Daubigny cette justice que ses œuvres sont généralement poétiques, et je les préfère avec leurs défauts à beaucoup d’autres plus parfaites, mais privées de la qualité qui le distingue. […] Un marécage miroitant, fourmillant d’herbes humides et marqueté de plaques lumineuses, un tronc d’arbre rugueux, une chaumière à la toiture fleurie, un petit bout de nature enfin, deviennent à ses yeux amoureux un tableau suffisant et parfait. […] La beauté de style et de caractère qu’on a tant louée dans ses bustes de dames romaines n’est pas décidée ni parfaite. […] Cherchons une explication moins ambitieuse, et croyons simplement qu’ayant entendu répéter fréquemment qu’il fallait copier fidèlement le modèle, et n’étant pas doué de la clairvoyance nécessaire pour en choisir un beau, il a copié le plus laid de tous avec une parfaite dévotion. […] Cependant les plus parfaits parmi ces groupes ne sont tels que parce qu’ils se rapprochent davantage de la vraie sculpture et que, par leurs attitudes penchées et leurs entrelacements, les figures créent cette arabesque générale de la composition, immobile et fixe dans la peinture, mobile et variable dans la sculpture comme dans les pays de montagnes.
Bref, tout se passerait dans la nature comme dans les œuvres du génie humain, où le résultat obtenu peut être minime, mais où il y a du moins adéquation parfaite entre l’objet fabriqué et le travail de fabrication. […] De bas en haut du monde organisé c’est toujours un seul grand effort ; mais, le plus souvent, cet effort tourne court, tantôt paralysé par des forces contraires, tantôt distrait de ce qu’il doit faire par ce qu’il fait, absorbé par la forme qu’il est occupé à prendre, hypnotisé sur elle comme sur un miroir, jusque dans ses œuvres les plus parfaites, alors qu’il paraît avoir triomphé des résistances extérieures et aussi de la sienne propre, il est à la merci de la matérialité qu’il a dû se donner. […] Dans les métamorphoses de la larve en nymphe et en insecte parfait, métamorphoses qui exigent souvent, de la part de la larve, des démarches appropriées et une espèce d’initiative, il n’y a pas de ligne de démarcation tranchée entre l’instinct de l’animal et le travail organisateur de la matière vivante. […] D’un côté, en effet, l’instinct le plus parfait de l’Insecte s’accompagne de quelques lueurs d’intelligence, ne fût-ce que dans le choix du lieu, du moment et des matériaux de la construction : quand, par extraordinaire, des Abeilles nidifient à l’air libre, elles inventent des dispositifs nouveaux et véritablement intelligents pour s’adapter à ces conditions nouvelles 62. […] Organisée maintenant pour flotter sur le miel, elle consomme cette provision de nourriture et devient nymphe, puis insecte parfait.
Le portrait de Mithridate, tracé par Racine, est d’une ressemblance parfaite ; c’est Mithridate lui-même qui pense, agit et parle. […] L’auteur n’a peut-être point d’ouvrages plus réguliers et plus parfaits, si l’on excepte Athalie. […] Prétendrait-on que ce vieux Mithridate, plein de passions et de vices, fût un homme parfait ? […] Iphigénie est celle de ses tragédies profanes où il a le moins mis du sien, et cependant c’est la plus parfaite : il embellit tout ce qu’il emprunte, et il semble plus grand encore quand il imite que lorsqu’il invente. […] Athalie, pleine de l’esprit, du caractère et de la religion des Juifs, n’en est que plus parfaite.
Meilleure, c’est l’égalité parfaite dans les jouissances médiocres qui sont l’idéal moyen aussi bien du civilisé que du sauvage. […] Les premières sont celles que nous ressentons à la représentation parfaite du type de notre race. […] L’un devant une statue parfaite jouit de la grâce des courbes, songe : quelle belle œuvre ! […] Agir et vivre dans le désintéressement de celui qui n’agit pas, c’est peut-être le bonheur parfait. […] Les réponses, au nombre de deux mille, peut-être, ont un air parfait d’authenticité.
