Pour moi, cet esprit qui ne s’est jamais interrompu dans ses destructions depuis qu’il a paru dans l’Histoire de France, s’y est glissé le jour où le principe religieux sur lequel était fondée une monarchie séculaire, a laissé s’introduire en elle l’effroyable termite qui n’a terminé sa besogne qu’en 1789, et qui n’a troué la cale du navire qu’après avoir troué le cœur de ceux qui auraient dû la préserver et la défendre. […] Quand, à part même les philosophes dont il se fait sa plus belle ceinture, il invoque le témoignage de toutes les voix gallicanes, jansénistes, parlementaires qui ont le plus insolemment piaillé contre le pouvoir religieux et monarchique d’alors, ou du moins contre ce qu’il en restait encore ; quand sa plus large et sa plus familière et sa plus chère source de renseignements et d’informations est Barbier, le bazochien Barbier, l’avocat consultant au Parlement, et qu’il consulte — qui tient plus de place dans le livre de M.
Profondément religieux d’éducation et de nature, il fut puritain et adultère dans un pays puritain, avec un éclat près duquel l’éclat des désordres de Lord Byron s’efface. […] La spontanéité du cœur qu’il avait, cet être délicat, fragile, idéal, religieux, qui tenait si peu de place dans l’espace et qui en tiendra une si grande dans le temps, et qui placidement accomplit, hélas !
Les mortifications de Rama, son ascétisme, ses tentations, ses luttes, sa victoire, toute cette partie morale et religieuse du livre, que M. […] Au point de vue exclusivement littéraire, le Ramayâna ne peut pas même être comparé au Koran, qui, si vous écartez l’entente immense du législateur et du fondateur d’empire religieux, n’est esthétiquement, dans ses endroits les plus frappants, qu’un pastiche audacieux de la Bible, interprétée par l’esprit grossier d’un idolâtre.
Tout homme qui pense, — tout moraliste, — tout physiologiste, — se sentira saisi d‘une ardente curiosité devant le phénomène de cette existence mise en dehors de l’humanité par l’énergique volonté et la passion religieuse d’un homme, et voudra la scruter et s’en rendre compte philosophiquement… Voilà pour la science et pour la pensée ! […] Pieux dès qu’il respira et comme il respirait, élevé par son oncle, un pauvre curé de campagne, qui lui apprit assez de latin pour entendre le bréviaire, Benoît-Joseph, dès qu’il fut en âge de choisir sa fonction parmi les hommes, sentit tressaillir en lui la vocation religieuse, qui y tressaillit longtemps, mais sans l’éclairer.
Il y a ramassé contre les idées religieuses avec lesquelles des amis voulurent, à ce qu’il raconte, le consoler de mourir, tous les préjugés, toutes les erreurs, tous les sophismes et même toutes les sottises d’un siècle athée, et il n’y en ajouta pas une de plus ! […] et c’est dans le fond de cette personnalité violemment écumante que nous trouvons encore, malgré tout, quelque chose d’immortellement religieux qui nous émeut, nous qui prenons parti pour le Dieu qu’on outrage, contre un si outrageant désespoir !
… Qui pense à Milton, à cette heure, dans ce monde moderne, attelé aux plus âpres besognes, qui n’est ni religieux, ni poétique, — tout ce que fut Milton, — et qui, tas de fourmis en travail, passe au pied de la statue des plus grands hommes sans avoir même le temps de la regarder ? […] et inflexible Tête-Ronde dont le temps a fait une tête de mort comme des autres, dans le charnier de l’Histoire où elle aurait été oubliée, si elle n’avait été qu’une tête politique et religieuse, et que l’historien, qui n’est, en somme, qu’un fossoyeur, n’aurait peut-être pas reconnue en la roulant sous sa bêche ?
Je puis bien admettre que cet homme, qui est, avant tout, un artiste, soit assez indifférent aux idées philosophiques et religieuses, mais il n’a point de parti-pris contre elles, et si même il pouvait croire que d’être religieux donnerait une beauté de plus à son œuvre, je suis parfaitement sûr qu’immédiatement il le serait !
La défense des Ordres religieux a été en partie vraie dans la bouche de M. de Montalembert ; la péroraison adressée à M.
