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465. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

Il semble cependant qu’on veuille réagir contre le pessimisme naturaliste, contre le romantisme et qu’on oppose, à l’idéalisme minutieux et subtil des slaves, une sorte d’idéalisme latin. […] Chazeray, qui écrivit L’Oued-Mehlhouf et une sorte de composition lyrique intitulée Le Potier d’argile. […] Or, c’est de ces sortes de victoires que découlent la grandeur morale et l’importance géographique d’une nation. […] Il fut le créateur d’une sorte d’ironie sentimentale et d’un style trop rapide, mais si exact à évoquer les éphémères de l’âme et de Paris. […] Il anime des fantoches de telle sorte que nous les voyons évoluer et qu’il semble que chacun d’eux ait été par instants notre compagnon de route.

466. (1767) Salon de 1767 « Peintures — La Grenée » pp. 90-121

Rien de plus difficile à imaginer que ces sortes de figures, il faut qu’elles soient de grand caractère ; il faut qu’elles soient belles et cependant qu’elles inspirent l’effroi. […] Sachez qu’en général le simbole est obscur, et qu’il n’y a sorte de précaution qu’il ne faille prendre pour être clair. […] Harmonie perdue, pour harmonie perdue, j’aimerois mieux que l’effet le plus violent du tems tombât sur les étoffes, et que leur entière destruction fît valoir les chairs et les autres parties essentielles, qui en reprendroient par comparaison une sorte de vie. […] C’est qu’ils n’ont connu qu’une sorte de luxe. […] Et celui qui après avoir dégradé l’agriculture embarrassa les échanges par toutes sortes d’entraves !

467. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

Enfant, il aimait donc toutes sortes de déduits et d’ébats, et il s’attachait par instinct aux gens riches, à ceux qui tenaient grand état de chasse, faucons et meutes, ce qui lui semblait le signe d’une noble inclination. […] Ce sont là des inconvénients inévitables ; mais l’extrême et passionnée curiosité de Froissart était une sorte de remède et de garantie contre la partialité même, s’il y avait été enclin ; car il n’était pas homme à se boucher une oreille, ni à retenir un récit qui lui aurait été conté, ce récit eût-il dû contredire sur quelque point une autre version précédente. […] Dans les idées du temps cela ne déshonorait en aucune façon, tant s’en faut ; et l’idéal de Froissart (car il en avait un) était précisément cette sorte de confrérie, de confraternité universelle, commune à tout ce qui était noble et vaillant, qui comptait dans ses rangs toute fleur de chevalerie, et qui savait couronner le vainqueur en respectant, en relevant honorablement le vaincu. […] Cette sorte de preuve, n’en déplaise au savant investigateur, est bien périlleuse, bien décevante, prête bien à l’illusion, et peut tromper même des gens de goût. — Froissart, en poésie, n’a pas de style, il n’a qu’un genre qui est celui de son temps, le genre en vogue à cette date ; et ce genre, qui nous dit que d’autres à côté de lui ne le cultivaient pas avec autant de facilité ?

468. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

Cette absence se prolongeant de la sorte, Linné apprit, non sans étonnement, qu’un perfide ami cherchait à en profiter pour lui enlever le cœur de sa fiancée ; il revint sans trop se presser, à temps encore pour déjouer cette machination anticonjugale, et il retrouva la jeune fille restée fidèle. […] « Buffon, disait Linné vers la fin de sa vie, n’a point recalé les bornes de la science, mais il sut la faire aimer ; et c’est aussi la servir utilement. » Cet éloge ne dit point assez sans doute : voyons-y du moins une sorte de réparation accordée par le prince des botanistes, par le naturaliste qui l’était de naissance et de pur génie, à celui qui l’était devenu par volonté et qui régna, lui aussi, du droit du génie et de la puissance. […] Buffon apparaît donc ici sous la forme d’un conquérant qui tient l’épée, comme une sorte de Moïse ou de Josué de la science, et je m’avoue un peu étonné : je me l’étais toujours figuré plus calme et moins flamboyant. […] Ce qui est vrai, c’est que les grandes hypothèses de Buffon, ses tableaux des diverses époques de la nature, quelques phrases jetées çà et là sur l’unité primitive de dessein, phrases qui n’ont pas la portée qu’on leur donne, ont paru suffisantes au savant illustre, mais enthousiaste, pour voir en Buffon un précurseur de lui-même, un prophète de l’ordre de vues qu’il affectionne : il a donc salué en Buffon une sorte de dieu humain à peu près comme Lucrèce salue Épicure.

469. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — II » pp. 254-269

Ils ont, pense-t-il, plusieurs choses pareilles et communes, et ont aussi des différences, mais non pas si fort éloignées et dispareilles qu’elles ne se tiennent : l’homme n’est du tout au-dessus, ni du tout au-dessous. » Il fait une cote mal taillée, et voilà une sorte d’égalité établie. […] C’est de cette sorte que partout il ne se donne que pour l’économe, le distributeur public des bonnes et saines lectures qu’il a digérées et recueillies. […] Il a beaucoup d’expressions de cette sorte, fraîches ou fortes, et presque toujours vives, dont il nourrit et anime sa diction ; il dira, parlant des enfants : « Il faut leur grossir le cœur d’ingénuité, de franchise, d’amour, de vertu et d’honneur. » Il dira, parlant de la ditférence trop souvent profonde et de l’abîme qu’il y a, — qu’il y avait alors, — entre le sage et le savant : « Qui est fort savant n’est guère sage, et qui est sage n’est pas savant. […] Ce témoignage moins connu que d’autres a cela de particulier qu’il porte précisément sur le charme de la manière de Montaigne, en ce qu’elle a de plus opposé à la méthode de Charron : « Dans mon innocente et fortunée solitude, écrivait Jean de Muller (1784-1785), je travaille dix ou onze heures par jour à mon livre (sa grande histoire helvétique) ; vient ensuite une heure donnée à la correspondance, le reste à la société ; ma société du matin, c’est Moïse ou Paul, celle du soir Cicéron, Métastase et Montaigne ; parfois, quand l’horizon se trouble, vient un certain ami bien cher qui ne me quitte guère, nommé Horace ; il me dit : « Deme supercilio nubem… » Et à son frère, dans une lettre du 4 décembre 1788 : « Je te conseille de composer souvent ; cela est indispensable à un esprit comme le tien ; écris tes pensées sur les choses, les livres, les hommes ; qu’il sorte de là une collection à la Montaigne.

470. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

Je suis fâché de vous parler de la sorte, mais vous m’y forcez. […] En santé et dès qu’il était tout à fait à lui-même, il avait besoin de joutes, de contradictions, de gageures, de palinodies, en un mot, de tout ce qui donne une petite comédie au public ; et comme on savait que ces sortes de querelles lui plaisaient et qu’il excellait à y jouer son rôle, on les faisait naître sous ses pas. […] le poète qui s’était publiquement consacré à célébrer les saints dans ses hymnes, revenir de la sorte à la mythologie païenne ! […] Les pièces de vers que Santeul composa pour glorifier les états de Bourgogne et leur zèle à fournir des subsides au roi durant la guerre, lui valurent de leur part une sorte de récompense nationale, c’est-à-dire un cadeau de plusieurs feuillettes de vin de Bourgogne.

471. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — I » pp. 298-315

L’étude du passé, où de grands talents ont allumé des phares qui ont attiré toutes les sortes d’esprits, commence à devenir un entraînement de mode et un piège. […] Toutefois il ne lui eût pas nui de savoir du latin, et il en eût fait son profit, puisqu’il aime à étudier les auteurs anciens et à commenter César, dont il se fera en ses loisirs une sorte de bréviaire. […] Celui-ci nous fait bien fidèlement assister aux intrigues et menées de mille sortes qui remplissent ces premières années de la Régence. […] Écoutons Plutarque nous exprimer et nous définir cette grâce singulière et ce je ne sais quoi de réussi qui s’attachait à toutes les actions de l’heureux mortel : Car de son temps, en Grèce, nous dit-il, beaucoup ayant été grands et ayant fait de grandes choses, desquels étaient Timothée, et Agésilas, et Pélopidas, et celui que Timoléon avait surtout pris pour modèle, Épaminondas, les actions de tous ceux-là eurent pour caractère l’éclat mêlé d’une certaine violence et d’un certain labeur, de telle sorte qu’il a rejailli sur quelques-unes et du blâme et du repentir ; mais des actions de Timoléon, si l’on excepte cette fatale nécessité au sujet de son frère, il n’en est pas une où il ne convienne, selon la remarque de Timée, de s’écrier avec Sophocle : « Ô dieux !

472. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

Les Espagnols répandaient le bruit que cet exil de M. de Rohan n’était qu’une feinte, et qu’on ne l’envoyait de la sorte à Venise que pour y agir contre eux. […] Il fut nommé général des troupes de la république, avec pension et toutes sortes d’honneurs. […] Saint-Évremont, en regrettant que M. de Rohan n’ait pas pénétré plus avant dans les desseins de César, et mieux expliqué les ressorts de sa conduite, avoue pourtant « qu’il a égalé la pénétration de Machiavel dans les remarques qu’il a faites sur la clémence de César, aux guerres civiles. « On voit, dit-il, que sa propre expérience en ces sortes de guerres lui a fourni beaucoup de lumières pour ces judicieuses observations. » Rohan, dans ce travail sur les guerres des Gaules et sur l’ancienne milice, paraît un homme fort instruit ; il n’y a plus trace de ces premières inadvertances qu’on a tant relevées dans son premier voyage de 1600, lorsqu’il y faisait Cicéron auteur des Pandectes, comme il aurait dit des Tusculanes. […] Rohan se décida avec une sorte de joie à y faire le simple soldat et à y donner le coup de main, lui qui, jusque-là, avait tant machiné de la tête.

473. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

Ces sortes de considérations n’étaient pas indifférentes aux restaurateurs de l’Académie d’alors ; aussi l’utilité fut-elle un peu sacrifiée à l’éclat. […] C’est à cette date que l’Académie, fut réintégrée dans son privilège d’avoir pour protecteur spécial et perpétuel monarque, de correspondre directement avec lui pour l’approbation de ses choix et la présentation de ses nouveaux membres, sans avoir affaire à un ministre amovible et aux bureaux, comme cela a lieu pour les autres Académies, Ce fut par le premier gentilhomme de la Chambre (ou par le grand chambellan, selon les régimes), que l’Académie reprit l’habitude et l’usage de faire et de recevoir ces sortes de communications qui tiennent à son essence ; c’est par son canal qu’elle obtint les audiences du prince. […] Quelqu’un qui s’amuse à compter sur ses doigts ces sortes de choses a remarqué que, s’il avait consenti à la douce violence qu’on lui voulait faire, il eût été le dix-septième ministre de Louis-Philippe dans l’Institut et le neuvième dans l’Académie française. […] N’y mettons ni esprit de parti ni préjugés d’aucune sorte.

474. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Il y est dit, entre autres griefs, que Foucault se servait, pour la conversion du menu peuple, d’un homme de néant nommé Archambaud, que cet Archambaud menait des gens de sa sorte au cabaret et trouvait le moyen de les enivrer ; que le lendemain, lorsqu’ils étaient revenus à eux-mêmes, il leur allait dire, ou qu’ils avaient promis d’aller à la messe, et que s’ils prétendaient s’en dédire, il les ferait traiter comme des relaps ; ou qu’ils avaient mal parlé du gouvernement et des mystères catholiques, et que le seul moyen de se racheter d’une sévère punition était de se ranger à la religion romaine ; que l’affaire, ainsi amorcée et entamée sur des gens du commun, se poursuivit ensuite sur ceux d’une condition supérieure ; qu’en général l’artifice de l’intendant était de faire faire aux réformés, sous quelque prétexte, un premier acte extérieur qui pût être interprété pour une adhésion à la communion romaine, comme d’assister à un sermon, par curiosité ou par intimidation, et qu’ensuite, moyennant la peur d’être déclarés relaps et traités comme tels, il avait raison de son monde ; que, sans avoir eu besoin de demander des troupes, il s’était servi de celles qu’on faisait filer alors sur la frontière de l’Espagne et que commandait le marquis de Boufflers, et qu’il avait été commis par ces troupes, lui les dirigeant et les conduisant de ville en ville, de village en village, de véritables horreurs et cruautés. […] M. de Louvois m’ayant envoyé plusieurs ordres en blanc, il s’est converti six cents personnes dans cinq villes ou bourgs, sur le simple avis que les compagnies étaient en marche. » Tous les articles qui suivent dans le Journal seraient à citer comme aveu naïf des inventions, ruses, douces contraintes, moyens de toutes sortes employés ; l’effroi, l’intérêt, les pensions, — même les livres de Bossuet et de l’abbé Fleury. […] Mais l’on comprend très-bien, après cette merveilleuse campagne et cette sorte de pêche miraculeuse à laquelle on vient d’assister, et qui faisait de Foucault l’intendant modèle, celui qui était proposé à l’émulation de tous les autres, que Louis XIV, trop bien servi et trompé dans le sens même de ses désirs, ait cru pouvoir changer de système ; qu’il ait renoncé à l’emploi et au maintien des Édits gradués, précédemment rendus dans la supposition que les conversions traîneraient en longueur, et que, persuadé qu’il n’y avait plus à donner, comme on dit vulgairement, que le coup de pouce (tant pis pour le grand roi, s’il n’est pas content de l’expression, mais je n’en sais pas de plus juste), il se soit déterminé à révoquer formellement l’Édit de Nantes. […] C’était un homme très-curieux d’antiques, de médailles, de bronzes, de livres et de toutes sortes de raretés qu’il avait déterrées partout.

475. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise par M. Taine. »

Tel professeur de nos amis, à l’œil mi-clos et au fin sourire, un demi-Gaulois homme de goût15, trouvait moyen de la sorte d’être à la fois légèrement paresseux et avec cela excitateur. […] Au point de vue moral complet et de l’expérience, ce qui peut sembler surtout avoir fait défaut à ces existences si méritantes, si austères, et ce qui, par son absence, a nui un peu à l’équilibre, ç’a été de toutes les sociétés la plus douce, celle qui fait perdre le plus de temps et le plus agréablement du monde, la société des femmes, cette sorte d’idéal plus ou moins romanesque qu’on caresse avec lenteur et qui nous le rend en mille grâces insensibles : ces laborieux, ces éloquents et ces empressés dévoreurs de livres n’ont pas été à même de cultiver de bonne heure cet art de plaire et de s’insinuer qui apprend aussi plus d’un secret utile pour la pratique et la philosophie de la vie. […] Il en est ainsi d’un bout à l’autre de l’histoire ; chaque siècle, avec des circonstances qui lui sont propres, produit des sentiments et des beautés qui lui sont propres ; et à mesure que la race humaine avance, elle laisse derrière elle des formes de société et des sortes de perfection qu’elle ne rencontre plus. […] Paul et Virginie porte certainement des traces de son époque ; mais, si Paul et Virginie n’avait pas été fait, on pourrait soutenir par toutes sortes de raisonnements spécieux et plausibles qu’il était impossible à un livre de cette qualité virginale de naître dans la corruption du xviiie  siècle : Bernardin de Saint-Pierre seul l’a pu faire.

476. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

C’est ainsi qu’au sein de chaque sujet, de chaque situation donnée, il a opéré avec une sorte de détermination certaine et suivie, qui ne perdait aucun de ses coups. […] A mesure que l’esprit juge mieux de l’étendue des choses, de la richesse du passé, de l’incomparable beauté des anciens et premiers modèles, il entre dans une sorte de sérénité un peu calme et refroidie, qui tempère la veine féconde. […] Ce qui ne peut être su de cette sorte, ce qui ne peut être saisi et déterminé d’après des caractères positifs et des particularités sensibles, volontiers il l’ignore, ou du moins il fait tout comme, et l’abandonne, sans paraître s’y mêler, aux controverses et aux échos d’alentour. […] Nul doute qu’un narrateur vraiment primitif ne l’eût pris de la sorte et ne fût allé au bout ; mais, pour nous, lecteurs modernes, qui, après tout, ne sommes pas Corses, qui nous intéressons à Orso et qui tenons fort à ce qu’il ne finisse ni par le mâquis ni par les galères, nous sommes heureux de la dextérité du romancier qui nous l’a montré cédant tout autant qu’il faut et s’en tirant toutefois, ne commençant pas le premier, mais, du moment qu’il s’en mêle, faisant coup double.

477. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre II. L’éloquence politique »

Et dans les lettres qui furent écrites depuis 1700 il serait facile de noter toute sorte de commencements, comme des poussées et des jets d’éloquence politique, même chez des femmes. […] Un faux goût d’antiquité décore les discours de toute sorte d’ornements mythologiques, grecs, romains ; on n’entend plus retentir que les noms de Catilina, de Marius, de Lysandre, de Thémistocle. […] Mais le monde ne pardonna pas à Mirabeau cette sorte de férocité, d’exaspération physique qui remplaçait chez lui la légèreté du libertinage à la mode : une fougueuse nature éclatait dans ses vices, au lieu de la gracieuse corruption qu’on était accoutumé à admirer. […] Il y a là une sorte de raideur doctrinaire qui est d’un assez puissant effet.

478. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

Il était à craindre que l’histoire ne versât dans l’abstraction, et ne tournât à une sorte de mécanique morale. […] Une conception de l’univers et de la vie s’affirme dans ces œuvres maîtresses qui ont rempli l’existence de Renan : la même qui nous est renvoyée par ces essais de toute sorte, où sa pensée se reposait, où se jouait sa fantaisie, études d’histoire, de critique ou de morale, dialogues ou drames philosophiques, et toutes ces allocutions, confidences, propos, où d’un mot le maître donnait le contact et le secret de son âme. […] Il y en a de toutes sortes, de toute origine et de toute qualité : hommes et femmes, civils et militaires, soldats et généraux, c’est à qui nous rendra, plus ou moins complète ou frappante, l’image de l’Empereur et de son immense aventure. […] Il semble que le public soit las de fictions et savoure la certitude de la réalité des récits et descriptions que ces sortes d’écrits lui offrent.

479. (1890) L’avenir de la science « V »

Mais n’entendant absolument rien en théologie, et sentant pourtant le besoin d’une croyance, elle trouve commode de prendre tout fait le système qu’elle rencontre sous sa main, sans se soucier de le perfectionner ; car tenter de le perfectionner, ce serait le prendre au sérieux, ce serait se poser en théologien ; or, il est de bon ton, parmi nous, de déclarer qu’on ne s’occupe pas de ces sortes de choses. […] Je n’hésite pas à le dire, le temps de ces sortes de rôles est passé. […] À cet excès doit aboutir tout ce qui est monopole dans le monde de la pensée, tout ce qui exige pour être compris une sorte de révélation particulière, un sens à part que n’a pas l’humanité. […] Héraclite concevait les astres comme des météores s’allumant à temps dans des réceptacles préparés à cette fin, sortes de chaudrons, qui, en nous tournant leur partie obscure, produisent les phases, les éclipses, etc.