Parmi tant d’œuvres magistrales, il en est à peine une parfaite que l’on puisse proposer comme un modèle digne d’être imité, et cependant, dans presque toutes, il y a des beautés extraordinaires. […] C’est un style parfait, concis sans pauvreté, correct sans froideur, irréprochable sans purisme, ironique et naturel à la fois, et en somme, travaillé avec tant de courage et de limpidité qu’il sera bientôt classique, s’il ne l’est déjà. […] Ils ne possèdent pas la netteté de Flaubert, ni son style parfait, ni son impersonnalité puissante ; au contraire, s’ils prennent le réel pour matière première, c’est pour le couler dans le moule de l’individualité ou, comme dirait Zola, pour le montrer à travers leur tempérament. […] Pour moi, il n’y a d’autre morale que la morale catholique, et ses préceptes me semblent seuls purs, droits, sains et parfaits. […] Comme Valera est, d’ailleurs, très-sagace, très-psychologue, très-maître de lui, il semble que les destins lui ont réservé dans le roman espagnol le rôle de Stendhal dans le roman français, — un Stendhal parfait dans la forme autant que le vrai Stendhal fut pécheur ; bien des choses éloignent, cependant, Valera du réalisme, surtout son caractère aristocratique qui le pousse peut-être à considérer le réalisme comme quelque chose degrossier, et l’observation de la réalité comme un travail indigne d’un esprit épris de la beauté classique et suprême.
Mais voici une image qui, moins noble, présente le même sens et se trouve d’une parfaite vérité.
Lainé plus énergique et moins fébrile, aussi pur, assistant, non sans une ombre de tristesse, à l’orgie parlementaire, à ce marché d’intrigues et de corruptions qui se démena durant tout le règne de Louis-Philippe, et sans y prendre d’autre part que de s’y pencher de temps en temps, et d’y plonger le regard pour le juger avec honnêteté et dégoût et pour le flétrir (comme il fit à un moment pour la coalition sous le ministère Molé), mais, je le répète, sans jamais en revendiquer profit pour lui ni en tirer prétexte à des combinaisons ambitieuses : je l’eusse voulu, en un mot, plus platonique et plus désintéressé, plus parfait qu’il n’est donné sans doute à la nature humaine de l’être.
Ce petit nombre de critiques excepté, l’on doit reconnaître que les Grecs ont dans leurs tragédies un goût parfait, une régularité remarquable.
Partout l’ignorance et la docilité politiques sont parfaites.
Ainsi, notre précieux confrère, avec au fond une spirituelle connaissance du cœur humain, à la forme un souci récompensé du parfait, et les plus louables ruses, améliore grandement, par ses petites cultures intensives, le champ des lettres françaises.
Il préféra quitter la vie dans la parfaite clarté de son esprit, et attendre avec une pleine conscience la mort qu’il avait voulue et appelée.
Ce qu’il appelle ici verborum intellectum, ou l’expression, est parfaite dans ce musicien.
Que Fénelon soit parfait écrivain dans beaucoup de ses ouvrages, c’est une chose que nous avons reconnue nous-même.
Il n’a nul égard à l’accord parfait du caractère, de l’esprit, de la vie tout entière de celui à qui il est imputé, avec le mot même.
L’enthousiasme ne sait pas trembler, un écrivain qui a voué à Bossuet un culte véritable et qui, pour mieux vivre tête à tête avec lui, s’est retiré intellectuellement de son siècle et n’a plus habité que celui de cet imposant génie, Floquet, a entrepris de nous donner un livre nouveau sur Bossuet, et, quoique sa modestie le cache avec un goût parfait sous ce nom respectueux d’Études, ce livre, d’une érudition vaste et détaillée, n’en est pas moins une biographie.
