Les Girondins, au ministère et dans l’Assemblée, pèsent tantôt sur l’Assemblée par leur éloquence, tantôt sur le roi par leur popularité ; ils essayent le rôle de modérateurs de la Révolution. […] Il est sans doute possible qu’après un si long laps de temps le curé de Bessancourt ait commis quelques inadvertances de noms, de dates, de détails sur des personnages si nombreux alors dans les prisons et sur leurs rôles respectifs dans ce drame pathétique de leur dernière heure ; mais il est impossible à qui a entendu ce modeste et sincère témoin de ces scènes de révoquer en doute sa véracité. […] Elle m’accueillit avec sécurité, prévenue qu’elle était par le poète Béranger que je n’étais point de sa religion politique, que je ne venais ni pour la flatter ni pour la trahir, mais uniquement pour m’instruire et pour entendre ses témoignages sur le temps, sur les choses, sur les hommes qu’elle avait traversés, connus, fréquentés de si près dans cette intimité quotidienne où les hommes les plus comédiens en public oublient de se masquer, selon leurs rôles, devant les témoins domestiques de toutes les heures secrètes de leur vie. […] XVI Saint-Just aussi jouait un grand rôle dans cette mémoire.
La comparaison des barons du Rhin et des Titans, et le rôle de Frédéric Barberousse assimilé à celui de Jupiter, — c’est de l’histoire à vue d’aigle, à vue de vautour.
Il eût dû être autre le lendemain de Lucrèce et sous le coup de l’enthousiasme même ; il l’eût dirigé en le partageant ; c’est de cette façon empressée que je conçois le mieux le rôle de la critique marchant, comme Minerve, en avant ou à côté de Télémaque.
Le chat joue ici le rôle de conseiller comme dans le conte : « D’où vient le soleil. » 152.
Le moment de la majorité du roi approchait ; le 22 février (1723), un lit de justice devait être tenu au Parlement pour cette déclaration solennelle ; le roi y devait parler, le Régent aussi, le chancelier ou le garde des sceaux également, et enfin le premier président du Parlement y avait son rôle à part. […] Il fut assez coutumier du fait, et ce n’est pas la seule cérémonie dont il ait fait les frais et dont il ait écrit les doubles rôles. […] Il parle de lui, au début, en termes modestes, et qui sont faits pour être agréés : Je n’ai point joué de rôle, dit-il, mais j’ai souvent été témoin.
Quoi qu’il en soit de ces aperçus toujours sujets à conjectures et qui demanderaient bien des développements, tel était, dans le plus beau de son rôle et dans l’ensemble de sa physionomie, l’homme qui, à vingt-deux ans, se mit à causer de toutes choses par lettres avec Vauvenargues ; et ici nous n’avons plus qu’à les laisser parler l’un et l’autre. […] Vauvenargues fait bonne défense et, sans d’abord se découvrir, il accepte en partie le rôle qu’on lui fait, il l’explique et s’en excuse : Je ne veux pas vous faire entendre que je me suffise à moi-même, et que toujours le présent remplisse le vide de mon cœur ; j’éprouve aussi, souvent et vivement, cette inquiétude qui est la source des passions. […] Il vint un temps où Mirabeau n’eût plus été admis à dire à Vauvenargues : « Aimez vos amis avec leurs défauts ; je vous passe trop de sagesse, passez-moi le contraire. » Ce n’est pas toujours le rôle de Vauvenargues de recevoir des conseils ; il aime et excelle à en donner.
Catinat était encore une fois sur le pied d’un négociateur en armes ; ce n’était pas le rôle qu’il eût choisi de préférence. […] Camille Rousset explique fort bien sans doute les hésitations de Catinat par une erreur de plume et un malentendu de rédaction dans l’une des dépêches qu’il reçut ; mais un autre que Catinat, saisissant plus hardiment l’esprit de son rôle et s’en pénétrant plus au vif, serait allé de l’avant sans tant marchander. […] Catinat rentrait trop aisément dans le second rôle : bien faire le jour de l’action, et puis se tenir en deçà plutôt qu’aller au-delà.