480. (1886) De la littérature comparée

Il y a un état moral distinct pour chacune de ces formations et pour chacune de leurs branches ; il y en a un pour l’art en général et pour chaque sorte d’art ; pour l’architecture, pour la peinture, pour la sculpture, pour la musique, pour la poésie ; chacune a sa loi, et c’est en vertu de cette loi qu’on la voit se lever au hasard, à ce qu’il semble, et toute seule parmi les avortements de ses voisines, comme la peinture en Flandre et en Hollande au xviie  siècle, comme la poésie en Angleterre au xvie  siècle, comme la musique en Allemagne au xviiie  siècle. […] Si vous considérez dans son ensemble le développement des littératures modernes qui font l’objet de ce cours, vous verrez bientôt qu’à travers bien des variations, des tâtonnements et des revirements de goût, il présente le tableau d’une sorte de conflit entre deux éléments qui parfois se fondent ensemble, puis se séparent de nouveau, se combattent tour à tour et se réunissent. […] Quelques-uns des auteurs latins subsistent pourtant : Virgile, d’abord, auquel on fait une sorte de réputation de nécromant, quelques écrits de Cicéron et de Sénèque, Tite-Live, Salluste, Horace, Ovide, Pline, Lucain ; on les lit dans les cloîtres, on les cite dans les écrits scolastiques et dans les chroniques, on les commente, mais généralement sans les comprendre, et en les plaçant tous au même rang. […] Enfin, parmi les productions les plus immédiatement contemporaines — sans parler d’une sorte de mysticisme qui va emprunter aux écrivains hermétiques leurs voiles les plus obscurs pour les jeter bizarrement sur le scepticisme contemporain — il faut noter le retour à la méditation, l’étude de la vie intérieure, la préoccupation de l’au-delà.

481. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XIII »

Il y aune sorte de volupté perverse dans la façon dont elle déshabille sa pudeur devant son amant. […] La nuit même de ses noces, par une sorte de talion infâme, Léa se livre au premier venu. […] Le monde, qui l’honore et qui l’aime, l’appelle « la princesse Georges », avec une sorte de familiarité respectueuse et tendre. […] Sou attitude est si fière, que l’horreur qu’elle devrait inspirer se change en une sorte d’admiration stupéfaite.

482. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Mme de Genlis. (Collection Didier.) » pp. 19-37

Après quelques années passées au Palais-Royal, Mme de Genlis, âgée de trente et un ans (1777), fit donc sa retraite avec une sorte d’éclat ; elle quitta solennellement le rouge (ce qui était un grand signe alors), et elle alla habiter au couvent de Bellechasse un petit pavillon qu’elle s’était fait bâtir et où elle s’installa avec ses élèves. […] Imaginez qu’à cette époque, et par une sorte d’attrait qui rapprochait la fleur des pédants de la fleur des pédantes, La Harpe devint amoureux d’elle : c’est à croire à l’influence des étoiles. […] Les railleurs, les ennemis du critique (et il n’en manquait pas), les envieux du bel-esprit gouverneur, s’égayaient là-dessus, comme bien l’on pense ; les couplets ne tarissaient pas, et ce nom de La Harpe, qui faisait un singulier à-propos au talent célèbre de Mme de Genlis sur la harpe, prêtait à toutes sortes de calembours. […] Ne pouvant se priver de son goût pour le théâtre, elle imagina de mettre en action et de leur faire jouer dans le jardin, où les décorations artificielles se combinaient avec la nature, les principales scènes de l’Histoire des voyages de l’abbé Prévost, abrégée par La Harpe, et en général toutes sortes de sujets historiques ou mythologiques.

483. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le surintendant Fouquet. (Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M. P. Clément.) 1846. » pp. 294-312

Un des hommes les moins scrupuleux et les plus entendus de ce temps-là, Gourville, raconte dans ses Mémoires très sincères comment il fit la connaissance de Fouquet, qui le goûta et l’employa à plus d’une sorte de négociations. […] Fouquet essaya enfin, un jour, de se compléter dans cette sorte de ménage et d’établissement royal, en se donnant La Vallière pour maîtresse. […] L’abondance paraissait en même temps chez les gens d’affaires, qui d’un côté couvraient toutes leurs malversations par toute sorte d’artifice, et les découvraient de l’autre par un luxe insolent et audacieux, comme s’ils eussent appréhendé de me les laisser ignorer. […] Que serait-ce si elle voyait encore cet infortuné même, à peine connaissable, mais moins changé et moins abattu de la longueur de sa maladie et de la dureté de sa prison que du regret d’avoir pu déplaire à Votre Majesté, et qu’il lui dît : « Sire, j’ai failli, si Votre Majesté le veut ; je mérite toute sorte de supplices ; je ne me plains point de la colère de Votre Majesté : souffrez seulement que je me plaigne de ses bontés.

484. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

Voltaire peut-être a raison, et pourtant la postérité, qui n’a pas à opter entre ces chefs-d’œuvre divers ni à se décider pour l’un au détriment des autres, la postérité, qui n’est pas homme de lettres, ne se pose point la question de la sorte ; elle ne recherche pas ce qui est plus ou moins difficile ou élevé comme art, comme composition ; elle oublie les genres, elle ne voit plus que le trésor moral de sagesse, de vérité humaine, d’observation éternelle qui lui est transmis sous une forme si parlante et si vive. […] Ceux qui, sur la foi de quelques anecdotes exagérées, se font de lui une sorte de rêveur toujours absent, ont raison de n’y rien comprendre : mais c’est que l’aimable poète n’était point ce qu’ils se figurent. […] Il avait beaucoup observé les animaux, et il s’était accoutumé à ne voir en eux qu’une sorte d’étage très développé de l’édifice humain, une sorte de démembrement varié de l’harmonie humaine dans ses parties simples.

485. (1912) L’art de lire « Chapitre VIII. Les ennemis de la lecture »

Il y a une sorte d’incompatibilité d’humeur. […] Les auteurs ont toutes sortes de motifs de ne pas admirer, ni même goûter les ouvrages de leurs confrères, motifs dont l’amour-propre est seulement l’un, duquel, du reste, je n’irai pas jusqu’à dire qu’il est le plus faible. […] Certains lecteurs, en effet, par une sorte de timidité, sont toujours des lecteurs en retard. […] Cette sorte de timidité qui fait le lecteur retardataire est un des grands ennemis du plaisir de la lecture.

486. (1908) Après le naturalisme

Appellera-t-on alors, cette sorte de Littérature, une Littérature sociale ! […] Bien des fortunes politiques et monétaires se fondèrent là, à la faveur des troubles de toutes sortes. […] Tout au plus ne fut-il qu’une sorte de médium.  […] Même aux urnes, il est encore dans la main des exploiteurs de toutes sortes, dont il prétend se libérer. […] Il en est de deux sortes, une bonne et une mauvaise.

487. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre II. Les Normands. » pp. 72-164

. —  Quel genre de beauté et quelle sorte d’idées les Français ont apportés dans le monde. […] L’un compare sa maîtresse à toutes sortes de pierres précieuses et de fleurs. […] La vie à ce moment, en dehors de la guerre et même pendant la guerre, est une grande parade, une sorte de fête éclatante et tumultueuse. […] Notez enfin que les tournois abondent, c’est une sorte d’opéra qu’ils se donnent à eux-mêmes. […] Ils ne boivent point d’eau, si ce n’est par pénitence ; ils mangent abondamment de toutes les sortes de chairs et de poissons.

488. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Appendice à l’article sur Gabriel Naudé »

Diodati et Gaffarelli, auxquels je voudrois vous prier d’écrire confidemment que vous avez entendu parler des différends qui se passent entre lui et moi, et que, sachant assurément que le Père m’a donné juste sujet de me plaindre de lui, vous les priez de le réduire et persuader à me donner quelque satisfaction par lettre de sa propre main, conçue en telle sorte qu’il montre au moins d’avoir regret de m’avoir offensé à tort et légèrement contre tant de services que je lui avois rendus. Je crois que si vous voulez prendre la peine de traiter cet accord de la sorte, il vous réussira.

489. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VIII. De la clarté et des termes techniques »

Il y a une autre sorte de propriété du langage qui consiste non plus dans le rapport en quelque sorte théorique de l’idée et du mot, mais dans le rapport du mot à l’intelligence des gens auxquels on s’adresse. […] Car on n’a pas à rechercher toujours la même sorte de clarté : chaque sujet a sa clarté propre, réglée par sa destination qui l’adresse à tel ou tel public.

490. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre premier. Impossibilité de s’en tenir à l’étude de quelques grandes œuvres » pp. 108-111

Tout cela est d’abord vague, indécis, confus, noyé dans une sorte de crépuscule. […] S’il est vrai que chaque époque se forge de la sorte des dieux mortels à son image et maltraite ou ignore des hommes de valeur réservés à l’admiration des générations suivantes, il est nécessaire de réduire le rôle excessif attribué trop fréquemment à ces fortes individualités qui dominent du haut de leur gloire le siècle où elles ont vécu.

491. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 39, qu’il est des professions où le succès dépend plus du génie que du secours que l’art peut donner, et d’autres où le succès dépend plus du secours qu’on tire de l’art que du génie. On ne doit pas inferer qu’un siecle surpasse un autre siecle dans les professions du premier genre, parce qu’il le surpasse dans les professions du second genre » pp. 558-567

Mais il est d’autres professions où les derniers venus n’ont pas le même avantage sur leurs prédecesseurs, parce que le progrès qu’on peut faire en ces sortes de professions, dépend plus du talent d’inventer et du génie naturel de celui qui les exerce, que de l’état de perfection où ces professions se trouvent lorsque l’homme qui les exerce fournit sa carriere. Ainsi l’homme qui est né avec le génie le plus heureux est celui qui va plus loin que les autres dans ces sortes de professions, et cela indépendamment du dégré de perfection où elles se trouvent lorsqu’il les exerce.

492. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — I. Takisé, Le taureau de la vieille »

. — Sartyi, répondit la vieille, je veux bien te la donner comme épouse mais que jamais elle ne sorte au « soleil ou ne s’approche du feu, car elle fondrait « aussitôt comme de la graisse. » Le sartyi promit à la vieille que jamais Takisé ne sortirait aux heures de soleil et que jamais non plus elle ne s’occuperait de cuisine. […] Elle a fondu comme beurre et, ce fleuve nouveau que tu aperçois dans le lointain, c’est elle qui lui a donné naissance en fondant de la sorte. » « — Il me faut ma Takisé ! 

493. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « M. Boissonade. »

Une sorte de verve ingénieuse et abondante s’est répandue sur toutes les parties de l’annotation et du commentaire. […] En agissant de la sorte, M.  […] Il l’assaisonna de toutes sortes de jolies petites notes. […] Dans ces sortes de notes, M.  […] Et Vaugelas a fait, à propos de ces sortes de vers, une excellente remarque.

494. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

Souvent, aux lieux les plus connus, un certain profil soudainement caractérisé me révèle des masses différentes, des groupes nouvellement conçus, que je n’avais jamais envisagés de cette sorte, et qui sont vrais, et qui s’ajoutent à la connaissance vivante que j’ai du tout. » Ce que cet ami me disait de ses montagnes, je l’appliquais involontairement à notre littérature, à mesure que, l’envisageant de loin, sous un aspect extérieur, et pourtant d’un lieu ‌ qui est à elle encore par la culture, elle me paraissait offrir une perspective nouvelle dans des objets tant de fois étudiés et connus. […] On y gagne de connaître une culture, d’un intérêt général aussi, qui reproduit en moins, mais assez au complet, les grands mouvements de l’ensemble, et les fait revoir d’un jour inattendu dans une sorte de réflexion secondaire. […] Mais c’est à produire, à solliciter une impression entière et efficace qu’ils sont destinés ; et aussi n’en parlons-nous qu’avec rapidité et une sorte de crainte sous un point de vue autre. […] L’ancienne et précédente culture française, ou plutôt la production et végétation française sans culture régulière, était, au déclin du moyen âge et au xvie  siècle, comme un grand champ libre, soit en France, soit aux pays environnants (Savoie, Vaud, Liége, etc.), et donnait pêlemêle toutes sortes d’herbes, de fleurs, même de longs foins et de folles avoines. La culture académique, régulière et polie, le siècle de Louis XIV et son rouleau, n’ont passé sur le gazon et n’ont fait boulingrin et tapis vert qu’au milieu ; les bordures et les prairies hors du cercle ont gardé toutes sortes de flottants vestiges. — Au xvie  siècle sans doute, et même auparavant, il y avait une langue de cour et du centre, qui se piquait d’être la bonne.

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