] Il ne croyait pas aux hypocrisies et voyait des intérêts partout.

256. (1875) Revue des deux mondes : articles pp. 326-349

Les sources de la chaleur animale sont partout et nulle part d’une manière exclusive. […] Nous découvrons partout une liaison nécessaire entre les organes et leurs fonctions ; c’est là un principe général auquel aucun organe du corps ne saurait se soustraire. […] Les causes premières nous échappent partout, et partout également nous ne pouvons atteindre que les causes immédiates des phénomènes. […] Ici, comme partout, rien n’arrive par un brusque hasard ; les événements les plus soudains en apparence ont eu leurs causes latentes. […] On ne cherche plus maintenant le siège de la vie ; on sait qu’elle réside partout dans toutes les molécules de la matière organisée.

257. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Il y répand partout une modération féconde, pour employer la belle expression de d’Aguesseau. […] Ainsi il y aura véritable connaissance de Dieu et de l’homme partout où le médiateur sera connu, et ignorance de Dieu et de l’homme, partout où le médiateur sera inconnu. […] On s’aperçoit aisément dans la Vie de Rollin qu’il a sacrifié partout des richesses. […] Partout où il s’est remué quelque chose de grand, on retrouve nos ancêtres. […] Partout où il reste une chance à la fortune, il n’y a point d’héroïsme à la tenter.

258. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (2e partie) » pp. 417-487

II Le livre commence par cet axiome : « L’homme est né libre, et partout il est dans les fers !  […] Au lieu de lire : l’homme naît libre, et partout il est dans les fers, lisez : l’homme naît esclave, et il ne devient relativement libre qu’à mesure que la société l’affranchit de la tyrannie des éléments et de l’oppression de ses semblables par la moralité de ses lois et par la collection de ses forces sociales contre les violences individuelles. […] VII Quant à la souveraineté, c’est-à-dire à ce pouvoir légitime qui régit avec une autorité sacrée les empires, Rousseau la place, la déplace métaphysiquement ici ou là, dans un tel labyrinthe d’abstractions, et lui suppose des qualités tellement abstraites, tellement contradictoires, qu’on ne sait plus à qui il faut obéir, et contre qui il faut se révolter ; tantôt lui donnant des limites, tantôt la déclarant tyrannique ; ici la proclamant indivisible, là divisée en cinq ou six pouvoirs, pondérés, fondés sur des conventions supérieures à toute convention ; collective, individuelle, existant parce qu’elle existe, n’existant qu’en un point de temps métaphysique que la volonté unanime doit renouveler à chaque respiration ; déléguée, non déléguée, représentative et ne pouvant jamais être représentée ; condamnant le peuple à tout faire partout et toujours par lui-même, lui défendant de rien faire que par ses magistrats ; déclarant que le peuple ne peut jamais vouloir que le bien, déclarant quelques lignes plus loin la multitude incapable et perpétuellement mineure. […] Patriarcale en Orient, théocratique dans les Indes, monarchiquement sacerdotale en Judée et en Égypte, royale en Perse, aristocratique en Italie, démocratique en Grèce, pontificale à Jérusalem et dans Rome moderne, élective et anarchique dans les Gaules, représentative et hiérarchique en Angleterre, chevaleresque et monacale en Espagne, équestre et turbulente comme les hordes sarmates en Pologne et en Hongrie, assise, immobile et formaliste en Allemagne, mobile, inconstante, militaire et dynastique en France, la forme du gouvernement varie partout, la souveraineté jamais. […] L’âge patriarcal, souveraineté paternelle absolue, mais providentielle, du père, première image de la souveraineté paternelle de Dieu, père universel de toute race, admet partout le droit d’aînesse dans l’hérédité, ou le droit absolu de tester en faveur du favori, du benjamin du père ; le père se continue dans celui que Dieu lui a envoyé le premier, ou dans celui qu’il a choisi pour son bien-aimé parmi ses frères.

259. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (2e partie) » pp. 365-432

C’est peut-être un préjugé, Monsieur, je n’ose pas le décider, mais il n’en est pas moins vrai que, même parmi nous, les plus pauvres, les plus ignorantes des familles du peuple, soit à la ville, soit à la campagne, un instinct, absurde peut-être, mais invincible, nous inspire partout et toujours une répugnance naturelle pour certaines familles entachées de crimes fameux dans quelques-uns de leurs membres, et capables, nous le supposons du moins, de retrouver cette capacité du crime de génération en génération ; nous nous en éloignons tant que nous pouvons, nous disons que cette race est mal famée, nous ne leur donnons pas nos filles, nous ne permettons pas à nos garçons de chercher des femmes parmi eux. […] Jamais la charité en nature ne fut plus prodigue de ses secours que dans les pauvres chaumières exposées tour à tour à ces dénuements ; l’aumône est née partout de la misère : aujourd’hui à toi, demain à moi. […] On croit voir des portraits de famille dans certaines figures du tableau, telles, par exemple, que la transparente sœur madame Baptistine et la vieille madame Magloire, sœur volontaire aussi plutôt que servante de la maison épiscopale ; on croit deviner que le poète, comme le peintre Rubens, mettant partout sa femme ou sa sœur dans ses tableaux, s’est souvenu de son heureuse enfance de la rue du Colombier, et a retracé le profil de sa mère ou la face réjouie de quelque bonne tante auxiliaire de sa mère, dans les figures de ces deux saintes femmes de l’Évangile, domestiques du saint évêque de Digne. […] La société terroriste, toujours et partout, ne serait donc qu’une éternelle et réciproque extermination ? […] X Rectifions-les partout où nous les rencontrons, même sur les lèvres d’un saint ; les bonnes intentions n’excusent que les incapables.

260. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

I Quand ce livre de Proudhon parut1, des journaux, qui cherchent partout des publicités de ricochet, donnèrent des fragments de ce livre dont ils firent l’affaire en faisant la leur, mais ce fut tout. […] IX Un point de vue qu’on promène partout ou qu’on retrouve partout, tant on s’en est laissé frapper, ne constitue pas une philosophie. […] … la femme a mis dans la famille ce principe de révolution que Proudhon devrait détester partout, — car il n’est pas plus légitime là qu’ici, — mais qu’il ne déteste que dans la femme, comme si le peuple ne ressemblait pas à la femme, comme si elle et lui n’étaient pas les éternels mineurs de l’humanité ! […] Et cette place a été tellement bien faite que partout où la femme l’a acceptée et gardée les Sociétés ont été aussi morales qu’elles puissent être, et qu’elles doivent devenir d’autant plus immorales dans l’avenir que les femmes voudront sortir de cette place et se croiront le droit de la répudier.

261. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

Hugo dans toutes ces créatures, Hugo partout et toujours Hugo ! […] Comme Hugo, il est partout… Il est précisément dans cette scène, la plus préparée, la plus travaillée et la plus indécente du livre, cette scène du viol (presque) de Gwynplaine (l’Homme qui rit) par cette duchesse Josiane, que l’auteur, l’ennemi des duchesses, a bâtie à la chaux et au sable de la plus audacieuse corruption. […] Ce furent à leur tour les poètes du temps, comme Sannazar et Pontano, les Épigrammatistes et les Renaissants qui imitaient l’ordure antique, les Suétoniens qui voyaient partout des Césars et des vices à la façon romaine, et tous ces ennemis de l’Église qui n’attendaient que Luther pour se faire protestants. […] deux mots puérils, et traînés partout, sur la veste blanche du roi et la couleur du fiacre qui le porta à l’échafaud. […] Quoique le sujet du livre en question protège, exalte et grandisse à plus d’une place, comme je l’ai dit déjà, le talent de Victor Hugo, le sujet n’en reste pas moins très au-dessus de son génie, et la preuve, c’est que Victor Hugo l’affaiblit, toujours et partout, quand il y mêle ses inventions.

