Une lettre à Ibis, un conte légendaire, deux petites histoires orientales, je tiens l’une, La Besace de toile bise, pour parfaite en son genre, et une brève nouvelle de notre temps, La Vieille à l’Araignée, forment la première partie du livre ; et, déjà, j’indiquerai une différence dans la manière d’écrire de M.
Et il possède une parfaite science du métier.
Baour-Lormian est un de nos meilleurs versificateurs ; son style n’est cependant remarquable par aucun de ces efforts, aucune de ces tentatives qu’on observe dans celui de la plupart de nos poètes à la mode, tout est naturel et simple dans les vers de M. de Lormian… Le fond sur lequel roulent ces Veillées est bien triste et bien sombre : il ne peut plaire qu’aux âmes sensibles et mélancoliques qui aiment à entendre les Muses soupirer des plaintes sublimes et moduler de tendres regrets ; elles y trouveront, dans de beaux vers, l’expression la plus parfaite des sentiments dont elles se nourrissent, et chériront le poète aimable dont les chants mélodieux s’accordent si bien avec cette voix secrète de douleur qui retentit toujours au-dedans d’elles-mêmes.
Calemard de Lafayette, un poème qui n’est sans doute pas de tout point parfait, mais qui est vrai, naturel, étudié et senti sur place, essentiellement champêtre en un mot, et dont un poète académicien, et non académique (M.
Embrassant donc le xviie siècle dans son ensemble et le résumant dans le caractère qui y domine, il y voit, contrairement à l’esprit du xvie siècle, un perpétuel travail et une tendance suivie depuis Henri IV et Richelieu jusqu’à Louis XIV à l’établissement du pouvoir monarchique : On peut dire que l’esprit de tout ce siècle-ci, remarque-t-il, a été, du côté de la Cour et des ministres, un dessein continuel de relever l’autorité royale jusqu’à la rendre despotique ; et du côté des peuples, une patience et une soumission parfaite, si l’on en excepte quelque temps pendant la régence. […] Sur Vardes si mêlé aux intrigues de la cour de Madame, et qui n’était plus de la première jeunesse, « mais plus aimable encore par son esprit, par ses manières insinuantes, et même par sa figure, que tous les jeunes gens » ; — sur Lauzun, « le plus insolent petit homme qu’on eût vu depuis un siècle », excellent comédien, non reconnu tout d’abord ; — sur Bellefonds qui était creux et faux en tout, « faux sur le courage, sur l’honneur et sur la dévotion » ; — sur La Feuillade « fou de beaucoup d’esprit, continuellement occupé à faire sa cour, et l’homme le plus pénétrant qui y fût, mais qui souvent passait le but » ; — sur Marcillac, fils de La Rochefoucauld, c’est-à-dire de l’homme de son temps le plus délié et le plus poli, et qui lui-même réussit dans la faveur, « étant homme de mérite, poli, et sage de bonne heure, caractère que le roi a toujours aimé » ; — sur le chevalier de Rohan, au contraire, qui fut décapité pour crime de lèse-majesté, « l’homme de son temps le mieux fait, de la plus grande mine, et qui avait les plus belles jambes » (car il ne faut pas mépriser les dons de la nature, pour petits qu’ils soient, quand on les a dans leur perfection)75 ; — sur tous ces originaux et bien d’autres le témoignage de La Fare est précieux, de même que son expression est parfaite. […] Revenant en idée sur cet amour délicat et tendre qui avait honoré son passé, sur ce souvenir qui aurait dû lui être sacré de Mme de La Sablière, il ne craignait pas de le comparer et de le sacrifier aux images de cette vie sans retenue et sans scrupule qui l’envahissait désormais tout entier : De Vénus-Uranie, en ma verte jeunesse, Avec respect j’encensai les autels, Et je donnai l’exemple au reste des mortels De la plus parfaite tendresse.
