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332. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 92-93

Tantôt gaie, tantôt sensible, elle a célébre successivement la joie & les langueurs.

333. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Ils n’ont pour fortune et pour joie Que les refrains de leurs couplets, L’ombre que la voile déploie, La brise que Dieu leur envoie, Et ce qui tombe des filets ! […] … Cette idée m’a remplie de joie… « J’ai une prière à vous faire, et vous me l’accorderez au nom de votre tendre et candide fille : ne me donnez jamais celui de muse.

334. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Préface »

Descartes serait transporté de joie s’il pouvait lire quelque chétif traité de physique et de cosmographie écrit de nos jours. […] Il ne se plaignit jamais de la vie, quoique la vie n’ait guère eu pour lui que les récompenses qu’on se donne par les joies de l’intérieur.

335. (1889) La critique scientifique. Revue philosophique pp. 83-89

Lui pourtant, qui accepte avec Spencer, contre Guyau, la théorie de l’art fin en soi, désintéressé, il sent bien que l’art doit avoir sa marque propre, que l’émotion esthétique se distingue en quelque chose des émotions ordinaires, et il recourt, pour se tirer d’embarras, à une hypothèse ingénieuse : « Nous croyons, écrit-il (p. 36), qu’il faudra à l’avenir distinguer dans l’émotion ordinaire (non plus esthétique) : d’une part, l’excitation, l’exaltation neutre qui la constitue, qui est son caractère propre et constant ; de l’autre, un phénomène cérébral additionnel, qui est l’éveil d’un certain nombre d’images de plaisir ou de douleur, venant s’associer au fond originel, le colorer ou le timbrer, pour ainsi dire, et produire la peine ou la joie proprement dites, quand elles comprennent le moi comme sujet souffrant et joyeux. » L’émotion esthétique aurait alors ceci de particulier, que, « tout en conservant intact l’élément excitation », elle « laisse à son minimum d’intensité l’élément éveil des images, etc. ». […] H., qu’un « faible indice de joie ou de douleur ».

336. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Jules de Gères »

Ils étaient à l’affût pour observer, — l’un, de son étude d’avoué où il apprit à nous faire des chefs-d’œuvre comme L’Interdiction et Le Contrat de mariage, l’autre, de la taverne dans laquelle il jugeait, à cœur de journée, ses voleurs, ses vagabonds et ses filles de joie. […] … De Gères, dans L’Arbre devenu vieux, n’a pas l’étrange originalité de Guérin, qui nous donne les joies et les tristesses du Centaure, mais il en a la mélancolie.

337. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iv »

Vous ne porterez pas notre deuil, car nous serons morts le sourire aux lèvres et une joie surhumaine au cœur. […] J’estime que j’ai eu toutes les joies de la terre, tout le bonheur humain, et que je puis m’en aller paisible.

338. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

c’est l’intrépide Vasou lui-même, s’écrient-elles transportées de joie. […] » Rassurée par ce pardon et par cette promesse, Sacountala débarrasse avec joie le saint prophète de la corbeille lourde de fruits qu’il vient de cueillir ; elle verse sur ses pieds fatigués une eau rafraîchissante, et, d’une voix caressante, elle le supplie de protéger son époux et elle dans ses prières, et de demander au ciel la gloire à leurs descendants. […] L’Ermite , avec joie. […] Sacountala , s’approchant et regardant avec joie. […] (Elle s’approche de l’arbuste, le regarde, puis s’écrie, transportée de joie :) Miracle !

339. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

J’ai cherché volontiers ma joie et mon idéal dans les allées désertes. […] « Quelle joie ! […] Ce qui manquait à Lamennais, c’était la joie. La vocation du prêtre est faite autant de joie que de foi. […] Il n’y a pas d’autre devoir et il n’y a pas non plus d’autre joie.

340. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Boyer, Philoxène (1827-1867) »

Théophile Gautier Les Deux Saisons de Philoxène Boyer, où l’éloquent orateur du quai Malaquais, qui est aussi un vrai poète, résume ses joies, hélas !

341. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Le Braz, Anatole (1859-1926) »

voici des vers qui sont d’un poète, d’un poète authentique, de quelqu’un dont l’âme est pieuse, douce, émue, voltigeante et chantante, prompte à la joie et prompte aux larmes, de quelqu’un qui ne ressemble pas aux autres hommes, qui n’est pas raisonnable, pratique, morose, ambitieux, qui va son chemin, loin des sentiers battus, vers des sommets bleus, aperçus en rêve dans une auréole de brumes dorées.

342. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Raymond, Louis (1869-1928) »

Elle se promène en des paysages d’automne et d’hiver, des paysages attendris où nulle joie trop vive n’éclate, où seul le souvenir des tristesses passées éveille quelque souffrance douce.

343. (1894) Propos de littérature « Bibliographie » pp. 144-146

Joies, poèmes, (1888-1889), chez Tresse et Stock.

344. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre V. Sculpture. »

Qu’on place donc au monument d’un chrétien, d’un côté, les pleurs de la famille et les regrets des hommes ; de l’autre, le sourire de l’espérance et les joies célestes : un tel sépulcre, des deux bords duquel on verrait ainsi les scènes du temps et de l’éternité, serait admirable.

345. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rivoire, André (1872-1930) »

Pierre Quillard Le Songe de l’Amour : Ce sont ici des vers de l’amour, de plusieurs amours qui n’en sont qu’un, à cause du poète qui en ressentit la joie inquiète, réticente et farouche, se donnant et se reprenant avec une égale bonne foi et une égale fierté d’indépendance ; s’il a souffert, il n’a pas fait souffrir ; et, sans être dupe outre mesure du songe qu’il s’était créé, il a voulu en perpétuer l’illusion, parce qu’elle était noble, cruelle et douce.

346. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Valéry, Paul (1871-1945) »

La poésie doit nous exprimer tout entiers : passions, douleurs et joies mêlées, aspirations, désirs, actions, confondus, dans les limites que lui marque le goût, faculté qui préside au choix, l’acte esthétique par excellence… M. 

347. (1900) La vie et les livres. Cinquième série pp. 1-352

C’était pour lui une vive joie que de rencontrer un maire lettré ou un curé intelligent. […] Beaucoup d’entre nous demandent à la littérature tout autre chose que des joies littéraires. […] Une joie imprévue l’y attendait. […] Il en a vu les longs labeurs et les joies brèves. […] Quelle joie, lorsqu’on peut arriver, avec la cargaison, à la petite auberge de Zitzarry.

348. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXXXIXe entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

Le Roi, également instruit de leur venue, en souriait de joie. […] « Quoi qu’il en puisse arriver après, je ferai en sorte que ma vengeance frappe en cette fête l’homme cruel qui m’a enlevé mes joies. […] Bientôt cette hospitalité et cette joie furent remplacées par des gémissements. […] Depuis lors le roi Etzel ne connut plus la joie. […] Après de si amères souffrances la joie de la Reine fut vive.

349. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

Le chant du pâtre, les voix de la famille assise un moment dans le sillon, tout ce qui a le son de la vie, répond en lui à des places secrètes, et le provoque à dire les joies ou les douleurs des mortels. […] Quant au vicaire (curate), il est admirable et touchant de vérité naïve : sa science dans les classiques grecs ; sa pauvreté, la maladie de sa femme ; ses quatre filles si belles et si pieuses, ses cinq fils qui s’affligent avec lui ; ce mémoire de marchand, entre deux feuillets, qui le vient troubler au milieu du livre grec qu’il commentait dans l’oubli de ses maux ; sa joie simple, triomphante, un matin qu’il a lu au réveil et qu’il annonce à sa famille qu’une société littéraire (il le tient de bonne source) se fonde enfin, pour publier les livres des auteurs pauvres ; toutes ces petites scènes successives composent un ensemble fini qui ne peut être que de Wilkie ou de Crabbe. […] comme il l’habituera à associer l’idée de joie à l’image de la nuit, comme il veut lui donner en toutes choses, pour compagne de jeux, la nature ! […] …  Mieux vaut remercier une ancienne journée  Pour la joie au soleil librement couronnée, Que d’aigrir son désir contre un présent jaloux.

350. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

Je trouve, dans des notes qu’il écrivait alors, l’expression exagérée, mais bien vive, du sentiment de fierté qui l’ulcérait : « Que me parlez-vous de joie ? […] J’aime mieux vivre avec dignité et tristesse que de trouver des joies factices dans l’esclavage et le mépris de moi-même. » Ce fut un an environ avant de quitter ses fonctions de précepteur (1825) qu’il publia une traduction du troisième volume des Éléments de la Philosophie de l’Esprit humain, par Dugald Stewart. […] Le cœur de Ghérard nageait dans la joie, et ses yeux rayonnants allaient chercher les yeux d’Hélène sous leurs paupières abaissées. « Oh ! […] Il s’est tourné vers Dieu d’où vient la paix et la joie.

351. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Il y vit aimé, indépendant, studieux, dans ce délicieux loisir des jeunes années, repos d’une union formée par le cœur, lune de miel prolongée de l’existence, où la destinée bien rare verse du jour sans ombre, des joies sans lie et des douceurs sans mélange d’amertume à ses favoris. […] dis-je à l’enfant tout en rompant le cachet et en déchirant l’enveloppe. — C’est que maman m’a dit que la lettre avait été apportée de grand matin par un chasseur tout galonné d’or, avec un beau plumet à son chapeau, et qu’il avait bien recommandé de vous remettre ce billet à votre réveil, parce que sa princesse lui avait dit : Allez vite, il ne faut pas retarder la joie et peut-être la fortune de ce jeune homme. » Et deux billets séparés, et d’écritures diverses, tombèrent de l’enveloppe sur mon lit. […] Communiquez le billet du prince au jeune homme, et remerciez-moi du plaisir que je vous donne, car je sais que votre seule joie est dans la joie de ceux que vous aimez. » J’ouvris le second billet ; il était écrit d’une main évidemment précipitée et lasse d’insomnie, sur un chiffon de papier large comme cinq doigts et taché de gouttes d’encre.

352. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXIXe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (2e partie) » pp. 321-384

Faisons ma soupe de bonne grâce ; les saints souriaient à tout, et l’on dit que sainte Catherine de Sienne faisait avec grande joie la cuisine. » Le 11 avril. […] Je les entends rire et toujours rire ; cet âge est une joie permanente. […] Description de journées de joie et d’ennui dans son vieux château du Berry et de quelques courses jusqu’aux neiges de l’Auvergne. […] « Si jamais tu lis ceci, mon ami, tu auras l’idée d’une affection permanente, ce quelque chose pour quelqu’un qui vous occupe au coucher, au lever, dans le jour et toujours, qui fait tristesse ou joie, mobile et centre de l’âme. — En lisant un livre de géologie, j’ai rencontré un éléphant fossile découvert dans la Laponie, et une pirogue déterrée dans l’île des Cygnes, en creusant les fondations du pont des Invalides.

353. (1863) Cours familier de littérature. XV « XCe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (3e partie) » pp. 385-448

Je lui mis sa robe et le menai par la main le long de la garenne du nord, où il fit quelques pas tout seul, les premiers, ce que j’allai annoncer en grande joie à ma mère : “Maurice, Maurice a marché seul ! […] Là je m’arrête ; à cette pensée s’attache un million de pensées mortes et vives, mais surtout mortes ; mon mémorandum, commencé pour lui, continué pour vous au même jour, daté de quelque joie l’an dernier et maintenant tout de larmes. […] Le plaisir de lui voir l’air content, d’être à sa fête, et au fond de cette joie des serrements de cœur, et cette horrible vision des cercueils autour du salon, — posés sur ces tabourets longs et drapés à franges d’argent. […] J’ai l’intérêt de la vie future de ceux que j’aime, et qui n’y croient pas, tant en croyance et tant à cœur, que, pour le leur procurer, je souffrirais avec joie le martyre.

354. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 5-64

Que leur aurait fait mon chagrin jeté tout au travers de leur joie, comme une ortie dans une guirlande de roses ? […] — Monte, mon enfant, dit la fiancée, c’est une bénédiction du bon Dieu que de trouver une occasion de charité à la porte de la ville, un jour de noce et de joie, comme est ce beau jour pour nous. […] Je cherchai à me souvenir juste de l’air qu’Hyeronimo et moi nous avions composé ensemble, et petit à petit, note après note, dans nos soirées d’été du dimanche sous la grotte, et qui imitait tantôt le roucoulement des ramiers au printemps sur les branches, tantôt les gazouillements argentins des gouttes d’eau tombant de la rigole dans le bassin du rocher, tantôt les fines haleines du vent de nuit qui se tamise, en se coupant sur les lames des joncs de la fontaine, aiguisées comme le tranchant de la faux de mon père ; tantôt le bruit des envolées subites des couples de merles bleus, quand ils se lèvent tout à coup du fourré, avec des cris vifs et précipités, moitié peur, moitié joie, pour aller s’abattre sur le nid où ils s’aiment et où ils se taisent pour qu’on ne puisse plus les découvrir sous la feuille. […] Le bargello regardait tantôt sa femme, d’un air de joie, tantôt moi d’un air de doute : — Ce visage-là ne fera pas bien peur à mes prisonniers, dit-il en souriant ; mais, après tout, nous sommes chargés de les garder et non de leur faire peur.

355. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Sophie Arnould, cette charmante femme, qui était la joie, l’esprit, la gaieté de son siècle, est devenue, en passant par le cabinet de travail de M. de Goncourt, plus agaçante qu’une religieuse janséniste. […] Ceux-là sont des écrivains nés ; ceux-là ont écrit parce que l’ivresse des choses qui était en eux les rendait généreux et avides de se prodiguer, parce qu’ils avaient à faire part à tous de leur joie. […] Je me souviens de la joie que j’éprouvai il y a une dizaine d’années en ouvrant mon premier livre de Nietzsche. […] Wagner le déchire à chaque instant par la force même de son génie ; c’est à peine si Parsifal, œuvre de vieillesse, est un chant de douleur, mais comme il y a plus de joie véritable dans l’œuvre de Wagner, dans les Maîtres Chanteurs, dans Siegfried, même dans Tristan et Tannhäuser, que dans les pages les plus riantes de Nietzsche !

356. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 avril 1886. »

… Certes, la joie serait grande si, tandis que la musique déroule les émotions d’où naissent les paroles, nous avions devant les yeux, en une correspondance parfaite, le tableau où les émotions, symbolisées dans une forme plastique, se renforceraient d’une vie nouvelle ;, la vie plastique. […]   L’œil ne pouvait l’endurer, mais l’oreille et le cœur, avec une extase de délices ténébreuses, Avec une terreur et un émerveillement dont les racines étaient la joie et la force de la pensée mise en liberté, Percevait le surgissement d’un arrêt divin, comme une aube ensoleillée surgissante aux regards,       Des profondeurs de la Mer. […] Et la joie que nous donne à tous Lohengrin, l’admiration que nous inspire Tristan, l’émotion que nous suggère Parsifal, tout cela est l’expression de la connaissance, enfin réveillée, de notre fraternité. […] Il faut donc à tout cela donner la plus grande attention ; il faut saluer avec joie et soutenir énergiquement tout ce qu’on fait à cet égard en France.

357. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Préface de la seconde édition »

Rien n’est survenu depuis qui fût de nature à l’ébranler, et j’y persévère, comme en ce qui fait à la fois la règle et la joie de mon esprit.

358. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — II. (Fin.) » pp. 513-532

Il est bientôt débarqué et amené par l’amiralag, qui le fait chevaucher à côté de lui, jusqu’au lieu où étaient saint Louis et les autres prisonniers ; c’était un grand pavillon où les barons étaient et plus de dix mille personnes avec eux : « Quand j’entrai dedans, nous dit-il, les barons firent tous si grande joie, qu’on ne pouvait rien entendre ; et ils en louaient Notre-Seigneur, disant qu’ils croyaient m’avoir perdu. » — On trouvera peut-être que c’est là une joie bien prompte et bien vive après les pleurs et au milieu encore des plus grandes angoisses. […] Les hommes trop raffinés ou soi-disant philosophes n’ont plus de ces joies ni de ces douleurs ; mais replongez-les dans les épreuves naturelles, ils les retrouveront.

359. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — III » pp. 178-197

Il y a un malheur public dans votre joie ; elle est un fléau pour votre pays ; une folie telle que la vôtre, parée d’une épée quand elle mériterait mieux un éventail, a fait, ce que jamais les ennemis n’eussent pu faire, que cette voûte de notre empire, inébranlée jusqu’à vous, n’est plus qu’un édifice mutilé qui menace ruine. […] Tu n’es point connue là où le Plaisir est adoré, cette chancelante déesse à la ceinture dénouée et aux yeux errants, toujours appuyée sur le bras de la Nouveauté, son volage et fragile soutien ; car tu es tendrement patiente (meek) et constante, haïssant le changement, et trouvant dans le calme d’un amour éprouvé des joies que les orageux transports ne donnent jamais. […] c’est le son du cor là-bas sur le pont… » Cet insouciant messager apporte dans son sac, qu’il jette négligemment, la joie ou la douleur, la mort ou la naissance, la fortune ou la ruine…, et il repart en sifflant.

360. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Elle parle volontiers, elle rit aisément, elle se fait un grand plaisir d’une bagatelle, elle aime à faire une innocente guerre à ses amis… Mais, parmi toute cette disposition qu’elle a pour la joie, on peut dire que cette aimable enjouée a toutes les bonnes qualités des mélancoliques qui ont l’esprit bien fait, car elle a le cœur tendre et sensible, elle sait pleurer avec ses amies affligées ; elle sait rompre avec les plaisirs quand l’amitié le demande ; elle est fidèle à ses amis ; elle est capable de secret et de discrétion ; elle ne fait jamais de brouillerie à qui que ce soit ; elle est généreuse et constante dans ses sentiments, et elle est enfin si aimable qu’elle est aimée des plus honnêtes personnes de la Cour, de l’un et de l’autre sexe, mais de gens qui ne se ressemblent ni en condition, ni en humeur, ni en esprit, ni en intérêts, et qui conviennent pourtant tous que Clarice est très charmante, qu’elle a de l’esprit, de la véritable bonté et mille qualités dignes d’être infiniment estimées. […] La joie était le fond de son âme et comme l’expression de la santé de son esprit ; c’est elle qui a écrit à Saint-Évremond : « La joie de l’esprit en marque la force. » On a dit d’elle qu’à table, tant elle s’y montrait animée et enjouée, « elle était ivre dès la soupe » ; ivre de belle humeur et de saillies, car elle ne buvait que de l’eau, et les ivrognes, qu’on les appelât Chapelle ou Vendôme, furent toujours mal venus près d’elle.

361. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

C’est à partir de 1836 que son talent montra qu’il était capable de s’élever à des compositions pures, naturelles, touchantes, désintéressées : il publia le joli poème intitulé L’Aveugle de Castel-Cuillé, dans lequel il nous fait assister aux fêtes, aux joies du village, et à la douleur d’une jeune fille, d’une fiancée que la petite vérole vient de rendre aveugle et que son amoureux délaisse pour en épouser une autre. […] Au milieu de la joie de tous et des chansons, une seule voix bien douce se plaint. […] Et en entendant ces vers si sentis, chacun donnait avec larmes, et le poète nageait dans la joie de son cœur de voir le chapeau du curé se remplir à la ronde.

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