— La lettre audacieuse des évêques donne à penser : ils n’osent de telles choses que parce qu’ils sentent qu’il y a, à côté du roi, une conscience timide et religieuse, celle de la reine, qu’ils effrayent et qu’ils espèrent dominer.
Vigié-Lecocq Chez Le Cardonnel, seul, le sentiment religieux atteint toute sa pureté ; mais pureté très moderne encore, nerveuse nostalgie d’une âme trop délicate pour les besognes serviles à qui le cloître, seul, sied et qui, seule, peut comprendre toutes les joies spirituelles d’un silence claustral.
. — Du sens religieux de la poésie (1893). — Opinions (1895). — Almanach de prose et de vers pour 1897. — L’Esprit belge (1899). — Auguste Rodin (1900). — Le Rêve de vivre, poèmes (1900).
LOUIS, Religieux de l’Ordre des Carmes, né à Valréas en Provence en 1626, mort vers l’an 1700.
Il y a deux intentions dans la publication de ce livre, l’intention littéraire et l’intention politique ; mais, dans la pensée de l’auteur, la dernière est la conséquence de la première, car l’histoire des hommes ne présente de poésie que jugée du haut des idées monarchiques et des croyances religieuses.
Les monuments de l’architecture religieuse au moyen âge sont des ouvrages de l’art, apparemment. […] Les regains de foi religieuse sont des trompe-l’œil de même nature, et notre paradoxale fin de siècle nous présente précisément ce spectacle. […] Je suis au nombre des faibles, comme le reste de ma confession religieuse va le montrer. […] Et ils s’exposent justement au même fiasco que les religieux. […] L’heure était passée, en 1751, pour la poésie et pour l’éloquence religieuse.
Je ne vous rappellerai pas le caractère religieux et même théologique des pudiques confessions de Saint-Augustin. […] Les maladies, la persécution avaient développé ses sentiments religieux. […] Il y connaît des prêtres ou des religieux, qu’il déclare avoir été excellents pour lui. […] L’ouvrage, vu de loin, prend, avec un peu de bonne volonté, des aspects de récit biblique, de mythe religieux. […] Du chapitre 8 du livre IV sortait le préjugé anti-catholique, et la Constitution civile du clergé, et la persécution religieuse.
Comme elle a créé le monde (on peut bien dire cela, je crois, même dans un sens religieux), il est juste qu’elle le gouverne. […] Religion, histoire, fantaisie A chaque nouvelle exposition, les critiques remarquent que les peintures religieuses font de plus en plus défaut. […] Plus d’un écrivain religieux, naturellement enclin, comme les écrivains démocrates, à suspendre le beau à la croyance, n’a pas manqué d’attribuer à l’absence de foi cette difficulté d’exprimer les choses de la foi. Erreur qui pourrait être philosophiquement démontrée, si les faits ne nous prouvaient pas suffisamment le contraire, et si l’histoire de la peinture ne nous offrait pas des artistes impies et athées produisant d’excellentes œuvres religieuses. […] Pour revenir aux peintures religieuses, dites-moi si vous vîtes jamais mieux exprimée la solennité nécessaire de la Mise au tombeau.
Mais quand l’amitié et les sentiments de la nature seraient sans exigence, quand la religion serait sans fanatisme, on ne pourrait pas encore ranger de telles affections dans la classe des ressources qu’on trouve en soi ; car ces sentiments modifiés rendent cependant encore dépendant du hasard : si vous êtes séparé de l’ami qui vous est cher, si les parents, les enfants, l’époux que le sort vous a donné, ne sont pas dignes de votre amour, le bonheur que ces liens peuvent promettre, n’est plus en votre puissance ; et quant à la religion, ce qui fait la base de ses jouissances, l’intensité de la foi, est un don absolument indépendant de nous ; sans cette ferme croyance, on doit encore reconnaître l’utilité des idées religieuses, mais il n’est au pouvoir de qui que ce soit de s’en donner le bonheur.
Parfois, un certain sentiment religieux agrandit cette émotion et la verse sur le monde.
Chérot dans les Études religieuses ; Lapauze, H.