Cowper, ce poète moraliste et austère qui avait visé à réformer le monde, se trouva subitement à la mode et dans la faveur des salons pour une boutade qui, sauf plus d’innocence et une chasteté parfaite, aurait pu être aussi bien une des drôleries plaisantes et comme qui dirait un Cadet Buteux ou Monsieur et Madame Denis de Désaugiers. […] Je passe rapidement sur ces gentillesses, sur les progrès de la chaise que le jonc de l’Inde a rendue plus flexible, à laquelle on ajoute des bras, et à ces bras encore on ne donne pas d’emblée la parfaite et commode courbure : rien, dans les arts de la vie, ne se trouve du premier coup. […] Cependant ici, dans cette description si parfaite qu’on vient de lire, Cowper a su concilier les deux ordres de qualités, la finesse et le relief de chaque détail (je dirai même le brillanté sur un ou deux points), et la gradation et la fuite aérienne de la perspective.
Des juges, d’ailleurs équitables, ont cru trouver trop de régularité et de mécanisme dans l’indication stricte des heures, des minutes consacrées à chaque portion des devoirs dans les classes ; mais il semble qu’en se représentant avec une précision si parfaite les exercices de chaque groupe successivement, le ministre ait voulu ne pas s’en tenir à une idée prise de loin et de haut, comme cela est trop ordinaire ; qu’il ait voulu communiquer aux maîtres le sentiment de l’importance qu’il met à un parfait accord entre les facultés diverses. […] Il acquiert pour toute la vie l’habitude de raisonner en chimiste, au lieu de se borner à savoir par cœur, pour quelques mois, le texte de son cours… Aussi, pour la parfaite exécution du nouveau plan d’études, les professeurs trouveront-ils bien plus de profit à préparer leur leçon dans le laboratoire même, au milieu des appareils, en prenant part à la disposition matérielle des expériences, qu’à l’étudier dans leur cabinet, abstraction faite des objets qu’ils vont avoir à manier et à faire passer sous les yeux des élèves.
Housset avec un accent pénétré et qui l’honore, sont certainement celles qui m’ont donné le plus de bonheur intellectuel et de jouissances parfaites. […] De plus il a sous lui toute une élite d’hommes secondaires que cette histoire nous découvre et qui prennent figure et vie à nos yeux : — en première ligne, Martinet, lieutenant-colonel du régiment du Roi, mort maréchal de camp, officier modèle, dont le nom devient proverbial dans l’armée, et qui est l’instrument de la réforme, le parfait instructeur, le praticien de la discipline nouvelle dans l’infanterie ; — après lui, le chevalier de Fourilles, qui rend des services pareils, et qui est un autre Martinet pour la cavalerie ; — des intendants comme Chaniel, agent zélé, ferme, intelligent, dont les plus grands généraux redoutent les écritures, qui ne paraît pas en avoir abusé toutefois, et que Louvois, fidèle au principe de la séparation des pouvoirs, soutient sans broncher dans ses contestations avec les maréchaux victorieux, après la conquête. […] Je suis sur les lieux ; je vois les choses avec application, et c’est mon métier que de les connaître ; je sais mon devoir, aux règles duquel je m’attache inviolablement, mais encore plus que j’ai l’honneur d’être votre créature, que je vous dois tout ce que je suis, et que je n’espère que par vous ; ce qui étant de la sorte, et n’ayant pour but que très-humble et très parfaite reconnaissance, ce serait bien y manquer et me rendre indigne de vos bonnes grâces, si, crainte d’une rebuffade ou par l’appréhension de la peine, je manquais à vous proposer les véritables expédiants qui peuvent faciliter le ménage et avancement de cet ouvrage-ci, et de tous ceux que vous me ferez l’honneur de me commettre.
