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917. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Cros, Charles (1842-1888) »

Car Charles Cros, il ne faut jamais l’oublier, demeure poète, et poète très idéaliste, très chaste, très naïf, même dans ses fantaisies les plus apparemment terre-à-terre ; cela, d’ailleurs, saute aux yeux dès les premières lignes de n’importe quoi de lui.

918. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Tailhade, Laurent (1854-1919) »

Des mysticités douteuses et trop parées, une madone telle que l’eût priée Baudelaire, mais combien plus sombre d’avoir oublié de l’être, combien plus triste de sourire ainsi… C’est surtout par les couleurs de son inspiration, par ce lyrisme mystique et sensuel qui, à ce degré, n’est que de ce siècle, que Laurent Tailhade nous appartient.

919. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 100-104

Piqué du jugement que nous avons porté de ses Productions, & irrité de ce que nous n'avons pas craint de nous élever contre l'abus déplorable qu'il a fait de ses talens, ce Poëte ne nous a point oubliés dans cette Satire ; mais ce qu'il dit de nous, annonce moins de talent que de haine & de fureur : aussi croyons-nous ne pouvoir mieux nous venger des sarcasmes qu'il nous prodigue, qu'en les mettant sous les yeux de nos Lecteurs.

920. (1902) Le critique mort jeune

Que d’oubliés gisent là côte à côte qui ont rêvé de vivre dans l’estime et la mémoire des hommes ! […] Rapprochez-le de ce mot, qui veut ne pas être oublié, sur les montagnes de Tolède « contractées de passion ». […] N’oubliez pas que M.  […] Bourget s’égaie austèrement : il n’oublie pas un instant que la naïveté de son personnage indique la gravité de son mal. […] Il emploie tout son talent à la rappeler à nos contemporains qui l’oublient volontiers.

921. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Il vit tout en un clin d’œil, mais au moment de remonter au ciel, il s’avisa d’avoir oublié de jeter un regard sur les lieux où se rend la justice. […] Et le roi et le prince, pas pris, de se mêler aux groupes de rhumatisants, d’ataxiques, de bacillaires, de grands et petits hystériques, de cardiaques, d’épileptiques, sans oublier les vénériens : blennorhagiques et autres blessés de l’amour (la cour est pleine !) […] Mais je dois d’abord oublier, avant de rire, que j’ai entendu Yvette. […] Pour plaire au propriétaire et aussi pour me divertir, nous visitâmes chaque lieu et chaque chose minutieusement : la cuisine, le parloir (lui servait aussi de salle à manger, etc., sans oublier l’écurie de Taffy (voilà ! […] Phèdre et Bérénice, voilà l’amour en ses deux extrêmes ; Monime est une héroïne calme, Athalie, une reine, belle naguère et qui ne l’oublie pas ; Esther, une femme belle encore et consciente de sa beauté.

922. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

Parfois, il est vrai, nous nous oublions dans notre rêverie ; en se prolongeant, elle prend peu à peu les caractères du véritable rêve. […] Est-il certain qu’ils ne subsistent pas, invisibles mais réels encore, comme la veilleuse que l’on a oublié d’éteindre à l’aube garde son invisible clarté dans la lumière du grand jour ? […] Le tableau est oublié. […] Le poète pourra même sans inconvénient dépasser un peu la mesure, aller au-delà de la poésie, oublier qu’il fait œuvre d’art, et mettre tout son cœur dans ses vers. […] Mais pas un instant on ne nous la fera oublier.

923. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Voici, d’autre part, la vie grouillante et bigarrée d’Amsterdam, dans les bas-fonds de laquelle le malheureux Kobus, ensorcelé par Siska, se dégrade et oublie son art. […] Aussitôt nous devenons amis avec eux ; même nous oublions un peu que nous lisons un livre à la disposition de tout le monde. […] N’oublions point enfin les notes variées et intelligentes de Dumont-Wilden. […] On n’oublie ni Le Coq rouge, ni Le Magasin littéraire. […] N’oublions pas en effet que Théophile Gautier débuta dans l’atelier de Rioult et qu’il demeura toute sa vie un peintre.

924. (1887) George Sand

À côté de ces grands romans il ne faut pas oublier des œuvres moindres, non par le talent, mais par l’étendue. […] Et Lavinia, qui pourrait l’oublier ? […] On n’oublie plus ces paysages. […] De là est sortie cette analyse de passion qu’on n’oublie plus et qui fait de chaque lecteur un complice de Bénédict. […] » s’écrie-t-elle sans cesse, et elle ajoute : « Je parle comme si je devais vivre longtemps, et j’oublie que je suis très vieille.

925. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Mais l’oiseau lui dit : « Tu as vite oublié les avis que je t’ai donnés. […] Tu l’oubliais déjà, sans songer d’ailleurs que je ne puis avoir le rubis dont je parle169. […] » répondit l’oiseau : « Tu viens en ce moment d’oublier les deux premières. […] (v. 301 à 305) « Veux-tu que je te les redise en sorte que tu ne les oublies pas ? Vous vous occupez tant de parler que j’ai peur que vous ne les oubliiez.

926. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

La Compagnie a voulu les oublier. […] Mais à quoi bon oublier le bien qu’on a pour celui qu’on n’a pas ? […] Dites-moi seulement que vous ne m’oubliez pas. […] c’est là une chose trop rare pour que je l’aie pu oublier. […] Tout en parlant de cet oublié, M. 

927. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

Le seul culte à rendre à Dieu — c’est-à-dire, ne l’oublions pas, à l’idée de la perfection qu’on porte en soi — ce sera la recherche de la vérité et la pratique du bien. […] Il oublie, dirait-on, que ce n’est pas leur faute, il leur est reconnaissant de leur vertu comme d’un acte méritoire. […] Correct même quand il est malveillant, il s’oublie, il recourt presque aux gros mots : « Le terrible est-il épuisé, on arrive au dégoûtant. […] Il a frissonné de pitié en se disant que ce voyageur oubliait son péril pour lécher le miel, et il a voulu l’avertir. […] Des consciences assoupies se réveillent ; on se passionne pour les graves problèmes qu’on avait oubliés, on les discute, on retrouve la notion égarée du Bien et du Mal.

928. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Il l’oublie, se marie, fait un beau et rapide chemin dans la magistrature et devient veuf. […] Nature au front serein comme vous oubliez ! […] Le résultat de son séjour chez eux est son mariage avec une jeune fille russe, charmante figure qui vient faire oublier les scènes d’horreur de la première partie du livre. […] Quand ils l’auront trouvé, il leur sera loisible d’oublier leurs majestés et de faire convenablement la fête. […] C’est l’aventure d’un académicien, jeune encore, assez pour n’avoir pas oublié ce qu’est l’amour.

929. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

Mais la vraie question, la seule, est de savoir quelles ont été les conséquences de la transformation ; — et c’est en général ce que l’on omet ou ce que l’on oublie de considérer. […] On ne doit pas l’oublier, si l’on veut bien entendre l’économie de son Discours. […] Oublier Bayle, ou le supprimer, c’est donc mutiler, c’est fausser toute l’histoire des idées au xviiie  siècle. […] Il a « essuyé les plâtres » pour ses successeurs ; et dans la maison qu’il avait habité le premier, d’autres se sont installés comme chez eux, qui l’ont fait oublier. […] Tout le monde a lu ses Mémoires, et personne, je pense, ne les a oubliés.

930. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

(Je n’oublie pas d’ailleurs qu’à cette timidité nous devons la grâce de son idylle chez madame Basile, la petite marchande italienne.) […] Il est vrai que les plus pieuses institutions peuvent devenir purement mécaniques et dégénérer jusqu’à oublier leur objet. […] et Thérèse aussi l’a-t-elle oubliée ? […] (Il oublie carrément madame de Warens.) […] — Il oublie que ni lui ni Anet n’était le mari de la dame des Charmettes.

931. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 218-221

Depuis Voltaire, on a trop oublié l’esprit, en poésie ; M. de Musset lui refit une large part ; avec cela, il eut encore ce qu’ont si peu nos poëtes modernes, la passion.

932. (1874) Premiers lundis. Tome II « L. Aimé Martin. De l’éducation des mères de famille, ou de la civilisation du genre humain par les femmes. »

Le saint- simonisme, sous ce rapport, a eu l’immense mérite de soulever et de poser avec audace les vraies questions, celles qui ressortent de l’examen réel de la société d’à présent, et bien que ses solutions aient été hasardées et mystiques parfois jusqu’à la folie, il a déchiré le voile d’une fausse pudeur et a montré au christianisme attiédi ce qu’on oubliait trop et ce qu’il fallait guérir. — M. 

933. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gregh, Fernand (1873-1960) »

Mais lisez Rêve, lisez Voyages, lisez tant d’autres pièces, sans oublier ce Menuet, déjà célèbre, et vous direz avec moi : « Voilà un vrai poète !

934. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 260-264

Bourdaloue est toujours égal à son sujet & à lui-même : Corneille oublie souvent le sien, & l’abaisse par des négligences.

935. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Charles Nisard »

Ce qu’on ne savait pas, c’était l’importance que trois pédants colossaux devaient retrouver, dans ce temps, aux yeux du moins de l’écrivain qui se dévouait à écrire leur vie oubliée.

936. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « César Cantu »

Or, Renée, le continuateur de Sismondi et qui nous a donné cette solide et brillante Histoire de Louis XVI qu’aucun de ceux qui aiment l’Histoire n’a oubliée, Renée était d’une raison trop haute et trop sobre, il était d’une conscience historique trop pure, pour laisser passer sous sa plume le courant de faits sans critique et sans choix qui viennent s’entasser et se cahoter dans le récit diffus de Cantu.

937. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Préface »

Elle a dernièrement reproché à l’auteur des Œuvres et des Hommes d’avoir oublié, dans ses volumes précédents, des personnalités très considérables.

938. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

N’oublions pas cependant que sur un point si délicat des opinions bien diverses se sont produites, et peut-être suffira-t-il de mettre ces opinions en présence pour concilier les devoirs de l’historien avec les justes égards dus à une femme célèbre, dont les dernières années ont laissé un souvenir honorable. […] Il est vrai qu’il ajoute ce correctif précieux, oublié ou dédaigné par Chateaubriand : “Mais ses yeux avaient une lumière, ses cheveux cendrés une teinte, sa bouche un accueil, toute sa physionomie une intelligence et une grâce d’expression qui faisaient souvenir, si elles ne faisaient plus admirer. […] Imaginez-vous que depuis dix ans je ne l’avais plus quitté, que nous passions nos journées ensemble ; j’étais à côté de lui quand il travaillait, je l’exhortais à ne pas tant se fatiguer, mais c’était en vain : son ardeur pour l’étude et le travail augmentait tous les jours, et il cherchait à oublier les circonstances des temps en s’occupant continuellement. […] “Je t’aimerai toujours, s’écrie l’ardent poète, s’appropriant les vers de l’Anthologie grecque, — je t’aimerai toujours ; mais toi, chez les morts, ne bois pas, je t’en prie, à cette coupe qui te ferait oublier tes anciens amis.” »

939. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIe Entretien. Marie Stuart, (Reine d’Écosse). (Suite et fin.) »

Elle oublia sa sourde haine contre Catherine de Médicis et lui écrivit ; elle écrivit au roi Charles IX et au duc d’Anjou pour leur demander de la secourir. […] XXXI Cependant l’Europe sur laquelle Marie Stuart avait compté, l’oubliait ; mais elle n’oubliait pas l’Europe. […] Marie l’ayant relevé, lui prit la main et se penchant vers lui, elle l’embrassa. « Adieu, ajouta-t-elle, adieu, mon cher Melvil ; ne m’oublie jamais ni dans ton cœur ni dans tes prières. » « S’adressant ensuite aux comtes de Shrewsbury et de Kent, elle leur demanda qu’il fût fait grâce à son secrétaire Curle : Nau fut omis.

940. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre premier »

Je voudrais le dire sans me jeter dans l’extrémité opposée, et sans affecter contre des hommes et des livres oubliés une sévérité qui ressemblerait à de la colère contre des morts. […] Ses poésies, comme ses doctrines, ne sont que des apparences ; et son nom, entre ceux que le genre humain répète et ceux qu’il oublie, suspendu et comme réservé pour un jugement qui ne sera jamais rendu, son nom n’est ni glorieux ni inconnu : il est spécieux. […] Je sais bien que cet art d’accommoder les vérités scientifiques à notre ignorance toujours prévenue, n’est pas pur de toute fausse grâce, et qu’en faisant les honneurs de la science, Fontenelle ne s’est pas oublié. […] Il aime les morts comme nous aimons les absents, dont les défauts s’oublient, et dont les qualités nous deviennent plus chères par l’illusion de l’éloignement.

941. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

La partie théologique de l’ouvrage, entachée d’hérésie, est maintenant oubliée ; mais la partie philosophique, empreinte d’un rationalisme fort respectable, était encore vers 1840 la base de l’enseignement dans les séminaires, au grand scandale de l’école néo-catholique, qui trouvait le livre dangereux et inepte. […] Je lui lus de la sorte les longues histoires du père Maimbourg, écrivain maintenant oublié, mais qui fut en son temps estimé de Voltaire ; diverses publications de M.  […] J’oubliai qu’il existait une littérature moderne. […] J’allais oublier un autre livre qui, avec le Télémaque, constitua longtemps pour moi le dernier mot de la littérature.

942. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Il s’effondra vite, parce qu’il eut le tort de borner toute son esthétique à la description exacte et méticuleuse des milieux et des mœurs, et parce que, comme on l’a dit, « à force de ne voir partout que des faits, on avait oublié les idées ». […] Sans nous occuper même des ignominies fabriquées en terre batave et mises au compte de la France, il ne faut pas oublier que les livres français les plus audacieux et les romans les plus cyniques restent plutôt des articles d’exportation. […] — des scènes tragiques, où aucun détail d’observation n’est oublié. […] Mais je ne puis oublier que je songeais à parler de féminisme littéraire.

943. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — II. (Fin.) » pp. 98-121

Vous ne me verrez jamais aujourd’hui retourner, mais toujours chevaucher avant. » En reproduisant ces paroles après cinq siècles, je n’oublie point pourtant que ce sont des paroles d’adversaire dans une journée qui fut de grand deuil pour la France d’alors ; mais la France est en fonds de gloire, et elle peut honorer un victorieux si doué de générosité, comme lui-même il honora un vaincu si plein de vaillance. […] Froissart, dans sa netteté de récit, n’oublie rien. […] À ce moment Froissart semble se ralentir et s’oublier un peu : il tient à ne rien omettre, et c’est difficile.

944. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « De la tradition en littérature et dans quel sens il la faut entendre. Leçon d’ouverture à l’École normale » pp. 356-382

N’oublions jamais que Rome était déjà arrivée, par son énergie et son habileté, au pouvoir politique le plus étendu et à la maturité d’un grand État, après la seconde guerre punique, sans posséder encore rien qui ressemblât à une littérature proprement dite digne de ce nom ; il lui fallut conquérir la Grèce pour être prise, en la personne de ses généraux et de ses chefs illustres, pour être touchée de ce beau feu qui devait doubler et perpétuer sa gloire. […] La meilleure manière, non seulement de sentir, mais de faire valoir les belles œuvres, c’est de ne point avoir de parti pris, de se laisser faire chaque fois en les lisant, en en parlant ; d’oublier s’il se peut, qu’on les possède de longue main, et de recommencer avec elles comme si on ne les connaissait que d’aujourd’hui. […] Je m’oublie, messieurs ; nous aurons assez d’occasions d’appliquer ensemble et de vérifier dans une pratique assidue ces diverses observations que je vous présente ici sans trop d’ordre et de méthode, l’Art poétique de notre maître Horace nous ayant dès longtemps autorisés à cette manière de discourir librement des choses du goût.

945. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure  »

Quoi qu’il en soit de sa théorie, la curiosité de M. de Lescure a voulu suppléer spirituellement au silence d’un grave historien moderne, qui n’avait rien oublié, dans le tableau du règne de Henri IV, que de parler de la belle Gabrielle ; l’omission était piquante2. […] Je lui avais bien dit que, pour vérifier sa critique, on irait à Bayle et qu’on resterait sur Bayle sans retourner à sa critique : c’est ce qui m’est arrivé, car l’article censuré m’amuse, puis me mène au suivant, et j’oublie M. l’abbé… » Marais n’est pas précisément un esprit fort ; il a des principes de religion ; ce n’est pas un pyrrhonien pur : il trouve précisément dans Bayle comme un moyen terme à son usage. […] Dans le passage cité de Phèdre et que Bayle applique à Boileau, il y a : Naris emunctæ senex, Ésope, ce vieillard au nez fin ; Bayle, en citant, a eu le soin d’oublier ce vieillard ; personne, en effet, n’est charmé de s’entendre appeler vieillard, même en latin, et même dans un compliment.

946. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure »

Il ne trouve dans tout cela que matière à plaisanterie, et il y revient à tout propos avec un malin plaisir : « J’ai su (septembre 1722) que le poète Arouet prenant congé du cardinal Dubois pour aller à Bruxelles, où il est allé voir Rousseau et tenir avec lui une conférence pacifique sur les coups de bâton des poètes, il dit au ministre : « Je vous prie, Monseigneur, de ne pas oublier que les Toiture étaient autrefois protégés par les Richelieu », se mettant ainsi hardiment au niveau de Voiture, dont il est bien loin. […] Mais de quoi s’avise-t-on de les donner au public, et pourquoi M. l’éditeur va-t-il chercher un Eunuque oublié, où il n’y a ni rime ni raison, ni sens ? […] Certes, instruit comme il l’était, possédant ses auteurs anciens et son siècle de Louis XIV, fidèle au goût sain, Marais eût été un membre de l’Académie française qui en eût valu bien d’autres ; mais il oublia trop, en couvant ce désir, qu’il vivait dans un cercle qui n’était pas celui du monde littéraire ; il avait en haine le salon de Mme de Lambert où se décidaient la plupart des choix académiques ; il n’était, lui, d’aucun salon.

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