Nous avons fait partie de cette jeune école qui, dans les dix premières années de la Restauration, ramenée à la foi chrétienne par l’étude des de Maistre, des Bonald et des Frayssinous, succédait, non pas à l’école légère et railleuse de Voltaire, morte déjà depuis longtemps, mais à l’école positive et raisonneuse de l’Empire… Pleine d’amour pour la vérité, mais, après tout, fille de son siècle, et pleine aussi d’admiration pour la science, l’école dont nous parlons accueillait avec respect une foi dont elle sentait la grandeur et les bienfaits, mais elle n’en restait pas moins fidèle à la raison, dont elle comprenait l’autorité… La science était déjà venue en aide aux vérités chrétiennes… Cuvier montrait partout les traces du déluge et l’accord parfait des nouvelles découvertes géologiques avec le récit génésiaque.
Enfin, l’un est le fini le plus parfait, et l’autre l’infini (qui ne peut pas l’être sans perdre à l’instant même son grand caractère d’infini), seulement semblables en ceci, s’il faut à toute force leur trouver une ressemblance, c’est qu’ils sont, chacun à sa manière, de délicieux poètes tous les deux !
cela est charmant et cela serait parfait sans les deux débilités que j’ai soulignées ; mais ce n’est qu’un cil dans un bel œil bleu.
Comme aussi dans L’Accord parfait, Sacra famés, L’État, L’Expiation, Le Mal suprême et d’autres encore qu’il est impossible d’énumérer dans cette gerbe pressée de poésies qui n’ont qu’un tort à nos yeux, c’est d’être des brins de poésie.
Il fallait avoir l’instinct profond des choses poétiques, vibrer en accord parfait avec elles et surtout n’être pas enterré sous ce gazon qui fleurissait l’estimable crâne de Walckenaer comme une tombe, et M.
Tout le monde, en effet, sait la place que l’auteur des Cariatides et des Stalactites occupe dans la poésie française, et cette place, même ceux qui ne vibrent pas en accord parfait avec sa poésie ne la lui contestent pas.
Leur solution parfaite, je la trouve dans une lettre d’Olivier Amphoux, docteur en droit, étudiant en théologie protestante, qui, peu avant Vassincourt, où il tomba le 5 septembre 1914, écrivait : « L’heure de la grande bataille approche.
La vie n’attend pas la science ; et il ne faudrait rien moins que la science parfaite et complète de toutes les séries des phénomènes sociaux pour nous donner la formule de la vraie politique égalitaire.
Le caractère de l’homme était en harmonie parfaite avec sa vie. […] Taine cherche dans l’histoire les types les plus parfaits des diverses variétés de l’animal humain. […] La dignité et la bonté s’unissaient en lui dans un si parfait accord, qu’il savait autoriser la familiarité tout en imposant le respect. […] Son admiration pour son ami était telle qu’il le voulait parfait, et qu’il désirait être lui-même parfait pour être digne de lui. […] C’est le tableau le plus parfait de la vie humaine, ou plutôt c’est le résumé de la vie de l’humanité, concentré en un point.
Tous n’étaient pas non plus en parfait accord. […] Aux socialistes, qui pourraient se croire en possession d’un système définitif et parfait, il rappelle le danger qu’il y aurait pour eux à s’enfermer dans des formules trop étroites et trop rigides. […] l’orthographe sera à la fois parfaite et d’une simplicité enfantine… Ainsi soit-il, mes frères ! […] Le malheur est qu’écrivain scrupuleux, jaloux d’une exactitude parfaite, il n’en a pas encore livré au public le développement complet. […] Peut-être se fût-il demandé si une maîtrise de soi, aboutissant à une parfaite sérénité, est bien un idéal irréprochable.
Oui, sans doute, nous retrouvons chez lui l’harmonie parfaite que nous sommes habitués depuis longtemps à ne plus chercher que parmi les anciens. […] Ces idées sont mesurées avec une parfaite convenance sur le caractère, le degré de culture et l’expérience de chacun d’entre eux. […] Assez longtemps nous avons demandé aux âges reculés et aux chefs des nations les seuls types parfaits que l’art sût nous créer. […] À la vérité, Robert ajoute que ce bonheur parfait n’est que dans les biens idéaux. […] En vérité, le pauvre Itzig a du malheur ; et si, en nous racontant avec cette symétrie parfaite les destinées si différentes des deux enfants d’Ostrau, M.