Ce n’est point d’ailleurs le rôle de la critique de prédire sans cesse le lendemain, d’outrepasser les horizons ; elle l’a voulu trop faire jusqu’ici. […] Tandis que, sous la Restauration, on aimait surtout dans Talma finissant et grandissant un novateur, une espèce d’auteur et de poëte dramatique (et non, certes, le moindre), qui rendait ou prêtait aux rôles un peu conventionnels et refroidis de la scène française une vie historique, une réalité à demi shakspearienne, — il arrive que ce qu’on a surtout aimé dans notre jeune et grande actrice, ç’a été un retour à l’antique, à la pose majestueuse, à la diction pure, à la passion décente et à la nature ennoblie, à ce genre de beauté enfin qui rappelle les lignes de la statuaire. […] Rendons, rendons enfin admiration et justice à ces hommes qui ont imposé leur nom à leur siècle, Périclès, Auguste, Léon X et Louis XIV ; oui, ils ont été pour beaucoup dans la grandeur et la majesté de l’âge qu’on les a trop accusés d’accaparer ; leur absence totale et prolongée est bien capable aujourd’hui de faire apprécier leur rôle : ils ont empêché les génies et les talents de s’égarer, de se dissiper, les médiocres de passer sur le corps des plus grands ; ils ont maintenu les proportions, les rangs, les vocations, la balance des arts.
Vous trouverez dans le Marinier et dans la Famille Bourgeois des questions d’héritage et d’argent expliquées avec tant de clarté qu’elles en deviennent intéressantes, même si vous les séparez du drame où elles jouent leur rôle. […] Ce bouc qui dénoue le drame redouble encore l’impression d’épouvante et de mystère : il convenait qu’un animal eût un rôle, et un rôle humain, dans une histoire d’hommes si voisins de l’animalité primitive.
Ce Figaro, qui mérite un nom plus sérieux, parce que, sans viser à la dignité, il s’abstient toujours de la déclamation et qu’il ne pousse pas son rôle à l’extrême, a très bien jugé en quelques mots ce prince de Conti qui le raillait. […] « Il m’a souvent passé par l’esprit, dit Gourville, que les hommes ont leurs propriétés à peu près comme les herbes61, et que leur bonheur consiste d’avoir été destinés ou de s’être destinés eux-mêmes aux choses pour lesquelles ils étaient nés. » Et, s’appliquant cette pensée à lui-même, il ajoute : « J’oserais quasi croire que j’étais né avec la propriété de me faire aimer des gens à qui j’ai eu affaire, et que c’est cela proprement qui m’a fait jouer un assez beau rôle avec tous ceux à qui j’avais besoin de plaire. » Gourville fit bien des conquêtes en ce genre, mais la plus difficile, et qui prouve le plus pour lui, fut celle de Colbert. […] Il me semble ici que le rôle des deux côtés est beau : de la part du prince, on aime à voir une dernière fois ce regard étincelant dont l’air de colère n’est ici qu’une preuve suprême d’affection, et on aime aussi cette noble marque du désintéressement de Gourville, qui se montre digne de l’amitié d’un grand homme.
L’expérience de cette campagne m’a fait renoncer pour toujours à ce rôle mixte et bâtard. […] Il a trop de ressort, trop de fierté naturelle d’intelligence, pour se prêter, même avec d’autres que Brune, à ces rôles à la fois intimes et secondaires. […] Marmont, fidèle au génie français, et l’un des plus distingués capitaines de cette école de l’armée d’Italie, penchait encore pour l’offensive et en prenait volontiers l’attitude, même quand son rôle était purement défensif.
C’était son rôle de prédilection et son élément. […] Il écrivit dans La Quotidienne du 19 janvier quelques lignes nobles et senties, bien d’accord avec son rôle de fidélité gémissante. […] Comme il faut qu’un coin de faiblesse se mêle à nos qualités mêmes, on a remarqué que ce rôle de proscrit et de persécuté était devenu chez lui un goût et, vers la fin, un peu une manie, une idée fixe.
Si le style, à première vue, y est plus pompeux et fleuri que celui que Mézeray emploie d’ordinaire, et qui sent parfois le frondeur et le républicain, il n’y a pas de quoi s’en étonner, disait-on, puisque l’auteur, cette fois, s’était travesti en courtisan et voulait rester fidèle à l’esprit de son rôle. […] Il les a distribuées par ordre chronologique ; il y a joint les notes et éclaircissements qu’on peut désirer, une introduction historique où il envisage le caractère et le rôle du personnage, et une préface où il rend compte du procédé matériel de l’écrivain. […] Il est convenable, mais peu à l’aise, en ces rôles.