Les frères Le Nain, nés et élevés à Laon, eurent pour premier maître un étranger et probablement un Flamand, qu’on ne nomme pas ; ils étaient trois, Antoine, Louis et Mathieu, « vivant, est-il dit, dans une parfaite union » ; ils offraient, dans l’application de leur pinceau, des différences, qui paraissent avoir été de dimension plutôt que de manière. […] Malgré ce léger défaut d’action et de composition qui ne s’aperçoit qu’en y repensant et à l’analyse, l’effet de lumière est si vrai, si large, si bien rendu, si pleinement harmonieux ; la bonté, l’intelligence et les vertus domestiques peintes sur toutes ces figures sont si parfaites et si parlantes, que l’œuvre attache, réjouit l’œil, tranquillise le cœur et fait rêver l’esprit. […] Il te faut, pour le moins, posséder et joindre à tes mérites ce génie d’imitation si parfait, si animé, si fin, qu’il devient comme une création et une magie à son tour, cet emploi merveilleux des moyens et des procédés de l’art qui, sans s’étaler et sans faire montre, respire ou brille dans chaque détail comme dans l’ensemble.
Qualités et défauts, Villars était bien en tout un type parfait de l’officier français tel qu’on l’a vu de tout temps et tel qu’il est encore. […] Louis XIV, sur un échiquier aussi déterminé, aussi rapproché du centre, et où l’échec au roi était à tout coup si menaçant, avait un avis militaire personnel ; il passait des heures à étudier les cartes de Flandre, et il répondait ou faisait répondre à Villars sur ses moindres démarches en parfaite connaissance de cause. […] Les lignes de communication, de Marchiennes à Denain, s’appelaient insolemment « le chemin de Paris. » Louis XIV, il faut lui rendre cette justice, écrivait de Fontainebleau, le 17 juillet, au maréchal de Villars, cette lettre qui en suppose une autre antérieure sur le même sujet : « Ma première pensée avait été, dans l’éloignement où se trouve Landrecies de toutes les autres places d’où les ennemis peuvent tirer leurs munitions et convois, d’interrompre leur communication en faisant attaquer les lignes de Marchiennes (ou de Denain), ce qui les mettrait dans l’impossibilité de continuer le siège ; mais, comme il m’a paru que vous ne jugez pas cette entreprise sur les lignes de Marchiennes praticable, je m’en remets à votre sentiment par la connaissance plus parfaite que vous avez étant sur les lieux… » Le ministre de la guerre, M.
Lorsqu’il ne s’agit pas d’étudier pour gagner sa vie, et si l’étudiant est assez heureux pour que le Ciel lui ait donné des parents qui lui assurent du pain, je serais volontiers d’avis qu’on le laissât suivre la science pour laquelle il se sentirait le plus d’inclination ; et bien que celle de la poésie soit moins utile qu’agréable, du moins elle n’est pas de ces sciences qui déshonorent ceux qui les cultivent La poésie, seigneur hidalgo, est, à mon avis, comme une jeune fille d’un âge tendre et d’une beauté parfaite, que prennent soin de parer et d’enrichir plusieurs autres jeunes filles, qui sont toutes les autres sciences ; car elle doit se servir de toutes, et toutes doivent se rehausser par elle. […] je vous en garde un pour la bonne bouche, qui sera le parfait et le superfin dans ce genre d’aventures. » Il ne s’apercevait pas en parlant ainsi, que par son gai succès de Don Quichotte il allait rendre son succès sérieux impossible ; il tirait d’avance sur son futur roman, et Persilès et Sigismonde n’avait plus lieu de naître. […] Jugeant en parfaite connaissance de cause les écrivains espagnols, Saint-Évremond disait : « Il y a peut-être autant d’esprit dans les autres ouvrages des auteurs de cette nation que dans les nôtres ; mais c’est un esprit qui ne me satisfait pas, à la réserve de celui de Cervantes en Don Quichotte, que je puis lire toute ma vie sans en être dégoûté un seul moment.