Enfin, le spectacle, d’un goût parfait, d’une richesse très harmonieuse, est un charme pour les yeux. […] Et enfin, pour achever d’éclaircir la question du renanisme, outre les livres de Renan, il y a sa vie, qui fut celle d’un parfait honnête homme, d’un homme très courageux — et d’un bon homme. […] J’étais à l’Ecole normale (on n’est pas parfait et c’est une tare qu’on m’a assez reprochée ! […] Que Scarmentado, de son côté, trompe sa femme, et ce sera l’accord parfait, la félicité absolue. […] J’ai des raisons de croire que, aujourd’hui encore, notre corporation est des plus mêlées et qu’elle contient à la fois les pires gredins et les plus parfaits honnêtes gens.
L’ensemble n’est pas mal, et sera mieux, Dieu évoluant vers le parfait, c’est-à-dire vers lui-même, et Tout aspirant à être Tout d’une façon, si j’ose dire, plus totale. […] Si son Dieu unique est véritablement la bonté absolue, l’être parfait, il aurait dû faire son univers parfait. […] Personne ne fut plus pénétrant et plus rusé avec une parfaite et sincère bonhomie. […] C’est le manuel du parfait intrigant. […] Comme auteur, chrétien élégant ; comme homme, chrétien docile, humble, soumis, je ne dis pas parfait chrétien ; mais chrétien vrai, selon la foi et par les œuvres.
C’est bien, en effet, leur maître livre, leur livre parfait, celui où ils ont le plus tempéré leur manière. […] Si un artiste publie un ouvrage parfait, il y a bien des chances pour que son esthétique soit bonne. […] C’est ainsi que Paul et Virginie et Atala sont restés des types inoubliables de littérature neuve et parfaite. […] C’est dans Molière que l’on trouve les plus parfaits modèles de l’amour pur. […] La Bruyère n’a publié qu’un livre, qui est parfait, Pascal est le dernier mot de la netteté condensée, qui ne s’obtient que par le labeur.
D’instinct et sans effort, ils ont rencontré le geste aisé, la parole facile, l’élégance soutenue, le trait piquant, la clarté parfaite. […] Le sentiment d’où tout part chez le réformé est l’inquiétude de la conscience ; il se représente la justice parfaite, et sent que sa justice, telle quelle, ne subsistera point devant celle-là. […] Mais il écrit en parfait honnête homme, on voit qu’il ne cherche point du tout la gloire d’orateur ; il veut persuader solidement, rien de plus. […] Pendant dix pages, l’idée déborde en une seule phrase continue du même tour, sans crainte de l’entassement et de la monotonie, en dépit de toutes les règles, tant le cœur et l’imagination sont comblés et contents d’apporter et d’amasser toute la nature comme une seule offrande « devant celui qui, par ses nobles fins et sa façon obligeante de donner, surpasse ses dons eux-mêmes et les augmente de beaucoup ; qui, sans être contraint par aucune nécessité, ni tenu par aucune loi ou par aucun contrat préalable, ni conduit par des raisons extérieures, ni engagé par nos mérites, ni fatigué par nos importunités, ni poussé par les passions importunes de la pitié, de la honte et de la crainte, comme nous avons coutume de l’être ; ni flatté par des promesses de récompense, ni séduit par l’attente de quelque avantage qui pourrait lui revenir ; mais étant maître absolu de ses propres actions, seul législateur et conseiller de lui-même, se suffisant, et incapable de recevoir un accroissement quelconque de son parfait bonheur, tout volontairement et librement, par pure bonté et générosité, se fait notre ami et notre bienfaiteur ; prévient non-seulement nos désirs, mais encore nos idées, surpasse non-seulement nos mérites, mais nos désirs et même nos imaginations, par un épanchement de bienfaits que nul prix ne peut égaler, que nulle reconnaissance ne peut payer ; n’ayant d’autre objet en nous les conférant que notre bien effectif et notre félicité, notre profit et notre avantage, notre plaisir et notre contentement833. » La force du zèle et le manque de goût : tels sont les traits communs à toute cette éloquence. […] L’art classique, devenu parfait, fournit la méthode et les développements.