Son irréligion même, qui éclate pour nous dans ses rapports avec nos philosophes, et qui est le côté par lequel il les a le plus regardés, cette irréligion qui jure si fort avec son rôle de roi fondateur et instituteur de peuple, n’était pas au fond ce qu’accusent ses correspondances les plus connues. […] Nous allons représenter l’Œdipe de Voltaire, dans lequel je ferai le héros de théâtre ; j’ai choisi le rôle de Philoctète ; il faut bien se contenter de quelque chose… M. de Suhm, qui l’a compris, et qui lit, à travers cette indifférence soi-disant philosophique, le regret et le tourment d’une âme amoureuse des grandes choses, lui va toucher la fibre secrète et le rassure en lui disant : La réflexion que vous faites, Monseigneur, sur le bonheur qu’il y a à venir à propos dans le monde est des plus justes, et serait très propre à consoler le héros (le prince d’Anhalt) dont Votre Altesse Royale a une si haute opinion, si à ses qualités guerrières il savait joindre votre philosophie, Monseigneur. […] Je suis bien aise de vous donner encore ce témoignage consolant avant de descendre du théâtre de ce monde, où vous avez joué le rôle d’un parfaitement honnête homme, qui est bien le plus glorieux pour les mortels.
Les règles de la sensation agréable sont des limites pour l’art ; le rôle du génie dans l’art est précisément de reculer sans cesse ces limites et pour cela de paraître parfois violer les règles. […] L’intelligence peut seule exprimer dans une œuvre extérieure le suc de la vie, faire servir notre passage ici-bas à quelque chose, nous assigner une fonction, un rôle, une œuvre très minime dont le résultat a pourtant chance de survivre à l’instant qui passe. […] La curiosité, l’attrait de l’inconnu jouent un grand rôle jusque dans l’attrait excité par une œuvre d’art.
L’« animal politique » d’Aristote devient de plus en plus conscient de son rôle social, Les plus significatifs parmi les derniers travaux de la sociologie, en dépit d’énormes divergences, paraissent tendre vers une conception organique de la cité, envisagée désormais comme un « être » véritable, comme un « individu » plus complexe et plus différencié. […] Tout en affirmant l’individualité profonde de la cité, l’unité et la liberté nationales, elle nous fait entrevoir une solidarité inter-nationale exerçant sa fonction normale et jouant son rôle nécessaire dans la vie de tous les corps sociaux, qu’elle embrasse. […] Malgré l’individualité bien nette des idéals nationaux et la diversité des rôles que les peuples sont destinés à jouer dans l’histoire, il y a au fond de leurs efforts et de leurs luttes une identique aspiration vers un état meilleur, une commune recherche de plus de force et de plus d’équilibre.
Plus précisément, le rôle du cerveau est de faire que l’esprit, quand il a besoin d’un souvenir, puisse obtenir du corps l’attitude ou le mouvement naissant qui présente au souvenir cherché un cadre approprié. […] Le cerveau, en dehors de ses fonctions sensorielles, n’a d’autre rôle que de mimer, au sens le plus large du terme, la vie mentale. […] Je n’irais pas aussi loin ; mais j’estime que nous percevons virtuellement beaucoup plus de choses que nous n’en percevons actuellement, et qu’ici encore le rôle de notre corps est d’écarter de la conscience tout ce qui ne nous serait d’aucun intérêt pratique, tout ce qui ne se prête pas à notre action.
Avant de quitter Lucrèce, rendons hommage à l’actrice qui l’a si tragiquement réalisée : mademoiselle Georges, sans déroger à l’idéal effrayant, au diadème de bronze qui couronne ce rôle d’horreur, a trouvé des accents de nature, des cris de passion familière, la vérité dans la majesté. […] C’est après tout le rôle naturel qui sied au pédantisme ignorant.
Or, les esprits qui jugent de la sorte, ont un rôle à jouer dans l’effort commun ; ils ont à exciter ceux qui doutent d’une issue, à tempérer, à ne pas suivre ceux qui voient à chaque pas un labarum ; ils ont à multiplier les points de vue de l’histoire, les documents de l’érudition, les variétés réelles, innombrables, qui déconcertent les unités étroites et factices ; ils ont aussi à rappeler, d’autres fois, le but futur, la grande unité sociale, vague encore, complexe, et inégale toujours, où évidemment le siècle s’achemine. […] Toute âme, toute vie a son rôle en ce monde ; à l’une est le sillon, à l’autre sont les mers ; à toi, noble insensée et la plus vagabonde, De semer en volant le bon grain dans les airs !
La littérature française à l’étranger Pour les nations méridionales, d’abord, les rôles sont renversés : elles nous empruntent et nous imitent. l’Italie échappe par le goût français aux fadeurs et aux affectations du marinisme. […] Sans doute elle n’oublie jamais son rôle et ses intérêts d’impératrice ; elle se sert de Voltaire pour tromper le monde.