S’il a l’air de céder si aisément et de se dérober quand il a affaire au peuple, c’est-à-dire aux esprits frivoles, esclaves du préjugé et de l’habitude, c’est qu’il ne veut rien céder du fond et qu’il réserve pour un petit nombre, « pour une petite troupe choisie », l’entière originalité et l’intégrité parfaite de ses pensées. […] Travaillez donc, Copernic, Galilée, Newton, La Place, veillez vos longues veilles, suivez jusqu’au bout la méthode expérimentale ou l’analyse rigoureuse, et tous vos travaux qui ont fait de l’astronomie la plus digne et la plus parfaite des sciences vont derechef servir de support et comme de trépied à des rêveries néoplatoniciennes renouvelées, à des extases. […] Apaisons, éteignons, s’il se peut, en leur présence, nos velléités, nos agitations sublunaires : dans notre parcelle éthérée, effaçons-nous, soyons une fois le parfait miroir, le pur esprit.
Voici une page que je trouve parfaite en son genre : lisez haut, lisez bien, accentuez et scandez chaque mot, chaque membre de phrase, comme Jean-Jacques le voulait pour son monologue de Pygmalion, et vous sentirez quelle est, en ce genre du pittoresque écrit, l’habileté de MM. de Goncourt : « Sept heures du soir. […] Ce qui n’empêche pas le charmant motif dont on vient de voir l’esquisse d’être d’une parfaite vérité pour les cœurs atteints et mordus de la chimère. […] Je n’ai point flatté les auteurs, des amis pourtant dont les qualités me sont précieuses et chères ; je me suis pris chez eux à l’essentiel, à ce qui est caractéristique et qui constitue leur nature ou la vocation qu’ils se sont donnée : mais je me serais bien mal fait comprendre, si l’on ne concluait avec moi que MM. de Goncourt sont des artistes aussi distingués que convaincus et sincères, un talent rare en deux personnes, de parfaits gentilshommes de lettres.
des échantillons de tous ces beaux marbres qu’il a vus, des plans, des fac-simile de toutes ces belles cathédrales qu’il voulait surpasser, et il forme un cabinet de dessins parfaits, de reliefs d’ivoire, ou encore un cabinet de minéralogie, d’où il résulte aussi toutes sortes de lumières. […] Fille de paysans, sans éducation, elle ne pouvait composer ses tableaux de mémoire ; sa bonne foi d’ailleurs, sa simplicité parfaite, sa piété ardente, sont attestées par les hommes les plus éclairés qui la visitèrent. […] Pendant qu’il parle ainsi sans discontinuer, d’une voix claire, les yeux baissés, une espèce de sourire vague à sa bouche (assez gracieux dans son dédain) annonce cette profonde et douce satisfaction, cette intime et parfaite certitude qu’il a de lui-même.
Ce ne fut qu’après Richelieu, après la Fronde, sous la reine-mère et Mazarin, que tout d’un coup, du milieu des fêtes de Saint-Mandé et de Vaux, des salons de l’hôtel de Rambouille1 ou des antichambres du jeune roi, sortirent, comme par miracle, trois esprits excellents, trois génies diversement doués, mais tous les trois d’un goût naïf et pur, d’une parfaite simplicité, d’une abondance heureuse, nourris des grâces et des délicatesses indigènes, et destinés à ouvrir un âge brillant de gloire où nul ne les a surpassés. […] Racine, en effet, est le plus parfait modèle de ce style en poésie ; Fléchier fut moins heureux dans sa prose. […] Les talents les plus libres et les plus origiraux ne deviennent parfaits que s’ils ont eu une discipline première, s’ils ont fait une bonne rhétorique ; Mme de Sévigné fit la sienne sous Ménage et sous Chapelain.
On voit, à ces principales conditions d’un historien parfait, combien il est rare que toutes ces conditions se trouvent réunies dans un même homme, et combien peu de chefs-d’œuvre historiques doivent exister et surnager sur cet océan d’annales ou de chroniques qui encombrent les archives des nations. […] Dans ce genre d’histoire parfait, l’historien n’est plus seulement un annaliste : il est citoyen, il est moraliste, il est politique, il est poète, il est peintre, il est législateur, il est apologiste, il est satiriste, il est homme d’État, il est juge, il est instituteur des nations, il est Tacite. […] La plus parfaite des langues serait celle qui contiendrait le monde dans un mot.