Je me suis regardé, en imitant ce caractère, comme un peintre religieux qui travaille à un tableau d’autel. […] L’inconnu ajoutait encore à la terreur religieuse qu’il éprouvait, rien qu’à sentir courir à son front le souffle sacré. […] Il avait été engagé parmi les Jésuites dans sa jeunesse et avait eu sa période de tendresse et de rêverie religieuse : il ne s’en guérit jamais entièrement.
La géographie physique des lieux parcourus, la géologie, la météorologie, les productions minérales, la flore, si l’on ose parler ainsi, la faune, sont la matière d’autant de chapitres et de tableaux ; puis l’on passe au moral des peuples qui se meuvent dans ce cadre inflexible et sous ce climat impérieux : les centres commerciaux, les centres religieux, puis les mœurs des Touareg en particulier, leurs origines probables, leur histoire (si histoire il y a), leur constitution, leur vie politique et intérieure, tout vient par ordre et en son lieu. […] Deux confréries représentent cette double influence : l’une, celle des Senoûsi, ainsi appelée du nom de leur fondateur Es-Senoûsi (mort en 1859), est notre ennemie mortelle ; elle est fondée sur une pensée de protestation religieuse contre toutes les concessions faites à la civilisation de l’Occident, contre toutes les innovations introduites dans divers États de l’Orient par les derniers souverains, et contré tout essai nouveau d’agrandissement ou d’action de la part des infidèles. […] Les marabouts, très respectés parmi eux, sont des nobles qui ont abdiqué tout rôle politique dans la gestion des affaires pour conquérir une plus grande autorité religieuse, et pour exercer une sorte de magistrature libre dans l’ordre de la justice et de l’instruction publique.
Ce tableau a de la grandeur et de la solennité en ce qui regarde les figures d’Innocent III, de Grégoire IX et de l’empereur Frédéric II ; il a de la beauté et de la grâce en ce qui touche saint Louis, saint François d’Assise, le culte de la Vierge alors dans toute sa fleur, les épopées chevaleresques et religieuses dans leur premier et chaste épanouissement. […] Par bonheur, Phanor est religieux, catholique, il croit : sa foi est un beau voile à sa suffisance. […] Ses livres peuvent attirer et forcer l’admiration pendant quelques pages, mais bientôt leur monotonie fatigue ; car ils sont le contraire de ces écrits chers à Montaigne, pleins de suc et de moelle intérieure, pétris d’expérience et d’indulgence, qui gagnent à être exprimés et pressés, et qui de tout temps ont fait les délices des hommes de sens, des hommes de goût, des hommes vraiment humains… Au résumé, c’est un militant ; il l’est en tout et partout ; comme tel, il laissera dans l’histoire des guerres politiques et religieuses de ce temps une trace lumineuse : Lacordaire et lui, deux lieutenants de La Mennais, et qui ont continué de tenir brillamment la campagne après que leur général avait passé à l’ennemi.
L’Europe, au sortir des troubles religieux et à travers les phases de la guerre de Trente ans, enfantait laborieusement un ordre politique nouveau ; la France à l’intérieur épuisait son reste de discordes civiles. […] A l’époque dont nous parlons, loin d’être un obstacle à suivre le mouvement littéraire, religieux ou politique, ce genre de vie était le plus propre à l’observer ; il suffisait de regarder quelquefois du coin de l’œil et sans bouger de sa chaise, et puis l’on pouvait, le reste du temps, vaquer à ses goûts et à ses amis. […] Ce caractère religieux et résigné augmenta chez elle avec l’âge, sans altérer en rien la sérénité de son humeur ; il communique souvent à son langage quelque chose de plus fortement sensé et d’une tendresse plus grave.
Si l’on excepte Çakya-Mouni, les grands fondateurs religieux n’ont pas été des métaphysiciens. […] Ambitieux profane, égaré dans un dédale de luttes religieuses, cet astucieux Iduméen eut l’avantage que donnent le sang-froid et la raison, dénués de moralité, au milieu de fanatiques passionnés. […] Le mouvement galiléen de Juda, fils d’Ézéchias, ne paraît pas avoir eu un caractère religieux ; peut-être, cependant, ce caractère a-t-il été dissimulé par Josèphe (Ant., XVII, x, 3).