262. (1837) Lettres sur les écrivains français pp. -167

Personne ne s’entend mieux à parler de soi, toujours et partout. […] Karr du soupçon de se moquer ainsi partout de lui-même, au profit de je ne sais quelle manie de popularité. […] Karr de répéter partout et jusqu’à satiété ses bons mots et ses fines plaisanteries. […] Alexandre Dumas est l’homme de France qui connaît le plus de monde ; il a des amis partout. […] Jal se trouvait avoir un nom fourré partout.

263. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

Désormais en tout et partout la Vérité ou le néant, voilà l’alternative. […] Partout la même préoccupation de la simplification des moyens et de la vulgarisation de l’art. Partout, aux peintures cauchemardantes et désespérées, succède l’affirmation de la vie humaine ; partout l’étude positive et crue des trivialités, comme vous dites, qui avaient été repoussées jusqu’ici comme indignes ; partout l’art descend, ce qui, remarquez-le bien, ne veut pas dire qu’il s’abaisse ; l’art descend au niveau de nos préoccupations journalières portant ; et recherchant la vie, là où jusqu’ici il semblait si souvent prendre à tâche de ne porter et de ne rechercher que la mort. Partout au culte du beau langage, du grand style et du balancement de la phrase, se substitue le culte du fait et de l’idée. Partout enfin, dans la mesure du talent des artistes, l’art aspire à vivre de notre vie réelle, à revêtir nos costumes et nos passions réels, à se mettre, en un mot, à l’unisson des pulsations réelles de notre cœur.

264. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

Pour le latin « Monsieur le Ministre, « Émus de l’infériorité croissante de la culture générale, que d’excellents esprits viennent de mettre en si vive lumière, et convaincus comme eux qu’il existe une étroite relation entre l’étude des langues anciennes et la persistance du génie français, nous avons l’honneur d’attirer votre bienveillante attention sur une révision nécessaire des programmes de l’enseignement secondaire, élaborés en 1902, lesquels ont à peu près aboli l’étude du latin dans les lycées, et en même temps affaibli déplorablement l’étude du français. » Tel est le texte de la pétition, dont Les Marges avaient pris l’initiative, et que l’on a signée un peu partout. […] Il disait à la bourgeoisie : « Je voterai pour l’enseignement moderne, parce que la suppression de la culture classique, à laquelle, personnellement, je suis de tout mon cœur attaché, vous portera le coup le plus funeste. » Et il concluait en ces termes : « Lorsqu’il y a cinquante ou soixante ans, sous Louis-Philippe, la bourgeoisie est arrivée au pouvoir, au gouvernement, aux affaires, elle avait compris alors que le prestige de la seule richesse ne lui suffirait pas, et elle essayait, en appelant à sa tête des hommes imprégnés de la culture antique, en la défendant partout, d’ajouter pour elle au prestige grossier de l’argent le prestige d’une noble culture. […] La réforme de l’orthographe a été une question politique… Seulement ce sont nos gouvernants — et non pas nous — qui mettent partout la politique, et la plus basse. […] Mais la force romaine, le bras romain, la langue et la pratique romaines sont aussi partout : ç’a été le grand instrument de propagation et de culture. » S’il existe un parlement et des ministres qui aient le loisir de songer à ces choses, qu’ils le prouvent.

265. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Son caractère, ses désirs, ses idées seraient certainement plus ou moins heurtés et froissés partout, mais ils pourraient l’être moins qu’ils ne le sont. […] Il est porté à s’abandonner à ces influences complexes qui le sollicitent de partout et qui sont la société concentrée et résumée dans son âme. […] Dès lors, n’y a-t-il pas une attitude générale qui se propose à l’homme et qui résume l’ensemble de ses rapports avec, le monde social et le monde cosmique, avec lui-même, les contradictions et les harmonies qu’il trouve partout, en lui comme en dehors de lui ? […] Il faut partout une division du travail et une différenciation des fonctions.

266. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

Pour peu qu’on ouvre le livre de ce philosophe, fasciné par un fantôme historique tout autant qu’aurait pu l’être un poète, ce fou sublime de Byron, par exemple, qui s’abîmait dans la contemplation magnétique d’une boucle de cheveux blonds de Lucrèce Borgia, ce qu’on cherchera d’abord, c’est le motif même d’un pareil livre, la passion qui a dû l’écrire, et qui devrait partout s’y retrouver. […] Aussi, partout ailleurs que dans l’exposition et la discussion philosophique, où il a ce que Mirabeau disait l’éloquence de la chose, le célèbre professeur n’est-il qu’un écrivain d’imitation, de pastiche réussi, qui se donne de grands airs, mais qui n’ose prendre la langue de son siècle, parce qu’elle est trouble encore, malgré tout ce que son siècle y a déversé de puissant ! […] Cousin, dans ce livre fadement exagéré sur les charmes de la duchesse de Chevreuse, nous fait l’effet de cette gravure qui est partout chez les coiffeurs et qui représente Héro, versant sur la tête de Léandre un pot de parfums. […] Quand Richelieu allait jusqu’à la hache pour en finir avec le mal et le couper dans sa racine, Anne soutenait une noblesse indocile qui cherchait partout, même dans le lit du roi, le point d’appui d’une grande révolte.

267. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre IV. Conclusions » pp. 183-231

D’autres littératures pourraient encore servir de démonstration ou de contre-épreuve ; si la loi que j’ai formulée répond à une réalité sociale et psychologique, à une nécessité logique, elle doit se retrouver partout, mais souvent contrariée par d’autres forces. […] Pour donner une idée, même lointaine, de cette synthèse, nous sommes forcés de commencer par l’analyse ; l’analyse est toujours brutale ; elle scinde ce que la vie unit ; elle établit des catégories factices ; elle énumère, l’un après l’autre, des éléments qui sont partout coexistants. […] Réciproquement : partout où le principe d’une liberté grandissante a été étouffé (par exemple en Allemagne, en Espagne), la vie nationale s’est arrêtée. […] Nullement ; elles sont au contraire dans tous les éléments de leur époque et de leur milieu qu’ils ont subis sans leur imposer l’empreinte de leur personnalité, dans tel cliché du vocabulaire ou de la syntaxe, dans telle forme purement traditionnelle, dans tel préjugé local docilement obéi, dans tel principe de l’époque aveuglément accepté ; en un mot, partout où la forme, — dans le sens profond du mot, — n’est pas parfaitement adéquate à la personnalité ; par contre ces mêmes artistes demeurent vivants jusque dans leurs erreurs, quand elles sont personnelles.

268. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

Dans la tradition moderne, et entre ses instincts nationaux maintenus à degrés divers, il n’est pas de vérité plus sentie que l’aversion pour la barbarie mahométane, et ce besoin de l’éloigner de l’Europe, partout attesté dans l’histoire. […] L’art de ce poëte est partout exquis et brillant ; mais son charme est surtout religieux. […] Ajoutons-le : dans cette inégale mais forte civilisation du seizième siècle, où la vie était partout et s’accroissait par la division même, une ville de province, justement citée aujourd’hui pour son École de cavalerie, avait alors son éditeur de Pindare, Jean Benoist, docteur en médecine, professeur de langue grecque à l’Académie royale de Saumur. […] La science partout éveillait l’émulation, et pouvait parfois tromperie talent sur le moment venu d’oser en poésie, et sur l’audace permise à notre langue.

269. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Alletz, Édouard (1798-1850) »

Frédéric Deville De bonne heure, son goût naturel le portait vers les études morales et religieuses ; il s’essaya, de bonne heure aussi, dans cette double voie, et, soit qu’il ait écrit en prose, soit qu’il ait demandé à la poésie ses inspirations, partout et toujours il a conservé intact le caractère qu’il avait revêtu, le caractère d’écrivain moraliste.

270. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Valentine (1832) »

Mais, de là au don créateur et magique des Le Sage, des Fielding, des Prévost, des Walter Scott, il y a évidemment une distance infinie : d’un côté, le fait réel, le cas particulier, l’historien encore rempli de lui-même, qui intéresse par une reproduction animée et fidèle ; de l’autre la diversité des combinaisons, la fécondité des sentiments, tout un monde de créatures pour les revêtir et les exprimer ; la réalité à la fois transformée et partout reconnaissable ; l’univers, en un mot, et l’homme, aux mains de l’art et du génie. […] Je n’ai point pardonné non plus à Valentine, dans la matinée qui suit la scène du cabinet, d’offrir à M. de Lansac de le suivre partout où il le voudra.

271. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — II. La versification, et la rime. » pp. 257-274

On s’appuya de l’exemple de ce beau génie pour la faire employer partout, & la rendre désormais le seul langage d’Apollon. […] Il mettoit partout de l’esprit au lieu d’images, de l’analyse au lieu d’imagination, de la sécheresse & de la froideur au lieu d’embonpoint, de véhémence & d’un feu divin.

272. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre neuvième. »

Le mensonge est vil partout, et partout il est destructeur de toute société.

273. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Joseph de Maistre »

Telle était l’idée de Joseph de Maistre, que vous retrouvez sous toutes les pages qu’il a écrites ici ou là : ici plus profondément, plus splendidement, — mais en appuyant moins là-bas, mais partout ; — cette idée est le sol, le sous-sol et la superficie de toutes ses théories politiques, de toutes ses dissertations d’histoire. […] Dans un pays comme la Russie, où la richesse est plus nécessaire que partout ailleurs, même qu’en Angleterre, Joseph de Maistre ne pouvait payer un secrétaire, et le plus souvent n’avait pas assez d’argent pour prendre une voiture. « On me dit, — écrit-il avec cette philosophie que j’appelle, moi, une sainteté, et qui fut toujours si piquante d’esprit quand elle était le plus touchante de résignation, — on me dit que j’ai de l’esprit, mais je ne puis cependant pas faire avec de l’esprit une berline ! 

274. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jules Girard » pp. 327-340

Et voilà que nous nous retrouvons une cinquantième fois devant une vieille poétique abattue, qu’on n’oserait peut-être pas relever en littérature, mais qu’on croit pouvoir très bien relever en histoire, et qui est vraie partout, ou qui ne l’est pas plus en histoire qu’en littérature ! […] Aussi les invoque-t-il pour expliquer à fond tout son Thucydide, et en cela a-t-il raison encore, comme il l’a eue déjà en disant que Thucydide n’était que l’expression du génie grec… Partout, en effet, à toutes les objections qu’on a faites ou qu’on pourrait faire contre Thucydide et la beauté littéraire de son histoire, M. 

275. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Henri de L’Épinois » pp. 83-97

À coup sûr, un grand historien peut sortir de l’École des Chartes comme de partout, mais pas plus que de partout, et si M. de L’Épinois n’est pas cet historien-là, il est au moins un homme qui entend profondément et consciencieusement l’Histoire, quand il ne la domine pas.

276. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Félix Rocquain » pp. 229-242

on en intitulait une, entre toutes, L’Esprit révolutionnaire avant la Révolution, la tête qui la pensait, cette histoire, et qui, du propre aveu de son titre, se préoccupait plus de l’esprit révolutionnaire que de la Révolution elle-même, devait le chercher et le prendre partout où il fut. […] qui est partout !

277. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « A. Grenier » pp. 263-276

Il va partout, ce reporter d’une société qu’on ne connaît que par le sommet et qu’il faut éclairer à la base. Il va aux écoles, aux assemblées, aux conférences, aux thermopoles, qui étaient des cafés (sans café) et des lieux publics ; il va partout, enfin, où l’histoire des Universités, des Instituts et des enseignements officiels n’a jamais mis un pied, qu’elle respecte trop pour l’y risquer… Et de tout ce qu’il regarde et recueille, en mille citations étonnantes et en mille anecdotes inouïes, ce qui se dégage uniquement, c’est ce honteux et misérable résultat que ce monde de l’antiquité, traité de sublime, a péri moins par l’épée des Barbares que par les phrases et sous les phrases de la plus bavarde des civilisations.

278. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. J. Autran. Laboureurs et Soldats, — Milianah. »

Et plus tard, sous le sourire de Don Juan, sous la seule contraction d’ironie qui ait passé par ces lèvres pâles et si fièrement désespérées, on retrouve aussi le sérieux profond et la rêverie de celui qui partout n’est que Childe-Harold. […] Partout là l’auteur de Laboureurs et Soldats est traité d’écrivain viril, la plus noble qualification, selon nous, qu’on puisse donner à un homme de lettres dans ce temps, si tristement émasculé.

279. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Lamartine »

On ne s’étonne plus de la grâce de bucolique qui, partout, dans ses œuvres poétiques, se mêle sans cesse au lyrisme grandiose de Lamartine, quand on voit de quel nid était sorti le rossignol qui chantait inextinguiblement en lui, quand l’aigle, qui y était aussi, ne criait pas… La première impression que reçut son génie, cette première impression dont nous restons marqués à jamais, fut l’impression de la maison de son père, où il était né parmi les pasteurs, comme Virgile, et les vendangeurs du Mâconnais. […] Il y a Lamartine, et partout où il est et où il se porte, c’est Lamartine tout entier.

280. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Eugène Sue » pp. 16-26

Quand il écrivit ses Mémoires de Mathilde, ce fut à la reprise dans l’opinion du grand livre des Liaisons dangereuses, et partout il fut écrasé par les modèles qu’il avait choisis. […] Eugène Sue a une éblouissante palette, ce qui ne suffit pas pour être un grand peintre, — la mettait partout, jusque dans sa livrée.

281. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVII. Des panégyriques ou éloges adressés à Louis XIII, au cardinal de Richelieu, et au cardinal Mazarin. »

Ils l’ont peint comme un esprit souple et puissant, qui, malgré les ennemis et les rivaux, parvint aux premières places, et s’y soutint malgré les factions ; qui opposait sans cesse le génie à la haine, et l’activité aux complots ; qui, environné de ses ennemis, qu’il fallait combattre, avait en même temps les yeux ouverts sur tous les peuples ; qui saisissait d’un coup d’œil la marche des États, les intérêts des rois, les intérêts cachés des ministres, les jalousies sourdes ; qui dirigeait tous les événements par les passions ; qui, par des voies différentes, marchant toujours au même but, distribuait à son gré le mouvez ment ou le repos, calmait la France et bouleversait l’Europe ; qui, dans son grand projet de combattre l’Autriche, sut opposer la Hollande à l’Espagne, la Suède à l’Empire, l’Allemagne à l’Allemagne, et l’Italie à l’Italie ; qui, enfin, achetait partout des alliés, des généraux et des armées, et soudoyait, d’un bout de l’Europe à l’autre, la haine et l’intérêt.  […] Il fit une dédicace au même homme qu’il avait outragé, et substitua partout l’éloge à la satire, trouvant le moyen de s’avilir à la fois par tous les deux.