Puis on a Mme de Maintenon, esprit juste, tête saine, parole agréable et parfaite dans un cercle tracé. […] Mme Du Deffand eut cela de particulier du moins, entre les esprits forts de son siècle, de n’y point mettre de bravade, de sentir que la philosophie qu’on affiche cesse d’être de la philosophie, et elle se contenta de rester en parfaite sincérité avec elle-même. […] Une des personnes de sa société qu’elle appréciait le plus était la duchesse de Choiseul, femme du ministre de Louis XV, personne bonne, vertueuse, régulière à la fois et charmante, et qui n’avait d’autre défaut à ses yeux que d’être trop parfaite ; elle lui écrivait un jour : Vous ne vous ennuyez donc point, chère grand-maman (c’était un sobriquet de société qu’elle lui donnait), et je le crois, puisque vous le dites.
Ce M. de Bernières, issu, si je ne me trompe, d’une famille très liée avec Port-Royal, était homme de bien, d’un bon esprit, et vivait en parfait accord avec l’archevêque de Cambrai. […] Dans le peu qu’on nous donne ici de ses conseils à Mme de Maintenon, il sait mettre le doigt sur les défauts essentiels, sur cet amour-propre qui veut tout prendre sur soi, sur cet esclavage de la considération, cette ambition de paraître parfaite aux yeux des gens de bien, enfin tout ce qui constituait au fond cette nature prudente et glorieuse. […] Il est assez singulier qu’une telle parole se rencontre dans la bouche du Sauvage américain, mais elle n’en est pas moins belle et parfaite, et digne qu’on l’inscrive à la suite des pages de Fénelon.
Saint-Simon, qui nous l’a peinte à ravir dans sa première forme, nous la montre encore dans le plein de sa beauté et dans la grandeur de sa représentation, qu’elle sut soutenir à travers toutes les fortunes : C’était une femme plutôt grande que petite, brune avec des yeux bleus qui disaient sans cesse tout ce qui lui plaisait, avec une taille parfaite, une belle gorge, et un visage qui, sans beauté, était charmant ; l’air extrêmement noble, quelque chose de majestueux en tout son maintien, et des grâces si naturelles et si continuelles en tout, jusque dans les choses les plus petites et les plus indifférentes, que je n’ai jamais vu personne en approcher, soit dans le corps, soit dans l’esprit, dont elle avait infiniment et de toutes les sortes ; flatteuse, caressante, insinuante, mesurée, voulant plaire pour plaire, et avec des charmes dont il n’était pas possible de se défendre quand elle voulait gagner et séduire ; avec cela un air qui, avec de la grandeur, attirait au lieu d’effaroucher ; une conversation délicieuse, intarissable, et d’ailleurs fort amusante par tout ce qu’elle avait vu et connu de pays et de personnes ; une voix et un parler extrêmement agréables, avec un air de douceur ; elle avait aussi beaucoup lu, et elle était personne à beaucoup de réflexion. […] Retournée à Madrid toute puissante et autorisée (août 1705), elle y règne véritablement dans l’intérieur du palais, et s’attache pour l’avenir à demeurer en parfaite concorde avec la cour et le cabinet de Versailles, jusqu’à l’heure toutefois où ce cabinet se mettra en désaccord avec les intérêts mêmes de l’Espagne. […] Mais il est encore bien d’autres traits à relever dans sa nature, et qui la mettent en parfait contraste avec son amie Mme de Maintenon.
Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. […] Les étés, les hivers étaient ainsi employés par d’Antin à la poursuite laborieuse de sa fortune : dans le parfait idéal où il se la peignait toujours, il ne croyait pas encore l’avoir atteinte. […] Il en voulait au cœur du roi avant tout, il filait à la Cour le parfait amour, et c’est l’endroit aussi par où il est le plus blessé : Un homme sage, dit-il, peut se passer de la fortune, surtout quand il a fait abondamment ce qu’il faut pour la mériter.