Nous ne possédons pas le scénario primitif, alors que le rôle du valet de Don Juan était rempli par Trivelin. […] On verra plus loin comment Dominique Biancolelli, engagé dans la troupe pour l’emploi de second zanni sous le nom d’Arlequin, doubla Trivelin de 1662 à 1671 et joua ensuite les premiers rôles jusqu’en 1688.
Les sociologues s’efforcent de mettre en lumière le rôle du milieu social et de l’éducation dans la formation de nos sentiments. Ce rôle ne peut être nié.
La Magdaléenne lui fut fidèle jusqu’au Golgotha, et joua le surlendemain de sa mort un rôle de premier ordre ; car elle fut l’organe principal par lequel s’établit la foi à la résurrection, ainsi que nous le verrons plus tard. […] On nomme aussi parmi les disciples Thomas, ou Didyme 434, qui douta quelquefois, mais qui paraît avoir été un homme de cœur et de généreux entraînements 435 ; un Lebbée ou Taddée ; un Simon le Zélote 436, peut-être disciple de Juda le Gaulonite, appartenant à ce parti des Kenaïm, dès lors existant, et qui devait bientôt jouer un si grand rôle dans les mouvements du peuple juif ; enfin Judas fils de Simon, de la ville de Kerioth, qui fit exception dans l’essaim fidèle et s’attira un si épouvantable renom.
Tour à tour dieu et roi, guerrier et messager, l’histrion, changeant de rôle et de visage, fit face à tous les incidents d’un mythe, s’adapta à toutes les péripéties d’une action. […] Le drame avait beau s’élever et se purifier, s’assombrir et s’attendrir, se vouer aux calamités et aux deuils, ils s’obstinaient à y jouer leur rôle, à jeter leurs quolibets bouffons et obscènes sur ses nobles plaintes.
Ils disaient : le baron, le major, le conseiller, parce que les rôles qu’ils créaient représentaient tous les barons, tous les majors et tous les conseillers, sinon de l’Allemagne, au moins de leur idée. […] Tous les autres rôles, qui tournent autour de ceux-là, n’existent que pour mettre en relief la fille du millionnaire, bête comme une dot de six millions, et qui abuse encore de cet énorme droit.
Il faut toujours compter, quand on le juge, sa vertu, sa force morale, ce sentiment qui lui a fait jouer un grand rôle dans les crises politiques et dominer parfois les hommes les plus violents au seul nom de la patrie.
Je ne joue donc pas ici le rôle d’avocat général portant une accusation ; mais, tout au contraire, celui d’accusé répondant aux interrogations qu’on lui pose : si j’ai déserté le théâtre avec armes et bagages, ainsi que l’ont fait MM. […] Mais nous ignorions que ce fût l’homme pour lequel il avait triomphé qui se déguisât en esclave pour jouer le rôle d’insulteur. […] Buloz, les rôles de Christine et de Bérengère. […] Il ne voulait pas me croire, il insista : je donnai à Mme Mélingue les rôles de Christine et de Bérengère. On ne joua pas Christine, et l’on joua Charles VII, mais ce fut Mlle Noblet qui remplit le rôle distribué à Mme Mélingue.
Le duc de Montausier ne se tenait pas pour offensé des applications qu’on lui faisait des principaux traits du rôle.
Que ne déclariez-vous net à votre père que ce rôle ne vous convenait pas ?
Le général Bonaparte, qui eût été ridicule s’il avait voulu se faire prophète ou révélateur, était dans le vrai rôle que lui assignait la Providence, en relevant de ses mains victorieuses cet autel vénérable, en y ramenant par son exemple les populations quelque temps égarées. […] XI En reprenant son rôle d’historien, M. Thiers raconte ensuite, avec la verve d’un Molière politique, les rôles divers joués par le premier Consul, par sa femme, par ses frères, par ses sœurs, par le sénat, par le conseil d’État, par Fouché, par Cambacérès, ses confidents, chargés de risquer les indiscrétions et de subir les désaveux pour se faire offrir sous un nom ou sous un autre le titre du pouvoir monarchique dont il avait déjà la réalité. […] dit-il, affligés de leur rôle plus qu’on ne peut dire, prononcèrent la mort. […] On n’y comprend en réalité qu’une chose : c’est que l’historien, qui veut rester à la fois révolutionnaire et monarchique, en dépit de la contradiction des deux rôles, cherche à excuser maintenant la fondation de l’empire comme il a cherché à excuser le renversement de la république et l’institution dictatoriale du consulat à vie.