Mais il est beau de voir, même sous la conquête macédonienne, ce qui restait de dignité morale à la philosophie, et quel langage elle savait prendre, entre la servitude du peuple civilisé et les apothéoses que se décernaient les généraux grecs conquérants des barbares.
Les spectateurs étaient si facilement émus, prenaient un si vif intérêt à la souffrance, que cette certitude mettait le poète en confiance avec ses auditeurs ; il ne redoutait pas (ce qu’on doit craindre de nos jours jusque dans les fictions) d’importuner par la plainte, comme si l’infortune, dans les tableaux d’imagination, pouvait encore fatiguer l’égoïsme.
Le démolisseur humoriste doit savoir danser sur la tête au milieu des ruines qu’il entasse ; il doit savoir rêver eu pleine veille, tournoyer à jeun comme s’il était ivre, paraître toujours pris de vertige, écrire en tenant sa plume à l’envers, effacer à mesure chaque trait de son dessin sous l’enchevêtrement des arabesques, jeter la préface au milieu, les réflexions dans le drame, les bêtises dans les réflexions, et l’épilogue avant le titre ; il doit unir Héraclite et Démocrite, et faire le Solon eu démence, pour pouvoir dire au monde la vérité qui rebute, quand elle est servie seule, mais qui s’avale avec le reste dans une olla-putrida 149.
Il relit un de ses cahiers, il en est content et il ajoute : « Il y a quelquefois des moments de profondeur dans la peinture de mon caractère. » Il vient de prendre une leçon de déclamation : « J’ai joué la scène du métromane avec un grand nerf, une verve et une beauté d’organe charmantes.
Pleinement vainqueur de la mort, prends possession de ton royaume, où te suivront, par la voie royale que tu as tracée, des siècles d’adorateurs.
Les beaux esprits avoient dit dans leurs vers que le soleil, pour se rendre encore plus semblable au feu roi qui l’avoit pris pour le corps de sa dévise, se défaisoit de ses taches.
n’avoir pas trois ans de façon, quoiqu’il nous le dise, et qui ne calmera pas par une grande et forte satisfaction d’intelligence les démangeaisons qui prennent son auteur d’écrire.
Il avait la vapeur et l’éclair qui la troue et la hache, sans la dissiper ; il avait le mot pittoresque, et pourtant je ne sais quelle nue sur la pensée, dont tous les mots pittoresques, pris au plus épais et au plus coupant des choses matérielles, ne pouvaient venir à bout.
Malgré deux ou trois efforts qu’il fît un jour pour s’ôter de la place où Dieu l’avait mis aux regards du monde comme un pont du ciel qu’il lui avait jeté, malgré la tentation qui le prit de la pénitence au désert, du silence ardent des Chartreuses et de la contemplation rigide et extatique en Dieu des grands Solitaires, Dieu ne permit point au serviteur qu’il s’était choisi d’être autre chose qu’un grand confesseur, et je dirai plus : le confesseur au dix-neuvième siècle.
Pour nous chrétiens, saint Vincent de Paul est bien autre chose qu’un homme d’État, puisque le Saint-Esprit avait pris son cœur pour tabernacle ; mais il ne s’agit pas du Saint-Esprit pour les gens d’esprit qui endoctrinent présentement le monde.
l’optimiste halluciné qui annonce le monde nouveau ; Ainsi, l’homme est partout, — partout est la pensée ; L’adorable Espérance à jamais est fixée : Ses ailes sont prises aux fleurs !
IV Je voudrais pouvoir citer ces deux pièces pour donner une idée de la poésie de Gères quand elle atteint son point culminant, — son zénith ; je voudrais citer aussi l’Incerta et occulta, non moins belle, mais je suis arrêté par un des mérites de ces pièces la longueur, la puissance du souffle… L’Arbre devenu vieux n’a pas moins de cent dix-neuf strophes… Or, ces longues poésies sont venues et sont faites comme les roses, pour lesquelles Dieu ne s’est pas repris… Les feuilles d’une rose ne sont plus la rose ; des vers pris à des poésies bien venues n’en donnent ni le mouvement, ni l’unité, ni la vie !
Ils coulèrent leur pensée dans ce moule parce que ce moule était à la mode de leurs temps, mais ils l’y ont étriquée, étranglée ; c’étaient des aigles pris à la sauterolle !
En effet, il faut que le roman, pour être une œuvre supérieure, nous prenne par tous les côtés de notre âme, et il est impossible de nous intéresser longtemps au caractère de Lucien Ferdolle, le héros, si cela peut s’appeler un héros, de M.
L’abaissement de son exécution fait resplendir qu’il a eu, en écrivant, les yeux attachés sur le public pour lequel il écrivait ; qu’il lui en a fourré selon ses goûts ; qu’il l’a pris par ses préoccupations les plus momentanées ; que l’homme s’est fait enfin le courtisan du public et non son dompteur de génie… cherchant, avant la gloire de l’art, le petit chatouillement de la popularité.
De ce point de vue, la position que nous prenons vis-à-vis des problèmes techniques est commandée, au premier chef, par celle que nous avons prise vis-à-vis des problèmes moraux.