Ces âmes fines, qui ont reçu en don le maniement des cœurs, auraient peu à faire pour devenir de parfaits instruments de politique ; ce qu’on peut leur demander, c’est de ne jamais se servir de leur science qu’à bonne fin, et c’est ce que fit saint François de Sales en toute sa vie. […] Le succès rapide de la première édition de ce livret, comme il l’appelle, l’obligea à retoucher la seconde : « J’ai ajouté, disait-il, beaucoup de petites chosettes, selon les désirs que plusieurs dignes juges m’ont témoigné d’en avoir, et toujours regardant les gens qui vivent en la presse du monde. » C’est cette appropriation parfaite de ce premier ouvrage de saint François de Sales aux gens du monde, qui en fait le cachet. […] Voilà la vraie grâce de l’écrivain chez saint François de Sales ; il n’y aurait, ce semble, qu’à arrêter sa plume à temps pour que ce fût parfait.
Dans ce livre, où tout est en vers, jusqu’à la préface, on trouve une note en prose qui ne peut laisser aucun doute, non seulement sur la manière de procéder de l’auteur des Fleurs du mal, mais encore sur la notion qu’il s’est faite de l’Art et de la Poésie ; car Baudelaire est un artiste de volonté, de réflexion et de combinaison avant tout. « Fidèle — dit-il — à son douloureux programme, l’auteur des Fleurs du mal a dû, en parfait comédien, façonner son esprit à tous les sophismes comme à toutes les corruptions. » Ceci est positif. […] Comptez-le donc aussi, et mettez-le avec tous les aphorismes, tranquillement impudents, de ce sybarite plein de calme : « toute débauche parfaite a besoin d’un parfait loisir », etc., et confessez qu’il y a là une somme de comique à défrayer une pièce de théâtre, et souhaitons même que L’Ivrogne, qui sera le prochain drame de Baudelaire, soit aussi gai, sous couleur noire, que ses Paradis artificiels.
Imprécis quant à la forme, solubles et souples comme des lianes, chantants et harmonieux comme des improvisations musicales, ils resteront le seul exemple d’une œuvre d’art parfaite, créée contrairement à toutes formules.
M. de Valmont est un parfait comédien ; il est maître des expressions de son visage, du mouvement de ses gestes et du moment de ses larmes. […] A tous ceux qui fréquentèrent l’admirable et rare écrivain, le causeur incomparable et l’ami parfait, l’étude de M. […] Avec un sérieux parfait, il accomplit ses devoirs de biographe, il est impartial et renseigné. […] Ils sont le témoignage d’une de nos aspirations nationales et l’une de ses plus parfaites réalisations. […] Aussi, entre Louis XIV et Le Nôtre, l’accord fut-il parfait.
Molière est moins grand, mais immensément plus parfait. […] Ces vers ne sont-ils pas aussi parfaits que plaisants. […] Il faut parmi le monde une vertu traitable ; À force de sagesse, on peut être blâmable ; La parfaite raison fuit toute extrémité, Et veut que l’on soit sage avec sobriété. […] A-t-on jamais écrit de prose plus vive en vers si parfaits ? […] L’amour qui nous attache aux beautés éternelles N’étouffe pas en nous l’amour des temporelles : Nos sens facilement peuvent être charmés Des ouvrages parfaits que le ciel a formés.