282. (1773) Essai sur les éloges « Morceaux retranchés à la censure dans l’Essai sur les éloges. »

Partout on ne voyait que des instruments honteux de supplice, et des effigies de ceux qui avaient échappé à la mort par l’exil. […] Ainsi, partout il déployait avec une inflexible hauteur les armes du despotisme ; c’est ainsi qu’il vint à bout de tout abaisser.

283. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XII. »

À son atteinte, toutes les choses de la nature ont frissonné ; et par lui tu établis le niveau de la raison commune qui réside dans tout, se mêlant aux grandes et aux petites intelligences, raison si puissante qui est le suprême roi partout. […] « Ainsi, tu as partout harmonisé le bien au mal, de sorte qu’il existe pour tous une seule loi, toujours la même, que désertent par leur fuite tous ceux des mortels qui deviennent méchants ; infortunés qui, désirant toujours la possession des biens, n’aperçoivent pas la loi générale de Dieu, n’écoutent pas cette loi, à laquelle s’ils obéissaient, ils auraient, avec l’intelligence, le bonheur et la vie !

284. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 168-169

On y reconnoît partout la même tournure d’esprit, le même caractere, & il falloit que chaque personnage y eût le sien particulier.

285. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 389

L’illustre Evêque de Meaux n’avoit certainement en vue que le fond du sujet & les mœurs des personnages ; car il étoit trop connoisseur pour l’admirer du côté du style, qui est partout foible & prosaïque.

286. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Chardin  » p. 143

Quand on a vu un de ses tableaux, on ne s’y trompe plus ; on le reconnaît partout.

287. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

L’ à-peu-près et le pêle-mêle se glissent partout. […] Comme elle aspirait à la notoriété, elle ne tarda pas à regretter l’absence de la liberté d’écrire et s’efforça de la rejoindre partout où elle eut l’espoir de la trouver. […] Toujours et partout on a plus ou moins à compter avec elles, avec les entêtements ou avec les rêves, avec un faux imprévu qui déjoue. […] Les barrières ayant été renversées et les hauteurs rasées, tout le monde est en plaine, l’air du dehors excite, l’examen pénètre partout ; le pour et le contre sollicitent chaque matin ; à ce jeu, l’esprit s’aiguise vite, en même temps que les convictions s’épuisent. […] Ils en trouvent d’étranges parfois, car ils en prennent partout, et chez le voisin et jusque chez l’ancien adversaire.

288. (1925) La fin de l’art

Ce n’était pas encore ridicule, l’uniforme militaire était partout. […] Le microbe de la contagion est partout. […] D’ailleurs, maintenant que l’on voit la contagion partout, on s’écarte volontiers de l’homme enrhumé. […] Partout, c’est de même : il y a deux voies pour aller dans le Midi, la Bourgogne et le Bourbonnais. […] C’est dire que partout Ardouin-Dumazet a des admirateurs et des fidèles.

289. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Des livres classiques. » p. 533

Les livres classiques sont presque tous à faire ; faute de ce secours, partout on étudie beaucoup et avec peine, l’on sait peu et l’on sait mal.

290. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Le Bel » p. 171

Il a le scorbut ou les humeurs froides ; j’en appelle à Bouvart, mais vous me direz que Bouvart voit cette maladie partout.

291. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre III. De la signification de la vie. L’ordre de la nature et la forme de l’intelligence. »

Il est présent partout où son influence se fait sentir. […] De là l’idée d’un ordre général de la nature, le même partout, planant à la fois sur la vie et sur la matière. […] Mais supposons que l’ordre soit partout de même espèce, et comporte simplement des degrés, qui aillent du géométrique au vital. […] Mais, partout ailleurs que chez l’homme, la conscience s’est laissé prendre au filet dont elle voulait traverser les mailles. […] Partout ailleurs que chez l’homme, la conscience s’est vu acculer à une impasse ; avec l’homme seul elle a poursuivi son chemin.

292. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 275-276

Tour à tour Géometre, Astronome, Naturaliste, Géographe, Moraliste, il est partout Ecrivain instructif & amusant, parce que les leçons plaisent toujours quand elles n’ont point l’air de leçons, & quand on a l’art d’éclairer l’esprit, sans le rebuter par un ton dogmatique.

293. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

La Fare rend pourtant cette justice au cardinal de Richelieu « qu’avec cette jalousie qu’il avait de l’autorité royale et de la sienne qu’il en croyait inséparable, il aima et récompensa la vertu partout où elle ne lui fut pas contraire, et employa volontiers les gens de mérite ». […] Quand on a eu le plaisir de vivre avec vous, toutes les autres compagnies paraissent fort insipides ; je ne trouve presque partout où je vais que de languissantes conversations et de froides plaisanteries, bien éloignées de ce sel que répandait la Grèce, qui vous rend la terreur des sots. […] Il dormait partout les dernières années de sa vie.

294. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Une Réception Académique en 1694, d’après Dangeau (tome V) » pp. 333-350

Enfin il occupait de lui les autres partout où il paraissait, et c’était ce qui le flattait le plus. […] Cette éloquence dont nous sommes encore tout éblouis, et dont vous avez créé le modèle, vous accompagne partout. […] Partout vous faites voir d’heureuses applications de l’Écriture, de doctes citations des pères ; vous les possédez tous, et s’il y en a quelqu’un qui se présente à vous plus ordinairement que les autres (Tertullien sans doute), c’est par la sympathie des imaginations sublimes que la nature n’accorde qu’à ses favoris.

295. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

Le roman, qui n’a été ainsi désigné qu’au Moyen-Âge et d’un nom qui sent la décadence ; que les Grecs avaient oublié de nommer, et qui ne faisait pas d’abord un genre bien à part, était partout chez eux. […] Il est naturel par le fond des choses et dans le courant du récit, sinon dans le détail de l’expression ; il est facile désormais, grâce à son traducteur ; il est agréable, excepté dans le dernier livre ; il est instructif partout sur le chapitre des mœurs et usages. […] L’atmosphère générale des esprits est, en quelque sorte, assainie dans ses grands courants, tandis qu’en ce temps-là les foyers de contagion étaient partout existants, rapprochés, échauffés, et l’on ne faisait guère que passer de l’un à l’autre.

296. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

La conquête de l’Angleterre par les Normands (1066) est la dernière en date des grandes invasions territoriales qui ont précédé partout le Moyen-Age, et le Moyen-Age était déjà commencé partout ailleurs quand elle eut lieu ; la langue, et partant la littérature anglaise qui en devait sortir, se trouva ainsi en retard sur les autres littératures du continent, particulièrement sur la française : elle s’inspira, elle s’imprégna d’abord de celle-ci, et elle n’acquit qu’avec le temps son juste tempérament, sa saveur propre. […] C’est le joyeux forestier en révolte et le roi des braconniers Robin Hood, le vaillant compère, qui n’est jamais plus en gaieté, ni plus d’humeur à jouer de l’épée ou du bâton que quand le taillis est brillant et que l’herbe est haute : « Robin Hood, c’est le héros national ; saxon d’abord et armé en guerre contre les gens de loi, « contre les évêques et archevêques » ;… généreux de plus, et donnant à un pauvre chevalier ruiné des habits, un cheval et de l’argent pour racheter sa terre engagée à un abbé rapace ; compatissant d’ailleurs et bon envers le pauvre monde, recommandant à ses gens de ne pas faire de mal aux yeomen ni aux laboureurs ; mais par-dessus tout hasardeux, hardi, fier, allant tirer de l’arc sous les yeux du shérif et à sa barbe, et prompt, aux coups, soit pour les embourser, soit pour les rendre. » Partout, d’un bout à l’autre, dans tout ce livre de M. 

297. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SOUZA » pp. 42-61

Ce qui manque, c’est du calme et de la fraîcheur, c’est quelque belle eau pure qui guérisse nos palais échauffés. » Cette qualité de fraîcheur et de délicatesse, cette limpidité dans l’émotion, cette sobriété dans la parole, ces nuances adoucies et reposées, en disparaissant presque partout de la vie actuelle et des œuvres d’imagination qui s’y produisent, deviennent d’autant plus précieuses là où on les rencontre en arrière, et dans les ouvrages aimables qui en sont les derniers reflets. […] Marie-Joseph Chénier a écrit sur Mme de Souza, avec la précision élégante qui le caractérise, quelques lignes d’éloges applicables particulièrement à Eugène : « Ces jolis romans, dit-il, n’offrent pas, il est vrai, le développement des grandes passions ; on n’y doit pas chercher non plus l’étude approfondie des travers de l’espèce humaine ; on est sûr au moins d’y trouver partout des aperçus très-fins sur la société, des tableaux vrais et bien terminés, un style orné avec mesure, la correction d’un bon livre et l’aisance d’une conversation fleurie…, l’esprit qui ne dit rien de vulgaire, et le goût qui ne dit rien de trop. » Mais indépendamment de ces louanges générales, qui appartiennent à toute une classe de maîtres, il faut dire d’Eugène de Rothelin qu’il peint le côté d’un siècle, un côté brillant, chaste, poétique, qu’on n’était guère habitué à y reconnaître. […] Dans Eugénie et Mathilde, Mme de Souza s’est épanchée personnellement plus peut-être que partout ailleurs.

298. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre II. Les privilèges. »

. — Partout d’ailleurs, sa qualité l’en a préservé, lui, son château et les dépendances de son château ; la taille ne l’atteint que dans ses fermiers. […] Un évêque, un abbé, un chapitre, une abbesse a le sien, comme un seigneur laïque ; car jadis le monastère et l’Église ont été de petits États, comme le comté et le duché. — Intacte de l’autre côté du Rhin, presque ruinée en France, la bâtisse féodale laisse partout apercevoir le même plan. […] À Remiremont, le chapitre noble des chanoinesses a « la basse, haute et moyenne justice dans cinquante-deux bans de seigneuries », présente à soixante-quinze cures, confère dix canonicats mâles, nomme dans la ville les officiers municipaux, outre cela trois tribunaux de première instance et d’appel et partout les officiers de gruerie.

299. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

Cela se voit partout, même, il paraît, dans la politique  Il y en a qui gardent le goût des femmes, voire des petites femmes, jusque dans un âge avancé ? […] On conçoit à la rigueur qu’à une époque où tout était chose d’Etat, où s’achevait l’unité de la France, où toute son histoire aboutissait enfin à la monarchie absolue, où partout, dans les mœurs, dans les manières, dans la religion, dans les lettres, triomphait le même esprit de discipline et d’autorité, un cardinal ait eu l’idée de préposer une compagnie de lettrés à la fixation et à la conservation de la langue. […] Cet artifice détonne étrangement dans des livres où le souci de la vérité est, partout ailleurs, si évident.

300. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Pensées, essais, maximes, et correspondance de M. Joubert. (2 vol.) » pp. 159-178

Il exige de l’agrément et une certaine aménité, même dans les sujets austères ; il réclame du charme partout, même dans la profondeur : « Il faut porter du charme dans ce qu’on approfondit, et faire entrer dans ces cavernes sombres, où l’on n’a pénétré que depuis peu, la pure et ancienne clarté des siècles moins instruits, mais plus lumineux que le nôtre. » Ces mots de lumineux et de lumière reviennent fréquemment chez lui et trahissent cette nature ailée, amie du ciel et des hauteurs. […] Il était « de ces esprits méditatifs et difficiles qui sont distraits sans cesse de leur œuvre par des perspectives immenses et les lointains du beau céleste dont ils voudraient mettre partout quelque image ou quelque rayon ». […] Chateaubriand prend pour matière le ciel, la terre et les enfers : Saint-Pierre semble choisir ce qu’il y a de plus pur et de plus riche dans la langue : Chateaubriand prend partout, même dans les littératures vicieuses, mais il opère une vraie transmutation, et son style ressemble à ce fameux métal qui, dans l’incendie de Corinthe, s’était formé du mélange de tous les autres métaux.

301. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. » pp. 432-452

Partout se révèle et perce un amour-propre presque puéril, qui en toutes choses se préfère naïvement aux autres, qui se donne le beau rôle en le leur refusant, qui se pose en victime et tranche du généreux. […] Ce qu’il a fait là littérairement, il l’a dû faire presque partout pour ces époques anciennes ; il a substitué plus ou moins les sentiments qu’il se donnait dans le moment où il écrivait, à ceux qu’il avait réellement au moment qu’il raconte. […] C’est de lui que viennent comme de leur source les beautés et les défauts que nous retrouvons partout autour de nous, et chez ceux même que nous admirons le plus : il a ouvert la double porte par où sont entrés en foule les bons et les mauvais songes.

302. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Rulhière. » pp. 567-586

Rulhière, sous une enveloppe un peu épaisse et un peu forte, était un homme fin, adroit, circonspect et mesuré, néanmoins beaucoup plus homme de lettres au fond qu’il ne voulait le paraître, cherchant partout autour de lui des sujets d’épigrammes, de comédie, d’histoire, et s’y appliquant ensuite sous main, à loisir, avec lenteur, sans s’exposer au public, en se bornant à captiver la société de son temps, et en se ménageant une perspective lointaine vers la postérité. […] Domergue, me rend perplexe à cet égard. » — « Comme il vous plaira, monsieur, comme il vous plaira ; bonsoir. » Toute cette scène est très agréablement contée ; elle fait plus d’honneur pourtant à l’esprit de Rulhière qu’à son cœur, et lui-même il nous apparaît en tout ceci comme un homme qui cherche partout trop visiblement des traits et des embellissements pour l’ouvrage qu’il compose. […] Mais lorsqu’en lisant Rulhière on peut se détacher assez de l’intérêt profond des choses pour n’observer que la structure du discours, on est partout frappé de la riche variété des nombres qui concourent à l’harmonie générale.

303. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — I. » pp. 84-104

C’est ainsi que partout il prend et garde sa place : au bivouac, en Espagne, il s’isole et ne permet point la familiarité, sauf à offrir d’échanger un coup de sabre avec l’indiscret qui le dérangera ; et là où il n’a plus de sabre, dans les prisons de Toulouse ou de Perpignan, il tient également à distance et en respect la compagnie assez mêlée qui s’y rencontre. Partout où il est, le cercle se fait naturellement autour de lui. […] Partout et dans tous les temps, ce sont les besoins qui ont fait les conventions appelées principes, et toujours les principes se sont tus devant les besoins.

304. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — I. » pp. 322-340

Envoyé à Rome pendant l’occupation de 1799, témoin de cette émulation de rapines que le gouvernement du Directoire propageait partout dans les républiques formées à son image, il écrit à son ami Chlewaski qu’il a laissé à Toulouse : Dites à ceux qui veulent voir Rome qu’ils se hâtent, car chaque jour le fer du soldat et la serre des agents français flétrissent ses beautés naturelles et la dépouillent de sa parure… Les monuments de Rome ne sont guère mieux traités que le peuple. […] En voyant ces rochers, partout couronnés de myrte et d’aloès, et ces palmiers dans les vallées, vous vous croyez au bord du Gange ou sur le Nil, hors qu’il n’y a ni pyramides, ni éléphants ; mais les buffles en tiennent lieu et figurent fort bien parmi les végétaux africains, avec le teint des habitants qui n’est pas non plus de notre monde… Ce n’est pas sans raison qu’on a nommé ceci l’Inde de l’Italie. […] On peut dire qu’il n’avait embrassé ni senti à aucun instant l’esprit et le génie de cette grande époque ; le côté héroïque comme le côté social lui avait échappé ; il n’y avait vu partout que les excès et les désordres, les bassesses ou les ridicules.

305. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

Cela n’est pas sa faute, à cet historien qui n’oublie rien et qui pénètre tout, si l’histoire lui manque sous les pieds, si son cabestan n’enlève que des pailles au lieu d’arracher des montagnes, et si toute cette histoire de la comédie, dont l’origine est religieuse, peut s’écrire partout avec deux mots : des prêtres sur lesquels se sont entés des baladins ! […] Il n’y a, au fond, dans toute cette histoire, reprise en sous-œuvre par du Méril, que la vieille histoire connue, qui peut s’écrire en quelques mots et qu’il a mise en cinq cents pages, — si brillantes de talent, du reste, qu’il semble ne pas avoir bavardé, — de la comédie, sortant partout de la danse, sa plus profonde racine ; dérivant, en peu de temps, du langage mimique au langage religieux et processionnel ; s’imprégnant plus tard de politique dans des sociétés fortement politiques comme les sociétés grecques, et vivant ainsi jusqu’au moment où l’imagination reconquiert ses droits et crée une autre comédie, la comédie désintéressée de tout ce qui n’est pas l’observation de la nature humaine… Et, vous le voyez ! […] C’est là qu’on sentait d’abord le philosophe, qu’on allait retrouver partout, faisant précéder, comme tout esprit véritablement synthétique, d’une métaphysique son histoire.

306. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

Or, à l’exception de quelques poètes — exception partout — emportés par cette belle démence dont parle Shakespeare, et dont le génie traîne la volonté après soi, comme le cheval sauvage traîna Brunehault, la littérature désintéressée a toujours fort peu existé en Angleterre, dans ce pays de l’intérêt dont Bentham a théorisé les pratiques ; et Macaulay eut l’ambition de son pays. […] … Ce whigisme, qui infecte tout de son poison… innocent, est si insupportable dans Macaulay, que ceux-là — et nous sommes du nombre — qui aiment l’originalité partout et même en Histoire, quoiqu’elle y soit plus téméraire qu’ailleurs, n’ont aucun plaisir de surprise à voir Macaulay couper Pitt en deux, comme l’enfant de Salomon, et en faire deux Pitt très distincts, — l’un d’avant 1792, qui ressemblerait beaucoup à Fox, un Pitt philanthrope, négrophile, amoureux de liberté, presque un quaker, et l’autre d’après 1792, le détestable, celui-là, selon Macaulay, l’esprit brouillé et brouillon, l’emporté, le tory des coalitions ! […] Or, s’il n’eût pas gagné à cela d’être Lord d’Angleterre, il n’en eût pas moins été partout Lord de la Critique, puisque « Lord » signifie « Seigneur ».

307. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

Mais comme il est très jeune, qu’il a bien peu observé et qu’il a plus de lecture que d’expérience, son jugement ne diffère point de ceux qu’on trouve partout. […] J’ai le regret de l’apprendre à ceux qui verraient là une diminution du pittoresque : l’accent régional est en décroissance partout. […] Mais la nouveauté de tels romans, je le répète, serait due à d’autres causes plus profondes, et d’abord à cette constatation que la vie humaine est partout digne du même intérêt, capable de provoquer les mêmes émotions, les mêmes colères, les mêmes admirations.

308. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

Partout ailleurs nous ne faisons que deviner la force : ici nous apercevons la force ; partout ailleurs, quand deux faits s’accompagnent, nous n’observons que les deux faits et leur concours ; ici, par une exception merveilleuse, nous découvrons encore « ce je ne sais quoi qui s’applique aux corps, pour les mouvoir, les pousser, « les attirer20 », élément ou ingrédient particulier, vraiment « inexplicable ou ineffable, lorsqu’on veut chercher des exemples et des moyens d’explications hors du fait même de la conscience. » Il n’y a point d’autre vue semblable ; et quand vous concevez d’autres forces, c’est d’après la vôtre et sur ce modèle que vous en formez la notion. […] Partout, au moral et au physique, vous ne commandez qu’à des intermédiaires.

309. (1858) Du roman et du théâtre contemporains et de leur influence sur les mœurs (2e éd.)

C’est partout, on le voit, la même pensée, c’est-à-dire le même mensonge à la vérité, la même calomnie contre la société. […] Partout injustice, oppression, rapacité. […] Partout, et surtout à Paris, les théâtres se sont multipliés ; le nombre des spectacles a augmenté. […] En un temps où le journal entrait partout, il est entré avec le journal là où le roman ne s’était jamais introduit. […] Le doute était partout ; les anciennes croyances étaient tombées en poussière.

310. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Sculpture, Vassié, Pajou, Mignot » p. 104

Il y a partout une grande mollesse de chair ; et par-ci par-là des vérités de détail qui font croire que cet artiste ne s’épargne pas y les modèles.

311. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Note »

Il se dessine dans Mirabeau, dans Vergniaud et dans bien d’autres personnages ; le profil de Jocelyn-tribun se projette partout[…] Jocelyn se profile partout ! 

312. (1799) Dialogue entre la Poésie et la Philosophie [posth.]

On dit et on nous répète partout, que le propre du poète est de peindre, que la poésie est une peinture parlante, et d’après cette définition, il n’y a point au bas de l’Hélicon de barbouilleur qui ne se croie un Raphaël : je demanderai d’abord ce qu’on entend par peindre ; c’est sans doute représenter l’objet à l’imagination, avec la même vivacité que si on l’avait devant les yeux. […] C’est là le grand mérite de Racine, la cause du charme qu’on éprouve en le lisant ; il a fort enrichi la langue, non par des expressions nouvelles, qu’il faut toujours hasarder très sobrement, mais par l’art heureux avec lequel il sait réunir ensemble des expressions connues, pour donner à son vers ou plus de force ou plus de grâce ; par la finesse avec laquelle il sait relever une expression commune, en y joignant une expression noble ; enfin par la simplicité unie partout à la noblesse, à la facilité et à l’harmonie.

313. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre X. Mme A. Craven »

J’insiste, parce que c’est une thèse, partout posée par moi, que je ne cesserai de poser que quand il n’y aura plus un seul bas-bleu dans ce monde — et ce ne sera pas demain !  […] gémissements et larmoiements partout, quand ce n’est pas amour et scrupule !

314. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Mathilde de Toscane »

Renée a pris le pontife partout où il est le pontife. […] L’Eglise romaine a mis Grégoire au rang des saints ; partout l’idée de sa sainteté prévalut dans le peuple après sa mort.

315. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Louis XIV. Quinze ans de règne »

L’acceptation de ce testament qui souleva toute l’Europe contre Louis XIV, et qu’à sa place aucun de ses ennemis n’aurait rejeté, produisit immédiatement cette guerre de coalition si acharnée et si funeste qui se fit partout : en Allemagne, en Flandre, en Italie, et plus tard enfin en Espagne, et dans laquelle la France opposa à ces fléaux incarnés contre nous : Guillaume III, Marlborough, le prince Eugène, le duc de Savoie, le regain magnifique encore de ses grands hommes : Vendôme, Villars, Berwick et Catinat. […] Confusion et déplacement funestes, qui doivent troubler la limpidité du courant historique pour des siècles, car, si les hommes se trompent sur la nature des fautes qui ont produit les abaissements ou les calamités d’une époque, ils ne se trompent pas dans cet instinct qu’ils ont gardé depuis la Chute et qui leur fait mettre toujours des fautes partout où il y a du malheur !

316. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Paix et la Trêve de Dieu »

Sans cesse et partout, à côté de la force militaire des grands féodaux, il aurait vu l’autorité des faibles coalisés dans la prière et prêtant le refrain unanime de leurs clochers à la parole désarmée de la houlette épiscopale. […] dressa la chevalerie à la guerre chrétienne, acheva par les cathédrales le mouvement commencé par les châteaux forts, et enfin mit ses cent bras de Briarée partout, jusque dans les décisions de l’Église, qui établirent la Trêve de Dieu, mais qui l’établirent… avec des lances !

317. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de la Révolution » pp. 73-87

… Et voilà pourquoi, ici, — comme toujours et partout, — la question morale domine la question littéraire. […] Quant à l’historien de saint Dominique, le faux romancier de Marie-Madeleine, et l’écrivain, — partout ailleurs que dans ces Conférences d’une si étonnante médiocrité, — ils ont trouvé tous les trois la gloire qui leur convenait eu entrant à l’Académie.

318. (1880) Goethe et Diderot « Introduction »

Elle était chez nous, non pas, comme à présent, dans deux départements, mais partout, et plus forte et plus incontestée qu’elle ne l’est présentement à Strasbourg ou à Metz. […] Mais elle a mis au service de sa gloire sa langue, qu’on entend et qu’on parle partout.

319. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Créqui »

En voyant s’éteindre, elles et leur langage, des femmes comme la marquise de Créqui et les sociétés auxquelles ces femmes appartenaient, l’auteur, trop attique lui-même pour définir l’atticisme, s’est demandé si l’atticisme, cette chose ineffable, mais facile à sentir et qui n’a de grec que le nom, mourait et disparaissait avec elles, et il s’est répondu que tout le temps « qu’il y aura partout une femme spirituelle douée de charme, à côté de l’aïeule souriante et qui n’invoque pas à tout propos son expérience, — (pourquoi pas ?) — une mère avec d’aimables filles qui paraîtront presque ses sœurs, un cercle de jeunes femmes amies honnêtement enjouées… partout où il y aura de l’aisance, de l’instruction, de la culture, des mœurs sans maussaderie avec le désir de plaire », la bonne compagnie recommencera et l’atticisme sortira de ses cendres.

320. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « L’abbé Monnin. Le Curé d’Ars » pp. 345-359

La cloche y sonnait à minuit et l’église s’y ouvrait à cette heure où l’on dort partout, et le confesseur infatigable, ce veilleur des âmes, entrait à l’église, où des foules l’attendaient déjà sous le porche ; car il avait donné le goût et presque la faim de la confession, ce grand Confesseur ! […] En effet, il n’y a que cela qui explique sa vie ; il n’y a que la notion de Notre Seigneur Jésus-Christ telle que nous la portons dans nos âmes, qui puisse expliquer cette espèce de règne (car c’en fut un) d’un prêtre caché au bout du monde, dans sa pauvre petite Bethléem de quelques feux et de quelques âmes, et que les foules, à défaut de mages, sont de partout venues visiter !

321. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Ernest Hello »

C’est enfin, toujours et partout, et essentiellement, le mystique chrétien du livre de l’Homme, des Physionomies de saints, de la Parole de Dieu, qui vit ici sous le conteur et qui dramatise sa pensée immuablement mystique. […] Ces contes religieux, métaphysiques et flambant de mysticité, sans amour terrestre, sans les petites femmes qu’il faut fourrer partout dans ses livres, si l’on veut avoir du succès, sont bien virils et bien relevés pour la génération efféminée et abjecte des esprits modernes.

322. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Marquis Eudes de M*** »

Nous avons fait partie de cette jeune école qui, dans les dix premières années de la Restauration, ramenée à la foi chrétienne par l’étude des de Maistre, des Bonald et des Frayssinous, succédait, non pas à l’école légère et railleuse de Voltaire, morte déjà depuis longtemps, mais à l’école positive et raisonneuse de l’Empire… Pleine d’amour pour la vérité, mais, après tout, fille de son siècle, et pleine aussi d’admiration pour la science, l’école dont nous parlons accueillait avec respect une foi dont elle sentait la grandeur et les bienfaits, mais elle n’en restait pas moins fidèle à la raison, dont elle comprenait l’autorité… La science était déjà venue en aide aux vérités chrétiennes… Cuvier montrait partout les traces du déluge et l’accord parfait des nouvelles découvertes géologiques avec le récit génésiaque. […] Il collationne les traits des voyageurs contemporains les plus distingués, et partout il rencontre, sur toutes les latitudes, cette notion d’esprit si désagréable à la philosophie, l’ennemie née du surnaturel.

323. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Gustave Rousselot  »

l’optimiste halluciné qui annonce le monde nouveau ; Ainsi, l’homme est partout, — partout est la pensée ; L’adorable Espérance à jamais est fixée : Ses ailes sont prises aux fleurs !

324. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Jules de Gères »

S’il y a encore de l’originalité quelque part pour nos esprits aplatis, frottés et usés les uns contre les autres, dans ce temps où l’égalité veut être partout, c’est en province qu’on trouve cette aristocratique originalité. […] Et cependant, à voir partout La feuillaison qui le décore, On eût dit que, vif et debout, L’ormeau resplendissait encore !

325. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Armand Pommier » pp. 267-279

de dire une fois, sous forme d’idées générales, la part qu’il faut faire à cette chose moderne et envahissante qui entre partout et pénètre tout, et monte jusque dans le roman : la Physiologie ! […] Et Dieu sait si je ne fais pas pourtant le plus que je peux la guerre sans trêve et sans relâche au matérialisme, si partout où je l’aperçois je ne frappe pas dru sur son affreuse panse de Falstaff !

326. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXX. De Fléchier. »

Il paraît avoir une connaissance profonde des hommes ; partout il les juge en philosophe, et les peint en orateur. […] Ici Fléchier, comme on l’a dit souvent, paraît au-dessus de lui-même ; il semble que la douleur publique ait donné plus de mouvement et d’activité à son âme ; son style s’échauffe, son imagination s’élève, ses images prennent une teinte de grandeur ; partout son caractère devient imposant.

327. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

Faudrait-il supposer même que, métropole puissante de l’univers, le sillonnant de ses colonies, l’Europe lui ait envoyé avec son sang une vieillesse anticipée, et que, sur ces territoires de l’Amérique septentrionale qui s’étendent sans cesse, dans ces villes qui poussent si vite, notre civilisation n’ait jeté partout, avec son expérience de plusieurs siècles et ses plus récentes inventions, que le bon sens pratique, l’intelligente âpreté au gain, et cette active distribution du travail, cet emploi technique et pressé de la vie, qui laisse si peu de temps aux plaisirs délicats de l’âme et du goût ? […] Que, dans un district de l’Union, dans un des plus opulents et des plus endurcis par l’orgueil du bien-être et de la domination, une humble et pieuse femme ait élevé la voix contre l’usage impie et tout-puissant de l’esclavage domestique ; qu’elle ait attaqué du même coup la loi, le préjugé, l’avarice, la volupté, toutes les passions humaines coalisées sous le sceau de la coutume, du bon sens et de la fierté même d’un peuple libre : eh bien, cette faible voix, qu’anime un saint enthousiasme, a partout retenti ; des millions d’échos la répètent dans le monde américain et la renvoient au-delà des mers ; une ardeur nouvelle d’humanité a enflammé les prêches des temples et les congrégations de fidèles.

328. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Et partout, cette fantastique activité de ruche joyeuse ! […] Quand je suis parti, grand soleil, toilettes claires, voitures découvertes ; partout une joie, un étincellement. […] On l’est à cause de la foule, qui est ici plus serrée et plus curieuse que partout ailleurs. […] Mais vous le rencontrez partout sur votre chemin. […] Partout des figures de connaissance, devenues des figures amies.

329. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIe entretien. Le Lépreux de la cité d’Aoste, par M. Xavier de Maistre » pp. 5-79

C’est, lui dit-il dans sa lettre, la simple histoire d’un pauvre homme malade, relégué du monde par une infirmité contagieuse, qu’on appelle la lèpre, qu’on soignait jadis dans les léproseries qui sont éteintes partout, mais qui subsiste encore aujourd’hui dans nos hautes montagnes. […] L’infortuné est seul partout. […] Lors même que je ne la voyais pas, je trouvais partout des traces de sa présence. […] L’infortuné est seul partout ! […] Nous reprîmes, après un frugal repas, la route de Belley, ne cessant de parler à nos compagnons de cette découverte d’une littérature nouvelle et selon nous supérieure à tout ce que nous avions lu jusque-là, contenue dans quelques pages de l’oncle de notre ami, et nous nous promîmes d’en rechercher partout d’autres pages.

330. (1876) Romanciers contemporains

Victor Hugo, au contraire, est toujours et partout poète. […] Lui est avant tout, toujours et partout poète, et, au fond, nous nous garderons bien de nous en plaindre. […] La mort est partout. […] Partout l’humble surtout lui a tendu la main. […] Là, comme partout, l’auteur est exempt de parti pris.

331. (1908) Après le naturalisme

Vivre, c’est partout, dès l’origine et invinciblement, inévitablement, attirer à soi, s’incorporer le milieu ambiant, tout ce qui autour d’elle vaut pour la Vie. […] La fonction a créé l’organe : le livre partout répandu. […] On la veut complète et partout. […] La réalité on la voulait partout, et il n’était pas superflu en effet qu’on s’en préoccupât. […] La vérité en tout et partout, voilà l’idéal nouveau qui se lève.

332. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviiie entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

Partout le peuple les considérait d’abord bouche béante. […] Sîfrit triomphe toujours et partout de tous. […] Que Dieu éloigne à jamais de lui la pensée de revenir au pays de Tenemark. » « Partout on fit faire place sur le chemin de la belle Kriemhilt. […] Il regarda partout et ne vit personne. […] « On fit cesser partout les tournois.

333. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — J — Jouy, Jules (1855-1897) »

Peut-être sa muse a-t-elle un peu trop sacrifié à la politique et l’accusera-t-on d’aller un tantinet vers les mécontents quand même, mais elle sait être variée et prendre ses impressions un peu partout.

334. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

Il a voulu constater les dégâts faits par chacun des morceaux de l’obus qui venait d’éclater, les suivant partout, selon le caprice du hasard qui les a lancés. […] oui, mon amour, quand tu m’embrasses, il me passe des frissonnements partout. […] Ainsi partout et surtout dans le monde des lettres. […] Et de fait on sent partout, dans ce livre singulier fait de charme et de philosophie, d’ironie et de logique, le frémissement de la chose vivante. […] Les mots d’esprit du Roi se trouvent partout dans cette consciencieuse étude.

335. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lafenestre, Georges (1837-1919) »

Pas de dissonances, partout une harmonie puissante et sobre.

336. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

Son style, partout clair, concis et coulant, s’élève à une extraordinaire sublimité toutes les fois qu’il exprime le constant amour de l’auteur pour la patrie. […] Par le magique effet de cette exactitude dans le détail, le lecteur, présent partout, s’intéresse à tous les mouvements, assiste à toute l’action, et ne peut rien confondre ni rien perdre de vue. […] Partout la force de cette morale tendante à égaliser les humains, reluit dans chaque épisode. […] Le premier, toujours politique et toujours orateur, ne varie ni le fonds ni les ornements de son sujet ; son récit a partout la gravité de l’histoire ; ses dialogues ont partout le ton de la tribune aux harangues. […] Virgile tourne ses vers avec bien plus de souplesse et de grâce : il semble partout les interrompre par un soupir.

337. (1860) Cours familier de littérature. X « LIXe entretien. La littérature diplomatique. Le prince de Talleyrand. — État actuel de l’Europe » pp. 289-399

L’un était l’esprit des hautes classes, y compris le club des Jacobins, les hommes de paroles, de systèmes, d’utopies, de réformes, de liberté, d’égalité pratiques : ceux-là regardant la paix et la fraternité entre les peuples comme le premier bienfait de la révolution ; les autres, passions populaires et soldatesques plus qu’intelligentes, vociférant la guerre universelle à grands cris, et surtout la guerre à l’Angleterre, par ce vieux ressentiment hébété qui fait partout appel à son bras, ne pouvant pas faire appel à sa tête, brutalité des places publiques et des casernes, qui n’a pour diplomatie que des vociférations et pour traités que des levées en masse. […] On lavait partout le sang des échafauds ; on cherchait, en tâtonnant parmi les débris, l’ordre à l’intérieur, la réconciliation avec l’étranger. […] On l’avait vu à Athènes, à Sparte, à Rome, à Paris, partout : les révolutions populaires les plus éclatantes avaient toutes été faites par l’aristocratie tendant la main au peuple ; partout les Solon, les Gracques, les César, les Russell, les Sidney, les d’Orléans, les Mirabeau, les la Rochefoucauld, les Clermont-Tonnerre, les Lauzun, les Talleyrand, les Sieyès, les la Fayette, tribuns du peuple ou tribuns des armées, avaient été nécessaires à la démocratie pour lui donner l’idée, la parole, le mouvement, la force, la popularité des révolutions. […] Des négociations patentes ou secrètes se renouèrent partout, et furent conclues dans quelques cours. […] Le camp menaçant de Boulogne est sa seule négociation à l’extérieur ; il voit partout des complots britanniques et des assassins soldés contre lui par l’or de l’Angleterre.

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