Ici Fléchier, comme on l’a dit souvent, paraît au-dessus de lui-même ; il semble que la douleur publique ait donné plus de mouvement et d’activité à son âme ; son style s’échauffe, son imagination s’élève, ses images prennent une teinte de grandeur ; partout son caractère devient imposant.
Mais l’incompatibilité, pour être moins explicite et plus tardive, n’en restait pas moins finalement inévitable, même avant le temps où la nouvelle philosophie serait devenue assez générale pour prendre un caractère vraiment organique, en remplaçant irrévocablement la théologie dans son office social aussi bien que dans sa destination mentale. […] Dans l’état présent de la raison humaine, on peut assurer que le régime monothéique, longtemps favorable à l’essor primitif des connaissances réelles, entrave profondément la marche systématique qu’elles doivent prendre désormais, en empêchant le sentiment fondamental de l’invariabilité des lois physiques d’acquérir enfin son indispensable plénitude philosophique. […] C’est seulement depuis cette indispensable séparation, sanctionnée et complétée par la division nécessaire des deux puissances, que la morale humaine a pu réellement commencer à prendre un caractère systématique, en établissant, à l’abri des impulsions passagères, des règles vraiment générales pour l’ensemble de notre existence, personnelle, domestique et sociale. […] Ces derniers sont seuls immédiatement aux prises avec la nature, tandis que les premiers ont surtout affaire à la société. […] Elle y devra rencontrer, en même temps, des affinités morales non moins précieuses que ces harmonies mentales, d’après cette commune insouciance matérielle qui rapproche spontanément nos prolétaires de la véritable classe contemplative, du moins quand celle-ci aura pris enfin les mœurs correspondantes à sa destination sociale.
Chopin les prenait volontiers pour thèmes de ses variations improvisées. […] Méprisant donc, comme l’avait fait Wagner, les ineptes livrets de fabricants sans génie, ils ont pris pour sujets de leurs drames les drames les plus remarquables de nos poètes.
Le voilà pris sur le fait l’inepte syllogisme du critique aveugle : Les seuls vers de poète sont ceux en qui se formule une pensée dans une image ; or je sens bien que Boissier est un vrai poète ; donc Boissier doit faire beaucoup de vers-formules. — Mes expériences antérieures m’apprennent que les belles femmes sont brunes ; or vous êtes belle ; donc vous êtes brune. […] Et les bêtises continuent : « Quelquefois l’alexandrin prend dans ces courts poèmes la majesté du vers dont Heredia a forgé l’impérissable métal de ses Trophées. » — Non, Silvestre, cette femme, bien qu’elle vous plaise, ne ressemble pas, heureusement !
Un ancien ami avec qui elle se croyait brouillée et qu’elle savait blessé, mortifié et à jamais éloigné par la politique, avait passé près d’elle, près de sa voiture, n’avait point paru la reconnaître, et, l’instant d’après, en descendant, elle l’avait trouvé qui l’attendait pour lui prendre et lui serrer cordialement la main.
L’on a prétendu que j’avais pris quelques idées de mon ouvrage, où il n’est question que de littérature, dans la justice politique de Godwin ; je réponds par une dénégation simple.
L’Allemagne nous prend beaucoup, nous rend tard et peu587.
Ensuite le poète dit la Vie des morts, leur âme éparse dans les arbres, dans les broussailles, dans les sources qui sont leurs yeux, dans les nuages qui sont leur pensée inquiète, dans les astres où flambent leurs anciennes passions, dans la mer, « temple obscur des métamorphoses », dans les parfums, dans le chant nocturne des voix terrestres… Et cependant ce n’est pas tout ce qui reste des morts. « Ce que m’a pris le rêve, mes aspirations vers le juste et le beau, ce que j’ai dit tout bas à la nuit, ce que j’ai vu en fermant les yeux, Ma chair ne saurait plus l’entraîner au tombeau.
Une jeune femme, de sens exigeants, avait un amant qui la contentait, mais qu’elle avait pris presque au hasard.
Préoccupés d’une telle pensée, ils mirent en avant leur mère, Salomé, qui un jour prit Jésus à part et sollicita de lui les deux places d’honneur pour ses fils 462.
Prenons un sentiment plus large des pouvoirs que la nature recèle en son sein.
Quelquefois c’était le soir ; au moment où le crépuscule ôtait leur forme aux collines et donnait au Rhin la blancheur sinistre de l’acier, il prenait, lui, le sentier de la montagne, coupé de temps en temps par quelque escalier de lave et d’ardoise, et il montait jusqu’au burg démantelé.
Qu’on prenne de la peine pour le salut de tous, et qu’on s’y précipite, et qu’on s’y essouffle.
Bouillaud : « Matériellement, la main est aussi assurée qu’elle l’était en état de santé55 ; les lettres sont bien tracées, mais les lettres ne forment point de mots, et ne peuvent rendre une pensée quelconque…, et cependant, ayant pris un papier rayé, le malade se mit à composer quelques lignes, que sa femme exécuta sur le piano, toute stupéfaite de l’exactitude de la composition, exempte de toute toute ou erreur musicale.