Et comme la prière mentale devenait l’état habituel des âmes profondément religieuses, parvenir à un état plus parfait encore n’était possible qu’à la condition de faire cesser cet état d’oraison muette et discursive que les premiers préceptes avaient déjà nettement défini ; il était donc naturel que l’extase fut mieux décrite par les mystiques chrétiens qu’elle ne l’avait été par les néoplatoniciens, et, par contraste, la parole intérieure devait facilement apparaître comme l’état ordinaire de l’âme humaine. […] Mais dans la pure contemplation, on en vient tellement à parler à Dieu qu’on n’aplus un autre langage que celui que lui seul entend… ; on ne lui dit qu’on l’aime qu’en aimant… Si l’on vient et jusqu’où l’on vient à la perfection d’un tel acte pendant cette vie, et si l’on en peut venir jusqu’au point de faire entièrement cesser au dedans de soi toute image et toute parole, je le laisse à décider aux parfaits spirituels. Ici…, je me contente de dire… qu’on entrevoit du moins la parfaite pureté… : la pensée, épurée, autant qu’il se peut, de tout ce qui la grossit, des images, des expressions, du langage humain, … sans raisonnement, sans discours, puisqu’il s’agit seulement de recueillir le fruit et la conséquence de tous les discours précédents, goûte le plus pur de tous les êtres, qui est Dieu, … par le plus pur de tous ses actes, et s’unit intimement à la vérité, plus encore par la volonté que par l’intelligence22. » Si nous l’entendons bien, Bossuet accorde aux mystiques que, dans l’état le plus parfait possible en cette vie, la parole intérieure cesse d’être un discours suivi pour devenir une série d’interjections sans lien grammatical [ch. […] La passivité a des degrés, l’activité également ; en somme, les deux états se rejoignent par des intermédiaires ; entre le maximum d’activité et l’extrême passivité, il existe une continuité parfaite. […] Instr., VII, 10, 15, 21 ; VIII, 29, 31. — Cf. l’ouvrage latin, Mystici in tuto, 12, où Bossuet cite un religieux qui déclare n’être parvenu à l’oraison parfaite qu’après seize années d’oratio vulgaris ; Bossuet pensait sans doute à ce P.
Oui, votre vers est net, harmonieux, sonore, flexible ; oui, vous savez en guirlandes parfaites entrelacer les mots, et cela, je l’admire, puisque vous n’avez pas vingt ans, mais avant tout j’aime votre âme si tendre, si délicate, pareille à Une maison blanche où sèche du tilleul.
Je n’oserai répondre de l’exacte théologie et de la parfaite orthodoxie de cette prière ; on a le Pater de M. […] Des deux filles qu’elle perdit, l’une, l’aînée, personne d’un rare mérite, d’une sensibilité exquise jointe à une raison parfaite, était poète aussi ; dans des vers d’elle sur le jour des morts, je me souviens de celui-ci qui s’adressait aux êtres chers qui nous ont été ravis : Vous qui ne pleurez plus, vous souvient-il de nous ?
Et pareillement, c’est raison qu’on élimine de sa parole tout ce qui nuit ou ne sert pas à l’intelligence des choses ; l’expression parfaite est celle qui met la pensée en pleine lumière. […] Il voulait un rythme impeccable, une forme pleine et parfaite, et qu’on ne plaignît pas sa peine.
Van Dyck et Blauwaert, Mme Boidin-Puisais doivent à ce maître leur intelligence de l’œuvre, la belle netteté, si peu commune, de leur diction : mais le drame wagnérien n’est point appris facilement ; ces artistes avaient trop de choses à oublier encore pour s’y rendre parfaits. L’orchestre, est, lui, parfait ; M. […] Les gens épris du théâtre et de la musique connaîtront alors la puissance de son génie ; ils verront que l’œuvre wagnérienne est exclusivement une analyse psychique exprimée par des procédés nouveaux, parfaits ; et la différence alors sera manifeste à tous, entre ce drame profond, logique, vivant, et les vides sonorités conservatoriennes des compositeurs qui injurient Wagner, et profitent du wagnérisme qu’on suppose à leurs œuvres. […] Boileau parlant à Racine. « On voit bien que l’Opéra est l’ébauche d’un grand spectacle ; il en donne l’idée ; mais je ne sais pas comment l’Opéra, avec une musique si parfaite et une dépense toute royale, a pu réussir à m’ennuyer. » Qui s’exprime ainsi ? […] On a dit aussi, — non sans justesse, — que Walter, trait d’union de la poésie noble et de l’invention populaire, offre un parfait symbole de l’idéal wagnérien.