Le chapitre le plus remarquable des deux volumes est assurément celui qui traite des affaires religieuses. […] En même temps que la corde religieuse, il touchait la fibre du patriotisme arabe : « Pourquoi, leur disait-il, la nation arabe est-elle soumise aux Turcs ? […] cela est bien vrai. » Après l’insurrection du Caire, Napoléon ne se départit point de ce système de protection pour les anciens chefs religieux du pays.
Si jamais vous allez en Perse, dans ce pays de vieille civilisation, qui a subi bien des conquêtes, bien des révolutions religieuses, mais qui n’a pas eu, à proprement parler, de Moyen Âge, et dans lequel certaines traditions se sont toujours conservées, prenez un homme d’une classe quelconque, et dites-lui quelques vers de Ferdousi : il y a chance, m’assure-t-on, pour qu’il vous récite de lui-même les vers suivants ; car les musiciens et chanteurs vont en redisant à plein chant des épisodes entiers dans les réunions, dans les festins. […] Dans les premiers instants, le chef religieux de la ville refusa de lire les prières d’usage sur sa tombe, sous prétexte de cet ancien soupçon d’hérésie, et par crainte sans doute de déplaire au sultan. […] Toutefois, grâce à la méthode fidèle et religieuse de traduction qu’a adoptée M.
Il y a eu, au milieu du xviiie siècle, un homme jeune et déjà mûr, d’un grand cœur et d’un esprit fait pour tout embrasser, qui s’était formé lui-même et qui ne s’en était pas enorgueilli, fier à la fois et modeste, stoïque et tendre, parlant le langage des grands hommes du siècle précédent, ce langage qui semblait n’être ici que l’expression naturelle et nécessaire de ses propres pensées ; sincèrement et librement religieux sans rien braver, sans rien prêcher ; réconciliant, en un mot, dans sa personne bien des parties opposées de la nature en montrant l’harmonie. […] Il n’y a nul doute que Vauvenargues ne fût religieux ; cela ressort de ses écrits, et Marmontel a dit de lui qu’il est mort « avec la constance et les sentiments d’un chrétien philosophe ». […] Quelles qu’aient pu être antérieurement les opinions par lesquelles il avait passé, Vauvenargues, à cette date de 1746 et jusqu’à sa mort, était donc et demeura dans des sentiments religieux, élevés, mais philosophiques et libres.
Sentiments religieux d’Augier. […] Augier, en effet, bien que comptant beaucoup d’amis parmi les libres-penseurs, était profondément religieux. […] Et, il y a trois ans, lors de la reprise des Effrontés, il refusa de céder à ceux qui le priaient de permettre qu’on reprît le Fils de Giboyer, afin de ne pas réveiller des ressentiments assoupis et de ne pas soulever, à l’occasion d’une de ses œuvres, des polémiques irritantes sur la question religieuse.
Autre chose est la valeur économique, autre chose les valeurs morales, religieuses, esthétiques, spéculatives. […] Il n’est pas d’être, si humble soit-il, pas d’objet vulgaire qui, à un moment donné de l’histoire, n’ait inspiré des sentiments de respect religieux. […] C’est à quoi servent les fêtes, les cérémonies publiques, ou religieuses, ou laïques, les prédications de toute sorte, celles de l’Église ou celles de l’école, les représentations dramatiques, les manifestations artistiques, en un mot tout ce qui peut rapprocher les hommes et les faire communier dans une même vie intellectuelle et morale.
Beaucoup d’hommes, élevés dans un respect religieux pour d’antiques doctrines, consacrées par d’innombrables chefs-d’œuvre, s’inquiètent, s’effraient des projets de la secte naissante, et semblent demander qu’on les rassure. […] En conclut-on la nécessité de recourir à des sujets du moyen âge ou des temps modernes, à des sujets religieux ou chevaleresques ? […] Soyez religieux et graves dans vos écrits ; mais ne soyez pas éternellement tristes : rappelez-vous que, dans les livres sacrés, tout n’est pas du ton des lamentations de Jérémie, ou des plaintes de Job, et qu’on y trouve aussi des hymnes de bonheur ou des cantiques d’allégresse.